Language of document : ECLI:EU:T:2024:361

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

5 juin 2024 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure de nullité – Marque de l’Union européenne verbale ACOMODEO – Marque nationale verbale antérieure ACOMODIS – Cause de nullité relative – Absence de risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), et article 53, paragraphe 1, sous a), du règlement (CE) no 207/2009 [devenus article 8, paragraphe 1, sous b), et article 60, paragraphe 1, sous a), du règlement (UE) 2017/1001] – Usage sérieux de la marque antérieure – Article 57, paragraphe 2, du règlement no 207/2009 (devenu article 64, paragraphe 2, du règlement 2017/1001) »

Dans l’affaire T‑365/23,

Habitat Barcelona Unión Constructora SL, établie à Barcelone (Espagne), représentée par Me R. Guerras Mazón, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. T. Frydendahl, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Acomodeo Marketplace GmbH, établie à Francfort-sur-le-Main (Allemagne), représentée par Me S. Fröhlich, avocat,

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de Mme M. J. Costeira, présidente, M. P. Zilgalvis (rapporteur) et Mme E. Tichy‑Fisslberger, juges,

greffier : M. V. Di Bucci,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Habitat Barcelona Unión Constructora SL, demande l’annulation de la décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 28 mars 2023 (affaire R 713/2022‑4) (ci-après la « décision attaquée »).

I.      Antécédents du litige

2        Le 24 juillet 2020, le prédécesseur en droit de la requérante, Holadays Barcelona SL, a présenté à l’EUIPO une demande en nullité de la marque de l’Union européenne verbale ACOMODEO, enregistrée le 16 mars 2020 sous le numéro 15 523 863 à la suite d’une demande déposée le 8 juin 2016, en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

3        Les services visés par la marque contestée relevaient notamment des classes 35, 38 et 42 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondaient, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        Classe 35 : « Courtage, pour le compte de tiers, de contrats de prestation de services, en particulier concernant l’hébergement [temporaire] d’hôtes ; recueil de données dans un fichier central ; recherches d’informations dans des fichiers informatiques pour des tiers ; gestion de fichiers informatisée ; notation en termes de comparaison de prix de logements ; services de publicité et de promotion, ainsi que de conseils s’y rapportant ; groupage de publicité spécifique aux clients ou non pour les entreprises en vue de leur diffusion sur l’Internet ; diffusion de publicité pour le compte de tiers via des réseaux de communications en ligne sur Internet ; compilation de messages publicitaires à utiliser en tant que pages Web sur Internet ; services de publicité en ligne pour le compte de tiers ; référencement de sites web à but commercial ou publicitaire ; consultation pour la direction des affaires ; services de consultation et de conseil relatifs aux affaires, gestion des affaires commerciales, gestion de fichiers informatisée » ;

–        Classe 38 : « Accès à du contenu, à des sites et à des portails Internet ; fourniture d’accès à des informations concernant les possibilités mondiales de logement, en particulier appartements, réservations par l’Internet ; fourniture d’accès à des banques de données de réservations de logements dans le monde entier sur des réseaux informatiques ; services de télécommunication fournis par le biais de portails et de plateformes Internet, en particulier pour la réservation des hébergements précités pour le compte de tiers » ;

–        Classe 42 : « Conception et développement d’ordinateurs et de logiciels ; prestation de services informatiques pour logiciels ; services informatiques d’analyse de données ; fourniture de moteurs de recherche sur Internet ; mise à disposition de moteurs de recherche permettant d’obtenir des données par le biais de réseaux de communication ; fourniture de moteurs de recherche de logements par l’Internet ».

4        La demande en nullité a été formée pour tous les services mentionnés au point 3 ci-dessus et était fondée notamment sur la marque espagnole verbale antérieure ACOMODIS, enregistrée le 6 septembre 2010 sous le numéro 2 926 070, désignant notamment les services relevant des classes 36 et 43 et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        Classe 36 : « Gérance d’immeubles d’habitation ; services d’agences de logement [appartements] ; agences immobilières ; location d’appartements ; location de biens immobiliers ; courtage ; estimations immobilières ; émission de chèques de voyage ; recouvrement de loyers ; services d’assurances » ;

–        Classe 43 : « Services hôteliers (hôtels, auberges, pensions et abris) ; location et réservation de logements temporaires ; location de tentes ; services de restaurants en libre-service ; bars et cafétérias ; services de camps de vacances [hébergement] ; services de camps de vacances (hébergement) ; mise à disposition de terrains de camping ; maisons de vacances ; appartements touristiques ou tout autre hébergement touristique ; location de constructions transportables ; services et réservation d’hôtels, de motels et de pensions ».

5        La cause invoquée à l’appui de la demande en nullité était celle visée à l’article 60, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001, lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 1, sous b), de ce règlement.

6        À la suite de la demande formulée par Acomodeo UG, titulaire de la marque contestée et prédécesseur en droit de l’intervenante, Acomodeo Marketplace GmbH, l’EUIPO a invité le prédécesseur en droit de la requérante à apporter la preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure.

7        Le 2 novembre 2020, à titre d’éléments de preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure, le prédécesseur en droit de la requérante a produit, devant la division d’annulation, les éléments suivants :

–        une série de factures émises par la requérante et envoyées à des clients au Benelux, en Danemark, en Suède, en Italie, en France, au Portugal et en Grèce. Ces documents étaient datés entre le 11 avril 2014  et le 6 mars 2020 ;

–        des extraits du site Internet « www.airbnb.es » montrant les services de la requérante ;

–        deux extraits non datés relatifs à des appartements équipés et des activités à Barcelone, portant le signe figuratif acomodis Barcelona all the way qui, d’après la requérante, proviendraient de son site Internet.

8        Le 25 mars 2021, le transfert de la marque contestée à l’intervenante a été enregistré.

9        Le 28 février 2022, la division d’annulation a rejeté la demande en nullité.

10      Le 28 avril 2022, le prédécesseur en droit de la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’annulation.

11      Le 30 mars 2023, le transfert de la marque antérieure à la requérante a été publié.

12      Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours, au motif, en substance, que, d’une part, les preuves produites par la requérante démontraient l’usage sérieux de la marque antérieure au sens de l’article 64, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 uniquement en ce qui concernait les « services de location et de réservation de logements temporaires ; maisons de vacances ; appartements touristiques » et, d’autre part, ces services étaient différents de ceux pour lesquels la marque contestée avait été enregistrée, de sorte qu’une des conditions nécessaires à l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 n’était pas remplie.

II.    Conclusions des parties

13      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        révoquer la décision attaquée et annuler l’enregistrement de la marque contestée pour les services relevant des classes 35, 38 et 42 ;

–        condamner l’EUIPO et l’intervenante aux dépens.

14      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens exposés en cas de tenue d’une audience.

15      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

III. En droit

A.      Sur l’interprétation du premier chef de conclusions de la requérante

16      Par son premier chef de conclusions, la requérante demande au Tribunal de révoquer la décision attaquée et d’annuler l’enregistrement de la marque contestée pour les services relevant des classes 35, 38 et 42.

17      L’EUIPO soutient que, pour autant que ce chef de conclusions devrait être compris comme une demande tendant à ce que le Tribunal ordonne à la chambre de recours de révoquer la décision attaquée, conformément à l’article 103 du règlement 2017/1001, il serait irrecevable. Toutefois, dans son mémoire en réponse, l’EUIPO interprète le premier chef de conclusions comme incluant, nécessairement et implicitement, une demande d’annulation de la décision attaquée.

18      À cet égard, il convient de relever que, conformément à l’article 72, paragraphe 3, du règlement 2017/1001, le Tribunal a seulement compétence pour annuler ou réformer les décisions des chambres de recours. La révocation d’une décision prise par l’EUIPO est, quant à elle, prévue par l’article 103 du même règlement, qui dispose que l’instance qui a adopté une décision peut la révoquer dans un délai d’un an à compter de son adoption en cas d’erreur de procédure manifeste [arrêts du 26 juin 2018, Jumbo Africa/EUIPO – ProSiebenSat.1 Licensing (JUMBO), T‑78/17, non publié, EU:T:2018:383, point 13, et du 14 juillet 2021, JT/EUIPO – Carrasco Pirard (QUILAPAYÚN), T‑197/20, non publié, EU:T:2021:429, point 22].

19      Or, bien que le premier chef de conclusions de la requérante soit expressément formulé comme tendant notamment à la révocation de la décision attaquée, il ressort clairement du corps de la requête que l’objet du recours est d’obtenir l’annulation de cette décision. En effet, la requérante s’appuie sur une prétendue violation des dispositions du règlement 2017/1001. Partant, il y a lieu de conclure que, par son premier chef de conclusions, la requérante vise notamment l’annulation de la décision attaquée.

B.      Sur la portée du recours

20      L’intervenante soutient que la référence faite par la requérante, au point 26 de la requête, à l’enregistrement international no 1 061 882 de la marque verbale ACOMODIS, sur lequel a été notamment fondée la demande en nullité, est dénuée de toute pertinence. Selon elle, cet enregistrement n’est pas concerné par le présent recours dans la mesure où la conclusion de la division d’annulation relative à l’usage sérieux de celui-ci n’a pas été contestée devant la chambre de recours et, de ce fait, est devenue définitive.

21      À cet égard, il doit être relevé que la chambre de recours, compte tenu du fait que la requérante n’a pas avancé d’arguments en ce qui concerne les conclusions de la division d’annulation relatives à l’absence de preuve de l’usage sérieux de l’enregistrement international antérieur, également invoqué à l’appui de la demande en nullité, a considéré que lesdites conclusions étaient devenues définitives et n’a pas procédé à l’appréciation de la preuve de l’usage sérieux en ce qui concerne ce droit antérieur.

22      Il ressort de la jurisprudence que la chambre de recours ne doit pas réexaminer d’office la question de l’usage sérieux de la marque antérieure à l’égard de produits non visés par les parties devant elle, dans le recours ou les observations en réponse [arrêt du 24 septembre 2015, Rintisch/OHMI – Compagnie laitière européenne (PROTICURD), T‑382/14, non publié, EU:T:2015:686, point 24]. Il en découle que la question de l’usage sérieux de l’enregistrement international antérieur n’était pas comprise dans l’objet du litige devant la chambre de recours. Or, en vertu de l’article 188 du règlement de procédure du Tribunal, les mémoires des parties ne peuvent pas modifier l’objet du litige devant la chambre de recours, de sorte que l’argumentation de la requérante concernant l’usage sérieux de l’enregistrement international antérieur doit être regardée comme étant irrecevable.

C.      Sur la recevabilité de certaines annexes de la requête et de certains arguments avancés par les parties

23      L’EUIPO et l’intervenante font valoir que les documents figurant en annexes A 10 à A 15 de la requête n’ont pas été déposés dans le cadre de la procédure administrative devant l’EUIPO et, de ce fait, sont irrecevables.

24      En outre, l’intervenante soutient que certains arguments, à savoir ceux relatifs à la signification en espagnol de l’expression « recouvrement de loyers », les définitions juridiques figurant à l’article 1543 du code civil espagnol, les exemples de loyers réglés par un paiement unique, sont également irrecevables dans la mesure où ils ont été présentés pour la première fois devant le Tribunal.

25      À cet égard, il doit être rappelé qu’un recours porté devant le Tribunal en vertu de l’article 72, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours. Dans le cadre dudit règlement, en application de son article 95, ce contrôle doit se faire au regard du cadre factuel et juridique du litige tel qu’il a été porté devant la chambre de recours [voir arrêt du 1er février 2005, SPAG/OHMI – Dann et Backer (HOOLIGAN), T‑57/03, EU:T:2005:29, point 17 et jurisprudence citée]. Il s’ensuit que le Tribunal ne saurait annuler ou réformer la décision objet du recours pour des motifs qui apparaîtraient postérieurement à son prononcé (arrêts du 11 mai 2006, Sunrider/OHMI, C‑416/04 P, EU:C:2006:310, point 55, et du 13 mars 2007, OHMI/Kaul, C‑29/05 P, EU:C:2007:162, point 53).

26      Dès lors, la fonction du Tribunal n’est pas de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des preuves présentées pour la première fois devant lui. En effet, l’admission de ces preuves est contraire à l’article 188 du règlement de procédure, selon lequel les mémoires des parties ne peuvent pas modifier l’objet du litige devant la chambre de recours. Partant, les preuves produites pour la première fois devant le Tribunal doivent être déclarées irrecevables, sans qu’il soit nécessaire de les examiner [voir arrêt du 14 mai 2009, Fiorucci/OHMI – Edwin (ELIO FIORUCCI), T‑165/06, EU:T:2009:157, point 22 et jurisprudence citée].

27      En ce qui concerne, premièrement, les annexes A 10 à A 14 de la requête, il s’agit des contrats conclus par la requérante avec les locataires et les propriétaires des biens immobiliers ainsi que des extraits du site Internet de l’intervenante et de son propre site Internet. Ces éléments ne faisaient pas partie du dossier administratif devant la chambre de recours, de sorte qu’ils sont irrecevables, conformément à la jurisprudence citée aux points 25 et 26 ci-dessus.

28      S’agissant, deuxièmement, de l’annexe A 15 de la requête, correspondant à l’extrait du site Internet de l’association des gestionnaires immobiliers de Barcelone et de Lérida, il convient de relever que la requérante l’invoque pour soutenir son argument selon lequel le service de courtage de contrats est complémentaire aux services couverts par la marque antérieure.

29      À cet égard, il ressort de la jurisprudence que, au titre de l’article 263 TFUE, lu à la lumière de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, une partie requérante doit pouvoir contester devant le juge de l’Union européenne chaque question de droit ou de fait sur laquelle un organe de l’Union fonde ses décisions (voir, en ce sens, arrêt du 18 juin 2020, Primart/EUIPO, C‑702/18 P, EU:C:2020:489, point 46).

30      Or, en l’espèce, l’argumentation de la requérante vise à contester la conclusion de la chambre de recours selon laquelle les services de courtage, pour le compte de tiers, de contrats de prestation de services et les services relevant de la classe 43, couverts par la marque antérieure, étaient assurés par des entreprises différentes et s’adressaient à un public différent. Cette conclusion fait partie du cadre factuel et juridique du litige devant la chambre de recours et, partant, l’élément de preuve produit en annexe A 15 de la requête est recevable.

31      Il en va de même des arguments avancés aux points 28, 29 et 33 de la requête, dont la recevabilité est contestée par l’intervenante, qui visent à contester les considérations de la chambre de recours selon lesquelles le loyer se référait à un paiement régulier.

32      Enfin, il doit être relevé que, au point 20 de son mémoire en réponse, l’intervenante conteste la conclusion de la chambre de recours selon laquelle l’usage sérieux de la marque antérieure a été démontré pour les services de location et de réservation de logements temporaires, de maisons de vacances et d’appartements de vacances. De même, aux points 31 à 34 de son mémoire en réponse, elle a, « à titre de précaution », réitéré son argument avancé devant la chambre de recours selon lequel l’usage sérieux de ladite marque n’a été prouvé pour aucun des services couverts par celle-ci.

33      Ces arguments, pour autant qu’ils doivent être compris comme constituant un moyen autonome fondé sur l’article 173, paragraphe 3, du règlement de procédure, sont incompatibles avec les conclusions de l’intervenante et doivent être rejetés dès lors que cette dernière n’a pas conclu à l’annulation ou à la réformation de la décision attaquée en vertu de ladite disposition [voir arrêt du 2 février 2022, Canisius/EUIPO – Beiersdorf (CCLABELLE VIENNA), T‑694/20, non publié, EU:T:2022:45, point 58 et jurisprudence citée].

D.      Sur la détermination du règlement applicable ratione temporis

34      Compte tenu de la date d’introduction de la demande d’enregistrement de la marque contestée, à savoir le 8 juin 2016, qui est déterminante aux fins de l’identification du droit matériel applicable, les faits de l’espèce sont régis par les dispositions matérielles du règlement no 207/2009 (voir, en ce sens, ordonnance du 5 octobre 2004, Alcon/OHMI, C‑192/03 P, EU:C:2004:587, points 39 et 40, et arrêt du 23 avril 2020, Gugler France/Gugler et EUIPO, C‑736/18 P, non publié, EU:C:2020:308, point 3 et jurisprudence citée).

35      Par suite, en l’espèce, en ce qui concerne les règles de fond, il convient d’entendre les références, faites par la chambre de recours dans la décision attaquée et par les parties dans leurs écritures, à l’article 8, paragraphe 1, sous b), à l’article 60, paragraphe 1, sous a), et à l’article 64, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, comme visant respectivement l’article 8, paragraphe 1, sous b), l’article 53, paragraphe 1, sous a) et l’article 57, paragraphe 2, du règlement no 207/2009. Par ailleurs, dans la mesure où, selon une jurisprudence constante, les règles de procédure sont généralement censées s’appliquer à la date à laquelle elles entrent en vigueur (voir arrêt du 11 décembre 2012, Commission/Espagne, C‑610/10, EU:C:2012:781, point 45 et jurisprudence citée), le litige est régi par les dispositions procédurales du règlement 2017/1001 et du règlement délégué (UE) 2018/625 de la Commission, du 5 mars 2018, complétant le règlement 2017/1001, et abrogeant le règlement délégué (UE) 2017/1430 (JO 2018, L 104, p. 1).

E.      Sur le fond

36      À l’appui du recours, la requérante invoque deux moyens, tirés, le premier, de la violation de l’article 57, paragraphe 2, du règlement no 207/2009 et, le second, de la violation de l’article 53, paragraphe 1, sous a), dudit règlement lu en combinaison avec l’article 8, paragraphe 1, sous b), du même règlement.

1.      Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 57, paragraphe 2, du règlement no 207/2009

37      Dans le cadre de son premier moyen, la requérante remet en cause certaines appréciations de la chambre de recours portant sur les éléments de preuve visant à établir l’usage sérieux de la marque antérieure. En particulier, elle conteste les considérations de la chambre de recours selon lesquelles les services de recouvrement de loyers se référaient uniquement à une somme d’argent payée régulièrement. Or, en espagnol, le verbe « alquilar » (louer) n’impliquerait aucune connotation de répétition et/ou de périodicité. À cet égard, la requérante se réfère également à l’article 1543 du code civil espagnol en vertu duquel il n’existerait aucune obligation de procéder à un paiement régulier ou périodique des loyers.

38      En outre, la requérante soutient que, dans la mesure où la question de la signification exacte de l’expression « cobro de alquileres » (recouvrement de loyers) n’a été soulevée que par la chambre de recours, elle joint des éléments de preuve supplémentaires pour contester les conclusions de la celle-ci sur ce point.

39      La requérante ajoute que, dans l’hypothèse où le Tribunal conclurait que le service de recouvrement de loyers ne couvrirait que le recouvrement périodique de loyers au titre des locations de longue durée, certains des appartements mentionnés dans les éléments de preuve ont parfois été loués pour de longues périodes et qu’elle a encaissé des versements périodiques de loyers.

40      Dans la mesure où, selon la requérante, l’usage de la marque antérieure a été démontré pour le recouvrement de loyers, cet usage couvrirait les services suivants : « agences de logement [immobilier] ; location d’appartements ; location de biens immobiliers », étant donné que le recouvrement de loyers ferait incontestablement partie des obligations pertinentes qu’impliqueraient ces services.

41      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

42      À titre liminaire, il importe de rappeler que, selon l’article 57, paragraphes 2 et 3, du règlement no 207/2009, le titulaire d’une marque de l’Union européenne peut requérir la preuve que, au cours des cinq années qui précèdent la date de la demande en nullité, la marque antérieure a fait l’objet d’un usage sérieux sur le territoire sur lequel elle est protégée pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et sur lesquels la demande en nullité est fondée, pour autant qu’à cette date la marque antérieure était enregistrée depuis cinq ans au moins.

43      En outre, si la marque antérieure est enregistrée depuis cinq ans au moins à la date de publication de la demande de marque de l’Union européenne, le titulaire de la marque antérieure doit apporter également la preuve que la marque antérieure a fait l’objet d’un usage sérieux sur ce territoire au cours des cinq années qui précèdent cette publication. À défaut d’une telle preuve, la demande en nullité est rejetée. Si la marque antérieure n’a été utilisée que pour une partie des produits ou des services pour lesquels elle est enregistrée, elle n’est réputée enregistrée que pour cette partie des produits et des services, aux fins de l’examen de la demande en nullité.

44      Une marque fait l’objet d’un usage sérieux lorsqu’elle est utilisée conformément à sa fonction essentielle qui est de garantir l’identité d’origine des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée, aux fins de créer ou de conserver un débouché pour ces produits et ces services, à l’exclusion d’usages de caractère symbolique ayant pour seul objet le maintien des droits conférés par la marque. De plus, la condition relative à l’usage sérieux de la marque exige que celle-ci, telle qu’elle est protégée sur le territoire pertinent, soit utilisée publiquement et vers l’extérieur [voir arrêt du 4 avril 2019, Hesse et Wedl & Hofmann/EUIPO (TESTA ROSSA), T‑910/16 et T‑911/16, EU:T:2019:221, point 29 et jurisprudence citée].

45      L’appréciation du caractère sérieux de l’usage de la marque doit reposer sur l’ensemble des faits et des circonstances propres à établir la réalité de l’exploitation commerciale de celle-ci, en particulier les usages considérés comme justifiés dans le secteur économique concerné pour maintenir ou créer des parts de marché au profit des produits ou des services protégés par la marque, la nature de ces produits ou de ces services, les caractéristiques du marché, l’importance et la fréquence de l’usage de la marque (voir arrêt du 4 avril 2019, TESTA ROSSA, T‑910/16 et T‑911/16, EU:T:2019:221, point 30 et jurisprudence citée).

46      En vertu de l’article 10, paragraphes 3 et 4, du règlement délégué 2018/625, les indications et les preuves de l’usage doivent établir le lieu, la durée, l’importance et la nature de l’usage qui a été fait de la marque pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et les preuves se limitent à la production de pièces justificatives comme des emballages, des étiquettes, des barèmes de prix, des catalogues, des factures, des photographies, des annonces dans les journaux ainsi qu’aux déclarations écrites visées à l’article 97, paragraphe 1, sous f), du règlement 2017/1001.

47      Pour examiner, dans un cas d’espèce, le caractère sérieux de l’usage d’une marque antérieure, il convient de procéder à une appréciation globale en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce. Cette appréciation implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte [voir arrêt du 8 juillet 2004, Sunrider/OHMI – Espadafor Caba (VITAFRUIT), T‑203/02, EU:T:2004:225, point 42 et jurisprudence citée]. Un faisceau d’éléments de preuve peut permettre d’établir les faits à démontrer, alors même que chacun de ces éléments, pris isolément, serait impuissant à rapporter la preuve de l’exactitude de ces faits [voir arrêt du 13 février 2015, Husky CZ/OHMI – Husky of Tostock (HUSKY), T‑287/13, EU:T:2015:99, point 66 et jurisprudence citée].

48      Ainsi, il n’est pas requis que chaque élément de preuve contienne des informations sur chacun des quatre éléments sur lesquels doit porter la preuve de l’usage sérieux, à savoir le lieu, la durée, la nature et l’importance de l’usage. En, effet, il ne s’agit donc pas d’analyser chacune des preuves de façon isolée, mais de les analyser conjointement, afin d’en identifier le sens le plus probable et cohérent [voir arrêt du 1er juin 2022, Worldwide Machinery/EUIPO – Scaip (SUPERIOR MANUFACTURING), T‑316/21, non publié, EU:T:2022:310, point 25 et jurisprudence citée].

49      Toutefois, l’usage sérieux d’une marque ne peut pas être démontré par des probabilités ou des présomptions, mais doit reposer sur des éléments concrets et objectifs qui prouvent une utilisation effective et suffisante de la marque sur le marché concerné (voir arrêt du 4 avril 2019, TESTA ROSSA, T‑910/16 et T‑911/16, EU:T:2019:221, point 31 et jurisprudence citée).

50      C’est à la lumière des principes susmentionnés qu’il convient d’examiner le présent moyen.

51      La publication de la demande d’enregistrement de la marque contestée datant du 28 juillet 2016 et la demande en nullité ayant été introduite le 24 juillet 2020, en application de l’article 57, paragraphes 2 et 3, du règlement no 207/2009, l’usage sérieux de la marque antérieure en Espagne devait être démontré pour les périodes allant du 28 juillet 2011 au 27 juillet 2016 et du 24 juillet 2015 au 23 juillet 2020. Ces deux périodes se chevauchent, ainsi que l’avait relevé la chambre de recours.

52      Toutefois, il convient de constater que, afin de définir la première période pertinente, la chambre de recours a retenu, en application de l’article 64, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, la date de l’introduction de la demande d’enregistrement de la marque contestée, à savoir le 8 juin 2016. Or, dans la mesure où cette disposition constitue une règle de fond [voir arrêt du 6 septembre 2023, Weider Germany/EUIPO – Den i Nosht (YIPPIE!), T‑45/22, non publié, EU:T:2023:513, point 13 et jurisprudence citée], elle n’est pas applicable en l’espèce (voir point 34 ci-dessus). À cet égard, il convient d’ajouter qu’en vertu de la disposition applicable en l’espèce, à savoir l’article 57, paragraphe 2, du règlement no 207/2009, la date pertinente est la publication de la demande d’enregistrement de la marque contestée et non pas celle de l’introduction de ladite demande.

53      Cependant, bien que, en l’espèce, la première période pertinente correcte pour laquelle l’usage sérieux de la marque contestée devait être démontré commençait à courir le 28 juillet 2011 et non pas le 8 juin 2011, comme l’avait considéré la chambre de recours, aucun des éléments de preuve soumis par la requérante ne date de la période allant du 8 juin 2011 au 28 juillet 2011, de sorte que, en tout état de cause, il n’est pas possible de reprocher à la chambre de recours d’avoir tenu compte des éléments de preuve ne datant pas de la période pertinente.

54      Il s’ensuit que l’erreur de droit commise par la chambre de recours est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée et, de surcroît, n’est pas alléguée par la requérante qui, à l’instar de ladite chambre, se réfère également aux dispositions du règlement 2017/1001.

55      À cet égard, il convient de rappeler que l’annulation d’un acte de l’Union en raison d’une base juridique erronée n’est pas justifiée lorsqu’une telle erreur n’a pas eu d’influence déterminante sur l’appréciation portée par l’auteur de celui‑ci (arrêt du 21 février 2024, Sinopec Chongqing SVW Chemical e.a./Commission, T‑762/20, EU:T:2024:113, point 157 et jurisprudence citée).

56      En ce qui concerne la nature de l’usage de la marque contestée, la chambre de recours a considéré que la division d’annulation avait conclu, à juste titre, que les services pour lesquels l’usage sérieux de la marque antérieure a été prouvé étaient les services de location et de réservation de logements temporaires, les maisons de vacances et les appartements touristiques, l’ensemble de ces services relevant de la classe 43. Selon la chambre de recours, l’usage sérieux n’avait pas été démontré pour les autres services couverts par la marque antérieure.

57      Pour rappel, ainsi qu’il ressort des points 37 à 40 ci-dessus, la requérante conteste les conclusions de la chambre de recours selon lesquelles l’usage sérieux de la marque antérieure n’avait pas été démontré pour les services de recouvrement de loyers relevant de la classe 36. Elle soutient que l’usage sérieux de ladite marque pour ces services emporterait également celui pour les services d’agences de logement, la location d’appartements et la location de biens immobiliers relevant de la même classe.

58      À cet égard, la chambre de recours a notamment rejeté l’argument de la requérante, selon lequel la présence, sur les éléments de preuve produits, des expressions « nous confirmons par la présente que nous avons reçu le paiement effectué » et « total à payer à l’arrivée » en anglais démontrait l’usage de la marque antérieure pour les services de recouvrement de loyers. Selon la chambre de recours, la confirmation de paiements reçus pour la réservation de logements temporaires (de vacances) ne constituait pas un usage pour le service de recouvrement de loyers pour le compte de tiers. Elle a ainsi confirmé la position de la division d’annulation selon laquelle l’usage éventuel de ladite marque en relation avec les paiements liés à la location de logements temporaires ne constituait pas un usage pour la perception de loyers en tant que service pour des tiers.

59      En outre, la chambre de recours a notamment relevé que ces derniers services consistaient à percevoir des loyers auprès des locataires, voire à engager les poursuites afin d’en obtenir le paiement. Ainsi, il s’agirait d’un service fourni aux propriétaires visant à collecter efficacement et en temps utile les loyers que les locataires devaient payer régulièrement, tel que le loyer pour l’utilisation continue d’une maison ou d’un appartement. Or, les éléments de preuve mentionnés par la requérante à cet égard, seraient non seulement rares, mais feraient exclusivement référence à la location et à la réservation d’un logement temporaire ne nécessitant pas de paiements réguliers et répétitifs.

60      À cet égard, il y a lieu de relever que l’argumentation de la requérante selon laquelle l’usage de la marque antérieure a été démontré pour le recouvrement de loyers est fondée sur l’utilisation, dans la correspondance avec les locataires, des expressions « nous confirmons par la présente que nous avons reçu le paiement effectué » et « total à payer à l’arrivée ». Toutefois, ces indications qui apparaissent dans les courriels échangés avec les locataires ne sauraient constituer des preuves suffisantes de la fourniture de services autonomes de recouvrement de loyers contre rémunération pour le compte d’un tiers et ne sauraient être considérées comme susceptibles de créer un débouché. En effet, les locataires ne sauraient être considérés comme les destinataires de tels services. De même, l’activité consistant à percevoir les paiements fait ainsi partie des services de location temporaire pour lesquels l’usage sérieux de la marque antérieure a été démontré.

61      Quant à l’affirmation de la requérante selon laquelle elle avait comme clients également les propriétaires d’appartements, il suffit de relever qu’elle repose seulement sur l’annexe A 11 de la requête qui, ainsi qu’il ressort du point 27 ci-dessus, n’est pas recevable en l’espèce.

62      Partant, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que l’usage sérieux de la marque antérieure n’avait pas été prouvé en ce qui concerne le recouvrement de loyers.

63      Dans ces conditions, l’argumentation de la requérante, selon laquelle c’est à tort que la chambre de recours a considéré qu’un loyer impliquait un paiement régulier ou périodique, est inopérante. En effet, comme le fait valoir l’EUIPO, la chambre de recours a avancé plusieurs motifs pour lesquels elle a considéré que l’usage sérieux de la marque antérieure pour ce service n’avait pas été démontré. Or, ainsi qu’il ressort des points 60 à 62 ci-dessus la chambre de recours était fondée à considérer que la requérante n’avait pas démontré avoir fourni des services de recouvrement de loyers pour le compte de tiers.

64      De même, étant donné que l’usage sérieux de la marque antérieure n’a pas été démontré en ce qui concerne les services de recouvrement de loyers, un tel usage n’est pas a fortiori démontré pour les services suivants : « agences de logement [immobilier] ; location d’appartements ; location de biens immobiliers ». En effet, l’argumentation de la requérante pour ces services se limitait à l’affirmation selon laquelle le recouvrement de loyers faisait partie des « obligations pertinentes » qu’ils impliquaient.

65      Au vu des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le premier moyen.

2.      Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 53, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, lu en combinaison avec l’article 8, paragraphe 1, sous b), du même règlement 

66      La requérante fait valoir qu’il existe un risque de confusion en l’espèce et conteste les conclusions de la chambre de recours selon lesquelles les services en cause étaient différents, en soutenant que les services couverts par la marque contestée, en particulier, ceux qui se réfèrent expressément à l’hébergement sont identiques ou à tout le moins similaires aux services couverts par la marque antérieure.

67      L’EUIPO et l’intervenante contestent les allégations de la requérante.

68      Aux termes d’une lecture combinée de l’article 53, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 et de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du même règlement, sur demande du titulaire d’une marque antérieure, la marque de l’Union européenne enregistrée est déclarée nulle lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), ii), du règlement no 207/2009, il convient d’entendre par marques antérieures les marques enregistrées dans un État membre dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque de l’Union européenne.

69      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, en tenant compte de tous les facteurs caractérisant le cas d’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêts du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée, et du 21 mars 2019, Pan/EUIPO – Entertainment One UK (TOBBIA), T‑777/17, non publié, EU:T:2019:180, point 37 et jurisprudence citée].

70      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

71      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner les appréciations de la chambre de recours relatives à l’existence d’un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 en l’espèce.

72      Dans la mesure où, dans ses appréciations de l’existence d’un risque de confusion, la chambre de recours s’est limitée à la comparaison des services en cause, il y a lieu de commencer par l’examen de cette partie de la décision attaquée.

a)      Sur la comparaison des services

73      Selon une jurisprudence constante, pour apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [voir arrêt du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, EU:T:2007:219, point 37 et jurisprudence citée].

1)      Sur les services relevant de la classe 35

74      La requérante soutient que les services de courtage, pour le compte de tiers, de contrats, de prestation de services, en particulier, concernant l’hébergement d’hôtes, qu’ils soient ou non rémunérés de manière indépendante, font partie des principales fonctions des agences de logement et des agences immobilières pour lesquelles l’usage sérieux de la marque antérieure serait démontré. Il s’agirait non seulement d’un service complémentaire, mais également d’un service quasiment indispensable à la fourniture de services de logement. La destination de ces services serait également la même que pour les agences immobilières, à savoir mettre des biens immobiliers à la disposition du public. Afin de contester les considérations de la chambre de recours selon lesquelles les services en cause n’ont pas la même destination et ne sont pas complémentaires, la requérante se réfère également aux directives de l’EUIPO.

75      Quant aux considérations de la chambre de recours selon lesquelles les services liés à la location de logements temporaires s’adressent principalement au grand public, tandis que le courtage de contrats pour le compte des tiers se concentre sur les professionnels, la requérante soutient que cette interprétation ne repose sur aucun fondement, étant donné que les contrats en question sont conclus dans l’intérêt de toutes les parties. Par ailleurs, la requérante fait valoir que ce sont les entreprises fournissant des locations et des réservations d’hébergements temporaires qui effectuent le courtage des contrats qui régiront ces locations, contrairement à ce qu’a affirmé la chambre de recours. Ainsi, la requérante indique qu’elle prend parfois en charge la gestion intégrale de l’appartement et agit parfois comme intermédiaire entre le professionnel, propriétaire du logement, et la personne qui effectue la réservation.

76      En outre, la requérante indique que la destination du service de courtage de contrats de prestation de services, pour le compte de tiers, en particulier concernant l’hébergement d’hôtes couvert par la marque contestée est la même que celle des services de location et de réservation d’hébergements temporaires. Par ailleurs, la chambre de recours aurait reconnu, au point 69 de la décision attaquée, qu’il était nécessaire de prévoir un contrat pour la fourniture d’un logement temporaire.

77      S’agissant des services de notation en termes de comparaison de prix de logements, ils auraient habituellement la même origine, les mêmes circuits de distribution et le même public que les services fournis par les agences de logement, les agences immobilières et les services de location d’appartements. D’après la requérante, ces services sont étroitement liés au logement et s’adressent à tous ceux qui pourraient être intéressés par une comparaison des prix de logements, à savoir des entreprises et des professionnels ou des membres du grand public.

78      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

79      En l’espèce, la chambre de recours a considéré que, bien qu’il soit nécessaire de prévoir un contrat pour la fourniture d’un logement temporaire, le courtage de contrats pour la fourniture de services, pour le compte d’autrui, et la fourniture de logements étaient assurés par des entreprises différentes et s’adressaient à un public différent. À cet égard, la chambre de recours a relevé que les services liés à la location de logements temporaires s’adressaient principalement au grand public, tandis que le courtage de contrats pour le compte de tiers se concentrerait sur les professionnels afin qu’ils fournissent des services. De même, le fournisseur de location et de réservation de logements temporaires (de vacances) ne proposerait généralement pas des services de courtage en tant que services rémunérés pour d’autres entreprises. De surcroît, la nature et la finalité de ces services seraient différentes.

80      Quant aux services de notation en termes de comparaison de prix de logements couverts par la marque contestée, la chambre de recours a considéré que ces services étaient nécessaires à une entreprise pour réaliser son objectif commercial et assurer son bon fonctionnement. Selon la chambre de recours, ces services étaient manifestement différents des services couverts par la marque antérieure étant donné que ni leur destination ni leur nature n’étaient similaires et qu’ils s’adressaient à des publics différents.

81      À titre liminaire, il convient de relever, à l’instar de l’EUIPO et de l’intervenante, qu’une partie importante de l’argumentation relative à la similitude entre les services couverts par la marque contestée et ceux couverts par la marque antérieure est fondée sur la prémisse selon laquelle l’usage sérieux de la marque antérieure a été démontré pour les services fournis par des agences de logement (immobilier) et des agences immobilières, la location d’appartements et la location des biens immobiliers relevant de la classe 36. Or, cette prémisse est erronée, étant donné que, ainsi qu’il ressort du point 64 ci-dessus, l’usage sérieux de la marque antérieure n’a pas été démontré pour ces services. Il s’ensuit que les arguments de la requérante fondés sur cette prémisse erronée doivent être écartés.

82      De même, à l’instar de la chambre de recours, il y a lieu de rappeler que les services adressés à des publics différents ne sauraient être considérés comme substituables, ni, par conséquent, comme concurrents. De tels services ne peuvent pas non plus présenter un caractère complémentaire. En effet, les services complémentaires sont ceux entre lesquels existe un lien étroit, en ce sens que l’un est indispensable ou important pour l’usage de l’autre, de sorte que les consommateurs peuvent penser que la responsabilité de la fourniture de ces services incombe à la même entreprise (voir, en ce sens, arrêt du 22 janvier 2009, easyHotel, T‑316/07, EU:T:2009:14, points 56 à 58).

83      À cet égard, il convient de relever, à l’instar de la chambre de recours, que les services de courtage, pour le compte de tiers, de contrats de prestation de services, en particulier, concernant l’hébergement d’hôtes et la notation en termes de comparaison de prix de logements, couverts par la marque contestée et relevant de la classe 35, ont une destination et une nature différente des services pour lesquels l’usage sérieux de la marque antérieure a été démontré. En outre, les services couverts par la marque contestée s’adressent à des professionnels, tandis que les services couverts par la marque antérieure s’adressent principalement au grand public.

84      La circonstance selon laquelle un contrat serait nécessaire pour la fourniture d’un logement temporaire n’est pas décisive en l’espèce, notamment parce qu’une entreprise proposant la location du logement temporaire, qui conclut des contrats dans le cadre de sa propre activité ne fournit pas, pour autant, le service de courtage, pour le compte de tiers, de contrats de prestation de services à ses clients locataires. Lorsque ces derniers s’adressent à une société fournissant des services de logements temporaires, ils ne cherchent pas à se procurer un service de courtage. Ainsi, s’il n’est pas exclu que les services de courtage s’adressent non seulement aux professionnels, mais également aux particuliers, la qualité de ces derniers est celle de propriétaire d’un bien immobilier souhaitant mettre ce bien en location et non pas celle d’un client souhaitant louer un logement temporaire, de sorte que ces particuliers ne seront pas amenés à penser que l’offre de ces deux services incombe à la même entreprise.

85      S’agissant de l’annexe A 15 de la requête que la requérante invoque à l’appui de son argumentation selon laquelle le courtage des contrats ferait partie des services offerts par les gestionnaires immobiliers, il convient de relever, ainsi qu’il ressort de cet élément de preuve, que ce service n’est pas mentionné parmi les services habituellement proposés par les gestionnaires immobiliers. En effet, cet élément se limite à mentionner la « formalisation du contrat correspondant », ce qui ne constitue aucunement la fourniture d’un service de courtage des contrats à un tiers.

86      Quant à l’allégation de la requérante selon laquelle il ressortirait des annexes A 10 et A 11 de la requête qu’elle prenait parfois en charge la gestion intégrale de l’appartement et louait le bien par procuration pour le compte du propriétaire, il suffit de relever que cette allégation est fondée, d’une part, sur des annexes irrecevables (voir point 27 ci-dessus) et, d’autre part, sur la prémisse erronée selon laquelle l’usage sérieux de la marque antérieure a été démontré pour les services suivants : « agences de logement (immobilier) » et « agences immobilières » (voir point 81 ci-dessus). Par conséquent, une telle argumentation ne saurait prospérer.

87      En ce qui concerne, les services de notation en termes de comparaison de prix de logements, ils ne s’adressent pas non plus au même public que les services couverts par la marque antérieure pour lesquels l’usage sérieux a été démontré. Il doit être notamment relevé que ces services ne visent pas les membres du grand public « cherchant à trouver les meilleures offres et les “bons plans” », comme le prétend la requérante. En effet, ce dernier pourrait être éventuellement intéressé par le résultat d’un tel service, à savoir la comparaison de prix de logements, mais ne va certainement pas demander à ce qu’une société procède à une comparaison des prix en donnant des notes. Ainsi que l’a fait valoir la chambre de recours, au point 72 de la décision attaquée, ce service vise à effectuer des opérations quotidiennes nécessaires à une entreprise pour réaliser son objectif commercial et assurer son bon fonctionnement.

88      Quant aux références de la requérante aux directives de l’EUIPO, il convient de rappeler que celles-ci ne constituent pas des actes juridiques contraignants pour l’interprétation des dispositions du droit de l’Union (arrêt du 6 juin 2019, Deichmann/EUIPO, C‑223/18 P, non publié, EU:C:2019:471, point 49).

89      Enfin, la requérante n’ayant pas avancé d’arguments afin de contester les appréciations de la chambre de recours relatives aux autres services relevant de la classe 35 couverts par la marque contestée, il n’y a pas lieu de remettre en cause ces appréciations.

90      Dans ces conditions, eu égard à la jurisprudence citée au point 82 ci-dessus, il y a lieu de considérer que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur d’appréciation en soutenant que les services relevant de la classe 35 couverts par la marque contestée étaient différents de ceux couverts par la marque antérieure pour lesquels l’usage sérieux a été démontré.

2)      Sur les services relevant de la classe 38

91      La requérante soutient que les services relevant de la classe 38 couverts par la marque contestée présentent une complémentarité avec les services d’agences de logement (immobilier), d’agences immobilières, de location d’appartements ainsi que de location de biens immobiliers, de location et de réservation de logements temporaires, de maisons de vacances et d’appartements de vacances couverts par la marque antérieure. Selon elle, la chambre de recours aurait négligé le fait que les services de télécommunications couverts par la marque contestée visaient explicitement l’accès à des informations concernant les possibilités mondiales de logements, en particulier les réservations d’appartements par Internet. De même, la requérante conteste les considérations de la chambre de recours selon lesquelles les télécommunications n’étaient pas indispensables pour fournir des logements temporaires, en soutenant que la quasi-totalité des réservations de logements et des demandes d’informations y afférentes serait effectuée par le biais des télécommunications.

92      En outre, la requérante se réfère aux directives de l’EUIPO selon lesquelles les services de conseils, de consultations et d’informations seraient en principe toujours similaires, voire identiques, aux services auxquels ils se rapportent. Il en découlerait que les services de « fourniture d’accès à des informations concernant les possibilités mondiales de logement, en particulier appartements, réservations par Internet » et de « fourniture d’accès à des banques de données de réservations de logements dans le monde entier sur des réseaux informatiques » devraient être considérés comme étant très similaires à une partie des services couverts par la marque antérieure.

93      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

94      La chambre de recours a considéré que la destination des services de télécommunication couverts par la marque contestée et les services pour lesquels l’usage sérieux de la marque antérieure avait été démontré était différente, qu’ils étaient proposés par des entités différentes et qu’ils n’étaient ni concurrents ni complémentaires. Elle a ajouté que le fait que les télécommunications jouaient un rôle important dans le processus de réservation de logements temporaires ne signifiait pas que le public pertinent serait amené à penser que la fourniture des deux services incomberait à la même entreprise.

95      S’agissant des services de télécommunication fournis par le biais de portails et de plateformes Internet, en particulier pour la réservation des hébergements pour le compte de tiers couverts par la marque contestée, il doit être relevé, à l’instar de la chambre de recours, que le public pertinent ne sera pas amené à penser que la fourniture de ces services et de ceux couverts par la marque antérieure pour lesquels l’usage sérieux a été prouvé incombe à la même entreprise. En effet, ces services sont fournis par des sociétés de télécommunication et non pas par des sociétés proposant la location temporaire de biens immobiliers et peuvent, en réalité, s’adresser à ces dernières. Quant au public visé par les services de location temporaire, lorsque celui-ci consultera un portail ou une plate-forme Internet proposant la location temporaire des biens immobiliers, il ne sera pas amené à penser que les services de location temporaire et les services de télécommunication assurant le fonctionnement de ce portail ou de cette plateforme incomberont à la même entreprise. Partant, en application de la jurisprudence citée au point 82 ci-dessus, ces services sont différents, comme l’avait, à juste titre, considéré la chambre de recours.

96      En ce qui concerne les services de fourniture d’accès à des informations concernant les possibilités mondiales de logement, en particulier appartements, réservations par Internet et de fourniture d’accès à des banques de données de réservations de logements dans le monde entier sur des réseaux informatiques couverts par la marque contestée, il doit être rappelé que l’argument de la requérante quant à leur similitude aux services couverts par la marque antérieure repose sur les directives de l’EUIPO. Or, ainsi qu’il ressort du point 88 ci-dessus, ces directives ne sont pas contraignantes. De surcroît, l’extrait desdites directives, cité par la requérante, porte sur le lien entre les services de conseil, de consultation et d’information sur un service donné et ce service, alors que les services couverts par la marque contestée sont des services de fourniture d’accès à certaines informations englobant des aspects techniques.

97      La requérante n’ayant pas avancé d’arguments afin de contester les appréciations de la chambre de recours relatives aux autres services relevant de la classe 38 couverts par la marque contestée, il n’y a pas lieu de remettre en cause ces appréciations.

98      Il s’ensuit que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur d’appréciation en considérant que les services relevant de la classe 38 couverts par la marque contestée étaient différents de ceux pour lesquels l’usage sérieux de la marque antérieure a été démontré.

3)      Sur les services relevant de la classe 42

99      La requérante soutient que le service de fourniture de moteurs de recherche sur Internet couvert par la marque contestée est complémentaire aux services couverts par la marque antérieure relevant des classes 36 et 43. Ils auraient également la même destination et le même public pertinent. Elle ajoute que le site Internet de l’intervenante ne serait pas un simple moteur de recherche fournissant des informations « brutes » sur des locations proposées par différentes entreprises, mais il s’agirait d’un site de réservation offrant la possibilité d’effectuer des réservations.

100    L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

101    La chambre de recours a considéré que les services relevant de la classe 42 couverts par la marque contestée étaient des services liés aux logiciels et au matériel informatique fournis par des sociétés informatiques. Elle est parvenue à la conclusion selon laquelle la destination de ces services était différente de celle des services pour lesquels l’usage sérieux de la marque antérieure avait été démontré, que l’ensemble de ces services était fourni par des entités différentes et par le biais de canaux de distribution différents et qu’ils n’étaient ni concurrents ni complémentaires.

102    Tout d’abord, il convient de relever que l’argumentation de la requérante est fondée sur la prémisse selon laquelle l’usage sérieux de la marque antérieure a été démontré pour les services relevant des classes 36 et 43. Or, ainsi qu’il a déjà été constaté au point 81 ci-dessus, cette prémisse est erronée. Les seuls services à prendre en compte pour la présente appréciation sont ceux pour lesquels l’usage sérieux de la marque antérieure a été démontré.

103    Ensuite, s’agissant de la similitude entre le service de fourniture de moteurs de recherche sur Internet couvert par la marque contestée et les services de la marque antérieure pour lesquels l’usage sérieux a été démontré, à savoir les « services de location et de réservation de logements temporaires ; maisons de vacances ; appartements touristiques », ils ne s’adressent pas au même public et n’ont pas la même destination, contrairement à ce que soutient la requérante. En effet, il doit être relevé, à l’instar de la chambre de recours, que les services couverts par la marque contestée sont fournis par des sociétés informatiques, ce qui n’est pas le cas des services couverts par la marque antérieure.

104    Enfin, s’agissant de l’allégation de la requérante selon laquelle le site Internet de l’intervenante ne serait pas un simple moteur de recherche, mais fonctionnerait comme un site de réservation et offrirait la possibilité d’effectuer des réservations, d’une part, il doit être rappelé que les modalités de commercialisation particulières des produits ou des services désignés par les marques pouvant varier dans le temps et suivant la volonté des titulaires de ces marques, l’analyse prospective du risque de confusion ne saurait dépendre des intentions commerciales, réalisées ou non, et par nature subjectives, des titulaires des marques [arrêts du 15 mars 2007, T.I.M.E. ART/OHMI, C‑171/06 P, non publié, EU:C:2007:171, point 59, et du 9 septembre 2008, Honda Motor Europe/OHMI – Seat (MAGIC SEAT), T‑363/06, EU:T:2008:319, point 63]. D’autre part, force est de constater qu’une entreprise proposant, sur son site Internet, la possibilité de réserver un logement temporaire, n’offre pas le service de fourniture de moteurs de recherche sur Internet. Il est clair que c’est la société informatique assurant le fonctionnement du moteur de recherche disponible sur ledit site Internet qui offre le service de fourniture de moteurs de recherche sur Internet.

105    La requérante n’ayant pas avancé d’arguments afin de contester les appréciations de la chambre de recours relatives aux autres services relevant de la classe 42 couverts par la marque contestée, il n’y a pas lieu de remettre en cause ces appréciations.

106    Il s’ensuit que c’est à juste titre que la chambre de recours a estimé que les services couverts par la marque contestée relevant de la classe 42 et les services couverts par la marque antérieure pour lesquels l’usage sérieux avait été démontré étaient différents.

107    Au vu des considérations qui précèdent, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur d’appréciation en considérant que les services couverts par les marques en conflit étaient différents.

b)      Sur le risque de confusion

108    L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74].

109    La chambre de recours a considéré que l’une des conditions nécessaires à l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 n’était pas remplie, étant donné que les services en cause étaient différents.

110    La requérante soutient que, en l’espèce, il existe un risque de confusion et avance, à cet égard, que le Tribunal reste tenu d’apprécier l’existence d’un risque de confusion concernant les marques en conflit ayant pour point de départ l’existence d’un degré élevé de similitude des signes, reconnu par l’EUIPO et l’intervenante dans le cadre d’une procédure d’opposition antérieure. Elle soutient notamment que le public pertinent est constitué du grand public et de professionnels.

111    Tout en étant consciente du fait qu’il ne s’agit pas d’une procédure en contrefaçon, la requérante soutient toutefois que, en réalité, l’intervenante et elle sont deux concurrentes sur le même secteur d’activité, à savoir la location d’appartements. De même, elle soutient que l’intervenante a enregistré la marque contestée pour les services relevant de classes n’ayant aucun rapport avec les services d’hébergement, mais a tiré profit de la description de ces services pour y insérer artificiellement des services d’hébergement, parvenant ainsi à couvrir son activité réelle, à savoir l’intermédiation dans la location d’hébergements temporaires. À cet égard, la requérante ajoute que la note explicative de la liste des classes de produits et de services de l’arrangement de Nice exclut expressément la gérance des biens immobiliers de la classe 35 et les services réalisés à l’aide de raccordements par télécommunications de la classe 38.

112    L’EUIPO n’a pas formulé d’observations à l’égard des arguments susmentionnés que l’intervenante conteste.

113    Ainsi qu’il est rappelé au point 70 ci-dessus, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent.

114    En l’espèce, la chambre de recours ayant conclu, à juste titre, à l’absence de similitude entre les services en cause (voir point 107 ci-dessus), c’est, par conséquent, à juste titre, qu’elle a considéré, au point 82 de la décision attaquée, que l’une des conditions d’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 n’était pas remplie, ce qui permettait d’exclure tout risque de confusion.

115    Quant aux allégations de la requérante sur l’usage et l’intention réels de la titulaire de la marque contestée, il y a lieu de rappeler qu’en vertu de la jurisprudence citée au point 104 ci-dessus, l’analyse prospective du risque de confusion ne saurait dépendre des intentions commerciales, réalisées ou non, et par nature subjectives, des titulaires des marques, de sorte que l’utilisation qu’entend faire l’intervenante de la marque contestée est sans pertinence dans ce contexte. S’il n’est pas exclu que les allégations de la requérante quant aux intentions de l’intervenante puissent être pertinentes dans une procédure de nullité fondée sur l’article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 [devenu article 59, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001] elles sont sans incidence sur la légalité de la décision attaquée en l’espèce.

116    Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le moyen tiré de la violation de l’article 53, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, lu en combinaison avec l’article 8, paragraphe 1, sous b), du même règlement, et, partant, le recours dans son intégralité.

IV.    Sur les dépens

117    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

118    La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens exposés par l’intervenante, conformément aux conclusions de cette dernière.

119    En revanche, l’EUIPO n’ayant conclu à la condamnation de la requérante aux dépens qu’en cas d’organisation d’une audience, il convient, en l’absence d’organisation d’une audience, de décider que l’EUIPO supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Habitat Barcelona Unión Constructora SL supportera, outre ses propres dépens, ceux exposés par Acomodeo Marketplace GmbH.

3)      L’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) supportera ses propres dépens.

Costeira

Zilgalvis

Tichy-Fisslberger

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 5 juin 2024.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.