Language of document : ECLI:EU:T:2021:816

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

24 novembre 2021 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne verbale Riviva – Marque de l’Union européenne verbale antérieure RIVELLA – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Rejet partiel de la demande d’enregistrement – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001] – Preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure – Article 42, paragraphe 2, du règlement no 207/2009 [devenu article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001] »

Dans l’affaire T‑551/20,

Jeronimo Martins Polska S.A., établie à Kostrzyn (Pologne), représentée par Me R. Skubisz, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. D. Gája, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Rivella International AG, établie à Rothrist (Suisse), représentée par Mes S. Pietzcker et C. Spintig, avocats,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’EUIPO du 1er juillet 2020 (affaire R 2420/2019-4, relative à une procédure d’opposition entre Rivella International et Jeronimo Martins Polska,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de Mmes V. Tomljenović (rapporteure), présidente, P. Škvařilová‑Pelzl et M. I. Nõmm, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 3 septembre 2020,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 3 novembre 2020,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 23 novembre 2020,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 20 juin 2017, Optimum mark sp. z o.o., prédécesseur en droit de la requérante, Jeronimo Martins Polska S.A., a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal Riviva.

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 32 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Jus de fruits ; jus végétaux [boissons] ; jus de fruits-légumes ; boissons aux fruits ; boissons à base de légumes ou de fruits et légumes ; eaux minérales [boissons] ; eaux de source ; eau gazeuse et non gazeuse ; boissons sans alcool ; sirops pour boissons ; préparations pour faire des boissons ».

4        La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques de l’Union européenne no 172/2017, du 11 septembre 2017.

5        Le 5 décembre 2017, l’intervenante, Rivella International AG a formé opposition au titre de l’article 46 du règlement 2017/1001, à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits mentionnés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur la marque de l’Union européenne verbale antérieure RIVELLA déposée le 22 octobre 1999, enregistrée le 5 février 2001 et dûment renouvelée jusqu’au 22 octobre 2029, sous le no 1 354 059, désignant notamment les produits relevant de la classe 32 et correspondant à la description suivante : « Eaux minérales et gazeuses et autres boissons non alcooliques ; boissons de fruits et jus de fruits ; sirops et autres préparations pour faire des boissons ».

7        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux prévus par l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

8        Le 28 juin 2018, la requérante a demandé, conformément à l’article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, que l’intervenante apporte la preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure pour les produits pour lesquels elle était enregistrée et sur lesquels l’opposition était fondée.

9        Par décision du 28 août 2019, la division d’opposition a accueilli l’opposition dans son intégralité en retenant, en substance, que, l’usage de la marque antérieure ayant été démontré pour une partie des produits désignés par celle-ci, à savoir « les boissons gazeuses non alcooliques », il convenait de conclure à l’existence d’un risque de confusion pour l’ensemble des produits visés par la marque demandée.

10      Le 28 octobre 2019, l’intervenante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, contre la décision de la division d’opposition.

11      Par décision du 1er juillet 2020 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’EUIPO a confirmé la décision de la division d’opposition et a rejeté le recours formé par la requérante devant elle.

12      Elle a, d’une part, considéré que l’intervenante a suffisamment démontré l’usage de la marque antérieure pour les produits relevant de la classe 32 « limonades et boissons gazeuses non alcooliques » et, d’autre part, reconnu l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit pour l’ensemble des produits relevant de la classe 32 visés par la marque demandée.

 Conclusions des parties

13      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO et, le cas échéant, l’intervenante aux dépens.

14      L’EUIPO et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

15      À titre liminaire, il convient de relever que, compte tenu de la date d’introduction de la demande d’enregistrement en cause, à savoir le 20 juin 2017, qui est déterminante aux fins de l’identification du droit matériel applicable, les faits de l’espèce sont régis par les dispositions matérielles du règlement no 207/2009 (voir, en ce sens, arrêts du 8 mai 2014, Bimbo/OHMI, C‑591/12 P, EU:C:2014:305, point 12, et du 18 juin 2020, Primart/EUIPO, C‑702/18 P, EU:C:2020:489, point 2 et jurisprudence citée).

16      Par suite, en l’espèce, il convient d’entendre les références faites par la chambre de recours dans la décision attaquée et par les parties à l’instance à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et à l’article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, comme visant l’article 8, paragraphe 1, sous b), et l’article 42, paragraphe 2, d’une teneur identique du règlement n° 207/2009 ».

17      À l’appui de son recours, la requérante invoque, en substance, deux moyens, tirés, le premier, d’une violation de l’article 42, paragraphe 2, du règlement no 207/2009 et, le second, d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), dudit règlement.

 Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 42, paragraphe 2, du règlement no 207/2009

18      Dans le cadre de son premier moyen, la requérante conteste, en substance, la conclusion de la chambre de recours selon laquelle un usage sérieux de la marque antérieure a été démontré pour les produits « limonades et boissons gazeuses non alcooliques ».

19      Premièrement, la requérante fait valoir que les étiquettes de produits et les photographies de magasins ne contiendraient aucune information concernant le lieu, la durée ou l’importance de l’usage, et qu’il ne serait pas certain qu’elles relèvent de la période et du territoire pertinents. Par ailleurs, si la déclaration sous serment signée par un membre du conseil d’administration de l’intervenante (ci-après la « déclaration sous serment ») contient des informations relatives à la durée, au lieu, à la nature et à l’importance de l’usage, elle ne constituerait pas un élément de preuve suffisant dans la mesure où elle émane d’un employé de l’intervenante et où son contenu ne serait pas étayé par les autres preuves fournies par elle.

20      Deuxièmement, la requérante fait valoir que le lien établi par la chambre de recours avec une partie du territoire de l’Allemagne et de la France ne permettrait pas d’établir l’usage sérieux pour une partie substantielle du territoire de l’Union européenne, ainsi que l’exigerait la jurisprudence. Par ailleurs, les différents éléments de preuve, notamment les photographies de magasins, les étiquettes de produit et les factures, ne montreraient ni le lieu de la mise sur le marché ni la taille du territoire de la commercialisation effective des produits en cause.

21      Troisièmement, selon la requérante, aucun élément de preuve concret et objectif indiquant avec certitude la forme sous laquelle la marque antérieure a été utilisée sur le marché au cours de la période pertinente pour les produits « limonades et boissons gazeuses non alcooliques » n’aurait été produit.

22      L’EUIPO et l’intervenante contestent ces arguments.

23      Selon une jurisprudence constante, il ressort de l’article 42, paragraphes 2 et 3, du règlement no 207/2009, lu à la lumière du considérant 10 du même règlement (devenu considérant 24 du règlement 2017/1001), et de la règle 22, paragraphe 3, du règlement (CE) no 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement (CE) no 40/94 du Conseil sur la marque communautaire (JO 1995, L 303, p. 1) [devenue article 10, paragraphe 3, du règlement délégué (UE) 2018/625 de la Commission, du 5 mars 2018, complétant le règlement 2017/1001, et abrogeant le règlement délégué (UE) 2017/1430 (JO 2018, L 104, p. 1)], que la ratio legis de l’exigence selon laquelle la marque antérieure doit avoir fait l’objet d’un usage sérieux pour être opposable à une demande de marque de l’Union européenne consiste à limiter les conflits entre deux marques, à moins qu’il n’existe un juste motif économique à l’absence d’usage sérieux de la marque antérieure découlant d’une fonction effective de celle-ci sur le marché. En revanche, lesdites dispositions ne visent ni à évaluer la réussite commerciale ni à contrôler la stratégie économique d’une entreprise ou encore à réserver la protection des marques à leurs seules exploitations commerciales quantitativement importantes [voir arrêt du 17 janvier 2013, Reber/OHMI – Wedl & Hofmann (Walzer Traum), T‑355/09, non publié, EU:T:2013:22, point 25 et jurisprudence citée].

24      Une marque fait l’objet d’un usage sérieux lorsqu’elle est utilisée, conformément à sa fonction essentielle qui est de garantir l’identité d’origine des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée, aux fins de créer ou de conserver un débouché pour ces produits et services, à l’exclusion d’usages de caractère symbolique ayant pour seul objet le maintien des droits conférés par la marque [arrêt du 23 septembre 2020, Osório & Gonçalves/EUIPO – Miguel Torres (in.fi.ni.tu.de), T‑601/19, non publié, EU:T:2020:422, point 38 ; voir également, par analogie, arrêt du 11 mars 2003, Ansul, C‑40/01, EU:C:2003:145, point 43]. De plus, la condition relative à l’usage sérieux de la marque exige que celle-ci, telle qu’elle est protégée sur le territoire pertinent, soit utilisée publiquement et vers l’extérieur [arrêt du 8 juillet 2004, Sunrider/OHMI – Espadafor Caba (VITAFRUIT), T‑203/02, EU:T:2004:225, point 39 ; voir également, par analogie, arrêt du 11 mars 2003, Ansul, C‑40/01, EU:C:2003:145, point 37].

25      L’appréciation du caractère sérieux de l’usage de la marque antérieure doit reposer sur l’ensemble des faits et des circonstances propres à établir la réalité de l’exploitation commerciale de celle-ci, en particulier les usages considérés comme étant justifiés dans le secteur économique concerné pour maintenir ou créer des parts de marché au profit des produits ou des services protégés par la marque, la nature de ces produits ou de ces services, les caractéristiques du marché, l’importance et la fréquence de l’usage de la marque [voir arrêt du 10 septembre 2008, Boston Scientific/OHMI – Terumo (CAPIO), T‑325/06, non publié, EU:T:2008:338, point 30 et jurisprudence citée]. Pour examiner le caractère sérieux de l’usage d’une marque antérieure, il convient de procéder à une appréciation globale en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce. Cette appréciation implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte. Ainsi, un faible volume de produits commercialisés sous ladite marque peut être compensé par une forte intensité ou une grande constance dans le temps de l’usage de cette marque et inversement [arrêts du 8 juillet 2004, MFE Marienfelde/OHMI – Vétoquinol (HIPOVITON), T‑334/01, EU:T:2004:223, point 36, et du 8 juillet 2004, VITAFRUIT, T‑203/02, EU:T:2004:225, point 42].

26      L’usage sérieux d’une marque ne peut être démontré par des probabilités ou des présomptions, mais doit reposer sur des éléments concrets et objectifs qui prouvent une utilisation effective et suffisante de la marque sur le marché concerné [voir arrêt du 23 septembre 2009, Cohausz/OHMI – Izquierdo Faces (acopat), T‑409/07, non publié, EU:T:2009:354, point 36 et jurisprudence citée].

27      Si la règle 22 du règlement no 2868/95 mentionne des indications concernant les quatre éléments sur lesquels doit porter la preuve de l’usage sérieux, à savoir le lieu, la durée, la nature et l’importance de l’usage, et donne des exemples de preuve acceptables à cet égard, comme les emballages, les étiquettes, les barèmes de prix, les catalogues, les factures, les photographies, les annonces dans les journaux et les déclarations écrites, cette règle n’indique nullement que chaque élément de preuve doive nécessairement contenir des informations sur chacun des quatre éléments en cause [voir arrêt du 19 avril 2013, Luna/OHMI – Asteris (Al bustan), T‑454/11, non publié, EU:T:2013:206, point 35 et jurisprudence citée]. Selon une jurisprudence constante, il ne peut être exclu qu’un faisceau d’éléments de preuve permette d’établir les faits à démontrer, alors même que chacun de ces éléments, pris isolément, serait impuissant à rapporter la preuve de l’exactitude de ces faits. C’est donc la prise en considération de l’ensemble des éléments soumis à l’appréciation de la chambre de recours qui doit permettre d’établir la preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure (voir arrêt du 19 avril 2013, Al bustan, T‑454/11, non publié, EU:T:2013:206, points 36 et 37 et jurisprudence citée).

28      En l’espèce, la chambre de recours a retenu, sans que cela ne soit contesté, que la période pertinente pour l’appréciation de l’usage sérieux était comprise entre le 20 juin 2012 et le 19 juin 2017 (ci-après la « période pertinente »).

29      Les preuves fournies par l’intervenante de son usage de la marque antérieure, telles que prises en compte par la chambre de recours, sont mentionnées explicitement au point 3 de la décision attaquée. Il s’agit des éléments suivants :

–        une déclaration sous serment signée par le président du conseil d’administration de l’intervenante, selon laquelle la marque RIVELLA a été utilisée dans plusieurs États membres de l’Union, dont l’Allemagne et la France pour des boissons gazeuses sans alcool. Pour la période comprise entre le 1er janvier 2013 et le 30 juin 2017, trois variantes du produit RIVELLA auraient été commercialisées, à savoir « Rivella Rouge » (produit classique), « Rivella Bleu » (produit pauvre en calories) et « Rivella Vert » (produit aux extraits de thé vert). Pour cette période, il aurait été vendu entre 1,4 et 2,7 millions de bouteilles par an en Allemagne et entre 762 000 et 804 000 de bouteilles par an en France ;

–        des étiquettes qui auraient été utilisées en Allemagne et en France pour les variantes rouge et bleue ;

–        des photographies de magasins et de supermarché montrant des stands et des caisses de produits ;

–        des images d’une campagne d’affichage publicitaire en France ;

–        des factures pour chaque année de la période 2013-2017 adressées à un client en Allemagne pour des montants compris entre 14 000 et 25 000 euros par facture ;

–        des factures pour chaque année de la période 2013-2017 adressées à un client en France pour des montants compris entre 17 000 et 19 000 euros par facture ;

–        des factures adressées à l’intervenante par différents clients en Allemagne et en France pour des activités promotionnelles.

30      La chambre de recours a examiné ces documents aux points 7 à 51 de la décision attaquée et a considéré que, pris dans leur ensemble, ils constituaient des éléments de preuve suffisants et concluants que la marque antérieure a fait l’objet d’un usage sérieux en France et en Allemagne pendant la période pertinente pour les produits « limonades et boissons gazeuses non alcooliques ».

31      À titre liminaire, il importe de rappeler que, conformément à la jurisprudence exposée aux points 25 et 27 ci-dessus, la chambre de recours a correctement pu procéder à une appréciation globale des éléments de preuve, et prendre en compte les différents éléments de preuve quand bien même ils ne permettaient pas nécessairement, pris individuellement, d’établir la durée, la nature, le lieu et l’importance de l’usage.

32      S’agissant de la nature de l’usage, la chambre de recours a correctement retenu que, prises ensemble, la déclaration sous serment, les factures, les photographies de magasins, les étiquettes de produits ainsi que les campagnes publicitaires permettaient d’établir que la marque antérieure avait été utilisée pour les produits « limonades et boissons gazeuses non alcooliques » pendant la période pertinente.

33      En effet, d’une part, il ressort de la déclaration sous serment que, pendant la période concernée, trois variantes de boissons gazeuses non-alcoolisées ont été commercialisées en Allemagne et en France sous la marque RIVELLA, à savoir « Rivella Rouge », « Rivella Bleu » et « Rivella Vert » ainsi que, ponctuellement, d’autres variantes du produit.

34      D’autre part, les affirmations contenues dans la déclaration sous serment sont étayées par les autres éléments de preuve fournis par l’intervenante. En particulier, les factures, établies entre 2013 et 2017, font état de la vente de produits, identifiés comme des boissons, dénommés « Rivella Bleu », « Rivella Vert », « Rivella Rouge », « Rivella Rot », « Rivella Light » ou encore « Rivella Grün ». Or, les photographies de magasins et les étiquettes, bien que non-datées, permettent de confirmer que les dénominations utilisées dans les factures correspondent bien à des « limonades et boissons gazeuses non alcooliques ». En effet, quand bien même les photographie et étiquettes sont non datées et donc dépourvues, en tant que telles, de valeur probante, elles sont susceptibles d’étayer d’autres pièces, telles que les factures, afin d’établir l’utilisation de la marque antérieure [voir, en ce sens, arrêt du 9 septembre 2020, Novomatic/EUIPO – Brouwerij Haacht (PRIMUS), T‑669/19, non publié, EU:T:2020:408, point 60].

35      Ainsi, contrairement à ce que soutient la requérante, les appréciations de la chambre de recours ne reposent pas sur de simples probabilités ou suppositions, mais sur un faisceau d’indices concordants, suffisamment solides et objectifs.

36      S’agissant de la durée et de l’importance de l’usage, la requérante se borne à faire valoir qu’il n’est pas possible d’apprécier si ces critères sont satisfaits, même lorsque tous les éléments de preuve sont pris en compte dans leur ensemble. Il y a lieu de relever, à cet égard, que les factures produites par l’intervenante portent sur la quasi-totalité de la période concernée, et font référence aux années 2013 à 2017. En outre, ces factures démontrent une constance dans le temps et une fréquence de l’usage de la marque antérieure. De plus, chacune des factures fait état de la vente de plusieurs milliers de produits « Rivella Bleu », « Rivella Rouge » ou encore « Rivella Vert ». En conséquence, au regard de la jurisprudence exposée aux points 23 à 27 ci-dessus, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que la marque antérieure avait fait l’objet d’un usage suffisamment important.

37      S’agissant du territoire à prendre en compte pour l’examen de l’usage sérieux, il importe de relever qu’il n’est pas nécessaire que l’usage d’une marque de l’Union européenne soit géographiquement étendu pour être qualifié de sérieux, dans la mesure où une telle qualification dépend des caractéristiques des produits ou des services concernés sur le marché correspondant et, plus généralement, de l’ensemble des faits et des circonstances propres à démontrer que l’exploitation commerciale de cette marque permet de créer ou de conserver les parts de marché pour les produits ou les services pour lesquels elle a été enregistrée. D’ailleurs, afin de qualifier de sérieux l’usage d’une marque de l’Union européenne, il n’est pas exigé que cette dernière soit utilisée sur une partie substantielle du territoire de l’Union. En outre, la possibilité que la marque en question ait été utilisée sur le territoire d’un seul État membre ne doit pas être exclue, dans la mesure où il convient de faire abstraction des frontières des États membres et de tenir compte des caractéristiques des produits ou services concernés [voir, en ce sens, arrêts du 30 novembre 2016, K&K Group/EUIPO – Pret A Manger (Europe) (Pret A Diner), T‑2/16, non publié, EU:T:2016:690, point 50 ; du 15 novembre 2018, DRH Licensing & Managing/EUIPO – Merck (Flexagil), T‑831/17, non publié, EU:T:2018:791, point 67, et du 7 novembre 2019, Intas Pharmaceuticals/EUIPO – Laboratorios Indas (INTAS), T‑380/18, EU:T:2019:782, point 80 et jurisprudence citée].

38      Dès lors, la circonstance que l’usage de la marque antérieure n’ait été établi qu’en lien avec une petite partie du territoire de l’Allemagne et de la France ne s’oppose pas au caractère sérieux de l’usage de la marque antérieure, et ce d’autant plus que, ainsi qu’il ressort du point 36 ci-dessus, cet usage a été établi, non pas de manière ponctuelle mais pour presque toute la période pertinente et dans des quantités suffisamment importantes.

39      Par ailleurs, la requérante soutient, en substance, que l’intervenante n’a pas fourni de véritables preuves que des produits portant la marque antérieure étaient commercialisés dans différents magasins et qu’il n’a pas été établi que ladite marque avait fait l’objet d’un usage vers l’extérieur. Sans qu’il soit nécessaire d’examiner si la chambre de recours pouvait prendre en compte les photographies de magasins, bien que non datées, pour constater que les produits étaient commercialisés dans de nombreux supermarchés et magasins allemands et français, il y a lieu de relever que le fait que la preuve de l’usage de la marque antérieure n’a été rapportée que pour la vente de produits à destination d’un seul client en Allemagne et d’un seul client en France ne permet pas d’exclure a priori son caractère sérieux (arrêt du 11 mai 2006, Sunrider/OHMI, C‑416/04 P, EU:C:2006:310, point 76). En effet, l’importance territoriale de l’usage n’est qu’un des facteurs devant être pris en compte, parmi d’autres, pour déterminer s’il est sérieux ou non.

40      Partant, il convient de constater, à la lumière des considérations exposées aux points 31 à 39 ci-dessus, que c’est à juste titre que la chambre de recours, après avoir procédé à un examen global des preuves d’usage fournies par l’intervenante, a considéré que la marque antérieure avait, pour la période pertinente, fait l’objet d’un usage sérieux en Allemagne et en France pour les « limonades et boissons gazeuses non alcooliques ».

41      Pour l’ensemble des motifs qui précèdent, il convient de rejeter comme non fondé le premier moyen.

 Sur le secondmoyen, tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009

42      Par le second moyen, la requérante reproche à la chambre de recours d’avoir constaté, à tort, l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit, en violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no°207/2009.

43      Premièrement, si la requérante admet que les produits comparés sont, en partie identiques et en partie similaires, elle conteste l’appréciation du degré de similitude entre les produits en cause, effectuée par la chambre de recours.

44      Tout d’abord, elle fait valoir que les « jus de fruits ; jus végétaux [boissons] ; jus de fruits-légumes ; boissons aux fruits ; boissons à base de légumes ou de fruits et légumes » et les produits désignés par la marque antérieure ne sont pas identiques ou très similaires en ce qu’ils diffèrent par leur qualité, leur valeur nutritive, leur fabrication par différentes entreprises et leur production. En outre, le fait qu’ils servent à satisfaire un besoin identique ne permettrait pas de conclure qu’ils sont interchangeables.

45      Ensuite, elle soutient que les « eaux minérales [boissons] ; eau de source ; eau non gazeuse » ainsi que l’ « eau gazeuse » diffèrent des produits désignés par la marque antérieure par leurs producteurs et leurs techniques de fabrication. En outre, ils ne seraient pas substituables, notamment en raison de leur valeur nutritionnelle différente.

46      Enfin, la requérante soutient que les « sirops pour boissons » et les « préparations pour faire des boissons », même distribués de la même manière, ne sont pas moyennement similaires aux produits désignés par la marque antérieure puisqu’il ne s’agit pas de boissons et qu’ils auraient une nature et une destination différentes.

47      Deuxièmement, la requérante conteste la conclusion de la chambre de recours selon laquelle les marques en conflit sont visuellement et phonétiquement similaires à un degré inférieur à la moyenne.

48      D’une part, la requérante allègue que les signes en conflit ne sont pas similaires sur le plan visuel. Elle conteste que la différence de lettres au milieu des signes RIVELLA et Riviva ne suffisait pas à neutraliser la similitude visuelle créée par les lettres communes, même s’il est tenu compte du fait que les consommateurs n’auraient que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des marques. À cet égard, elle fait valoir que, bien que les signes coïncident par leur partie initiale, la chambre de recours aurait méconnu le principe en vertu duquel la comparaison des signes devrait reposer sur l’impression d’ensemble qu’ils produisent.

49      D’autre part, la requérante allègue que la prononciation des signes était complètement différente. En effet, elle rappelle que RIVELLA avait une prononciation douce et Riviva une prononciation plus sèche. Elle ajoute que la structure différente des éléments « viva » et « vella », notamment l’utilisation de voyelles et de consonnes différentes ainsi que leur position différente, jouait un rôle important dans leur perception globale, et ajoutait des différences phonétiques « en termes généraux de son, de rythme et d’intonation ».

50      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

51      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

52      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

53      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

54      C’est à la lumière de ces principes qu’il convient d’examiner l’appréciation effectuée par la chambre de recours du risque de confusion entre les signes en conflit dans l’esprit du public pertinent.

 Sur le public pertinent

55      S’agissant de la définition du public pertinent, selon la jurisprudence, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, EU:T:2007:46, point 42 et jurisprudence citée].

56      En l’espèce, la chambre de recours a considéré, aux points 53 et 54 de la décision attaquée, que, la marque antérieure étant une marque de l’Union européenne, le territoire pertinent est celui de l’Union. Toutefois, dans la mesure où il suffit que le motif relatif de refus existe dans une partie de l’Union, la chambre de recours a concentré son analyse sur le public germanophone. En ce qui concerne la composition du public et son niveau d’attention, la chambre de recours a considéré que, les produits relevant de la classe 32 étant des produits de consommation courante, le public pertinent était le grand public et qu’il était doté d’un niveau d’attention moyen.

57      Il n’y a pas lieu de remettre en cause ces appréciations de la chambre de recours, au demeurant non contestées par la requérante. En particulier, il importe de relever que, compte tenu du fait que, pour refuser l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne, il suffit qu’un motif relatif de refus au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 existe dans une partie de l’Union, la chambre de recours était fondée à concentrer son appréciation sur la partie germanophone du public pertinent [voir, en ce sens, arrêt du 5 février 2020, Globalia Corporación Empresarial/EUIPO – Touring Club Italiano (TC Touring Club), T‑44/19, non publié, EU:T:2020:31, points 84 et 85 et jurisprudence citée].

 Sur la comparaison des produits

58      La chambre de recours a considéré, aux points 59 à 66 de la décision attaquée que les « boissons sans alcool », « jus de fruits ; jus végétaux [boissons] ; jus de fruits-légumes ; boissons aux fruits ; boissons à base de légumes ou de fruits et légumes », les « eaux minérales [boissons] ; eaux de source ; eau non gazeuse », les « eaux gazeuses », ainsi que les « sirops pour boissons » et « préparations pour faire des boissons », visés par la marque demandée et relevant de la classe 32, étaient soit identiques soit similaires, à des degrés divers, aux produits désignés par la marque antérieure relevant de la même classe.

59      Selon une jurisprudence constante, pour apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [voir arrêt du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, EU:T:2007:219, point 37 et jurisprudence citée].

60      Premièrement, s’agissant des « boissons sans alcool », la requérante ne conteste pas que ces produits sont identiques aux « limonades » et aux « boissons gazeuses non alcooliques » et il n’y a pas lieu de remettre cette constatation en cause. En effet, ainsi que la chambre de recours l’a correctement constaté, dès lors que les « boissons sans alcool » incluaient, en tant que catégorie plus large, tous les produits désignés par la marque antérieure, à savoir, les « limonades » et les « boissons gazeuses non alcooliques », ces produits étaient identiques [voir, en ce sens, arrêt du 7 septembre 2006, Meric/OHMI – Arbora & Ausonia (PAM-PIM’S BABY-PROP), T‑133/05, EU:T:2006:247, point 29 et jurisprudence citée]. À cet égard, il convient de rappeler que c’est au demandeur de marque, et non à l’EUIPO, qu’il incombe de limiter, le cas échéant, la demande d’enregistrement de marque à certains produits non couverts par la marque antérieure. L’EUIPO n’a pas l’obligation de procéder à une analyse de chacun des produits ou des services faisant partie de chaque catégorie visée par la demande de marque, mais doit porter son examen sur la catégorie en question, en tant que telle [voir, en ce sens, arrêt du 14 juillet 2011, ratiopharm/OHMI – Nycomed (ZUFAL), T‑222/10, non publié, EU:T:2011:383, point 34 et jurisprudence citée].

61      Deuxièmement, en ce qui concerne les produits « jus de fruits ; jus végétaux [boissons] ; jus de fruits-légumes ; boissons aux fruits ; boissons à base de légumes ou de fruits et légumes », s’il convient de constater que, contrairement à ce qu’a affirmé la chambre de recours, ces produits ne sont pas des boissons gazeuses, et ne sont pas de ce fait identiques aux « boissons gazeuses non alcooliques », il y a lieu de constater que la chambre de recours a considéré, à bon droit, que l’ensemble de ces produits sont au moins très similaires aux « boissons gazeuses non alcooliques », et ce indépendamment de la question de savoir si les « boissons aux fruits » et les « boissons à base de légumes ou de fruits et légumes » contestées pouvaient inclure ou non les autres produits « jus de fruits », « jus végétaux » et « jus de fruits-légumes » en tant que catégories de produits plus large.

62      En effet, d’une part, ainsi que la chambre de recours l’a relevé, en substance, au point 63 de la décision attaquée, même si les produits désignés par la marque antérieure ne contiennent pas les mêmes ingrédients de fruits et légumes que les « jus de fruits ; jus végétaux [boissons] ; jus de fruits-légumes ; boissons aux fruits ; boissons à base de légumes ou de fruits et légumes », ils sont tous des boissons non alcooliques principalement destinées à étancher la soif et sont consommées normalement fraîches ou pour le plaisir [voir, par analogie, arrêt du 12 décembre 2014, Ludwig Schokolade/OHMI – Immergut (TrinkFix), T‑105/13, non publié, EU:T:2014:1070, point 97]. En outre, ils peuvent avoir les mêmes producteurs et être distribués à travers les mêmes canaux de distribution. D’autre part, contrairement à ce qu’avance la requérante, il n’est pas exclu que les « limonades et boissons gazeuses non alcooliques » puissent être perçues, de même que les « jus de fruits ; jus végétaux [boissons] ; jus de fruits-légumes ; boissons aux fruits ; boissons à base de légumes ou de fruits et légumes » comme des produits sains ayant des fonctions nutritives. En effet, ces produits peuvent, non seulement avoir un goût de fruit, mais également contenir des extraits de fruits ou avoir une base de fruits ou de jus de fruits.

63      Par conséquent, contrairement à ce que soutient la requérante, les « jus de fruits ; jus végétaux [boissons] ; jus de fruits-légumes ; boissons aux fruits ; boissons à base de légumes ou de fruits et légumes » pourraient être considérés comme interchangeables, principalement de par leur destination et ainsi comme concurrents dans leur utilisation avec les « boissons gazeuses non alcooliques ».

64      Il convient donc de constater que, si la chambre a erronément constaté que les « jus de fruits ; jus végétaux [boissons] ; jus de fruits-légumes ; boissons aux fruits ; boissons à base de légumes ou de fruits et légumes » sont identiques aux « boissons gazeuses non alcooliques », elle a correctement considéré qu’ils présentaient, à tout le moins, un degré élevé de similitude.

65      Troisièmement, s’agissant des « eaux minérales [boissons] ; eaux de source et eaux non gazeuses » s’il est exact que leur fabrication et production sont différentes, il n’en demeure pas moins que, contrairement à ce que soutient la requérante, ces produits étaient des boissons non alcooliques de consommation courante, qui servent à étancher la soif et peuvent être commercialisées selon les mêmes canaux et modalités que les « boissons gazeuses non alcooliques ». Compte tenu que le Tribunal a déjà jugé que les « eaux minérales » présentent un degré de similitude au moins moyen avec les « boissons non alcoolisés au cola » dans l’arrêt du 25 novembre 2015, Masafi/OHMI – Hd1 (masafi) (T‑249/14, non publié, EU:T:2015:881, point 27), la chambre de recours a pu correctement conclure au degré moyen de la similitude entre les produits comparés.

66      Quatrièmement, s’agissant des « eaux gazeuses », indépendamment de la question de savoir si ces produits ont une destination, un usage ou une valeur nutritionnelle différente, ainsi que le fait valoir la requérante, il y a lieu de relever que, ces produits relèvent de la catégorie plus large des « boissons gazeuses non alcooliques », couverts par la marque antérieure. En conséquence, de tels produits ne sont pas seulement « très similaires », ainsi que la chambre de recours l’a relevé, mais identiques [arrêt du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI – LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T‑346/04, EU:T:2005:420, point 34].

67      Cinquièmement, s’agissant des « sirops pour boissons et préparations pour faire des boissons », il convient de relever que si ces produits, qui ne sont pas des boissons en tant que telles, diffèrent de par leur nature et leur destination des « limonades et boissons gazeuses non alcooliques », ils peuvent avoir une utilisation similaire, dans la mesure où il suffit d’y ajouter de l’eau gazeuse pour qu’ils deviennent des boissons gazeuses non alcooliques prêtes à la consommation, lesdits produits ayant ainsi une destination identique et se trouvant dans un rapport de concurrence directe sur le marché [voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 86]. En outre, ainsi que la chambre l’a relevé ces produits peuvent avoir les mêmes canaux de distribution et les mêmes producteurs. La circonstance que des techniques différentes soient utilisées pour fabriquer ces produits ne suffit pas à exclure la similitude desdits produits. Il en découle que la chambre de recours a pu conclure à bon droit qu’il existe, au moins, un degré moyen de similitude entre ces produits.

 Sur la comparaison des signes

68      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

69      La chambre de recours a, aux points 73 et 76 de la décision attaquée conclu, sur les plans visuel et phonétique, à un degré de similitude inférieur à moyen des signes RIVELLA et Riviva. Sur le plan conceptuel, elle a considéré que lesdits signes n’étaient pas comparables dans la mesure où ils n’avaient pas une signification claire dans une des langues de l’Union.

70      En premier lieu, s’agissant de la comparaison visuelle, il convient de relever que les signes RIVELLA et Riviva se composent respectivement de sept et de six lettres et coïncident, tant par la présence des trois premières lettres placées dans le même ordre au début « r-i-v », que par la présence de la lettre « a » à la fin des deux signes. Ainsi, la seule différence entre les marques en conflit tient à la présence des groupes de lettres « ell » et « iv » au milieu des signes.

71      À cet égard, ainsi que l’a relevé à juste titre la chambre de recours au point 72 de la décision attaquée, il ressort de la jurisprudence que le consommateur attache normalement plus d’importance au début d’une marque qu’à sa fin, la partie initiale d’une marque ayant normalement, tant sur le plan visuel que sur le plan phonétique, un impact plus fort que la partie finale de celle-ci [voir, en ce sens, arrêts du 7 septembre 2006, PAM-PIM’S BABY-PROP, T‑133/05, EU:T:2006:247, point 51, et du 27 février 2019, Aytekin/EUIPO – Dienne Salotti (Dienne), T‑107/18, non publié, EU:T:2019:114, point 49 et jurisprudence citée]. Certes, ainsi que l’indique l’adverbe « normalement », cette considération ne saurait valoir dans tous les cas [arrêts du 12 juillet 2019, MAN Truck & Bus/EUIPO – Halla Holdings (MANDO), T‑698/17, non publié, EU:T:2019:524, point 62, et du 9 avril 2014, Farmaceutisk Laboratorium Ferring/OHMI – Tillotts Pharma (OCTASA), T‑501/12, non publié, EU:T:2014:194, point 58]. Toutefois, en l’espèce, aucun élément ne permet de remettre en cause l’appréciation selon laquelle le fait que les trois premières lettres des signes en conflit coïncidaient contribuait à ce que, dans leur intégralité, lesdits signes donnaient une impression visuelle assez similaire.

72      De plus, contrairement à ce que soutient la requérante, il n’y a pas de différence flagrante dans la terminaison des signes en conflit. Au contraire, les signes coïncident par la dernière lettre « a », ce qui contribue à renforcer la similitude des signes dans leur impression d’ensemble. Ainsi, c’est à juste titre que la chambre de recours a retenu que les différences de lettres au milieu des signes, ne suffisent pas à neutraliser l’impression visuelle assez similaire créée par les lettres communes des marques en conflit lorsqu’elles sont perçues par le public dans leur intégralité, compte tenu également du fait que les consommateurs n’ont que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des marques [voir, en ce sens, arrêts du 3 mars 2015, Bial-Portela/OHMI, T‑366/11 RENV, non publié, EU:T:2015:129, points 36 et 38, et du 13 mai 2020, Wonder Line/EUIPO – De Longhi Benelux (KENWELL), T‑284/19, non publié, EU:T:2020:192, points 39 et 40].

73      Partant, il convient de constater qu’il existe, non pas un degré de similitude inférieur à la moyenne ainsi que la chambre de recours l’a constaté au point 73 de la décision attaquée, mais, au moins un degré moyen de similitude visuelle entre les marques en conflit.

74      En deuxième lieu, s’agissant de la comparaison sur le plan phonétique, il y a lieu de relever, à l’instar de la chambre de recours, que la prononciation des signes coïncide par la prononciation des éléments verbaux « riv » et « a ». Au surplus, cette identité phonétique concerne, notamment, le début des signes en conflit. Ces lettres seront donc les premières que le consommateur prononcera et entendra et seront, à ce titre, celles qui retiendront davantage son attention [voir arrêt du 1er mars 2016, BrandGroup/OHMI – Brauerei S. Riegele, Inh. Riegele (SPEZOOMIX), T‑557/14, non publié, EU:T:2016:116, point 51 et jurisprudence citée].

75      De surcroît, contrairement à ce que soutient la requérante, la seconde partie des signes en conflit, « vella » et « viva », et plus particulièrement la prononciation des éléments verbaux « ell » et « iv », par lesquels les marques en conflit diffèrent, ne permet pas d’atténuer l’identité partielle de prononciation desdites marques, du fait des éléments communs « riv » et « a » (voir, en ce sens, arrêt du 1er mars 2016, SPEZOOMIX, T‑557/14, non publié, EU:T:2016:116, point 50).

76      De plus, la structure similaire des signes, lesquels sont composés chacun de trois syllabes, « ri-vel-la » et « ri-vi-va », chacune identiques ou partiellement identiques, leur donne un rythme et une intonation similaires. En outre, comme l’indique à juste titre l’EUIPO, un rythme sonore similaire résulte de l’intonation donnée par la position des voyelles dans l’ordre « i-i-a » dans la marque demandée et « i-e-a » dans la marque antérieure. Il convient donc de rejeter les arguments de la requérante selon lesquels la prononciation des marques en conflit était différente en termes de son, de rythme et d’intonation globale. Par ailleurs, l’argument de la requérante selon lequel il existait une différence entre la prononciation « douce » du signe antérieur et de celle plus « sèche » du signe demandé n’est pas étayé.

77      Partant, il convient de constater qu’il existe, non pas un degré de similitude inférieur à la moyenne ainsi que la chambre de recours l’a constaté au point 76 de la décision attaquée, mais, au moins un degré moyen de similitude phonétique entre les marques en conflit.

78      Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours n’aurait pas pris en compte ses arguments relatifs à la pratique décisionnelle antérieure de l’EUIPO, selon laquelle la présence d’un nombre de lettres identiques ne suffit pas à conclure à un risque de confusion, s’il existe des différences importantes qui neutralisent ces similitudes, les signes devant être comparés au moyen d’une appréciation d’ensemble.

79      D’une part, il ressort d’une jurisprudence constante que les décisions que les chambres de recours de l’EUIPO sont amenées à prendre, en vertu du règlement no 207/2009, concernant l’enregistrement d’un signe en tant que marque de l’Union européenne, relèvent de l’exercice d’une compétence liée et non d’un pouvoir discrétionnaire. Dès lors, la légalité desdites décisions doit être appréciée uniquement sur le fondement de ce règlement et non sur celui d’une pratique décisionnelle antérieure à celles-ci (arrêts du 26 avril 2007, Alcon/OHMI, C‑412/05 P, EU:C:2007:252, point 65, et du 24 novembre 2005, ARTHUR ET FELICIE, T‑346/04, EU:T:2005:420, point 71).

80      D’autre part, s’il ressort également de la jurisprudence que l’EUIPO est tenu d’exercer ses compétences en conformité avec les principes généraux du droit de l’Union et eu égard aux principes d’égalité de traitement et de bonne administration, et ainsi de prendre en considération les décisions déjà prises sur des demandes similaires et de s’interroger avec une attention particulière sur la question de savoir s’il y a lieu ou non de décider dans le même sens [voir, en ce sens, arrêts du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, EU:C:2011:139, points 73 à 76, et du 21 mars 2014, FTI Touristik/OHMI (BigXtra), T‑81/13, non publié, EU:T:2014:140, point 52], il suffit de relever que, contrairement à ce que soutient la requérante, la chambre de recours a bien pris en compte l’impression d’ensemble produite par les signes en conflit ainsi que le fait que si les signes divergent par les groupes de lettres « ell » et « iv », cela ne neutralise pas les similitudes entre ces signes.

81      En troisième lieu, s’agissant de la comparaison sur le plan conceptuel, la chambre de recours a relevé, au point 77 de la décision attaquée, que les signes en conflit ne revêtaient aucune signification claire dans une des langues de l’Union européenne par rapport aux produits concernés, et que la comparaison conceptuelle restait neutre. Il n’y a pas lieu de remettre en cause cette appréciation, au demeurant non contestée par la requérante.

 Sur le caractère distinctif de la marque antérieure

82      Il y a lieu de relever que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en retenant, au point 79 de la décision attaquée, que la marque antérieure disposait d’un caractère distinctif intrinsèque normal ce qui, au demeurant, n’est pas contesté par la requérante.

 Sur l’appréciation globale du risque de confusion

83      S’agissant de l’existence du risque de confusion entre les marques en conflit, la chambre de recours a considéré qu’il existait un risque de confusion pour tous les produits relevant de la classe 32 visés par la marque demandée.

84      Il convient de rappeler que l’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés par celles-ci. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement (arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, VENADO avec cadre e.a., T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74). En outre, parmi les facteurs pertinents dont il doit être tenu compte dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, figure également le caractère distinctif de la marque antérieure [voir arrêt du 13 décembre 2007, Xentral/OHMI – Pages jaunes (PAGESJAUNES.COM), T‑134/06, EU:T:2007:387, point 70 et jurisprudence citée].

85      À ce titre, il convient de rappeler que tous les produits en cause sont des produits de consommation courante et que lors de leur achat le public pertinent fera preuve d’un niveau d’attention moyen.

86      Il ne pourrait être conclu à l’existence d’un risque de confusion que si le public pertinent était susceptible d’être induit en erreur sur l’origine commerciale des produits en cause.

87      Compte tenu des considérations précédentes, ce risque apparaît, en l’espèce, comme étant démontré à l’égard de tous les produits visés par la marque demandée, lesquels sont identiques ou similaires à différents degrés aux produits visés par la marque antérieure. En effet, confrontés aux produits visés par la marque demandée, les consommateurs relevant du public pertinent établiront un lien entre les marques en conflit, dans la mesure où, premièrement, les signes en cause sont, globalement considérés comme étant moyennement similaires, deuxièmement, les produits en cause sont identiques ou similaires à un degré moyen ou élevé, troisièmement, le public pertinent ne fera preuve que d’un degré moyen d’attention lors de l’achat desdits produits, et quatrièmement, la marque antérieure dispose d’un caractère distinctif intrinsèque normal.

88      Partant, il y a lieu de retenir, en l’espèce, que la chambre de recours a, à bon droit, conclu à l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit.

89      Il convient donc de rejeter le second moyen et, partant, le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

90      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

91      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Jeronimo Martins Polska S.A. est condamnée aux dépens.

Tomljenović

Škvařilová-Pelzl

Nõmm

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 24 novembre 2021.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.