Language of document : ECLI:EU:T:2019:623

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

19 septembre 2019 (*)

« Aides d’État – Secteur bancaire – Aide octroyée à FIH sous la forme du transfert de ses actifs dépréciés à une nouvelle filiale et du rachat ultérieur de ceux-ci par l’organisme chargé de garantir la stabilité financière – Aides d’État en faveur des banques en période de crise – Décision déclarant l’aide compatible avec le marché intérieur – Recevabilité – Calcul du montant de l’aide – Erreur manifeste d’appréciation »

Dans l’affaire T‑386/14 RENV,

FIH Holding A/S, établie à Copenhague (Danemark),

FIH A/S, anciennement FIH Erhvervsbank A/S, établie à Copenhague,

représentées par Me O. Koktvedgaard, avocat,

parties requérantes,

contre

Commission européenne, représentée par MM. L. Flynn, A. Bouchagiar et Mme K. Blanck, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de la décision 2014/884/UE de la Commission, du 11 mars 2014, concernant l’aide d’État SA.34445 (12/C) mise en œuvre par le Danemark en faveur de la cession des actifs de FIH liés à l’immobilier à FSC (JO 2014, L 357, p. 89),

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de MM. A. M. Collins (rapporteur), président, R. Barents et J. Passer, juges,

greffier : M. P. Cullen, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 21 mars 2019,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

 Contexte de la décision attaquée

1        L’une des deux requérantes, FIH A/S, anciennement FIH Erhvervsbank A/S (ci-après « FIH »), est une société à responsabilité limitée constituée conformément à la législation bancaire danoise et supervisée par les autorités bancaires danoises. FIH, ainsi que ses filiales, sont entièrement détenues par l’autre requérante, FIH Holding S/A (ci-après « FIH Holding »).

2        FIH a bénéficié de certaines mesures adoptées par le Royaume de Danemark afin de stabiliser son secteur bancaire. En juin 2009, FIH a reçu un apport en capital hybride de catégorie 1 de 1,9 milliard de couronnes danoises (DKK) (environ 225 millions d’euros) en vertu de la loi danoise sur les apports en capital financés par l’État. Cette loi avait été approuvée par la Commission européenne en tant que régime d’aides compatible avec le marché intérieur par la décision C(2009) 776 final, du 3 février 2009, relative au régime d’aide d’État N31a/2009 – Danemark. Selon cette décision, le régime d’aides était ouvert à des établissements bancaires fondamentalement sains et solvables.

3        En juillet 2009, le Royaume de Danemark a fourni à FIH une garantie d’État d’un montant de 50 milliards de DKK (environ 6,31 milliards d’euros), en vertu de la loi danoise sur la stabilité financière. Cette loi avait également été approuvée en tant que régime d’aides compatible avec le marché intérieur par la décision C(2009) 776 final. FIH a utilisé la totalité de cette garantie pour émettre des obligations. Au 31 décembre 2011, le montant des obligations émises par FIH et garanties par l’État danois s’élevait à 41,7 milliards de DKK (environ 5,56 milliards d’euros), soit 49,94 % du bilan de FIH. Ces obligations devaient arriver à échéance en 2012 et en 2013.

4        Entre 2009 et 2011, l’agence de notation Moody’s a baissé la note de FIH, qui est passée de A 2 à B1, avec une perspective négative.

5        Afin de surmonter les problèmes de liquidités qu’allait créer la structure des échéances des obligations, il est apparu nécessaire de réduire sensiblement le bilan de FIH. Le 6 mars 2012, le Royaume de Danemark a donc notifié un paquet de mesures à la Commission. Deux étapes étaient envisagées.

6        Au cours de la première étape, les actifs les plus problématiques (notamment des prêts immobiliers et des produits dérivés) seraient transférés vers une nouvelle filiale de FIH Holding, NewCo. Le passif initial de NewCo était constitué de deux prêts qui lui avaient été consentis par FIH et de fonds propres d’une valeur de 2 milliards de DKK (environ 268 millions d’euros). Dans ce contexte, la Financial Stability Company (ci-après la « FSC »), une entité publique mise en place par les autorités danoises dans le contexte de la crise financière, a également fourni à NewCo un financement correspondant aux montants nécessaires pour refinancer ses actifs (à savoir 13 milliards de DKK), afin que FIH rembourse ses prêts garantis par l’État.

7        Au cours de la seconde étape, la FSC procéderait à l’achat des actions de NewCo, qui serait ensuite liquidée de manière ordonnée.

8        FIH Holding et la FSC ont conclu plusieurs accords connexes relatifs à la situation de NewCo pendant ce processus de liquidation. En particulier, FIH Holding a fourni à la FSC une garantie illimitée contre les pertes, assurant à cette dernière le recouvrement de l’intégralité des montants qu’elle verserait et des apports en capital qu’elle consentirait à NewCo. La FSC a accepté de financer et de recapitaliser NewCo au cours de sa liquidation, si cela se révélait nécessaire.

9        Par sa décision C(2012) 4427 final, du 29 juin 2012, concernant l’aide d’État SA.34445 (12/C) (ex 2012/N) – Danemark, la Commission a considéré que les mesures notifiées constituaient une aide d’État en faveur de NewCo et du groupe FIH. Elle a néanmoins provisoirement approuvé le paquet de mesures pour des raisons de stabilité financière pour une période de six mois ou, si le Royaume de Danemark présentait un plan de restructuration au cours de cette période, jusqu’à ce qu’elle adopte une décision finale sur ce point.

10      Par la même décision, la Commission a ouvert une procédure formelle d’examen de ces mesures. En particulier, elle a émis des doutes s’agissant de la proportionnalité de celles-ci et leur limitation au minimum nécessaire. Elle s’est également demandé si la contribution propre du groupe FIH était adéquate et si les distorsions de concurrence étaient suffisamment limitées.

11      Le 2 juillet 2012, FIH a remboursé au Royaume de Danemark les fonds propres hybrides de catégorie 1 d’un montant de 1,9 milliard de DKK (environ 225 millions d’euros) qu’elle avait reçus en 2009. Dès lors, la FSC a été en mesure de financer la quasi-totalité des 2 milliards de DKK nécessaires au rachat de NewCo grâce au remboursement anticipé de ces fonds.

12      Le 4 janvier 2013, le Royaume de Danemark a présenté un plan de restructuration de FIH, dont la version finale date du 24 juin 2013.

13      Le 3 octobre 2013, le Royaume de Danemark a transmis un ensemble de propositions d’engagements, dont la version finale date du 3 février 2014, afin de répondre aux préoccupations exprimées par la Commission dans le cadre de la procédure d’examen.

 Décision attaquée

14      Le 12 mars 2014, la Commission a notifié au Royaume de Danemark sa décision 2014/884/UE, du 11 mars 2014, concernant l’aide d’État SA.34445 (12/C) mise en œuvre par le Danemark en faveur de la cession des actifs de FIH liés à l’immobilier à FSC (JO 2014, L 357, p. 89, ci-après la « décision attaquée »). L’aide en cause a été déclarée compatible avec le marché intérieur en vertu de l’article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE, compte tenu du plan de restructuration et des engagements présentés.

15      Selon la décision attaquée, les mesures en faveur de FIH constituaient une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE.

16      En premier lieu, la Commission a relevé que les mesures en question faisaient appel à des ressources d’État, car elles étaient financées par la FSC, une entreprise publique utilisant des ressources publiques. Premièrement, la FSC avait fourni un apport en espèces de 2 milliards de DKK (environ 268 millions d’euros) pour l’achat d’actions à NewCo. Deuxièmement, la FSC s’était engagée à financer les actifs de NewCo pendant que FIH remboursait les prêts garantis par l’État (voir point 6 ci-dessus). Troisièmement, la FSC avait renoncé à une partie des intérêts dus aux fins du paiement de la garantie reçue de la part de FIH Holding contre les pertes de NewCo (voir point 8 ci-dessus).

17      En deuxième lieu, la Commission a estimé que les mesures procuraient un avantage en faveur du groupe FIH. Elle a considéré que, contrairement à ce que les autorités danoises faisaient valoir, ces mesures ne respectaient pas le principe de l’opérateur privé en économie de marché. À cet égard, la décision attaquée indique, dans un graphique reproduit au point 18 ci-après, la valeur actualisée nette (ci-après la « VAN » ou net present value) de l’accord d’achat d’actions, pour différentes valeurs de liquidation des actifs de NewCo allant de 5,1 milliards de DKK à 28,3 milliards de DKK. La probabilité que chacun des scénarios se produise est représentée par une ligne pointillée, allant de 0,1 à 7,5 %. Selon la Commission, dans les scénarios les plus probables, le rendement est légèrement négatif.

18      Selon la décision attaquée, le rendement escompté (expected return) des mesures en cause dépend du futur flux de recettes généré par les flux de trésorerie, qui doit être ramené à sa valeur actuelle, à savoir la VAN, en utilisant un taux d’actualisation (discount rate) approprié.

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19      Dès lors, la décision attaquée conclut que la VAN moyenne globale de l’accord d’achat d’actions, pondérée en fonction de la probabilité, selon le calcul de l’expert externe de la Commission, s’élève à 726 millions de DKK. En conséquence, l’accord d’achat d’actions entraîne une perte plutôt qu’un profit pour la FSC. De surcroît, un opérateur privé en économie de marché aurait exigé une rémunération des fonds propres d’au moins 10 % par an pour un investissement similaire d’un montant de 2 milliards de DKK (environ 268 millions d’euros), ce qui aurait généré environ 1,33 milliard de DKK sur les sept ans d’existence de NewCo.

20      En troisième lieu, la Commission a relevé que les mesures concernaient exclusivement le groupe FIH et NewCo et, de ce fait, étaient sélectives.

21      En quatrième lieu, la Commission a estimé que les mesures étaient susceptibles de créer des distorsions de la concurrence et d’avoir des effets sur le commerce entre États membres.

22      Selon les calculs de la Commission, appuyés par des rapports d’experts externes, le montant de l’aide s’élevait à environ 2,25 milliards de DKK (environ 300 millions d’euros). Pour quantifier le montant de l’aide, la Commission a tenu compte des éléments suivants :

–        le bénéfice lié à la formule de l’accord d’achat d’actions (0,73 milliard de DKK), en raison d’une participation à concurrence de seulement 25 % à la hausse de la valeur des fonds propres sur une période d’investissement de sept ans (selon la Commission, une prise de participation ordinaire serait assortie d’une participation de 100 % aux rendements des fonds propres) ;

–        le renoncement à une rémunération annuelle sur les fonds propres sur une période d’investissement de sept ans (1,33 milliard de DKK) ;

–        le paiement par NewCo d’intérêts excédentaires sur le premier prêt à FIH et sur son financement initial (0,33 milliard de DKK) ;

–        le paiement de frais administratifs excédentaires à FIH pour la gestion des actifs et les opérations de couverture (0,14 milliard de DKK).

23      Comme facteur atténuant, la Commission a estimé que l’annulation anticipée de garanties de l’État pour un montant de 0,28 milliard de DKK devait être déduite du montant de l’aide.

24      En ce qui concerne la compatibilité de l’aide avec le marché intérieur, la Commission a examiné la mesure sur le fondement de l’article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE et à la lumière de la communication concernant le traitement des actifs dépréciés dans le secteur bancaire de la Communauté (JO 2009, C 72, p. 1, ci-après la « communication sur actifs dépréciés ») ainsi que de la communication concernant l’application, à partir du 1er janvier 2012, des règles en matière d’aides d’État aux aides accordées aux banques dans le contexte de la crise financière (JO 2011, C 356, p. 7).

25      À cet égard, la Commission a relevé que la rémunération requise des fonds propres dépendait de l’effet net réel produit par les mesures en termes de sauvetage d’actifs. Elle a évalué que l’effet brut produit par les mesures en termes de sauvetage d’actifs s’élevait à 375 millions de DKK et que la valeur de cession correspondante dépassait de 254 millions de DKK la valeur économique réelle, une somme qui devait être rémunérée et récupérée. De plus, des frais excédentaires d’un montant de 143,2 millions de DKK devaient être recouvrés.

26      Selon la Commission, un paiement anticipé de 254 millions de DKK (en date de valeur du 1er mars 2012) a réduit l’effet net en termes de sauvetage d’actifs, le faisant passer de 375 millions de DKK à 121 millions de DKK. Par conséquent, le versement d’une prime unique de 310,25 millions de DKK en date de valeur du 30 septembre 2013, un paiement annuel de 12,1 millions de DKK (correspondant à une rémunération annuelle de 10 % de l’effet en termes de sauvetage d’actifs) et le recouvrement des frais administratifs excédentaires rendraient les mesures conformes à la communication sur les actifs dépréciés.

27      Au vu de ces différents éléments, la Commission a considéré que les mesures étaient proportionnées, limitées au minimum et garantissaient une contribution propre suffisante de FIH, conformément à la communication sur les actifs dépréciés.

28      Ensuite, la Commission a vérifié la compatibilité des mesures avec la communication concernant l’application, à partir du 1er janvier 2012, des règles en matière d’aides d’État aux aides accordées aux banques dans le contexte de la crise financière. Elle a ainsi estimé qu’un plan de restructuration complet avait été fourni, démontrant que FIH recouvrerait sa viabilité à long terme sans aide d’État. Par ailleurs, selon la Commission, le plan de restructuration assurait une répartition des charges adéquate ainsi qu’une atténuation suffisante des distorsions de la concurrence.

29      À la lumière de ce qui précède, la décision attaquée a déclaré l’aide compatible avec le marché intérieur.

 Procédures antérieures devant le Tribunal et la Cour

 Procédure antérieure devant le Tribunal

30      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 24 mai 2014, les requérantes ont introduit un recours en annulation contre la décision attaquée.

31      Au soutien de leur recours, les requérantes ont avancé trois moyens, tirés, le premier, de la violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE dans la mesure où la décision attaquée n’aurait pas appliqué correctement le principe de l’opérateur privé en économie de marché, le deuxième, d’erreurs dans le calcul du montant de l’aide d’État et de l’aide incompatible avec le marché intérieur et, le troisième, de la violation de l’obligation de motivation.

32      La Commission a fait valoir que le recours devait être rejeté comme non fondé, en ajoutant que le deuxième moyen était partiellement irrecevable dans la mesure où, dans le cadre de leur cinquième grief, les requérantes visaient à contester la décision autorisant l’aide sur la base d’engagements proposés par le Royaume de Danemark.

33      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 25 février 2016.

34      Par arrêt du 15 septembre 2016, FIH Holding et FIH Erhvervsbank/Commission (T‑386/14, ci-après l’« arrêt initial », EU:T:2016:474), d’une part, le Tribunal a accueilli le premier moyen avancé par les requérantes et a annulé la décision attaquée. D’autre part, il a rejeté comme non fondé le troisième moyen. Par ailleurs, le Tribunal a conclu qu’il n’y avait pas lieu d’examiner le deuxième moyen, pas plus qu’il n’y avait lieu de statuer sur la recevabilité du cinquième grief dudit deuxième moyen.

 Procédure antérieure devant la Cour

35      Par requête déposée au greffe de la Cour le 16 novembre 2016, la Commission a formé un pourvoi contre l’arrêt initial, en soulevant un moyen unique tiré de l’erreur de droit que le Tribunal aurait commise dans son interprétation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE.

36      Par arrêt du 6 mars 2018, Commission/FIH Holding et FIH Erhvervsbank (C‑579/16 P, ci-après l’« arrêt sur pourvoi », EU:C:2018:159), la Cour a annulé l’arrêt initial. En premier lieu, la Cour a considéré que c’était à tort que le Tribunal avait accueilli le premier moyen soulevé devant lui, dès lors que c’était sans commettre d’erreur que la décision attaquée avait appliqué le principe de l’investisseur privé plutôt que celui du créancier privé. En second lieu, elle a jugé qu’elle disposait des éléments nécessaires pour statuer définitivement sur le premier moyen et a rejeté celui-ci. En revanche, la Cour a constaté que le litige n’était pas en état d’être jugé en ce qui concerne le deuxième moyen, sur lequel le Tribunal ne s’était pas prononcé. Par conséquent, elle a décidé de renvoyer l’affaire T‑386/14 devant le Tribunal pour qu’il statue sur le deuxième moyen soulevé devant lui et a réservé les dépens.

 Procédure et conclusions des parties

37      À la suite de l’arrêt sur pourvoi, l’affaire T‑386/14 RENV a été attribuée à la huitième chambre du Tribunal.

38      Le 2 mai 2018, la Commission et, le 15 mai 2018, les requérantes ont, conformément à l’article 217, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, déposé un mémoire d’observations écrites.

39      Les requérantes concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

40      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme en partie irrecevable et en partie non fondé ;

–        condamner les requérantes aux dépens.

41      Sur proposition du juge rapporteur, le Tribunal (huitième chambre) a décidé d’ouvrir la phase orale de la procédure et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89 du règlement de procédure, a invité les parties à répondre à certaines questions écrites. Les parties ont répondu à ces questions dans les délais impartis.

42      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 21 mars 2019.

 En droit

 Sur la recevabilité du recours et d’un grief

43      Selon la Commission, le recours formé contre la partie de la décision attaquée autorisant l’aide sur la base d’engagements proposés par le Royaume de Danemark est irrecevable dans la mesure où les requérantes contestent l’analyse de la compatibilité de l’aide avec le marché intérieur qui y est effectuée. Étant donné que les aides d’État sont en principe interdites, la Commission considère que les requérantes n’avaient pas droit à une aide d’État. Dès lors, en ce qui concerne les engagements présentés par le Royaume de Danemark, la décision attaquée serait dépourvue d’effets juridiques susceptibles d’affecter les intérêts des requérantes.

44      Au stade de la réplique, la Commission ajoute qu’elle n’a pas dicté les engagements à prendre par le Royaume de Danemark, contrairement à ce qu’avancent les requérantes, tout en admettant qu’elle a formulé plusieurs suggestions à cet égard.

45      De plus, elle soutient que la décision attaquée n’impose pas de conditions, puisqu’elle est fondée sur l’article 7, paragraphe 3, du règlement (CE) no 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article [108 TFUE] (JO 1999, L 83, p. 1), et non sur son article 7, paragraphe 4.

46      Enfin, la Commission fait valoir que, dans la mesure où les requérantes semblent soutenir dans leur réponse du 8 février 2019 aux questions écrites du Tribunal et dans leurs plaidoiries lors de l’audience que la Commission a violé son obligation de mener une enquête diligente et impartiale, ce grief doit être rejeté comme étant irrecevable.

47      Les requérantes soutiennent que leur recours est recevable dans son intégralité. Elles observent que la décision est indivisible, étant donné que, sans les engagements, la Commission n’aurait pas déclaré l’aide compatible avec le marché intérieur. En ce qui concerne le grief tiré de la violation de l’obligation de mener une enquête diligente et impartiale, il ressort de leurs plaidoiries lors de l’audience que les requérantes considèrent que cette critique était implicite dans les arguments avancés dans le cadre du deuxième moyen dans la requête.

48      Selon une jurisprudence constante, seuls peuvent faire l’objet d’un recours en annulation les actes qui produisent des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts de la partie requérante en modifiant de façon caractérisée sa situation juridique (arrêts du 30 janvier 2002, Nuove Industrie Molisane/Commission, T‑212/00, EU:T:2002:21, point 36, et du 11 mars 2009, TF1/Commission, T‑354/05, EU:T:2009:66, point 60).

49      Pour déterminer si un acte ou une décision produit de tels effets, il y a lieu de s’attacher à sa substance (arrêts du 30 janvier 2002, Nuove Industrie Molisane/Commission, T‑212/00, EU:T:2002:21, point 37, et du 11 mars 2009, TF1/Commission, T‑354/05, EU:T:2009:66, point 61).

50      Le seul fait qu’une décision de la Commission déclare une aide compatible avec le marché intérieur et qu’elle ne fait donc pas grief, en principe, à la partie requérante, ne dispense pas le Tribunal d’examiner si certaines appréciations de la Commission produisent des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts de celle-ci (arrêts du 30 janvier 2002, Nuove Industrie Molisane/Commission, T‑212/00, EU:T:2002:21, point 38, et du 20 septembre 2007, Salvat père & fils e.a./Commission, T‑136/05, EU:T:2007:295, point 36).

51      Ainsi, il ressort de la jurisprudence qu’est recevable un recours en annulation formé contre une décision déclarant une aide existante compatible avec le marché intérieur sur la base des engagements pris par l’État membre concerné (voir, en ce sens, arrêt du 11 mars 2009, TF1/Commission, T‑354/05, EU:T:2009:66, points 69 à 73). Il convient de rappeler également que, aux points 77 à 83 de l’arrêt du 3 avril 2014, Commission/Pays-Bas et ING Groep (C‑224/12 P, EU:C:2014:213), la Cour a rejeté les arguments de la Commission visant à contester l’annulation des engagements inclus dans sa décision au motif que les engagements proposés par le Royaume des Pays-Bas ne lui étaient pas imputables, mais étaient le simple résultat de propositions unilatérales de ce dernier.

52      De plus, il ressort de la jurisprudence que les engagements font partie intégrante de la mesure notifiée et que, partant, la décision de la Commission porte sur la mesure notifiée et les engagements pris ensemble (voir, en ce sens, ordonnance du 1er décembre 2015, Banco Espírito Santo/Commission, T‑814/14, non publiée, EU:T:2015:936, point 31 et jurisprudence citée). Dès lors, la décision de la Commission a pour effet de rendre contraignants les engagements formulés par l’État en cause dans la mesure où elle conditionne expressément le constat de la compatibilité des aides avec le marché intérieur au respect desdits engagements [voir, en ce sens, arrêt du 19 septembre 2018, HH Ferries e.a./Commission, T‑68/15, EU:T:2018:563, point 47 (non publié)].

53      En l’espèce, il résulte de l’article 1er, deuxième alinéa, de la décision attaquée que l’aide d’État en question est déclarée « compatible avec le marché intérieur, compte tenu du plan de restructuration et des engagements présentés en annexe ».

54      Par conséquent, et contrairement à ce que soutient la Commission, le recours est recevable également dans la mesure où il vise à contester les engagements et/ou le plan de restructuration qu’elle a acceptés. En effet, il ne saurait être nié que les engagements et le plan de restructuration produisent des effets juridiques à l’égard des requérantes et sont susceptibles d’affecter leurs intérêts puisque l’aide n’est autorisée que si les engagements et le plan de restructuration sont respectés.

55      De surcroît, même si la décision attaquée est partiellement favorable aux requérantes, ces dernières, dans la mesure où elles contestent les engagements, ont un intérêt à agir pour faire vérifier par le juge de l’Union européenne la légalité de cette décision.

56      Plus précisément, par le cinquième grief avancé dans le cadre du deuxième moyen dont la recevabilité est mise en cause par la Commission, les requérantes contestent le calcul de l’effet d’allégement des exigences de fonds propres, estimé à 375 millions de DKK par la Commission et à 275 millions de DKK par elles, ainsi que l’application par la Commission d’un taux de rémunération de 10 % annuel au montant de l’allégement des exigences de fonds propres afin de déclarer les mesures compatibles avec le marché intérieur à la lumière de la communication sur les actifs dépréciés. Sur cette question, la décision attaquée affecte les intérêts des requérantes, qui doivent effectuer des paiements annuels au Royaume de Danemark, dont le montant est contesté, afin d’assurer la compatibilité de l’aide avec le marché intérieur.

57      De surcroît, compte tenu de la correspondance entre la Commission et les requérantes, l’inclusion de ce taux de rémunération annuel ne semble pas avoir été proposée à l’initiative du Royaume de Danemark et sans aucune intervention de la Commission, contrairement à ce qu’elle fait valoir. À cet égard, il y a lieu de relever par exemple que, dans un courriel du 16 septembre 2013, les services de la Commission ont indiqué ce qui suit :

« As pointed out by my colleagues, the annual remuneration of the remaining capital relief effect (121 Million DKK), amounting to 12.1 Million DKK per annum should indeed be added to the list [of] measures needed to achieve compatibility. »

58      Le cas présent se distingue par ailleurs de la jurisprudence citée par la Commission au soutien de sa position. Au point 27 de l’arrêt du 14 avril 2005, Sniace/Commission (T‑141/03, EU:T:2005:129), le Tribunal a jugé que la partie requérante n’avait pas d’intérêt à voir l’acte attaqué annulé dès lors que celui-ci autorisait, sans condition ni restriction temporelle, l’aide en sa faveur , ce qui n’est pas le cas en l’espèce. En ce qui concerne l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 20 septembre 2007, Salvat père & fils e.a./Commission (T‑136/05, EU:T:2007:295), il convient de rappeler que le Tribunal a explicitement indiqué que, pour juger le recours irrecevable, il ne suffisait pas de constater que la décision déclarait l’aide compatible avec le marché intérieur, mais que, au contraire, il convenait d’examiner in concreto la situation de la partie requérante (arrêt du 20 septembre 2007, Salvat père & fils e.a./Commission, T‑136/05, EU:T:2007:295, points 36 et 37). Par ailleurs, la Commission n’a pas expliqué pourquoi il y aurait lieu d’effectuer un parallèle quelconque entre la présente affaire de l’espèce et celle ayant donné lieu à l’arrêt du 20 septembre 2007, Salvat père & fils e.a./Commission (T‑136/05, EU:T:2007:295), qui ne concernait pas une décision prise sur la base d’engagements.

59      Dès lors, il convient de rejeter les arguments de la Commission quant à l’irrecevabilité partielle du recours.

60      En ce qui concerne la recevabilité du grief tiré de la violation de l’obligation de mener une enquête impartiale et diligente, il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’article 84, paragraphe 1, du règlement de procédure, la production de moyens nouveaux en cours d’instance est interdite à moins que ces moyens ne se fondent sur des éléments de droit et de fait qui se sont révélés pendant la procédure. Cependant, un moyen qui constitue l’ampliation d’un moyen énoncé antérieurement, explicitement ou implicitement, dans la requête et qui présente un lien étroit avec celui-ci doit être déclaré recevable. Pour pouvoir être considéré comme une ampliation d’un moyen ou d’un grief antérieurement énoncé, un nouvel argument doit présenter, avec les moyens ou les griefs initialement exposés dans la requête, un lien suffisamment étroit pour pouvoir être considéré comme résultant de l’évolution normale du débat au sein d’une procédure contentieuse (arrêt du 20 novembre 2017, Petrov e.a./Parlement, T‑452/15, EU:T:2017:822, point 46 ; voir également, en ce sens, arrêt du 22 avril 2016, Italie et Eurallumina/Commission, T‑60/06 RENV II et T‑62/06 RENV II, EU:T:2016:233, points 45 et 46).

61      Force est de constater que, comme la Commission le soutient à juste titre, la requête ne contient aucune référence à une prétendue violation de l’obligation de mener une enquête diligente et impartiale. Dès lors, dans la mesure où l’argument des requérantes peut être compris comme visant à démontrer que l’enquête de la Commission était insuffisante, il y a lieu de constater que ce grief ne présente pas un lien suffisamment étroit avec les arguments avancés dans le cadre du deuxième moyen visant à constater l’existence d’erreurs manifestes d’appréciation. Partant, ce grief doit être rejeté comme étant irrecevable.

62      Au vu de ce qui précède, il y a lieu de déclarer le recours recevable et de rejeter comme irrecevable le grief tiré de la violation de l’obligation de mener une enquête diligente et impartiale.

 Sur le fond

63      Dans le cadre du deuxième moyen avancé par les requérantes au soutien de leur recours, elles font valoir que la Commission a commis cinq séries d’erreurs dans le calcul du montant de l’aide d’État et de l’aide incompatible avec le marché intérieur. Les première, deuxième et quatrième branches du deuxième moyen concernent le calcul du montant de l’aide d’État déclarée incompatible avec le marché intérieur, à savoir 254 millions de DKK, alors que les troisième et cinquième branches concernent le calcul de l’effet d’allégement des fonds propres dans le cadre de l’analyse de la compatibilité de l’aide avec le marché intérieur, à savoir 375 millions de DKK. Suivant cette logique, il y a lieu d’analyser la quatrième branche avant la troisième.

 Sur la première branche, tirée d’erreurs dans le calcul de la valeur des actifs cédés

64      Dans le cadre de la première branche du deuxième moyen, les requérantes font valoir que la Commission aurait commis des erreurs dans le calcul de la valeur des actifs cédés, qui serait trop basse, ce qui aurait eu des conséquences sur la fixation du montant de l’aide d’État et de l’aide incompatible avec le marché intérieur. À l’appui de cette première branche du deuxième moyen, les requérantes avancent, en substance, cinq séries de griefs.

65      Premièrement, les requérantes relèvent que la FSC ainsi que l’autorité danoise de surveillance du secteur financier ont examiné spécifiquement les expositions du portefeuille de prêts, alors que la Commission a ajusté la valeur sur la base d’un modèle mathématique. Selon les requérantes, cet ajustement est erroné. En effet, il n’y aurait aucune raison d’utiliser un modèle mathématique au lieu de s’appuyer sur les évaluations spécifiques de la FSC et de l’autorité danoise de surveillance du secteur financier.

66      Dans leur réponse du 22 décembre 2015 aux questions écrites du Tribunal, les requérantes relèvent que, même si le rapport d’expert préliminaire du 9 janvier 2013 indiquait que, dans certains cas, la notation accordée à certains débiteurs par les requérantes ne semblait pas correcte, ce même document affirmait que, en général, les probabilités de cessation de paiements retenues par les requérantes étaient adéquatement prudentes. De plus, les requérantes ont contesté les critiques relatives à la notation de certains débiteurs, en indiquant que ces critiques portaient sur trois prêts uniquement, soit un nombre de prêts insuffisamment représentatif pour permettre de tirer des conclusions générales. Qui plus est, la Commission aurait mal interprété la notation d’un des prêts en question.

67      La Commission conteste ce grief. Selon elle, les requérantes établissent une opposition erronée entre modélisation mathématique et évaluation individuelle de la valeur du portefeuille de prêts. En réalité, même l’« évaluation individuelle » de la FSC serait fondée sur une modélisation. Il serait trompeur de prétendre que son approche écarte toute évaluation individuelle des actifs cédés, car elle a fondé ses travaux sur l’examen individuel d’un échantillon de dossiers. La Commission ajoute que l’examen du portefeuille par la FSC n’était pas sans engendrer des difficultés, car celle-ci a utilisé des données agrégées, la méthode n’était pas entièrement claire et il y avait des incohérences. Dès lors, elle aurait été obligée de procéder à sa propre analyse approfondie.

68      En ce qui concerne le premier grief des requérantes, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la Commission, lorsqu’elle adopte un acte impliquant une appréciation économique complexe, jouit d’un large pouvoir d’appréciation et le contrôle juridictionnel dudit acte sur ce point se limite à la vérification du respect des règles de procédure et de l’obligation de motivation, de l’exactitude matérielle des faits retenus pour opérer le choix contesté, de l’absence d’erreur manifeste dans l’appréciation de ces faits ou de l’absence de détournement de pouvoir. En particulier, il n’appartient pas au Tribunal de substituer son appréciation économique à celle de la Commission (voir, en ce sens, arrêts du 11 juillet 2002, HAMSA/Commission, T‑152/99, EU:T:2002:188, point 127, et du 6 mars 2003, Westdeutsche Landesbank Girozentrale et Land Nordrhein-Westfalen/Commission, T‑228/99 et T‑233/99, EU:T:2003:57, point 282).

69      Afin d’établir que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation dans l’examen des faits, de nature à justifier l’annulation de la décision attaquée, les éléments de preuve apportés par la partie requérante doivent être suffisants pour priver de plausibilité les appréciations des faits retenus dans la décision en cause (arrêts du 12 décembre 1996, AIUFFASS et AKT/Commission, T‑380/94, EU:T:1996:195, point 59, et du 9 juin 2016, Magic Mountain Kletterhallen e.a./Commission, T‑162/13, non publié, EU:T:2016:341, point 52).

70      À la lumière de ce qui précède, il y a lieu de relever que le choix de la méthode d’évaluation d’un portefeuille de prêts aux fins du calcul du montant d’une aide au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, implique une telle appréciation économique complexe. Dès lors, le fait que la Commission se soit fondée sur sa propre analyse du portefeuille de prêts, au lieu de se fonder sur l’évaluation fournie par le Royaume de Danemark, ne saurait être critiqué, à condition que cette démarche soit justifiée dans l’exercice raisonnable de sa marge de discrétion.

71      En l’espèce, la Commission justifie sa démarche par deux raisons principales.

72      D’une part, dans sa réponse du 15 février 2019 aux questions écrites du Tribunal, ainsi que lors de l’audience, la Commission a indiqué que la méthode d’évaluation du portefeuille de la FSC était fondée sur une approche comptable, alors que l’évaluation des actifs aux fins de leur cession immédiate devait être effectuée sur la base de leur valeur de vente. En d’autres termes, selon la Commission, il y avait lieu de calculer la valeur qu’un acheteur potentiel serait prêt à payer pour acquérir les actifs immédiatement, qui serait souvent inférieure à la valeur comptable ou prudentielle, car la valeur de vente devait inclure un rabais substantiel lié au risque, lequel est un multiple des pertes escomptées. Dès lors, la Commission soutient que l’approche méthodologique de la FSC n’était pas appropriée en l’espèce.

73      D’autre part, à la suite de son examen d’un échantillon de prêts, la Commission a identifié des cas dans lesquels la notation accordée à certains débiteurs, en application du système interne des requérantes, ne semblait pas correcte, ce qui suggère que les probabilités de cessation de paiements utilisées par les requérantes n’étaient pas aussi fiables qu’elles le prétendaient. En ce qui concerne l’argument des requérantes selon lequel les critiques reflétées dans le rapport d’expert préliminaire du 9 janvier 2013 relatives aux probabilités de cessation de paiements retenues portaient uniquement sur trois prêts, ce qui serait insuffisamment représentatif, la Commission a souligné lors de l’audience que ces critiques concernaient l’examen d’un échantillon de prêts, ce qui expliquerait que ces critiques puissent paraître insuffisamment représentatives en termes absolus.

74      Il y a lieu de considérer que, eu égard aux explications fournies par la Commission, les requérantes n’ont pas démontré que la Commission a dépassé les limites de sa marge de discrétion lorsqu’elle a décidé d’effectuer sa propre évaluation du portefeuille de prêts. Dès lors, le premier grief doit être rejeté.

75      Deuxièmement, les requérantes relèvent que la Commission a utilisé un facteur de stress de 2,21 dans son évaluation du portefeuille, en multipliant les probabilités de cessation de paiements des débiteurs pour ce facteur de stress. Or, FIH aurait déjà revu à la hausse, de manière réaliste, ses évaluations internes des probabilités de cessation de paiements. Dès lors, l’application supplémentaire de ce facteur de stress ferait double emploi et serait contraire au principe d’égalité de traitement, pénalisant effectivement les banques qui, comme FIH, avaient revu leurs évaluations internes des probabilités de cessation de paiements pour tenir compte de la crise économique. À cet égard, les requérantes font valoir que, en 2011, elles avaient mis en place un nouveau modèle d’évaluation interne du risque, avec un système de notation par client similaire à celui de Moody’s, qu’elles ont utilisé pour calculer les pertes potentielles sur les prêts. Ce système aurait conduit à une augmentation de la probabilité moyenne de cessation de paiements du portefeuille de prêts d’environ 2 à 3 % en 2009 jusqu’à 6,42 % à la fin de l’année 2011. Dans ces circonstances, l’utilisation du facteur de stress de 2,21 aurait conduit, à tort, à augmenter les probabilités de cessation de paiements d’environ 7 points, jusqu’à 14,2 % (2,21 x 6,42 %). Par ailleurs, la Commission n’aurait pas justifié l’utilisation concrète du facteur de stress de 2,21 dans le cas d’espèce.

76      La Commission conteste ce grief.

77      À cet égard, il y a lieu de relever que, selon la Commission, l’utilisation d’un facteur de stress de 2,21 pour les probabilités de cessation de paiements des débiteurs dans son évaluation du portefeuille était systématique dans les affaires d’aides d’État concernant le secteur financier depuis 2009. Quant aux raisons de l’utilisation de ce facteur, la Commission fait référence à des analyses macroéconomiques, validées par la littérature scientifique. En particulier, ce facteur correspondrait aux moyennes du marché pour des portefeuilles ayant une notation principalement située entre B- et BBB- et une durée de vie moyenne pondérée restante de l’ordre de trois à sept ans. Dans sa réponse du 21 décembre 2015 aux questions écrites du Tribunal, la Commission a précisé que le portefeuille en cause avait une qualité moyenne, avec une probabilité de cessation de paiements légèrement plus élevée, mais une perte en cas de défaut légèrement plus basse, que celle de la moyenne du fait de la bonne couverture d’une partie du portefeuille, et une durée de vie pondérée moyenne, comparable à celle d’autres cas.

78      De plus, la Commission a ajouté que, si FIH n’avait pas déjà mis en œuvre un système de notation interne strict, qui était la base pour calculer la valeur du portefeuille de prêts, elle aurait dû adopter une approche encore plus exigeante, comme elle l’a fait dans d’autres cas.

79      Compte tenu des explications de la Commission mentionnées aux points 77 et 78 ci-dessus, il y a lieu de considérer que les requérantes n’ont pas démontré que la Commission a dépassé les limites de sa marge de discrétion lorsqu’elle a décidé d’appliquer un facteur de stress de 2,21. Dès lors, le deuxième grief doit être rejeté.

80      Troisièmement, les requérantes contestent le fait que les calculs de la Commission étaient fondés sur une perte de 100 % en cas de cessation de paiements du débiteur. Selon les requérantes, leur expérience montre qu’une perte d’environ 30 % sur les prêts non garantis en cas de cessation de paiements du débiteur serait adéquate.

81      La Commission conteste ce grief.

82      À cet égard, la Commission a expliqué que l’application d’un taux de perte de 100 % en cas de défaillance sur des actifs non garantis est une pratique courante. Alors que la perte en cas de défaillance serait déterminée sur la base de la valeur des sûretés, en l’absence de sûretés, comme c’est le cas pour des actifs non garantis, un taux de perte de 100 % s’appliquerait automatiquement.

83      Dès lors, il convient de constater que les requérantes n’ont pas démontré que la Commission a dépassé sa marge de discrétion lorsqu’elle a estimé qu’en cas de défaillance d’un débiteur, et notamment en l’absence de toutes sûretés, il était prudent d’envisager que les pertes escomptées représentent 100 % des actifs non garantis. En effet, ainsi qu’il ressort de la réponse de la Commission du 15 février 2019 aux questions écrites du Tribunal et lors de l’audience, dans ces circonstances, il n’est pas possible d’assumer qu’il y aura une récupération partielle de la créance, même si cela n’implique pas nécessairement qu’il n’y aura jamais de récupération. Partant, dans une telle hypothèse, il ne saurait être raisonnablement exclu qu’aucune partie de la créance ne puisse être récupérée. À la lumière de ce qui précède, le troisième grief doit être rejeté.

84      Quatrièmement, les requérantes critiquent la Commission pour avoir ignoré l’absence de risque de pertes sur les prêts remboursés, à savoir 5,7 milliards de DKK à la fin de l’année 2012.

85      La Commission conteste ce grief. Dans la décision attaquée, le portefeuille de prêts aurait été défini selon la date de référence du 31 décembre 2011 et son évaluation aurait été réalisée en utilisant toutes les informations dont disposait la Commission à la date de clôture de la transaction, à savoir le 2 juillet 2012.

86      Elle ajoute qu’il est erroné de considérer que la réduction du volume du portefeuille à la suite des remboursements entraîne une réduction proportionnelle du risque et donc une réduction proportionnelle de la valeur économique réelle. Cela serait dû au fait que les parties ayant la meilleure qualité de crédit, incitées par les taux élevés prévus par la loi pour le renouvellement des prêts, auraient remboursé aussi rapidement que possible au lieu de refinancer leurs prêts, alors que les parties ayant des problèmes de liquidités seraient restées dans le portefeuille de prêts. Dès lors, malgré les remboursements, la qualité globale du portefeuille se serait détériorée. Étant donné que le reste du portefeuille était de qualité plus faible, la diminution des pertes prévues aurait été moins marquée, ainsi qu’il ressort du diagramme reproduit ci-après :

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87      En ce qui concerne le présent grief, il convient de rappeler que la date de clôture de l’opération était le 2 juillet 2012, même si, pour des raisons de simplicité, les parties se réfèrent au 30 juin 2012, à savoir le dernier jour ouvrable avant la date de clôture. Cependant, le portefeuille de prêts a été considéré comme ayant été transféré à la FSC à la date du 1er janvier 2012. Dès lors, comme il ressort de ses écritures ainsi que de sa réponse du 21 décembre 2015 aux questions écrites du Tribunal, c’est sur la base de la composition du portefeuille de prêts au 31 décembre 2011 que la Commission a évalué celui-ci à la date du 30 juin 2012, en tenant compte de l’évolution de la valeur du portefeuille entre ces deux dates, tout en précisant que, en l’absence de données pour le 30 juin 2012, elle a effectué une interpolation sur la base des données disponibles à la date du 30 septembre 2012.

88      Il ressort de ce qui précède que, afin de déterminer le bien-fondé de l’argument des requérantes, il y a lieu d’établir si la date pertinente aux fins de l’analyse est le 31 décembre 2011, le 30 juin 2012 ou la fin de l’année 2012.

89      À cet égard, il y a lieu de constater que la date pertinente est celle à laquelle l’opération a été clôturée une fois que toutes les conditions étaient réunies, à savoir le 30 juin 2012 (2 juillet 2012). Même si la Commission a décidé de prendre en compte la date du 31 décembre 2011 pour définir la composition du portefeuille de prêts, parce que la cession a été considérée comme ayant été effectuée à cette date, elle ne pouvait pas ignorer la période allant du 31 décembre 2011 au 30 juin 2012 (2 juillet 2012), car le risque de non-remboursement a effectivement disparu pour une série de prêts pendant cette période. En d’autres termes, dans le cadre de son calcul de la valeur des actifs cédés, la Commission devait considérer l’absence de risque de non‑remboursement des prêts effectivement remboursés au 30 juin 2012 (2 juillet 2012), comme elle l’a fait. En revanche, la Commission pouvait à juste titre refuser de prendre en compte le remboursement effectif de prêts après cette date.

90      Dès lors, compte tenu des explications fournies par la Commission quant aux calculs effectués, il y a lieu de rejeter le quatrième grief.

91      Cinquièmement, les requérantes soutiennent que la Commission s’est écartée de la communication sur les actifs dépréciés dans son calcul de l’aide d’État et de l’aide incompatible avec le marché intérieur. Au lieu de calculer la valeur de la cession et de la comparer avec la valeur de marché et la valeur économique réelle, l’élément central de la décision attaquée serait un calcul de la valeur du prix d’achat variable pour la FSC, à savoir le rendement pour celle-ci.

92      La Commission conteste ce grief. Elle relève que, selon la communication sur les actifs dépréciés, plusieurs modèles d’évaluation sont potentiellement acceptables, sans qu’elle soit pour autant tenue d’appliquer une méthode unique. Par ailleurs, elle souligne le rôle joué par les requérantes, dont le montage extrêmement sophistiqué imposait l’adoption d’une approche spécifique.

93      Il convient de rappeler qu’il a été jugé que des règles telles que des lignes directrices énoncent une règle de conduite indicative de la pratique à suivre dont la Commission ne peut s’écarter, dans un cas particulier, sans fournir des raisons qui soient compatibles avec le principe d’égalité de traitement. En effet, en adoptant de telles règles de conduite et en annonçant par leur publication qu’elle les appliquera dorénavant aux cas concernés par celles-ci, l’institution en question s’autolimite dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation et ne saurait se départir de ces règles sous peine de se voir sanctionner, le cas échéant, au titre d’une violation de principes généraux du droit, tels que l’égalité de traitement ou la protection de la confiance légitime (arrêts du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission, C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, EU:C:2005:408, points 209 et 211, et du 30 mai 2013, Quinn Barlo e.a./Commission, C‑70/12 P, non publié, EU:C:2013:351, point 53). Dès lors, la Commission était tenue de respecter la communication sur les actifs dépréciés en l’absence de raisons justifiant de s’en écarter.

94      À cet égard, il y a lieu de relever qu’il ressort notamment des points 111 et suivants de la décision attaquée que la Commission a fondé son analyse de la compatibilité de la cession sur la communication sur les actifs dépréciés. En outre, en ce qui concerne l’évaluation des actifs, il convient d’observer que les points 37 et suivants de la communication sur les actifs dépréciés prévoient que plusieurs modèles sont envisageables, comme le relève la Commission à juste titre. Dès lors, il y a lieu de rejeter le cinquième grief des requérantes.

95      Au vu de ce qui précède, il y a lieu de rejeter comme non fondée la première branche du deuxième moyen dans son intégralité.

 Sur la deuxième branche, tirée d’erreurs dans le calcul du risque que FIH devienne insolvable

96      Par la deuxième branche du deuxième moyen, les requérantes considèrent que la Commission a commis des erreurs dans ses calculs relatifs au risque que FIH devienne insolvable et ne soit pas en mesure d’honorer ses obligations envers la FSC.

97      D’une part, la Commission aurait supposé, à tort, que les dividendes seraient de 0 % en cas de cessation de paiements. Dans leur réponse du 22 décembre 2015 aux questions écrites du Tribunal, les requérantes ont expliqué que le taux attendu des pertes (loss expectation rate) résulte de la multiplication des pertes en cas de cessation de paiements (loss given default) par la probabilité de cessation de paiements (probability of default). Dès lors, le taux attendu des pertes de 16 % pour la FSC calculé par la Commission serait le résultat de la multiplication de la probabilité de cessation de paiements d’un établissement financier noté B1 par Moody’s comme FIH par un taux des pertes en cas de cessation de paiements de 100 % (en d’autres termes, un « dividende » de 0 % en cas de cessation de paiements).

98      D’autre part, le montant de l’exposition nette de la FSC aurait été exagéré. En particulier, la Commission n’aurait pas tenu compte des remboursements de prêts entre le 1er janvier et le 2 juillet 2012 (à savoir la date de la clôture de la cession d’actifs) et des remboursements effectués rapidement ensuite jusqu’à la fin de l’année 2012.

99      La Commission conteste les arguments avancés par les requérantes.

100    Il doit être rappelé que, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence citée aux points 68 et 69 ci-dessus, la Commission jouit d’un large pouvoir d’appréciation lorsqu’elle doit effectuer une évaluation économique complexe, comme en l’espèce.

101    Premièrement, en ce qui concerne l’argument relatif aux dividendes escomptés prétendument de 0 % pour la FSC en cas de cessation de paiements de FIH ou, en d’autres termes, au prétendu taux de pertes escompté de 100 % en cas de cessation de paiements de FIH, il y a lieu de relever d’abord que la Commission considère comme étant excessivement simpliste la formule sur laquelle les requérantes fondent cet argument. En réalité, dans sa réponse du 15 février 2019 aux questions écrites du Tribunal, la Commission a indiqué explicitement qu’elle n’a pas utilisé cette formule. En effet, la formule utilisée par la Commission est décrite aux points 17 à 19 ci-dessus et le résultat de l’application de cette formule est représenté dans le graphique figurant au point 18 ci-dessus.

102    Dès lors, il convient de rejeter le premier grief soulevé par les requérantes, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres arguments avancés par la Commission.

103    Deuxièmement, en ce qui concerne la question relative à la date de référence et aux remboursements effectués en 2012, ce grief doit être rejeté pour les raisons mentionnées aux points 87 à 90 ci-dessus.

104    Au vu de ce qui précède, il y a lieu de rejeter comme non fondée la deuxième branche du deuxième moyen.

 Sur la quatrième branche, tirée d’erreurs dans le calcul des intérêts payables à la FSC pour son financement de NewCo

105    Par la quatrième branche du deuxième moyen, les requérantes font valoir que la Commission a commis une erreur en évaluant les intérêts exigibles par la FSC auprès de NewCo pour son financement de celle-ci. En particulier, les hypothèses de départ de la Commission exagéreraient considérablement la dette réelle et la dette attendue de NewCo et, dès lors, son besoin de liquidités. En particulier, les requérantes font valoir que le portefeuille de prêts avait été réduit de 5,7 milliards de DKK à la fin de l’année 2012. De ce fait, le point de départ pour le besoin de financement devrait être évalué à 7,97 milliards de DKK, au lieu de 13,37 milliards de DKK.

106    La Commission conteste les arguments avancés par les requérantes, pour les raisons exposées au point 85 ci-dessus.

107    Par la quatrième branche du deuxième moyen, les requérantes soutiennent, en substance, que la Commission n’a pas dûment pris en compte la réduction du portefeuille de prêts vers la fin de l’année 2012 et, par conséquent, a surestimé le besoin de liquidités de NewCo et donc les intérêts payables par celle-ci à la FSC. Compte tenu des considérations exposées aux points 87 à 90 ci-dessus, selon lesquelles la Commission pouvait à juste titre refuser de prendre en compte le remboursement de prêts après le 30 juin 2012 (2 juillet 2012), il y a lieu de rejeter la quatrième branche du deuxième moyen comme non fondée.

 Sur la troisième branche, tirée d’erreurs dans le calcul de la rémunération de 10 % pour l’investissement en capital de la FSC

108    Dans le cadre de la troisième branche du troisième moyen, les requérantes font valoir que l’exigence que la FSC obtienne une rémunération de 10 % par an de l’investissement en capital de deux milliards de DKK est infondée en raison de la réduction importante de son risque de pertes grâce à la cession d’actifs envisagée.

109    La Commission conteste les arguments avancés par les requérantes. Dans sa réponse du 15 février 2019 aux questions écrites du Tribunal, ainsi que lors de l’audience, la Commission a fait valoir que, aux points 74 et 75 de l’arrêt sur pourvoi, la Cour n’exigeait pas que la Commission prenne en compte des considérations relatives à la réduction de l’exposition économique de l’État, mais lui reconnaissait simplement la faculté de les prendre en compte lors de l’analyse de la compatibilité de l’aide avec le marché intérieur.

110    En tout état de cause, la Commission fait valoir qu’elle a pris en compte certains effets économiques résultant de la fin des mesures d’aide préalablement accordées. En particulier, il ressortirait notamment du considérant 125 de la décision attaquée que la Commission a pris en compte dans le cadre de l’examen de la compatibilité de l’aide avec le marché intérieur le fait que FIH a remboursé les obligations garanties par l’État et a aussi remboursé les fonds propres hybrides qui lui avaient été octroyés par l’État.

111    Dans le cadre de la troisième branche du deuxième moyen, les requérantes critiquent la décision attaquée, notamment en ce qu’elle ignore l’impact de la réduction du risque pour le Royaume de Danemark sur le calcul de la rémunération relative à l’investissement en capital de la FSC dans NewCo.

112    Il ressort des points 58 et 62 de l’arrêt sur pourvoi que les risques auxquels est exposé l’État et qui découlent pour lui d’aides d’État qu’il a précédemment accordées sont liés à sa qualité de puissance publique et ne relèvent donc pas des éléments qu’un opérateur privé aurait, dans des conditions normales de marché, pris en compte dans ses calculs économiques. Il s’ensuit que c’est à bon droit que, en l’espèce, la Commission n’a pas pris en compte, lors de l’application du principe de l’opérateur privé aux fins de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, les risques liés aux aides accordées à FIH par les mesures de 2009.

113    Cependant, alors que l’exposition économique d’un État membre résultant de l’octroi antérieur d’une aide d’État et son souhait de protéger ses intérêts économiques ne sont pas pris en compte lors de l’examen, au titre de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, de l’existence d’une aide d’État, il n’en demeure pas moins que, ainsi que la Commission l’a relevé lors de l’audience devant la Cour et que l’avocat général Szpunar l’a considéré aux points 81 et 83 de ses conclusions, lesdites considérations peuvent être prises en compte lors de l’appréciation, au titre de l’article 107, paragraphe 3, TFUE, de la compatibilité d’une mesure d’aide subséquente avec le marché intérieur et sont donc susceptibles de conduire cette institution à constater, comme en l’espèce, le caractère compatible avec le marché intérieur de ladite mesure (arrêt sur pourvoi, points 74 et 75).

114    À la lumière de ce qui précède, indépendamment de la question de savoir si la Commission devait ou simplement pouvait prendre en compte certaines considérations relatives à la réduction du risque pour le Royaume de Danemark dans le cadre de l’analyse de la compatibilité des mesures en cause avec le marché intérieur, il y a lieu de constater que, en l’espèce, elle a pris en compte d’une certaine manière ces considérations, notamment le fait que FIH a remboursé les obligations garanties par l’État et a aussi remboursé les fonds propres hybrides qui lui avaient été octroyés par ce dernier, comme cela résulte des considérants 125 et suivants de la décision attaquée. En effet, comme le relève la Commission, il ressort de la décision attaquée qu’elle a pris ces éléments en compte dans son examen de la viabilité de FIH et de l’existence d’une répartition des charges adéquate.

115    En ce qui concerne la conclusion selon laquelle cette rémunération devait s’élever au moins à 10 % par an de l’investissement en capital, il y a lieu de relever que la Commission a fait remarquer que, lorsque les mesures ont été adoptées en 2012, les obligations prioritaires non garanties de FIH étaient cotées sur le marché avec un rendement supérieur à 10 %. Dès lors, selon la Commission, il est logique de supposer qu’un opérateur privé en économie de marché exigerait un rendement plus élevé pour les actions, qui ont une position créditrice inférieure.

116    Compte tenu de la marge de discrétion dont elle jouit lorsqu’elle doit effectuer une évaluation économique complexe, en vertu de la jurisprudence citée au point 68 ci-dessus, et à la lumière des considérations exposées au point 115 ci-dessus, il y a lieu de relever que les requérantes n’ont pas démontré que la Commission a dépassé les limites de sa marge de discrétion.

117    Dès lors, il y a lieu de rejeter la troisième branche du deuxième moyen comme non fondée.

 Sur la cinquième branche, tirée d’erreurs dans le calcul du montant de l’allégement des exigences de fonds propres résultant de la cession d’actifs

118    Dans le cadre de la cinquième branche du deuxième moyen, les requérantes soutiennent que la Commission a commis des erreurs dans son calcul du montant de l’allégement des exigences de fonds propres résultant de la cession d’actifs.

119    D’une part, selon les requérantes, il n’y avait pas de raison de demander une rémunération pour l’allégement des exigences de fonds propres. De surcroît, les engagements adoptés seraient très contraignants pour FIH et réduiraient sensiblement sa capacité à exercer des activités commerciales et à bénéficier de l’amélioration de sa situation en termes de capitaux. Ce faisant, FIH aurait déjà payé, et continuerait à payer, un prix très élevé du fait de la cession d’actifs à la FSC.

120    D’autre part, la fixation du montant de l’effet d’allégement des exigences de fonds propres à 375 millions de DKK serait fondée sur une interprétation incorrecte par la Commission d’informations émanant de l’autorité danoise de surveillance du secteur financier, en particulier de l’annexe B.12 du mémoire en défense. Les requérantes ajoutent que le Royaume de Danemark a déclaré à plusieurs reprises que le montant correct était de 275 millions de DKK.

121    Les requérantes ajoutent dans leur réponse du 22 décembre 2015 aux questions écrites du Tribunal que l’effet d’allégement des exigences de fonds propres était calculé au niveau de FIH Holding, plutôt que de FIH. Dès lors, selon les requérantes, cet effet serait de 275 millions de DKK résultant de la réduction du risque de liquidités, puisque, compte tenu de la garantie illimitée contre les pertes fournie par FIH Holding à la FSC, il n’y a pas eu de réduction du risque des crédits au niveau de FIH Holding, même s’il y a eu un effet d’allégement de 100 millions de DKK résultant de la réduction du risque des crédits au niveau de FIH. Cependant, ce serait à tort que la décision attaquée a considéré qu’il y avait eu un effet d’allégement des exigences de fonds propres de 100 millions de DKK résultant de la réduction d’autres risques, notamment les risques liés aux revenus. En effet, même si dans les estimations initiales un effet d’allégement des exigences de fonds propres avait été inclus à ce titre, l’autorité danoise de surveillance du secteur financier et les requérantes ont fait valoir par la suite qu’il s’agissait d’une erreur.

122    Dans leur réponse du 8 février 2019 aux questions écrites du Tribunal, les requérantes ont précisé que le risque lié aux revenus représentait l’effet anticipé d’une perte budgétée pour l’année à venir, qui devait être pris en compte dans les calculs des exigences de fonds propres de la banque en cause. En d’autres termes, si, en 2011, FIH anticipait des pertes de 40 millions de DKK pour l’année 2012, elle devait disposer de 40 millions de DKK en fonds propres en 2011 pour couvrir ces pertes. Dans ce contexte, les requérantes ajoutent que le risque lié aux revenus peut aboutir seulement à une exigence de disposer de fonds propres additionnels, et non à une déduction des exigences de fonds propres. Or, dans le tableau 1 figurant à l’annexe B.12 du mémoire en défense, les requérantes auraient comptabilisé, par erreur, des risques liés aux revenus négatifs. Interrogées par le Tribunal lors de l’audience, les requérantes ont explicitement indiqué que le risque lié aux revenus ne pouvait jamais être négatif.

123    La Commission conteste les arguments avancés des requérantes. Elle soutient que l’effet de l’allégement des exigences de fonds propres a été correctement calculé.

124    Dans la mesure où les requérantes soutiennent que ni le rachat des actions de NewCo par la FSC, ni le niveau de rémunération de cet investissement ne constituent une aide d’État, la Commission se réfère à ses arguments développés dans le cadre du premier moyen.

125    La Commission conteste l’argument selon lequel les requérantes ne bénéficient pas d’un allégement d’exigences de fonds propres, parce que FIH n’en avait pas besoin, et selon lequel, en tout état de cause, les engagements retirent tout avantage. À cet égard, la Commission fait remarquer que les requérantes admettent que le transfert d’actifs vers NewCo a eu pour effet de remédier aux difficultés de liquidités. Sans ces mesures, FIH aurait probablement été contrainte de cesser ses activités, étant donné que les autorités de surveillance l’avaient mise en garde contre le risque imminent de perte de sa licence. De plus, les requérantes auraient admis dans la requête l’existence d’un allégement des exigences de fonds propres, dont elles contesteraient uniquement le montant. Cela aurait été confirmé par l’autorité danoise de surveillance du secteur financier.

126    En ce qui concerne le calcul de l’effet d’allégement, la Commission explique qu’elle avait initialement retenu un montant de 847 millions de DKK sur la base du calcul effectué par FIH, et vérifié par la FSC, qui avait été établi au niveau de FIH. La Commission aurait accepté la proposition ultérieure du Royaume de Danemark d’évaluer l’allégement des exigences de fonds propres au niveau de FIH Holding et non à celui de FIH, ce qui aurait entraîné une diminution importante de l’allégement estimé. Le Royaume de Danemark a estimé l’allégement à 375 millions de DKK et, dès lors, la Commission aurait légitimement retenu ce montant, qui résulterait d’une réduction du coussin de protection contre le risque de liquidités de 275 millions de DKK et d’une réduction du coussin de protection contre les autres risques de 100 millions de DKK.

127    Enfin, la Commission aurait appliqué un taux de rémunération annuel de 10 % pour l’allégement des fonds propres, car il s’agirait d’une pratique courante visant à assurer la compatibilité de l’aide avec le marché intérieur. Selon elle, une rémunération de 10 % ne reflète pas le prix du marché, ce qui éliminerait tout avantage et par conséquent l’existence d’une aide. Il serait plutôt question d’un niveau permettant à la Commission de vérifier que l’aide était limitée au minimum nécessaire, que le bénéficiaire contribuait au coût de la mesure et que les pourvoyeurs de capital se répartissaient adéquatement les charges.

128    Premièrement, en ce qui concerne l’argument des requérantes, selon lequel il n’y avait pas de raison pour demander une rémunération pour l’allégement des exigences de fonds propres et encore moins pour demander un taux de rémunération annuel de 10 %, il convient de relever que les engagements offerts n’éliminent pas l’existence d’un avantage découlant de l’allégement des exigences de fonds propres. Dès lors, dans ces circonstances, et eu égard au large pouvoir d’appréciation dont jouit la Commission lorsqu’elle doit effectuer une évaluation économique complexe, comme il a été indiqué au point 68 ci-dessus, cette dernière ne saurait être critiquée pour avoir demandé une rémunération annuelle pour déclarer l’aide compatible avec le marché intérieur. De plus, les requérantes n’ont pas démontré que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation en considérant qu’une rémunération annuelle de 10 % permettait de garantir que l’aide soit limitée au minimum nécessaire et que le bénéficiaire contribue au coût de la mesure.

129    Deuxièmement, en ce qui concerne l’argument selon lequel le montant de l’effet d’allégement des exigences de fonds propres a été erronément fixé à 375 millions de DKK, force est de constater que l’affirmation de la Commission selon laquelle elle s’était fondée sur des documents fournis par le Royaume de Danemark, qui ne contesterait pas ce montant, n’est pas exacte. S’il est vrai que le Royaume de Danemark s’est référé à ce montant, y compris dans les tableaux inclus dans le document figurant à l’annexe B.12 du mémoire en défense, il y a lieu de relever qu’il a précisé dans ce même document que le montant correct, selon lui, était de 275 millions de DKK. En effet, le texte accompagnant le tableau 1 figurant à l’annexe B.12 du mémoire en défense indique :

« Please note that the figures in Table 1 have been used for illustrative purposes, as the argument is still maintained that the relevant figures to be used are from 30 June 2012, cf. the email sent to the Commission on 29 April 2013. »

130    De plus, dans la note en bas de page à laquelle renvoie cette phrase, qui se trouve à la fin du document, il est indiqué ce qui suit :

« Based on these updated calculations the capital relief in FIH Holding Group is DKK 275 million (from liquidity risk)[…] »

131    À des fins d’exhaustivité, il y a lieu de relever que le courriel du Royaume de Danemark à la Commission du 29 avril 2013, figurant à l’annexe B.11 du mémoire en défense, contient une lettre des requérantes et une autre de l’autorité danoise de surveillance du secteur financier. Dans leur lettre, les requérantes expliquent qu’elles ont été informées par l’autorité danoise de surveillance du secteur financier que le risque lié aux revenus ne pouvait pas être négatif et que, par conséquent, il n’y avait pas lieu de considérer qu’il avait un effet d’allégement de fonds propres relatif au risque lié aux revenus de 100 millions de DKK, allant de - 52 millions de DKK avant la transaction à - 152 millions de DKK après la transaction. De plus, dans sa lettre, l’autorité danoise de surveillance du secteur financier confirme que, en effet, le risque lié aux revenus ne peut pas être négatif.

132    Ainsi qu’il ressort du point 120 ci-dessus, les requérantes font valoir que, après un certain temps, même si elles n’étaient pas d’accord avec la Commission sur ce point, elles ont décidé de ne pas réitérer leur désaccord à chaque fois afin d’adopter une attitude constructive.

133    Compte tenu de ce qui précède, il y a lieu de considérer que la Commission ne pouvait pas se limiter à soutenir que les données ont été fournies par le Royaume de Danemark et les requérantes et que celles-ci les auraient acceptées.

134    De plus, il convient de relever que, interrogée par écrit ainsi que lors de l’audience sur les raisons de fond permettant de considérer spécifiquement qu’il y avait eu un effet d’allégement des exigences de fonds propres d’un montant de 100 millions de DKK relatif au risque lié aux revenus au niveau de FIH Holding, la Commission est restée en défaut de fournir une telle raison et de réfuter l’argument des requérantes selon lequel ce risque ne pouvait pas être négatif.

135    Au vu de ce qui précède, il y a lieu d’accueillir en partie la cinquième branche du deuxième moyen et, pour le surplus, de rejeter cette branche comme non fondée.

136    Partant, il y a lieu d’annuler la décision attaquée dès lors qu’elle considère qu’il y a eu un effet d’allégement des exigences de fonds propres d’un montant de 100 millions de DKK relatif au risque lié aux revenus au niveau de FIH Holding.

 Sur les dépens

137    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions des requérantes.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision 2014/884/UE de la Commission, du 11 mars 2014, concernant l’aide d’État SA.34445 (12/C) mise en œuvre par le Danemark en faveur de la cession des actifs de FIH liés à l’immobilier à FSC est annulée.

2)      La Commission européenne supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par FIH Holding A/S et FIH A/S.

Collins

Barents

Passer

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 19 septembre 2019.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.