Language of document : ECLI:EU:T:2010:265

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

30 juin 2010(*)

« Référé – Demande de mesures provisoires – Méconnaissance des exigences de forme – Irrecevabilité »

Dans l’affaire T‑61/10 R,

Fernando Marcelino Victoria Sánchez, demeurant à Séville (Espagne), représenté initialement par MN. Domínguez Varela, puis par MP. Suarez Plácido, avocats,

partie requérante,

contre

Parlement européen, représenté par MM. N. Lorenz, N. Görlitz et Mme P. López-Carceller, en qualité d’agents,

et

Commission européenne, représentée par Mmes L. Lozano Palacios et I. Martínez del Peral, en qualité d’agents,

parties défenderesses,

ayant pour objet une demande de mesures provisoires visant à garantir l’intégrité physique du requérant, ses droits fondamentaux et ceux des citoyens européens qui pourraient être affectés,

LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

rend la présente

Ordonnance

Faits à l’origine du litige, procédure et conclusions des parties

1        Le requérant, M. Fernando Marcelino Victoria Sánchez, contrôleur aérien, soutient être impliqué sans le vouloir dans une affaire de corruption. Il affirme avoir décrit l’affaire en cause dans une demande introduite auprès du Parlement européen.

2        Le requérant fait référence à un écrit qui révélerait que, depuis les années 60, d’anciens hauts fonctionnaires du gouvernement et des avocats très connus en Espagne auraient organisé une association illicite liée aux services sanitaires, avec l’objectif de frauder le fisc espagnol.

3        Selon le requérant, l’existence de l’association illicite qu’il a dénoncée a été ignorée du fait des agissements d’une « superstructure », constituée par un ensemble de hauts fonctionnaires du gouvernement espagnol, d’avocats, de juges, de procureurs, ainsi que de membres des autorités sanitaires et des médias. Des membres de cette « superstructure » l’auraient contacté en 2006 pour obtenir son silence en ce qui concerne l’affaire en cause, en exerçant des menaces sur sa vie et sur celle de son entourage.

4        Le requérant affirme avoir introduit des recours devant la Cour européenne des droits de l’homme, ainsi que des plaintes et des demandes d’ouverture d’une enquête pénale devant les autorités nationales. Il souligne qu’il fait lui-même l’objet de poursuites pénales qu’il estime contraires au droit de l’Union européenne (les chefs d’accusation ne seraient toutefois pas précisés).

5        Le requérant a demandé, par courrier, à la Commission des Communautés européennes, de garantir son intégrité physique, craignant que la « superstructure » susmentionnée porte atteinte à celle-ci voire menace directement sa vie.

6        Le requérant se plaint, en outre, de la promulgation, par les autorités espagnoles, d’une réglementation relative aux contrôleurs aériens qui réduirait leur indépendance et leurs salaires.

7        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 8 février 2010, le requérant a introduit un recours contre l’inaction du Parlement et de la Commission.

8        Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 16 février 2010, le requérant a introduit la présente demande en référé.

9        Le requérant conclut à ce qu’il plaise au président du Tribunal d’adopter toutes les mesures provisoires adéquates pour garantir son intégrité physique.

10      Le Parlement et la Commission concluent à ce qu’il plaise au président du Tribunal de rejeter la demande en référé comme étant irrecevable et, en tout état de cause, comme non fondée et de condamner le requérant aux dépens.

 En droit

11      Les compétences du Tribunal sont celles énumérées à l’article 256 TFUE, tel que précisé par l’article 51 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et par l’article 1er de l’annexe I dudit statut. En application de ces dispositions, le Tribunal est compétent pour connaître des litiges relatifs à l’application de l’article 265 TFUE et pour prescrire les mesures provisoires nécessaires au titre de l’article 279 TFUE.

12      Dès lors que le non-respect du règlement de procédure du Tribunal constitue une fin de non-recevoir d’ordre public, il appartient au juge des référés d’examiner d’office, in limine litis, si les dispositions applicables de ce règlement ont été respectées (ordonnances du président du Tribunal du 7 mai 2002, Aden e.a./Conseil et Commission, T‑306/01 R, Rec. p. II‑2387, point 43, et du 2 août 2006, BA.LA. Di Lanciotti Vittorio e.a./Commission, T‑163/06 R, non publiée au Recueil, point 35).

13      À cet égard, l’article 104, paragraphe 2, du règlement de procédure dispose que les demandes de mesures provisoires doivent spécifier l’objet du litige, les circonstances établissant l’urgence, ainsi que les moyens de fait et de droit justifiant à première vue l’octroi de la mesure provisoire à laquelle elles concluent. Ainsi, le sursis à exécution et les autres mesures provisoires peuvent être accordés par le juge des référés s’il est établi que leur octroi est justifié à première vue en fait et en droit (fumus boni juris) et qu’ils sont urgents en ce sens qu’il est nécessaire, pour éviter un préjudice grave et irréparable aux intérêts de la partie qui les sollicite, qu’ils soient prononcés et produisent leurs effets avant même la décision principale. Ces conditions sont cumulatives, de sorte que les mesures provisoires doivent être rejetées dès lors que l’une d’elles fait défaut [ordonnance du président de la Cour du 14 octobre 1996, SCK et FNK/Commission, C‑268/96 P(R), Rec. p. I‑4971, point 30].

14      En outre, en vertu de l’article 104, paragraphe 3, du règlement de procédure, la demande doit notamment être présentée par acte séparé et, conformément à l’article 44, paragraphe 1, sous c) de ce même règlement, toute requête doit indiquer l’objet du litige et contenir un exposé sommaire des moyens invoqués.

15      Il découle d’une lecture combinée de ces dispositions du règlement de procédure qu’une demande relative à des mesures provisoires doit, à elle seule, permettre à la partie défenderesse de préparer ses observations et au juge des référés de statuer sur la demande, le cas échéant, sans autres informations à l’appui. Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il faut, pour qu’une telle demande soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celle-ci se fonde ressortent d’une façon cohérente et compréhensible du texte même de la demande en référé. Si ce texte peut être étayé et complété sur des points spécifiques par des renvois à des passages déterminés de pièces qui y sont annexées, un renvoi global à d’autres écrits, même annexés à la demande en référé, ne saurait pallier l’absence des éléments essentiels dans celle-ci [ordonnances du président du Tribunal du 15 janvier 2001, Stauner e.a./Parlement et Commission, T‑236/00 R, Rec. p. II‑15, point 34, et Aden e.a./Conseil et Commission, précitée, point 52 ; voir, également, ordonnance du président de la Cour du 30 avril 2010, Ziegler/Commission, C‑113/09 P(R), non publiée au Recueil, point 13].

16      En l’espèce, s’agissant de la condition relative à la justification des mesures à première vue en fait et en droit (fumus boni juris), force est de relever que le requérant n’y consacre aucun argument.

17      Le requérant ne mentionne, en particulier, aucune disposition du droit de l’Union que le Parlement ou la Commission auraient violée et s’abstient de préciser l'inaction reprochée à ces institutions. En outre, le rôle que le Parlement ou la Commission pourraient prendre dans le contexte de ces mesures provisoires est difficilement perceptible, le requérant semblant d’ailleurs imputer sa situation actuelle au comportement des seules autorités espagnoles.

18      Il résulte de cette absence d'arguments concernant la condition fumus boni juris qu'il est impossible de comprendre, à la lecture de la demande de mesures provisoires, la nature des mesures provisoires demandées (voir, en ce sens, ordonnances du président du Tribunal du 2 juillet 2004, Bactria/Commission, T‑76/04 R, Rec. p. II‑2025, point 50, et du 17 décembre 2009, Vereniging Milieudefensie et Stichting Stop Luchtverontreiniging Utrecht/Commission, T‑396/09 R, non publiée au Recueil, point 36).

19      Partant, la présente demande en référé ne satisfait manifestement pas aux exigences de l’article 104, paragraphes 2 et 3, du règlement de procédure et doit donc être rejetée comme irrecevable.

Par ces motifs,

LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

ordonne :

1)      La demande en référé est rejetée.

2)      Les dépens sont réservés.

Fait à Luxembourg, le 30 juin 2010.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       M. Jaeger


* Langue de procédure : l’espagnol.