Language of document : ECLI:EU:T:2014:898

ORDONNANCE DU PRÉSIDENT DE LA SIXIÈME CHAMBRE DU TRIBUNAL

3 octobre 2014 (*)

« Confidentialité »

Dans l’affaire T‑454/13,

Société nationale maritime Corse Méditerranée (SNCM), établie à Marseille (France), représentée par Mes A. Winckler, F.‑C. Laprévote, J.‑P. Mignard et S. Mabile, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par Mme M. Afonso et M. B. Stromsky, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenue par

Corsica Ferries France SAS, établie à Bastia (France), représentée par Mes S. Rodrigues et C. Bernard-Glanz, avocats,

partie intervenante,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision C (2013) 1926 final de la Commission, du 2 mai 2013, concernant l’aide d’État SA.22843 (2012/C) (ex 2012/NN) mise à exécution par la France en faveur de la Société nationale maritime Corse Méditerranée et la Compagnie méridionale de navigation,

LE PRÉSIDENT DE LA SIXIÈME CHAMBRE DU TRIBUNAL

rend la présente

Ordonnance

 Procédure

1        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 26 août 2013, la requérante, la Société nationale maritime Corse Méditerranée (SNCM), a introduit un recours visant à l’annulation de la décision C (2013) 1926 final de la Commission, du 2 mai 2013, concernant l’aide d’État SA.22843 (2012/C) (ex 2012/NN) mise à exécution par la France en faveur de la SNCM et la Compagnie méridionale de navigation.

2        Par acte déposé au greffe du Tribunal le 11 décembre 2013, Corsica Ferries France SAS a demandé à intervenir au soutien des conclusions de la Commission européenne.

3        Par lettres des 9 janvier et 10 février 2014, la requérante a demandé que certaines informations et pièces contenues dans sa requête et sa réplique fassent l’objet d’un traitement confidentiel à l’égard de Corsica Ferries France si celle-ci était admise à intervenir. Elle a joint à ses demandes une version non confidentielle de ces écritures.

4        Par ordonnance du président de la sixième chambre du Tribunal du 21 février 2014, Corsica Ferries France a été admise à intervenir au soutien des conclusions de la Commission et la décision sur le bien-fondé des demandes de traitement confidentiel présentées par la requérante a été réservée.

5        Par lettre du 6 mars 2014, Corsica Ferries France a formulé des objections à l’encontre de ces demandes de traitement confidentiel en ce qui concerne une grande partie des éléments visés par celles-ci.

 Sur les demandes de traitement confidentiel

 Objet des demandes

6        La demande de traitement confidentiel présentée par la requérante le 9 janvier 2014 concerne certaines données figurant aux points 78, 100, 163, 170 et 176, sous b), de la requête et à la note en bas de page n° 91 de la requête, ainsi que les annexes A 4 et A 5, A 7 et A 8, et A 14 à A 16 de la requête dans leur intégralité.

7        La demande de traitement confidentiel présentée par la requérante le 10 février 2014 concerne l’annexe 1 de la réplique dans son intégralité.

 Sur le bien-fondé des demandes

 Considérations de principe

8        Aux termes de l’article 116, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, si une intervention dont la demande a été présentée dans le délai de six semaines prévu à l’article 115, paragraphe 1, de ce règlement est admise, la partie intervenante reçoit communication de tous les actes de procédure signifiés aux parties. Le président peut, cependant, à la demande d’une partie, exclure de cette communication des pièces secrètes ou confidentielles.

9        Cette disposition pose pour principe que tous les actes de procédure signifiés aux parties doivent être communiqués aux parties intervenantes et ne permet qu’à titre dérogatoire d’exclure certaines pièces ou informations secrètes ou confidentielles de cette communication (voir ordonnance du 24 avril 2012, Embraer e.a./Commission, T‑75/10, EU:T:2012:198, point 14 et jurisprudence citée).

10      À cet égard, en premier lieu, les instructions au greffier du Tribunal, prévoient, à l’article 6, paragraphe 2, qu’une demande de traitement confidentiel doit être présentée conformément aux dispositions des instructions pratiques aux parties, dont il ressort notamment que la partie qui présente une demande de confidentialité doit préciser les pièces ou les informations visées et indiquer, avec une précision suffisante, les raisons de leur caractère confidentiel (voir ordonnance du 3 mai 2011, SKW Stahl-Metallurgie Holding et SKW Stahl-Metallurgie/Commission, T‑384/09, EU:T:2011:192, point 25 et jurisprudence citée).

11      En deuxième lieu, lorsqu’une partie présente une demande au titre de l’article 116, paragraphe 2, seconde phrase, du règlement de procédure, le président se prononce uniquement sur la confidentialité des pièces et informations pour lesquelles la demande de traitement confidentiel est contestée (ordonnance du 22 février 2005, Hynix Semiconductor/Conseil, T‑383/03, Rec, EU:T:2005:57, point 36).

12      La contestation de la confidentialité par la partie intervenante doit porter sur des éléments précis des pièces de procédure qui sont restés occultés et indiquer les motifs pour lesquels celui-ci estime que la confidentialité à l’égard de ces éléments doit être refusée. Partant, une demande de traitement confidentiel doit être accueillie pour autant qu’elle porte sur des éléments qui n’ont pas été contestés par la partie intervenante, ou qui ne l’ont pas été de manière explicite et précise (voir ordonnance du 5 octobre 2012, Orange/Commission, T‑258/10, EU:T:2012:524, point 21 et jurisprudence citée).

13      En troisième lieu, dans la mesure où une demande présentée au titre de l’article 116, paragraphe 2, seconde phrase, du règlement de procédure est contestée, il appartient au président, dans un premier temps, d’examiner si chacune des pièces et informations dont la confidentialité est contestée revêt un caractère secret ou confidentiel (voir, en ce sens, ordonnances Hynix Semiconductor/Conseil, point 11 supra, EU:T:2005:57, point 38, et Orange/Commission, point 12 supra, EU:T:2012:524, point 22).

14      C’est au regard du caractère secret ou confidentiel de chacune des pièces et informations visées qu’il convient d’apprécier l’exigence de motivation de la demande de confidentialité à laquelle est soumise la requérante. En effet, il y a lieu de faire une distinction entre, d’une part, les informations qui sont par nature secrètes, telles que les secrets d’affaires d’ordre commercial, concurrentiel, financier ou comptable, ou confidentielles, telles que les informations purement internes, et, d’autre part, les pièces ou informations susceptibles de revêtir un caractère secret ou confidentiel pour un motif qu’il appartient au demandeur de rapporter (ordonnances Hynix Semiconductor/Conseil, point 11 supra, EU:T:2005:57, point 34, et Orange/Commission, point 12 supra, EU:T:2012:524, point 23).

15      Ainsi, le caractère secret ou confidentiel des pièces ou informations, pour lesquelles n’est apportée aucune motivation autre que celle consistant en la description de leur contenu, ne sera admis que pour autant que ces informations puissent être considérées comme secrètes ou confidentielles de par leur nature (ordonnances du 18 novembre 2008, Zhejiang Harmonic Hardware Products/Conseil, T‑274/07, EU:T:2008:508, point 25, et du 14 octobre 2009, vwd Vereinigte Wirtschaftsdienste/Commission, T‑353/08, EU:T:2009:402, point 17).

16      En quatrième lieu, lorsque son examen le conduit à conclure que certaines des pièces et informations dont la confidentialité est contestée sont secrètes ou confidentielles, le président procède, dans un second temps, à l’appréciation et à la mise en balance des intérêts en présence, pour chacune de celles-ci (ordonnances Hynix Semiconductor/Conseil, point 11 supra, EU:T:2005:57, point 42, et vwd Vereinigte Wirtschaftsdienste/Commission, point 15 supra, EU:T:2009:402, point 24).

17      Ainsi, lorsque le traitement confidentiel est demandé dans l’intérêt de la partie requérante, le président met en balance, pour chaque pièce ou information visée, le souci légitime de cette partie d’éviter que ne soit portée une atteinte sérieuse à ses intérêts et le souci tout aussi légitime des parties intervenantes de disposer des informations nécessaires à l’exercice de leurs droits procéduraux (ordonnances Hynix Semiconductor/Conseil, point 11 supra, EU:T:2005:57, point 44, et vwd Vereinigte Wirtschaftsdienste/Commission, point 15 supra, EU:T:2009:402, point 25).

18      En toute hypothèse, la partie requérante doit envisager, eu égard au caractère contradictoire et public du débat judiciaire, la possibilité que certaines des pièces ou informations secrètes ou confidentielles qu’elle a entendu produire au dossier apparaissent nécessaires à l’exercice des droits procéduraux des parties intervenantes et, par suite, doivent être communiquées à ces derniers (ordonnance Hynix Semiconductor/Conseil, point 11 supra, EU:T:2005:57, point 46).

19      C’est au regard de ces principes qu’il convient d’examiner les demandes de traitement confidentiel présentées dans la présente affaire.

 Sur les éléments pour lesquels la confidentialité a été demandée et à l’encontre desquels Corsica Ferries France n’a pas formulé d’objections

20      Conformément aux principes rappelés aux points 11 et 12 ci-dessus, il y a lieu d’accueillir la demande de traitement confidentiel présentée par la requérante le 9 janvier 2014 pour autant qu’elle porte sur les annexes A 4, A 7, A 8 et A 16 de la requête. Corsica Ferries France n’a, en effet, pas formulé d’objections à l’encontre de la demande de confidentialité de ces annexes.

 Sur les éléments pour lesquels la confidentialité a été demandée et à l’encontre desquels Corsica Ferries France a formulé des objections

21      Corsica Ferries France considère que le traitement confidentiel des données figurant dans l’annexe A 14 de la requête et dans l’annexe 1 de la réplique n’est pas justifié au motif qu’il s’agit de données qui, en application des articles L. 1411‑3 et R. 1411‑7 du code général des collectivités territoriales français (ci-après le « CGCT »), doivent être rendues publiques par délibération de l’assemblée territoriale de Corse (France). Elle ajoute que, dès lors que lesdites données ne sauraient ainsi être considérées comme confidentielles, il en va nécessairement de même des autres données qui s’y rattachent ou qui y renvoient, figurant aux points 78, 100, 163, 170 et 176, sous b), de la requête, à la note en bas de page n° 91 de la requête ainsi que dans les annexes A 5 et A 15 de celle-ci. Par ailleurs, elle relève qu’une obligation générale de transparence pèse sur les États membres dans le domaine des aides d’État sous forme de compensations de service public, ceux-ci devant publier sur Internet un certain nombre d’informations, dont les montants annuels correspondant aux aides octroyées aux entreprises chargées de la gestion d’un service d’intérêt économique général. À cet égard, elle cite l’article 7 de la décision 2012/21/UE de la Commission, du 20 décembre 2011, relative à l’application de l’article 106, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne aux aides d’État sous forme de compensations de service public octroyées à certaines entreprises chargées de la gestion de services d’intérêt économique général (JO 2012, L 7, p. 3) et le point 60 de l’encadrement de l’Union européenne applicable aux aides d’État sous forme de compensations de service public (2011) (JO 2012, C 8, p. 15).

22      Corsica Ferries France fait également valoir que la non-divulgation des données visées au point 21 ci-dessus, en particulier celles relatives au montant de la sous-compensation du service complémentaire (points 163 et 170 de la requête et annexe A 15 de celle-ci), a pour effet de « rendre très difficile si ce n’est impossible » une vérification de la méthode utilisée pour les établir. Partant, elle ne serait pas en mesure d’en contester le bien-fondé.

23      En premier lieu, il convient d’examiner si chacune des pièces et informations dont la confidentialité est contestée revêt un caractère secret ou confidentiel. Il y a lieu de relever, à cet égard, que Corsica Ferries France ne prétend pas que les éléments dont elle conteste la confidentialité ne constituent pas des secrets d’affaires par nature, mais considère que lesdits éléments ne sauraient revêtir un caractère confidentiel au motif qu’ils doivent être rendus publics en application de certaines règles de droit français ou de droit de l’Union.

24      Premièrement, s’agissant des éléments occultés au point 78 de la requête, ceux-ci constituent des secrets d’affaires par nature, en ce qu’ils portent sur des données commerciales relatives à l’utilisation respective des ferries et cargos de la requérante pour le service permanent et les capacités supplémentaires.

25      Toutefois, force est de constater que ces données concernent l’année 2008. Or, il est de jurisprudence constante qu’un traitement confidentiel ne peut qu’exceptionnellement être octroyé à des données qui se rapportent à des faits datant de cinq ans ou plus s’il est démontré que, nonobstant leur caractère historique, elles constituent toujours, en l’espèce, des éléments essentiels de la position commerciale de l’entreprise intéressée (voir ordonnance du 28 janvier 2014, Novartis Europharm/Commission, T‑67/13, EU:T:2014:75, point 53 et jurisprudence citée). En l’absence d’une motivation particulière de la requérante tendant à démontrer que la divulgation des données en cause à Corsica Ferries France, nonobstant leur caractère historique, serait de nature à porter atteinte à ses intérêts commerciaux, il n’y a pas lieu d’accorder un traitement confidentiel à ces données (voir ordonnance Novartis Europharm/Commission, précitée, EU:T:2014:75, point 53 et jurisprudence citée).

26      Deuxièmement, s’agissant des éléments occultés au point 100 de la requête, ceux-ci constituent des secrets d’affaires par nature, en ce qu’ils donnent des informations d’ordre commercial sur le nombre moyen de passagers transportés par la requérante en 2012, en particulier durant la basse saison, par traversée. Ces éléments sont susceptibles de se voir accorder un traitement confidentiel.

27      Troisièmement, l’élément occulté au point 163 de la requête est une évaluation du montant total de la sous-compensation prétendument enregistrée par la requérante au titre du service complémentaire pendant la période 2007-2011. La requérante justifie le traitement confidentiel de ce montant en faisant valoir qu’il découle directement de calculs qu’elle a effectués sur la base de données financières internes. Cette justification ne saurait être accueillie. En effet, les données financières utilisées pour établir le montant occulté ne se déduisent en aucune manière de ce dernier montant, qui est global et porte sur plusieurs années.

28      Quatrièmement, ne sauraient non plus être considérées comme confidentielles les informations occultées figurant à la note en bas de page n° 91 de la requête. En effet, celles-ci ne consistent qu’en une brève explication de la méthode de calcul utilisée par la requérante pour établir ses résultats après charges de capital pour le service complémentaire. Aucun secret d’affaires d’ordre commercial, concurrentiel, financier ou comptable ni aucune information purement interne ne sont divulgués dans cette note en bas de page. En outre, la requérante ne fait valoir aucun motif autre que la simple description très générale du contenu de ladite note en bas de page pour soutenir que celle-ci revêt un caractère confidentiel.

29      Cinquièmement, l’élément occulté au point 170 de la requête est une évaluation du montant total de la sous-compensation prétendument enregistrée par la requérante au titre du service permanent pendant la période 2007-2011. La requérante justifie le traitement confidentiel de ce montant en faisant valoir qu’il a été obtenu sur la base d’une méthode de calcul et de données financières par nature confidentielles. Cette justification ne saurait être accueillie. En effet, la méthode de calcul – à supposer même qu’un tel élément puisse revêtir un caractère secret ou confidentiel – et les données financières utilisées pour établir le montant occulté ne se déduisent en aucune manière de ce dernier montant, qui est global et porte sur plusieurs années.

30      Sixièmement, l’élément occulté au point 176, sous b), de la requête est une évaluation du montant global de la compensation susceptible d’être affecté aux capacités supplémentaires. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 29 ci-dessus, il n’y a pas lieu d’accorder un traitement confidentiel à cette donnée.

31      Septièmement, s’agissant de l’annexe A 5 de la requête, celle-ci comporte plusieurs tableaux, dont certains contiennent des informations qui sont par nature secrètes et d’autres des informations qui présentent un caractère public. Ainsi, ont un tel caractère, et, partant, ne sauraient se voir accorder un traitement confidentiel, les « capacités de référence des navires » ainsi que le montant de la subvention (hors répartition) pour la seconde moitié de 2007 et pour chacune des années suivantes jusqu’en 2013 inclus. En revanche, sont susceptibles de se voir accorder un tel traitement, dès lors qu’elles constituent des secrets d’affaires d’ordre commercial et concurrentiel, les données issues du cahier des charges relatives au nombre de places par ligne pour le service permanent et pour le service complémentaire, les informations relatives à l’utilisation respective des ferries et cargos de la requérante pour le service permanent et le service complémentaire ainsi que les données relatives à la répartition de la subvention par services, sauf, eu égard à leur caractère historique (voir point 25 ci-dessus), dans la mesure où ces différentes données et informations portent sur la seconde moitié de l’année 2007 et sur l’année 2008. Enfin, compte tenu de leur caractère très général, il n’y a pas lieu d’accorder un traitement confidentiel aux informations figurant dans les tableaux intitulés « Pourcentage de réalisation des services » et « Répartition de la subvention service complémentaire ».

32      Huitièmement, s’agissant de l’annexe A 14 de la requête, celle-ci contient, pour la seconde moitié de l’année 2007 et pour chacune des années suivantes jusqu’en 2011 inclus, le compte de résultat analytique de la requérante ventilé par types de navire, la valeur vénale de sa flotte « de service public » ainsi que son compte de résultat analytique ventilé par lignes maritimes entre Marseille (France) et la Corse. Ces différentes données sont par nature secrètes, en ce qu’elles constituent des secrets d’affaires d’ordre commercial, concurrentiel et financier et, partant, sont susceptibles de se voir accorder un traitement confidentiel sauf, compte tenu de leur caractère historique (voir point 25 ci-dessus), dans la mesure où elles portent sur la seconde moitié de l’année 2007 et sur l’année 2008.

33      Neuvièmement, s’agissant de l’annexe A 15 de la requête, celle-ci contient un tableau détaillant le calcul de la sous-compensation prétendument enregistrée par la requérante pendant chacune des années de la période 2007-2011. Ce tableau contient des données financières et stratégiques, commercialement sensibles, et est, par conséquent, susceptible de se voir accorder un traitement confidentiel sauf, eu égard à leur caractère historique (voir point 25 ci-dessus), en ce qui concerne les données portant sur les années 2007 et 2008.

34      Dixièmement, l’annexe 1 de la réplique contient un tableau précisant, pour chaque mois de l’année 2012 et pour janvier 2013, le montant des compensations financières versées à la requérante au titre de la convention de service public ainsi que ses extraits de compte bancaire correspondants. Il s’agit là de données financières commercialement sensibles qui constituent des secrets d’affaires par nature et, par conséquent, sont susceptibles de se voir accorder un traitement confidentiel.

35      L’allégation de Corsica Ferries France selon laquelle les données figurant à l’annexe A 14 de la requête et à l’annexe 1 de la réplique et, partant, les autres données occultées de la requête qui s’y rattachent, ne sauraient avoir un caractère confidentiel au motif que, en application de certaines dispositions du CGCT, elles doivent être rendues publiques, doit être rejetée. Certes, l’article L. 1411-3 du CGCT prévoit que le délégataire de service public doit produire chaque année à l’autorité délégante un rapport comportant notamment les comptes retraçant la totalité des opérations afférentes à l’exécution de la délégation de service public, une analyse de la qualité de service ainsi qu’une annexe permettant à ladite autorité d’apprécier les conditions d’exécution du service public, et que ce rapport doit ensuite faire l’objet d’un examen par l’assemblée délibérante. Toutefois, à supposer même que ledit rapport doive contenir le même type d’informations que celles visées par les demandes de confidentialité de la requérante, il ne se déduit ni de cette disposition, ni de l’article R. 1411‑7 du CGCT, également cité par Corsica Ferries France, que, comme le prétend cette dernière, il est rendu public par « délibération » de l’assemblée délibérante compétente, en l’occurrence l’assemblée territoriale de Corse. Il convient d’ajouter que, si l’article L. 1411-13 du CGCT – au demeurant non invoqué par Corsica Ferries – dispose que, dans les communes de 3 500 habitants et plus, les documents relatifs à l’exploitation des services publics délégués, qui doivent être remis à la commune en application de conventions de délégation de service public, sont également mis à la disposition du public, il exclut expressément de cette mise à disposition les documents mentionnés à l’article 6 de la loi française n° 78-753, du 17 juillet 1978, portant diverses mesures d’amélioration des relations entre l’administration et le public et diverses dispositions d’ordre administratif, social et fiscal (JORF du 18 juillet 1978, p. 2851). Or, cette dernière disposition prévoit précisément que ne sont communicables qu’à l’intéressé, notamment, les documents administratifs dont la communication porterait atteinte au secret en matière commerciale et industrielle.

36      S’agissant de l’allégation de Corsica Ferries France selon laquelle l’article 7 de la décision 2012/21 et le point 60 de l’encadrement de l’Union européenne applicable aux aides d’État sous forme de compensations de service public obligent l’État membre concerné à publier sur Internet ou par d’autres moyens appropriés les montants annuels correspondant à l’aide octroyée à l’entreprise, il suffit de relever qu’il a déjà été décidé, au point 31 ci-dessus, que, en l’espèce, cette dernière information ne pouvait se voir accorder un traitement confidentiel.

37      En second lieu, s’agissant de la mise en balance des intérêts en présence, force est de constater que Corsica Ferries France n’avance de motif précis justifiant en quoi les informations dont elle conteste le caractère confidentiel seraient nécessaires à l’exercice de ses droits procéduraux qu’en ce qui concerne les éléments occultés aux points 163 et 170 de la requête et l’annexe A 15 de celle-ci. Les éléments occultés aux points 163 et 170 de la requête ne pouvant se voir accorder un traitement confidentiel (voir points 27 et 29 ci-dessus), il n’y a lieu de procéder à une telle mise en balance que par rapport à l’annexe A 15 de la requête, dont certains passages ont été considérés comme étant par nature confidentiels (voir point 33 ci-dessus). À cet égard, il convient de considérer que les éléments relatifs au calcul de la sous-compensation prétendument enregistrée par la requérante pendant chacune des années de la période 2007-2011, contenus dans cette annexe, sont effectivement nécessaires pour permettre à Corsica Ferries France d’utilement faire valoir ses droits et exposer sa thèse devant le Tribunal étant donné que la question de ladite sous-compensation est au centre de plusieurs griefs invoqués par la requérante au soutien de sa demande d’annulation de la décision C (2013) 1926 final. Dans ces circonstances, il y a lieu, au titre de la mise en balance des intérêts en présence, de rejeter, dans son intégralité, la demande de confidentialité de l’annexe A 15 de la requête.

Par ces motifs,

LE PRÉSIDENT DE LA SIXIÈME CHAMBRE DU TRIBUNAL

ordonne :

1)      Il est fait droit aux demandes de traitement confidentiel, à l’égard de Corsica Ferries France SAS, des éléments suivants :

–        l’annexe A 4 de la requête ;

–        l’annexe A 7 de la requête ;

–        l’annexe A 8 de la requête ;

–        l’annexe A 16 de la requête ;

–        les éléments occultés au point 100 de la requête ;

–        l’annexe A 5 de la requête, en ce qui concerne les données figurant dans les tableaux intitulés « Cahier des charges service permanent », « Cahier des charges service complémentaire », « Service permanent effectué par les cargos », « Service complémentaire effectué par les cargos », « Service permanent effectué par les ferries » « Service complémentaire effectué par les ferries » et, à l’exception des indications relatives au montant annuel de la subvention (hors répartition), « Répartition de la subvention par services », sauf dans la mesure où ces différentes données portent sur la seconde moitié de l’année 2007 et sur l’année 2008 ;

–        l’annexe A 14 de la requête, sauf dans la mesure où les données qui y figurent portent sur la seconde moitié de l’année 2007 et sur l’année 2008 ;

–        l’annexe 1 de la réplique.

2)      Les demandes de traitement confidentiel sont rejetées pour le surplus.

3)      Une version non confidentielle des pièces du dossier conforme aux points 1 et 2 du présent dispositif, communiquée par Société nationale maritime Corse Méditerranée (SNCM) dans le délai imparti par le greffier, sera signifiée par les soins de celui-ci à Corsica Ferries France.

4)      Un délai sera imparti à Corsica Ferries France pour présenter un mémoire en intervention.

5)      

6)      Les dépens sont réservés.

Fait à Luxembourg, le 3 octobre 2014.

Le greffier

 

       Le président

E.  Coulon

 

       S. Frimodt Nielsen


* Langue de procédure : le français.