Language of document : ECLI:EU:C:2016:987

Affaire C‑119/15

Biuro podróży « Partner » Sp. z o.o. sp.k. w Dąbrowie Górniczej

contre

Prezes Urzędu Ochrony Konkurencji i Konsumentów

(demande de décision préjudicielle,introduite par le Sąd Apelacyjny w Warszawie)

« Renvoi préjudiciel – Directive 93/13/CEE – Directive 2009/22/CE – Protection des consommateurs – Effet erga omnes de clauses abusives figurant dans un registre public – Sanction pécuniaire infligée à un professionnel ayant utilisé une clause considérée équivalente à celle figurant audit registre – Professionnel n’ayant pas participé à la procédure ayant conduit à la constatation du caractère abusif d’une clause – Article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne – Notion de “juridiction nationale dont les décisions ne sont pas susceptibles d’un recours juridictionnel de droit interne” »

Sommaire – Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 21 décembre 2016

1.        Protection des consommateurs – Clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs – Directive 93/13 – Moyens destinés à faire cesser l’utilisation des clauses abusives – Réglementation nationale qualifiant de comportement illicite l’utilisation par un professionnel de clauses considérées comme équivalentes à des clauses illicites contenues dans un registre national – Admissibilité – Condition – Respect du droit à une protection juridictionnelle effective – Vérification par le juge national

(Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, art. 47 ; directive du Parlement européen et du Conseil 2009/22, art. 1er et 2 ; directive du Conseil 93/13, telle que modifiée par la directive 2011/83, art. 6, § 1, 7, 8 et 8 bis)

2.        Questions préjudicielles – Saisine de la Cour – Questions d’interprétation – Obligation de renvoi – Portée – Juridiction nationale au sens de l’article 267, troisième alinéa, TFUE – Notion

(Art. 267, al. 3, TFUE)

1.      L’article 6, paragraphe 1, et l’article 7 de la directive 93/13, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, lus en combinaison avec les articles 1er et 2 de la directive 2009/22, relative aux actions en cessation en matière de protection des intérêts des consommateurs, ainsi qu’à la lumière de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à ce que l’utilisation de clauses de conditions générales, dont le contenu est équivalent à celui de clauses jugées illicites par une décision juridictionnelle définitive et inscrites dans un registre national des clauses de conditions générales jugées illicites, soit considérée, à l’égard d’un professionnel qui n’a pas été partie à la procédure ayant conduit à l’inscription de ces clauses dans ledit registre, comme un comportement illicite, à condition, ce qu’il appartient au juge national de vérifier, que ce professionnel bénéficie d’un droit de recours effectif tant contre la décision admettant l’équivalence des clauses comparées portant sur la question de savoir si, compte tenu de l’ensemble des circonstances pertinentes propres à chaque cas, ces clauses sont matériellement identiques, eu égard notamment aux effets produits au détriment des consommateurs, que contre la décision fixant, le cas échéant, le montant de l’amende infligée.

En effet, il ne saurait être contesté que la mise en place d’un tel registre est compatible avec le droit de l’Union. À cet égard, il ressort des dispositions de la directive 93/13, et notamment de l’article 8 de celle-ci, que les États membres peuvent établir des listes énonçant des clauses contractuelles réputées abusives. En vertu de l’article 8 bis de cette directive, telle que modifiée par la directive 2011/83, les États membres sont tenus d’informer la Commission de l’établissement de telles listes. Il découle de ces dispositions que ces listes ou registres établis par des instances nationales répondent, en principe, à l’intérêt de la protection des consommateurs dans le cadre de la directive 93/13. Toutefois, ledit registre doit être géré de manière transparente dans l’intérêt non seulement des consommateurs, mais également des professionnels. Cette exigence implique notamment que celui-ci soit structuré de manière claire, indépendamment du nombre de clauses qu’il contient. En outre, les clauses figurant audit registre doivent répondre au critère d’actualité, ce qui implique que ce registre soit soigneusement tenu à jour et que, dans le respect du principe de sécurité juridique, les clauses n’ayant plus lieu d’y figurer en soient retirées sans délai.

De surcroît, en application du principe de protection juridictionnelle effective, le professionnel qui se voit infliger une amende en raison de l’utilisation d’une clause jugée équivalente à une clause figurant dans un registre doit, notamment, disposer d’une possibilité de recours contre cette sanction. Ce droit de recours doit pouvoir porter tant sur l’appréciation du comportement considéré comme illicite que sur le montant de l’amende fixé par l’organe national compétent. Dans ce contexte, l’examen effectué par la juridiction compétente ne se bornerait pas à une simple comparaison formelle des clauses examinées avec celles figurant au registre. Au contraire, cet examen consisterait à apprécier le contenu des clauses litigieuses afin de déterminer si, compte tenu de l’ensemble des circonstances pertinentes propres à chaque cas, ces clauses sont matériellement identiques, eu égard notamment aux effets qu’elles produisent, à celles inscrites dans ce registre.

(voir points 36, 38-40, 42, 47, disp. 1)

2.      L’article 267, troisième alinéa, TFUE doit être interprété en ce sens qu’une juridiction dont les décisions, rendues dans le cadre d’un litige, peuvent faire l’objet d’un pourvoi en cassation ne peut être qualifiée de juridiction dont les décisions ne sont pas susceptibles d’un recours juridictionnel de droit interne.

(voir point 54, disp. 2)