Language of document : ECLI:EU:T:2009:159

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (première chambre)

18 mai 2009 (*)

« Requête introductive d’instance – Représentation par un avocat – Irrecevabilité manifeste »

Dans l’affaire T-37/09,

Zdeněk Altner, demeurant à Prague (République Tchèque),

partie requérante,

contre

Commission des communautés européennes,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours visant à faire constater que la Commission s’est illégalement abstenue d’engager une procédure en manquement contre la République Tchèque à la suite de la plainte du requérant relative aux prétendues violations par les autorités et les juridictions nationales des conventions internationales relatives à la lutte contre la corruption,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (première chambre),

composé de M. Mme Tiili, président (rapporteur), M. F. Dehousse et Mme I. Wiszniewska-Białecka, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Procédure et conclusions du requérant

1        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 8 janvier 2009, le requérant a introduit le présent recours.

2        La requête a été signée par le requérant lui-même, en qualité d’« advokát ». 

3        Par lettre reçue au greffe du Tribunal le 9 mars 2009, le requérant a déposé, également sous sa seule signature, un addendum à sa requête.

4        Il conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer que, nonobstant la lettre de mise en demeure du 26 août 2008 qu’il a envoyée à la Commission, celle-ci n’a pas engagé la procédure pour constater le manquement de la République Tchèque aux obligations qui lui incombent en vertu de la convention pénale sur la corruption et de la convention civile sur la corruption ;

–        annuler l’avis de la Commission du 31 octobre 2008, portant la référence JLS.S.E2/PDL/amj D(2008) 17398.

 En droit 

5        Aux termes de l’article 111 du règlement de procédure du Tribunal, lorsque le recours est manifestement irrecevable, le Tribunal peut, sans poursuivre la procédure, statuer par voie d’ordonnance motivée.

6        En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier et décide, en application de cet article, de statuer sans poursuivre la procédure.

7        Aux termes de l’article 19, troisième et quatrième alinéas, du statut de la Cour de justice, applicable à la procédure devant le Tribunal en vertu de l’article 53, premier alinéa, du même statut :

« Les [... ] parties [autres que les États membres, les institutions de la Communauté, les États parties à l’accord EEE autres que lesdits États membres et l’Autorité de surveillance AELE] doivent être représentées par un avocat.

Seul un avocat habilité à exercer devant une juridiction d’un État membre ou d’un autre État partie à l’accord EEE peut représenter ou assister une partie devant la Cour ».

8        L’article 21, premier alinéa, dudit statut, applicable également à la procédure devant le Tribunal en vertu de l’article 53, premier alinéa, du même statut, prévoit :

« La Cour est saisie par une requête adressée au greffier. La requête doit contenir l’indication du nom et du domicile du requérant et de la qualité du signataire [...] ».

9        Enfin, selon l’article 43, paragraphe l, premier alinéa, du règlement de procédure, « l’original de tout acte de procédure doit être signé par l’agent ou l’avocat de la partie ».

10      Il ressort du libellé de l’article 19, troisième alinéa, du statut, et en particulier de l’emploi du terme « représentées », qu’une « partie » au sens de cette disposition, quelle que soit sa qualité, n’est pas autorisée à agir elle-même devant la Cour, mais doit recourir aux services d’un tiers, étant obligatoirement un avocat habilité à exercer devant une juridiction d’un État membre ou d’un autre État partie à l’accord EEE. D’autres dispositions du statut ou du règlement de procédure du Tribunal (voir l’article 21, premier alinéa, du statut ainsi que les articles 43, paragraphe l, premier alinéa, 44, paragraphe 3, et 59 du règlement de procédure du Tribunal) confirment qu’une partie et son défendeur ne peuvent être une seule et même personne (voir ordonnances de la Cour du 5 décembre 1996, Lopes/Cour de justice, C-174/96 P, Rec. p. I-6401, point 11, et du 31 novembre 2007, C-502/06 P, Correia de Matos/Parlement, Rec. p. I-163, point 11).

11      Aucune dérogation ou exception à cette obligation n’étant prévue par le statut ou le règlement de procédure, la présentation d’une requête signée par le requérant lui-même ne peut donc suffire aux fins de l’introduction d’un recours (voir ordonnance Lopes/Cour de justice, précitée, point 8, et Correia de Matos/Parlement, précitée, point 12). Cette solution vaut même si le requérant est un avocat habilité à plaider devant une juridiction nationale (ordonnance Lopes/Cour de justice, précitée, point 10).

12      L’exigence d’avoir recours à un tiers correspond à la conception du rôle de l’avocat selon laquelle celui-ci est considéré comme collaborateur de la justice et appelé à fournir, en toute indépendance et dans l’intérêt supérieur de celle-ci, l’assistance légale dont le client a besoin. Cette conception répond aux traditions juridiques communes aux États membres et se retrouve également dans l’ordre juridique communautaire, ainsi qu’il résulte, précisément, de l’article 19 du statut [ordonnance du Tribunal du 8 décembre 1999, Euro-lex/OHMI (EULEX), T-79/99, Rec. p. II-3555, point 28, et du 27 septembre 2006, Correia de Matos/Parlement, T-440/05, Rec. p. II-76, point 14].

13      Il résulte de ce qui précède que le présent recours, introduit sous la seule signature du requérant et, de ce fait, ne satisfaisant pas aux exigences de l’article 19 du statut, est irrecevable.

14      En tout état de cause, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le recours en carence intenté par une personne physique ou morale et visant à faire constater que, en n’engageant pas contre un État membre une procédure en constatation de manquement, la Commission s’est abstenue de statuer en violation du traité est irrecevable (voir, par exemple, arrêt de la Cour du 14 février 1989, Star Fruit/Commission, C-247/87, Rec. p. 291).

15      En effet, les personnes physiques ou morales ne peuvent se prévaloir de l’article 232, troisième alinéa, CE qu’en vue de faire constater qu’une institution s’est abstenue d’adopter, en violation du traité, des actes, autres que des recommandations ou des avis, dont elles sont les destinataires potentiels ou qui concerneraient lesdites personnes de manière directe et individuelle (arrêt de la Cour du 26 novembre 1996, T. Port, C-68/95, Rec. p. I-6065, points 58 et 59).

16      Or, dans le cadre de la procédure en manquement régie par l’article 226 CE, les seuls actes que la Commission peut être amenée à prendre sont adressés aux États membres (ordonnances du Tribunal du 29 novembre 1994, Bernardi/Commission, T-479/93 et T-559/93, Rec. p. II-1115, point 31, et du 19 février 1997, Intertronic/Commission, T­117/96, Rec. p. II-141, point 32).

17      Il résulte des considérations qui précèdent qu’il y a lieu de rejeter le présent recours comme étant manifestement irrecevable, sans qu’il soit nécessaire de le signifier à la partie défenderesse.

 Sur les dépens

18      La présente ordonnance étant adoptée avant la notification de la requête à la partie défenderesse et avant que celle-ci n’ait pu exposer des dépens, il suffit de décider que la partie requérante supportera ses propres dépens, conformément à l’article 87, paragraphe 1, du règlement de procédure.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

ordonne :

1)      Le recours est rejeté.

2)      La partie requérante supportera ses propres dépens.

Fait à Luxembourg, le 18 mai 2009.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

        V. Tiili


* Langue de procédure : le tchèque.