Language of document : ECLI:EU:C:2023:727

ORDONNANCE DU VICE-PRÉSIDENT DE LA COUR

28 septembre 2023 (*)

« Pourvoi – Référé – Mesures restrictives prises au regard de la situation en Ukraine – Gel de fonds et de ressources économiques – Maintien du nom d’une personne physique sur la liste des personnes, des entités et des organismes faisant l’objet de ces mesures – Suspension du processus de “relistage” de cette personne – Publication d’une notice au Journal officiel de l’Union européenne – Obligation de prendre des mesures relatives aux visas accordés par les États membres – Mesures pouvant être adoptées par le juge des référés »

Dans l’affaire C‑564/23 P(R),

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 57, deuxième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 13 septembre 2023,

Conseil de l’Union européenne, représenté par Mme P. Mahnič, MM. R. Meyer et J. Rurarz, en qualité d’agents,

partie requérante,

les autre parties à la procédure étant :

Nikita Dmitrievich Mazepin, demeurant à Moscou (Russie), représenté par Mes A. Bass, T. Marembert, D. Rovetta, avocats, Mes M. Campa, M. Moretto et V. Villante, avvocati,

partie demanderesse en première instance,

République de Lettonie,

partie intervenante en première instance,

LE VICE-PRÉSIDENT DE LA COUR

l’avocat général, M. M. Szpunar, entendu,

rend la présente

Ordonnance

1        Par son pourvoi, le Conseil de l’Union européenne demande l’annulation de l’ordonnance du président du Tribunal de l’Union européenne du 7 septembre 2023, Mazepin/Conseil (T‑743/22 RIII, ci‑après l’« ordonnance attaquée »), par laquelle celui‑ci a fait droit à la demande en référé introduite par M. Nikita Dmitrievich Mazepin.

 Le cadre juridique

 La décision 2014/145/PESC

2        L’article 1er, paragraphes 1, 6 et 7, de la décision 2014/145/PESC du Conseil, du 17 mars 2014, concernant des mesures restrictives eu égard aux actions compromettant ou menaçant l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance de l’Ukraine (JO 2014, L 78, p. 16), telle que modifiée par la décision (PESC) 2023/1218 du Conseil, du 23 juin 2023 (JO 2023, L 159I, p. 526), dispose :

« 1.      Les États membres prennent les mesures nécessaires pour empêcher l’entrée ou le passage en transit sur leur territoire :

[...]

e)      des femmes et hommes d’affaires influents exerçant des activités en Russie et des membres de leur famille proche ou d’autres personnes physiques, qui en tirent avantage, ou des femmes et hommes d’affaires ayant une activité dans des secteurs économiques qui fournissent une source substantielle de revenus au gouvernement de la Fédération de Russie, qui est responsable de l’annexion de la Crimée et de la déstabilisation de l’Ukraine ; [...]

[...]

et des personnes physiques qui leur sont associées ou qui sont associées aux personnes morales, entités ou organismes [...] inscrits sur la liste figurant à l’annexe.

[...]

6.      Les États membres peuvent déroger aux mesures imposées au paragraphe 1 lorsque le déplacement d’une personne se justifie pour des raisons humanitaires urgentes, ou lorsque la personne se déplace pour assister à des réunions intergouvernementales et à des réunions dont l’initiative a été prise par l’Union [européenne] ou qu’elle accueille, ou à des réunions accueillies par un État membre assurant alors la présidence de l’[Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe], lorsqu’il y est mené un dialogue politique visant directement à promouvoir les objectifs stratégiques des mesures restrictives, y compris le soutien à l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance de l’Ukraine.

7.      Tout État membre souhaitant accorder des dérogations au sens du paragraphe 6 le notifie au Conseil par écrit. La dérogation est réputée être accordée sauf si un ou plusieurs membres du Conseil s’y opposent par écrit dans les deux jours ouvrables qui suivent la réception de la notification en question. Si un ou plusieurs membres du Conseil s’y opposent, le Conseil, statuant à la majorité qualifiée, peut décider d’accorder la dérogation proposée. »

 Le règlement (UE) no 269/2014

3        L’article 2, paragraphe 1, du règlement (UE) no 269/2014 du Conseil, du 17 mars 2014, concernant des mesures restrictives eu égard aux actions compromettant ou menaçant l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance de l’Ukraine (JO 2014, L 78, p. 6), tel que modifié par le règlement (UE) no 476/2014 du Conseil, du 12 mai 2014 (JO 2014, L 137, p. 1) (ci-après le « règlement no 269/2014 »), prévoit :

« Sont gelés tous les fonds et ressources économiques appartenant aux personnes physiques ou morales, entités ou organismes, ou aux personnes physiques ou morales, entités ou organismes qui leur sont associés, énumérés à l’annexe I, de même que tous les fonds et ressources économiques que ces personnes physiques ou morales, entités ou organismes possèdent, détiennent ou contrôlent. »

4        L’article 14, paragraphe 4, de ce règlement énonce :

« La liste figurant à l’annexe I est révisée à intervalles réguliers et au moins tous les douze mois. »

 Les antécédents du litige

5        Le 9 mars 2022, le Conseil a adopté la décision (PESC) 2022/397, modifiant la décision 2014/145 (JO 2022, L 80, p. 31), par laquelle le nom de M. Mazepin a été ajouté sur la liste des personnes, des entités et des organismes faisant l’objet de mesures restrictives figurant à l’annexe de la décision 2014/145.

6        À la même date, le Conseil a adopté le règlement d’exécution (UE) 2022/396, mettant en œuvre le règlement no 269/2014 (JO 2022, L 80, p. 1), par lequel le nom de M. Mazepin a été ajouté à la liste des personnes physiques et morales, des entités et des organismes figurant à l’annexe I du règlement no 269/2014.

7        Le 14 septembre 2022, le Conseil a adopté la décision (PESC) 2022/1530, modifiant la décision 2014/145 (JO 2022, L 239, p. 149), par laquelle il a décidé de maintenir le nom de M. Mazepin sur la liste des personnes, des entités et des organismes faisant l’objet de mesures restrictives figurant à l’annexe de la décision 2014/145, en modifiant les motifs de son inscription sur cette liste.

8        À la même date, le Conseil a adopté le règlement d’exécution (UE) 2022/1529, mettant en œuvre le règlement no 269/2014 (JO 2022, L 239, p. 1), par lequel le nom de M. Mazepin a été maintenu, avec la même modification des motifs que celle visée au point précédent, sur la liste des personnes physiques et morales, des entités et des organismes figurant à l’annexe I du règlement no 269/2014.

9        Le 13 mars 2023, le Conseil a adopté la décision (PESC) 2023/572, modifiant la décision 2014/145 (JO 2023, L 75 I, p. 134), par laquelle il a décidé de maintenir le nom de M. Mazepin sur la liste des personnes, des entités et des organismes faisant l’objet de mesures restrictives figurant à l’annexe de la décision 2014/145, en modifiant les motifs de son inscription sur cette liste ainsi que ses informations d’identification.

10      À la même date, le Conseil a adopté le règlement d’exécution (UE) 2023/571, mettant en œuvre le règlement no 269/2014 (JO 2023, L 75 I, p. 1), par lequel le nom de M. Mazepin a été maintenu, avec les mêmes modifications des motifs et des informations d’identification que celles visées au point précédent, sur la liste des personnes physiques et morales, des entités et des organismes figurant à l’annexe I du règlement no 269/2014.

 La procédure devant le Tribunal et l’ordonnance attaquée

11      Par une requête déposée au greffe du Tribunal le 25 novembre 2022, M. Mazepin a introduit un recours tendant à l’annulation de la décision 2022/1530 et du règlement d’exécution 2022/1529, en tant que ces actes le concernent (ci-après, ensemble, les « premiers actes litigieux »).

12      Par un acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 9 décembre 2022, M. Mazepin a introduit une première demande en référé tendant, en substance, au sursis à l’exécution des premiers actes litigieux. Par l’ordonnance du 1er mars 2023, Mazepin/Conseil (T‑743/22 R, EU:T:2023:102), le président du Tribunal a fait droit à cette demande et a ordonné, pour partie, le sursis à l’exécution de ces actes, en tant qu’ils concernent M. Mazepin.

13      Par un acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 4 avril 2023, M. Mazepin a, sur le fondement de l’article 86 du règlement de procédure du Tribunal, adapté la requête mentionnée au point 11 de la présente ordonnance, de sorte que celle-ci vise également à l’annulation de la décision 2023/572 et du règlement d’exécution 2023/571 (ci-après, ensemble, les « seconds actes litigieux »).

14      Par un acte séparé déposé au greffe du Tribunal le même jour, M. Mazepin a introduit une deuxième demande en référé tendant, en substance, au sursis à l’exécution des seconds actes litigieux. Par l’ordonnance du président du Tribunal du 19 juillet 2023, Mazepin/Conseil (T‑743/22 RII, EU:T:2023:406), le président du Tribunal a fait droit à cette demande et a ordonné, pour partie, le sursis à l’exécution de ces actes, en tant qu’ils concernent M. Mazepin.

15      Par un acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 7 septembre 2023, M. Mazepin a introduit une troisième demande en référé.

16      Par l’ordonnance attaquée, le président du Tribunal a fait droit à cette demande et a ordonné, en substance :

–        au point 1 du dispositif de cette ordonnance, le sursis à l’exécution du « relistage » annoncé de M. Mazepin aux mêmes conditions que celles prévues aux points 1 et 2 du dispositif de l’ordonnance du président du Tribunal du 19 juillet 2023, Mazepin/Conseil (T‑743/22 RII, EU:T:2023:406) ;

–        au point 2 de ce dispositif, la publication au Journal officiel de l’Union européenne d’une notice indiquant clairement qu’il est sursis à l’exécution de ce « relistage » annoncé ;

–        au point 3 dudit dispositif, au Conseil de prendre les mesures nécessaires pour assurer que les États membres se conforment, de manière effective et complète, à l’ordonnance du président du Tribunal du 19 juillet 2023, Mazepin/Conseil (T‑743/22 RII, EU:T:2023:406), et, en particulier, pour assurer que le visa délivré à M. Mazepin le 7 août 2023 ou tout autre visa qui pourrait devenir nécessaire couvre au moins le territoire des États membres de l’espace Schengen et demeure valide durant la période nécessaire pour permettre à M. Mazepin d’exercer effectivement les droits octroyés par cette ordonnance, et

–        au point 4 du même dispositif, au Conseil d’informer le président du Tribunal des mesures adoptées.

17      Le 14 septembre 2023, M. Mazepin a introduit, en application de l’article 164 du règlement de procédure du Tribunal, une demande de rectification de l’ordonnance attaquée.

18      Par l’ordonnance du 19 septembre 2023, Mazepin/Conseil (T‑743/22 RIII), le président du Tribunal a adopté des mesures provisoires en substance comparables à celles exposées au point 16 de la présente ordonnance et a rapporté l’ordonnance attaquée.

 Les conclusions des parties

19      Le Conseil demande à la Cour :

–        d’annuler l’ordonnance attaquée ;

–        de rejeter la demande en référé, et

–        de réserver les dépens.

20      M. Mazepin demande à la Cour :

–        de déclarer qu’il n’y a plus lieu de statuer sur la présente procédure en référé, ou

–        de rejeter le pourvoi, et, dans tous les cas,

–        de condamner le Conseil aux dépens.

 Sur le non-lieu à statuer

 Argumentation

21      M. Mazepin soutient que, dans la mesure où, par l’ordonnance du 19 septembre 2023, Mazepin/Conseil (T‑743/22 RIII), le président du Tribunal a rapporté l’ordonnance attaquée, le présent pourvoi n’a plus d’objet et que, par conséquent, il n’y a plus lieu de statuer sur celui-ci.

 Appréciation

22      Il ressort des termes mêmes du dispositif de l’ordonnance du président du Tribunal du 19 septembre 2023, Mazepin/Conseil (T‑743/22 RIII), que l’ordonnance attaquée est rapportée.

23      À cet égard, l’article 159 du règlement de procédure du Tribunal énonce que, à la demande d’une partie, une ordonnance statuant sur une demande en référé peut à tout moment être modifiée ou rapportée à la suite d’un changement de circonstances.

24      Il résulte de la jurisprudence de la Cour qu’une décision du juge des référés rapportant une ordonnance ayant accordé une mesure provisoire emporte non pas l’annulation rétroactive de cette ordonnance, mais seulement sa modification ou son abrogation, le juge des référés pouvant reconsidérer, pour l’avenir uniquement, une telle ordonnance [voir, en ce sens, ordonnance du 14 février 2002, Commission/Artegodan, C‑440/01 P(R), EU:C:2002:95, point 65, et ordonnance du vice-président de la Cour du 19 mai 2022, République tchèque/Pologne (Mine de Turów), C‑121/21 R, EU:C:2022:408, point 22].

25      Cette décision ne saurait donc avoir pour effet de remettre en cause les effets passés d’une ordonnance ayant accordé une mesure provisoire [voir, en ce sens, ordonnance du vice-président de la Cour du 19 mai 2022, République tchèque/Pologne (Mine de Turów), C‑121/21 R, EU:C:2022:408, point 23].

26      Il s’ensuit que, à compter de la date de sa signification aux parties, l’ordonnance du président du Tribunal du 19 septembre 2023, Mazepin/Conseil (T‑743/22 RIII), peut, tout au plus, priver l’ordonnance attaquée de tout effet, mais qu’elle ne fait pas disparaître celle-ci de l’ordre juridique de l’Union, en tant qu’elle laisse subsister les effets produits par cette dernière ordonnance entre la date de sa signification et celle de la signification de l’ordonnance l’ayant rapportée.

27      Partant, il y a lieu de considérer que le présent pourvoi conserve un objet, de telle sorte qu’il convient de statuer sur celui-ci.

 Sur le pourvoi

28      À l’appui de son pourvoi, le Conseil invoque cinq moyens, tirés, le premier, d’une violation de l’obligation de motivation, les deuxième et quatrième, d’erreurs de droit manifestes quant à l’étendue de la compétence du juge des référés, le troisième, d’erreurs manifestes dans l’application des conditions régissant l’octroi de mesures provisoires et, le cinquième, d’erreurs de droit manifestes entachant le point 3 du dispositif de l’ordonnance attaquée.

 Sur le cinquième moyen

 Argumentation

29      Par son cinquième moyen, qu’il convient d’examiner en premier lieu, le Conseil soutient que le point 3 du dispositif de l’ordonnance attaquée est entaché de plusieurs erreurs de droit manifestes.

30      Tout d’abord, la mesure imposée au Conseil à ce point 3 méconnaîtrait la répartition des compétences reflétée à l’article 266 TFUE. En effet, il appartiendrait non pas aux juridictions de l’Union, mais au Conseil de prendre les mesures nécessaires pour exécuter cette ordonnance.

31      Ensuite, ledit point 3 serait entaché d’une erreur de droit en tant qu’il ordonnerait au Conseil d’adopter une mesure qui ne ressortirait pas à sa compétence. Ainsi, le Conseil ne disposerait pas du pouvoir de garantir l’application du droit de l’Union par les États membres. En particulier, ni le droit primaire de l’Union ni le règlement (CE) no 810/2009 du Parlement européen et du Conseil, du 13 juillet 2009, établissant un code communautaire des visas (code des visas) (JO 2009, L 243, p. 1), ne lui permettraient d’interférer dans la délivrance de visas par les États membres. Or, conformément à l’article 13, paragraphe 2, TUE, le Conseil ne devrait agir que dans les limites de ses attributions.

32      Enfin, au même point 3, le président du Tribunal aurait, en pratique, imposé une injonction aux États membres et outrepassé ainsi les limites de sa compétence.

33      M. Mazepin avance que le Conseil est tenu d’exécuter les mesures figurant au dispositif de l’ordonnance attaquée, en vue de se conformer à l’article 13, paragraphe 2, TUE et à l’article 266 TFUE.

34      En outre, il disposerait d’une compétence, définie à l’article 16, paragraphe 1, et à l’article 32 TUE, afin de coordonner l’action des États membres dans le cadre de la politique étrangère et de sécurité commune. Ainsi, en ce qui concerne l’application, par les États membres, de l’ordonnance du président du Tribunal du 19 juillet 2023, Mazepin/Conseil (T‑743/22 RII, EU:T:2023:406), le Conseil pourrait, par exemple, inciter ceux-ci à adopter une approche commune qui consisterait à délivrer un visa uniforme à M. Mazepin, tout en laissant l’État membre concerné apprécier si les raisons invoquées par ce dernier pour entrer sur son territoire satisfont aux conditions prévues par cette ordonnance.

 Appréciation

35      Conformément à l’article 13, paragraphe 2, TUE, les institutions de l’Union ne peuvent agir que dans les limites des attributions qui leur sont conférées par les traités (voir, en ce sens, arrêt du 23 octobre 2007, Parlement/Commission, C‑403/05, EU:C:2007:624, point 49).

36      Cette disposition, qui s’impose à l’ensemble des institutions de l’Union, s’oppose à ce que le juge des référés ordonne au Conseil d’adopter une ou plusieurs mesures qui ne ressortent pas à la compétence de cette institution.

37      À cet égard, il importe de rappeler que, au point 3 du dispositif de l’ordonnance attaquée, le président du Tribunal a ordonné au Conseil de prendre les mesures nécessaires pour assurer que les États membres se conforment, de manière effective et complète, à l’ordonnance du président du Tribunal du 19 juillet 2023, Mazepin/Conseil (T‑743/22 RII, EU:T:2023:406), et, en particulier, pour assurer que le visa délivré à M. Mazepin le 7 août 2023 ou tout autre visa qui pourrait devenir nécessaire couvre au moins le territoire des États membres de l’espace Schengen et demeure valide durant la période nécessaire pour permettre à M. Mazepin d’exercer effectivement les droits octroyés par cette ordonnance.

38      Or, en premier lieu, force est de constater que le droit primaire de l’Union ne confère pas au Conseil une compétence générale pour adopter des mesures encadrant l’application, par les États membres, d’actes tels que les premiers ou les seconds actes litigieux. En particulier, l’obligation imposée aux États membres, par l’article 32 TUE, de se concerter au sein du Conseil européen et du Conseil sur toute question de politique étrangère et de sécurité présentant un intérêt général ne saurait être comprise comme autorisant le Conseil à prendre des mesures destinées à inciter les États membres à délivrer un visa dans les conditions prévues par l’ordonnance attaquée.

39      En outre, ce droit n’attribue pas non plus au Conseil le pouvoir de prendre des mesures individuelles visant à assurer la délivrance d’un visa par un État membre ou à garantir qu’un tel visa aurait une portée géographique et temporelle déterminée.

40      En deuxième lieu, un tel pouvoir n’est pas non plus conféré au Conseil par des actes de l’Union harmonisant les politiques menées par les États membres en matière de visas. En particulier, un tel pouvoir n’est aucunement prévu par le règlement no 810/2009.

41      En troisième lieu, il convient, certes, de relever que l’article 1er, paragraphe 7, de la décision 2014/145, telle que modifiée par la décision 2023/1218, prévoit que le Conseil se prononce, dans certains cas, sur la possibilité, pour un État membre, de délivrer un visa, par dérogation aux mesures restrictives découlant de l’article 1er, paragraphe 1, de cette décision.

42      Cependant, cet article 1er, paragraphe 7, ne permet pas au Conseil d’intervenir d’office auprès d’un État membre ou d’adresser à un État membre des instructions relatives à la délivrance ou à la portée d’un visa, mais attribue uniquement à cette institution la faculté de décider si un État membre souhaitant délivrer un visa peut déroger à ces mesures restrictives, dans le cas où un ou plusieurs membres du Conseil se sont opposés à la délivrance de ce visa.

43      Il résulte de ce qui précède que le Conseil n’est pas compétent pour prendre les mesures visées au point 3 du dispositif de l’ordonnance attaquée et que le président du Tribunal ne pouvait donc pas, sans méconnaître l’article 13, paragraphe 2, TUE, ordonner au Conseil d’adopter de telles mesures.

44      Il s’ensuit qu’il y a lieu d’accueillir le cinquième moyen.

45      Dans la mesure où ce moyen ne vise que le point 3 du dispositif de l’ordonnance attaquée, il y a lieu d’examiner également le deuxième moyen du pourvoi.

 Sur le deuxième moyen

 Argumentation

46      Par son deuxième moyen, qu’il y a lieu d’examiner en second lieu, le Conseil soutient que le président du Tribunal a commis, en ordonnant les mesures énoncées aux points 1 à 3 du dispositif de l’ordonnance attaquée, une erreur de droit manifeste quant à l’étendue de sa compétence en tant que juge des référés.

47      Le juge des référés du Tribunal serait autorisé, en application de l’article 157, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, à prendre des mesures provisoires pour protéger l’effectivité de la décision à intervenir sur une demande en référé, laquelle aurait pour objet de préserver l’effectivité de la décision à intervenir sur un recours principal auquel cette demande est accessoire.

48      En l’espèce, le recours principal introduit par M. Mazepin porterait sur quatre actes de l’Union. En conséquence, dans la présente procédure, le président du Tribunal ne pourrait adopter des mesures provisoires que dans le but de préserver l’effectivité d’une éventuelle décision annulant ces actes. Partant, les mesures adoptées au titre de l’article 157, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal devraient uniquement viser à préserver l’effectivité de telles mesures provisoires.

49      Or, le président du Tribunal aurait, par l’ordonnance attaquée, adopté des mesures se rapportant à des actes qui ne sont pas visés par le recours principal introduit par M. Mazepin et qui n’auraient même pas encore été adoptés. Ce faisant, il aurait outrepassé les limites de sa compétence.

50      Cette analyse serait corroborée par les termes de l’article 278 TFUE et de l’article 156, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, dont il ressortirait que le président du Tribunal peut uniquement surseoir à l’exécution d’un acte attaqué dans un recours principal devant le Tribunal.

51      Si l’article 279 TFUE et l’article 156, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal permettent, certes, à cette juridiction d’adopter d’autres types de mesures provisoires, ces dispositions exigeraient toutefois que ces mesures soient liées à un recours principal introduit devant ladite juridiction par le requérant concerné, ce qui ne serait pas le cas en l’espèce.

52      M. Mazepin soutient, à titre principal, que, par l’ordonnance attaquée, le président du Tribunal a ordonné le sursis à l’exécution non pas d’un acte futur, mais d’une procédure administrative qui était en cours à la date à laquelle cette ordonnance a été signée. Une telle mesure pourrait être adoptée, en vertu de l’article 279 TFUE, en vue d’assurer le respect, par le Conseil, des ordonnances de référé déjà adoptées par le président du Tribunal dans la présente affaire, dans un contexte où le Conseil méconnaîtrait manifestement les obligations qui découlent de ces dernières ordonnances.

53      M. Mazepin fait valoir, à titre subsidiaire, que les mesures adoptées par le président du Tribunal sont indispensables pour lui assurer une protection juridictionnelle effective.

54      À titre encore plus subsidiaire, il avance que tout vice tiré du caractère anticipé de l’ordonnance attaquée serait désormais purgé, dans la mesure où il aurait, après la signification de celle-ci, adapté les conclusions de son recours en annulation.

 Appréciation

55      À titre liminaire, il importe de souligner que, si le deuxième moyen porte sur les points 1 à 3 du dispositif de l’ordonnance attaquée, l’irrégularité du point 3 de ce dispositif ressort déjà du point 43 de la présente ordonnance. Partant, il y a lieu d’examiner ce moyen uniquement en tant qu’il vise les points 1 et 2 dudit dispositif.

56      À cet égard, il convient de relever que l’article 39, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, rendu applicable à la procédure devant le Tribunal en vertu de l’article 53, premier alinéa, de ce statut, dispose que, pour l’examen de conclusions tendant à l’obtention des mesures prévues aux articles 278 et 279 TFUE, le président peut statuer « selon une procédure sommaire dérogeant, en tant que besoin, à certaines règles contenues dans [ledit] statut et qui sera fixée par le règlement de procédure ».

57      Dans ce cadre, l’article 157, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal habilite le président du Tribunal à fixer un bref délai à l’autre partie pour la présentation d’observations écrites ou orales. L’article 157, paragraphe 2, de ce règlement dispose toutefois que le président du Tribunal peut faire droit à une demande de mesures provisoires formulée par une partie avant même que l’autre partie ait présenté ses observations.

58      Il découle de ces dispositions que le président du Tribunal, statuant en tant que juge des référés, est habilité à se prononcer sans entendre au préalable les parties dans leurs observations [voir, en ce sens, ordonnance de la vice-présidente de la Cour du 8 décembre 2020, Price/Conseil, C‑298/20 P(R), EU:C:2020:1006, point 26 et jurisprudence citée].

59      Il ressort de la jurisprudence de la Cour relative à l’article 160, paragraphe 7, du règlement de procédure de la Cour, disposition qui correspond à l’article 157, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, que le juge connaissant d’une demande de mesures provisoires peut arrêter de telles mesures à titre conservatoire, avant même que l’autre partie ait présenté ses observations, soit jusqu’au prononcé de l’ordonnance mettant fin à l’instance en référé, soit jusqu’à la clôture de la procédure principale, si celle-ci a lieu plus tôt, lorsque le prononcé de ces mesures est dans l’intérêt de la bonne administration de la justice, en particulier en vue de garantir l’effectivité de la procédure en référé [voir, en ce sens, ordonnance du vice-président de la Cour du 27 juillet 2023, VC/EU-OSHA, C‑456/23 P(R)‑R, EU:C:2023:612, point 4 et jurisprudence citée].

60      La procédure instituée à l’article 157, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal constitue ainsi une procédure dérogatoire destinée à permettre d’ordonner aussi rapidement que possible des mesures provisoires, en vue d’assurer que l’écoulement du temps nécessaire pour se prononcer, à l’issue d’une procédure contradictoire, sur une demande en référé n’ait pas pour effet de priver la partie qui a introduit cette demande d’une protection juridictionnelle suffisante.

61      Il n’en demeure pas moins que cette procédure dérogatoire constitue une modalité particulière de mise en œuvre des articles 278 et 279 TFUE ainsi que de l’article 39, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne. Partant, il y a lieu de constater que, comme le soutient le Conseil, ladite procédure ne permet pas au juge des référés de prendre des mesures qu’il ne serait pas habilité à adopter en application des articles 278 et 279 TFUE.

62      Dans la mesure où l’ordonnance attaquée ne précise pas si les mesures ordonnées aux points 1 et 2 de son dispositif sont fondées sur l’article 278 TFUE ou sur l’article 279 TFUE, il y a lieu d’examiner si ces mesures ressortent à la compétence conférée au juge des référés par l’un ou l’autre de ces articles.

63      S’agissant, en premier lieu, de l’article 278 TFUE, celui-ci dispose que les recours formés devant la Cour n’ont pas d’effet suspensif, mais que celle-ci peut toutefois, si elle estime que les circonstances l’exigent, ordonner le sursis à l’exécution de l’acte attaqué.

64      Cet article est mis en œuvre à l’article 156, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, qui précise que toute demande de sursis à l’exécution d’un acte d’une institution aux termes de l’article 278 TFUE n’est recevable que si le demandeur a attaqué cet acte dans un recours devant le Tribunal.

65      En l’espèce, à la date à laquelle a été signée l’ordonnance attaquée, le Tribunal était saisi, dans le cadre du recours en annulation introduit devant cette juridiction par M. Mazepin, de conclusions visant les décisions 2022/1530 et 2023/572 ainsi que les règlements d’exécution 2022/1529 et 2023/571 (ci-après, ensemble, les « actes litigieux »).

66      Dans ce contexte, force est de constater que les points 1 et 2 du dispositif de cette ordonnance ne sont pas formellement présentés comme prononçant le sursis à l’exécution d’un ou de plusieurs des actes attaqués par M. Mazepin devant le Tribunal.

67      Ces points ne peuvent pas, non plus, être regardés comme ordonnant, en substance, la suspension de certains des effets de ces actes.

68      En effet, le processus de « relistage », dont le point 1 du dispositif de l’ordonnance attaquée ordonne la suspension, vise à modifier, d’une part, la décision 2014/145 en prorogeant cette dernière et, d’autre part, le règlement no 269/2014 en mettant en œuvre l’obligation, énoncée à l’article 14, paragraphe 4, de celui-ci, de réviser à intervalles réguliers la liste figurant à l’annexe I de ce règlement.

69      Dès lors, étant donné que les actes litigieux se bornent également à modifier la décision 2014/145 et le règlement no 269/2014, sans obliger pour autant le Conseil à engager à l’avenir un nouveau processus de « relistage », le processus visé à ce point 1 ne saurait être considéré comme constituant un effet ou une mesure d’exécution de ces actes.

70      Quant au point 2 du dispositif de l’ordonnance attaquée, il ordonne la publication d’une notice au Journal officiel de l’Union européenne, publication qui n’est ni prévue ni proscrite par lesdits actes.

71      Il en découle que les points 1 et 2 de ce dispositif ne pouvaient pas valablement être fondés sur l’article 278 TFUE.

72      En ce qui concerne, en second lieu, l’article 279 TFUE, celui-ci énonce que, dans les affaires dont elle est saisie, la Cour peut prescrire les mesures provisoires nécessaires.

73      Cet article confère au juge des référés une large marge d’appréciation pour décider des mesures devant être prononcées, lesquelles peuvent notamment consister en des injonctions appropriées et en des mesures accessoires visant à garantir l’efficacité des mesures provisoires ordonnées par ce juge (voir, en ce sens, ordonnance du président de la Cour du 24 avril 2008, Commission/Malte, C‑76/08 R, EU:C:2008:252, point 19, ainsi que ordonnance du 20 novembre 2017, Commission/Pologne, C‑441/17 R, EU:C:2017:877, points 96, 97 et 99).

74      Il ressort toutefois de la jurisprudence de la Cour que de telles mesures provisoires doivent avoir un lien direct avec l’objet du recours principal (voir, en ce sens, ordonnance du 19 octobre 1976, Société pour l’Exportation des Sucres/Commission, 88/76 R, EU:C:1976:140, point 5, et du 16 décembre 1980, Metallurgica Rumi/Commission, 258/80 R, EU:C:1980:296, point 21), exigence qui est en substance rappelée à l’article 156, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, lequel prévoit que toute demande relative à l’une des mesures provisoires visées à l’article 279 TFUE n’est recevable que si elle émane d’une partie principale à une affaire dont le Tribunal est saisi et si elle se réfère à cette affaire.

75      Dans ce cadre, les mesures provisoires adoptées au titre de l’article 279 TFUE ne doivent pas dépasser le cadre du litige tel qu’il a été déterminé par le recours principal, en tant qu’elles ne peuvent avoir d’autre objet que de sauvegarder les intérêts d’une des parties à un litige devant le Tribunal afin de ne pas rendre illusoire l’arrêt qui mettra fin à l’instance principale en le privant d’effet utile (voir, en ce sens, ordonnance du 17 mai 1991, CIRFS e.a./Commission, C‑313/90 R, EU:C:1991:220, point 24, ainsi que ordonnance du président de la Cour du 24 avril 2008, Commission/Malte, C‑76/08 R, EU:C:2008:252, point 15).

76      Partant, étant donné qu’un arrêt d’annulation a pour effet de faire disparaître rétroactivement l’acte annulé de l’ordre juridique de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 31 mars 1971, Commission/Conseil, 22/70, EU:C:1971:32, point 60), le juge des référés peut notamment, sur la base de l’article 279 TFUE, ordonner à une institution de l’Union de ne pas adopter un acte qui constituerait une forme d’exécution de l’acte annulé ou qui aurait pour conséquence de conférer un caractère définitif à certains effets de ce dernier acte.

77      En revanche, le juge des référés ne saurait, sans dépasser le cadre d’un litige relatif à un recours en annulation, enjoindre à une institution de l’Union de suspendre une procédure qui ne dépend pas de l’acte attaqué, en vue d’éviter que l’acte adopté à l’issue de cette procédure recèle la même illégalité que celle dénoncée dans ce recours.

78      Certes, la Cour a jugé que, en cas d’annulation d’un règlement dont l’effet est limité à une période de temps bien définie, l’institution qui en est l’auteur a l’obligation d’exclure des textes nouveaux devant intervenir après l’arrêt d’annulation, pour régir des périodes postérieures à cet arrêt, toute disposition ayant le même contenu que celle jugée illégale (voir, en ce sens, arrêt du 26 avril 1988, Asteris e.a./Commission, 97/86, 99/86, 193/86 et 215/86, EU:C:1988:199, point 29).

79      Pour autant, d’une part, si l’autorité absolue dont jouit un arrêt d’annulation s’attache tant à son dispositif qu’aux motifs qui constituent le soutien nécessaire de ce dernier, elle ne peut entraîner l’annulation d’un acte non déféré à la censure des juridictions de l’Union qui serait entachée de la même illégalité (voir, en ce sens, arrêt du 14 septembre 1999, Commission/AssiDomän Kraft Products e.a., C‑310/97 P, EU:C:1999:407, point 54). D’autre part, il n’appartient pas à ces juridictions d’indiquer, dans le cadre d’un arrêt d’annulation, les mesures devant être adoptées par l’institution concernée pour exécuter cet arrêt (voir, en ce sens, arrêts du 24 juin 1986, AKZO Chemie et AKZO Chemie UK/Commission, 53/85, EU:C:1986:256, point 23, ainsi que du 25 mai 1993, Foyer culturel du Sart-Tilman/Commission, C‑199/91, EU:C:1993:205, point 17).

80      Il s’ensuit qu’un arrêt d’annulation ne saurait conduire directement à remettre en cause la validité d’un acte postérieur à l’acte annulé en raison du fait que cet acte postérieur est entaché de la même illégalité que celle entachant l’acte annulé.

81      Dans ces conditions, une ordonnance du juge des référés enjoignant à une institution de l’Union de suspendre une procédure pouvant aboutir à l’adoption d’un tel acte postérieur reviendrait à garantir au requérant concerné non pas une protection contre les effets d’actes adoptés par une institution, telle que prévue par le droit primaire de l’Union, mais une protection préventive d’un tout autre ordre.

82      En vue de garantir une telle protection, le juge des référés serait ainsi obligé de porter une appréciation sur des questions sur lesquelles l’institution concernée n’a pas encore eu l’occasion de se prononcer, ce qui aurait pour conséquence une anticipation des débats au fond ainsi qu’une confusion des différentes phases des procédures administratives et judiciaires (voir, par analogie, arrêt du 11 novembre 1981, IBM/Commission, 60/81, EU:C:1981:264, point 20), alors qu’il n’appartient pas à ce juge de se substituer à cette institution (voir, en ce sens, ordonnance du 5 octobre 1969, Allemagne/Commission, 50/69 R, EU:C:1969:42, p. 451).

83      En outre, l’absence de compétence du juge des référés pour enjoindre à une institution de l’Union de suspendre une procédure qui ne dépend pas d’un acte attaqué, en vue d’éviter que l’acte adopté à l’issue de cette procédure recèle la même illégalité que celle dénoncée dans un recours en annulation, n’est, contrairement à ce que soutient M. Mazepin, pas de nature à priver ce dernier de la protection juridictionnelle que lui octroie le droit primaire de l’Union, en tant que ce dernier acte pourra faire l’objet d’un recours en annulation assorti d’une demande en référé, laquelle pourra, le cas échéant, tendre au prononcé de mesures provisoires en application de l’article 156, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal.

84      En l’espèce, ainsi qu’il ressort du point 65 de la présente ordonnance, à la date à laquelle a été signée l’ordonnance attaquée, le Tribunal était saisi, dans le cadre du recours en annulation introduit par M. Mazepin devant cette juridiction, de conclusions visant les actes litigieux.

85      Or, d’une part, pour les raisons indiquées aux points 68 et 69 de la présente ordonnance, les actes pouvant être adoptées par le Conseil dans le cadre du processus de « relistage » en cause en l’espèce doivent être regardés comme résultant d’une procédure qui ne dépend pas des actes litigieux et, en particulier, comme ne procédant pas à l’exécution de ces derniers actes.

86      D’autre part, les actes pouvant être adoptés par le Conseil dans le cadre de ce processus ont vocation, au regard de la pratique de cette institution, à être applicables pour une période postérieure à celle régie par les actes litigieux, de telle sorte qu’ils ne sont pas susceptibles de rendre définitifs les effets de ces derniers actes.

87      Il en découle que la mesure ordonnée au point 1 du dispositif de l’ordonnance attaquée est dépourvue de lien direct avec l’objet du recours en annulation introduit par M. Mazepin devant le Tribunal. En l’absence d’un tel lien, cette mesure ne saurait être regardée comme constituant une mesure accessoire visant à garantir l’efficacité des mesures provisoires déjà ordonnées par le président du Tribunal dans les précédentes ordonnances qu’il a rendues dans la présente affaire, visées aux points 12 et 14 de la présente ordonnance, puisque, par celles-ci, le président du Tribunal a ordonné un sursis à l’exécution partiel des actes visés par ce recours en annulation. Il s’ensuit que la mesure ordonnée à ce point 1 ne pouvait pas être valablement adoptée en application de l’article 279 TFUE.

88      Il en va de même de la mesure ordonnée au point 2 du dispositif de l’ordonnance attaquée, dès lors que celle-ci se borne à assurer la publicité de la mesure ordonnée au point 1 du dispositif de cette ordonnance.

89      La circonstance que M. Mazepin ait, postérieurement à la date de la signature de l’ordonnance attaquée, présenté au Tribunal un mémoire en adaptation des conclusions de sa requête est, en tout état de cause, sans incidence sur les considérations qui précèdent, dans la mesure où ce mémoire tend à l’annulation de nouveaux actes adoptés par le Conseil, actes qui ne sont pas directement visés par les mesures figurant au dispositif de cette ordonnance.

90      Il s’ensuit que le deuxième moyen doit être accueilli et qu’il y a lieu, sans qu’il soit besoin de statuer sur les premier, troisième et quatrième moyens, d’annuler l’ordonnance attaquée dans son intégralité, dans la mesure où le point 4 du dispositif de celle-ci n’est pas détachable des points 1 à 3 de ce dernier.

 Sur la demande de mesures provisoires devant le Tribunal

91      Conformément à l’article 61, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, lorsque la Cour annule la décision du Tribunal, elle peut soit statuer elle-même définitivement sur le litige, lorsque celui-ci est en état d’être jugé, soit renvoyer l’affaire devant le Tribunal pour qu’il statue. Cette disposition s’applique également aux pourvois formés conformément à l’article 57, deuxième alinéa, de ce statut [ordonnance du vice-président de la Cour du 24 mai 2022, Puigdemont i Casamajó e.a./Parlement et Espagne, C‑629/21 P(R), EU:C:2022:413, point 172 ainsi que jurisprudence citée].

92      En l’espèce, le président du Tribunal a statué avant que les autres parties à la procédure aient eu la possibilité de présenter leurs observations, conformément à l’article 157, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal.

93      Dans ces conditions, il apparaît que l’affaire n’est pas en état d’être jugée et qu’il y a donc lieu de la renvoyer devant le Tribunal.

 Sur les dépens

94      L’affaire étant renvoyée devant le Tribunal, il convient de réserver les dépens.

Par ces motifs, le vice-président de la Cour ordonne :

1)      L’ordonnance du président du Tribunal de l’Union européenne du 7 septembre 2023, Mazepin/Conseil (T‑743/22 RIII), est annulée.

2)      L’affaire est renvoyée devant le Tribunal de l’Union européenne.

3)      Les dépens sont réservés.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.