Language of document : ECLI:EU:T:2012:685

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU PRÉSIDENT DE LA DEUXIÈME CHAMBRE DU TRIBUNAL

12 décembre 2012 (*)

« Intervention – Intérêt à la solution du litige – Article 116, paragraphe 6, du règlement de procédure du Tribunal  »

Dans l’affaire T‑635/11,

Regency Entertainment Psychagogiki kai Touristiki AE, établie à Maroussi Attikis (Grèce), représentée par Me N. Niejahr, avocate, Me F.M. Carlin, Barrister, Mes Q. Azau, F. Spyropoulos, I. Dryllerakis, et K. Spyropoulos, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. P.-J. Loewenthal, D. Triantafyllou et H. van Vliet, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision C (2011) 3504 final, du 24 mai 2011 concernant l’aide d’État C 16/10 (ex NN 22/10, ex CP 318/09) mise en œuvre par la Grèce en faveur de certains casinos grecs (JO L 285, p. 25),

LE PRÉSIDENT DE LA DEUXIÈME CHAMBRE DU TRIBUNAL

rend la présente

Ordonnance

 Faits et procédure

1        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 9 décembre 2011, Regency Entertainment Psychagogiki kai Touristiki AE a introduit un recours visant à l’annulation de la décision C (2011) 3504 final, du 24 mai 2011 concernant l’aide d’État C 16/10 (ex NN 22/10, ex CP 318/09) mise en œuvre par la Grèce en faveur de certains casinos grecs (JO L 285, p. 25) (ci-après la « décision attaquée »).

2        Dans cette décision, la Commission a considéré que la Grèce a mis en œuvre un traitement fiscal discriminatoire en faveur de certains casinos par l’application simultanée de diverses dispositions, en partie impératives, consistant en la fixation d’une taxe uniforme de 80 % sur le prix des billets d’entrée et en la fixation de deux prix légaux différents pour le billet d’entrée des casinos publics et privés, à 6 et 15 EUR, respectivement. La Commission a estimé que ces mesures constituaient des aides d’État illégales au sens de l’article 108, paragraphe 3, TFUE et qu’elles n’étaient pas compatibles avec le marché intérieur parce qu’elles conféraient un avantage concurrentiel injustifié à certains casinos. Elle a donc notamment décidé que la Grèce devait récupérer auprès des casinos bénéficiaires l’aide incompatible octroyée après le 21 octobre 1999.

3        Le 27 juillet 2012, Koinopraxia Touristiki Loutrakiou (ci-après « KTL »), dont le siège est établi à Athènes (Grèce), représenté par Me S. Pappas, avocat, a déposé une demande d’intervention au soutien des conclusions de la Commission dans la présente affaire.

4        Cette demande d’intervention a été signifiée aux parties, conformément à l’article 116, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement de procédure du Tribunal. Par lettre du 10 septembre 2012, la Commission a indiqué qu’elle n’avait pas d’objection à opposer à cette demande. Par lettre du 13 septembre 2012, la requérante a conclu au rejet de cette demande d’intervention.

5        Les parties au principal n’ont demandé le traitement confidentiel d’aucun des documents versés au dossier.

 Sur la demande d’intervention

 Sur le bien fondé de la demande d’intervention

6        L’article 40 du statut de la Cour de justice, applicable à la procédure devant le Tribunal en vertu de l’article 53, premier alinéa, dudit statut, prévoit, dans son deuxième alinéa, que toute personne justifiant d’un intérêt à la solution d’un litige à l’exclusion des litiges entre États membres, entre institutions de l’Union ou entre États membres, d’une part, et institutions de l’Union, d’autre part, peut intervenir audit litige. Selon l’article 40, quatrième alinéa, du statut de la Cour, les conclusions de la requête en intervention ne peuvent avoir d’autre objet que le soutien des conclusions de l’une des parties.

7        En l’espèce, KTL fait valoir qu’elle est l’auteur de la plainte sur la base de laquelle la Commission a adopté la décision attaquée, qu’elle a activement participé à la procédure administrative et qu’elle se trouve en situation de concurrence avec les sociétés bénéficiaires de l’aide faisant l’objet de la décision attaquée. Elle ajoute avoir été admise à intervenir dans le cadre d’une affaire similaire pendante devant le Tribunal (ordonnance du président de la deuxième chambre du Tribunal du 4 mai 2012, Etaireia Akiniton Dimosiou AE (ETAD)/Commission, T‑419/11). Elle aurait donc un intérêt légitime direct et actuel à intervenir.

8        La requérante, quant à elle, conteste l’intérêt à intervenir de KTL. Elle soutient tout d’abord que la demande en intervention est irrecevable dès lors que les documents de régularisation de sa demande n’ont pas été fournis en langue de procédure. De plus, KTL ne démontrerait pas son intérêt direct et actuel à intervenir. Selon elle, le seul fait d’avoir déposé une plainte n’établit pas l’existence d’un tel intérêt. En outre, elle conteste l’affirmation selon laquelle KTL serait en concurrence avec elle. Enfin elle soutient que le fait que KTL ait été admis à intervenir dans l’affaire T‑419/11, ayant pour objet l’annulation de la décision attaquée, ne prouverait pas davantage son intérêt à intervenir en l’espèce. Subsidiairement, elle relève que la demande en intervention a été déposée plus de six semaines après la communication au Journal officiel de l’Union européenne du recours et ne pourrait donc être accueillie que sur le fondement de l’article 116, paragraphe 6, du règlement de procédure.

9        Tout d’abord, le Tribunal relève que la demanderesse en intervention a valablement régularisé sa demande en intervention en communiquant dans le délai fixé les pièces demandées, à savoir la preuve de son existence juridique et la preuve que le mandat donné à son avocat avait été régulièrement établi par un représentant qualifié à cet effet.

10      Le fait que ces pièces aient été communiquées en langue grecque n’infirme pas cette conclusion.

11      En effet, il résulte de l’article 35, paragraphe 3, premier à troisième alinéas, du règlement de procédure et de l’article 7, paragraphe 5, deuxième alinéa, des instructions au greffier du Tribunal (JO 2007, L 232, p. 1) que, en l’absence d’une demande d’une partie en ce sens, ce n’est que si la traduction dans la langue de procédure apparaît nécessaire au bon déroulement de la procédure qu’il incombe au greffier d’y faire procéder (voir arrêt du Tribunal du 15 juin 2010, Mediaset/Commission, T‑177/07, Rec. p. II‑2341, point 37).

12      En l’espèce, en l’absence d’une demande en ce sens de la part des parties, le Tribunal n’a pas jugé nécessaire de demander la traduction dans la langue de procédure des pièces en cause, communiquées au titre d’exigences procédurales aux fins de l’identification de la demanderesse en intervention ainsi que de son représentant.

13      L’argument de la requérante selon lequel la demande en intervention est irrecevable au motif que les documents de régularisation de sa demande n’ont pas été fournis dans la langue de procédure doit donc être écarté.

14      Ensuite, le Tribunal constate que la décision attaquée a été adoptée à l’issue d’une procédure qui a été ouverte à la suite du dépôt d’une plainte par KTL le 8 juillet 2009. Dans cette plainte, KTL dénonçait la législation grecque régissant un régime de taxes sur les droits d’entrée dans les casinos, en faisant valoir qu’un tel régime équivalait à fournir une aide d’État à trois casinos grecs.

15      En outre, la décision attaquée conclut à l’existence d’un traitement fiscal discriminatoire au profit de certains casinos grecs bénéficiaires par l’application simultanée de diverses dispositions mises en œuvre illégalement par la Grèce et qui ne sont pas compatibles avec le marché intérieur parce qu’elles confèrent un avantage concurrentiel injustifié aux casinos bénéficiaires, dont la demanderesse en intervention ne fait pas partie. La décision attaquée est donc favorable à KTL et ses intérêts pourraient être affectés en cas d’annulation de ladite décision.

16      Il convient donc de considérer que KTL dispose d’un intérêt direct et actuel à la solution du litige, dès lors que le recours tend à l’annulation d’une décision adoptée à l’issue d’une procédure ouverte à la suite du dépôt de sa plainte et qui lui est favorable (voir, en ce sens, ordonnances du président de la troisième chambre du Tribunal du 24 mars 1997, British Coal/Commission, T‑367/94, Rec. p. II‑469, point 31, du président de la troisième chambre élargie du Tribunal du 25 février 2000, Diputación Foral de Álava e.a./Commission, T‑127/99, non publiée au Recueil, point 12, et du président de la sixième chambre du Tribunal du 6 juin 2008, Olympiakes Aerogrammes/Commission, T‑416/05, non publiée au Recueil, point 29).

17      Il s’ensuit que KTL a justifié de son intérêt à la solution du litige. Par conséquent, il y a lieu d’admettre sa demande d’intervention.

 Sur les droits procéduraux de l’intervenante

18      Il convient de rappeler que l’article 115, paragraphe 1, du règlement de procédure prévoit que la demande d’intervention est présentée au plus tard avant l’expiration d’un délai de six semaines qui prend cours à la publication au Journal officiel de l’Union européenne de l’avis relatif à l’introduction du recours, ou, à défaut, avant la décision d’ouvrir la procédure orale.

19      En outre, l’article 116, paragraphe 6, du règlement de procédure prévoit que, si la demande d’intervention a été présentée après l’expiration du délai de six semaines prévu à l’article 115, paragraphe 1, l’intervenant peut, sur la base du rapport d’audience qui lui est communiqué, présenter ses observations lors de la procédure orale.

20      Il résulte de la lecture combinée de ces dispositions que les droits procéduraux de l’intervenant sont différents selon que celui-ci a présenté sa demande d’intervention avant l’expiration du délai de six semaines prenant cours à la publication au Journal officiel de l’Union européenne de l’avis relatif à l’introduction du recours, ou après l’expiration de ce délai mais avant la décision d’ouvrir la procédure orale. Lorsque l’intervenant a présenté sa demande après l’expiration de ce délai, il est uniquement en droit de participer à la procédure orale, pour autant qu’il ait saisi le Tribunal avant l’ouverture de celle-ci. À ce titre, il doit recevoir communication du rapport d’audience et peut présenter ses observations sur la base de celui-ci lors de cette procédure orale (voir, en ce sens, ordonnance du président de la quatrième chambre du Tribunal du 28 avril 2005, Microsoft/Commission, T‑201/04, Rec. p. II‑1491, points 39 à 41).

21      En l’espèce, l’avis relatif à l’introduction du recours dans la présente affaire a été publié au Journal officiel de l’Union européenne du 4 février 2012 (JO C 32 p. 41). La demande d’intervention de KTL a été déposée au greffe du Tribunal le 27 juillet 2012. Il est donc manifeste qu’elle a été présentée après l’expiration du délai de six semaines prévu par l’article 115, paragraphe 1, du règlement de procédure, majoré du délai de distance de dix jours prévu par l’article 102, paragraphe 2, dudit règlement.

22      Dès lors, KTL ne peut prétendre qu’aux droits procéduraux prévus par l’article 116, paragraphe 6, du règlement de procédure.

 Sur les dépens

23      L’article 87, paragraphe 1, du règlement de procédure prévoit qu’il est statué sur les dépens dans l’arrêt ou l’ordonnance qui met fin à l’instance.

24      À ce stade de l’instance, les dépens doivent donc être réservés.

Par ces motifs,

LE PRÉSIDENT DE LA DEUXIÈME CHAMBRE DU TRIBUNAL

ordonne :

1)      Koinopraxia Touristiki Loutrakiou est admise à intervenir dans l’affaire T‑635/11 au soutien des conclusions de la Commission européenne.

2)      Conformément aux dispositions de l’article 116, paragraphe 6, du règlement de procédure du Tribunal, le greffier lui communiquera en temps utile le rapport d’audience en vue de la présentation de ses observations éventuelles lors de la procédure orale.

3)      Les dépens sont réservés.

Fait à Luxembourg, le 12 décembre 2012.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       N. J. Forwood


* Langue de procédure : l'anglais.