Language of document : ECLI:EU:T:2021:699

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (dixième chambre)

13 octobre 2021 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne verbale Sedus ergo+ – Marques nationale et internationale verbales antérieures ERGOPLUS – Motif relatif de refus – Absence de risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001] »

Dans l’affaire T‑436/20,

Sedus Stoll AG, établie à Dogern (Allemagne), représentée par Mes M. Goldmann et J. Thomsen, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par MM. M. Fischer, D. Hanf et M. Eberl, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Wolfgang Kappes, demeurant à Bochum (Allemagne), représenté par Mes J. Schneiders, N. Gottschalk et B. Schneiders, avocats,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’EUIPO du 12 mars 2020 (affaire R 2194/2018‑1), relative à une procédure d’opposition entre M. Kappes et Sedus Stoll,

LE TRIBUNAL (dixième chambre),

composé de MM. A. Kornezov, président, G. Hesse et D. Petrlík (rapporteur), juges,

greffier : Mme R. Ūkelytė, administratrice,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 10 juillet 2020,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 22 septembre 2020,

vu le mémoire en réponse de l’intervenant déposé au greffe du Tribunal le 30 septembre 2020,

à la suite de l’audience du 1er juillet 2021,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 21 octobre 2016, la requérante, Sedus Stoll AG, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal Sedus ergo+ (ci-après la « marque demandée »).

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 10 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Meubles médicaux, en particulier, chaises, fauteuils et tables médicales pour le maintien de la colonne vertébrale ; chaises et fauteuils de stimulation thérapeutique des muscles et du corps ; meubles à usage thérapeutique, sanitaire et prophylactique ».

4        La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques de l’Union européenne no 2016/239, du 16 décembre 2016.

5        Le 15 décembre 2017, l’intervenant, M. Wolfgang Kappes, a formé opposition, au titre de l’article 41 du règlement n° 207/2009 (devenu article 46 du règlement 2017/1001), à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        Cette opposition était fondée sur les marques antérieures suivantes :

–        la marque verbale allemande ERGOPLUS, enregistrée sous le numéro 1116230, pour les produits « meubles, en particulier, meubles de bureau », relevant de la classe 20 (ci-après la « marque antérieure ») ;

–        l’enregistrement international n° 518842, enregistré le 5 janvier 1988, de la marque verbale ERGOPLUS, désignant l’Autriche, la France et le Benelux et enregistrée, pour les produits « meubles, en particulier, meubles de bureau », relevant de la classe 20.

7        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001].

8        Par décision du 8 octobre 2018, la division d’opposition de l’EUIPO a rejeté l’opposition dans son intégralité, estimant qu’il n’existait pas de risque de confusion, aux motifs que la marque antérieure avait un caractère distinctif extrêmement faible et que son caractère distinctif élevé n’avait pas été suffisamment démontré, les signes à comparer n’étant pas suffisamment similaires pour créer un risque de confusion.

9        Le 9 novembre 2018, l’intervenant a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, contre la décision de la division d’opposition.

10      Par décision du 12 mars 2020 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’EUIPO a annulé la décision de la division d’opposition, au motif qu’il existait un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001].

 Conclusions des parties

11      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        rejeter le recours formé contre la décision de la division d’opposition ;

–        condamner, d’une part, l’EUIPO aux dépens de la procédure devant le Tribunal et, d’autre part, l’intervenant aux dépens de la procédure de recours devant l’EUIPO.

12      L’EUIPO et l’intervenant concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens de la procédure devant le Tribunal.

 En droit

 Observations préliminaires

13      À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que la date d’introduction de la demande d’enregistrement en cause est déterminante aux fins de l’identification des dispositions matérielles applicables du règlement no 207/2009 et du règlement 2017/1001 (voir, en ce sens, arrêt du 18 juin 2020, Primart/EUIPO, C‑702/18 P, EU:C:2020:489, point 2 et jurisprudence citée). En l’espèce, la demande d’enregistrement de la marque concernée a été introduite le 23 juillet 2015, à savoir sous l’empire du règlement no 207/2009. Par conséquent, les faits de l’espèce sont régis par les dispositions matérielles de ce règlement.

14      Par suite, en ce qui concerne les règles de fond, il convient d’entendre les références faites à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 par la chambre de recours dans la décision attaquée, ainsi que par la requérante, l’EUIPO et l’intervenant dans leurs mémoires respectifs, comme visant l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, les deux dispositions ayant une teneur identique.

15      À l’appui de son recours, la requérante soulève un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001], en ce que la chambre de recours a conclu dans la décision attaquée qu’il existait un risque de confusion s’agissant des marques en conflit et concernant des produits de la classe 10 et des produits de la classe 20. À cet égard, elle soutient, en substance, que ladite chambre a commis des erreurs s’agissant des constatations ayant trait au niveau d’attention du public pertinent, à la similitude des produits et des signes concernés, à l’absence de caractère distinctif de la marque antérieure ainsi qu’au caractère dominant et distinctif des éléments verbaux constitutifs de la marque demandée.

16      L’EUIPO et l’intervenant contestent les arguments de la requérante.

17      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

18      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001], un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Ces deux conditions sont cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

 Sur le niveau dattention du public pertinent

19      Aux points 20 et 21 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté, en substance, que, puisque les produits en cause s’adressent tant au grand public qu’à des entreprises disposant de compétences professionnelles particulières ou spécialisées et que le territoire pertinent est l’Allemagne, le public pertinent est constitué de ces deux groupes de personnes de cet État membre. Ensuite, la chambre de recours a considéré que le degré d’attention de ce public variait d’un niveau normal à un niveau élevé, en fonction du prix respectif des produits concernés, mais que, afin d’apprécier le risque de confusion, il convenait de prendre en considération le public ayant le niveau d’attention le moins élevé, à savoir le niveau normal d’attention.

20      Les parties ne contestent pas la définition du public pertinent ni celle du territoire pertinent.

21      En revanche, la requérante conteste l’appréciation de la chambre de recours au motif que celle-ci a méconnu le fait que, en ce qui concerne les produits de la classe 10 désignés par la marque demandée, à savoir les « meubles médicaux » et les « meubles à usage thérapeutique, sanitaire et prophylactique », le niveau d’attention du public pertinent est très élevé, l’achat de meubles étant, en règle générale, précédé d’une réflexion approfondie et conçu comme un investissement à long terme. Elle relève que le prix n’est qu’un des critères qui permettent d’apprécier le niveau d’attention lors de l’achat d’un produit, la catégorie du produit, l’importance de la décision d’achat, la périodicité des achats ainsi que des considérations fonctionnelles et esthétiques étant également importantes. De telles considérations vaudraient encore plus pour les meubles de la classe 10 désignés par la marque demandée, dès lors qu’il s’agit de produits liés à la santé pour lesquels le public pertinent fait preuve d’un degré d’attention particulièrement élevé.

22      L’EUIPO et l’intervenant considèrent que les constatations de la chambre de recours sur le degré d’attention du public pertinent ne sont entachées d’aucune erreur. L’intervenant estime que la catégorie des meubles médicaux comprend également des produits bon marché. Par conséquent, il conviendrait de fonder l’appréciation du risque de confusion sur le public faisant preuve de l’attention la plus faible.

23      Selon la jurisprudence, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte, en tant que public pertinent, les consommateurs moyens des produits ou des services en cause, lesquels sont censés être normalement informés et raisonnablement attentifs et avisés. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction des produits ou des services en cause [voir arrêts du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, EU:T:2007:46, point 42 et jurisprudence citée, et du 17 février 2017, Construlink/EUIPO – Wit-Software (GATEWIT), T‑351/14, non publié, EU:T:2017:101, point 46].

24      Dans un cas où le public pertinent est composé, pour l’ensemble des produits ou services désignés par les marques en conflit, tant de consommateurs faisant partie du grand public que de professionnels, le degré d’attention le moins élevé du consommateur moyen de l’un de ces deux groupes doit être pris en considération [voir arrêts du 15 juillet 2011, Ergo Versicherungsgruppe/OHMI – Société de développement et de recherche industrielle (ERGO Group), T‑221/09, non publié, EU:T:2011:393, point 21, et du 28 novembre 2019, Soundio/EUIPO – Telefónica Germany (Vibble), T‑665/18, non publié, EU:T:2019:825, point 24 ; voir également, en ce sens, arrêt du 15 février 2011, Yorma’s/OHMI – Norma Lebensmittelfilialbetrieb (YORMA’S), T‑213/09, non publié, EU:T:2011:37, point 25].

25      En l’espèce, il est constant entre les parties que les produits en cause s’adressent à la fois au grand public et aux professionnels et que le grand public fait preuve, en général, d’un degré d’attention moins élevé que les professionnels.

26      Par conséquent, il convient de prendre en considération le niveau d’attention dont fait preuve le consommateur moyen faisant partie du grand public.

27      La marque demandée désigne, notamment, des « meubles médicaux » et des « meubles à usage thérapeutique, sanitaire et prophylactique », qui constituent des éléments d’ameublement bien spécifiques. À ce titre, ils entrent dans la classe 10, qui englobe un ensemble de produits à finalité médicale ou chirurgicale, parmi lesquels figure le « mobilier spécial à usage médical ».

28      Bien que les produits désignés par la marque demandée puissent être destinés au grand public, leur achat n’est pas régulier mais, au contraire, très occasionnel, de tels produits étant destinés à être utilisés pendant une période prolongée [voir, par analogie, arrêt du 27 février 2019, Aytekin/EUIPO – Dienne Salotti (Dienne), T‑107/18, non publié, EU:T:2019:114, point 24]. Un tel achat répond, de surcroît, à des considérations liées à la santé des consommateurs, ce qui implique, en règle générale, un degré d’attention accru de la part du consommateur moyen faisant partie du grand public.

29      Si l’intervenant soutient que, parmi les produits désignés par la marque demandée, figureraient des meubles bon marché, tels que des « armoires à pharmacie » ou des « meubles à fonction orthopédique », il n’apporte pas d’élément de nature à démontrer, d’une part, que des meubles d’usage courant comme les « armoires à pharmacie » relèveraient de la catégorie du « mobilier spécial à usage médical », faisant partie de la classe 10, ou des différents produits visés par cette marque, et, d’autre part, que des « meubles à fonction orthopédique » seraient des produits d’usage courant auxquels le consommateur moyen faisant partie du grand public n’apporterait qu’un niveau d’attention normal. Bien au contraire, s’agissant des « armoires à pharmacie », il convient de relever, comme l’a fait l’EUIPO lors de l’audience, que de tels éléments de mobilier ne sont pas utilisés pour effectuer un traitement thérapeutique ou des soins et qu’ils ne relèvent donc pas de la catégorie des « meubles médicaux », faisant partie de la classe 10.

30      Dans ces conditions, il convient de constater que le niveau d’attention du consommateur moyen, qui doit être pris en compte aux fins de l’examen du risque de confusion, doit être considéré en l’espèce comme élevé. Par conséquent, la chambre de recours a commis une erreur de droit en ayant considéré que le niveau d’attention dudit consommateur moyen était de normal à élevé, en fonction du prix respectif des produits, et qu’il convenait, dès lors, de prendre en considération le niveau d’attention le moins élevé, à savoir un niveau normal.

 Sur la comparaison des produits en cause

31      La requérante ne conteste pas la constatation de la chambre de recours selon laquelle les produits compris dans la classe 10, visés par la marque demandée, et les produits couverts par la marque antérieure, relevant de la classe 20, sont similaires. Cependant, elle considère que la chambre de recours a commis une erreur en s’abstenant de préciser le degré exact de similitude entre ces produits et de ne pas avoir reconnu ce degré comme faible.

32      Parmi les « meubles », faisant partie de la classe 20 et visés par la marque antérieure, et parmi les « meubles médicaux », faisant partie de la classe 10 et visés par la marque demandée, certains produits se chevauchent, notamment au regard de leurs qualités ergonomiques ou du fait qu’ils ont la même destination et peuvent être proposés par les mêmes fabricants et à travers les mêmes circuits de distribution.

33      Il en découle que ces derniers produits présentent un degré moyen de similitude.

34      À cet égard, c’est à tort que la chambre de recours s’est bornée à constater que les produits en cause étaient similaires sans préciser que cette similitude était d’un degré moyen, une telle constatation étant d’ailleurs vague et manquant en précision, en ce qu’elle ne permet ni aux parties, ni au Tribunal de comprendre si la chambre de recours s’est fondée sur l’existence d’un degré de similitude faible, moyen ou élevé.

 Sur la comparaison des signes en conflit

35      Aux points 26 à 34 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que le signe verbal « Sedus ergo+ » de la marque demandée et le signe verbal « ERGOPLUS » de la marque antérieure sont similaires.

36      En premier lieu, la requérante soutient que la chambre de recours a commis une erreur de droit dans l’examen des éléments distinctifs et dominants de ces marques. D’une part, elle n’aurait pas tiré des conclusions appropriées du caractère distinctif extrêmement faible des éléments « ERGOPLUS », dans la marque antérieure, et « ergo+ », dans la marque demandée. D’autre part, elle n’aurait pas relevé le caractère distinctif et dominant de l’élément « Sedus », dans la marque demandée. En second lieu, la chambre de recours aurait commis une erreur de droit dans l’examen de la similitude des signes en conflit.

37      L’EUIPO et l’intervenant contestent les arguments de la requérante. Ils font valoir que les signes en conflit présentent un degré de similitude supérieur à une faible similitude, qu’il convient d’attribuer à la marque antérieure un certain caractère distinctif, aussi faible soit-il, que l’élément « Sedus » de la marque demandée correspond à la dénomination sociale de la requérante que le public pertinent reconnaît comme telle et auquel le consommateur moyen n’attachera pas d’attention particulière, et que la marque antérieure a été reprise telle quelle, au moins phonétiquement et conceptuellement, dans la marque demandée.

38      Au vu des arguments de la requérante, il importe, au préalable, d’examiner le grief portant sur les éléments distinctifs et dominants des marques en conflit.

 Sur les éléments distinctifs des signes en conflit

39      Selon la jurisprudence, deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents, à savoir les aspects visuel, phonétique et conceptuel [arrêts du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, EU:T:2002:261, point 30, et du 15 décembre 2010, Novartis/OHMI – Sanochemia Pharmazeutika (TOLPOSAN), T‑331/09, EU:T:2010:520, point 43].

40      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des marques en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par celles-ci. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

41      De même, cette appréciation globale doit être effectuée en tenant compte, notamment, des éléments distinctifs et dominants des marques en conflit (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée). Dans le cadre de cette appréciation, la circonstance que le niveau de caractère distinctif de chacun des éléments de ces marques soit différent revêt une importance particulière.

42      Aux fins d’apprécier le niveau de caractère distinctif de ces éléments, il y a lieu d’examiner l’aptitude plus ou moins grande de ceux-ci à contribuer à identifier les produits ou les services pour lesquels la marque a été enregistrée ou demandée comme provenant d’une entreprise déterminée, et donc à distinguer ces produits ou ces services de ceux d’autres entreprises. Lors de cette appréciation, il convient de prendre en considération notamment les qualités intrinsèques des éléments en cause au regard de la question de savoir si ceux-ci sont ou non dénués de tout caractère descriptif des produits ou des services pour lesquels la marque a été enregistrée ou demandée [voir arrêts du 3 septembre 2010, Companhia Muller de Bebidas/OHMI – Missiato Industria e Comercio (61 A NOSSA ALEGRIA), T‑472/08, EU:T:2010:347, point 47 et jurisprudence citée, et du 10 mars 2021, Kerry Luxembourg/EUIPO – Ornua (KERRYMAID), T‑693/19, non publié, EU:T:2021:124, point 53].

43      Par ailleurs, l’appréciation de la similitude des marques verbales en conflit doit également prendre en compte le fait que le consommateur prête généralement une plus grande attention au début d’une telle marque qu’à sa fin, la partie initiale d’une marque ayant normalement, tant sur le plan visuel que sur le plan phonétique, un effet plus fort que la partie finale de celle-ci [voir arrêts du 27 février 2019, Aytekin/EUIPO – Dienne Salotti (Dienne), T‑107/18, non publié, EU:T:2019:114, point 47, et du 26 mars 2020, Conlance/EUIPO – LG Electronics (SONANCE), T‑343/19, non publié, EU:T:2020:124, point 39].

44      Il ressort de ce qui précède que lorsqu’un signe contient un élément verbal faiblement distinctif, qui est commun au signe auquel le premier signe doit être comparé, et un autre élément qui est davantage susceptible d’attirer l’attention des consommateurs, la présence dudit élément commun dans les signes en conflit ne saurait, à elle seule, les rendre similaires [voir arrêt du 19 novembre 2014, Evonik Oil Additives/OHMI – BRB International (VISCOTECH), T‑138/13, non publié, EU:T:2014:973, point 60]. Il en va notamment ainsi lorsque cet autre élément est susceptible d’attirer l’attention des consommateurs en raison de sa position initiale dans la marque demandée [voir, en ce sens, arrêt du 28 mai 2020, Workspace Group/EUIPO – Technopolis Holding (UMA WORKSPACE), T‑506/19, non publié, EU:T:2020:220, point 38].

45      En l’espèce, la chambre de recours a constaté, au point 26 de la décision attaquée, que les marques en conflit n’avaient pas d’élément dominant Au point 28 de cette décision, elle a estimé que, dans la marque demandée, composée de deux éléments, « Sedus » et « ergo+ », ce dernier élément « conserv[ait] sa propre signification distinctive », bien que celle-ci soit faible. Enfin, au point 30 de ladite décision, dans le cadre de l’appréciation de la similitude visuelle des signes en conflit, elle a constaté que l’élément « Sedus » n’occupait pas une position dominante dans la marque demandée.

46      Au regard de ces considérations, lors de l’examen de l’existence d’un risque de confusion, la chambre de recours a considéré, aux points 47 et 48 de la décision attaquée, d’une part, que la marque antérieure, à savoir ERGOPLUS, se présentait presque à l’identique dans l’élément « ergo+ », figurant dans la marque demandée, « un produit désigné par “ergo+” pouvant donc parfaitement être considéré comme se référant au fabricant de “ERGOPLUS” ». D’autre part, elle a estimé que l’ajout, dans la marque demandée, devant l’élément « ergo+ » de l’élément « Sedus », à savoir, selon elle, la raison sociale de la requérante, n’apportait pas « une modification suffisante pour que le terme d’ensemble détourne l’attention [du public pertinent] de l’élément “ERGOPLUS/ergo+” ». Elle a précisé que cet ajout ne modifiait pas l’impression d’ensemble produite par la marque demandée de manière déterminante, étant donné que, contrairement à ce qu’avait considéré la division d’opposition, « ergo+ » avait déjà acquis une signification distincte propre, observant par ailleurs que la marque antérieure était intégrée presque à l’identique dans la marque demandée.

47      Il découle de ces considérations que la chambre de recours a refusé d’accorder une importance plus élevée à l’élément « Sedus » et, en réalité, a traité cet élément et l’élément « ergo+ » sur un pied d’égalité, voire accordé une importance moindre à l’élément « Sedus ».

48      Ce faisant, en premier lieu, la chambre de recours n’a pas suffisamment tenu compte de la circonstance que l’élément « Sedus » est placé en début de la marque demandée et que le consommateur prête généralement une plus grande attention à un élément ainsi placé qu’à celui figurant à la fin du signe, comme l’est, en l’espèce, « ergo+ ».

49      En second lieu, la chambre de recours n’a pas suffisamment pris en compte la différence de niveau de caractère distinctif des différents éléments de la marque demandée.

50      À cet égard, l’élément largement commun aux marques en conflit, à savoir « ergo+ », dans la marque demandée, et « ERGOPLUS », dans la marque antérieure, a – ainsi que la chambre de recours l’a reconnu aux points 27 et 34 de la décision attaquée – un faible niveau de caractère distinctif, lequel niveau est largement inférieur au niveau normal de caractère distinctif. En effet, cet élément renvoie à des notions telles que l’ergonomie ou un avantage et représente une allusion aux meubles pour lesquels l’ergonomie est, en règle générale, censée constituer une qualité importante. De plus, le qualificatif « PLUS/+ », qui complète la référence à l’ergonomie, doit être compris comme signifiant un supplément d’ergonomie.

51      À cet égard, si l’EUIPO fait valoir que la circonstance que les différents éléments dont se compose une marque peuvent présenter un caractère distinctif extrêmement faible, voire inexistant, ne signifie pas que la combinaison de ces éléments présente nécessairement aussi un caractère distinctif faible, voire inexistant, il convient de souligner que, en l’espèce, les termes « ERGO » et « +/PLUS », appréciés de manière combinée, ne présentent tout au plus, pour les motifs énoncés au point 50 ci-dessus, qu’un faible caractère distinctif par rapport aux produits auxquels ils se réfèrent.

52      Sur ce point, il n’existe aucun écart perceptible entre l’élément de la marque demandée « ergo+ » et la simple somme des parties qui le composent. Ainsi, la combinaison de celles-ci ne présente pas de caractère inhabituel par rapport auxdits produits que cette marque désigne et ne crée pas une impression suffisamment éloignée de celle produite par la simple réunion des indications apportées par ces parties.

53      De même, l’intervenant ne saurait se borner à soutenir que le signe ERGOPLUS a acquis un caractère distinctif normal, voire élevé, après l’usage qui en a été fait sur le marché. En effet, si l’intervenant aurait pu, en application de l’article 173, paragraphe 3 du règlement de procédure du Tribunal, soulever un moyen de cette nature, il n’a pas présenté devant le Tribunal d’élément concret qui démontrait une telle circonstance permettant de contester de manière étayée la conclusion de la chambre de recours selon laquelle il n’avait pas démontré le caractère distinctif accru par l’usage de la marque antérieure.

54      Dans ces conditions, il convient de constater que l’élément largement commun aux marques en conflit, à savoir « ergo+ », dans la marque demandée, et « ERGOPLUS », dans la marque antérieure, revêt un faible caractère distinctif.

55      En revanche, ainsi que l’EUIPO l’a reconnu lors de l’audience, l’élément « Sedus » doit être regardé comme doté d’un caractère distinctif normal. En effet, pour le public pertinent, à savoir le grand public allemand, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, un tel élément est dépourvu de signification, sa proximité avec les termes « sedere » ou « sedes », de langue latine et signifiant « être assis » et « siège », ne pouvant être reconnue par ce public, dès lors que ces termes sont inusités dans le territoire pertinent.

56      Or, dans la décision attaquée, la chambre de recours n’a pas fait référence au niveau de caractère distinctif de l’élément « Sedus », ce que l’EUIPO reconnaît dans son mémoire en réponse, et donc encore moins au caractère distinctif normal de cet élément dont elle n’a ainsi pas tenu compte, comme cela ressort des considérations évoquées aux points 46 et 47 ci-dessus.

57      À cet égard, l’EUIPO soutient, en substance, que ce serait à juste titre que la chambre de recours n’a pas pris en considération cet élément au motif qu’il correspond à la dénomination sociale de la requérante, ce qui serait connu du public pertinent, selon les déclarations de cette dernière.

58      Or, l’EUIPO n’explique pas les raisons pour lesquelles l’utilisation de la dénomination sociale du titulaire d’une marque en tant qu’élément de celle-ci devrait conduire à l’affaiblissement du caractère distinctif de cette marque. En effet, une telle utilisation peut être susceptible de renforcer l’aptitude de ladite marque à identifier les produits ou les services pour lesquels cette dernière a été enregistrée ou demandée comme provenant d’une entreprise déterminée, et donc à distinguer ces produits ou ces services de ceux des autres entreprises.

59      Par ailleurs, il ne ressort ni de la décision attaquée, laquelle ne s’est pas prononcée sur ce point, ni des pièces du dossier soumis au Tribunal, que ledit élément « Sedus » serait connu du public pertinent, à savoir le grand public allemand, comme désignant la requérante et qu’une telle circonstance aurait pour conséquence d’affaiblir le caractère distinctif de la marque demandée. Il en va d’autant plus ainsi que l’élément « Sedus » de cette marque ne constitue qu’une partie de la dénomination sociale de la requérante, qui s’énonce Sedus Stoll AG. Dans ces conditions, l’argument de l’EUIPO doit donc être écarté.

60      Il résulte de ce qui précède que, dans la décision attaquée, la chambre de recours a commis une double erreur de droit lors de l’appréciation du caractère distinctif des éléments de la marque demandée. D’une part, elle n’a pas tenu suffisamment compte du fait que, en raison de sa position initiale dans la marque demandée, l’élément « Sedus » était davantage susceptible d’attirer l’attention des consommateurs que l’élément « ergo+ ». D’autre part, elle n’a pas tenu dûment compte de la différence entre les niveaux de caractère distinctif des éléments « Sedus » et « ergo+ ».

 Sur la comparaison des signes sur les plans visuel, phonétique et conceptuel

61      Aux points 29 à 31 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que les signes en conflit présentaient une « certaine » similitude visuelle en raison de la présence dans chacun d’eux de l’élément « ERGO ». S’agissant du degré de similitude phonétique, elle a constaté, aux points 32 et 33 de cette décision, que celui-ci était « plus que faible », dès lors que la prononciation des signes en conflit concordait par les trois syllabes « ER-GO-PLUS » et ne différait que par les deux syllabes « SE-DUS ». En ce qui concerne le plan conceptuel, la chambre de recours a conclu, au point 34 de ladite décision, que les éléments « ERGOPLUS » et « ergo+ », respectivement contenus dans chacun des deux signes, impliquaient une similitude conceptuelle « plus que faible » entre ceux-ci, en raison de l’allusion à l’ergonomie et à un avantage.

62      La requérante soutient que les signes en conflit ne sont pas similaires. En premier lieu, elle fait valoir que les constatations opérées à cet égard dans la décision attaquée sont vagues, notamment s’agissant de la similitude visuelle desdits signes, pour laquelle il n’est pas possible de savoir si la chambre de recours s’est fondée sur une faible similitude visuelle ou sur une similitude normale. En second lieu, elle considère que, l’élément « ERGOPLUS » ne présentant qu’un caractère distinctif extrêmement faible, il ne saurait suffire à établir une similitude pertinente, étant relevé au surplus que le signe de la marque demandée comporte un élément dominant, à savoir l’élément « Sedus », la similitude visuelle, phonétique et conceptuelle entre les signes « ERGOPLUS » et « Sedus ergo+ » n’étant, au mieux, que faible.

63      L’EUIPO et l’intervenant contestent les arguments de la requérante. S’agissant de la comparaison opérée sur le plan conceptuel, l’intervenant fait valoir qu’il existe une égalité conceptuelle entre les signes en conflit et souligne que l’élément « Sedus » correspond à la dénomination sociale de la requérante, cette dénomination devant passer, en règle générale, à l’arrière-plan dans l’impression d’ensemble produite par cette marque et le public pertinent oubliant une telle dénomination, qu’il perçoit comme telle.

64      Il y a lieu de rappeler que le signe de la marque demandée consiste en deux éléments verbaux, à savoir « Sedus » et « ergo+ », alors que celui de la marque antérieure est constitué d’un seul élément verbal, à savoir « ERGOPLUS ».

65      En ce qui concerne la comparaison visuelle, il existe une similitude entre les signes en cause, en ce que ceux-ci coïncident par l’élément « ergo ». Pour autant, ce dernier ne contient que quatre des huit lettres du signe de la marque antérieure et ne correspond qu’à quatre des dix signes dont est constituée la marque demandée. En outre, les signes en conflit diffèrent par l’élément verbal « Sedus », qui est placé en début de la marque demandée et revêt un caractère distinctif plus élevé que l’élément « ergo ». Ainsi, il est susceptible d’attirer davantage l’attention du public pertinent que ce dernier élément, tout en ayant également une aptitude supérieure à contribuer à identifier les produits désignés par la marque demandée. Enfin, les signes en conflit diffèrent, de même, par l’opérateur numérique « + », placé à la fin de cette marque.

66      Compte tenu des considérations énoncées aux points 49 à 59 et au point 65 ci‑dessus, il convient ainsi de constater qu’il existe une faible similitude visuelle entre les signes en cause. Par conséquent, la chambre de recours a constaté à tort qu’il existait une « certaine » similitude entre les signes en conflit sur le plan visuel, une telle constatation étant d’ailleurs vague et manquant en précision pour les raisons exposées au point 34 ci-dessus.

67      S’agissant de la comparaison phonétique des signes en cause, c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a constaté que la prononciation de ces signes coïncidait par les trois syllabes « er », « go » et « plus », ressortant desdits signes, qu’elle différait par les deux syllabes initiales de la marque demandée, à savoir « se » et « dus », et que la marque antérieure était entièrement comprise phonétiquement dans la marque demandée.

68      Dans ces conditions, les signes en cause présentent un degré moyen de similitude phonétique. À cet égard, la constatation de la chambre de recours selon laquelle cette similitude était « plus que faible » manque de clarté pour les raisons exposées au point 58 ci-dessus.

69      En ce qui concerne la comparaison conceptuelle, la chambre de recours a focalisé son analyse sur l’élément verbal « ERGOPLUS », dans la marque antérieure, ou « ergo+ », dans la marque demandée, en relevant que cet élément, doté d’un caractère distinctif extrêmement faible, constituait une allusion à l’ergonomie et à un avantage, ce qui impliquait une similitude conceptuelle « plus que faible » entre les signes en cause.

70      En se fondant, au point 34 de la décision attaquée, sur le fait que l’élément verbal commun aux signes en cause, à une légère différence près, renvoyait aux notions d’ergonomie et d’avantage, et en observant, à ce même point, que la marque demandée, dans son ensemble, n’avait pas de signification pour le public pertinent, la chambre de recours n’a pas pris en considération la double circonstance que l’élément « Sedus », figurant dans ce signe, ne revêt pas une signification susceptible d’être comprise par ce public et qu’il est placé en début dudit signe. Or, cette double circonstance a pour conséquence d’influer sur la comparaison des signes en cause, au motif que la perception d’un élément verbal non compréhensible par le public pertinent et placé en début d’un des signes à comparer crée une différence sur le plan conceptuel.

71      Cette conclusion n’est pas remise en cause, pour les motifs exposés au point 58 ci-dessus, par l’argument selon lequel l’élément « Sedus » serait la dénomination sociale de la requérante et qu’il serait reconnu comme tel par le public pertinent, ni l’une ni l’autre de ces allégations n’étant établie.

72      Dès lors, la chambre de recours aurait dû considérer que les signes en cause présentaient un faible degré de similitude sur le plan conceptuel, et non une similitude « plus que faible », une telle constatation étant encore une fois vague et manquant en précision.

 Sur le risque de confusion

73      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74].

74      Par ailleurs, le risque de confusion est d’autant plus élevé que le caractère distinctif de la marque antérieure s’avère important (arrêt du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, EU:C:1997:528, point 24).

75      En outre, afin d’apprécier le degré de similitude existant entre les marques concernées, il faut déterminer leur degré de similitude visuelle, phonétique et conceptuelle et, le cas échéant, évaluer l’importance qu’il convient d’attacher à ces différents éléments, en tenant compte de la catégorie de produits ou services en cause et des conditions dans lesquelles ils sont commercialisés (voir arrêt du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, EU:C:1999:323, point 27).

76      En l’espèce, la chambre de recours a conclu, au regard des considérations rappelées aux points 45 et 46 ci-dessus, qu’un risque de confusion ne pouvait être exclu pour le public germanophone faisant preuve d’un degré d’attention moyen, y compris en tenant compte du faible caractère distinctif de la marque antérieure pour le mobilier et les produits similaires.

77      La requérante conteste cette conclusion en se fondant sur le caractère distinctif extrêmement faible de la marque antérieure ERGOPLUS et sur le caractère dominant ou, pour le moins, distinctif à un degré normal de l’élément verbal « Sedus », dans la marque demandée.

78      L’EUIPO fait valoir que l’absence de constatation du caractère dominant de l’élément verbal « Sedus » dans la marque demandée n’a pas d’incidence sur la reconnaissance de la position distinctive conservée dans celle-ci par l’élément verbal « ergo+ », qui doit se voir accorder un minimum de caractère distinctif et qui constitue, dans ladite marque, un élément autonome et non négligeable. À cet égard, il précise qu’il conviendrait de ne pas toujours refuser à une marque antérieure ayant un faible caractère distinctif l’aptitude à occuper une position distinctive autonome dans une marque postérieurement demandée en cas de reprise quasiment intégrale de la marque antérieure. Il considère que c’est à juste titre que la chambre de recours a pris en considération le fait que la marque demandée reprend la marque antérieure quasiment à l’identique en lui ajoutant la raison sociale de la requérante, qui semble connue de la majeure partie du public pertinent.

79      L’intervenant considère que la chambre de recours n’a commis aucune erreur. À cet égard, il se fonde, quant à lui, sur le constat de l’identité des produits désignés par les marques en conflit ainsi que sur la similitude phonétique et conceptuelle d’un degré élevé entre les signes en conflit, l’attention du public pertinent étant davantage attirée par l’élément verbal « ergo+ », qui présente un caractère plutôt descriptif et est apte à désigner un produit. En outre, il soutient que la règle énoncée par l’arrêt du 6 octobre 2005, Medion (C‑120/04, EU:C:2005:594, point 28), doit trouver application en l’espèce, même si l’élément qui conserve un pouvoir distinctif autonome est doté d’un faible caractère distinctif et qu’il n’y a pas de reprise à l’identique d’une marque antérieure.

80      Ainsi qu’il a été relevé au point 33 ci-dessus, les produits compris dans la classe 10 visés par la marque demandée et les produits couverts par la marque antérieure présentent un degré moyen de similitude. Ensuite, ainsi qu’il a été constaté aux points 64 à 72 ci-dessus, les signes en conflit présentent un faible degré de similitude visuelle et conceptuelle et un degré moyen de similitude phonétique.

81      Pour autant, s’agissant de la similitude des signes en conflit et de l’existence en conséquence d’un risque de confusion entre les marques en conflit dans l’esprit du public pertinent, lequel, ainsi qu’il ressort du point 30 ci-dessus, doit être regardé comme faisant preuve d’un degré d’attention élevé, il convient de rappeler, en premier lieu, que la chambre de recours n’a pas suffisamment tenu compte de la circonstance que l’élément « Sedus » est placé en début de la marque demandée et que, conformément à la jurisprudence rappelée au point 44 ci-dessus, le consommateur prête généralement une plus grande attention à un élément ainsi placé qu’à celui figurant à la fin du signe, comme l’est, en l’espèce, « ergo+ ».

82      En second lieu, ainsi qu’il ressort des points 49 à 59 ci-dessus, la chambre de recours n’a pas tenu dûment compte, dans la décision attaquée, de la différence de niveaux de caractère distinctif entre les éléments « Sedus », distinctif à un degré normal, et « ergo+ », distinctif à un faible degré. Elle n’a pas non plus correctement apprécié l’incidence du faible degré de caractère distinctif de la marque antérieure, qu’elle a pourtant reconnu au point 50 de la décision attaquée.

83      Ainsi, eu égard au faible caractère distinctif de l’élément commun des marques en conflit, respectivement « ERGOPLUS » et « ergo+ », la présence de l’élément « Sedus » dans la marque demandée, lequel, en raison de son caractère distinctif normal et de sa position en début du signe de cette marque, est susceptible de plus attirer l’attention du public pertinent, permettra à ce public de distinguer nettement les marques en conflit. Partant, la chambre de recours a commis une erreur lorsqu’elle a constaté qu’il pouvait exister, dans l’esprit de ce public, un risque de confusion quant au fait que les produits en cause puissent provenir de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement.

84      En outre, contrairement à ce que soutient l’EUIPO, la chambre de recours ne pouvait pas fonder sa conclusion sur le fait que l’élément verbal « ergo+ », légèrement différent de la marque antérieure, « conserv[ait] sa propre signification distinctive » dans la marque demandée.

85      En effet, en l’espèce, l’élément verbal « ergo+ » de la marque demandée n’a qu’un faible caractère distinctif, dans la mesure où, de toute évidence, cet élément fait allusion aux meubles.

86      À cet égard, pour qu’un élément doté d’un faible caractère distinctif puisse revêtir, dans une marque composée une position distinctive autonome au sens de l’arrêt du 6 octobre 2005, Medion (C‑120/04, EU:C:2005:594), il doit, en raison notamment de sa position dans le signe ou de sa dimension, être susceptible de s’imposer à la perception du consommateur et d’être gardé en mémoire par celui-ci (voir, en ce sens, arrêt du 22 octobre 2015, BGW, C‑20/14, EU:C:2015:714, point 40). Or, tel n’est pas le cas de l’élément « ergo+ » de la marque demandée dont ni la position ni la dimension ne lui permet de s’imposer à la perception du consommateur.

87      Il s’ensuit qu’il y a lieu d’accueillir le moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001].

88      La requérante conclut, outre à l’annulation de la décision attaquée, à la réformation de cette dernière.

89      À cet égard, il convient de rappeler que le pouvoir de réformation, reconnu au Tribunal en vertu de l’article 72, paragraphe 3, du règlement 2017/1001, n’a pas pour effet de conférer à celui-ci le pouvoir de procéder à une appréciation sur laquelle ladite chambre n’a pas encore pris position. L’exercice du pouvoir de réformation doit, par conséquent, en principe, être limité aux situations dans lesquelles le Tribunal, après avoir contrôlé l’appréciation portée par la chambre de recours, est en mesure de déterminer, sur la base des éléments de fait et de droit tels qu’ils sont établis, la décision que la chambre de recours était tenue de prendre (arrêt du 5 juillet 2011, Edwin/OHMI, C‑263/09 P, EU:C:2011:452, point 72).

90      À cet égard, il y a lieu de relever que, ainsi qu’il ressort du point 50 de la décision attaquée, la chambre de recours a fondé la décision attaquée uniquement sur la perception des signes en conflit et de leurs éléments distinctifs et dominants par le public pertinent germanophone. Elle n’a donc pas examiné la manière dont ces signes et les éléments qui les composent seraient perçus par le public pertinent de France et du Benelux.

91      Dans ces circonstances, il n’appartient pas au Tribunal de procéder, en l’espèce, à l’examen de l’argumentation présentée par la requérante, devant la chambre de recours, tendant à ce qu’aucun risque de confusion existe entre la marque demandée et les marques antérieures dans les territoires pertinents.

92      La demande de réformation de la décision attaquée présentée par la requérante sur le fondement de cette argumentation doit donc être rejetée.

93      Par conséquent, il convient d’annuler la décision attaquée et de rejeter, pour le surplus, le recours.

 Sur les dépens

94      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. L’EUIPO ayant succombé, il y a lieu de le condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux de la requérante, conformément aux conclusions de celle-ci.

95      Par ailleurs, la requérante a conclu à ce que l’intervenant soit condamné aux dépens de la procédure de recours devant l’EUIPO. À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 190, paragraphe 2, du règlement de procédure, les frais indispensables exposés par les parties aux fins de la procédure devant la chambre de recours sont considérés comme dépens récupérables. Partant, il y a également lieu de condamner l’intervenant à supporter, outre ses propres dépens exposés devant le Tribunal, les frais indispensables exposés par la requérante aux fins de la procédure devant la chambre de recours.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (dixième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la première chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 12 mars 2020 (affaire R 2194/2018-1) est annulée.

2)      Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      L’EUIPO supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par Sedus Stoll AG aux fins de la procédure devant le Tribunal.

4)      M. Wolfgang Kappes supportera ses propres dépens ainsi que les frais indispensables exposés par Sedus Stoll aux fins de la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO.

Kornezov

Hesse

Petrlík

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 13 octobre 2021.

Signatures


*      Langue de procédure : l’allemand.