Language of document : ECLI:EU:T:2023:54

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

8 février 2023 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne verbale LOULOU STUDIO – Marque internationale verbale antérieure LULU’S – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑24/22,

Ugo Bensoussan, demeurant à Paris (France), représenté par Mes V. Bouchara et A. Maier, avocates,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. T. Frydendahl, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Lulu’s Fashion Lounge LLC, établie à Chico, Californie (États-Unis), représentée par Mes C. Bercial Arias, K. Dimidjian-Lecompte et K. Henry, avocates,

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de MM. D. Spielmann (rapporteur), président, R. Mastroianni et Mme M. Brkan, juges,

greffier : Mme A. Juhász-Tóth, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 7 décembre 2022,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, le requérant, M. Ugo Bensoussan, demande l’annulation de la décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 12 novembre 2021 (affaire R 480/2021-4) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 5 avril 2019, le requérant a présenté à l’EUIPO une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe verbal LOULOU STUDIO.

3        La marque demandée désignait les produits et les services relevant, notamment, des classes 18, 25 et 35 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 18 : « Sacs à main ; sacs besaces ; sacs à dos ; sacs de sport ; sacs de plage ; sacs à langer ; porte-documents en cuir ; serviettes (maroquinerie) ; portefeuilles ; porte-cartes ; porte-billets ; porte-monnaie non en métaux précieux ; cartables ; étuis pour les clefs (maroquinerie) ; étuis en cuir pour permis de conduire ; porte-cartes de visite ; trousses de toilette ; trousses pour le maquillage ; coffrets destinés à contenir des affaires de toilette ; sacs à provisions ; bourses ; ceintures banane » ;

–        classe 25 : « Vêtements ; vêtements en cuir ou en imitation du cuir ; sous-vêtements ; lingerie ; chaussettes ; bas ; collants ; jambières ; maillots de bain ; shorts de bain ; paréos ; peignoirs ; pyjamas ; robes de chambre ; chemises de nuit ; cravates, nœuds papillon ; foulards ; écharpes ; étoles ; châles ; bandeaux pour la tête (habillement) ; ceintures (habillement) ; bretelles ; gants (habillement) ; mitaines ; chapellerie ; visières (chapellerie) ; couvre-oreilles ; chaussures (à l’exception des chaussures orthopédiques) ; chaussures de plage, de ski ou de sport ; chaussons ; semelles ; talonnettes pour chaussures ; fourrures (vêtements) ; bonneterie » ;

–        classe 35 : « Informations et conseils commerciaux aux consommateurs ; services de ventes au détail et sur internet de cuir et imitation du cuir, sacs à main, sacs de voyage, sacs besaces, sacs à dos, sacs de sport, sacs de plage, sacs à langer, porte-documents en cuir ; services de ventes au détail et sur internet de serviettes [maroquinerie], portefeuilles, porte-cartes, porte-billets, porte-monnaie non en métaux précieux, trousses de voyage [maroquinerie] ; services de ventes au détail et sur internet de cartables, malles, mallettes, valises, bagages, étiquettes à bagages [maroquinerie], étuis pour les clefs [maroquinerie], étuis en cuir pour permis de conduire, porte-cartes de visite, étuis en cuir pour chéquiers ; services de ventes au détail et sur internet de housses en cuir, étuis pour cravates, trousses de toilette, trousses pour le maquillage, coffrets destinés à contenir des affaires de toilette, sac-housses de voyage pour vêtements et souliers ; services de ventes au détail et sur internet de boîtes à chapeaux en cuir ou en imitation de cuir, parapluies, ombrelles, cannes, colliers ou habits pour animaux, sacs de transport pour animaux ; services de ventes au détail et sur internet de filets ou sacs à provisions, sacs ou sachets [enveloppes, pochettes] en cuir pour l’emballage, fouets et sellerie, laisses, bourses, ceintures banane ; services de ventes au détail et sur internet de vêtements, sous-vêtements, chaussettes, bas, collants, jambières, maillots de bain, shorts de bain, paréos, peignoirs, pyjamas, robes de chambre ; services de ventes au détail et sur internet de chemises de nuit, cravates, nœuds papillon, foulards, écharpes, étoles, châles, bandeaux pour la tête [habillement] ; services de ventes au détail et sur internet de ceintures [habillement], bretelles, gants [habillement], mitaines, chapellerie, visières [chapellerie], couvre-oreilles ; services de ventes au détail et sur internet de chaussures [à l’exception des chaussures orthopédiques], chaussons, semelles ; services de ventes au détail et sur internet de talonnettes pour chaussures, fourrures [vêtements], bonneterie ».

4        Le 4 octobre 2019, l’intervenante, Lulu’s Fashion Lounge LLC, a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits et les services visés au point 3 ci-dessus.

5        L’opposition était fondée, notamment, sur l’enregistrement international antérieur désignant l’Union européenne de la marque verbale LULU’S, enregistrée le 17 septembre 2014 sous le numéro 1230611, désignant les produits et les services relevant des classes 25 et 35 et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 25 : « Vêtements, à savoir robes, hauts (vêtements), chandails, gilets, vestes, jupes, caleçons, jeans, shorts, leggings, collants, chaussettes, blouses, vêtements de bain, combishorts, combinaisons-pantalons, articles de lingerie, justaucorps ; articles de chapellerie, à savoir chapeaux ; articles chaussants, à savoir chaussures, bottes, tongs, sandales » ;

–        classe 35 : « Services informatisés de commande en ligne portant sur des marchandises et produits de consommation d’usage courant ; services informatisés de commande en ligne dans le domaine des vêtements, chaussures, articles de bijouterie et accessoires ; services informatisés de magasins de vente au détail en ligne dans le domaine des vêtements, chaussures, articles de bijouterie et accessoires d’habillement, de chaussures et d’articles de bijouterie ».

6        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

7        Le 19 janvier 2021, la division d’opposition a partiellement fait droit à l’opposition, pour les produits et les services visés au point 3 ci-dessus.

8        Le 15 mars 2021, le requérant a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’opposition.

9        Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours. Premièrement, elle a relevé que le public pertinent était composé de professionnels et du grand public de l’Union européenne, dont le niveau d’attention était moyen. Deuxièmement, elle a considéré que les produits et les services en cause étaient tous identiques ou similaires, au moins à un faible degré. Troisièmement, elle a relevé que les signes en conflit présentaient un degré de similitude moyen sur le plan visuel et élevé sur le plan phonétique. Elle a ajouté que ces signes seraient tous deux perçus comme un diminutif du prénom Louise, mais qu’une telle référence ne véhiculait aucun concept. Quatrièmement, elle a considéré que la marque antérieure présentait un caractère distinctif moyen. Ayant par ailleurs rejeté les arguments du requérant tirés de décisions antérieures concernant des signes différents de ceux en conflit, la chambre de recours a conclu qu’il existait un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, concernant les produits et les services visés au point 3 ci-dessus.

 Conclusions des parties

10      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO et l’intervenante aux dépens, y compris ceux exposés dans le cadre de la procédure devant l’EUIPO.

11      L’EUIPO et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

12      À l’appui de son recours, le requérant soulève un moyen unique, tiré d’une violation l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001. En particulier, il conteste l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent.

13      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments du requérant.

14      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), iv), du règlement 2017/1001, il convient notamment d’entendre par marques antérieures les marques qui ont fait l’objet d’un enregistrement international ayant effet dans l’Union, dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque de l’Union européenne.

15      Constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

16      Lorsque la protection de la marque antérieure s’étend à l’ensemble de l’Union, il y a lieu de prendre en compte la perception des marques en conflit par le consommateur des produits et des services en cause sur ce territoire. Toutefois, il convient de rappeler que, pour refuser l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne, il suffit qu’un motif relatif de refus au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 existe dans une partie de l’Union [voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 76 et jurisprudence citée].

17      En l’espèce, le requérant ne conteste pas les conclusions de la chambre de recours selon lesquelles, d’une part, le public pertinent est composé de professionnels et du grand public de l’Union, dont le niveau d’attention est moyen et, d’autre part, les produits et les services en cause sont identiques ou similaires, au moins à un faible degré.

18      En revanche, le requérant conteste les conclusions de la chambre de recours relatives, d’une part, à la comparaison des signes en conflit sur les plans visuel, phonétique et conceptuel et, d’autre part, à l’appréciation globale du risque de confusion.

 Sur la comparaison des signes

19      Il convient de rappeler que l’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

20      L’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 41 et jurisprudence citée). Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 42). Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (arrêt du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 43).

 Sur l’absence de prise en compte des signes en conflit dans leur ensemble

21      À titre liminaire, le requérant reproche à la chambre de recours de ne pas avoir comparé les signes en conflit dans leur ensemble, mais d’avoir arbitrairement écarté de la comparaison le terme « studio » de la marque demandée, pour ne comparer que les termes « loulou » et « lulu ».

22      La chambre de recours a relevé, sans que le requérant le conteste, que le public pertinent décomposerait la marque demandée en deux termes, « loulou » et « studio », et qu’il percevrait le terme « studio » comme une simple description de l’origine de la conception ou de la fabrication des produits ou des services visés dans la demande d’enregistrement. Elle en a déduit que le terme « studio » possédait un caractère distinctif faible, voire inexistant.

23      Toutefois, contrairement à ce que soutient le requérant, la chambre de recours a tenu compte du terme « studio » dans sa comparaison des signes en conflit sur les plans visuel et phonétique. Ainsi, comparant ces signes sur le plan visuel, elle a estimé que le fait que la marque demandée contienne un deuxième élément verbal, secondaire, qui n’avait pas d’équivalent dans la marque antérieure, ne suffisait pas à contrebalancer les similitudes par ailleurs constatées. Sur le plan phonétique, elle a relevé que le public pertinent prononcerait les deux mots composant la marque demandée en cinq syllabes, qu’elle reproduit en alphabet phonétique. Elle a rappelé ensuite que le deuxième terme de la marque demandée n’avait « pas d’équivalent phonétique » dans la marque antérieure, qu’il avait une incidence moindre et qu’il serait perçu comme ayant un caractère distinctif faible, voire inexistant.

24      Il en résulte que, s’agissant de la comparaison des signes sur les plans visuel et phonétique, l’argument du requérant manque en fait.

25      S’agissant de la comparaison des signes en conflit sur le plan conceptuel, la chambre de recours n’a pas fait mention du mot « studio » dans son analyse. Toutefois, cette chambre ayant considéré, sans que le requérant le conteste, que le terme « studio » possédait un caractère distinctif faible, voire inexistant, cette omission ne saurait, eu égard à la jurisprudence visée au point 20 ci-dessus, constituer une erreur de droit.

26      Dès lors, s’agissant de la comparaison des signes sur le plan conceptuel, l’argument du requérant n’est pas fondé. Partant, l’argumentation relative à la prétendue absence de prise en compte des signes en conflit dans leur ensemble doit être écartée.

 Sur la comparaison des signes sur le plan visuel

27      Le requérant soutient que les signes en conflit sont totalement différents sur le plan visuel. Premièrement, ces signes auraient une structure différente. La marque antérieure aurait une structure typique de la langue anglaise, en ce qu’elle est composée d’un mot suivi d’une apostrophe et de la lettre « s », alors que la marque demandée serait composée de deux termes français et serait deux fois plus longue que la marque antérieure. Deuxièmement, la marque demandée serait, contrairement à la marque antérieure, dépourvue de tout élément graphique ou stylistique. Troisièmement, l’EUIPO aurait, dans des décisions antérieures, conclu à l’absence de similitude visuelle entre des signes comparables à ceux en conflit en l’espèce. En conséquence, le fait que les signes en conflit partagent quatre lettres serait insuffisant pour compenser les différences existant entre ces signes sur le plan visuel.

28      La chambre de recours a constaté une similitude visuelle moyenne entre les signes en conflit. En particulier, elle a considéré que le mot « loulou », premier et plus distinctif élément de la marque demandée, était fortement similaire à la marque antérieure. Elle a ajouté que le fait que la marque demandée contienne un deuxième élément verbal, secondaire, à savoir le mot « studio », qui n’avait pas d’équivalent dans la marque antérieure, ne suffisait pas à contrebalancer la similitude constatée.

29      S’agissant des arguments du requérant relatifs à la structure des signes en conflit, il convient de rappeler que le public pertinent est le grand public de l’Union et que, aux fins de l’appréciation d’un risque de confusion, la chambre de recours a apprécié la perception des signes en conflit du point de vue du public anglophone, situé en Irlande et à Malte. Or, la connaissance d’une langue étrangère ne pouvant pas, en général, être présumée [voir arrêt du 14 juillet 2021, Cole Haan/EUIPO – Samsøe & Samsøe Holding (Ø), T‑399/20, EU:T:2021:442, point 39 et jurisprudence citée], le requérant ne saurait se prévaloir, sans étayer ses allégations, du fait que le public pertinent percevra la marque demandée comme étant composée de deux termes appartenant à la langue française. Au demeurant, d’une part, le requérant ne fait pas valoir que les termes « loulou » et « studio » appartiennent au vocabulaire de base de cette langue et, d’autre part, comme le relève à juste titre l’EUIPO, le mot « studio » existe en anglais.

30      Par ailleurs, il convient de rappeler que le requérant ne conteste pas les appréciations de la chambre de recours rappelées au point 22 ci-dessus. Il ne conteste pas davantage que le mot « loulou » est fortement similaire à la marque antérieure. En effet, il se limite à soutenir que la similitude entre les signes en conflit résultant du fait qu’ils partagent quatre lettres est insuffisante pour contrebalancer les différences existant entre eux.

31      Dès lors, le requérant n’a pas démontré que la chambre de recours avait commis une erreur d’appréciation en ayant considéré que, en dépit de la présence dans la marque demandée du mot « studio », absent de la marque antérieure, les signes en conflit présentaient un degré moyen de similitude sur le plan visuel.

32      Cette conclusion n’est pas remise en cause par les autres arguments du requérant.

33      S’agissant de l’argument relatif aux éléments figuratifs distinguant prétendument les signes en conflit, il convient de rappeler que la marque antérieure, visée au point 5 ci-dessus, est une marque verbale. Or, selon la jurisprudence, une marque verbale est une marque constituée exclusivement de lettres, de mots ou d’associations de mots, écrits en caractères d’imprimerie dans une police normale, sans élément graphique spécifique. La protection qui découle de l’enregistrement d’une marque verbale porte sur le mot indiqué dans la demande d’enregistrement et non sur les aspects graphiques ou stylistiques particuliers que cette marque pourrait éventuellement revêtir [voir arrêt du 7 mai 2009, Klein Trademark Trust/OHMI – Zafra Marroquineros (CK CREACIONES KENNYA), T‑185/07, EU:T:2009:147, point 48 et jurisprudence citée]. Dès lors, l’argument doit être écarté.

34      S’agissant des arguments fondés sur des décisions antérieures de l’EUIPO, il y a lieu de rappeler que ce dernier est appelé à décider en fonction des circonstances de chaque cas d’espèce et qu’il n’est pas lié par des décisions antérieures prises dans d’autres affaires. En effet, la légalité des décisions de la chambre de recours doit être appréciée uniquement sur le fondement du règlement 2017/1001  et non sur celui d’une pratique décisionnelle antérieure à celles-ci. En outre, dans le cadre de son contrôle de légalité, le Tribunal n’est pas lié par la pratique décisionnelle de l’EUIPO [voir arrêt du 15 décembre 2015, LTJ Diffusion/OHMI – Arthur et Aston (ARTHUR & ASTON), T‑83/14, EU:T:2015:974, point 39 et jurisprudence citée]. En l’espèce, force est de constater que les décisions citées par le requérant concernaient des signes différents de ceux en conflit en l’espèce.

35      En conséquence, les arguments du requérant doivent être écartés.

 Sur la comparaison des signes sur le plan phonétique

36      Le requérant soutient que les signes en conflit sont différents sur le plan phonétique. Premièrement, la marque demandée serait prononcée en cinq, voire sept syllabes, par le public pertinent, tandis que la marque antérieure comporterait, dans toutes les langues, deux syllabes. Deuxièmement, la prononciation de la marque antérieure serait accentuée sur sa dernière syllabe, dont la lettre « s » finale produirait un « long sifflement ». Troisièmement, la prononciation de la marque demandée serait dominée par les syllabes longues et fortes composant le mot « studio ». Quatrièmement, les éléments « lulu » et « loulou » seraient prononcés différemment par une partie importante du public pertinent, qui ne serait pas familier de la juxtaposition des lettres « o » et « u » et qui, dès lors, pourrait scinder en deux syllabes la prononciation de « lou ». Cinquièmement, l’EUIPO aurait, dans des décisions antérieures, conclu à l’absence de similitude phonétique entre des signes comparables à ceux en conflit en l’espèce.

37      La chambre de recours a constaté un degré élevé de similitude phonétique entre les signes en conflit. À cet égard, elle a relevé que le public pertinent prononcerait les deux mots de la marque demandée en cinq syllabes, qu’elle reproduit en alphabet phonétique. Elle a ajouté que la première syllabe de chaque signe en conflit était identique et que la deuxième l’était presque, excepté le son produit par la lettre « s » dans la marque antérieure. Elle a rappelé ensuite que le deuxième terme de la marque demandée n’avait « pas d’équivalent phonétique » dans la marque antérieure et qu’il avait une incidence moindre dans la comparaison sur ce plan.

38      Force est de constater que les allégations du requérant selon lesquelles la marque demandée serait dominée sur le plan phonétique par les syllabes prétendument longues et fortes composant le mot « studio », et par la prononciation en deux syllabes de l’élément « lou » par une partie du public pertinent, ne sont aucunement étayées. Partant, elles ne permettent pas d’établir une erreur d’appréciation de la part de la chambre de recours.

39      En outre, le requérant ne conteste pas que le terme « studio » possède un caractère distinctif faible, voire inexistant. Dès lors, le requérant ne saurait reprocher à la chambre de recours d’avoir accordé à ce mot une importance moindre dans le résultat de la comparaison des signes en conflit sur le plan phonétique.

40      Par ailleurs, le requérant ne conteste pas que la première syllabe des signes en conflit est prononcée de manière identique pour la partie anglophone du public pertinent.

41      De surcroît, ainsi qu’il est relevé au point 37 ci-dessus, la chambre de recours a tenu compte de la différence de prononciation entre « loulou » et « lulu’s » causée par la lettre « s » finale de cette marque. Partant, même à supposer que, dans certaines langues, l’accent tonique serait placé sur la deuxième syllabe de « lulu’s », de manière à rendre clairement audible le « s » final, une telle circonstance ne serait pas suffisante à elle seule pour constater que la conclusion de la chambre de recours sur la similitude phonétique est entachée d’erreur.

42      Enfin, les arguments du requérant fondés sur des décisions antérieures de l’EUIPO doivent être écartés pour les motifs exprimés au point 34 ci-dessus.

43      En conséquence, les arguments du requérant doivent être écartés.

 Sur la comparaison des signes sur le plan conceptuel

44      Selon la jurisprudence, la similitude conceptuelle implique que les signes en conflit concordent dans leur contenu sémantique (arrêt du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, EU:C:1997:528, point 24).

45      Le requérant soutient que les signes en conflit ne sont pas similaires sur le plan conceptuel. Premièrement, il conteste que les termes « loulou » et « lulu » puissent être compris par le public pertinent comme des diminutifs du prénom Louise et soutient que ce public n’associera ces termes à aucun prénom. Il ajoute que ces termes n’ont aucune signification liée aux produits et aux services en cause ni aucune signification pouvant conduire à leur association sur un plan conceptuel par les consommateurs. Deuxièmement, la marque demandée évoquerait la France aux consommateurs, en raison du fait qu’elle est composée de deux mots français et que la combinaison de voyelles « ou » serait caractéristique de la langue française. En revanche, la marque antérieure leur évoquerait la langue anglaise, en raison de sa construction grammaticale typique de cette langue, résultant de l’apostrophe et du « s » final. Cette marque serait comprise par les consommateurs comme signifiant « quelque chose appartenant à Lulu ». Troisièmement, les mots « loulou » et « lulu » auraient plusieurs significations en français, très différentes les unes des autres et dont aucune ne serait liée à un prénom. En anglais, le mot « lulu » aurait une signification, mais non le mot « loulou ». Quatrièmement, la chambre de recours se serait fondée à tort sur la seule perception de la partie anglophone du public pertinent. Cinquièmement, l’EUIPO aurait, dans des décisions antérieures, conclu à l’absence de similitude conceptuelle entre des signes comparables à ceux en conflit en l’espèce.

46      La chambre de recours a constaté que les signes en conflit seraient tous deux compris comme étant des diminutifs du prénom Louise. Toutefois, elle a considéré que cette référence commune ne véhiculait aucun concept. Il s’ensuit que, ce faisant, elle n’a retenu l’existence d’aucune similitude conceptuelle entre lesdits signes.

47      Par ailleurs, il y a lieu de constater que le requérant avance des arguments contradictoires, faisant successivement valoir que les signes en conflit sont dépourvus de toute signification perceptible intrinsèque qui pourrait potentiellement avoir pour conséquence que les consommateurs associent ces signes sur le plan conceptuel, puis que, tant en français qu’en anglais, les mots « loulou » et « lulu » ont des significations très différentes. Ainsi, le requérant a en particulier relevé que, en français, le mot « loulou » avait plusieurs significations connues et le mot « lulu » une signification très différente de celle de « loulou », tandis qu’en anglais, les termes « lulu » et « loulou » avaient des significations fondamentalement différentes.

48      S’agissant de l’argument selon lequel les signes en conflit sont dépourvus de toute signification pouvant conduire à une similitude conceptuelle dans l’esprit du public, il vise, à le supposer fondé, à constater l’absence de similitude entre les signes sur le plan conceptuel.

49      Or, ainsi qu’il ressort du point 46 ci-dessus, telle est la conclusion à laquelle est parvenue la chambre de recours. Dès lors, l’argument est inopérant.

50      S’agissant de l’argument selon lequel les termes « loulou » et « lulu » ou « lulu’s » auraient des significations différentes, tant en français qu’en anglais, il convient de relever ce qui suit.

51      Premièrement, en ce qui concerne la signification en français des mots « loulou » et « lulu », il convient de rappeler que le public à l’égard duquel la chambre de recours a apprécié l’existence d’un risque de confusion est le public anglophone, situé en Irlande et à Malte. Or, eu égard à la jurisprudence rappelée au point 29 ci-dessus, le requérant ne saurait se prévaloir, sans étayer ses allégations, du fait que cette partie du public pertinent percevra le sens en français des termes « loulou » et « lulu », dont il n’a, au demeurant, pas fait valoir qu’ils appartenaient au vocabulaire de base de cette langue.

52      Deuxièmement, le requérant admet que le mot « loulou » n’a pas de signification en anglais et fait valoir que le mot « lulu » signifie dans cette langue « quelque chose d’extrêmement bon ou d’extrêmement mauvais ». Or, ainsi qu’il ressort de l’extrait du dictionnaire produit par le requérant à l’appui de cette dernière allégation, le mot « lulu » est un mot d’argot anglais américain vieilli.

53      Dès lors, s’il est possible que certains consommateurs anglophones dans l’Union comprennent le mot « lulu » selon sa définition visée ci-dessus, cette appréciation ne saurait être retenue pour une grande partie du public pertinent. Au contraire, il s’agira, pour une grande partie de ce public, d’un terme fantaisiste dénué de contenu sémantique.

54      En revanche, le requérant fait valoir à juste titre que la partie anglophone du public pertinent est susceptible de comprendre la marque antérieure comme désignant quelque chose appartenant à une personne appelée Lulu. En effet, eu égard à la construction du génitif des noms propres en anglais, l’apostrophe accolée au mot « lulu » et suivie du « s » dans la marque antérieure sera comprise par cette partie du public comme une référence à une personne appelée Lulu au possessif [voir, en ce sens, arrêt du 23 février 2022, Ancor Group/EUIPO – Cody’s Drinks International (CODE-X), T‑198/21, EU:T:2022:83, point 34].

55      Toutefois, cette circonstance, relevée à juste titre par la chambre de recours au point 19 de la décision attaquée, demeure sans influence sur la conclusion selon laquelle aucune similitude ne pouvait être retenue entre les signes en conflit sur le plan conceptuel.

56      Enfin, les arguments du requérant fondés sur des décisions antérieures de l’EUIPO doivent être écartés pour les motifs exprimés au point 34 ci-dessus.

57      En conséquence, les arguments du requérant doivent être écartés.

 Sur le risque de confusion

58      Le requérant conteste l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent. À cette fin, il réitère en substance les arguments par lesquels il a contesté la comparaison des signes effectuée par la chambre de recours.

59      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement (arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, VENADO avec cadre e.a., T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74).

60      Il ressort des points 27 et 28 de la décision attaquée que la chambre de recours a apprécié l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit de la partie anglophone du public pertinent en tenant compte, dans la marque demandée, du caractère distinctif élevé du mot « loulou » et du caractère descriptif du mot « studio », de l’identité ou de la similitude, au moins faible, des produits et des services en cause, du caractère distinctif normal de la marque antérieure, du niveau d’attention moyen du public pertinent, ainsi que du degré moyen de similitude visuelle et du degré élevé de similitude phonétique entre les signes en conflit.

61      Or, ainsi qu’il résulte des motifs du présent arrêt, ces appréciations n’ont pas été contestées ou ne sont pas entachées d’erreur.

62      En outre, il convient de rappeler que la chambre de recours a considéré qu’aucune similitude ne pouvait être retenue entre les signes en conflit sur le plan conceptuel. Il s’ensuit que l’appréciation portée par la chambre de recours quant à l’existence d’un risque de confusion n’est pas entachée d’erreur.

63      Dès lors, il convient d’écarter le moyen unique et, en conséquence, de rejeter le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

64      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Le requérant ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      M. Ugo Bensoussan est condamné aux dépens.

Spielmann

Mastroianni

Brkan

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 8 février 2023.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.