Language of document : ECLI:EU:T:2012:521


DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

4 octobre 2012 (*)

« FEOGA – Section ‘Garantie’ – Dépenses exclues du financement communautaire – Coton – Aide aux plus démunis – Développement rural – Efficacité des contrôles – Proportionnalité »

Dans l’affaire T‑215/10,

République hellénique, représentée initialement par M. I. Chalkias, Mmes G. Skiani et E. Leftheriotou, puis par M. Chalkias, Mmes Leftheriotou et X. Basakou, en qualité d’agents,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par Mmes H. Tserepa-Lacombe et A. Markoulli, en qualité d’agents, assistées de Me N. Korogiannakis, avocat,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision 2010/152/UE de la Commission, du 11 mars 2010, écartant du financement de l’Union européenne certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA), section « Garantie », du Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) et du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) (JO L 63, p. 7), dans la mesure où elle exclut certaines dépenses effectuées par la République hellénique,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. S. Papasavvas (rapporteur), président, V. Vadapalas et K. O’Higgins, juges,

greffier : Mme S. Spyropoulos, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 18 avril 2012,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Lors d’une mission d’enquête au titre de l’article 9, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 1258/1999 du Conseil, du 17 mai 1999, relatif au financement de la politique agricole commune (JO L 160, p. 103), effectuée en Grèce, les services de la Commission des Communautés européennes ont constaté diverses carences, notamment dans les contrôles sur place et la compatibilité avec le système intégré de gestion et de contrôle (ci-après le « SIGC »), dans le secteur du coton, du développement rural et de l’aide aux plus démunis.

 Correction financière appliquée aux dépenses dans le secteur du coton

2        Dans le cadre des enquêtes portant les références OTS/2003/01, OTS/2003/03 et OTS/2005/05, la Commission a effectué des vérifications en Grèce, du 31 mars au 4 avril 2003, du 20 au 24 octobre 2003 et du 17 au 21 octobre 2005, dans le domaine des aides à la production de coton.

3        À la suite d’un échange de correspondance, dans le cadre duquel les résultats desdites vérifications ont été communiqués pour l’ensemble des enquêtes à la République hellénique au titre de l’article 8 du règlement (CE) n° 1663/95 de la Commission, du 7 juillet 1995, établissant les modalités d’application du règlement (CEE) n° 729/70 en ce qui concerne la procédure d’apurement des comptes du FEOGA, section « Garantie » (JO L 158, p. 6), tel que modifié, des réunions bilatérales ont eu lieu entre la Commission et les autorités grecques, le 8 décembre 2005, s’agissant des enquêtes portant les références OTS/2003/01 et OTS/2003/03, et le 26 janvier 2007, s’agissant de l’enquête portant la référence OTS/2005/05. Le compte rendu de ces réunions a été notifié à la République hellénique par lettres de la Commission du 21 et du 30 mars 2006.

4        La République hellénique a présenté des observations sur les comptes rendus des réunions bilatérales par lettres des 26 juin 2006 et 3 mai 2007.

5        Par lettre du 14 novembre 2008, et conformément à l’article 11, paragraphe 2, troisième alinéa, du règlement (CE) n° 885/2006 de la Commission, du 21 juin 2006, portant modalités d’application du règlement (CE) n° 1290/2005 du Conseil en ce qui concerne l’agrément des organismes payeurs et autres entités ainsi que l’apurement des comptes du FEAGA et du Feader (JO L 171, p. 90), la Commission a communiqué officiellement à la République hellénique, pour l’ensemble des enquêtes effectuées, les conclusions auxquelles elle était parvenue sur la base des informations reçues dans le cadre de la procédure d’apurement de conformité ainsi que l’évaluation des dépenses déclarées à charge des exercices financiers 2004 à 2006 qu’elle envisageait d’exclure du financement communautaire.

6        Par lettre du 30 décembre 2008, la République hellénique a saisi l’organe de conciliation concernant la proposition de correction, qui a rendu son avis le 6 mai 2009.

7        Les services de la Commission ont communiqué à la République hellénique leur position finale par lettre du 31 juillet 2009.

 Correction financière appliquée dans le secteur de l’aide aux plus démunis

8        Dans le cadre de l’enquête portant la référence LA/2007/01/EL, la Commission a effectué, du 15 au 19 janvier 2007, un contrôle concernant l’aide aux plus démunis et a communiqué les résultats dudit contrôle à la République hellénique, conformément à l’article 11, paragraphe 1, du règlement n° 885/2006, par lettre du 14 mai 2007, à laquelle cette dernière a répondu, par lettre du 13 juillet 2007.

9        Une réunion bilatérale a eu lieu le 12 décembre 2007 entre les services de la Commission et les autorités grecques, dont le compte rendu ainsi qu’une version corrigée de celui-ci ont été communiqués à ces dernières par lettres du 27 février et du 13 mars 2008.

10      Par lettre du 11 septembre 2008, les services de la Commission ont communiqué officiellement aux autorités grecques leurs conclusions au titre de la procédure d’apurement de conformité, conformément à l’article 11, paragraphe 2, troisième alinéa, du règlement n° 885/2006, et leur intention d’exclure du financement communautaire certaines dépenses déclarées pour les exercices financiers 2005 à 2007 au titre de la fourniture de denrées alimentaires provenant des stocks d’intervention et destinées aux personnes les plus démunies de l’Union européenne (programmes 2003 à 2005).

11      Par lettre du 20 octobre 2008, la République hellénique a saisi l’organe de conciliation de cette proposition de correction, qui a rendu son avis 08/GR/382, le 19 février 2009.

12      Les services de la Commission ont communiqué à la République hellénique leur position finale par lettre du 17 novembre 2009.

 Correction financière appliquée dans le secteur du développement rural

13      Dans le cadre de l’enquête portant la référence RDG/2006/006/GR, la Commission a effectué, du 10 au 14 avril 2006, des contrôles concernant certaines mesures de développement rural relevant du Plan de développement rural 2000-2006 (retraite anticipée, zones défavorisées, mesures agro-environnementales et boisement des terres agricoles) exécutées au cours des années 2004 et 2005, dont les résultats ont été communiqués à la République hellénique, au titre de l’article 8 du règlement n° 1663/95, par lettre du 19 juillet 2006, à laquelle cette dernière a répondu par lettre du 19 septembre 2006.

14      Une réunion bilatérale a eu lieu le 1er mars 2007 entre les services de la Commission et les autorités grecques, dont le compte rendu a été communiqué à ces dernières par lettre du 7 mai 2007.

15      Par lettre du 4 avril 2008, et conformément à l’article 11, paragraphe 2, troisième alinéa, du règlement n° 885/2006, la Commission a communiqué officiellement à la République hellénique les conclusions auxquelles elle était parvenue sur la base des informations reçues dans le cadre de la procédure d’apurement de conformité en présentant l’évaluation des dépenses qu’elle proposait d’exclure du financement communautaire.

16      Par lettre du 9 mai 2008, et conformément à l’article 16, paragraphe 1 du règlement n° 885/2006, la République hellénique a saisi l’organe de conciliation de la correction proposée, qui a rendu son avis le 15 octobre 2008. La position finale de l’organe de conciliation ainsi que celle de la Commission ont été communiquées aux autorités grecques par lettre du 14 août 2009.

 Décision attaquée

17      Par la décision 2010/152/UE, du 11 mars 2010, écartant du financement de l’Union européenne certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA), section « Garantie », du Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) et du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) (JO L 63, p. 7, ci-après la « décision attaquée »), la Commission a écarté du financement communautaire, en ce qui concerne la République hellénique, la somme de 132 422 793,63 euros, pour des dépenses déclarées dans les secteurs du coton, du développement rural et de l’aide aux plus démunis, pour les exercices financiers 2004 à 2007.

18      Les motifs des corrections financières effectuées par la Commission sont résumés dans le rapport de synthèse du 30 septembre 2009, relatif aux résultats des inspections de la Commission dans le contexte de la procédure d’apurement de conformité, conformément à l’article 7, paragraphe 4, du règlement n° 1258/1999 et à l’article 31 du règlement n° 1290/2005 du Conseil, du 21 juin 2005, relatif au financement de la politique agricole commune (JO L 209, p. 1) (ci-après le « rapport de synthèse »), alors que les montants desdites corrections figurent dans l’annexe de la décision attaquée.

19      La décision attaquée vise, notamment, dans le tableau annexé à celle-ci, les corrections suivantes :

–        dans le secteur du coton, au titre des exercices financiers 2004 à 2006, une correction d’un montant total de 105 453 170,44 euros a été imposée, aux motifs d’insuffisances constatées dans le système de contrôle, le contrôle de la superficie et des mesures environnementales et en raison du dépassement des quantités autorisées par la réglementation, dont :

–        une correction forfaitaire à hauteur de 5 %, d’un montant de 12 022,67 euros, et une correction ponctuelle de 37 392 euros, au titre de l’exercice financier 2004 ;

–        une correction forfaitaire à hauteur de 5 %, d’un montant de 34 573 887,48 euros, et une correction ponctuelle de 1 284 276 euros, au titre de l’exercice financier 2005 ;

–        une correction forfaitaire à hauteur de 5 %, d’un montant de 68 134 305,29 euros, et une correction ponctuelle de 1 411 287 euros, au titre de l’exercice financier 2006 ;

–        dans le secteur du développement rural, au titre des exercices financiers 2005 et 2006, une correction d’un montant total de 18 523 716 euros a été imposée, pour les dépenses déclarées au titre des mesures de développement rural relatives à la surface (zones défavorisées, agroenvironnement et boisement des terres agricoles), aux motifs d’insuffisances persistantes dans le SIGC, de faiblesses dans les rapports de contrôle et de retards dans la réalisation des contrôles sur place, comportant :

–        deux corrections forfaitaires à hauteur de 10 %, de 8 498 907 euros et de 690 219 euros, au titre de l’exercice financier 2005 ;

–        une correction forfaitaire à hauteur de 5 %, d’un montant de 349 453 euros, et deux corrections forfaitaires à hauteur de 10%, de 6 168 408 euros et de 2 816 729 euros respectivement, au titre de l’exercice financier 2006 ;

–        dans le secteur de l’aide aux plus démunis, au titre des exercices financiers 2005 à 2007, une correction d’un montant total de 8 330 648,04 euros a été imposée, aux motifs de retraits des stocks d’intervention hors délai et de la distribution tardive des denrées alimentaires, dont :

–        une correction ponctuelle d’un montant de 1 310 306,02 euros, au titre de l’exercice financier 2005 ;

–        une correction ponctuelle d’un montant de 6 799 511,68 euros, au titre de l’exercice financier 2006 ;

–        une correction ponctuelle d’un montant de 220 830,34 euros, au titre de l’exercice financier 2007.

 Procédure et conclusions des parties

20      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 11 mai 2010, la République hellénique a introduit le présent recours.

21      La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, le juge rapporteur a été affecté à la cinquième chambre, à laquelle l’affaire a, par conséquent, été attribuée.

22      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (cinquième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale et, dans le cadre de mesures d’organisation de la procédure adoptées conformément à l’article 64 du règlement de procédure du Tribunal, de poser certaines questions ainsi que de demander la production de certains documents aux parties, qui ont déféré à ces demandes dans le délai imparti.

23      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience du 18 avril 2012.

24      La République hellénique conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer le recours fondé et annuler la décision attaquée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

25      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la République hellénique aux dépens.

 En droit

26      À l’appui de son recours, la République hellénique soulève dix moyens. Les cinq premiers concernent les corrections appliquées dans le secteur du coton, les deux suivants concernent la correction appliquée dans le secteur du développement rural et les trois derniers concernent la correction appliquée dans le secteur de l’aide aux plus démunis.

 Moyens relatifs aux corrections appliquées dans le secteur du coton

27      En ce qui concerne les corrections appliquées dans le secteur du coton, la République hellénique invoque cinq moyens, tirés, le premier, d’une appréciation erronée des faits et d’une violation de l’obligation de motivation ; le deuxième, d’une mauvaise appréciation des faits et d’une interprétation erronée de l’article 17 du règlement (CE) n° 1051/2001 du Conseil, du 22 mai 2001, relatif à l’aide à la production de coton (JO L 148, p. 3), et de l’article 13, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 1591/2001 de la Commission, du 2 août 2001, portant modalités d’application du régime d’aide pour le coton (JO L 210, p. 10) ; le troisième, d’une interprétation et d’une application erronées des orientations sur les corrections forfaitaires et d’une violation du principe de proportionnalité ; le quatrième, d’une interprétation erronée de l’article 7, paragraphe 4, du règlement n° 1051/2001 et des articles 1ers des règlements (CE) n° 1123/2004 de la Commission, du 17 juin 2004, fixant, pour la campagne de commercialisation 2003/2004, la production effective de coton non égrené ainsi que la réduction du prix d’objectif qui en résulte (JO L 218, p. 3), (CE) n° 905/2005 de la Commission, du 16 juin 2005, fixant, pour la campagne de commercialisation 2004/2005, la production effective de coton non égrené ainsi que la réduction du prix d’objectif qui en résulte (JO L 154, p. 3) et (CE) n° 871/2006 de la Commission, du 15 juin 2006, fixant, pour la campagne de commercialisation 2005/2006, la production effective de coton non égrené ainsi que la réduction du prix d’objectif qui en résulte (JO L 164, p. 3), et, le cinquième, de motifs de correction contradictoires et de calculs erronés.

 Sur le premier moyen, tiré d’une appréciation erronée des faits et d’une violation de l’obligation de motivation

28      La République hellénique estime que, si la Commission avait correctement apprécié les faits établis lors des enquêtes concernées et avait tenu compte des données qui lui avaient été communiquées pour les campagnes 2003/2004, 2004/2005 et 2005/2006, elle n’aurait pas dû appliquer de correction ou elle aurait dû, en tout état de cause, se contenter d’appliquer une correction de 2 % pour la campagne 2003/2004 et des corrections nulles pour les campagnes suivantes, eu égard aux améliorations substantielles apportées au système de contrôle lors de chaque campagne examinée. Elle soutient, à cet égard, que la Commission a fait une appréciation erronée des faits relatifs à l’environnement de contrôle, à la compatibilité du régime d’aide à la production avec le SIGC, à la qualité des contrôles sur place et à l’analyse du risque et, en outre, que la motivation de la décision attaquée est insuffisante.

29      Il convient de rappeler, à titre liminaire, que le Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA) ne finance que les interventions effectuées conformément aux dispositions communautaires dans le cadre de l’organisation commune des marchés agricoles (voir arrêt du Tribunal du 9 septembre 2011, Grèce/Commission, T‑344/05, non publié au Recueil, point 73, et la jurisprudence citée).

30      À cet égard, selon une jurisprudence constante, il résulte des règles relatives au FEOGA que les États membres sont tenus d’organiser un ensemble de contrôles administratifs et de contrôles sur place permettant d’assurer que les conditions matérielles et formelles d’octroi des aides sont correctement observées. Si l’organisation d’un tel ensemble de contrôles fait défaut ou si celle mise en place par un État membre est défaillante au point de laisser subsister des doutes quant à l’observation de ces conditions, la Commission est fondée à ne pas reconnaître certaines dépenses effectuées par l’État membre concerné (arrêt de la Cour du 14 avril 2005, Espagne/Commission, C‑468/02, non publié au Recueil, point 36 ; arrêts du Tribunal du 30 septembre 2009, Portugal/Commission, T‑183/06, non publié au Recueil, point 31, et Grèce/Commission, point 29 supra, point 74).

31      S’agissant des règles concernant la charge de la preuve dans le domaine de l’apurement des comptes, il convient de rappeler qu’il appartient à la Commission de prouver l’existence d’une violation des règles de l’organisation commune des marchés agricoles. Par conséquent, la Commission est obligée de justifier sa décision constatant l’absence ou les défaillances des contrôles mis en œuvre par l’État membre concerné. Toutefois, la Commission est tenue non de démontrer d’une façon exhaustive l’insuffisance des contrôles effectués par les administrations nationales ou l’irrégularité des chiffres transmis par celles-ci, mais de présenter un élément de preuve du doute sérieux et raisonnable qu’elle éprouve à l’égard de ces contrôles ou de ces chiffres. L’État membre concerné, pour sa part, ne saurait infirmer les constatations de la Commission sans étayer ses propres allégations par des éléments établissant l’existence d’un système fiable et opérationnel de contrôle. Dès lors qu’il ne parvient pas à démontrer que les constatations de la Commission sont inexactes, celles-ci constituent des éléments susceptibles de faire naître des doutes sérieux quant à la mise en place d’un ensemble adéquat et efficace de mesures de surveillance et de contrôle. Cet allégement de l’exigence de la preuve pour la Commission s’explique par le fait que c’est l’État membre qui est le mieux placé pour recueillir et vérifier les données nécessaires à l’apurement des comptes du FEOGA, et auquel il incombe, en conséquence, de présenter la preuve la plus détaillée et complète de la réalité de ses contrôles ou de ses chiffres et, le cas échéant, de l’inexactitude des affirmations de la Commission (arrêts de la Cour du 6 mars 2001, Pays‑Bas/Commission, C‑278/98, Rec. p. I‑1501, points 39 à 41, et du 24 février 2005, Grèce/Commission, C‑300/02, Rec. p. I‑1341, points 33 à 36 ; arrêt du 9 septembre 2011, Grèce/Commission, point 29 supra, point 76).

32      Il convient de rappeler, ainsi qu’il résulte du premier considérant du règlement (CE) n° 1740/97 de la Commission, du 5 septembre 1997, modifiant le règlement (CEE) n° 1201/89 portant modalités d’application du régime d’aide pour le coton (JO L 244, p. 1), que ce dernier a rendu applicable au régime d’aide à la production de coton certaines dispositions du SIGC afin de renforcer la gestion et le contrôle du régime d’aide au coton et d’éviter le risque de doubles paiements sur les mêmes superficies. Le deuxième considérant dudit règlement précise qu’il y a lieu d’ajouter, aux contrôles effectués par les États membres, les contrôles croisés avec le régime prévu dans le cadre du SIGC.

33      Il importe de rappeler également que l’article 9 du règlement n° 1591/2001 énonce clairement que l’identification des parcelles agricoles doit être conforme au système d’identification des parcelles agricoles (ci-après le « SIPA ») prévu dans le SIGC et prévoit une adaptation des superficies déclarées lorsque celles-ci diffèrent de celles constatées lors du contrôle.

34      En effet, ainsi qu’il résulte du considérant 4 du règlement (CE) n° 1486/2002 de la Commission, du 19 août 2002, modifiant le règlement n° 1591/2001 (JO L 223, p. 3), la connaissance la plus précise possible de l’exactitude des déclarations de superficie est un élément important de la gestion du régime d’aide, notamment dans le cadre des dispositions prises au titre de l’article 17, paragraphe 3, du règlement n° 1051/2001.

35      En l’espèce, la Commission a relevé des défaillances dans le système de contrôle instauré par les autorités grecques, notamment en ce qui concerne l’identification des parcelles agricoles conformément au SIGC, l’efficacité des contrôles sur place, les contrôles croisés et l’analyse du risque.

36      En particulier, dans la lettre du 14 novembre 2008 communiquant ses conclusions pour l’ensemble des enquêtes à la République hellénique, ainsi que dans le rapport de synthèse, la Commission a constaté des insuffisances dans le système de contrôle des superficies déclarées, tel qu’instauré par les autorités grecques. À cet égard, elle a relevé que, bien que les déclarations des surfaces ensemencées en coton aient été incluses dans la déclaration SIGC, la compatibilité du régime d’aide à la production de coton avec le SIGC n’était pas suffisamment assurée en Grèce, dans la mesure où :

–        les superficies de coton et les surfaces déclarées dans la déclaration SIGC (hors coton) faisaient l’objet de contrôles sur place séparés par des organismes différents ;

–        les services de l’Organismos pliromon kai elenchou koinotikon enischyseon prosanatolismou kai engyiseon [(Opekepe), organisme grec de paiement et de contrôle des aides d’orientation et de garantie], responsable pour la mise en œuvre des mesures liées au régime d’aide à la production de coton, ne disposaient que des informations relatives au coton contenues dans les déclarations SIGC alors que la réduction des surfaces de production pour chaque producteur entraînait un risque de déclaration limitée des superficies ensemencées en coton, que l’Opekepe n’était pas en mesure de couvrir complètement, dès lors qu’il n’aurait disposé de l’ensemble des informations contenues dans le SIGC (déclarations effectuées dans le cadre du SIGC et résultats des contrôles) que peu avant le versement final de l’aide ;

–        malgré les demandes répétées de la direction générale (DG) « Agriculture et développement rural », aucune information n’aurait été obtenue de la part des autorités grecques pour prouver la réalité des contrôles croisés qu’elles prétendaient avoir exécutés entre les déclarations effectuées dans le cadre du SIGC et les demandes d’aide au coton.

37      Il a été relevé, par ailleurs, que l’analyse de risque pour le contrôle des superficies ensemencées de coton se fondait à la fois sur la sélection de contrôles à réaliser dans le cadre du SIGC et sur les données historiques. Toutefois, cette procédure tenait compte d’éléments de risques non liés au coton et ne permettait pas de tenir suffisamment compte des rendements atypiques constatés en cours de campagne, ce qui aurait pu être fait par le suivi des livraisons de coton en temps réel par l’Opekepe. En outre, il a été constaté que le taux de contrôle sur place n’avait pas été augmenté à la suite des nombreuses irrégularités constatées.

38      S’agissant des suites données aux contrôles, il ressort du rapport de synthèse que, lorsque les contrôles sur place des superficies de coton montraient des écarts par rapport aux déclarations, la quantité de coton éligible à l’aide était simplement ajustée (réduite) à la surface contrôlée (multipliée par le rendement maximal autorisé) sans qu’aucune sanction soit appliquée aux producteurs au-delà de cette réduction pour avoir sous-déclaré la surface de coton. Or, selon l’avis de la DG « Agriculture et développement rural », l’absence d’application de sanctions réduirait à néant la portée des contrôles et leur effet dissuasif, ce qui avait, au demeurant, déjà été constaté lors des campagnes 1997/1998 à 2002/2003.

39      Force est de constater, ainsi que le relève la Commission, que le SIGC présentait des défaillances en Grèce en ce qui concerne, notamment, l’identification des parcelles agricoles et la qualité des contrôles sur place et que les affirmations de la République hellénique selon lesquelles les insuffisances constatées, prétendument mineures, n’ont pas affecté la régularité des paiements ne sauraient prospérer.

40      Premièrement, ainsi que l’invoque la Commission, les contrôles sur place effectués par l’Opekepe dits « de premier degré », consistant en la présence d’un contrôleur durant toute la période d’égrenage (24h/24) au sein de l’entreprise d’égrenage, assortis de contrôles ponctuels dits « de deuxième et de troisième degré », visaient à garantir l’existence physique du coton pour lequel l’aide avait été demandée et sa conformité avec les exigences d’éligibilité par rapport à sa qualité. En revanche, ces contrôles ne permettaient pas de garantir que le coton éligible provenait effectivement de superficies déclarées dans le cadre du SIGC, de manière à pouvoir s’assurer de la vraisemblance de l’origine du coton faisant l’objet des demandes d’aide.

41      Quant à l’argument de la République hellénique selon lequel les contrôles effectués en Grèce, selon la méthode de « production escomptée », fixée individuellement pour chaque producteur, et la méthode du contrôle des rendements des superficies cultivées, imposé à tous les producteurs, auraient, d’une part, empêché que du coton d’origine inconnue soit considéré éligible et, d’autre part, permis que toutes les superficies soient contrôlées, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, lorsqu’un règlement institue des mesures spécifiques de contrôle, les États membres sont tenus de les appliquer sans qu’il soit nécessaire d’apprécier le bien-fondé de leur thèse selon laquelle un système de contrôle différent serait plus efficace (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 11 juin 2009, Grèce/Commission, T‑33/07, non publié au Recueil, et la jurisprudence citée).

42      De surcroît, force est de relever que la Commission a constaté, dans la lettre du 14 novembre 2008 ainsi que dans le rapport de synthèse, que le système d’alerte précoce mis en place par les autorités grecques afin de détecter des rendements atypiques au fur et à mesure des livraisons et de vérifier que le coton provenait de superficies déclarées dans le cadre du SIGC n’a finalement pas été utilisé, ce qui au demeurant n’a pas été contesté par la République hellénique.

43      Deuxièmement, ainsi que la Commission l’a observé dans le rapport de synthèse, la République hellénique n’a pas démontré qu’une communication effective existait entre les services responsables des contrôles sur place. À cet égard, il y a lieu de relever que, bien que la République hellénique ait indiqué que les services de l’Opekepe alimentaient la base de données utilisée dans le cadre du SIGC avec les données relatives aux superficies ensemencées de coton obtenues auprès des directions de l’agriculture des nomes, elle a, toutefois, admis que des erreurs pouvaient survenir lors de l’enregistrement des données. Néanmoins, si elle affirme que ces erreurs étaient corrigées au fur et à mesure des contrôles administratifs réalisés par les nomes dont les résultats étaient transmis aux services de l’Opekepe afin que les corrections soient ensuite répercutées sur le logiciel des producteurs de coton de l’Opekepe et sur la base de données utilisée dans le cadre du SIGC, elle ne fournit aucune preuve quant à l’échange effectif des résultats desdits contrôles entre les services de l’Opekepe et les nomes, de sorte à établir que la base de données utilisée dans le cadre du SIGC était mise à jour.

44      Il s’ensuit que la Commission a conclu, à juste titre, que, bien que les autorités grecques aient fait valoir que des échanges existaient entre lesdits services, elles n’ont jamais fourni de copies d’une instruction écrite ou d’un document relatif à la transmission des résultats des contrôles, ni de preuve de la mise à jour de la base de données utilisée dans le cadre du SIGC en ce qui concerne les surfaces ensemencées de coton.

45      En outre, force est de relever que les documents soumis par la République hellénique au Tribunal pour étayer ses allégations sur la conformité des contrôles au SIGC et la communication entre les services responsables des contrôles sur place portent essentiellement sur la description des mesures et des procédures de contrôle adoptées en exécution des règlements n°s 1051/2001 et 1591/2001 et ne sauraient, en tout état de cause, constituer une preuve suffisante.

46      Même à supposer que les procédures de contrôle adoptées en exécution des règlements n°s 1051/2001 et 1591/2001 aient été effectivement suivies, un risque de paiement indu subsisterait, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence citée aux points 30 et 31 ci-dessus, eu égard aux erreurs et aux irrégularités constatées lors des contrôles sur place. Au demeurant, le fait qu’aucune de ces irrégularités n’a été relatée aux services responsables pour la gestion de l’aide à la production de coton confirme l’absence de communication entre les services mettant en œuvre le SIGC et ceux de l’Opekepe. Dès lors, la Commission a conclu, à juste titre, que la communication et l’échange de données entre le régime d’aide à la production de coton et le SIGC ainsi que la compatibilité dudit régime avec le SIGC n’était pas suffisamment garantie.

47      S’agissant des contrôles croisés prévus à l’article 13, paragraphe 1, sous f), du règlement n° 1591/2001, il convient de souligner que la République hellénique n’a pas apporté la preuve que ces contrôles avaient été réalisés. En effet, dans la requête, elle s’est limitée à renvoyer à des données statistiques qui démontreraient que, à la suite de contrôles administratifs et de contrôles sur place qui auraient été effectués sur les déclarations faites dans le cadre du SIGC en ce qui concerne les superficies ensemencées pour les campagnes 2002/2003 à 2005/2006 et de leur recoupement avec les demandes d’aide à la production de coton, un certain nombre de producteurs a été exclu du régime d’aide au coton.

48      Or, force est de constater que la Commission a fait état de discordances entre les superficies des parcelles déclarées dans les contrats conclus entre les agriculteurs et les entreprises d’égrenage, d’une part, et les superficies ensemencées de coton déclarées par les producteurs dans le cadre du SIGC, d’autre part. Ces discordances, qui avaient pourtant été portées à l’attention desdites autorités pendant la procédure administrative, s’agissant des enquêtes portant les références OTS/2003/01 et OTS/2003/03, permettaient, ainsi que l’a soutenu la Commission, de constater que les contrôles croisés avaient été inexistants ou complètement inefficaces. En effet, de telles discordances auraient dû être décelées par les autorités grecques lors de ces contrôles. De surcroît, leur présence permettait de douter de la vraisemblance des informations sur lesquelles se basaient les entreprises d’égrenage pour vérifier que le coton livré avait fait l’objet de déclarations dans le cadre du SIGC.

49      De même, dans la première communication adressée aux autorités grecques au titre de l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1663/95 relative à l’enquête portant la référence OTS/2005/05, du 23 mars 2006, la Commission a constaté qu’aucun contrôle croisé avec la base de données du SIGC n’avait été effectué et a demandé aux autorités grecques de lui fournir des preuves démontrant l’existence de tels contrôles, sans que celles-ci défèrent à cette demande.

50      Au vu de ce qui précède, il convient de conclure que la République hellénique n’a pas étayé ses allégations par des éléments établissant l’existence d’un système fiable et opérationnel de contrôle et que, par conséquent, la Commission n’a pas commis d’erreur en écartant une partie des dépenses en raison des insuffisances du système de contrôle constatées.

51      S’agissant du grief de la République hellénique selon lequel la décision attaquée ne serait pas suffisamment motivée, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la mesure de l’obligation de motiver consacrée par l’article 296 TFUE dépend de la nature de l’acte en cause et du contexte dans lequel il a été adopté (arrêts de la Cour du 22 juin 1993, Allemagne/Commission, C‑54/91, Rec. p. I‑3399, point 10, et du 14 avril 2005, Portugal/Commission, C‑335/03, Rec. p. I‑2955, point 83).

52      Dans le contexte particulier de l’élaboration des décisions relatives à l’apurement des comptes du FEOGA, la motivation d’une décision doit, selon la jurisprudence, être considérée comme suffisante dès lors que l’État destinataire a été étroitement associé au processus d’élaboration de cette décision et qu’il connaissait les raisons pour lesquelles la Commission estimait ne pas devoir mettre à la charge du FEOGA la somme litigieuse (voir arrêt du Tribunal du 12 juillet 2011, Slovénie/Commission, T‑197/09, non publié au Recueil, point 21, et la jurisprudence citée).

53      Or, il ressort de l’échange de correspondance dans le cadre des différentes enquêtes menées par la Commission entre les services de cette dernière et les autorités grecques, et du rapport de synthèse, que la République hellénique a pu connaître les motifs sur lesquels reposent les corrections proposées et qui fondent la décision attaquée, à savoir les insuffisances constatées dans le système de contrôle, l’absence de contrôles croisés, l’incompatibilité avec le SIGC, l’absence de contrôle des mesures environnementales et l’absence de sanctions ainsi que le dépassement des quantités autorisées par les règlements applicables.

54      Il résulte des constatations qui précèdent que la motivation de la décision attaquée est conforme aux exigences de l’article 296 TFUE.

55      Il s’ensuit que le premier moyen doit être rejeté comme non fondé, dans son ensemble.

 Sur le deuxième moyen, tiré d’une mauvaise appréciation des faits et d’une interprétation erronée de l’article 13, paragraphe 2, du règlement n° 1591/2001 et de l’article 17 du règlement n° 1051/2001

56      La République hellénique soutient que les appréciations de la Commission selon lesquelles le contrôle du respect des mesures environnementales adoptées au niveau national, au titre de l’article 17 du règlement n° 1051/2001, constitue un contrôle clé et un critère d’éligibilité de l’aide sont erronées. À cet égard, elle relève, d’une part, que l’article 17 du règlement n° 1051/2001 n’impose pas aux États membres de prévoir des sanctions lorsqu’ils prennent des mesures environnementales concrètes et, d’autre part, qu’un contrôle individuel et spécifique de chaque producteur quant au respect desdites mesures n’est pas concevable. Selon elle, la vérification du respect des mesures environnementales par un producteur déterminé découle nécessairement du rendement de la superficie de coton au niveau global.

57      Enfin, la République hellénique fait valoir qu’aucune sanction autre que celle prévue par l’article 13, paragraphe 2, du règlement n° 1591/2001, relative à l’exclusion du régime d’aide des quantités de coton produites résultant d’irrégularités, ne pouvait être infligée aux producteurs ayant fait l’objet d’un contrôle et dont la superficie constatée était différente de la superficie déclarée. Même à supposer que les mesures environnementales n’aient pas été intégralement appliquées ou contrôlées, elle estime que le risque pour le FEOGA est inexistant, compte tenu du fait que l’aide est octroyée en fonction de la quantité de coton livrée aux entreprises d’égrenage.

58      Il convient de rappeler, à titre liminaire, que, ainsi que l’a indiqué la Commission, la réforme du régime d’aide à la production de coton en 2001 a instauré l’obligation pour les États membres d’adopter des mesures environnementales appropriées et de prendre les mesures nécessaires pour rappeler aux producteurs la nécessité de respecter la législation environnementale.

59      Il y a lieu de relever, à cet égard, que, aux termes de l’article 17, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 1051/2001, les États membres prennent les mesures environnementales qu’ils considèrent appropriées compte tenu de la situation spécifique des surfaces agricoles utilisées pour la production de coton. En outre, les États membres prennent les mesures nécessaires pour rappeler aux producteurs la nécessité de respecter la législation environnementale. Les États membres limitent, le cas échéant, les superficies éligibles à l’aide à la production de coton non égrené, sur la base des critères objectifs qu’ils établissent en ce qui concerne :

–        l’économie agricole des régions pour lesquelles la production de coton est importante,

–        l’état pédoclimatique des superficies en question,

–        la gestion des eaux d’irrigation,

–        les rotations et techniques culturales susceptibles d’améliorer l’environnement.

60      Il découle du libellé des paragraphes 2 et 3 de l’article 17 du règlement n° 1051/2001 que les États membres disposent d’une large marge de discrétion quant à la forme, à la nature et au dispositif de contrôle des mesures environnementales adoptées, mais doivent veiller à en assurer le respect, en particulier dès lors qu’ils limitent les superficies éligibles à l’aide à la production de coton non égrené.

61      En l’espèce, il ressort du dossier que les mesures environnementales adoptées par la République hellénique, conformément à l’article 17 du règlement n° 1051/2001, comprenaient des mesures telles que la limitation de la surface de production et la réduction significative des superficies ensemencées, la fixation d’un plafond de rendement autorisé par producteur, le respect d’un code de bonnes pratiques agricoles prévoyant une rotation obligatoire des cultures et un programme de réduction de la pollution par les nitrates.

62      Ainsi que la Commission l’a relevé dans le cadre du rapport de synthèse, bien que l’arrêté ministériel n° 42195/2002, du 19 avril 2002, mettant en œuvre les mesures environnementales susvisées, ait défini des engagements individuels pour chaque producteur de coton dont le non-respect pouvait ériger des sanctions, ces dernières n’ont pas été appliquées.

63      En effet, les autorités grecques n’ont pas mis en place un dispositif de contrôle des mesures environnementales adéquat, mais se sont contentées d’un contrôle administratif du non-dépassement du rendement maximal fixé à chaque producteur. À cet égard, ainsi que la Commission l’a indiqué à juste titre, dans l’hypothèse d’un tel dépassement, les producteurs faisaient l’objet d’un contrôle automatique et la quantité de coton excédentaire produite était simplement exclue, sans qu’une amende leur soit imposée.

64      Or, ainsi que la Commission l’a relevé dans sa lettre du 14 novembre 2008 et dans le rapport de synthèse, au vu des mesures environnementales définies au niveau national par la République hellénique, les contrôles sur place des superficies prévus par l’article 13, paragraphe 2, du règlement n° 1591/2001 auraient dû être orientés vers la détection des superficies de coton non déclarées et le respect du code de bonnes pratiques agricoles. En revanche, lors des contrôles sur place effectués en Grèce, seules les surfaces ensemencées en coton qui avaient été déclarées étaient contrôlées.

65      Par ailleurs, ainsi qu’il résulte l’article 13, paragraphe 2, du règlement n° 1591/2001, en cas d’irrégularités constatées en ce qui concerne les superficies déclarées, l’aide est octroyée pour la quantité de coton pour laquelle toutes les autres conditions sont remplies, sous réserve de l’application des sanctions visées à l’article 14, paragraphe 1, dudit règlement. Cette dernière disposition prévoit que les États membres déterminent le régime de sanctions applicables aux violations des dispositions dudit règlement et prennent toute mesure nécessaire pour assurer la mise en œuvre de celles-ci, tout en veillant à ce qu’elles soient effectives, proportionnées et dissuasives.

66      Ainsi, la République hellénique n’est pas fondée à soutenir que la seule sanction envisageable sur le fondement de l’article 13, paragraphe 2, du règlement n° 1591/2001 est l’exclusion des quantités irrégulières du régime d’aide. Dès lors que les autorités grecques ont décidé de limiter les superficies éligibles à l’aide à la production de coton non égrené, conformément à l’article 17, paragraphe 3, du règlement n° 1051/2001, il était indispensable de prévoir un système de contrôle du respect de ces mesures et de sanctions en cas de violation desdites mesures, afin de garantir leur effet utile.

67      En outre, certaines mesures n’ont fait l’objet d’aucun contrôle, comme les mesures de rotation des cultures ou de réduction des nitrates. À cet égard, les autorités grecques ont fourni des données sur des exploitations dans la région de Thessalie contrôlées dans le cadre d’une mesure agro-environnementale de réduction de pollution par les nitrates et d’application des codes de bonnes pratiques agricoles sur la culture de coton. Toutefois, ces données ont été écartées par la Commission, dès lors que la mesure en question ne s’adressait qu’aux agriculteurs de la région de Thessalie et qu’elle ne concernait qu’une infime partie des producteurs de coton en Grèce, alors que les mesures environnementales liées à l’aide à la production de coton doivent être respectées par l’ensemble des producteurs concernés.

68      Il s’ensuit que, sans préjudice de l’efficacité éventuelle et de l’impact potentiellement positif de ces mesures sur l’environnement allégués par la République hellénique, dont en attesterait, notamment, la réduction de la consommation d’engrais et de produits phytopharmaceutiques, il n’en demeure pas moins que la République hellénique n’a pas mis en œuvre un système de contrôle permettant de s’assurer du respect desdites mesures par les producteurs.

69      Par ailleurs, ainsi que l’affirme la Commission, dans la mesure où le contrôle effectué était basé sur des évaluations globales de l’amélioration des indices environnementaux dans l’ensemble de la région, plutôt que sur le respect des mesures environnementales par chaque producteur, ne saurait être exclu le risque qu’une aide ait été accordée tant aux producteurs qui respectaient lesdites mesures qu’à ceux qui ne les respectaient pas.

70      Contrairement aux affirmations de la République hellénique, le seul fait d’avoir adopté des mesures environnementales concrètes, sans mettre en œuvre un système de contrôle adéquat et sans appliquer les sanctions prévues en cas de non respect de celles-ci, ne permet pas de garantir que les destinataires s’y conforment.

71      Enfin, la République hellénique conteste que le contrôle des mesures environnementales constituait un contrôle clé, dont l’absence justifierait l’application d’un taux de correction de 5 %, d’après les orientations pour l’application des corrections forfaitaires définies à l’annexe 2 du document VI/5330/97, du 23 décembre 1997, intitulé « Orientations concernant le calcul des conséquences financières lors de la préparation de la décision d’apurement des comptes du FEOGA-Garantie » (ci-après le « document VI/5330/97 »). À cet égard, il convient de rappeler que les contrôles clés sont les vérifications physiques et administratives requises pour contrôler les éléments quant au fond, alors que les contrôles secondaires sont des opérations administratives nécessaires pour le traitement correct des demandes, telles que la vérification du respect des délais de soumission, l’identification de demandes en double pour un même objet, l’analyse du risque, l’application de sanctions et la supervision adéquate des procédures.

72      Or, la République hellénique n’étaye pas ses arguments selon lesquels le contrôle en question devait être considéré comme un contrôle secondaire plutôt que comme un contrôle clé. En outre, force est de relever que les mesures adoptées par les autorités grecques visées au point 61 ci-dessus sont intimement liées au contrôle des superficies déclarées dans le cadre du SIGC, qui constitue un contrôle clé ayant pour objet, notamment, la prévention du risque de déclaration limitée des surfaces ensemencées et d’un risque consécutif de paiement indu. Il s’ensuit que, contrairement aux affirmations de la République hellénique, le contrôle de la mise en œuvre des mesures en question est nécessairement un contrôle clé.

73      Partant, le deuxième moyen doit être rejeté comme non fondé.

 Sur le troisième moyen, tiré d’une interprétation et d’une application erronées des orientations sur les corrections forfaitaires et d’une violation du principe de proportionnalité

74      La République hellénique fait valoir que la correction appliquée de 5 % concerne le défaut d’avoir effectué un contrôle clé, lequel ne serait pas pertinent en l’espèce. À cet égard, elle soutient que le document AGRI/17933/2000 de la Commission, qui définit pour chaque régime les contrôles clés et les contrôles secondaires, ne vise pas le coton. Elle affirme, toutefois, que, même dans l’hypothèse où le régime de coton aurait été intégré aux cultures arables, les deux contrôles clés prévus auraient été effectués normalement, au nombre, à la fréquence et à l’intensité requis par les règlements relatifs au coton. À titre subsidiaire, elle affirme que la correction de 5 % est excessive et disproportionnée par rapport au risque encouru, ce que l’organe de conciliation aurait reconnu dans son avis. En tout état de cause, si cette correction devait s’appliquer, elle aurait dû être échelonnée pour les trois campagnes examinées, au regard des améliorations successives introduites dans le système de contrôle lors des campagnes 2004/2005 et 2005/2006. Elle conclut que la correction de 5 % est illégale.

75      À titre liminaire, il convient de souligner que, en ce qui concerne le montant de la correction financière, la Commission peut aller jusqu’à refuser la prise en charge par le FEOGA de l’intégralité des dépenses exposées, si elle constate qu’il n’existe pas de mécanismes de contrôle suffisants (arrêts de la Cour du 20 septembre 2001, Belgique/Commission, C‑263/98, Rec. p. I‑6063, point 125, et du Tribunal du 28 mars 2007, Espagne/Commission, T‑220/04, non publié au Recueil, point 102). Cependant, la Commission doit respecter le principe de proportionnalité, qui exige que les actes des institutions de l’Union ne dépassent pas les limites de ce qui est approprié et nécessaire pour atteindre le but recherché (arrêt de la Cour du 17 mai 1984, Denkavit Nederland, 15/83, Rec. p. 2171, point 25). Si, dans le cadre de sa mission d’apurement des comptes, la Commission s’efforce, au lieu de refuser le financement de la totalité des dépenses, d’établir des règles visant à différencier selon le degré de risque que présentent, pour le FEOGA, différents niveaux de carence de contrôle, l’État membre doit démontrer que ces critères sont arbitraires et inéquitables (arrêt de la Cour du 4 juillet 1996, Grèce/Commission, C‑50/94, Rec. p. I‑3331, point 28, et arrêt du 11 juin 2009, Grèce/Commission, point 41 supra, point 140).

76      En ce qui concerne le niveau des corrections, il appartient à l’État membre de démontrer que la Commission a commis une erreur quant aux conséquences financières à tirer des irrégularités constatées (voir, en ce sens, arrêts Belgique/Commission, point 75 supra, point 37, et du 7 juillet 2005, Grèce/Commission, C‑5/03, Rec. p. I‑5925, point 38).

77      En l’espèce, la Commission a relevé, dans le cadre du rapport de synthèse, que les contrôles des superficies ensemencées, en ce compris les contrôles sur place, les contrôles croisés, les contrôles du respect des mesures environnementales définies par l’État membre et les sanctions s’y rapportant, sont des contrôles clés, au sens du document VI/5330/97, et qu’ils n’ont pas été suffisamment appliqués en Grèce pendant les campagnes 2003/2004 à 2005/2006. Elle a conclu que, en conséquence, il existait un risque pour le FEOGA et qu’une correction forfaitaire était plus à même de le couvrir, conformément au document VI/5330/97. En application dudit document, le taux de correction proposé a été fixé à 5 % pour les dépenses concernant les campagnes en question relatives aux exercices financiers 2004 et suivants, après déduction des corrections ponctuelles.

78      En premier lieu, il convient de relever que l’argument de la République hellénique selon lequel le document AGRI/17933/2000 de la Commission ne vise pas le coton est inopérant, dans la mesure où le taux de correction a été imposé sur la base du document VI/5330/97 qui définit, dans son annexe 2, les contrôles clés et les contrôles secondaires et dont le caractère applicable aux circonstances de l’espèce n’est pas contesté par la République hellénique.

79      En deuxième lieu, s’agissant du caractère proportionné du taux de correction de 5 % appliqué par la Commission, force est de constater que, contrairement aux allégations de la République hellénique, ce taux ne concerne pas l’hypothèse d’absence totale de contrôles clés devant être effectués, hypothèse dans laquelle un taux de 10 % aurait dû être appliqué, mais l’hypothèse où les contrôles clés ont été réalisés sans que le nombre, la fréquence ou la rigueur préconisés par les règlements aient été respectés. Dans ce cas, le taux de 5 % est considéré comme raisonnable, selon le document VI/5330/97, dès lors qu’il ne peux être conclu que ces contrôles offrent le niveau attendu de garantie de régularité des demandes et que le risque de pertes pour le FEOGA était significatif.

80      À cet égard, il y a lieu de rappeler, ainsi qu’il a été constaté dans le cadre des deux premiers moyens, que la République hellénique n’a ni apporté la preuve de la fiabilité du système de contrôle et de sa compatibilité avec le SIGC ni démontré que les contrôles croisés avaient été effectivement réalisés et que les mesures environnementales adoptées au niveau national avaient fait l’objet d’un contrôle adéquat ou que leur non-respect avait été sanctionné.

81      Force est, dès lors, de constater que les carences relevées par les services de la Commission concernent des éléments importants du système de contrôle ainsi que l’exécution de contrôles qui jouent un rôle majeur pour la détermination de la régularité de la dépense, de sorte qu’il pouvait être raisonnablement conclu que le risque de pertes pour le FEOGA était significatif. En conséquence, le montant non reconnu par la Commission, limité à 5 % des dépenses concernées, ne peut pas être considéré comme excessif et disproportionné (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 22 septembre 2011, Italie/Commission, T‑500/09, non publié au Recueil, point 50).

82      Au vu de ce qui précède et compte tenu des risques de déclaration limitée des surfaces ensemencées en coton et de paiements indus, il y a lieu de conclure que, en l’espèce, la correction forfaitaire de 5 % appliquée par la Commission est proportionnée.

83      En troisième lieu, s’agissant des arguments de la République hellénique selon lesquels, dans l’hypothèse où une correction forfaitaire de 5 % devait s’appliquer, elle aurait dû être échelonnée pour les trois campagnes examinées, au regard des améliorations successives introduites dans le système de contrôle lors des campagnes 2004/2005 et 2005/2006, ils ne sauraient prospérer, dès lors que, ainsi qu’il a été conclu dans le cadre du premier moyen, le risque subsistait, en dépit desdites améliorations. En effet, les autorités grecques ne sauraient soutenir que, en raison de ce constat, le taux des corrections à effectuer doit être réduit, dès lors que, en dépit de ces améliorations, aussi méritoires soient-elles, le risque de préjudice pour le FEOGA a continué à être très élevé (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 17 mars 2005, Grèce/Commission, C‑285/03, non publié au Recueil, point 63, et la jurisprudence citée).

84      Partant, le troisième moyen doit être rejeté comme non fondé.

 Sur le quatrième moyen, tiré d’une interprétation erronée de l’article 7, paragraphe 4, du règlement n° 1051/2001 et des dispositions des articles 1ers des règlements n°s 1123/2004, 905/2005 et 871/2006

85      La République hellénique soutient que, concernant la campagne 2003/2004, les calculs de la Commission sont erronés, puisque l’article 7, paragraphe 4, du règlement n° 1051/2001 exige un dépassement de la quantité nationale garantie supérieur à 15 000 t, pour que la « coresponsabilité » et le montant unitaire de l’aide soient affectés. Ainsi, aucune correction n’aurait dû être appliquée au titre des 58 t de dépassement, qui ne constitueraient pas un paiement indu. Par ailleurs, elle soutient que, pour les campagnes 2004/2005 et 2005/2006, la production effective éligible à l’aide, prévue par les règlements n° 905/2005 et n° 871/2006 respectivement, était supérieure à celle estimée par la Commission.

86      Il convient de rappeler que, en vertu de l’article 4, paragraphe 2, second alinéa, du règlement n° 1591/2001, tel que modifié, la quantité éligible correspond à la quantité de coton non égrené, de qualité saine, loyale et marchande, issue de superficies déclarées conformément à l’article 9 et non exclues du régime d’aide au titre de l’article 17, paragraphe 3, du règlement n° 1051/2001 qui a été livrée par les producteurs aux entreprises d’égrenage et pour laquelle les dispositions prévues aux articles 5, 6, 8 et 10 à 12 sont respectées.

87      L’article 16, paragraphe 3, second alinéa, du règlement n° 1591/2001, tel que modifié, prévoit que la production effective correspond à la production totale de coton non égrené, de qualité saine, loyale et marchande, issue des superficies déclarées conformément à l’article 9 et non exclues du régime d’aide au titre de l’article 17, paragraphe 3, du règlement n° 1051/2001, et qui a été livrée par les producteurs aux entreprises d’égrenage.

88      Aux termes de l’article 1er, paragraphe 1, du règlement n° 1123/2004, pour la campagne de commercialisation 2003/2004, la production effective de coton non égrené est fixée à 1 006 248 t pour la Grèce.

89      Selon l’article 1er, paragraphe 1, du règlement n° 905/2005, pour la campagne 2004/2005, la production effective de coton non égrené est fixée à 1 137 229 t pour la Grèce.

90      Conformément à l’article 1er du règlement n° 871/2006, pour la campagne 2005/2006, la production effective de coton non égrené est fixée à 1 124 714 t pour la Grèce.

91      En l’espèce, dans le cadre du rapport de synthèse, il a été relevé que, pour les campagnes 2003/2004 à 2005/2006 et d’après les données fournies par les autorités grecques au cours des enquêtes, les quantités totales de coton non égrené pour lesquelles une aide a été reçue, à savoir 1 006 307 t pour la campagne 2003/2004, 1 103 074 t pour la campagne 2004/2005 et 1 124 735 t pour la campagne 2005/2006, seraient supérieures au plafond éligible pour chaque campagne fixé à 1 006 248 t, 1 101 124 t et 1 122 445 t, respectivement. Par conséquent, la Commission a considéré qu’une partie des aides avait été indûment versée et a ainsi proposé les corrections ponctuelles correspondantes.

92      En premier lieu, il y a lieu de relever que l’argument de la République hellénique selon lequel les montants des corrections ponctuelles reposent sur des estimations et, de ce fait, ne sont pas définitifs ne saurait prospérer. En effet, ainsi que le fait observer la Commission, les montants des corrections ponctuelles ont été estimés sur la base des informations fournies par les autorités grecques concernant, notamment, les quantités de coton produites et n’étaient susceptibles d’être modifiés que sur la base de preuves supplémentaires fournies par lesdites autorités. En tout état de cause, les montants des corrections ponctuelles proposées dans le rapport de synthèse sont identiques à ceux qui figurent dans la décision attaquée, lesquels ne sont pas qualifiés d’estimations. Ainsi, il convient d’écarter l’argument de la République hellénique comme étant inopérant.

93      En deuxième lieu, s’agissant des quantités éligibles, force est de constater que les parties ne sont pas d’accord sur la portée de cette notion ainsi que sur la portée des règlements n°s 1123/2004, 905/2005 et 871/2006 et sur les quantités de production autorisées par ces derniers. En effet, la République hellénique estime que la production éligible de coton non égrené pour les périodes de commercialisation concernées coïncide avec la production effective telle que définie par lesdits règlements, à savoir 1 006 248 t pour la campagne 2003/2004, 1 137 229 t pour la campagne 2004/2005 et 1 124 714 t pour la campagne 2005/2006, et que, par conséquent, l’ensemble de la production effective de coton non égrené produite légalement et conformément aux règlements n°s 1051/2001 et 1591/2001 sur le territoire grec est éligible à l’aide.

94      En ce qui concerne la correction ponctuelle appliquée au titre de la campagne 2003/2004, il ressort du rapport de synthèse et de la décision attaquée que les autorités grecques ont dépassé la quantité de production définie par le règlement n° 1123/2004 comme constituant tant la production éligible qu’effective, ce que, au demeurant, la République hellénique ne conteste pas. En effet, au lieu des 1 006 248 t de coton non égrené reconnues éligibles à l’aide par les autorités grecques, selon le considérant 4 dudit règlement, qui équivalent à la quantité considérée comme production effective par l’article 1er, premier tiret, de ce même règlement, la quantité de coton pour laquelle une aide a été accordée pour ladite campagne était égale à 1 006 307 t.

95      Ainsi que le fait observer la Commission, les 15 000 t de dépassement dont fait état la République hellénique concernent le montant dont est réduit le prix d’objectif, conformément à l’article 7, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 1051/2001, du fait du dépassement de la production nationale garantie par la production effective.

96      Il convient de rappeler à cet égard que l’article 6, premier tiret, du règlement n° 1051/2001 institue une quantité nationale garantie de coton non égrené égale, pour chaque campagne de commercialisation, à 782 000 t pour la Grèce. Le dépassement éventuel de la quantité nationale garantie, au cours d’une campagne de commercialisation, peut avoir pour effet la diminution du prix d’objectif fixé par l’article 3, paragraphe 1, du règlement n° 1051/2001, sur la base duquel est calculé le montant de l’aide à la production de coton non égrené, conformément à l’article 2, paragraphe 1, dudit règlement et affecter, ainsi, le montant de l’aide. De ce fait, une correction ponctuelle est appliquée en fonction du pourcentage de dépassement de la quantité nationale garantie.

97      Or, en l’espèce, la correction ponctuelle au titre de la campagne de 2003/2004 n’a pas été appliquée du fait du dépassement de la quantité nationale garantie, mais en raison du fait que la quantité totale de coton non égrené ayant reçu une aide en Grèce était supérieure à la production éligible, fixée par le règlement n° 1123/2004. Ainsi, la thèse de la République hellénique selon laquelle le dépassement en cause n’avait pas pour conséquence qu’un paiement indu avait été consenti aux autorités grecques doit être écartée.

98      S’agissant de la campagne 2004/2005, il ressort du considérant 3 du règlement n° 905/2005 que la quantité de 1 135 534 t de coton non égrené a été reconnue éligible à l’aide par les autorités grecques, alors que, selon le considérant 6 et l’article 1er dudit règlement, la production effective grecque s’élevait à 1 137 229 t. Ainsi que la Commission l’a indiqué dans ses écritures et qu’il découle des considérants 4 et 5 du règlement en cause, la quantité de 34 142 t de coton non égrené n’avait pas été reconnue éligible à l’aide par les autorités grecques elles-mêmes et a donc été déduite de l’aide, à l’exception d’une quantité de 1 644 t dont l’exclusion n’a pas été considérée justifiée, dès lors qu’elle répondait aux exigences de l’article 16, paragraphe 3, deuxième alinéa, du règlement n° 1591/2001. Il a été considéré, par conséquent, que la quantité de 1 644 t faisait partie de la production effective, mais qu’elle n’était pas éligible, dès lors qu’elle a été détruite par des inondations et que les producteurs ont été dédommagés. Ensuite, en application de l’article 15, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement n° 1051/2001 et compte tenu des données fournies par la République hellénique à la Commission, la quantité de coton non égrené a été multipliée par 33 et divisée par 32 pour obtenir la quantité effective finale de coton qui est également celle fixée par l’article 1er du règlement n° 905/2005, à savoir 1 137 229 t.

99      De même, s’agissant de la campagne 2005/2006, il ressort du troisième considérant du règlement n° 871/2006 que la quantité de coton non égrené reconnue éligible à l’aide par les autorités grecques était de 1 122 445 t, alors que, selon le considérant 6 et l’article 1er dudit règlement, la quantité de production effective était de 1 124 714 t. Dès lors que la quantité de production effective définie par le règlement n° 871/2006 et que la quantité ayant reçu une aide, selon le rapport de synthèse, de 1 124 735 t (après bonification) sont supérieures à la production reconnue éligible pour ladite campagne, c’est sans commettre d’erreur que la Commission a appliqué une correction ponctuelle à cet égard.

100    De surcroît, force est de constater que l’argument de la République hellénique selon lequel la Commission s’est fondée à tort sur les quantités présentées par les autorités grecques comme devant bénéficier d’une aide au lieu de se fonder sur celles fixées par les règlements pertinents ne saurait prospérer, dès lors que ces dernières quantités ont été déterminées sur la base des données fournies par les autorités grecques elles-mêmes.

101    Il s’ensuit que, dans la mesure où, pour l’ensemble des campagnes de commercialisation, la quantité de production effective grecque était supérieure à la quantité éligible à l’aide, la Commission n’a pas commis d’erreur en imposant une correction ponctuelle à la République hellénique.

102    Partant, ce moyen doit être rejeté comme non fondé.

 Sur le cinquième moyen, tiré de motifs de corrections contradictoires et de calculs erronés

103    La République hellénique fait valoir que la décision attaquée contient des erreurs de calcul et des montants de corrections qui sont contradictoires et qui créent une confusion, la privant ainsi fondamentalement de son droit de réfutation et de défense. Par conséquent, elle estime que ladite décision doit être annulée et qu’aucune correction financière ne doit être décidée dans le secteur de l’aide à la production de coton. À titre subsidiaire, elle fait valoir que, s’il est jugé qu’il existe un fondement légitime pour l’insuffisance du système de contrôle quant aux contrôles accessoires, la correction ne peut pas dépasser 2 % et ne peut concerner que la campagne 2003/2004.

104    Il ressort de la jurisprudence que le respect des droits de la défense dans toute procédure ouverte à l’encontre d’une personne et susceptible d’aboutir à un acte faisant grief constitue un principe fondamental de l’Union qui doit être assuré, même en l’absence de toute réglementation concernant la procédure. Ce principe exige que les destinataires de décisions qui affectent de manière sensible les intérêts de ceux-ci soient mis en mesure de faire connaître utilement leur point de vue (voir arrêt de la Cour du 19 janvier 2006, Comunità montana della Valnerina/Commission, C‑240/03 P, Rec. p. I‑731, point 129, et la jurisprudence citée).

105    En l’espèce, il est constant entre les parties que les montants des corrections forfaitaires qui ont été communiqués aux autorités grecques durant la procédure d’apurement diffèrent de ceux qui figurent dans le rapport de synthèse et dans la décision attaquée.

106    Or, ainsi que le fait valoir la Commission, l’erreur de correspondance entre les montants des corrections et les campagnes de commercialisation pertinentes qui a été relevée dans le rapport de synthèse et dans la décision attaquée n’est intervenue qu’à l’issue de la procédure administrative, au cours de laquelle les montants corrects ont été communiqués aux autorités grecques. En effet, l’ensemble de la procédure administrative s’est déroulée sur la base du tableau annexé à la lettre du 14 novembre 2008, dont les chiffres sont corrects. Par ailleurs, le montant total des corrections appliquées dans le secteur du coton n’a pas été affecté par l’erreur en question.

107    Force est de conclure que, ainsi que l’a relevé à juste titre la Commission, il s’agit d’une simple erreur typographique qui, bien que regrettable, ne saurait conduire à l’annulation de la décision attaquée (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 31 mars 2011, Grèce/Commission, T‑214/07, non publié au Recueil, point 44, et la jurisprudence citée), qui plus est dans une situation où la République hellénique a été en mesure de faire connaître utilement son point de vue, conformément aux exigences de la jurisprudence citée au point 104 ci-dessus.

108    Au vu de ce qui précède, il ne saurait être considéré que les droits de la défense de la République hellénique ont été violés.

109    Quant aux arguments avancés par la République hellénique à titre subsidiaire selon lesquels la correction appliquée ne pouvait, en tout état de cause, dépasser le taux de 2 % et ne pouvait concerner que la campagne 2003/2004, il y a lieu de constater qu’ils se rattachent aux arguments soulevés dans le cadre des premier et troisième moyens (voir points 28 et 74 ci-dessus) et qu’ils doivent, par conséquent, être rejetés pour les mêmes raisons que celles exposées dans ces derniers et, notamment, au point 83 ci-dessus.

110    Par conséquent, il convient de rejeter le cinquième moyen comme non fondé.

 Moyens relatifs aux corrections appliquées dans le secteur du développement rural

111    En ce qui concerne les corrections appliquées dans le secteur du développement rural, la République hellénique invoque deux moyens, tirés, le premier, de l’illégalité de la procédure d’apurement des comptes en raison d’une violation des formes substantielles prévues par l’article 8, paragraphe 1, troisième alinéa, sous a), du règlement n° 1663/95 et, le second, d’une appréciation erronée des faits et d’un défaut de motivation.

 Sur le premier moyen, tiré de l’illégalité de la procédure d’apurement des comptes en raison d’une violation des formes substantielles prévues par l’article 8, paragraphe 1, troisième alinéa, sous a), du règlement n° 1663/1995

112    La République hellénique fait valoir que la correction financière imposée ne repose pas sur des constatations précises de l’enquête portant la référence RDG/2006/006/GR relatives aux mesures et exercices ayant fait l’objet du contrôle. Elle indique, à cet égard, que, dans la lettre du 19 juillet 2006, ainsi que dans le compte rendu de la réunion bilatérale, la Commission ne se réfère que de manière très générale et vague à des insuffisances du SIGC, ce qu’elle a fait valoir lors de la réunion bilatérale. Elle soutient, en outre, que la Commission a fait référence à des insuffisances précises du SIPA, ainsi qu’à un certain nombre de documents concernant la notification de ces insuffisances, succinctement et pour la première fois, après la réunion bilatérale. Selon elle, ces insuffisances concernaient d’autres vérifications et procédures non précisées et, par conséquent, l’imposition d’une correction financière a été faite en violation des dispositions et procédures relatives à l’apurement des comptes et, de ce fait, est illégale.

113    Il convient de considérer que, par ce moyen, la République hellénique vise à établir une violation de ses garanties procédurales et de ses droits de la défense par la Commission lors de la procédure administrative. Aux fins de cet examen, il y a lieu de vérifier si, en l’espèce, lors de la procédure d’apurement de conformité, la Commission a méconnu les garanties procédurales de la République hellénique, telles que prévues par l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1663/95 et interprétées par la jurisprudence, et a, le cas échéant, violé les droits de la défense de la République hellénique.

114    À cet égard, il y a lieu de rappeler, tout d’abord, que, en vertu de l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1663/95, tel que modifié notamment par le règlement (CE) n° 2245/1999 de la Commission, du 22 octobre 1999 (JO L 273, p. 5), la Commission doit, à l’issue d’une enquête et dans le cas où elle considère que les dépenses n’ont pas été effectuées conformément aux règles de l’Union, communiquer les résultats de ses vérifications à l’État membre et indiquer les mesures correctives à prendre pour garantir à l’avenir le respect de ces règles.

115    Conformément à la jurisprudence, la « communication écrite » au sens de cette disposition doit donner au gouvernement concerné une parfaite connaissance des réserves de la Commission, de sorte qu’elle puisse remplir la fonction d’avertissement conférée par ladite disposition (arrêts de la Cour du 24 janvier 2002, Finlande/Commission, C‑170/00, Rec. p. I‑1007, point 34, et du 7 octobre 2004, Espagne/Commission, C‑153/01, Rec. p. I‑9009, point 93).

116    Il s’ensuit que l’article 8, paragraphe 1, du règlement nº 1663/95 exige que l’irrégularité qui est reprochée à l’État membre concerné figure de manière suffisamment précise dans la communication écrite prévue au premier alinéa de ladite disposition, de telle sorte que cet État en ait une connaissance parfaite. Ainsi, une communication qui ne remplit pas cette condition ne peut être qualifiée de communication écrite au sens de la même disposition.

117    En outre, le non-respect de ladite condition imposée à cet article 8, paragraphe 1, vide de sa substance la garantie procédurale accordée aux États membres à l’article 5, paragraphe 2, sous c), cinquième alinéa, du règlement n° 729/70 du Conseil, du 21 avril 1970, relatif au financement de la politique agricole commune (JO L 94, p. 13), et à l’article 7, paragraphe 4, cinquième alinéa, du règlement nº 1258/1999, qui limite dans le temps les dépenses sur lesquelles peut porter un refus de financement par le FEOGA (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 13 juin 2002, Luxembourg/Commission, C‑158/00, Rec. p. I‑5373, point 24, et du 24 février 2005, Grèce/Commission, point 31 supra, point 70).

118    L’article 8, paragraphe 1, du règlement nº 1663/95 doit ainsi être lu en combinaison avec l’article 5, paragraphe 2, sous c), cinquième alinéa, du règlement n° 729/70 et l’article 7, paragraphe 4, cinquième alinéa, du règlement nº 1258/1999, selon lesquels la Commission ne peut pas exclure les dépenses qui ont été effectuées plus de 24 mois avant qu’elle n’ait notifié par écrit à l’État membre concerné les résultats des vérifications. Il en résulte que la communication écrite prévue à l’article 8, paragraphe 1, premier alinéa, sert d’avertissement de ce que les dépenses effectuées pendant la période de 24 mois qui précède la notification de cette communication peuvent être exclues du financement par le FEOGA et, partant, celle-ci constitue l’élément de référence pour le décompte du délai de 24 mois ainsi prévu.

119    En conséquence, afin de remplir sa fonction d’avertissement, notamment à la lumière de l’article 5, paragraphe 2, sous c), cinquième alinéa, du règlement n° 729/70 et de l’article 7, paragraphe 4, cinquième alinéa, du règlement nº 1258/1999, la communication visée à l’article 8, paragraphe 1, du règlement nº 1663/95 doit d’emblée identifier de manière suffisamment précise toutes les irrégularités reprochées à l’État membre concerné qui ont, en définitive, fondé la correction financière effectuée. Seule une telle communication est en mesure de garantir une parfaite connaissance des réserves de la Commission au sens de la jurisprudence de la Cour citée au point 115 du présent arrêt et peut constituer l’élément de référence pour le décompte du délai de 24 mois prévu à l’article 5, paragraphe 2, sous c), cinquième alinéa, du règlement n° 729/70 et à l’article 7, paragraphe 4, cinquième alinéa, du règlement nº 1258/1999.

120    En l’espèce, il convient de relever que, notamment au point 1.1 de la lettre du 19 juillet 2006, adressée à la République hellénique au titre de l’article 8, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement n° 1663/1995, intitulé « Reconnaissance des parcelles », la Commission a indiqué que, en dépit des améliorations constatées en ce qui concerne les missions précédentes, certaines insuffisances avaient été observées dans le cadre de la sous-rubrique agro-environnementale « Agriculture biologique ». À cet égard, les services de la Commission ont constaté que, dans trois demandes de soutien, la parcelle était identifiée par rapport à son emplacement, mais que les demandes de soutien étaient toujours accompagnées de l’extrait officiel de la base de données utilisée dans le cadre du SIGC (déclaration faite dans le cadre du SIGC), dans laquelle le code à treize chiffres d’identification des parcelles était utilisé. La Commission a, ensuite, demandé aux autorités grecques d’améliorer leur système afin de garantir l’identification précise des parcelles et des animaux individuellement dans le cadre des demandes de soutien pour toutes les mesures de développement rural liées à la surface, conformément à l’article 66 du règlement (CE) n° 817/2004 de la Commission, du 29 avril 2004, portant modalités d’application du règlement (CE) n° 1257/1999 du Conseil, concernant le soutien au développement rural par le Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA) (JO L 153, p. 30).

121    Par ailleurs, s’agissant du point 2.1 de la lettre, intitulé « Contrôles croisés sur la base des données du SIGC », la Commission a constaté des améliorations par rapport aux missions précédentes. Elle a indiqué, en outre, que les demandes de soutien examinées étaient toujours accompagnées de la déclaration officielle faite dans le cadre du SIGC, sur laquelle des contrôles croisés avaient été effectués. De plus, elle a relevé que des éléments de preuve de la réalisation de contrôles croisés informatisés avaient été prélevés avant les versements de l’aide. Toutefois, elle a conclu que des éléments de preuve qui avaient été récoltés lors de missions de vérification antérieures démontraient que des insuffisances importantes subsistaient quant au SIGC. Partant, tout en reconnaissant les efforts entrepris par les autorités grecques, il leur a été rappelé que des insuffisances importantes subsistaient dans le cadre du fonctionnement du SIGC en Grèce.

122    La République hellénique a, par lettre du 21 septembre 2006, déposé des observations sur la lettre du 19 juillet 2006, dans le cadre desquelles elle n’a ni réagi ni demandé une clarification quant aux insuffisances du SIGC soulevées par la Commission. Elle s’est contentée de répéter que les agents de la Commission qui avaient effectué les contrôles ont, d’une part, reconnu les efforts importants entrepris afin d’améliorer les systèmes de contrôle et, d’autre part, constaté que tous les contrôles croisés exigés entre les demandes d’aide et la base de données utilisée dans le cadre du SIGC avaient été réalisés au titre des mesures concernées.

123    La Commission, dans sa lettre du 29 janvier 2007 par laquelle elle a invité la République hellénique à une réunion bilatérale, tout en mentionnant les contrôles administratifs et, notamment, les contrôles croisés avec la base de données utilisée dans le cadre du SIGC parmi les sujets qui feraient l’objet de discussion et pour lesquels des informations complémentaires pouvaient être soumises et tout en reconnaissant les progrès réalisés en la matière, a rappelé ensuite que la position générale de ses services était que des insuffisances importantes persistaient quant au SIGC en Grèce. S’agissant de l’identification des parcelles agricoles, la Commission a, d’une part, exprimé son désaccord avec la position des autorités grecques selon laquelle, en Grèce, les parcelles concernées par les mesures agro-environnementales ou les mesures relatives aux zones défavorisées auraient été identifiées conformément à l’article 66, paragraphe 4, du règlement n° 817/2004 et, d’autre part, a souligné que ses services considéraient insuffisante l’identification des parcelles dans les demandes de soutien relatives à la mesure agro-environnementale concernée.

124    Dans le compte rendu de la réunion bilatérale, qui s’est tenue le 1er mars 2007, transmis à la République hellénique par lettre du 7 mai 2007, la Commission a réitéré sa position selon laquelle l’identification des parcelles agricoles par rapport à la mesure agro-environnementale concernée était insuffisante et a invité les autorités grecques à lui transmettre, pour chacun des trois nomes contrôlés, dix demandes de soutien introduites par des bénéficiaires de cette mesure en 2006. S’agissant des contrôles croisés avec la base de données utilisée dans le cadre du SIGC, les services de la Commission ont rappelé les lacunes du SIPA et du SIGC constatées en Grèce dans le cadre de diverses enquêtes réalisées. La Commission a également fait état du désaccord exprimé par les autorités grecques concernant le caractère général de la position exprimée par elle, laquelle, selon elles, ne saurait constituer une base pour l’application d’une correction financière. Elle a conclu que, sur la base de toutes les informations reçues, elle n’était pas en mesure d’évaluer le risque réel encouru, mais que les lacunes constatées en ce qui concerne l’identification des parcelles agricoles, le SIGC, les rapports de contrôle, les contrôles sur place et les pratiques agricoles devaient être considérées comme constituant des lacunes de contrôles clés, emportant une correction de 5 % pour les dépenses déclarées au titre des mesures s’y rapportant. Elle a néanmoins ajouté que l’évaluation finale du risque pour le FEOGA se fonderait sur les informations supplémentaires soumises par les autorités grecques.

125    Enfin, à la suite de la présentation d’informations complémentaires par la République hellénique après la réunion bilatérale, la Commission a, par lettre du 4 avril 2008, communiqué ses conclusions à la République hellénique, au titre de l’article 11, paragraphe 2, troisième alinéa, du règlement n° 885/2006. Dans cette lettre, la Commission a effectivement fourni des précisions concernant les insuffisances du SIPA et du SIGC évoquées dans le cadre de courriers précédents.

126    En particulier, la Commission a indiqué que divers audits de ses services avaient révélé des insuffisances dans le fonctionnement du SIGC en Grèce, lesquelles, conformément à l’annexe 8 de son document AGRI/17933/2000, devraient être considérées comme constituant des insuffisances de contrôles clés, ayant un impact sur les dépenses de développement rural qui sont liées aux mesures basées sur la superficie « e. (zones défavorisées) », « f. (agroenvironnement) » et « h. (boisement des terres agricoles) », étant donné que les paiements au titre des ces mesures sont effectués par recoupement des données provenant du SIPA. Elle a relevé, en outre, que, conformément aux constatations de ses services, des lacunes graves et persistantes affecteraient le SIPA s’agissant des exercices financiers 2005 et 2006 et que, par conséquent, le SIGC en Grèce ne fonctionnait pas complètement lors de la période concernée par l’enquête.

127    Les faiblesses du SIPA énoncées par la Commission dans sa lettre du 4 avril 2008 portaient, premièrement, sur le système d’information géographique informatisé dont la forme n’était pas compatible avec celle requise par l’article 20 du règlement (CE) n° 1782/2003 du Conseil, du 29 septembre 2003, établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs et modifiant les règlements (CEE) n° 2019/93, (CE) n° 1452/2001, (CE) n° 1453/2001, (CE) n° 1454/2001, (CE) n° 1868/94, (CE) n° 1251/1999, (CE) n° 1254/1999, (CE) n° 1673/2000, (CEE) n° 2358/71 et (CE) n° 2529/2001 (JO L 270, p. 1), et qui n’était pas accessible à l’ensemble des agriculteurs et unions d’agriculteurs ; deuxièmement, sur l’ancienneté des orthophotographies utilisées pour 90 % des parcelles ; troisièmement, sur l’inexactitude des informations relatives aux parcelles de référence et, quatrièmement, sur l’absence de conformité des parcelles à l’article 6, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 796/2004 de la Commission, du 21 avril 2004, portant modalités d’application de la conditionnalité, de la modulation et du système intégré de gestion et de contrôle prévus par le règlement n° 1782/2003 (JO L 141, p. 18), de façon à rendre les contrôles croisés inefficaces et incomplets.

128    Il convient de relever, en outre, que la Commission a indiqué que les carences susvisées avaient été communiquées aux autorités grecques par lettres des 23 mars 2006 et 6 juin 2007.

129    Ces constatations ont, par ailleurs, été réitérées aux points 17.2.1 et 17.2.2 du rapport de synthèse et les corrections forfaitaires imposées à hauteur de 10 % au titre des mesures basées sur la superficie ont été fondées en partie sur les insuffisances du SIGC, pour les exercices financiers 2005 et 2006.

130    En réponse à une question du Tribunal dans le cadre de mesures d’organisation de la procédure, la Commission a produit les lettres des 23 mars 2006 et 6 juin 2007 qui ont été transmises aux autorités grecques. Il ressort de ces documents, ainsi que l’a d’ailleurs soutenu la République hellénique, qu’ils ne portent pas sur l’enquête portant la référence RDG/2006/006/GR relative aux mesures et exercices ayant fait l’objet du contrôle. En effet, ces lettres portent, respectivement, sur l’enquête portant la référence AA/2005/05 relative aux cultures arables et sur les enquêtes portant les références AA/2006/14 et AA/2007/06 relatives aux aides à la surface. Ces lettres constituent, dans le contexte de ces enquêtes, la première communication adressée aux autorités grecques conformément à l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1663/95 et à l’article 11, paragraphe 2, du règlement n° 885/2006 et comportent en annexe les observations et les demandes d’informations complémentaires résultant des missions de vérification effectuées en Grèce, du 10 au 14 avril 2005 en ce qui concerne l’enquête portant la référence AA/2005/05, visée par la première lettre, du 5 au 12 octobre 2006 et du 27 février au 1er mars 2007 en ce qui concerne les enquêtes portant les références AA/2006/14 et AA/2007/06, visées par la seconde lettre.

131    Force est de constater que, eu égard aux exigences requises par la jurisprudence citée aux points 115 à 119 ci-dessus relatives au niveau de précision de la communication visée à l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1663/95, il ne saurait être considéré que la lettre du 19 juillet 2006, qui constituait la première communication au titre de cette disposition dans le cadre de l’enquête portant la référence RDG/2006/006/GR, a fourni aux autorités grecques une parfaite connaissance de l’irrégularité qui leur était reprochée quant aux insuffisances du SIGC. En effet, ainsi que le fait valoir la République hellénique, la Commission s’est référée de manière beaucoup trop vague et générale auxdites insuffisances.

132    Par conséquent, en précisant les raisons pour lesquelles elle estimait que le fonctionnement du SIGC et le SIPA présentaient des insuffisances en Grèce uniquement après la réunion bilatérale, la Commission a violé les droits procéduraux de la République hellénique.

133    Toutefois, conformément à une jurisprudence bien établie, la violation des droits procéduraux ne saurait aboutir à l’annulation de la décision attaquée que dans la mesure où il existe une possibilité que, en raison de cette irrégularité, la procédure administrative ait pu aboutir à un résultat différent, affectant ainsi concrètement les droits de la défense de la République hellénique (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 31 janvier 2012, Espagne/Commission, T‑206/08, non publié au Recueil, point 47, et la jurisprudence citée). Or, tel n’est pas le cas en l’espèce, la République hellénique n’ayant apporté aucun élément concret permettant de démontrer que, en l’absence de l’irrégularité constatée au point 131 ci-dessus, le résultat de la procédure aurait pu être différent.

134    Il s’ensuit que, nonobstant la violation des droits procéduraux de la République hellénique lors de la procédure administrative litigieuse constatée au point 132 ci-dessus, la décision attaquée ne saurait être annulée sur cette base.

135    Il résulte des considérations qui précèdent qu’il convient de rejeter le présent moyen comme non fondé.

 Sur le second moyen, tiré d’une appréciation erronée des faits et d’un défaut de motivation

136    La République hellénique soutient, s’agissant des faiblesses du SIGC, que les services de la Commission ont estimé par erreur et avec une motivation insuffisante que les carences reprochées au SIPA étaient d’une telle nature et d’une telle ampleur qu’elles affectaient l’efficacité des contrôles croisés liés aux mesures de développement rural et qu’elles constituaient un risque pour les paiements des mesures en cause au titre des exercices concernés. Elle observe, par ailleurs, que, excepté les allégations succinctes concernées, la lettre de conciliation ne contient, à cet égard, ni constatation, ni appréciation, ni motivation spécifique.

–       Sur les lacunes du SIGC

137    Il y a lieu, tout d’abord, de rappeler l’importance que revêt la mise en place d’un système fiable d’identification des parcelles. En effet, l’identification des parcelles agricoles à elle seule constitue un élément clé de l’application correcte d’un régime lié à la superficie. L’absence d’un système fiable d’identification des parcelles implique en soi un risque élevé de préjudice pour le budget de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 12 septembre 2007, Grèce/Commission, T‑243/05, Rec. p. II‑3475, point 61, et la jurisprudence citée).

138    Il importe de rappeler également que l’article 18 du règlement n° 1782/2003 exige la constitution d’un SIPA et que, conformément à l’article 20 dudit règlement, ce système est constitué sur la base de plans et de documents cadastraux ou d’autres références cartographiques. Les techniques utilisées s’appuient sur un système d’information géographique informatisé comprenant de préférence une couverture d’ortho-imagerie aérienne ou spatiale, avec des normes homogènes garantissant une précision au moins équivalente à celle de la cartographie à une échelle de 1/10 000. Toutes les parcelles agricoles doivent donc être identifiées selon ce système (voir, par analogie, arrêt du 31 mars 2011, Grèce/Commission, point 107 supra, point 54, et la jurisprudence citée).

139    Par ailleurs, en vertu de l’article 6 du règlement n° 796/2004, applicable aux faits de l’espèce : « Le [SIPA] visé à l’article 20 du règlement […] n° 1782/2003 fonctionne au niveau des parcelles de référence, telles que la parcelle cadastrale ou l’îlot de culture, ce qui garantit l’identification unique de chaque parcelle de référence. En outre, les États membres assurent la fiabilité de l’identification des parcelles agricoles et exigent en particulier que les demandes uniques soient pourvues des éléments ou assorties des documents prévus par les autorités compétentes afin de localiser et de mesurer chaque parcelle agricole […] »

140    Conformément à l’article 6, paragraphe 2, du règlement n° 796/2004, l’État membre veille à ce qu’au moins 90 % de la superficie individuelle d’au moins 75 % des parcelles de référence faisant l’objet d’une demande d’aide soit éligible en vertu du régime de paiement unique. Cette appréciation est effectuée annuellement à l’aide de méthodes statistiques appropriées.

141    Enfin, aux termes de l’article 66, paragraphes 2 et 4, du règlement n° 817/2004, lorsqu’une mesure de soutien en faveur du développement rural s’applique à des surfaces, les parcelles sont identifiées individuellement, conformément aux articles 18 et 20 du règlement n° 1782/2003.

142    En l’espèce, il ressort du point 17.2.1 du rapport de synthèse que divers audits menés par les services de la Commission ont révélé des lacunes sévères et persistantes dans le fonctionnement du SIGC en Grèce qui ont eu un impact sur les dépenses de développement rural associées aux mesures basées sur la superficie « e. (zones défavorisées) », « f. (agroenvironnement) » et « h. (boisement des terres agricoles) », étant donné que les paiements pour ces mesures basées sur la superficie étaient exécutés sur la base de contrôles croisés par rapport aux informations contenues dans le SIPA.

143    En particulier, il a été considéré que les anomalies sérieuses relevées dans le SIPA entravaient l’exécution efficace des contrôles croisés informatisés. Ce contrôle clé, tel qu’il est décrit dans le document VI/5330/97, constituerait une carence sérieuse et aurait généré un risque avéré pour le FEOGA. De plus, cette lacune aurait été notifiée à plusieurs reprises aux autorités grecques dans le passé sans conduire à la prise d’actions satisfaisantes de leur part. La Commission a conclu que, tenant compte du fait qu’aucune amélioration substantielle n’est intervenue dans le SIPA concernant l’exercice financier 2004 pour lequel un taux de correction de 5 % avait été appliqué, il convenait d’appliquer une correction forfaitaire de 10 % pour les dépenses déclarées au titre des mesures basées sur la superficie en Grèce « e. (zones défavorisées) », « f. (agroenvironnement) » – à l’exclusion des dépenses déclarées au titre de la sous mesure agro-environnementale « conservation des espèces menacées », qui ne dépendaient pas des surfaces déclarées et lesquelles n’étaient pas directement affectées par les insuffisances du SIGC/SIPA – et « h. (boisement des terres agricoles) » pour les exercices financiers 2005 et 2006.

144    En ce qui concerne la mesure « h. (boisement des terres agricoles) », bien que les services de la Commission aient reconnu que l’impact des carences du SIGC ait été atténué, dans une certaine mesure, par les contrôles sur place effectués sur 100 % des demandes d’aide au boisement, ils restaient d’avis que lesdits contrôles ne pouvaient entièrement compenser l’absence de contrôles croisés informatisés avec le SIGC, les lacunes dans l’identification adéquate des parcelles et les autres lacunes du système SIGC constatées en ce qui concerne la période couverte par l’audit. Toutefois, la Commission ayant considéré que les paiements au titre de la composante « investissement » de la mesure « h. (boisement des terres agricoles) » ne dépendaient pas des informations relatives aux parcelles du SIGC et qu’aucune lacune importante n’avait pu être identifiée à l’égard de celle-ci, elle a proposé d’abaisser le niveau de correction forfaitaire à 5 % pour les dépenses déclarées sous le nouveau régime de 2000-2006 pour la mesure « h. (boisement de terres agricoles) ».

145    Il convient de relever que le système d’identification des surfaces prévu doit être utilisé pour les mesures de développement rural lorsqu’elles font l’objet d’une demande d’aide, ce que, au demeurant, la République hellénique ne conteste pas.

146    Or, bien que, ainsi que le fait valoir la République hellénique, la Commission ait constaté que les demandes d’aide au titre de la sous-rubrique agro-environnementale « Agriculture biologique » étaient accompagnées d’un extrait de la base de données utilisée dans le cadre du SIGC dans lequel l’identification des parcelles se faisait sur la base du code unitaire de treize chiffres, elle a néanmoins conclu que, tant les municipalités ou les collectivités que les organismes de certification de l’agriculture biologique se référaient toujours aux parcelles en ce qui concerne leur emplacement et leur superficie. La Commission en a déduit que l’identification des parcelles agricoles dans le cadre des demandes d’aide relatives à la mesure en question était insuffisante, dès lors qu’elle n’était pas précise et individuelle, comme cela est exigé par l’article 66 du règlement n° 817/2004. Cette conclusion a été, au demeurant, réitérée par la Commission dans la communication officielle datée du 4 avril 2008, au titre de l’article 11, paragraphe 2, troisième alinéa, du règlement n° 885/2006.

147    La République hellénique affirme, à cet égard, que les autorités grecques ont démontré que l’identification des parcelles agricoles concernant la sous-rubrique agro-environnementale « Agriculture biologique » reposait sur le code de treize chiffres permettant l’identification des parcelles dans le cadre du SIGC, ainsi qu’il ressortirait des trente demandes d’aide introduites en 2006 au titre de l’exercice financier 2005 par les trois nomes qui ont fait l’objet d’un contrôle sur place, transmises à la Commission en annexe à leur lettre du 2 juillet 2007. Par ailleurs, elle soutient que, dans le cadre de ces contrôles, de nouveaux formulaires avaient été utilisés ainsi qu’il ressortirait des rapports de contrôle établis pour chacun des trois nomes concernant l’exercice financier 2005.

148    En réponse à une demande du Tribunal dans le cadre de mesures d’organisation de la procédure, au titre de l’article 64 du règlement de procédure, la République hellénique a produit les rapports de contrôle qui correspondent, selon elle, aux contrôles effectués en 2006. Or, s’il ressort de ces rapports que les parcelles agricoles contrôlées étaient identifiées par le code de treize chiffres permettant l’identification des parcelles dans le cadre du SIGC et s’il est constant que lesdits rapports ont été établis à la suite de contrôles sur place effectués en 2006, les parties ne semblent pas s’accorder sur l’exercice financier sur lequel ces rapports portent.

149    En effet, lors de l’audience, la Commission a soutenu qu’ils concernaient l’exercice financier 2007, qui est dénué de pertinence en l’espèce.

150    En tout état de cause, indépendamment de la question de savoir si les rapports en cause concernent l’exercice financier pertinent, ils ne sauraient établir, du fait du seul emploi du code de treize chiffres permettant l’identification des parcelles dans le cadre du SIGC, que l’identification des parcelles agricoles était fiable, précise et conforme aux exigences des règlements pertinents.

151    En particulier, la République hellénique n’a pas démontré que des contrôles croisés informatisés des demandes d’aides relatifs aux parcelles agricoles déclarées avaient été effectués pour éviter qu’une même aide ne soit indûment octroyée plusieurs fois au titre de la même année civile ou campagne de commercialisation et pour prévenir tout cumul indu d’aides accordées au titre de régimes d’aides communautaires comportant des déclarations de superficies.

152    Quant au boisement des terres agricoles, force est de constater que la Commission a pris en considération le fait que les défaillances du SIGC ont été atténuées par le taux de contrôle sur place de 100 % sur les demandes d’aide s’y rapportant et a réduit le taux de correction proposée de 10 à 5 %, en ce qui concerne les dépenses déclarées dans le cadre du nouveau régime. Or, les contrôles sur place, même sur l’ensemble des bénéficiaires, ne permettent pas à eux seuls de vérifier l’éligibilité des demandes d’aide et de palier l’absence des contrôles croisés informatisés avec le SIGC, lesquels ont pour objet de permettre la détection d’irrégularités éventuelles.

153    Il s’ensuit que l’argument de la République hellénique selon lequel la Commission aurait constaté des défaillances du SIGC et imposé une correction au titre de la mesure « h. (boisement des terres agricoles) » à tort, doit être rejeté. À cet égard, il y a lieu de relever que la République hellénique admet que le SIGC n’était pas pleinement opérationnel. En outre, le SIPA n’était pas pleinement conforme à l’article 20 du règlement n° 1782/2003, tel que modifié par le règlement n° 796/2004, pendant la période en question. Or, en l’absence de tels systèmes effectifs et pleinement opérationnels, qui sont prescrits par la réglementation de l’Union et qui constituent des éléments essentiels des contrôles, les contrôles croisés ne peuvent pas être correctement effectués (voir, en ce sens, arrêt du 31 mars 2011, Grèce/Commission, point 107 supra, point 65).

154    Quant au grief tiré de l’insuffisance de motivation de la conclusion de la Commission selon laquelle les carences du SIPA ont eu pour effet d’affecter l’efficacité des contrôles croisés, force est de constater qu’il ne saurait prospérer, dès lors que, ainsi que la République hellénique l’a admis dans ses écritures, au moment de la communication officielle des résultats de l’enquête à cette dernière, par lettre du 4 avril 2008, la Commission s’est référée, de manière succincte, mais précise, aux insuffisances du SIPA et du SIGC et à un certain nombre de lettres relatives à la communication des insuffisances précitées. La Commission a, par ailleurs, précisé que le défaut d’identification individuelle et précise des parcelles agricoles pour lesquelles une aide était demandée, contraire à l’article 66, paragraphe 4, du règlement n° 817/2004, ne permettait pas l’identification des surfaces et la réalisation des contrôles croisés. Ces références aux insuffisances constatées ont été réitérées dans le rapport de synthèse. Partant, dès lors que, ainsi que la Commission l’a relevé à juste titre lors de la procédure administrative, les paiements associés aux mesures de développement rural sont effectués sur la base de contrôles croisés entre les demandes de soutien et le SIGC, ce qui est conforme à l’article 68 du règlement n° 817/2004 (voir point 151 ci-dessus), il ne saurait être affirmé que la décision attaquée est insuffisamment motivée à cet égard.

155    Il s’ensuit que la décision attaquée répond aux exigences de motivation requises par l’article 296 TFUE et la jurisprudence citée aux points 51 et 52 ci-dessus et que le grief tiré d’une insuffisance de motivation doit être écarté.

156    Enfin, la République hellénique ne conteste pas l’allégation de la Commission selon laquelle les orthophotographies utilisées étaient anciennes. Cependant, elle estime qu’aucune correction ne devrait lui être imposée à ce titre, eu égard aux difficultés judiciaires rencontrées dans le cadre de son ordre juridique interne lors de l’appel d’offres organisé pour le renouvellement du support cartographique de la Grèce, à propos desquelles la Commission aurait été informée. À cet égard, elle considère que la jurisprudence permet à un État membre d’échapper aux conséquences défavorables découlant de l’inapplication d’une mesure de l’Union s’il informe la Commission en temps utile des difficultés objectives et insurmontables auxquelles il aurait été confronté et collabore avec celle-ci pour rechercher une solution.

157    Cette argumentation ne saurait prospérer. En effet, indépendamment de la question de savoir si de telles difficultés peuvent être qualifiées d’objectives et insurmontables comme le soutient la République hellénique, force est de relever qu’elles ne sauraient en tout état de cause justifier l’inachèvement du SIGC (voir, en ce sens, arrêt du 31 mars 2011, Grèce/Commission, point 107 supra, point 58).

158    À cet égard, il importe de rappeler qu’un État membre ne saurait exciper de dispositions pratiques ou de situations de son ordre juridique interne pour justifier le non-respect des obligations et des délais résultant des règles de l’Union (voir, en ce sens, arrêt Italie/Commission, point 81 supra, point 45).

159    Il s’ensuit que le fait que la République hellénique a préalablement informé la Commission des difficultés rencontrées ne saurait avoir pour conséquence une absence de correction. De même, le fait que les mesures préconisées par les règlements applicables afin d’assurer la conformité avec le SIGC ont été mises en œuvre postérieurement à l’année 2006 par les autorités grecques ne saurait conduire à une réduction de la correction imposée par la Commission, dès lors qu’un risque de préjudice existait pour le FEOGA.

160    Partant, la République hellénique n’a pas démontré que les corrections imposées au titre des mesures de développement rural « e. (zones défavorisées) », « f. (agroenvironnement) » et « h. (boisement des terres agricoles) » du fait des défaillances du SIGC étaient erronées.

161    Concernant le caractère disproportionné des corrections en question allégué par la République hellénique, force est de constater que les contrôles croisés avec les données du SIGC sont des contrôles clés, en vertu du document AGRI/17933/2000 de la Commission. S’agissant des dépenses déclarées au titre des mesures basées sur la superficie, « e. (zones défavorisées) », « f. (agroenvironement) » et « h. (boisement des terres agricoles) » pour les dépenses déclarées au titre des exercices financiers 2005 et 2006, d’une part, il convient de rappeler que les contrôles croisés avec les données du SIGC n’ont pas pu être effectués et, d’autre part, force est de relever que cette carence de contrôles clés, générant un risque pour le FEOGA, a été notifiée à plusieurs reprises aux autorités grecques sans que celles-ci prennent des mesures satisfaisantes. Enfin, concernant la mesure « h. (boisement des terres agricoles) », la Commission a estimé que les contrôles sur place ne pouvaient pas compenser totalement l’absence de contrôles croisés informatisés avec le SIGC et que, donc, ils ne suffisaient pas à eux seuls pour réduire le risque encouru par le FEOGA.

162    Il s’ensuit que, conformément au document VI/5330/97, il était justifié d’appliquer une correction à hauteur de 10 %, au titre de l’ensemble des mesures de développement rural basées sur la superficie pour les exercices financiers 2005 et 2006, eu égard au fait qu’il existait un risque élevé de pertes importantes pour le FEOGA et au fait qu’aucune amélioration substantielle n’est intervenue dans le SIPA en ce qui concerne l’exercice financier précédent.

163    Au demeurant, s’agissant de la mesure « h. (boisement des terres agricoles) », le taux de correction appliqué a été abaissé à 5 % pour les dépenses déclarées au titre du nouveau régime de 2000-2006, dès lors que, ainsi qu’il a été rappelé au point 144 ci-dessus, elles comportaient un volet qui ne dépendait pas des informations sur les parcelles du SIGC pour lesquelles ont été constatées des carences importantes affectant l’efficacité des contrôles croisés. La Commission a tenu compte de cet élément, mais eu égard au fait que cette mesure comportait également un autre volet, lequel reposait sur les informations relatives au SIGC, elle a considéré, à bon droit, qu’il existait toujours un risque pour le FEOGA.

164    Partant, le grief soulevé par la République hellénique selon lequel les corrections appliquées sont disproportionnées doit être écarté.

–       Sur les lacunes indépendantes du SIGC

165    S’agissant des lacunes associées au développement rural indépendantes du SIGC, à savoir les faiblesses des rapports de contrôle et le retard dans la réalisation des contrôles sur place, il ressort du point 17.2.1 du rapport de synthèse que les rapports de contrôle, en particulier pour la sous-rubrique agro-environnementale « Agriculture biologique », relatifs à l’exercice financier 2005, n’ont pas rendu compte de tous les contrôles effectués, ce qui serait contraire à l’article 28 du règlement n° 796/2004. De plus, il est indiqué qu’il n’y avait que peu de preuves concernant les contrôles sur place et le contrôle associé au respect des bonnes pratiques agricoles. En outre, l’ensemble des engagements souscrits par un bénéficiaire soumis à une visite de contrôle, comme le requiert l’article 69, paragraphe 3, du règlement n° 817/2004, n’auraient pas été contrôlés. Enfin, certains contrôles sur place pour la mesure « e. (zones défavorisées) » ont été effectués en retard, en violation de l’article 69 du règlement n° 817/2004. De plus, les autorités grecques n’auraient fourni aucune statistique de contrôle pour les exercices financiers 2005 et 2006.

166    Par ailleurs, dans le rapport de synthèse, la Commission a estimé que les constatations associées au développement rural indépendantes du SIGC concernaient la qualité des contrôles clés et justifiaient comme telles, conformément à l’esprit du document VI/5330/97, une correction forfaitaire de 5 % sur les dépenses déclarées au titre des mesures « e. (zones défavorisées) » et « f. (agroenvironnement) ».

167    Il convient de rappeler que, aux termes de l’article 28 du règlement n° 796/2004, applicable aux faits de l’espèce, chaque contrôle sur place fait l’objet d’un rapport rendant compte avec précision des différents éléments du contrôle. Ce rapport indique, notamment, les parcelles agricoles contrôlées, les parcelles agricoles mesurées et les résultats des mesures par parcelle agricole mesurée, ainsi que les techniques de mesure utilisées.

168    Il y a également lieu de relever que, bien que, dans la requête, la République hellénique affirme avoir utilisé les nouveaux rapports de contrôle, il ressort de ses observations sur la première communication de la Commission, présentées par lettre du 21 septembre 2006, ainsi que du point 3.2 du compte rendu de la réunion bilatérale, que les autorités grecques n’avaient pas eu recours aux nouveaux formulaires pour les campagnes en cause. En effet, lesdites autorités estimaient que les anciens formulaires étaient applicables et que, en tout état de cause, ils contenaient tous les éléments requis attestant que les contrôles sur place avaient été effectués de manière adéquate. Au demeurant, la République hellénique a également fait valoir que, s’agissant de la sous-rubrique agro-environnementale « Agriculture biologique », ont été recensés des cas où, par inadvertance, d’anciens types de formulaires de rapports de contrôle avaient été utilisés, au lieu des nouveaux qui seraient plus complets.

169    Contrairement aux allégations de la République hellénique, la forme du rapport est importante en tant que preuve de la qualité des contrôles réalisés, dès lors qu’elle permet d’attester que différents éléments ont été contrôlés avec la précision requise par le règlement n° 796/2004. Au demeurant, la République hellénique n’a fourni aucune preuve pour étayer son allégation selon laquelle les anciens types de formulaires remplissaient les exigences de la même manière que les nouveaux. Le fait que des sanctions aient été imposées et que des recommandations ont pu être données dans certains cas par les autorités grecques, à l’issue des contrôles, ne saurait non plus constituer une garantie que tous les éléments spécifiés dans les rapports ont fait l’objet d’un contrôle et, partant, que les paiements au titre de mesures de développement rural ont fait l’objet d’un contrôle de qualité, de façon à ne pas occasionner de risque de paiement indu.

170    Par ailleurs, la République hellénique admet que, dans certains cas, les contrôles sur place ont été effectués avec des retards, mais que les bénéficiaires étaient soumis à un contrôle dans le cadre d’autres régimes de soutien, permettant également de constater le type de culture, la superficie et l’éligibilité des surfaces en cause, ainsi que le nombre d’animaux déclarés dans la demande de soutien.

171    Or, l’article 69, paragraphes 1 et 3, du règlement n° 817/2004 énonce, notamment, que les contrôles sur place portent chaque année sur au moins 5 % des bénéficiaires, couvrent l’ensemble des types de mesures de développement rural prévus dans les documents de programmation et portent sur la totalité des engagements et des obligations d’un bénéficiaire qu’il est possible de contrôler au moment de la visite.

172    Partant, le fait que les bénéficiaires des mesures de développement rural dans les zones défavorisées ont été soumis à un contrôle dans le cadre d’autres régimes de soutien ne saurait pallier la non-satisfaction aux exigences de l’article 69, paragraphes 1 et 3, du règlement n° 817/2004. Au demeurant, même à supposer que la thèse de la République hellénique puisse prospérer, cette dernière n’a apporté aucune preuve quant à la réalisation desdits contrôles, permettant au Tribunal de vérifier si ces contrôles étaient conformes aux exigences susvisées.

173    Au vu de ce qui précède, il y a lieu de conclure que la Commission était fondée à écarter les dépenses comme étant inéligibles, dès lors que la République hellénique n’a pas démontré l’existence d’un système de contrôles fiable et opérationnel.

174    Dans ces circonstances, il convient de rejeter le présent moyen dans son intégralité.

 Moyens relatifs aux corrections appliquées dans le secteur de l’aide aux plus démunis

175    En ce qui concerne les corrections appliquées dans le secteur de l’aide aux plus démunis, la République hellénique soulève trois moyens, tirés, le premier, d’une violation des principes de confiance légitime, de sécurité juridique et, à titre subsidiaire, d’un abus de pouvoir, le deuxième, d’un calcul erroné des frais de transport et, le troisième, d’une interprétation et d’une application erronées de l’article 3, paragraphe 2, du règlement (CEE) n° 3149/92 de la Commission, du 29 octobre 1992, portant modalités d’application de la fourniture de denrées alimentaires provenant des stocks d’intervention au bénéfice des personnes les plus démunies de la Communauté (JO L 313, p. 50), ainsi que d’une violation du principe de proportionnalité et des limites du pouvoir d’appréciation de la Commission.

 Sur le premier moyen, tiré d’une violation des principes de confiance légitime, de sécurité juridique et, subsidiairement, d’un abus de pouvoir

176    La République hellénique fait valoir que le refus opposé par la Commission dans sa lettre du 16 décembre 2004 en ce qui concerne la possibilité d’un retrait, après le délai fixé par le règlement n° 3149/92, des produits issus des stocks d’intervention situés dans d’autres pays et concernés par le plan annuel de fourniture de denrées alimentaires provenant des stocks d’intervention au bénéfice des personnes les plus démunies de la Communauté devant être exécuté en 2004 (ci-après le « plan annuel de distribution concerné ») ne concernait pas les 16 630 t de riz non décortiqué, stockées en Grèce.

177    La République hellénique affirme que les autorités grecques avaient acquis la ferme conviction qu’il était possible de mettre en œuvre le plan annuel de distribution concerné, même après l’expiration des délais prévus pour le retrait de produits des stocks d’intervention, compte tenu du but purement social dudit plan. En outre, elle soutient que la décision de la Commission est disproportionnée par rapport aux conséquences réelles de la réalisation tardive de ce plan pour les intérêts de l’Union. Selon elle, l’imposition à sa charge de la valeur globale du plan en question au lieu d’une correction au titre des dépenses de stockage correspondant à la durée pendant laquelle les délais avaient été dépassés constitue une violation des principes de confiance légitime et de sécurité juridique et, à titre subsidiaire, un dépassement des limites du pouvoir d’appréciation discrétionnaire, sinon un abus de pouvoir.

178    Il convient de rappeler que, aux termes de l’article 3, paragraphe 1, du règlement n° 3149/92, tel que modifié par le règlement (CE) n° 1098/2001 de la Commission, du 5 juin 2001 (JO L 150, p. 37), la période d’exécution du plan annuel de fourniture de denrées alimentaires provenant des stocks d’intervention au bénéfice des personnes les plus démunies de la Communauté court du 1er octobre au 30 septembre de l’année suivante. Toutefois, la distribution aux associations caritatives peut être opérée jusqu’au 31 octobre de l’année d’exécution du plan.

179    S’agissant, en premier lieu, de la violation du principe de confiance légitime invoquée par la République hellénique au motif que les prises de position de la Commission dans sa lettre du 16 février 2005 ont fait naître chez elle des espérances fondées que des corrections financières ne lui seraient pas imposées, il y a lieu de rappeler que le droit de se prévaloir du principe de protection de la confiance légitime s’étend à tout justiciable à l’égard duquel une institution de l’Union a fait naître des espérances fondées du fait d’assurances précises qu’elle lui aurait fournies. En revanche, nul ne peut se prévaloir d’une violation de ce principe en l’absence d’assurances précises que lui aurait fournies une institution de l’Union (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 7 avril 2011, Grèce/Commission, C‑321/09 P, non publié au Recueil, point 45).

180    En l’espèce, par la lettre du 16 décembre 2004, dont un extrait figure au point 6.1.3.2 du rapport de synthèse, la Commission a, tout d’abord, indiqué aux autorités grecques que l’opération de retrait tardif de 1 879 t de lait écrémé en poudre des stocks d’intervention situés en Allemagne, pour laquelle elles sollicitaient une prorogation, ne requérait pas son autorisation. Toutefois, elle leur a rappelé que cette réponse ne préjugeait pas de l’application des règlements pertinents et de l’examen éventuel des dépenses afférentes à l’opération en cause au titre de la procédure d’apurement des comptes. Par ailleurs, elle a insisté sur la nécessité du retrait des produits en cause des stocks d’intervention sans retard, eu égard au fait que les allocations étaient versées pour l’année 2004. Elle a, en outre, souligné qu’il en était de même pour les céréales détenues en France et le riz stocké en Grèce, alloués dans le cadre du plan annuel de distribution concerné, qui n’avaient pas encore été prélevés des stocks.

181    Il s’ensuit que, contrairement aux arguments de la République hellénique, la Commission n’a pas pris en considération l’État membre dans lequel les quantités de produits étaient stockées, ni permis un traitement différent concernant le riz, qui est clairement visé par la Commission dans sa lettre. D’ailleurs, dans le cadre de leur réponse du 22 décembre 2004 à cette lettre, par laquelle les autorités grecques faisaient, notamment, état des difficultés rencontrées lors de l’exécution du plan annuel de distribution concerné engendrant des retards et sollicitaient une prorogation de quatre mois du délai pour le retrait des produits en cause des stocks d’intervention, à savoir jusqu’au 30 avril 2005, elles ont indiqué, sans établir de distinction entre les différents produits, que la Commission leur avait demandé, dans sa lettre du 16 décembre 2004, que les produits alloués dans le cadre dudit plan soient pris en charge par l’intervention jusqu’au 1er janvier 2005.

182    Par ailleurs, en réponse à cette dernière lettre, la Commission a, par lettre du 16 février 2005, de nouveau rappelé aux autorités grecques que les échéances prévues par le règlement devaient être respectées et que les dépenses devaient être déclarées pendant l’année pour laquelle le plan avait été adopté et ne pouvaient être répercutées d’une année à l’autre. En outre, elle a souligné le caractère sérieux des conséquences suscitées par les retards dans l’exécution des plans annuels de distribution qui avaient justifié une nouvelle modification du règlement n° 3149/92 afin de raccourcir la période d’exécution et de définir les conséquences des retards.

183    Il résulte de l’échange de ces courriers et, en particulier, de la lettre du 16 décembre 2004 que la Commission n’a aucunement permis le retrait tardif du riz des stocks d’intervention, mais a simplement pris note du fait que les autorités grecques souhaitaient poursuivre la distribution du riz faisant partie du plan annuel de distribution concerné et stocké en Grèce. Elle a, par ailleurs, mis en garde les autorités grecques en ce qui concerne à l’examen éventuel des dépenses afférentes à l’opération en cause au titre de la procédure d’apurement des comptes, ce qui impliquait la possibilité de corrections financières. Il s’ensuit que la lettre du 16 décembre 2004 ne saurait fonder la confiance légitime de la République hellénique.

184    Force est de rappeler, en outre, que le respect des délais réglementaires est impératif pour la bonne gestion des stocks d’intervention et la distribution des denrées aux plus démunis. Partant, si les quantités stockées ne sont pas retirées dans les délais prévus, les dépenses s’y rapportant doivent être supportées par l’État membre concerné. Or, ainsi que la Commission l’a fait valoir dans ses écritures et ainsi que cela a été relevé dans le rapport de synthèse, les autorités grecques ont mis en œuvre le plan annuel de distribution concerné en 2005, en prolongeant les opérations de retrait des stocks d’intervention des 16 630 t de riz fourni jusqu’à la fin du mois de février 2006 et en déclarant les dépenses s’y rapportant au FEOGA en 2006. Pendant ce temps, les autorités grecques ont continué à percevoir le remboursement des frais de stockage pour le riz jusqu’à son retrait final, en mars 2006. Ce faisant, elles ont ignoré le cadre réglementaire pertinent, tout en ayant pleinement conscience du caractère non éligible desdites quantités.

185    Dans ces circonstances, en l’absence d’assurances précises fournies par la Commission, il ne saurait être constaté que les prises de position de cette dernière concernant le retrait tardif du riz des stocks d’intervention et sa distribution tardive pendant la procédure d’apurement aient pu faire naître des espérances fondées que des corrections financières ne seraient pas imposées à la République hellénique. Il convient, par conséquent, de rejeter le grief invoqué par cette dernière selon lequel la Commission aurait violé le principe de confiance légitime.

186    S’agissant, en deuxième lieu, du grief tiré d’une violation du principe de sécurité juridique, il y a lieu de rappeler que la procédure de retrait des stocks d’intervention est régie par des délais stricts, fixés par le règlement n° 3149/92, tel que modifié. Contrairement à la position soutenue par les autorités grecques, le fait que ces délais sont dépassés entraîne l’exclusion des dépenses afférentes à l’exécution du plan. En l’espèce, dès lors que le retrait et la distribution du riz ont eu lieu bien après le délai fixé par le règlement n° 3149/92, des frais de stockage supplémentaires ont été indûment supportés par le FEOGA à compter du 31 octobre 2004, alors que les frais de transport n’ont pas été imputés aux exercices financiers correspondants. Or, si les autorités grecques estimaient qu’il était possible de mettre le plan en œuvre après l’expiration des délais réglementaires, elles ne sauraient exiger que la Commission tolère des irrégularités dans le cadre de son exécution et ne leur impose aucune correction ou une correction limitée, sur la base du principe de sécurité juridique (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 16 octobre 2003, Irlande/Commission, C‑339/00, Rec. p. I‑11757, point 81). Il doit en être ainsi à plus forte raison dans le cas où, comme en l’espèce, la Commission leur avait imposé des corrections pour les mêmes motifs, au titre des exercices financiers précédents.

187    S’agissant, en troisième lieu, du grief invoqué par la République hellénique à titre subsidiaire, selon lequel en lui faisant supporter le coût total du programme la Commission a commis un abus de pouvoir, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, un acte n’est entaché de détournement de pouvoir que s’il apparaît, sur la base d’indices objectifs, pertinents et concordants, avoir été pris dans le but exclusif, ou à tout le moins déterminant, d’atteindre des fins autres que celles excipées ou d’éluder une procédure spécialement prévue par le traité pour parer aux circonstances de l’espèce (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 16 novembre 2011, Bank Melli Iran/Conseil, C‑548/09 P, non encore publié au Recueil, point 50, et la jurisprudence citée).

188    Or, en l’espèce, la République hellénique n’a pas établi l’existence de tels indices. En effet, elle n’a pas présenté d’éléments suggérant que les circonstances qu’elle invoque, à les supposer établies, résultaient de la volonté de la Commission d’atteindre des fins autres que celle de veiller à l’exécution du plan dans les délais réglementaires prévus de sorte qu’il n’y ait pas de risque de paiement indu.

189    Quant à l’absence de risque de perte pour le FEOGA, il y a lieu de relever que, d’une part, les délais prévus par le règlement n° 3149/92 ont été dépassés, ce que le gouvernement grec n’a pas contesté, et, d’autre part, les dépenses de financement à la charge du FEOGA doivent être calculées en supposant que ce délai a été respecté. En conséquence, lorsque les autorités grecques paient après l’expiration du délai, elles imputent au FEOGA des dépenses non éligibles (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 28 octobre 1999, Italie/Commission, C‑253/97, Rec. p. I‑7529, point 126).

190    De plus, il convient de relever que, selon l’article 3, paragraphe 2, du règlement n° 3149/92, pendant la période d’exécution du plan, les États membres communiquent les modifications éventuelles que comporte l’exécution dudit plan à la Commission, sans toutefois entraîner une augmentation des dépenses prévues. De même, selon le paragraphe 3 de cette disposition, les États membres informent la Commission sans délai et au plus tard à la fin du mois d’avril de la période d’exécution des réductions de dépenses prévisibles dans l’application du plan.

191    Contrairement aux affirmations de la République hellénique, le fait qu’elle ait informé la Commission des difficultés rencontrées dans l’exécution du plan, et, notamment, quant au respect du calendrier imposé par le règlement n° 3149/92, n’impliquait pas que le rythme d’exécution du plan soit adapté et que les délais prévus soient prorogés ou ignorés.

192    Dès lors, conformément à la jurisprudence citée au point 158 ci-dessus, la République hellénique ne saurait se référer aux difficultés qu’elle a prétendument rencontrées dans l’exécution du plan afin de justifier le retrait tardif des produits en cause des stocks d’intervention et leur distribution tardive ni affirmer qu’elle a informé la Commission « en temps utile ». En effet, la Commission n’a été informée des difficultés rencontrées lors de l’exécution du plan annuel de distribution concerné que par lettre du 22 décembre 2004, soit presque deux mois après l’expiration de la date butoir pour l’exécution dudit plan, à savoir le 31 octobre 2004.

193    En outre, la circonstance selon laquelle le but du programme présente un caractère social et que ce dernier aurait été atteint ne saurait rendre les dépenses éligibles, dans la mesure où le retrait et la distribution des stocks ont eu lieu en dehors des délais prescrits. À cet égard, force est de rappeler que le fait que l’objectif visé par le financement octroyé a été atteint n’implique pas en soi que la sanction consistant en la suppression intégrale d’un concours financier soit disproportionnée (arrêt Comunità montana della Valnerina/Commission, point 104 supra, point 145).

194    Partant, il convient de rejeter le grief avancé par la République hellénique selon lequel, en lui faisant supporter le coût total du programme, la Commission a violé le principe de proportionnalité. En effet, la possibilité qu’une irrégularité soit sanctionnée non par la réduction d’un concours financier à concurrence du montant correspondant à cette irrégularité, mais par la suppression complète dudit concours est seule à même de produire l’effet dissuasif nécessaire à la bonne gestion des ressources du FEOGA (voir, en ce sens, arrêt Comunità montana della Valnerina/Commission, point 104 supra, point 144, et la jurisprudence citée).

195    Au vu de ce qui précède, il convient de rejeter ce moyen comme non fondé.

 Sur le deuxième moyen, tiré d’un calcul erroné des frais de transport

196    La République hellénique estime que c’est à tort que la Commission a fixé les frais de transport du plan annuel de distribution concerné au montant de 813 277,63 euros au lieu de 461 003,05 et que la décision attaquée doit être annulée pour ce motif. Elle fait valoir, à cet égard, que les frais de transport des produits dudit plan comprennent les sommes de 240 172,71 euros (poste budgétaire 05.02.04.01.3100.097.020 – exercice 2006), versés à la société « Euricom Hellas A.E. » en 2006 pour le transport de 1 870 t de riz blanchi, et de 220 830,34 euros (poste budgétaire 05.02.04.01.3100.182.028 – exercice 2007), versés à la société « Oryzomyloi Makedonias – Afoi Mystakidis A.E. » en 2007 pour le transport de 1 705 t de riz étuvé aux personnes démunies du pays. Quant au solde des 352 274,58 euros restants, il concernerait des frais de transport du produit fini à l’intérieur de l’État membre du programme de distribution gratuite en 2002, pour lequel la Commission n’a imposé aucune correction financière, ainsi qu’il ressortirait de la position finale de la Commission dans le cadre de l’enquête portant la référence LA/2006/022/GR, communiquée aux autorités grecques dans le cadre de cette dernière, par lettre du 17 novembre 2009.

197    En l’espèce, il convient de relever que, en réponse à une question du Tribunal lors de l’audience sur le fait de savoir si et par quel moyen les autorités grecques ont contesté le montant de correction imposée au titre des frais de transport du plan annuel de distribution concerné pendant la procédure administrative, la République hellénique a soutenu l’avoir fait, en premier lieu, dans ses observations sur le compte rendu de la réunion bilatérale du 12 décembre 2007, par lettre du 13 mai 2008, et, en second lieu, dans le cadre de la saisine de l’organe de conciliation par cette dernière.

198    À la suite d’une demande du Tribunal, la République hellénique a produit sa lettre du 13 mai 2008, qui a été versée au dossier.

199    Toutefois, ainsi que l’a fait valoir la Commission lors de l’audience, il ne ressort nullement de la lettre des autorités grecques du 13 mai 2008 que le montant des frais de transport a été contesté. En effet, dans ladite lettre, est uniquement réitérée l’argumentation des autorités grecques selon laquelle l’imposition d’une correction de la valeur totale des coûts liés au retrait tardif du riz des stocks d’intervention et à sa distribution tardive serait disproportionnée et selon laquelle, dans la mesure où le but social du programme a été atteint, en dépit du retard et des frais de stockage supplémentaires occasionnés, les dépenses relatives à la valeur du riz et au transport seraient éligibles. Or, il y a lieu de rappeler, ainsi qu’il a été constaté dans le cadre du premier moyen, invoqué en ce qui concerne les corrections appliquées dans le secteur de l’aide aux plus démunis, qu’une telle argumentation ne saurait prospérer.

200    Par ailleurs, bien que, lors de l’audience, la Commission n’ait pas contesté que les frais de transport du plan annuel de distribution concerné avaient fait l’objet d’une contestation devant l’organe de conciliation, la République hellénique n’a produit aucune preuve concernant l’éligibilité de ces dépenses pour étayer ses allégations. À cet égard, il convient de rappeler que, conformément à la jurisprudence citée au point 31 ci-dessus, dans le domaine de l’apurement des comptes du FEOGA, c’est à l’État membre qu’il incombe de présenter la preuve la plus détaillée et complète de la réalité des chiffres et, le cas échéant, de l’inexactitude des affirmations de la Commission.

201    Quant à la lettre de la Commission du 17 novembre 2009, adressée aux autorités grecques dans le cadre de l’enquête portant la référence LA/2006/022/GR, force est de constater qu’elle ne contient aucune référence quant au montant de 352 274,58 euros. Ainsi, elle ne saurait constituer une preuve suffisante de l’allégation de la République hellénique selon laquelle ledit montant serait compris dans les frais de transport de 2002 et qu’il aurait été inclus à tort dans le montant des frais de transport non éligibles du plan annuel de distribution concerné par la Commission.

202    Au demeurant, l’enquête de la Commission en l’espèce ne concernait que les plans de 2003 à 2005.

203    Partant, il convient de rejeter le présent moyen comme dénué de tout fondement.

 Sur le troisième moyen, tiré d’une interprétation et d’une application erronées de dispositions du droit de l’Union et, en particulier, de l’article 3, paragraphe 2, du règlement n° 3149/92 et d’une violation du principe de proportionnalité et des limites du pouvoir d’appréciation

204    La République hellénique estime, en ce qui concerne le plan annuel devant être exécuté en 2005, que, bien que la date fixée par l’article 3, paragraphe 2, du règlement n° 3149/92 pour le retrait des produits des stocks d’intervention ait été dépassée, la date limite pour la perte des allocations au titre des quantités non retirées des stocks aurait été respectée. Ainsi, la correction financière relative aux frais de stockage devrait être de 29 661,45 euros et non de 33 899,80, dès lors que le retrait des trois produits concernés a été effectué avant la date butoir du 30 septembre 2005.

205    Par ailleurs, la République hellénique soutient que, à supposer même que la Commission ait dû imposer une correction sur les dépenses de transport du riz et des pâtes à l’intérieur du pays, son montant n’aurait pas dû dépasser 89 562,21 euros, puisque le montant supplémentaire a été couvert par le budget national et que la Commission réclame donc une somme qu’elle n’a pas payée.

206    Selon la République hellénique, la distribution tardive des deux produits en cause ne crée en aucun cas une charge financière pour le FEOGA, puisqu’elle concerne exclusivement le volet de la distribution aux personnes les plus démunies du pays, alors que la charge financière engendrée par le rythme inadapté de la sortie des stocks sera supportée par elle, à condition qu’elle soit correctement calculée. Toutefois, elle soutient que l’annulation d’un programme annuel et l’exclusion de son financement annuel sont une charge disproportionnée compte tenu du fait que l’objectif final a été atteint.

207    La République hellénique estime que, en écartant la valeur des produits distribués ainsi que les frais de transport de ceux-ci, la Commission a infligé une double sanction et a manifestement violé le principe de proportionnalité.

208    En l’espèce, il ressort du point 6.1.1.3 du rapport de synthèse que, pour le plan de distribution devant être exécuté en 2005, 4 346 t de riz ont été retirées des stocks d’intervention grecs à la date du 30 septembre 2005, soit un mois après la date limite pour les retraits, mais avant l’échéance pour la perte des allocations.

209    Quant à la distribution des denrées alimentaires aux organisations caritatives, il a été constaté que les produits finis, pâtes et riz, du plan concerné n’ont pu être distribués qu’au premier trimestre de 2006, ce qui correspond à une date postérieure à celle fixée par le règlement n° 3149/92 pour l’exécution du plan.

210    Il y a lieu de constater que la République hellénique ne conteste pas que les opérations de retrait et de distribution des produits issus des stocks d’intervention ont été effectuées en dehors des délais fixés par l’article 3, paragraphes 1 et 2, du règlement n° 3149/92 et qu’elles ont donc eu lieu tardivement.

211    À cet égard, s’agissant, premièrement, de l’opération de retrait des 4 346 t de riz des stocks d’intervention, les arguments soulevés par la République hellénique selon lesquels, dans la mesure où ladite quantité a été retirée avant l’échéance pour la perte des allocations, à savoir le 30 septembre 2005, aucune correction n’aurait dû lui être imposée ne sauraient infirmer cette conclusion. En effet, le fait que la République hellénique ait retiré les 4 346 t de riz avant cette date n’a pas pour conséquence que le retrait soit considéré comme ayant été effectué en bonne et due forme. Ainsi, les griefs soulevés à ce titre ne sont pas de nature à remettre en cause la motivation du rapport de synthèse relative aux corrections appliquées du fait du retrait tardif des stocks d’intervention.

212    S’agissant, deuxièmement, des corrections imposées du fait de la distribution tardive des produits finis, pâtes et riz, aux plus démunis, il y a lieu de relever que celle-ci n’a été effectuée que le 3 mars 2006, donc plusieurs mois après l’expiration du délai prévu par l’article 3, paragraphe 1, du règlement n° 3149/92, tel qu’applicable aux faits de l’espèce. Or, contrairement aux affirmations de la République hellénique, l’opération de distribution des denrées alimentaires fait également partie de l’exécution du plan et, partant, une distribution tardive entrave l’objectif de l’action communautaire et emporte des conséquences financières pour le FEOGA, dès lors qu’elle empiète sur l’exécution du plan annuel suivant. Il s’ensuit que les arguments de la République hellénique selon lesquels aucune correction n’aurait dû lui être imposée, dès lors que la distribution des denrées concernées par le plan a eu lieu dans un délai raisonnable après l’expiration des délais fixés par le règlement susvisé, ne sauraient non plus remettre en cause la légalité des corrections appliquées.

213    S’agissant des frais de transport relatifs aux denrées distribuées après les délais prescrits, force est de constater qu’ils sont inéligibles, au même titre que la valeur des produits concernés.

214    Enfin, les arguments avancés par la République hellénique par lesquels elle fait valoir, en substance, une violation du principe de proportionnalité doivent être écartés, pour les mêmes raisons que celles qui ont été exposées dans le cadre du premier moyen, invoqué en ce qui concerne les corrections appliquées dans le secteur de l’aide aux plus démunis (voir points 193 et 194 ci-dessus).

215    Il s’ensuit que le troisième moyen doit être rejeté, ainsi que le recours, par voie de conséquence, dans son ensemble.

 Sur les dépens

216    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La République hellénique ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      La République hellénique est condamnée à supporter les dépens.

Papasavvas

Vadapalas

O’Higgins

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 4 octobre 2012.

Signatures

Table des matières


Antécédents du litige

Correction financière appliquée aux dépenses dans le secteur du coton

Correction financière appliquée dans le secteur de l’aide aux plus démunis

Correction financière appliquée dans le secteur du développement rural

Décision attaquée

Procédure et conclusions des parties

En droit

Moyens relatifs aux corrections appliquées dans le secteur du coton

Sur le premier moyen, tiré d’une appréciation erronée des faits et d’une violation de l’obligation de motivation

Sur le deuxième moyen, tiré d’une mauvaise appréciation des faits et d’une interprétation erronée de l’article 13, paragraphe 2, du règlement n° 1591/2001 et de l’article 17 du règlement n° 1051/2001

Sur le troisième moyen, tiré d’une interprétation et d’une application erronées des orientations sur les corrections forfaitaires et d’une violation du principe de proportionnalité

Sur le quatrième moyen, tiré d’une interprétation erronée de l’article 7, paragraphe 4, du règlement n° 1051/2001 et des dispositions des articles 1ers des règlements n°s 1123/2004, 905/2005 et 871/2006

Sur le cinquième moyen, tiré de motifs de corrections contradictoires et de calculs erronés

Moyens relatifs aux corrections appliquées dans le secteur du développement rural

Sur le premier moyen, tiré de l’illégalité de la procédure d’apurement des comptes en raison d’une violation des formes substantielles prévues par l’article 8, paragraphe 1, troisième alinéa, sous a), du règlement n° 1663/1995

Sur le second moyen, tiré d’une appréciation erronée des faits et d’un défaut de motivation

– Sur les lacunes du SIGC

– Sur les lacunes indépendantes du SIGC

Moyens relatifs aux corrections appliquées dans le secteur de l’aide aux plus démunis

Sur le premier moyen, tiré d’une violation des principes de confiance légitime, de sécurité juridique et, subsidiairement, d’un abus de pouvoir

Sur le deuxième moyen, tiré d’un calcul erroné des frais de transport

Sur le troisième moyen, tiré d’une interprétation et d’une application erronées de dispositions du droit de l’Union et, en particulier, de l’article 3, paragraphe 2, du règlement n° 3149/92 et d’une violation du principe de proportionnalité et des limites du pouvoir d’appréciation

Sur les dépens


* Langue de procédure : le grec.