Language of document : ECLI:EU:T:2010:129

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

26 mars 2010 (*)

« Référé – Marchés publics – Procédure d’appel d’offres – Rejet d’une offre – Demande de sursis à exécution et de mesures provisoires – Perte d’une chance – Absence de préjudice grave et irréparable – Défaut d’urgence »

Dans l’affaire T‑6/10 R,

Sviluppo Globale GEIE, établi à Rome (Italie), représenté par Mes F. Sciaudone, R. Sciaudone et A. Neri, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par Mme P. Costa de Oliveira, MM. F. Erlbacher et P. Manzini, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande de mesures provisoires concernant la procédure d’appel d’offres EuropeAid/127843/D/SER/KOS, relative à la prestation de services de soutien aux administrations douanière et fiscale du Kosovo,

LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

rend la présente

Ordonnance

 Antécédents du litige

1        Le 8 janvier 2009, le bureau de liaison de la Commission des Communautés européennes au Kosovo (ci-après le « pouvoir adjudicateur ») a publié au Supplément au Journal officiel de l’Union européenne un avis de marché de services intitulé « Soutien aux administrations douanière et fiscale du Kosovo » (EuropeAid/127843/D/SER/KOS).

2        Afin de participer à la procédure d’attribution du marché en question, la requérante, Sviluppo Globale GEIE, a créé le consortium « International Technical Assistance to Kosovo » (ci-après le « consortium ITAK »), dont les autres membres étaient l’agence des douanes italienne, l’administration des douanes et des finances hongroise, le service des finances publiques letton et une société de consultants française.

3        Après avoir invité plusieurs candidats à soumettre une offre, le pouvoir adjudicateur a établi une liste des candidats présélectionnés sur laquelle figuraient, outre le consortium ITAK, quatre autres consortiums.

4        Par lettre du 24 juillet 2009, le pouvoir adjudicateur a informé le consortium ITAK que, bien que son offre soit techniquement conforme, elle n’était pas économiquement la plus avantageuse et que, en conséquence, le comité d’évaluation avait proposé d’attribuer le marché à un autre consortium. Cette lettre comportait un tableau présentant les notes moyennes attribuées à l’offre du consortium ITAK et à celle du consortium retenu, telles qu’elles avaient été calculées par les membres du comité d’évaluation en fonction des critères prévus par l’avis de marché.

5        Par lettre du 27 juillet 2009, le consortium ITAK a contesté les notes que le comité d’évaluation avait attribuées à son offre et a formellement demandé des éclaircissements quant aux notes moyennes obtenues pour chacun des critères de la grille d’évaluation considérés individuellement, tant en ce qui concerne sa propre offre que celle retenue. Par lettre du 31 juillet 2009, le pouvoir adjudicateur a répondu en confirmant la validité de l’évaluation dudit comité et en soulignant ne pas pouvoir fournir d’autres informations, dès lors que les délibérations de ce comité étaient tenues secrètes.

6        Dans ces circonstances, par lettre du 14 septembre 2009, le consortium ITAK a introduit un recours administratif contre la décision de rejeter son offre et une demande d’accès aux documents relatifs à la procédure d’attribution du marché en question, fondée sur l’article 6 du règlement (CE) n° 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO L 145, p. 43). En l’absence de réponse de la Commission à sa demande initiale d’accès aux documents, le consortium ITAK a, par lettre du 15 octobre 2009, introduit une demande confirmative, en vertu de l’article 8 du règlement n° 1049/2001.

7        Par décision du 10 novembre 2009, la Commission a conclu que, malgré la grande expérience des membres du consortium ITAK, l’offre de ce dernier présentait des carences et ne pouvait donc être retenue (ci-après la « décision attaquée »). Ensuite, par décision du 26 novembre 2009, elle a répondu à la demande initiale d’accès aux documents introduite par le consortium ITAK, en refusant d’ailleurs en substance cet accès, et, par lettre du 10 décembre suivant, elle a répondu à la demande confirmative d’accès aux documents introduite par celui-ci, en renvoyant au contenu de la décision du 26 novembre 2009.

 Procédure et conclusions des parties

8        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 11 janvier 2010, la requérante a introduit un recours visant à l’annulation de la décision attaquée.

9        Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le 29 janvier 2010, la requérante a introduit la présente demande en référé, dans laquelle elle conclut, en substance, à ce qu’il plaise au président du Tribunal :

–        ordonner le sursis à l’exécution de la décision attaquée jusqu’à ce que le Tribunal se prononce sur le recours principal ;

–        ordonner à la Commission de ne pas procéder à la signature du contrat prévu à la suite de la décision attaquée jusqu’à ce que le Tribunal se prononce sur le recours principal ;

–        dans l’hypothèse où ce contrat serait déjà signé, ordonner que son exécution soit suspendue jusqu’à ce que le Tribunal se prononce sur le recours principal ;

–        en application de l’article 65, sous b) et c), du règlement de procédure du Tribunal, ordonner à la Commission, premièrement, de présenter les procès-verbaux du comité d’évaluation concernant l’évaluation de l’offre soumise par le consortium ITAK, deuxièmement, de produire les procès-verbaux du comité d’évaluation relatifs à l’évaluation de l’offre retenue et, en tout cas, les documents et informations qu’elle a à sa disposition en ce qui concerne les avantages relatifs et les caractéristiques de l’offre retenue, troisièmement, de produire les documents relatifs aux « appréciations médiocres » formulées par sa direction générale « Fiscalité et union douanière » quant au travail de M. A. dans le cadre de son activité exercée en 2004 comme vice-directeur général dans le cadre du projet CAFAO (Customs and Fiscal Assistance Office to the Western Balkans) au Kosovo, quatrièmement, de communiquer les noms et les titres de compétence des membres du comité d’évaluation et, cinquièmement, de faire connaître l’état d’avancement de la procédure d’appel d’offres en question et, en conséquence, de préciser si le contrat a été signé et est en cours d’exécution ;

–        condamner la Commission aux dépens.

10      Dans ses observations écrites, déposées au greffe du Tribunal le 17 février 2010, la Commission conclut, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter la demande en référé et la demande de mesures d’instruction ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

11      Il ressort d’une lecture combinée des articles 278 TFUE et 279 TFUE, d’une part, et de l’article 256, paragraphe 1, TFUE, d’autre part, que le juge des référés peut, s’il estime que les circonstances l’exigent, ordonner le sursis à l’exécution d’un acte attaqué devant le Tribunal ou prescrire les mesures provisoires nécessaires.

12      L’article 104, paragraphe 2, du règlement de procédure dispose que les demandes en référé doivent spécifier l’objet du litige, les circonstances établissant l’urgence ainsi que les moyens de fait et de droit justifiant à première vue l’octroi de la mesure provisoire à laquelle elles concluent. Ainsi, le sursis à exécution et les mesures provisoires peuvent être accordés par le juge des référés s’il est établi que leur octroi est justifié à première vue en fait et en droit (fumus boni juris) et qu’ils sont urgents en ce sens qu’il est nécessaire, pour éviter un préjudice grave et irréparable aux intérêts du requérant, qu’ils soient édictés et produisent leurs effets dès avant la décision principale. Ces conditions sont cumulatives, de sorte que les demandes de mesures provisoires doivent être rejetées dès lors que l’une d’elles fait défaut [ordonnance du président de la Cour du 14 octobre 1996, SCK et FNK/Commission, C‑268/96 P(R), Rec. p. I‑4971, point 30].

13      Dans le cadre de cet examen d’ensemble, le juge des référés dispose d’un large pouvoir d’appréciation et reste libre de déterminer, au regard des particularités de l’espèce, la manière dont ces différentes conditions doivent être vérifiées ainsi que l’ordre de cet examen, dès lors qu’aucune règle de droit ne lui impose un schéma d’analyse préétabli pour apprécier la nécessité de statuer provisoirement [ordonnances du président de la Cour du 19 juillet 1995, Commission/Atlantic Container Line e.a., C‑149/95 P(R), Rec. p. I‑2165, point 23, et du 3 avril 2007, Vischim/Commission, C‑459/06 P(R), non publiée au Recueil, point 25].

14      Enfin, l’article 278 TFUE pose le principe du caractère non suspensif des recours, les actes adoptés par les institutions, organes et organismes de l’Union bénéficiant d’une présomption de légalité. Ce n’est donc qu’à titre exceptionnel que le juge des référés peut ordonner le sursis à l’exécution d’un acte attaqué devant le Tribunal ou prescrire des mesures provisoires (voir, en ce sens, ordonnance du président du Tribunal du 17 décembre 2009, Vereniging Milieudefensie et Stichting Stop Luchtverontreiniging Utrecht/Commission, T‑396/09 R, non publiée au Recueil, point 31, et la jurisprudence citée).

15      Eu égard aux éléments du dossier, le juge des référés estime qu’il dispose de tous les éléments nécessaires pour statuer sur la présente demande de mesures provisoires, sans qu’il soit utile d’entendre, au préalable, les parties en leurs explications orales.

16      Dans les circonstances du cas d’espèce, il convient d’examiner d’abord si la condition de l’urgence est remplie.

 Arguments des parties

17      La requérante soutient que, en l’absence des mesures provisoires sollicitées, elle subirait un préjudice grave et irréparable.

18      Selon la requérante, ce préjudice serait irréparable étant donné qu’il ne pourrait plus être réparé même si la décision attaquée était annulée au terme de la procédure principale. En effet, la Commission n’ayant pas suspendu de sa propre initiative l’attribution du marché litigieux au consortium retenu, la décision principale devrait intervenir, selon toute probabilité, postérieurement à la signature du contrat et à la fin de son exécution. En outre, il paraîtrait très peu probable qu’une nouvelle procédure d’appel d’offres soit organisée par la Commission à la suite de l’annulation de la décision attaquée. Par ailleurs, le préjudice causé par la non-attribution du marché litigieux ne pourrait être intégralement réparé dans le cadre d’un recours indemnitaire, en vertu de l’article 268 TFUE, dès lors que ce préjudice, consistant en la perte d’une chance « très sérieuse », serait difficile à quantifier dans son entièreté. À cet égard, la requérante invoque l’ordonnance du président du Tribunal du 20 juillet 2006, Globe/Commission (T‑114/06 R, Rec. p. II‑2627, points 117, 118 et 127).

19      La requérante souligne également la gravité du préjudice qu’elle subirait dans l’hypothèse où sa demande en référé serait rejetée. À cet égard, elle dénonce, d’abord, la perte des bénéfices qu’elle aurait perçus si le marché lui avait été attribué. Ensuite, elle fait valoir que l’obtention du marché lui aurait apporté un bénéfice certain en termes d’image, la possibilité pour elle de se prévaloir d’un contrat obtenu auprès de la Commission, à l’issue d’une procédure d’appel d’offres, représentant une opportunité essentielle d’obtenir des références sur le plan européen, références qu’elle aurait pu invoquer dans le cadre de sa participation à d’autres procédures d’appel d’offres.

20      Enfin, la requérante estime que l’urgence dont elle se prévaut doit d’autant plus être prise en considération par le juge des référés que les arguments de fait et de droit qu’elle a présentés au soutien de l’existence d’un fumus boni juris paraissent « particulièrement sérieux ».

21      Selon la Commission, la requérante n’est parvenue à établir ni la gravité ni le caractère irréparable du préjudice allégué.

 Appréciation du juge des référés

22      Selon une jurisprudence constante, le caractère urgent d’une demande en référé doit s’apprécier par rapport à la nécessité qu’il y a de statuer provisoirement afin d’éviter qu’un préjudice grave et irréparable ne soit occasionné à la partie qui sollicite les mesures provisoires. C’est à cette dernière partie qu’il appartient d’établir qu’elle ne saurait attendre l’issue de la procédure principale sans avoir à subir un préjudice de cette nature (voir ordonnance du président du Tribunal du 20 janvier 2010, Agriconsulting Europe/Commission, T‑443/09 R, non publiée au Recueil, point 25, et la jurisprudence citée).

23      Pour pouvoir apprécier si le préjudice qu’appréhende la partie requérante présente un caractère grave et irréparable et justifie, par conséquent, la suspension, à titre exceptionnel, de l’exécution d’une décision, le juge des référés doit disposer d’indications concrètes permettant d’apprécier les conséquences précises qui résulteraient, vraisemblablement, de l’absence des mesures demandées. Il n’est toutefois pas nécessaire que l’imminence du préjudice allégué soit établie avec une certitude absolue. Il suffit, particulièrement lorsque la réalisation du préjudice dépend de la survenance d’un ensemble de facteurs, qu’elle soit prévisible avec un degré de probabilité suffisant (voir ordonnance du président du Tribunal du 20 novembre 2008, SIAE/Commission, T‑433/08 R, non publiée au Recueil, point 35, et la jurisprudence citée).

24      En l’espèce, il convient donc d’examiner si la requérante a démontré avec un degré de probabilité suffisant qu’elle subirait un préjudice grave et irréparable si les mesures provisoires qu’elle sollicite ne lui étaient pas octroyées.

25      S’agissant de la gravité du préjudice invoqué en l’espèce, il importe de rappeler que ce dernier serait subi à l’occasion d’une procédure d’appel d’offres organisée en vue de l’attribution d’un marché public. Or, une telle procédure a pour objet de permettre à l’autorité concernée de choisir, parmi plusieurs offres concurrentes, celle qui lui paraît la plus conforme aux critères de sélection prédéterminés. L’autorité qui institue une telle procédure dispose, par ailleurs, d’un large pouvoir d’appréciation quant aux éléments à prendre en considération en vue de l’adoption de la décision de passer le marché (voir ordonnance Agriconsulting Europe/Commission, précitée, point 28, et la jurisprudence citée).

26      Une entreprise qui participe à une telle procédure n’a, dès lors, jamais la garantie absolue que le marché public lui sera attribué, mais doit toujours tenir compte de l’éventualité de son attribution à un autre soumissionnaire ou à un autre candidat. Dans ces conditions, les conséquences financières négatives pour l’entreprise en question, qui découleraient du rejet de son offre, font, en principe, partie du risque commercial habituel, auquel chaque entreprise active sur le marché doit faire face. Il s’ensuit que la perte d’une chance de se voir attribuer et d’exécuter un marché public en raison du rejet d’une offre d’un soumissionnaire ou d’un candidat lors d’une procédure de passation de marché public ne saurait être regardée comme constitutive, en soi, d’un préjudice grave, indépendamment d’une appréciation concrète de la gravité de l’atteinte spécifique alléguée dans chaque cas d’espèce (voir ordonnance Agriconsulting Europe/Commission, précitée, point 29, et la jurisprudence citée).

27      En conséquence, c’est à la condition que l’entreprise requérante ait démontré à suffisance de droit qu’elle aurait pu retirer des bénéfices suffisamment significatifs de l’attribution et de l’exécution du marché que le fait, pour elle, d’avoir perdu une chance de se voir attribuer et d’exécuter ledit marché constituerait un préjudice grave. Par ailleurs, la gravité d’un préjudice d’ordre matériel doit être évaluée au regard, notamment, de la taille de l’entreprise requérante (voir ordonnance Agriconsulting Europe/Commission, précitée, point 30, et la jurisprudence citée).

28      En l’espèce, force est de constater que la requérante se borne à prétendre que, « [a]u vu du montant total prévu pour [le] marché [litigieux], la perte de la chance de percevoir les revenus découlant de la prestation des services en question constitue pour [elle] un préjudice d’une gravité certaine ». Elle s’abstient de produire des éléments, notamment chiffrés, permettant de considérer, compte tenu en particulier de sa taille, que la perte qu’elle risque de subir serait suffisamment grave pour justifier l’octroi de mesures provisoires. Dès lors, au regard des éléments figurant dans la demande en référé, le juge des référés n’est pas en mesure de considérer que la perte de la chance de percevoir les revenus résultant de l’exécution du marché public en question causerait à la requérante une atteinte spécifique suffisamment grave pour justifier l’octroi des mesures demandées.

29      S’agissant du caractère irréparable du préjudice découlant de la perte d’une chance, il y a lieu de rappeler que, lorsque le Tribunal accorde des dommages et intérêts sur la base de l’attribution d’une valeur économique au préjudice subi en raison d’un manque à gagner, cette réparation est en principe susceptible de satisfaire à l’exigence, énoncée par la jurisprudence, d’assurer la réparation intégrale du préjudice individuel que la partie concernée a effectivement subi du fait des actes illégaux particuliers dont elle a été victime (ordonnance Agriconsulting Europe/Commission, précitée, point 32 ; voir également, en ce sens, arrêt de la Cour du 21 février 2008, Commission/Girardot, C‑348/06 P, Rec. p. I‑833, point 76).

30      Il en résulte que, dans l’hypothèse où la requérante obtiendrait gain de cause dans la procédure principale, il pourrait être attribué une valeur économique au préjudice subi en raison de la perte de sa chance d’être retenue, ce qui permettrait de satisfaire à l’obligation de réparer intégralement le dommage individuel effectivement subi. Par conséquent, l’argument de la requérante selon lequel son préjudice serait irréparable au motif qu’il ne serait pas possible de quantifier la perte de la chance d’obtenir le marché litigieux ne saurait être accueilli (voir, en ce sens, ordonnance Agriconsulting Europe/Commission, précitée, point 33, et la jurisprudence citée).

31      Ainsi, l’ordonnance Globe/Commission, précitée, invoquée par la requérante, doit être considérée comme dépassée à cet égard par la jurisprudence plus récente, dans la mesure où il y avait été jugé que la perte de la chance de se voir attribuer un marché public était très difficile, voire impossible, à quantifier, de sorte que ladite perte pouvait être qualifiée de préjudice irréparable (voir, en ce sens, ordonnance Agriconsulting Europe/Commission, précitée, point 34).

32      Il s’ensuit que la requérante n’est pas parvenue à établir, avec un degré de probabilité suffisant, que le préjudice invoqué pourrait être qualifié d’irréparable. Elle n’a, notamment, pas démontré qu’elle serait empêchée d’obtenir une compensation financière ultérieure par la voie d’un recours en indemnité. En effet, dans la mesure où ce préjudice ne serait pas réparé par la seule annulation de la décision attaquée dans le cadre de l’affaire principale, il serait susceptible d’être réparé dans le cadre des voies de recours prévues par les articles 268 TFUE et 340 TFUE, étant entendu que la seule possibilité de former un recours en indemnité suffit à attester du caractère en principe réparable d’un tel préjudice (voir, en ce sens, ordonnance Agriconsulting Europe/Commission, précitée, point 35, et la jurisprudence citée).

33      Enfin, en ce qui concerne l’argument de la requérante selon lequel l’urgence dont elle se prévaut doit d’autant plus être prise en considération que les arguments qu’elle a présentés au soutien de l’existence d’un fumus boni juris paraissent « particulièrement sérieux », il suffit d’observer que, quelle que soit la force de ces arguments, la violation éventuelle d’une norme supérieure de droit par un acte ne saurait suffire à établir, par elle-même, la gravité et le caractère irréparable du préjudice causé par cette violation et donc justifier le bien-fondé d’une demande en référé. Par conséquent, il ne suffit pas pour la requérante d’alléguer une telle violation pour établir la réunion des conditions de l’urgence, à savoir le caractère grave et irréparable du préjudice découlant de cette violation, mais elle reste tenue de prouver les faits qui sont censés fonder la perspective d’un tel préjudice (voir, en ce sens, ordonnance Agriconsulting Europe/Commission, précitée, point 36, et la jurisprudence citée).

34      Il ressort de ce qui précède que la présente demande en référé doit être rejetée pour défaut d’urgence, sans qu’il soit besoin de vérifier si les autres conditions d’octroi des mesures provisoires sollicitées, notamment celle de l’existence d’un fumus boni juris, sont remplies.

35      Dans ces circonstances, il n’y a pas lieu d’adopter les mesures d’instruction sollicitées par la requérante, dès lors qu’elles ne concernent nullement la condition relative à l’urgence, ainsi qu’il ressort de la demande en référé, mais visent essentiellement l’exigence d’un fumus boni juris. La demande en référé devant être rejetée pour le seul défaut d’urgence, ces mesures sont donc dépourvues de toute pertinence.

Par ces motifs,

LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

ordonne :

1)      La demande en référé est rejetée.

2)      Les dépens sont réservés.

Fait à Luxembourg, le 26 mars 2010.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       M. Jaeger


* Langue de procédure : l’italien.