Language of document : ECLI:EU:T:2007:36

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

7 février 2007 (*)

« Fonctionnaires – Réaffectation d’un directeur en qualité de conseiller principal – Intérêt du service – Équivalence des emplois – Réorganisation d’Eurostat – Recours en annulation – Recours en indemnité »

Dans l’affaire T‑339/03,

Gabrielle Clotuche, fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Bruxelles (Belgique), représentée par Mes P.‑P. Van Gehuchten, J. Sambon, G. Demez et P. Reyniers, avocats,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. J. Currall et H. Krämer, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet, d’une part, une demande d’annulation de la décision de la Commission du 9 juillet 2003 de réaffecter la requérante d’un poste de directeur à un poste de conseiller principal et de la décision de la Commission du 1er octobre 2003 portant réorganisation d’Eurostat, en ce qu’elle ne comporte aucune mesure de réaffectation de la requérante en tant que directeur, et, d’autre part, une demande en réparation du préjudice moral,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (troisième chambre),

composé de M. M. Jaeger, président, Mme V. Tiili et M. O. Czúcz, juges,

greffier : M. I. Natsinas, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 15 février 2006,

rend le présent

Arrêt

 Faits à l’origine du recours

1        La requérante était, à l’époque des faits de l’espèce, fonctionnaire de grade A 2 à la Commission. Du 7 juillet 1997 au 15 janvier 2003, elle était affectée à la direction générale (DG) « Emploi ». Elle a été mutée, avec effet au 16 janvier 2003, à Eurostat (office statistique des Communautés européennes) en tant que directeur de la direction « Statistiques sociales ».

2        Sur la base de deux rapports sur la gestion financière et le contrôle d’Eurostat, établis par les services internes de la Commission, cette dernière disposait, à partir du mois de juillet 2003, d’informations démontrant prima facie qu’auraient été commises au sein d’Eurostat une série d’infractions sérieuses au règlement (CE, Euratom) n° 1605/2002 du Conseil, du 25 juin 2002, portant règlement financier applicable au budget général des Communautés européennes (JO L 248, p. 1), d’application à compter du 1er janvier 2003.

3        Lors d’une réunion du 9 juillet 2003, la Commission a décidé d’établir une équipe opérationnelle multidisciplinaire, dite « task-force », ayant pour mission de conduire une enquête administrative (ci-après la « task‑force »). Il a également été décidé de réaffecter, avec mention de leur grade, les six directeurs d’Eurostat, y compris la requérante, à des fonctions de « conseiller principal » créées à cet effet au sein d’Eurostat (ci-après la « décision de réaffectation du 9 juillet 2003 »). Le procès-verbal de cette réunion (ci-après le « procès-verbal du 9 juillet 2003 ») indique :

« [L]es mesures [à prendre] impliquent notamment :

–        l’ouverture immédiate de trois procédures disciplinaires par M. Kinnock en sa qualité d’autorité investie du pouvoir de nomination ;

–        en accord avec l’[Office européen de lutte antifraude], la création d’une task-force multidisciplinaire pour prendre en charge les aspects internes et externes des enquêtes actuellement gérées par l’[Office européen de lutte antifraude] seul. La task-force sera également chargée de conduire une enquête administrative complète dans le but d’évaluer les responsabilités du personnel impliqué dans toute possible irrégularité financière à Eurostat ;

–        […]

–        provisoirement et dans une première étape, le déplacement des directeurs d’Eurostat ;

–        […]

La Commission [...] :

–        approuve le plan d’action décrit dans le document SEC (2003) 832 ;

–        décide la mutation avec son emploi dans l’intérêt du service, au titre de l’article 7 du statut, de M. [V. A.] et sa confirmation comme directeur général d’Eurostat […]

–        décide la mutation avec leur emploi dans l’intérêt du service, au titre de l’article 7 du statut, de tous les directeurs actuels d’Eurostat sur des fonctions de conseillers principaux créées au sein d’Eurostat.

Ces décisions prennent effet immédiatement. Comme suite aux observations de M. Solbes et dans le souci du bon fonctionnement du service, la Commission demande que des clarifications soient rapidement apportées concernant la situation de ces directeurs de façon à permettre leur éventuelle reprise de fonction dès que possible. »

4        Le procès-verbal du 9 juillet 2003 se réfère à une communication à la Commission de M. Kinnock, vice-président de la Commission, ayant pour objet les « Investigations Eurostat » [document SEC (2003) 832 ; ci-après la « communication de M. Kinnock »], et qui a été envoyée au personnel d’Eurostat le même jour. Dans cette communication, il est préconisé ce qui suit :

« […] la Commission doit maintenant agir de manière décisive et adopter un paquet intégré de mesures profondes pour faire face à la situation.

Il est, dès lors, proposé que les mesures suivantes soient prises :

[…]

Une première analyse des éléments disponibles amène à la conclusion que, dans les circonstances actuelles, il est de l’intérêt de la Commission en tant qu’institution de déplacer un certain nombre de fonctionnaires d’Eurostat qui occupent actuellement des fonctions de management vers des fonctions de conseillers. Provisoirement et dans une première étape, cette mesure concerne tous les directeurs actuels […] Durant le déroulement de l’enquête, la Commission pourra décider de changements ou de compléments nécessaires ou appropriés à ces mesures.

[…] »

5        Dans un communiqué de presse du 9 juillet 2003, la Commission a indiqué :

« La Commission a ouvert des procédures disciplinaires contre trois fonctionnaires de la Commission. À titre conservatoire, un certain nombre de dirigeants d’Eurostat seront mutés et il leur sera confié des fonctions de conseillers.

S’il se révèle qu’un membre faisant ou ayant fait partie du personnel d’Eurostat a commis une infraction au règlement financier et au statut du personnel, il fera l’objet d’une procédure disciplinaire. La Commission tient à souligner que les décisions d’ouverture d’une procédure disciplinaire ou de mutation de fonctionnaires sont prises sans préjudice du principe de la présomption d’innocence.

Par mesure de prévention, toutes les archives locales et centrales d’Eurostat ont été mises en lieu sûr mardi soir. Le directeur général faisant fonction a demandé à tout le personnel d’encadrement de répondre à une série de questions concernant les allégations d’irrégularités.

[…] [la] task-force procédera aussi à une enquête administrative de grande envergure pour cerner les responsabilités individuelles d’autres agents impliqués dans d’éventuelles irrégularités financières.

[…]

Enfin, la Commission a approuvé la création en son sein d’un panel des irrégularités financières (PIF), qui appréciera les infractions potentielles au règlement financier commises par omission par des agents et adressera à la direction des avis consultatifs recommandant des mesures à prendre […] »

6        Le 14 juillet 2003, la requérante a été entendue par la task-force.

7        Le 16 juillet 2003, la commission du contrôle budgétaire du Parlement européen s’est réunie et a procédé à un échange de vues sur le dossier Eurostat avec, notamment, M. Kinnock et M. Solbes, membre de la Commission. Il ressort du rapport de cette réunion que M. Kinnock a rappelé que « tous les directeurs d’Eurostat [avaient] été placés à des postes de conseils n’impliquant pas de fonction managériale et [qu’]un ‘screening’ [avait] été entrepris afin de permettre à la Commission d’évaluer leur ‘réinstallation’ pour autant qu’elle soit justifiée ». Après avoir indiqué que « [l]es analyses nécessaires [étaient] attendues pour le 23 juillet », il a également constaté « qu’il fallait respecter la présomption d’innocence et l’ensemble des procédures garantissant les droits de la défense ».

8        Le 23 juillet 2003, la Commission a décidé de maintenir dans leurs fonctions à Eurostat les conseillers principaux, en attendant les rapports de la task-force et du service d’audit interne, prévus pour le 29 septembre 2003. Le même jour, la Commission a rendu public le communiqué de presse suivant :

« La Commission a en outre décidé de maintenir dans les fonctions de conseillers les directeurs d’Eurostat transférés le 9 juillet [2003] […] La situation des directeurs et des chefs d’unité sera réexaminée à la lumière du rapport que la [task-force] doit remettre à la Commission le 29 septembre [2003]. »

9        En outre, selon le procès-verbal de la réunion du 23 juillet 2003, la Commission a pris note des informations communiquées par M. Solbes oralement et dans la note d’information SEC (2003) 892 concernant les mesures prises ou en voie d’être prises en vue d’assurer la continuité des activités d’Eurostat, d’une part, et la mise en œuvre et le suivi des conclusions des différents rapports d’audit sur la gestion financière du service, d’autre part (ci-après la « note d’information de M. Solbes »). Aux termes dudit procès-verbal, la Commission souligne la « nécessité de préparer dès à présent un plan de contingence afin d’être en mesure de faire face à toute conséquence en termes de management d’Eurostat qui pourrait être tirée de la conclusion des travaux en cours ».

10      Le 4 août 2003, la requérante a adressé une lettre à MM. Kinnock et Solbes aux termes de laquelle elle contestait la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 et le fait que la Commission n’ait pas décidé de la réintégrer lors de sa réunion du 23 juillet. MM. Kinnock et Solbes y ont répondu par lettre datée du 26 août 2003. Aux termes de cette lettre :

« […] le 23 juillet, le collège a décidé de maintenir dans leur statut actuel les conseillers [principaux] [d’Eurostat] jusqu’à la remise des rapports de [la task-force], prévue pour la fin du mois de septembre. Nous sommes certains que vous comprendrez que le collège a besoin des résultats de ces rapports avant de décider s’il y a lieu d’annuler les mesures provisoires adoptées. Une action précipitée n’est pas recommandée. Veuillez noter que nous avons souligné le fait que le principe de la présomption d’innocence est pleinement appliqué et continuera de l’être.

[…]

[…] nous devons insister sur le fait que le sérieux de la situation en cause implique que les mesures prises par la Commission constituent des précautions élémentaires et proportionnées. Je suis certain que les collègues comprendront que la protection de la réputation d’Eurostat, et en fait celle de la Commission, exige que tous soutiennent les mesures prises et garantissent leur succès.

Vous pouvez être rassurée quant au fait que M. Prodi, Mme Schreyer et nous-même allons recommander au collège l’adoption d’autres mesures appropriées à la première occasion possible mais une telle opportunité ne peut se présenter que si elle est compatible avec la position de précaution qui est manifestement essentielle. »

11      La décision de réaffectation du 9 juillet 2003 a été notifiée à la requérante, par lettre non datée, le 1er septembre 2003 (ci-après la « décision notifiée »). Celle-ci est libellée comme suit :

« L’autorité investie du pouvoir de nomination

[...]

considérant le [procès-verbal du 9 juillet 2003], qui a décidé la mutation avec leur emploi dans l’intérêt du service de tous les directeurs actuels d’Eurostat sur des fonctions de conseillers principaux créées à cet effet au sein de l’Eurostat,

décide :

Dans l’intérêt du service, l’affectation de [la requérante], fonctionnaire de grade A 2, est modifiée comme suit :

ancienne affectation :  directeur à la direction générale ‘Eurostat’, direction E ‘Statistiques sociales’ ;

nouvelle affectation :  conseiller principal à la direction générale ‘Eurostat’, auprès du directeur général.

Cette décision prend effet le 9 juillet 2003. »

12      Le 1er octobre 2003, la Commission a adopté une décision portant réorganisation d’Eurostat, avec effet au 1er novembre 2003 (ci-après la « décision de réorganisation »).

13      À cette occasion, la création de six fonctions de conseillers principaux de grade A 2, lesquelles étaient « appelées à disparaître à terme », a été « confirmée ». En outre, il a été décidé de supprimer une direction et une fonction de directeur ainsi que de publier en interne et en externe tous les postes de directeur de la nouvelle structure, à l’exception du poste de directeur de la direction « Ressources », lequel avait été entre-temps pourvu par mutation.

14      Selon la communication concernant le nouvel organigramme d’Eurostat, présentée par M. Kinnock le 30 septembre 2003 (ci-après la « communication sur le nouvel organigramme) :

« Suite aux décisions prises par la Commission le 9 juillet 2003 puis le 23 juillet concernant Eurostat et comme annoncé dans la [note d’information] de M. Solbes [...], il apparaît nécessaire d’adapter l’organigramme d’Eurostat.

Comme expliqué dans la [note d’information de M. Solbes], Eurostat est confronté à un double défi :

–        assurer la continuité de ses activités, conformément à sa lettre de mission et à son programme de travail ;

–        assurer la mise en œuvre et le suivi de certaines mesures contenues dans divers rapports d’audit concernant la gestion financière d’Eurostat.

La présente proposition de modification de l’organigramme est une des mesures envisagées pour faire face à ces défis […]

[…] cette organisation est motivée par la nécessité de :

–        recentrer Eurostat sur ses activités de base pour la Commission et les États membres […]

–        simplifier la structure organisationnelle, en la rendant plus transparente et cohérente avec les activités principales du service […]

–        répondre aux défis de l’élargissement […]

La traduction de ces objectifs dans la nouvelle organisation s’articule autour de deux axes majeurs :

–        la reconstitution des directions autour des activités et politiques principales de l’Union européenne ;

–        le renforcement de la capacité de gestion financière et de contrôle d’Eurostat, en particulier au niveau du directeur général.

[…]

S’agissant de l’encadrement supérieur, il est proposé – étant donné les exigences qu’impliquent les nouvelles tâches et responsabilités des différentes directions – de publier tous les postes de directeur de la nouvelle structure. Afin d’offrir un panel de candidatures disposant de hautes qualifications et en provenance d’horizons variés, les postes seraient publiés simultanément en interne (au titre de l’article 29, paragraphe 1, sous a) et c), du statut [des fonctionnaires des Communautés européennes]) et en externe (article 29, paragraphe 2), à l’exception du poste de directeur A ‘Ressources’, qui sera – sur proposition ultérieure du directeur général – publié en interne ou pourvu par mutation.

Les conseillers principaux sont confirmés dans leur fonction. Ils pourront, le cas échéant – sur proposition du directeur général en accord avec le directeur général de la DG [‘Personnel et administration’] et les commissaires de tutelle –, être désignés comme directeur faisant fonction en attendant le pourvoi des postes publiés.

Le bilan en terme de fonction d’encadrement est le suivant :

–        le nombre d’unités reste le même (34 unités) ;

–        suppression d’une fonction de directeur A 2 (passage de 7 à 6 directions) ;

–        confirmation de la création provisoire de 6 fonctions A 2 de conseillers principaux, qui sont appelées à disparaître à terme.

Il est ainsi proposé à la Commission de donner son accord sur :

–        cette réorganisation qui entrera en vigueur 1er novembre 2003 ;

–        la suppression d’une direction et d’une fonction de directeur de grade A 2 ;

–        la décision de publication des emplois de directeurs de grade A 2 et le texte des avis de vacance figurant en annexe III […] »

15      En vertu du procès-verbal de la réunion de la Commission du 1er octobre 2003 (ci-après le « procès-verbal du 1er octobre 2003 ») :

« La Commission prend note des informations communiquées par M. Kinnock et M. Solbes concernant les modifications proposées à l’organigramme d’Eurostat. S’appuyant sur les enseignements tirés des problèmes rencontrés dans la gestion financière passée d’Eurostat ainsi que sur la nécessité d’assurer la production statistique, le nouvel organigramme s’articule autour de deux axes majeurs portant sur la reconstitution des directions autour des activités et politiques principales de l’Union européenne, d’une part, et le renforcement de la capacité de gestion financière et de contrôle d’Eurostat, en particulier au niveau du directeur général, d’autre part.

[…] la Commission :

–        approuve, avec date d’effet au 1er novembre 2003, la modification de l’organigramme d’Eurostat telle que [décrite dans la communication sur le nouvel organigramme] […] ;

–        approuve la suppression d’une direction et d’une fonction de directeur de grade A 2 avec effet immédiat ;

–        approuve, avec effet immédiat, la publication des avis de vacance pour les postes de directeurs des directions [‘Méthodologie et outils statistiques’, ‘Statistiques économiques et monétaires’, ‘Statistiques du marché intérieur’, ‘Statistiques agriculture, pêche, fonds structurels, environnement’ et ‘Statistiques des relations extérieures’ d’Eurostat] simultanément au titre de l’article 29, paragraphe 1, sous a) et c), et paragraphe 2, du statut [des fonctionnaires des Communautés européennes]. »

16      Le 4 octobre 2003, la requérante a introduit une réclamation sur la base de l’article 90, paragraphe 2, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes, dans sa version applicable à la présente espèce (ci-après le « statut »), contre la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 et contre la décision de réorganisation.

17      L’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») a rejeté cette réclamation par décision du 18 février 2004.

18      Le 20 avril 2004, la Commission a décidé de détacher la requérante, dans l’intérêt du service, auprès de la Confédération européenne des syndicats (CES), à partir du 1er mai 2004, pour une durée de deux ans (ci-après la « décision de détachement »).

 Procédure et conclusions des parties

19      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 6 octobre 2003, la requérante a introduit le présent recours.

20      Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le même jour, la requérante a introduit une demande visant notamment à obtenir le sursis à l’exécution de la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 et de la décision de réorganisation.

21      Conformément à l’article 91, paragraphe 4, du statut, la procédure au principal a, par décision du greffier du 7 octobre 2003, été suspendue jusqu’à l’adoption d’une décision explicite ou implicite de rejet de la réclamation de la requérante contre la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 et contre la décision de réorganisation.

22      Par ordonnance du 25 novembre 2003, Clotuche/Commission (T‑339/03 R, RecFP p. I‑A‑297 et II‑1423), le président du Tribunal a rejeté la demande de sursis à exécution et a réservé les dépens.

23      En annexe à son mémoire en défense du 7 mai 2004, la Commission a communiqué au Tribunal copie de la décision du 18 février 2004 de l’AIPN rejetant la réclamation de la requérante.

24      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal a décidé d’ouvrir la procédure orale et a, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 de son règlement de procédure, invité la Commission à produire certains documents et à répondre à certaines questions écrites du Tribunal. Elle a déféré à ces demandes.

25      La demande de huis clos formée par la Commission a été rejetée.

26      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales du Tribunal lors de l’audience du 15 février 2006.

27      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 ;

–        annuler la décision de réorganisation en ce qu’elle ne comporte, la concernant, aucune mesure de réaffectation en qualité de directeur ;

–        condamner la Commission à lui payer, au titre de la réparation du préjudice moral, la somme de 25 000 euros ;

–        condamner la Commission aux dépens.

28      Dans son mémoire en réplique, la requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal condamner la Commission à lui payer, au titre de la réparation du préjudice matériel, une somme correspondant à l’augmentation du traitement mensuel dont elle aurait dû bénéficier depuis le 1er mai 2004 en application de l’article 7, paragraphe 4, de l’annexe XIII du statut des fonctionnaires des Communautés européennes, dans sa version applicable à compter du 1er mai 2004 (ci-après le « nouveau statut »).

29      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        statuer sur les dépens comme de droit.

 Sur la demande visant à l’annulation de la décision de réaffectation du 9 juillet 2003

1.     Observation préliminaire

30      Il y a lieu de relever que le changement de situation de la requérante a été qualifié dans certaines pièces du dossier, notamment dans le procès-verbal du 9 juillet 2003 et dans la décision notifiée, ainsi que par la requérante elle-même dans la requête, de mutation. La Commission a, quant à elle, fait référence, dans ses écritures, à la réaffectation de la requérante, qualification que la requérante a reprise dans son mémoire en réplique.

31      À cet égard, il convient de rappeler qu’il résulte du système du statut qu’il n’y a lieu à mutation, au sens propre du terme, qu’en cas de transfert d’un fonctionnaire à un emploi vacant. Il en découle que toute mutation proprement dite est soumise aux formalités prévues par les articles 4 et 29 du statut. En revanche, ces formalités ne sont pas applicables en cas de réaffectation du fonctionnaire, en raison du fait qu’un tel transfert ne donne pas lieu à une vacance d’emploi (arrêt de la Cour du 9 août 1994, Rasmussen/Commission, C‑398/93 P, Rec. p. I‑4043, point 11 ; arrêts du Tribunal du 15 septembre 1998, De Persio/Commission, T‑23/96, RecFP p. I‑A‑483 et II‑1413, point 79, et du 6 mars 2001, Campoli/Commission, T‑100/00, RecFP p. I‑A‑71 et II‑347, point 29).

32      Or, il ressort du dossier que la requérante a été transférée avec son emploi en vue d’exercer une fonction de conseiller principal nouvellement créée, ce qui n’a pas donné lieu à l’ouverture d’une vacance d’emploi et ne constitue donc pas une mutation au sens du statut, mais une réaffectation.

33      La qualification erronée de la modification des fonctions de la requérante qui figure tant dans le procès-verbal du 9 juillet 2003 que dans la décision notifiée ne saurait toutefois, en soi, affecter la légalité de la décision de réaffectation du 9 juillet 2003, ce que la requérante ne prétend d’ailleurs pas.

34      Cette qualification n’a pas non plus d’incidence sur la portée de l’argumentation développée par la requérante. En effet, il convient de relever que, dans le cadre des moyens invoqués par celle-ci à l’appui de sa demande en annulation de la décision de réaffectation du 9 juillet 2003, les droits et obligations de l’administration sont semblables en ce qui concerne tant une mutation qu’une réaffectation (voir, en ce sens, arrêt Campoli/Commission, précité, point 31).

35      Bien que le statut ne connaisse pas le terme « réaffectation », il ressort de la jurisprudence que les décisions de réaffectation sont soumises, au même titre que les mutations, en ce qui concerne la sauvegarde des droits et intérêts légitimes des fonctionnaires concernés, aux règles de l’article 7, paragraphe 1, du statut, en ce sens notamment que la réaffectation des fonctionnaires ne peut se faire que dans l’intérêt du service et dans le respect de l’équivalence des emplois. Quelle que soit donc la qualification des actes litigieux, c’est à la lumière des principes de l’article 7, paragraphe 1, du statut que doivent être examinés les moyens soulevés par la requérante (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 24 février 1981, Carbognani et Coda Zabetta/Commission, 161/80 et 162/80, Rec. p. 543, point 21).

2.     Sur la recevabilité

 Arguments des parties

36      La Commission considère que la requérante n’a plus intérêt à agir contre la décision de réaffectation du 9 juillet 2003.

37      Selon la Commission, la décision de détachement a pour conséquence que la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 et la décision de réorganisation, pour autant que cette dernière constitue un acte confirmatif de la première, cessent de produire des effets juridiques à l’égard de la requérante. Dès lors, celle-ci n’aurait plus intérêt à demander l’annulation de cette décision. La Commission rappelle que, pour qu’un fonctionnaire puisse poursuivre un recours tendant à l’annulation d’une décision de l’AIPN, il faut qu’il conserve un intérêt personnel à l’annulation de la décision attaquée, et que, faute d’un intérêt à agir actuel de la requérante, il n’y a plus lieu de statuer sur le recours (arrêt du Tribunal du 24 avril 2001, Torre e.a./Commission, T‑159/98, RecFP p. I‑A‑83 et II‑395, points 30 et 31).

38      La requérante fait valoir que la thèse de la Commission est contredite par l’article 37 du statut, aux termes duquel le « fonctionnaire [détaché] continue à bénéficier, dans les conditions prévues aux articles 38 et 39, de tous ses droits et reste soumis aux obligations qui lui incombent en raison de son appartenance à son institution d’origine ». Elle demeurerait hiérarchiquement rattachée à Eurostat en qualité de conseiller principal et serait ainsi appelée à réintégrer immédiatement la fonction de conseiller principal à Eurostat à l’expiration de son détachement. Elle conserverait donc un intérêt à agir contre la décision de réaffectation.

 Appréciation du Tribunal

39      Il ressort d’une jurisprudence constante que, pour qu’un fonctionnaire puisse poursuivre un recours tendant à l’annulation d’une décision de l’AIPN, il faut qu’il conserve un intérêt personnel à l’annulation de la décision attaquée même après l’introduction de son recours (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 29 mai 1997, Contargyris/Conseil, T‑6/96, RecFP p. I‑A‑119 et II‑357, point 32, et Torre e.a./Commission, précité, points 28 à 31).

40      En l’espèce, la Commission a décidé de détacher la requérante, dans l’intérêt du service, auprès de la CES, à partir du 1er mai 2004, pour une durée de deux ans.

41      Or, il y a lieu de rappeler que, comme le souligne la requérante, en vertu de l’article 37 du statut, dans la position du détachement, le fonctionnaire continue à bénéficier, dans les conditions prévues aux articles 38 et 39 du statut, de tous ses droits et reste soumis aux obligations qui lui incombent en raison de son appartenance à son institution d’origine. En outre, lorsque le détachement est décidé dans l’intérêt du service, en vertu de l’article 38, sous f) et g), du statut, le fonctionnaire détaché conserve son emploi, ses droits à l’avancement et sa vocation à la promotion, et, à l’expiration du détachement, le fonctionnaire réintègre immédiatement l’emploi qu’il occupait antérieurement.

42      Par ailleurs, si la demande d’annulation de la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 était accueillie, la requérante devrait être considérée, au jour de son détachement auprès de la CES, comme n’ayant jamais quitté son emploi de directeur.

43      Dès lors, à l’expiration de son détachement, elle devrait être considérée comme réintégrant immédiatement son emploi de directeur, de sorte qu’elle dispose d’un intérêt à agir contre la décision de réaffectation.

44      Par conséquent, le recours est recevable en ce qu’il vise à l’annulation de la décision de réaffectation du 9 juillet 2003.

3.     Sur le fond

45      Les arguments de la requérante invoqués à l’appui de son recours en annulation de la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 peuvent être regroupés, en substance, en quatre moyens. Le premier moyen est tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, du statut, le deuxième, de la violation du principe d’égalité de traitement, le troisième, d’un détournement de pouvoir et de procédure ainsi que de la violation du devoir de sollicitude, du principe de bonne administration et du droit d’être entendue et, le quatrième, de la violation de l’obligation de motivation.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, du statut

46      La requérante soutient, en substance, que la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 n’est pas conforme à l’intérêt du service ni au principe de l’équivalence des emplois.

47      À cet égard, il convient de rappeler que, s’il est vrai que l’administration a tout intérêt à affecter les fonctionnaires en considération de leurs aptitudes et de leurs préférences personnelles, il ne saurait être reconnu pour autant aux fonctionnaires le droit d’exercer ou de conserver des fonctions spécifiques (arrêt Campoli/Commission, précité, point 71). Dès lors, même si le statut, en particulier son article 7, ne prévoit pas explicitement la possibilité de « réaffecter » un fonctionnaire, il ressort d’une jurisprudence constante que les institutions disposent d’un large pouvoir d’appréciation dans l’organisation de leurs services en fonction des missions qui leur sont confiées et dans l’affectation, en vue de celles-ci, du personnel qui se trouve à leur disposition, à la condition, cependant, d’une part, que cette affectation se fasse dans l’intérêt du service et, d’autre part, qu’elle respecte l’équivalence des emplois (arrêts de la Cour du 23 mars 1988, Hecq/Commission, 19/87, Rec. p. 1681, point 6, et du 7 mars 1990, Hecq/Commission, C‑116/88 et C‑149/88, Rec. p. I‑599, point 11 ; arrêts du Tribunal du 22 janvier 1998, Costacurta/Commission, T‑98/96, RecFP p. I‑A‑21 et II‑49, point 36, et du 26 novembre 2002, Cwik/Commission, T‑103/01, RecFP p. I‑A‑229 et II‑1137, point 30).

48      En l’espèce, il convient donc de déterminer si la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 satisfait à ces deux conditions.

 Sur l’intérêt du service

–       Arguments des parties

49      La requérante fait valoir que, à supposer même qu’elle puisse faire usage des prérogatives que lui reconnaît l’article 7 du statut pour procéder non pas à des mesures individuelles mais à une réaffectation collective, l’AIPN resterait tenue d’examiner pour chacun des intéressés si la mesure envisagée est nécessaire ou utile à l’objectif poursuivi. En l’espèce, la mise à l’écart de la requérante ne se justifierait ni à titre conservatoire ni en aucune autre manière.

50      La requérante fait valoir que ni la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 ni la décision de réorganisation ne contiennent des éléments permettant de conclure à l’existence d’un lien objectif entre l’intérêt du service et la décision de réaffectation. En réalité, ces décisions auraient essentiellement un caractère politique et médiatique, en ce qu’elles auraient eu pour but de montrer que la « Commission pren[ait] au sérieux le scandale Eurostat ».

51      La requérante estime que la Commission n’a jamais établi pourquoi la situation préexistante des directeurs pourrait s’avérer préjudiciable au bon déroulement des investigations. En effet, d’une part, les directeurs seraient restés à Eurostat et, d’autre part, les circuits financiers sous investigation se seraient trouvés, à l’époque des faits reprochés, sous le contrôle des chefs d’unité, qui n’auraient pas fait l’objet d’une mesure comparable ou parallèle.

52      En tout état de cause, l’affectation comme conseiller principal aurait été conditionnée au résultat des investigations visant à mettre en évidence le rôle des directeurs dans les irrégularités commises (« screening »), espéré pour le 23 juillet 2003. Or, à cette date, la Commission aurait décidé de maintenir les conseillers principaux dans leur fonction actuelle, dans l’attente des rapports de la task-force et du service d’audit interne prévus pour le 29 septembre 2003. Comme les enquêtes n’auraient pas mis en évidence de problème particulier, la réintégration des conseillers principaux dans leur emploi de directeur aurait dû être décidée à cette époque, et ce, en toute hypothèse, en ce qui concerne la requérante, laquelle aurait pris ses fonctions de directeur le 16 janvier 2003.

53      La Commission rappelle que les institutions disposent d’un large pouvoir d’appréciation dans l’organisation de leurs services en fonction des missions qui leur sont confiées et dans l’affectation, en vue de celles-ci, du personnel qui se trouve à leur disposition, à la condition, cependant, que cette affectation se fasse dans l’intérêt du service et dans le respect de l’équivalence des emplois (arrêt de la Cour du 12 novembre 1996, Ojha/Commission, C‑294/95 P, Rec. p. I‑5863, point 40, et arrêt du Tribunal du 28 mai 1998, W/Commission, T‑78/96 et T‑170/96, RecFP p. I‑A‑239 et II‑745, point 87).

54      L’intérêt du service justifierait la réaffectation d’un fonctionnaire, notamment lorsque le maintien de la situation préexistante serait préjudiciable au bon fonctionnement du service (arrêt W/Commission, précité, point 88). Selon la Commission, cette appréciation ne vaut pas seulement lorsque la situation préexistante est caractérisée par des tensions résultant de difficultés relationnelles internes, mais également dans toute autre situation préjudiciable ou exceptionnelle.

55      En l’espèce, la Commission serait parvenue à la conclusion que l’intérêt du service nécessitait la mise en place d’une task-force ayant comme mission d’établir un rapport qui devait lui permettre de prendre les mesures de gestion et d’organisation qui s’imposaient en vue d’assurer le respect de la réglementation financière et des règles afférentes à la bonne administration. Dans ces circonstances, elle aurait légitimement pu considérer que la sérénité et le bon déroulement de ces opérations, notamment les auditions des membres du personnel d’Eurostat, seraient mieux assurés si les directeurs en place à Eurostat avant l’adoption de ces mesures ne conservaient pas leurs fonctions de management pendant la durée de ces enquêtes. La Commission fait valoir, en effet, que, à la suite de leur réaffectation, les anciens directeurs ne faisaient plus directement partie de la chaîne hiérarchique de ce service, leur fonction consistant à conseiller le directeur général. C’est uniquement dans ce cadre et sur la base d’instructions ad hoc données par ce dernier que les conseillers principaux auraient pu recourir au soutien de la direction d’Eurostat à laquelle ils avaient antérieurement été affectés en tant que directeurs. L’objectif de la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 n’aurait donc aucunement été de « mettre fin aux malversations recherchées à Eurostat », mais seulement de rendre possible la conduite efficace et rapide de l’enquête administrative conduite par la task-force au sein d’Eurostat.

56      La Commission souligne que la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 avait pour objectif de rendre possible la conduite efficace et rapide des enquêtes nécessaires au sein d’Eurostat et non, comme le prétend la requérante, de montrer que « la Commission pren[ait] au sérieux le scandale Eurostat ». Quant au choix même de procéder auxdites enquêtes, la Commission ajoute qu’il n’est pas illégitime de prendre en considération également les critiques exprimées à son égard au sein du Parlement ainsi que dans les médias.

57      Selon la Commission, si l’intérêt du service justifie que l’on déplace un fonctionnaire afin de mettre fin à un conflit purement interne qui perturbe la sérénité du service, et cela sans que la responsabilité du fonctionnaire réaffecté soit démontrée, il est évident qu’un tel intérêt justifie également l’adoption d’une mesure qui vise à permettre qu’une enquête se déroule dans la sérénité, et cela toujours sans qu’aucune responsabilité soit attribuée au fonctionnaire réaffecté, relativement aux questions faisant l’objet de l’enquête. La Commission soutient que, dès lors que la situation préexistante pouvait s’avérer préjudiciable au bon déroulement des investigations qu’elle avait décidées, elle était en droit d’estimer, en vertu de son large pouvoir d’appréciation, que l’intérêt du service justifiait la réaffectation de la requérante en tant que conseiller principal.

58      En outre, l’objet de l’enquête conduite par la task-force ne signifierait nullement que l’« éloignement » de la requérante de ses fonctions de management, en vue de faciliter le bon déroulement de cette enquête, impliquerait la moindre suspicion à son égard concernant une éventuelle responsabilité d’une quelconque irrégularité financière. La Commission rappelle qu’une telle mesure de réaffectation peut même être prise indépendamment de la question de savoir si la personne concernée était ou non responsable de la situation préjudiciable au bon fonctionnement du service qui justifie cette mesure (arrêts Ojha/Commission, précité, point 41, et W/Commission, précité, point 88). En effet, le fait que l’AIPN a décidé de réaffecter tous les directeurs, indépendamment de la question de leur comportement individuel ou encore de la durée de leur affectation à Eurostat, confirmerait le caractère objectif de cette mesure, visant précisément à éviter toute mauvaise interprétation.

59      La Commission souligne qu’il n’est pas question en l’espèce de réaffectations collectives. Si tous les directeurs en place en juillet 2003 ont été réaffectés, ce serait, en effet, pour une raison identique, à savoir assurer la sérénité et le bon déroulement des enquêtes.

60      En tout état de cause, la requérante n’aurait produit aucun élément susceptible de démontrer l’existence d’une erreur manifeste commise à son égard par la Commission dans l’appréciation de l’intérêt du service.

61      Par ailleurs, la Commission souligne que la décision notifiée ne contient aucune indication quant à une limitation de la durée pendant laquelle cette décision produit ses effets. Dans le procès-verbal de la réunion du 9 juillet 2003, il ne serait question que d’une éventuelle réaffectation des conseillers principaux à leurs anciens emplois de directeurs. Bien que la Commission ait également considéré que les emplois des conseillers seraient « appelés à disparaître à terme », elle aurait, de la sorte, uniquement envisagé une éventuelle mutation ou réaffectation des titulaires desdits emplois. En revanche, le procès-verbal n’aurait eu ni pour objet ni pour effet de conférer un caractère temporaire à la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 en tant que telle.

–       Appréciation du Tribunal

62      Il y a lieu de rappeler que, compte tenu de l’étendue du pouvoir d’appréciation des institutions dans l’évaluation de l’intérêt du service, le contrôle du Tribunal portant sur le respect de la condition relative à l’intérêt du service doit se limiter à la question de savoir si l’AIPN s’est tenue dans des limites raisonnables, non critiquables, et n’a pas usé de son pouvoir d’appréciation de manière manifestement erronée (arrêts du Tribunal du 12 décembre 2000, Dejaiffe/OHMI, T‑223/99, RecFP p. I‑A‑277 et II‑1267, point 53, et du 21 septembre 2004, Soubies/Commission, T‑325/02, RecFP p. I‑A‑241 et II‑1067, point 50).

63      C’est à la lumière de ces principes et dans le cadre du contrôle restreint qu’ils assignent au Tribunal qu’il convient d’examiner la légalité de la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 au regard de l’intérêt du service.

64      À cet égard, il y a lieu de relever que la décision notifiée expose qu’il est dans l’intérêt du service de réaffecter la requérante en tant que conseiller principal auprès du directeur général d’Eurostat. Le procès-verbal du 9 juillet 2003, auquel se réfère cette décision, fait état de l’existence de carences et d’irrégularités au sein d’Eurostat appelant des mesures immédiates impliquant, notamment, l’ouverture de trois procédures disciplinaires, la création de la task-force et, « provisoirement et dans une première étape, le déplacement des directeurs d’Eurostat ».

65      Par ailleurs, ce même procès-verbal fait état de la décision de la Commission, en accord avec l’Office européen de lutte antifraude (OLAF), de créer « une task-force multidisciplinaire pour prendre en charge les aspects internes et externes des enquêtes actuellement gérées par l’OLAF seul ». La task-force devait être « également chargée de conduire une enquête administrative complète dans le but d’évaluer les responsabilités du personnel impliqué dans toute possible irrégularité financière à Eurostat ».

66      S’agissant de la décision de réaffecter les directeurs en place à des postes de conseillers principaux, ce document ajoute que, « comme suite aux observations de M. Solbes et dans le souci du bon fonctionnement du service, la Commission demande que des clarifications soient rapidement apportées concernant la situation de ces directeurs de façon à permettre leur éventuelle reprise de fonction dès que possible ».

67      Enfin, ledit procès-verbal renvoie à la communication M. Kinnock, aux termes de laquelle :

« […] la Commission doit maintenant agir de manière décisive et adopter un paquet intégré de mesures profondes pour faire face à la situation. Il est, dès lors, proposé que les mesures suivantes soient prises :

[…]

Une première analyse des éléments disponibles amène à la conclusion que, dans les circonstances actuelles, il est de l’intérêt de la Commission en tant qu’institution de déplacer un certain nombre de fonctionnaires d’Eurostat qui occupent actuellement des fonctions de management vers des fonctions de conseillers. Provisoirement et dans une première étape, cette mesure concerne tous les directeurs actuels […] Durant le déroulement de l’enquête, la Commission pourra décider de changements ou de compléments nécessaires ou appropriés à ces mesures […] »

68      La requérante prétend que l’argumentation de la Commission, présentée a posteriori, selon laquelle la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 trouve sa justification dans la volonté d’assurer la sérénité et le bon déroulement des enquêtes est incompatible avec les pièces du dossier, dont il ressortirait que ladite décision a été adoptée dans l’attente du résultat des investigations (« screening ») destinées à mettre en évidence l’éventuelle implication des directeurs dans les transactions irrégulières. Elle se fonde, à cet égard, sur les déclarations faites par M. Kinnock à la commission du contrôle budgétaire le 16 juillet 2003. À cette occasion, M. Kinnock a déclaré ce qui suit :

« [...] tous les directeurs d’Eurostat ont été placés à des postes de conseils n’impliquant pas de fonction managériale et un ‘screening’ a été entrepris afin de permettre à la Commission d’évaluer leur ‘réinstallation’ pour autant qu’elle soit justifiée […] Cette tâche est menée par la nouvelle task-force qui travaille avec le support de l’OLAF. Les analyses nécessaires sont attendues pour le 23 juillet et la Commission prendra ses décisions en tenant compte de l’implication des gestionnaires dans les transactions, leur responsabilité fonctionnelle et les conflits d’intérêt potentiels mais aussi sur la base des réponses fournies à un questionnaire détaillé envoyé par le nouveau directeur général [...] »

69      Le Tribunal considère toutefois que les justifications avancées par la requérante et par la Commission ne sont pas incompatibles. En effet, s’il ne semble pas exclu, à la lecture des documents cités ci-dessus, que la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 ait été prise en vue de procéder aux investigations (« screening ») destinées à mettre en évidence l’éventuelle implication de certains directeurs dans les irrégularités en cause, il n’en reste pas moins que la sérénité et le bon déroulement desdites investigations pouvait, dans l’attente de son résultat, constituer une justification de la décision de réaffectation du 9 juillet 2003.

70      Or, il y a lieu de rappeler que, conformément à la jurisprudence, la Commission dispose d’un large pouvoir d’appréciation dans l’évaluation de l’intérêt du service justifiant qu’il soit procédé à une réorganisation de ses services. Dans ces circonstances, le Tribunal considère que la Commission, en estimant que le bon déroulement des enquêtes, notamment des investigations destinées à évaluer le rôle éventuel des directeurs dans les irrégularités commises (« screening »), requérait la réaffectation de ces derniers, parmi lesquels la requérante, s’est tenue dans des limites raisonnables, non critiquables, et n’a pas usé de son pouvoir d’appréciation de manière manifestement erronée. En effet, la Commission a pu, à bon droit, estimer nécessaire, eu égard à la gravité et à l’urgence de la situation, de retirer auxdits directeurs les fonctions de management qu’ils occupaient en les réaffectant à des postes de conseillers principaux en vue de permettre à la task-force de procéder à ses enquêtes, et notamment à la détermination de l’éventuelle implication des directeurs dans les irrégularités identifiées dans les rapports établis par la DG « Budget » et par le service d’audit interne dont elle disposait au 9 juillet 2003. S’il est vrai que, d’une part, ces rapports faisaient état de ce que ces irrégularités auraient été commises jusqu’en 1999 et, d’autre part, la requérante n’a pris ses fonctions à Eurostat qu’au mois de janvier 2003, il ne saurait néanmoins être reproché à la Commission de ne pas avoir pris en compte, le 9 juillet 2003, la situation particulière de la requérante en la réaffectant au même titre que les autres directeurs. En effet, le fait que la requérante n’ait pas pu être impliquée dans les irrégularités en cause, ce qui n’est d’ailleurs pas contesté par la Commission, est indifférent à cet égard, compte tenu de ce que l’objectif poursuivi par les décisions de réaffectation n’était pas de sanctionner les directeurs impliqués dans lesdites irrégularités, mais de permettre le bon déroulement des enquêtes, notamment de celles (« screening ») destinées à mettre en évidence leur éventuelle responsabilité.

71      En outre, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence, des difficultés relationnelles internes ou externes, lorsqu’elles causent des tensions préjudiciables au bon fonctionnement du service, peuvent justifier la réaffectation d’un fonctionnaire dans l’intérêt du service. Une telle mesure peut même être prise indépendamment de la question de la responsabilité des incidents en cause (arrêt de la Cour du 12 juillet 1979, List/Commission, 124/78, Rec. p. 2499, point 13 ; arrêts Ojha/Commission, précité, point 42, et W/Commission, précité, point 88). Or, comme le fait observer la Commission, il y a lieu de considérer que, si l’intérêt du service justifie que l’on déplace un fonctionnaire afin de mettre fin à un conflit purement interne perturbant le bon fonctionnement du service, et cela sans qu’aucune responsabilité incombant au fonctionnaire réaffecté ne soit démontrée, ce même intérêt justifie également l’adoption d’une mesure visant à permettre qu’une enquête se déroule dans la sérénité, et cela toujours sans qu’aucune responsabilité ne soit attribuée au fonctionnaire réaffecté, relativement aux questions faisant l’objet de l’enquête.

72      S’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 n’aurait revêtu qu’un caractère provisoire, il convient de constater que la décision notifiée se réfère explicitement au procès-verbal du 9 juillet 2003, aux termes duquel les mesures à prendre par la Commission impliquent, notamment, « provisoirement et dans une première étape, le déplacement des directeurs d’Eurostat ». Contrairement aux affirmations de la Commission, on ne saurait donc déduire de la circonstance que la décision notifiée ne contient aucune indication explicite quant à la durée de ses effets que la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 n’avait pas de caractère provisoire. De même, si la partie décisionnelle du procès-verbal du 9 juillet 2003 ne mentionne, à strictement parler, aucune date fixe portant limitation des effets de la réaffectation des directeurs, il y a lieu de relever qu’il y est néanmoins précisé que « ces décisions prennent effet immédiatement » et que, « comme suite aux observations de M. Solbes et dans le souci du bon fonctionnement du service, la Commission demande que des clarifications soient rapidement apportées concernant la situation de ces directeurs de façon à permettre leur éventuelle reprise de fonction dès que possible ». Dans ces circonstances, la Commission ne saurait raisonnablement prétendre que la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 ne revêtait aucunement un caractère provisoire.

73      Toutefois, compte tenu de ce que la légalité d’un acte individuel doit être appréciée en fonction des éléments de fait et de droit existant à la date où l’acte a été pris (arrêt du Tribunal du 4 juin 2003, Del Vaglio/Commission, T‑124/01 et T‑320/01, RecFP p. I‑A‑157 et II‑767, point 77), la circonstance que la décision de réaffectation du 9 juillet 2003, censée être provisoire, a été maintenue lors de la réunion du 23 juillet 2003 ainsi qu’à l’occasion de l’adoption de la décision de réorganisation des services du 1er octobre 2003 ne saurait en soi affecter la légalité de la décision de réaffectation du 9 juillet 2003. Il en va de même des éléments que les enquêtes auraient éventuellement révélés postérieurement au 9 juillet 2003. À cet égard, il convient en outre de constater que la requérante, tout en reprochant à la Commission d’avoir omis de la réintégrer dans ses fonctions dès le premier examen de sa situation, n’a formulé aucun chef de conclusions tendant à l’annulation de la décision du 23 juillet 2003, relative au maintien en place des conseillers principaux dans l’attente des résultats de la task-force et du service d’audit interne.

74      Par conséquent, il convient de relever que, dès lors que la Commission avait constaté que la situation préexistante pouvait s’avérer préjudiciable au bon déroulement des investigations qu’elle avait décidées, elle était en droit d’estimer, en application de son large pouvoir d’appréciation, que l’intérêt du service justifiait une mesure de réaffectation de la requérante (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 16 avril 2002, Fronia/Commission, T‑51/01, RecFP p. I‑A‑43 et II‑187, point 55).

75      La requérante prétend que la Commission reste en défaut d’établir en quoi la situation préexistante des directeurs pouvait s’avérer préjudiciable au bon déroulement des investigations, alors que, par ailleurs, les directeurs sont restés à Eurostat et les circuits financiers sous investigations se sont trouvés, à l’époque des faits reprochés, sous le contrôle des chefs d’unité, qui, quant à eux, n’ont pas fait l’objet d’une mesure comparable.

76      À cet égard, le Tribunal considère que la Commission n’a pas dépassé les limites du large pouvoir d’appréciation dont elle jouit en la matière en considérant que la sérénité et le bon déroulement des enquêtes et, notamment, des auditions des membres du personnel d’Eurostat seraient mieux assurés si les directeurs en place à Eurostat avant l’adoption de ces mesures ne conservaient pas leurs fonctions de management pendant la durée desdites enquêtes. Ainsi, la Commission a pu estimer, sans entacher son appréciation d’une erreur manifeste, que le maintien en place des directeurs aurait constitué une situation préjudiciable au bon fonctionnement du service. En effet, ainsi que le fait observer la Commission, la réaffectation a eu pour conséquence que les anciens directeurs ne faisaient plus directement partie de la chaîne hiérarchique des services, leur fonction consistant à conseiller le directeur général. C’est ainsi uniquement dans ce cadre et sur la base d’instructions ad hoc données par ce dernier que les conseillers principaux pouvaient recourir au soutien de la direction d’Eurostat à laquelle ils avaient antérieurement été affectés en tant que directeurs. Il est indifférent, à cet égard, que, comme le prétend la requérante, les circuits financiers en cause aient été sous le contrôle des chefs d’unité, compte tenu de ce que la réaffectation des directeurs ne visaient pas à sanctionner ces derniers ou à éviter la continuation des irrégularités, mais à permettre que les enquêtes en cours se déroulent dans la sérénité.

77      Cette appréciation ne saurait être mise en cause par le prétendu caractère politique ou médiatique de la décision de réaffectation du 9 juillet 2003, invoqué par la requérante. En effet, dès lors que, ainsi qu’il a été exposé ci-dessus, l’intérêt du service justifiait à lui seul cette décision, les éventuelles considérations accessoires qui pourraient constituer des motifs de son adoption ne sauraient, en tout état de cause, affecter sa légalité.

78      Il résulte de ce qui précède que la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en estimant que l’intérêt du service justifiait la réaffectation de la requérante le 9 juillet 2003.

 Sur l’équivalence des emplois

–       Arguments des parties

79      La requérante fait valoir que la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 a été prise au mépris de l’équivalence des grades et des emplois et, plus particulièrement, de la correspondance entre le grade et la fonction.

80      La requérante relève que les fonctions des conseillers principaux ne préexistaient en aucune manière à la décision de réaffectation du 9 juillet 2003. Elles auraient ainsi été créées pour les besoins de la cause et n’auraient fait l’objet, ni le 9 juillet 2003 ni depuis lors, d’aucune description qui permettrait d’établir leur nécessité au regard de l’intérêt du service et le respect du principe d’équivalence. En outre, compte tenu de ce que les conseillers principaux seraient privés de toute fonction de management et d’encadrement, l’affectation en qualité de conseiller principal aurait porté atteinte aux droits statutaires de la requérante. En effet, ses nouvelles attributions seraient nettement en deçà de celles correspondant à son grade et à son emploi au regard de leur nature, de leur importance et de leur ampleur.

81      Dans son mémoire en réplique, la requérante conteste l’argument de la Commission selon lequel les tâches et les missions qui lui ont été confiées seraient en tous points conformes aux exigences statutaires. En effet, contrairement à la plupart de ses collègues, aucune tâche lui permettant d’exercer une mission en rapport avec son grade et son emploi ne lui aurait été confiée.

82      La Commission souligne que la requérante a fait l’objet d’une réaffectation avec son emploi. Étant donné qu’elle a gardé le même grade après sa réaffectation et qu’elle a été transférée avec son emploi, il apparaîtrait que l’équivalence des grades et des emplois a, par hypothèse, été respectée (arrêt Fronia/Commission, précité, point 51).

83      S’agissant de la prétendue absence de description des fonctions de conseiller principal, la Commission relève que, en vertu de l’annexe IV des dispositions générales d’exécution de l’article 5, paragraphe 4, du statut, cette dénomination, correspondant à l’emploi type « directeur », fait l’objet, dans la rubrique « Description de la fonction », de la mention suivante : « Fonctionnaire de haute qualification appelé à conseiller l’institution ou une direction générale dans un domaine déterminé ».

84      Quant au cas spécifique de la requérante, elle aurait eu effectivement comme mission de conseiller le directeur général d’Eurostat, M. V. A., dans l’exercice de ses fonctions ainsi que d’exécuter des tâches spécifiques de haut niveau. Il ressortirait des comptes rendus des réunions hebdomadaires de coordination auxquelles auraient participé M. V. A. et tous les conseillers principaux que ces derniers auraient eu pour mission, à titre d’exemple, de coordonner la préparation de documents en vue d’une réunion avec M. Solbes. La requérante aurait dès lors présenté, le 14 août 2003, une note de synthèse intitulée « Réflexion sur le programme d’action d’Eurostat – ‘Statistiques démographiques et sociales’ ». En outre, elle se serait vu confier la mission de préparer un document destiné aux autres directions générales de la Commission concernant des questions liées à l’exécution du budget. De plus, elle aurait présenté une intervention, au nom d’Eurostat, lors de la 89e conférence des directeurs généraux des instituts nationaux de statistiques (DGINS) qui se serait tenue les 18 et 19 septembre 2003 à Athènes. Enfin, la requérante aurait été appelée à apporter son concours à la mise en place des mesures correctrices qui s’imposaient concernant la gestion des relations contractuelles avec les entreprises et les organismes avec lesquels Eurostat entretient des relations, ainsi qu’il ressortirait d’une note de M. V. A. adressée à la requérante en date du 6 octobre 2003 mais se référant à une période antérieure. Il s’ensuit, selon la Commission, que la requérante s’est effectivement vu attribuer des tâches concrètes correspondant à son grade A 2.

85      La Commission souligne que la requérante a reçu un mandat du directeur général d’Eurostat. Par ailleurs, en tant que conseiller principal, elle aurait été à même de prendre toutes les initiatives utiles au sein du management d’Eurostat, de consulter ses collègues et d’obtenir toutes les informations souhaitées. De plus, elle aurait eu à tout moment un accès direct au directeur général. En effet, la fonction de conseiller principal à Eurostat, tout comme celle de directeur, demeurerait placée sous l’autorité directe du directeur général. À supposer même que les tâches confiées à la requérante soient restées en deçà de ce qui aurait été approprié à son grade, une telle circonstance ne saurait invalider ni la décision de réaffectation ni celle de réorganisation.

86      La Commission fait observer que les emplois de conseillers principaux ayant été créés par la décision du 9 juillet 2003, l’argument de la requérante selon lequel aucune description de ces fonctions n’a préexisté à sa réaffectation à un de ces emplois n’est pas pertinent.

87      En outre, la Commission rappelle que rien ne s’oppose à une décision entraînant l’attribution de nouvelles fonctions qui, si elles diffèrent de celles précédemment exercées et sont perçues par l’intéressé comme comportant une réduction de ses attributions, sont néanmoins conformes à l’emploi correspondant à son grade. Ainsi, même une diminution effective des attributions du fonctionnaire n’enfreindrait la règle de correspondance que si ses fonctions étaient, dans leur ensemble, nettement en deçà de celles correspondant à ses grade et emploi, compte tenu de leur nature, de leur importance et de leur ampleur (arrêt W/Commission, précité, point 104). De plus, le statut n’accorderait à un fonctionnaire aucun droit à un emploi déterminé, mais laisserait au contraire à l’AIPN la compétence d’affecter les fonctionnaires, dans l’intérêt du service, aux différents emplois correspondant à leur grade (arrêt W/Commission, précité, point 102).

–       Appréciation du Tribunal

88      En l’espèce, il est constant que, conformément à la décision notifiée, la requérante a fait l’objet d’une réaffectation « avec son emploi ».

89      Étant donné que la requérante a conservé son grade après sa réaffectation, à savoir le grade A 2, et qu’elle a été transférée avec son emploi, l’équivalence des grades et des emplois a, par hypothèse, été respectée (voir, en ce sens, arrêts Campoli/Commission, précité, point 42, et Fronia/Commission, précité, point 51).

90      La requérante fait toutefois valoir qu’elle a été affectée à des tâches sans définition précise qui constituent, en réalité, une diminution de ses responsabilités en ce qu’elle a été privée de toute fonction de management et d’encadrement.

91      À cet égard, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, en cas de modification des fonctions attribuées à un fonctionnaire, la règle de correspondance entre le grade et l’emploi implique une comparaison non pas entre les fonctions actuelles et antérieures de l’intéressé, mais entre ses fonctions actuelles et son grade dans la hiérarchie (arrêts du Tribunal du 10 juillet 1992, Eppe/Commission, T‑59/91 et T‑79/91, Rec. p. II‑2061, point 49, et Fronia/Commission, précité, point 53). Dès lors, rien ne s’oppose à ce qu’une décision entraîne l’attribution de nouvelles fonctions qui, si elles diffèrent de celles précédemment exercées et sont perçues par l’intéressé comme comportant une réduction de ses attributions, sont néanmoins conformes à l’emploi correspondant à son grade. Ainsi une diminution effective des attributions d’un fonctionnaire n’enfreint la règle de correspondance entre le grade et l’emploi que si ses fonctions sont, dans leur ensemble, nettement en deçà de celles correspondant à ses grade et emploi, compte tenu de leur nature, de leur importance et de leur ampleur (voir arrêt W/Commission, précité, point 104, et la jurisprudence citée).

92      En l’espèce, il ressort de la décision notifiée que la requérante a été réaffectée en tant que « conseiller principal » auprès du directeur général.

93      Il y a lieu de relever que, en vertu de l’annexe IV des dispositions générales d’exécution de l’article 5, paragraphe 4, du statut, la dénomination « conseiller principal », correspondant à l’emploi type « directeur » et au grade A 2, fait l’objet, dans la rubrique « Description de la fonction », de la mention suivante : « Fonctionnaire de haute qualification appelé à conseiller l’institution ou une direction générale dans un domaine déterminé ».

94      Il s’ensuit que non seulement le grade correspondant à la fonction de conseiller principal est le même que celui de directeur, mais que, en outre, la fonction de conseiller principal demeure également placée sous l’autorité directe du directeur général.

95      Il est vrai que la décision notifiée ne contient, en soi, aucune description de la fonction de conseiller principal auprès du directeur général à laquelle la requérante est réaffectée. Cette circonstance d’ordre formel ne saurait toutefois suffire à établir que l’équivalence des emplois n’a pas été respectée en l’espèce.

96      En effet, il y a lieu de rappeler que la fonction de conseiller principal auprès du directeur général d’Eurostat était une fonction nouvellement créée. Ainsi, l’absence de description de cette fonction dans la décision notifiée est susceptible d’être justifiée par le fait qu’il n’était pas encore possible de la déterminer en détail. En tout état de cause, il convient de relever que la nature même des fonctions attribuées à la requérante, à savoir une fonction de conseiller principal auprès du directeur général, s’oppose à ce que leur contenu soit déterminé a priori avec beaucoup de précisions et invite l’intéressé à en définir les contours à partir de l’expérience acquise dans sa nouvelle fonction et des besoins du service (voir, en ce sens, arrêt Eppe/Commission, précité, point 50).

97      En outre, le fait que les postes de conseillers principaux ont été créés par la décision du 9 juillet 2003 et qu’ils n’existaient pas auparavant au sein d’Eurostat ne démontre aucunement que l’exigence relative à l’équivalence des emplois a été violée.

98      Par ailleurs, il y a lieu de relever que la description des fonctions de conseiller principal contenue dans l’annexe IV des dispositions générales d’exécution de l’article 5, paragraphe 4, du statut ne fait état d’aucune fonction de management ou d’encadrement dont la requérante prétend avoir été privée. En outre, il convient de rappeler que, si le statut vise à garantir au fonctionnaire le grade obtenu, ainsi qu’un emploi correspondant à ce grade, il ne lui accorde aucun droit à un emploi déterminé, mais laisse au contraire à l’AIPN la compétence d’affecter les fonctionnaires, dans l’intérêt du service, aux différents emplois correspondant à leur grade (arrêt W/Commission, précité, point 102). Par ailleurs, s’il est vrai que l’administration a tout intérêt à affecter les fonctionnaires en fonction de leurs aptitudes spécifiques et de leurs préférences personnelles, on ne saurait reconnaître pour autant à un fonctionnaire le droit d’exercer ou de conserver des fonctions spécifiques ou de refuser toute autre fonction de son emploi type (arrêt de la Cour du 22 octobre 1981, Kruse/Commission, 218/80, Rec. p. 2417, point 7, et arrêt W/Commission, précité, point 105). En tout état de cause, ainsi qu’il a été rappelé ci-dessus, l’équivalence des emplois ne requiert pas une comparaison avec les fonctions exercées antérieurement.

99      Enfin, force est de constater que la requérante ne précise aucunement en quoi ses attributions en tant que conseiller principal étaient nettement en deçà de celles correspondant à ses grade et emploi compte tenu de leur nature, de leur importance et de leur ampleur. Dans son mémoire en réplique, elle se borne en effet à contester l’argument de la Commission selon lequel les tâches et les missions qui lui ont été confiées étaient en tous points conformes aux exigences statutaires. Elle ajoute que, contrairement à la plupart de ses collègues, elle n’a jamais été chargée d’aucune tâche lui permettant d’exercer une mission en rapport avec son grade et son emploi.

100    Or, il suffit de rappeler qu’une telle circonstance, à la supposer démontrée, ne saurait affecter la légalité de la décision de réaffectation du 9 juillet 2003, dès lors que celle-ci doit s’apprécier au moment de l’adoption de la décision (voir, en ce sens, arrêt Costacurta/Commission, précité, point 43).

101    Dans ces circonstances, il convient de relever que la fonction de conseiller principal correspond au grade A 2 de la requérante et, en tout état de cause, n’apparaît pas, en tant que telle, d’un niveau moindre que celui de la fonction de directeur.

102    Par conséquent, il convient de constater que la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 n’enfreint pas la règle de l’équivalence des grades et des emplois.

103    Le premier moyen de la requérante doit donc être rejeté dans son intégralité.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation du principe d’égalité de traitement

104    La requérante fait valoir que sa situation se différencie objectivement de celle des autres directeurs d’Eurostat dans la mesure où elle n’a été affectée à Eurostat que le 16 janvier 2003, soit postérieurement aux prétendus méfaits commis au sein de celui-ci. La Commission aurait donc violé le principe d’égalité de traitement en la traitant comme les autres directeurs en fonction à Eurostat depuis de nombreuses années et en omettant de la réintégrer dans ses fonctions dès le premier examen. L’administration aurait dû identifier quels étaient les fonctionnaires qui, de par leurs compétences, étaient susceptibles de prendre activement part aux pratiques reprochées, et ce en établissant une ligne chronologique. L’affectation de la requérante à Eurostat étant postérieure aux irrégularités en cause, elle n’aurait en aucune manière pu y prendre part.

105    La Commission considère que le principe d’égalité de traitement n’a pas été violé en l’espèce. En effet, aucun des directeurs d’Eurostat n’aurait été réaffecté à un poste de conseiller principal en raison de son comportement individuel ni même d’une suspicion quelconque à son égard. Ainsi, au regard de l’objectif consistant à faciliter la conduite des enquêtes menées au sein d’Eurostat, toutes les personnes concernées par les décisions de réaffectation du 9 juillet 2003 se seraient trouvées dans une situation identique. La Commission fait valoir qu’une décision de réaffectation peut être prise sans tenir compte de la question de savoir si la personne concernée était ou non responsable de la situation préjudiciable au bon fonctionnement du service qui justifie cette mesure (arrêt W/Commission, précité, point 88). Pour cette même raison, la durée de la période pendant laquelle ces personnes auraient été affectées à Eurostat serait dépourvue de pertinence.

106    Le Tribunal rappelle qu’il y a violation du principe d’égalité de traitement énoncé à l’article 5, paragraphe 3, du statut lorsque deux catégories de personnes dont les situations juridique et factuelle ne présentent pas de différence essentielle se voient appliquer un traitement différent ou lorsque des situations différentes sont traitées de manière identique (arrêts du Tribunal du 2 avril 1998, Apostolidis/Cour de justice, T‑86/97, RecFP p. I‑A‑167 et II‑521, point 61 ; du 26 septembre 2002, Borremans e.a./Commission, T‑319/00, RecFP p. I‑A‑171 et II‑905, point 41, et du 5 avril 2005, Hendrickx/Conseil, T‑376/03, non encore publié au Recueil, point 25). Dans une matière qui relève de l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire, ce principe est méconnu lorsqu’une institution procède à une différenciation arbitraire ou manifestement inadéquate par rapport à l’objectif poursuivi (arrêt du Tribunal du 6 juillet 1999, Séché/Commission, T‑112/96 et T‑115/96, RecFP p. I‑A‑115 et II‑623, point 127).

107    En l’espèce, il convient de relever que, ainsi qu’il a été exposé ci-dessus, bien que la requérante n’ait été affectée à Eurostat qu’en janvier 2003, soit postérieurement aux prétendues irrégularités commises au sein de celui-ci, la réaffectation de celle-ci et celle de tous les autres directeurs doit être considérée comme ayant été adoptée dans l’intérêt du service, à savoir en vue de permettre la sérénité et le bon déroulement des enquêtes. Dès lors, au moment de l’adoption de la décision de réaffectation du 9 juillet 2003, la requérante se trouvait dans une situation identique à celle des autres directeurs, lesquels n’étaient pas non plus suspectés d’avoir été impliqués dans les irrégularités commises au sein d’Eurostat.

108    Dans ces circonstances, il y a lieu de rejeter le deuxième moyen de la requérante.

 Sur le troisième moyen, tiré du détournement de pouvoir et de procédure ainsi que de la violation du devoir de sollicitude, du principe de bonne administration et du droit d’être entendu

 Arguments des parties

109    La requérante fait valoir que la réaffectation collective des directeurs d’Eurostat en tant que conseillers principaux est indissociable d’une suspicion disciplinaire dès lors que tant ces mesures que l’ouverture de procédures disciplinaires contre certains autres fonctionnaires d’Eurostat ont été décidées dans le contexte d’un « paquet intégré de mesures » ayant pour objet de mettre en évidence de graves méfaits au sein de ce service. L’AIPN aurait donc dû ouvrir une procédure disciplinaire contre elle, lui permettant ainsi de bénéficier des garanties procédurales qui s’y attachent.

110    Dans son mémoire en réplique, la requérante fait valoir que la « vindicte » entamée à son égard depuis 1997 par M. V. A., lequel aurait déjà fait obstacle à son recrutement dans les services de la Commission dès 1997, démontre que l’AIPN s’est rendue coupable d’un détournement de pouvoir à son égard. À cet égard, la requérante se réfère à un document intitulé « Faits et dates destinés à établir le grief subi par Gabrielle Clotuche suite à la décision de la Commission de la muter sur un poste de ‘conseiller principal’ à Eurostat » (ci-après le « document ‘Faits et dates’ »), établi en juillet 2004 par ses soins et annexé à son mémoire en réplique. La requérante sollicite l’autorisation d’apporter la preuve du fait que c’est sur l’insistance spécifique du nouveau directeur général que le cas de sa réaffectation n’a pas été, malgré la différence de situation objective, dissocié de celui des autres directeurs dès le 23 juillet 2003 ou dès le mois d’août 2003. Le nouveau directeur général aurait fait savoir, sans aucune motivation, qu’il ne « voulait pas » de la requérante. À la date de l’introduction de son recours, elle n’aurait pas disposé des informations lui permettant de formuler cette demande dans sa requête.

111    Par ailleurs, la requérante soutient que la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 a été prise en violation du devoir de sollicitude, étant donné que cette décision était indissociablement liée à d’autres mesures adoptées par la Commission et, notamment, à des procédures disciplinaires.

112    Selon la requérante, la Commission a le devoir d’arrêter les mesures commandées par l’intérêt du service après un examen attentif des mérites propres de chaque fonctionnaire et dans le cadre du devoir de sollicitude et du principe de bonne administration, en vertu desquels l’institution est tenue d’éviter qu’un fonctionnaire puisse voir entachées son honorabilité et sa réputation professionnelle. Elle souligne que son affectation à la direction « Statistiques sociales » d’Eurostat correspondait tout à la fois à ses compétences et à l’intérêt du service, puisqu’elle était étrangère aux difficultés frappant le fonctionnement d’Eurostat au cours des années antérieures.

113    En outre, le principe de bonne administration et le principe audi alteram partem auraient été violés, car la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 n’aurait pas été précédée d’une audition préalable et documentée du fonctionnaire au cours de laquelle celui-ci aurait pu s’expliquer sur des faits et moyens précis qui lui auraient été reprochés. La requérante rappelle que le devoir d’entendre l’intéressé avant l’adoption de tout acte faisant grief s’applique même en dehors de la matière disciplinaire, dans toutes les matières relevant de la fonction publique communautaire. Ce ne serait que dans des circonstances particulières où il s’avérerait impossible en pratique ou incompatible avec l’intérêt du service de procéder à une consultation préalable de l’intéressé que cette exigence pourrait être satisfaite par une audition après l’adoption de l’acte faisant grief (arrêt du Tribunal du 23 avril 2002, Campolargo/Commission, T‑372/00, RecFP p. I‑A‑49 et II‑223, points 31 et 32).

114    La Commission fait valoir qu’une décision n’est entachée de détournement de pouvoir que si elle apparaît, sur la base d’indices objectifs, pertinents et concordants, avoir été prise dans le but exclusif, ou à tout le moins déterminant, d’atteindre des fins autres que celles excipées ou d’éluder des procédures spécifiques prévues par le statut pour parer aux circonstances de l’espèce (arrêt du Tribunal du 14 octobre 2003, Wieme/Commission, T‑174/02, RecFP p. I‑A‑241 et II‑1165, point 70).

115    En l’espèce, la requérante n’aurait pas établi, ni même allégué, l’existence de tels indices. Pour aucun des directeurs, le motif de la réaffectation, dans l’intérêt du service, à un poste de conseiller principal ne serait dû au comportement individuel de l’intéressé, ni même à une suspicion quelconque à cet égard, mais bien à la nécessité de faciliter la conduite des enquêtes effectuées au sein d’Eurostat. Étant donné que la requérante n’aurait été suspectée d’aucun manquement à ses obligations au sens de l’article 86 du statut, il n’y a aurait pas eu de raison d’engager une procédure disciplinaire à son égard.

116    La Commission estime que, lorsqu’une décision de transfert a été adoptée dans l’intérêt du service et n’a porté atteinte ni à la position statutaire du requérant ni au principe de correspondance entre le grade et l’emploi, il ne saurait être question d’une mesure disciplinaire (arrêts du Tribunal du 6 novembre 1991, von Bonkewitz-Lindner/Parlement, T‑33/90, Rec. p. II‑1251, point 93, et Campoli/Commission, précité, point 70).

117    En outre, la Commission considère que le devoir de sollicitude n’a pas été violé. En effet, les exigences de ce devoir ne sauraient empêcher l’AIPN d’adopter les mesures qu’elle estime nécessaires dans l’intérêt du service, puisque le pourvoi de chaque emploi devrait se fonder en premier lieu sur l’intérêt du service. Un fonctionnaire ne saurait donc opposer son intérêt personnel aux mesures prises par l’AIPN en vue de l’organisation ou de la rationalisation des services et reconnues conformes à l’intérêt du service (arrêt W/Commission, précité, point 116).

118    En l’espèce, l’AIPN, dans l’exercice de son large pouvoir d’appréciation, aurait légitimement pu adopter la décision de réaffectation, étant donné la gravité de la situation à Eurostat et la nécessité de procéder à une enquête administrative qui soit conduite de manière aussi rapide et efficace que possible.

119    Par ailleurs, la Commission aurait pleinement respecté ses obligations de sollicitude vis-à-vis de la requérante, dans la mesure où, dans ses déclarations adressées au public, elle aurait établi une distinction très nette entre, d’une part, la réaffectation de certains fonctionnaires d’Eurostat et, d’autre part, l’ouverture de procédures disciplinaires contre certains autres fonctionnaires de cette direction générale. Dès lors, contrairement à ce que fait valoir la requérante, la « mutation collective » n’aurait pas été présentée comme très proche des procédures disciplinaires formellement entamées. En effet, le seul fait que ces deux séries de mesures soient mentionnées dans un seul document, voire dans une seule intervention orale, ne signifierait pas pour autant que ces déclarations aient pour objet ou même pour effet d’établir, dans l’esprit du public, un quelconque lien intrinsèque entre ces différentes mesures.

120    S’agissant de la violation du droit d’être entendu invoquée par la requérante, la Commission relève que l’administration n’est pas tenue de consulter au préalable les fonctionnaires intéressés sur les mesures de réorganisation des services qui peuvent affecter leur position, dans l’hypothèse où, comme en l’espèce, ces mesures ne portent atteinte ni au grade du fonctionnaire ni à sa situation matérielle (arrêt W/Commission, précité, point 100). Dans ces conditions, il ne serait pas non plus possible de déduire du principe de bonne administration une obligation d’entendre la requérante préalablement à sa réaffectation.

121    Quant au grief présenté dans le mémoire en réplique, concernant la prétendue « vindicte » exercée à l’encontre de la requérante par M. V. A., la Commission considère qu’il s’agit d’un grief produit en cours d’instance, en violation de l’interdiction prévue à l’article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure. La requérante n’aurait pas démontré que ce grief se fonde sur des éléments de fait qui se sont révélés pendant la procédure.

122    À cet égard, la Commission conteste la recevabilité du document « Faits et dates », annexé au mémoire en réplique. Elle est d’avis qu’il faut que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels un recours se fonde ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même et mutatis mutandis du mémoire en réplique. En outre, le fait que le document en question ait été rédigé par la requérante elle-même n’aurait pas pour conséquence qu’il puisse être considéré comme faisant partie intégrante du mémoire en réplique. En effet, une partie, au sens de l’article 19, troisième alinéa, du statut de la Cour de justice, ne serait pas autorisée à agir elle-même devant le juge communautaire, mais devrait recourir aux services d’un tiers habilité à exercer devant une juridiction d’un État membre, et aucune dérogation ou exception à cette obligation ne serait prévue.

123    De plus, les éléments figurant aux points du document « Faits et dates » auxquels la requérante se réfère concerneraient une période antérieure à l’introduction du présent recours.

124    Quant au fond, la Commission conteste l’allégation selon laquelle M. V. A. a adopté une attitude négative à l’égard de la requérante. En ce qui concerne la matérialité des actes et interventions qui, selon la requérante, constituent des indices permettant de conclure à l’existence du prétendu détournement de pouvoir, celle-ci se limiterait à des allégations purement gratuites et spéculatives sans offrir le moindre début de preuve. En tout état de cause, ce grief serait inopérant, dès lors que la décision de réaffectation du 9 juillet 2003, de même que la décision de réorganisation, n’aurait pas été adoptée par M. V. A. mais par le collège des membres de la Commission.

 Appréciation du Tribunal

125    Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la notion de détournement de pouvoir a une portée bien précise qui se réfère à l’usage de ses pouvoirs par une autorité administrative dans un but autre que celui en vue duquel ils lui ont été conférés. Une décision n’est entachée de détournement de pouvoir que si elle apparaît, sur la base d’indices objectifs, pertinents et concordants, avoir été prise pour atteindre des fins autres que celles excipées (arrêts du Tribunal du 11 juin 1996, Anacoreta Correia/Commission, T‑118/95, RecFP p. I‑A‑283 et II‑835, point 25 ; Séché/Commission, précité, point 139, et Campoli/Commission, précité, point 62).

126    Il y a également lieu de rappeler que, dès lors qu’une décision n’a pas été jugée contraire à l’intérêt du service, il ne saurait être question de détournement de pouvoir (arrêts du Tribunal Eppe/Commission, précité, point 57 ; du 19 juin 1997, Forcat Icardo/Commission, T‑73/96, RecFP p. I‑A‑159 et II‑485, point 39, et Campoli/Commission, précité, point 63).

127    Or, il a été exposé précédemment que la décision de la réaffectation du 9 juillet 2003 de la requérante devait être considérée comme conforme à l’intérêt du service. Il s’ensuit que, conformément à la jurisprudence citée ci-dessus, le grief tiré d’un détournement de pouvoir doit être rejeté.

128    En tout état de cause, pour autant que la requérante soutienne que la décision de réaffectation aurait été prise en vue d’atteindre des fins autres que celles invoquées à l’appui de celle-ci, il y a lieu de rappeler que, dans le cadre de l’établissement d’un détournement de pouvoir, il ne suffit pas d’invoquer certains faits à l’appui de ses prétentions ; il faut encore fournir des indices suffisamment précis, objectifs et concordants de nature à soutenir leur véracité ou, à tout le moins, leur vraisemblance (arrêt de la Cour du 6 mars 2001, Connolly/Commission, C‑274/99 P, Rec. p. I‑1611, point 113, et arrêt Cwik/Commission, précité, point 29). Or, la requérante reste en défaut de faire état de tels indices.

129    Par ailleurs, il convient de rappeler, ainsi qu’il vient d’être jugé, d’une part, que la mesure contestée, s’appliquant à tous les directeurs alors en fonction à Eurostat, présente un caractère général et impersonnel qui exclut la volonté de l’administration de sanctionner le comportement individuel de la requérante (voir point 107 ci-dessus) et, d’autre part, que la requérante, bénéficiant d’un nouvel emploi correspondant à son grade (voir point 102 ci-dessus), n’est pas fondée à prétendre qu’elle a fait l’objet d’une sanction. Par conséquent, la requérante n’a pas démontré qu’il s’agissait en réalité d’une mesure disciplinaire. Elle ne saurait donc reprocher à la Commission de ne pas avoir ouvert une procédure disciplinaire à son égard, laquelle lui aurait permis de bénéficier des garanties procédurales prévues dans ce cadre.

130    S’agissant du grief présenté, pour la première fois, au stade de la réplique, concernant la prétendue vindicte exercée à l’endroit de la requérante par M. V. A., directeur général d’Eurostat, il convient de rappeler que l’article 48, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement de procédure dispose que la production de moyens nouveaux en cours d’instance est interdite à moins que ces moyens ne se fondent sur des éléments de droit et de fait qui se sont révélés pendant la procédure.

131    Il convient de relever que la requérante ne démontre pas que ce grief se fonde sur des éléments de fait qui se sont révélés pendant la procédure. Il y a d’ailleurs lieu de constater que les faits relatifs à son recrutement à la Commission sont bien antérieurs au dépôt de sa requête. Le seul fait éventuel postérieur à l’introduction de sa requête serait la déclaration de M. V. A. selon laquelle il ne « voulait pas » de la requérante, dont il est fait état dans le document « Faits et dates ». Dans ce document, la requérante se réfère à un contact avec Mme H., du cabinet de M. Prodi, président de la Commission, en date du 8 décembre 2003, donc postérieure à l’introduction du recours, lors duquel la requérante aurait appris que la décision d’écarter tous les directeurs y compris elle-même qui venait d’arriver à Eurostat cinq mois et demi auparavant, résulterait de la volonté expresse de M. V. A. Mme H. lui aurait indiqué que ce dernier « n’[avait] pas voulu [la] sauver, [qu’]il [avait] au contraire tout fait pour [l’]écarter [et qu’]il ne [voulait] pas [l’]avoir ».

132    À supposer même que ce grief soit considéré comme recevable, il y a lieu de constater qu’une telle déclaration alléguée ne saurait se voir conférer une quelconque force probante et ne saurait donc démontrer l’existence d’une quelconque vindicte de la part du directeur général. En tout état de cause, il convient de rappeler que la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 a été adoptée par le collège des membres de la Commission, le jour même où ledit collège a décidé d’affecter M. Van den Abeele en tant que directeur général d’Eurostat. S’il est vrai que ce dernier occupait déjà ce poste à titre temporaire avant cette date, il n’en reste pas moins que la requérante n’a aucunement démontré qu’il avait effectivement exercé une influence déterminante sur la décision de réaffectation du 9 juillet 2003, adoptée par le collège des membres de la Commission.

133    S’agissant de la recevabilité du document « Faits et dates », il convient de rappeler que, en vertu de l’article 21, premier alinéa, du statut de la Cour, applicable au Tribunal en vertu de l’article 53, premier alinéa, du même statut et de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal, toute requête doit indiquer l’objet du litige et l’exposé sommaire des moyens invoqués. Cette indication doit être suffisamment claire et précise pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant, sans autres informations à l’appui. Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il faut, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci se fonde ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même (ordonnance du Tribunal du 28 avril 1993, De Hoe/Commission, T‑85/92, Rec. p. II‑523, point 20 ; arrêt du Tribunal du 29 janvier 1998, Dubois et Fils/Conseil et Commission, T‑113/96, Rec. p. II‑125, point 29, et ordonnance du Tribunal du 21 mai 1999, Asia Motor France e.a./Commission, T‑154/98, Rec. p. II‑1703, point 49).

134    Il convient également de rappeler que, si le corps de la requête peut être étayé et complété, sur des points spécifiques, par des renvois à des extraits de pièces qui y sont annexées, un renvoi global à d’autres écrits, même annexés à la requête, ne saurait pallier l’absence des éléments essentiels de l’argumentation en droit, qui, en vertu de la disposition susvisée, doivent figurer dans la requête (ordonnance Asia Motor France e.a./Commission, précitée, point 49, et arrêt du Tribunal du 18 octobre 2001, X/BCE, T‑333/99, Rec. p. II‑3021, point 115). En effet, il n’appartient pas au Tribunal de rechercher et d’identifier, dans les annexes, les moyens et arguments qu’il pourrait considérer comme constituant le fondement du recours, les annexes ayant une fonction purement probatoire et instrumentale (arrêts du Tribunal du 7 novembre 1997, Cipeke/Commission, T‑84/96, Rec. p. II‑2081, point 34, et X/BCE, précité, point 190).

135    De plus, on entend par annexes des pièces produites par une partie pour justifier ses allégations ou contredire celles de la partie adverse et les offres de preuve par lesquelles une partie soumet à l’appréciation de la juridiction une demande de mesure destinée à rapporter la preuve d’un fait ou d’une allégation, à savoir, notamment, une audition de témoins, une expertise ou la consultation d’un document détenu par un tiers (arrêt du Tribunal du 5 mars 2003, Ineichen/Commission, T‑293/01, RecFP p. I‑A‑83 et II‑441, point 29).

136    En l’espèce, la requérante expose, dans son mémoire en réplique, qu’il est « utile d’embrasser une période plus large [de l’exposé des faits que celle contenue dans sa requête] et de rappeler les conditions dans lesquelles elle a entamé ses fonctions au service de la Commission et les obstacles auxquels elle a été confrontée ». Elle ajoute que son mémoire en réplique « s’appuie sur la relation des faits vécus par [elle], présentés dans un document auquel il est fait référence [(‘Faits et dates’) ;] à savoir ses motivations sociales européennes et les obstacles mis à son entrée par M. [V. A.] […], l’activité intense déployée entre 1997 et 2002 dans la politique sociale de la Commission […], sa mutation à Eurostat à la tête des statistiques sociales […] et la réponse au défi de sa nouvelle affectation ».

137    Le mémoire en réplique contient des références aux points spécifiques du document « Faits et dates » qui, lui-même, renvoie à 30 annexes. Malgré l’existence de ces références, le Tribunal considère que ce document ne peut être pris en compte dans le cadre du présent recours. Il s’agit en effet d’un document établi par la requérante lors de la rédaction de son mémoire en réplique. Il lui appartenait ainsi de démontrer qu’elle n’aurait pas pu présenter ces faits dès sa requête, ce qu’elle reste en défaut de faire, à l’exclusion, d’une part, des faits concernant son détachement à la CES, lesquels sont, en tout état de cause, étrangers au présent recours, et, d’autre part, des faits relatifs à la prétendue vindicte exercée par M. Van den Abeele, dont il a été constaté précédemment qu’ils ne sauraient affecter la légalité de la décision de réaffectation du 9 juillet 2003.

138    Enfin, ainsi que le fait observer la Commission, la circonstance que le document en question a été rédigé par la requérante ne saurait conduire à le considérer comme faisant partie intégrante du mémoire en réplique. En effet, une partie, au sens de l’article 19, troisième alinéa, du statut de la Cour, n’est pas autorisée à agir elle-même devant le juge communautaire, mais doit recourir aux services d’un tiers habilité à exercer devant une juridiction d’un État membre et aucune dérogation ou exception à cette obligation n’est prévue (ordonnance de la Cour du 5 décembre 1996, Lopes/Cour de justice, C‑175/96 P, Rec. p. I‑6409, point 11).

139    Dès lors, il convient de conclure que l’annexe 1 du mémoire en réplique est irrecevable.

140    Dans ces circonstances, il n’y a pas lieu d’accéder à la demande de la requérante visant à lui permettre d’apporter la preuve de ce que c’est sur l’insistance spécifique du nouveau directeur général que le cas de sa réaffectation n’a pas été dissocié de celui des autres directeurs dès le 23 juillet 2003 ou dès le mois d’août 2003, malgré la différence objective entre sa situation et celle des autres directeurs. Par ailleurs, comme il a été constaté ci-dessus, la légalité de la décision doit s’apprécier au moment de son adoption et, dès lors, les faits postérieurs à la date du 9 juillet 2003 n’affectent pas la légalité de la décision de réaffectation du 9 juillet 2003.

141    S’agissant de la prétendue violation du devoir de sollicitude et du principe de bonne administration, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, le devoir de sollicitude de l’administration reflète l’équilibre des droits et obligations réciproques que le statut a créé dans les relations entre l’autorité publique et ses agents. Si, en vertu de ce principe, l’autorité compétente est tenue, lorsqu’elle apprécie l’intérêt du service, de prendre en considération l’ensemble des éléments qui sont susceptibles de déterminer sa décision, notamment l’intérêt de l’agent concerné (arrêt Dejaiffe/OHMI, précité, point 53), la prise en compte de l’intérêt personnel du fonctionnaire ne saurait aller jusqu’à interdire à l’AIPN de réaffecter un fonctionnaire contre son gré (arrêt Costacurta/Commission, précité, point 78 ; voir également, en ce sens, arrêt Cwik/Commission, précité, point 52).

142    En l’espèce, la Commission fait valoir qu’elle a respecté ses obligations de sollicitude vis-à-vis de la requérante, dans la mesure où, dans ses déclarations adressées au public, elle a établi une distinction très nette entre, d’une part, la réaffectation de certains fonctionnaires d’Eurostat et, d’autre part, l’ouverture de procédures disciplinaires contre certains autres fonctionnaires de cette direction générale. Dès lors, selon elle, contrairement à ce que fait valoir la requérante, la « mutation collective » n’a pas été présentée comme très proche des procédures disciplinaires formellement entamées. En effet, selon la Commission, le seul fait que ces deux séries de mesures soient mentionnées dans un seul document, voire dans une seule intervention orale, ne signifie pas pour autant que ces déclarations aient pour objet ou même pour effet d’établir, dans l’esprit du public, un quelconque lien intrinsèque entre ces différentes mesures.

143    À cet égard, le Tribunal constate que le communiqué de presse du 9 juillet 2003, cité au point 5 ci-dessus, n’opère aucune distinction nette entre la réaffectation de certains directeurs et l’ouverture de procédures disciplinaires. La Commission y constate, tout d’abord, qu’elle « a ouvert des procédures disciplinaires contre trois fonctionnaires de la Commission ». Dans la phrase suivante, elle constate que, « à titre conservatoire, un certain nombre de dirigeants d’Eurostat seront mutés et il leur sera confié des fonctions de conseillers ». Enfin, elle ajoute que, « s’il se révèle qu’un membre faisant ou ayant fait partie du personnel d’Eurostat a commis une infraction au règlement financier et au statut du personnel, il fera l’objet d’une procédure disciplinaire ».

144    Or, il convient de relever qu’un lien peut apparaître entre l’expression « à titre conservatoire » et le membre de phrase « s’il se révèle », donnant ainsi l’impression que les directeurs réaffectés feront l’objet d’une procédure disciplinaire. Cette impression est soutenue par un paragraphe ainsi rédigé :

« Par mesure de prévention, toutes les archives locales et centrales d’Eurostat ont été mises en lieu sûr […] Le directeur général faisant fonction a demandé à tout le personnel d’encadrement de répondre à une série de questions concernant les allégations d’irrégularités. »

145    Dès lors, la communication au public de la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 a pu accréditer l’idée que la requérante et les autres directeurs réaffectés à des emplois de conseillers principaux pouvaient être coupables ou, à tout le moins, suspectés des malversations faisant l’objet des enquêtes relatives à la gestion des programmes relevant de la compétence d’Eurostat. Cette impression n’est pas levée par l’indication selon laquelle la « Commission tient à souligner que les décisions d’ouverture d’une procédure disciplinaire ou de mutation de fonctionnaires sont prises sans préjudice du principe de la présomption d’innocence ». Au contraire, cette phrase tend à placer sur un même plan l’ouverture des procédures disciplinaires et la réaffectation des anciens directeurs. Bien que la Commission admette elle-même, devant le Tribunal, que la requérante n’a jamais été suspectée d’avoir pris part aux irrégularités en cause, il y a ainsi lieu de constater que le communiqué de presse du 9 juillet 2003 a nécessairement laissé une impression fort différente auprès du public.

146    Si cette circonstance ne saurait, en soi, affecter la légalité de la décision de réaffectation du 9 juillet 2003, dont il a été constaté qu’elle était conforme à l’intérêt du service, elle est néanmoins susceptible de constituer un élément pertinent dans le cadre de l’examen de la demande en indemnité formulée par la requérante.

147    Enfin, en ce qui concerne la prétendue violation du droit d’être entendu, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, si une simple mesure d’organisation interne, prise dans l’intérêt du service, ne porte pas atteinte à la position statutaire du fonctionnaire ou au respect du principe de correspondance entre le grade et l’emploi, l’administration n’est pas tenue d’entendre préalablement l’intéressé à ce sujet (arrêt du 7 mars 1990, Hecq/Commission, précité, point 14, et arrêt Cwik/Commission, précité, point 62). Dès lors, compte tenu de ce que la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 a été prise dans le respect de ces conditions, la Commission n’était pas tenue d’entendre la requérante préalablement à son adoption.

148    Il résulte de tout ce qui précède que le troisième moyen de la requérante doit être rejeté.

 Sur le quatrième moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation

 Arguments des parties

149    La requérante fait valoir que ni le procès-verbal du 9 juillet 2003 ni la décision notifiée ne comportent de motivation quant aux considérations liées à l’intérêt du service justifiant sa réaffectation. Rien dans la communication de M. Kinnock dans les communiqués de presse ou dans tout autre document porté à la connaissance de la requérante n’aurait permis d’étayer un lien nécessaire entre l’intérêt de tel ou tel service et la réaffectation de tel ou tel directeur, a fortiori de l’ensemble de ces derniers.

150    Contrairement aux affaires dans lesquelles une situation relationnelle impliquant directement le fonctionnaire concerné aurait été en cause, rien de tel n’aurait caractérisé la situation juridique de la requérante en l’espèce. Elle n’aurait donc pu prendre connaissance ni personnellement ni fonctionnellement du contexte qui pouvait justifier la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 et la décision de réorganisation.

151    La Commission relève que la décision notifiée ne vise pas seulement l’article 7 du statut expressément mais se réfère également au procès-verbal du 9 juillet 2003, dont la requérante avait, de toute évidence, connaissance, puisqu’elle l’a joint à sa requête. Or, ce procès-verbal se référerait à son tour à la communication de M. Kinnock. Dans ce dernier document, dont la requérante aurait également eu connaissance, la finalité des mesures adoptées lors de cette réunion serait amplement exposée.

152    En outre, la requérante aurait été en mesure, à la lecture de la lettre lui étant adressée par MM. Kinnock et Solbes, en date du 26 août 2003, de comprendre quelles étaient les raisons du choix opéré par l’AIPN. Dès lors, et en tout état de cause, la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 serait intervenue dans un contexte connu de la requérante, laquelle aurait donc été en mesure d’apprécier la légalité de cette décision ainsi que l’opportunité de la soumettre au contrôle juridictionnel.

 Appréciation du Tribunal

153    En réponse au présent moyen de la requérante, il suffit de rappeler que, si une simple mesure d’organisation interne, prise dans l’intérêt du service, ne porte pas atteinte à la position statutaire du fonctionnaire ou au principe de correspondance entre le grade et l’emploi, l’administration n’est pas tenue de la motiver (arrêt du 7 mars 1990, Hecq/Commission, précité, point 14, et arrêt Cwik/Commission, précité, point 62). La décision de réaffectation du 9 juillet 2003 constituant une simple mesure d’organisation interne prise dans l’intérêt du service respectant les conditions mentionnées ci-dessus, force est de constater que la Commission n’était aucunement tenue de la motiver à l’égard de la requérante. Le moyen est donc inopérant.

154    En tout état de cause, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence, l’obligation de motivation a pour but, d’une part, de fournir à l’intéressé une indication suffisante pour apprécier le bien-fondé de la décision prise par l’administration et l’opportunité d’introduire un recours devant le Tribunal et, d’autre part, de permettre à ce dernier d’exercer son contrôle. Son étendue doit être appréciée en fonction des circonstances concrètes, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que le destinataire peut avoir à recevoir des explications (arrêt du Tribunal du 12 décembre 2002, Morello/Commission, T‑135/00, RecFP p. I‑A‑265 et II‑1313, point 28).

155    Selon une jurisprudence constante, une décision est suffisamment motivée dès lors qu’elle est intervenue dans un contexte connu du fonctionnaire concerné qui lui permet de comprendre la portée de la mesure prise à son égard (arrêts W/Commission, précité, point 141 ; Campoli/Commission, précité, point 50, et Cwik/Commission, précité, point 63).

156    En l’espèce, la décision notifiée se réfère au procès-verbal du 9 juillet 2003 qui, à son tour, se réfère à la communication de M. Kinnock, envoyée au personnel d’Eurostat le 9 juillet 2003. Or, il y a lieu de relever que la finalité des mesures adoptées lors de la réunion du 9 juillet 2003 est exposée dans cette communication.

157    La requérante n’est donc pas fondée à prétendre qu’elle n’a pas eu connaissance, ni personnellement ni fonctionnellement, du contexte justifiant la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 étant donné que, ainsi que le fait valoir la Commission, non contestée par la requérante sur ce point, elle a eu connaissance de tous ces documents.

158    Dès lors, compte tenu du contexte dans lequel la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 est intervenue, ledit contexte étant connu par la requérante, il y a lieu de considérer que celle-ci a été en mesure d’en apprécier la légalité ainsi que l’opportunité de la soumettre à un contrôle juridictionnel. Le moyen est donc, en tout état de cause, dépourvu de fondement.

159    Le quatrième moyen de la requérante doit donc être rejeté, ainsi que, par voie de conséquence, les conclusions du requérant tendant à l’annulation de la décision de réaffectation du 9 juillet 2003.

 Sur la demande visant à l’annulation de la décision de réorganisation

1.     Sur la recevabilité

 Arguments des parties

160    La Commission considère que la demande visant à l’annulation de la décision de réorganisation est irrecevable en ce qu’elle ne constitue pas un acte faisant grief au sens de l’article 91, paragraphe 1, du statut.

161    La Commission rappelle que les simples mesures d’organisation interne des services, et plus particulièrement celles touchant à l’organisation administrative, ne sont pas susceptibles de faire l’objet d’un recours juridictionnel, dès lors qu’elles n’affectent pas la situation juridique ou matérielle du fonctionnaire concerné par la mesure dont il s’agit (arrêts du Tribunal du 24 juin 1993, Seghers/Conseil, T‑69/92, Rec. p. II‑651, point 29, et du 14 décembre 2000, Verheyden/Commission, T‑213/99, RecFP p. I‑A‑297 et II‑1355, point 20).

162    Or, tant dans son objet que dans ses effets, la décision de réorganisation se limiterait à fixer la structure interne d’Eurostat, revêtant donc une nature purement objective n’affectant en aucune manière la situation juridique de la requérante.

163    Par ailleurs, dans la mesure où la décision de réorganisation prévoit que les « conseillers principaux sont confirmés dans leurs fonctions », la Commission soutient qu’il s’agit d’un acte purement confirmatif dont le contenu se confond avec celui de la décision de réaffectation du 9 juillet 2003. Un tel acte pourrait constituer un acte attaquable lorsque, comme en l’espèce, le délai pour attaquer l’acte antérieur ne se serait pas encore écoulé. Toutefois, la Commission considère que la décision de réorganisation comprend deux éléments distincts et détachables l’un de l’autre, à savoir, d’une part, celui traitant des conseillers principaux en place et, d’autre part, celui relatif à la fixation de la nouvelle structure d’Eurostat. Dès lors, la requérante ne serait pas recevable à attaquer la décision de réorganisation, pour autant que celle-ci fixe la nouvelle structure d’Eurostat.

164    De plus, selon la Commission, admettre la recevabilité de la présente demande reviendrait à permettre à la requérante de contourner les conditions de recevabilité d’un recours ayant pour véritable objet une omission prétendument illégale de l’administration. En effet, en attaquant la décision de réorganisation « en tant qu’elle ne comporte aucune mesure de réaffectation de la requérante en qualité de directeur », cette dernière viserait en réalité à obtenir une décision portant nouvelle affectation en tant que directeur. Toutefois, la voie procédurale appropriée pour poursuivre un tel but aurait consisté à introduire une demande en ce sens, suivie, le cas échéant, d’une réclamation dirigée contre une éventuelle décision explicite ou implicite de rejet. Or, faute d’avoir respecté la procédure précontentieuse en deux étapes, la requérante ne pourrait pas pallier cette omission en introduisant un recours contre la décision de réorganisation.

165    En outre, la Commission fait valoir que la requérante n’expose ni ne développe aucun moyen spécifique pour mettre en cause la légalité de la décision de réorganisation. Dès lors, dans la mesure où elle vise à l’annulation de cette décision, la requête ne satisferait pas aux conditions prévues par l’article 44, paragraphe 1, du règlement de procédure. La Commission constate que la critique relative à la suppression de l’ancienne direction « Statistiques sociales » d’Eurostat, présentée dans le mémoire en réplique, constitue un grief produit en cours d’instance, donc irrecevable conformément à l’article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure. Les points de la requête auxquels la requérante se réfère auraient tous eu trait à la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 et, tout au plus, à la décision de réorganisation dans la seule mesure où celle-ci confirme la première décision.

166    De plus, selon la Commission, ce grief n’est pas personnel à la requérante, mais tend à mettre en cause l’opportunité politique d’une mesure d’organisation interne des services. En outre, serait dépourvu de pertinence l’argument de la requérante selon lequel la suppression de l’ancienne direction « Statistiques sociales » aurait eu pour conséquence de réduire ses chances d’être réaffectée à une fonction de directeur, car le statut n’accorderait au fonctionnaire aucun droit à un emploi déterminé, mais laisserait à l’AIPN la compétence d’affecter les fonctionnaires, dans l’intérêt du service, aux différents emplois correspondant à leur grade.

167    Quant à la critique de la requérante, présentée dans son mémoire en réplique, à l’encontre de la décision de pourvoir aux emplois de directeurs des directions « Statistiques économiques et monétaires », « Statistiques du marché intérieur », « Statistiques agriculture, pêche, fonds structurels, environnement » et « Statistiques des relations extérieures » d’Eurostat par voie de mutation, de promotion, ou de nomination externe, conformément à l’article 29, paragraphe 1, sous a) et b), et paragraphe 2, du statut et non par voie de réaffectation des conseillers principaux, conformément à l’article 7 du statut, la Commission relève que celle-ci a été produite en cours d’instance et que, dans sa requête, la requérante a attaqué l’absence de mesure de réaffectation à son égard, et non pas la décision relative au pourvoi des emplois litigieux. En tout état de cause, cette décision, au regard tant de son objet que de ses effets, se limiterait à adopter une mesure générale et objective en matière de politique du personnel et, dès lors, n’affecterait pas la situation juridique ou matérielle de la requérante.

168    La requérante conteste l’argument de la Commission selon lequel la décision de réorganisation n’est pas un acte lui faisant grief. Cette décision ne serait pas une simple mesure d’organisation interne des services mais comporterait, à son égard, une décision de réaffectation. La requérante fait valoir qu’une décision de réaffectation peut, en ce qu’elle modifie les conditions d’exercice et la nature des fonctions qu’elle exerce, porter atteinte à ses intérêts moraux et à ses perspectives d’avenir professionnel et donc lui faire grief. Certaines fonctions pourraient, à classement égal, conduire mieux que d’autres à une promotion en raison de la nature des responsabilités exercées (arrêts Ojha/Commission, précité, point 58 ; W/Commission, précité, point 47, et Fronia/Commission, précité, point 32).

169    La décision de réorganisation aurait comme conséquence que la requérante n’a pas été maintenue en qualité de directeur et n’a pas obtenu un nouveau poste de directeur. Cette décision aurait pour effet de l’écarter des structures d’encadrement alors qu’elle aurait pu raisonnablement nourrir l’espérance de se voir attribuer des fonctions hiérarchiques et d’encadrement de plus en plus importantes, ayant même postulé dans le cadre de l’ouverture de l’emploi de directeur général à Eurostat. La décision de réorganisation aurait porté atteinte à sa situation administrative en modifiant la nature et les conditions d’exercice de ses fonctions et en l’orientant vers une carrière différente en lui faisant ainsi grief.

170    En tout état de cause, la requérante soutient que toute décision par laquelle l’autorité réaffecte un directeur, qui est effectivement en charge de management, à un emploi de conseiller principal dépourvu de telles responsabilités, constitue un acte faisant grief étant donné que, en vertu de l’article 7, paragraphe 4, de l’annexe XIII du nouveau statut, les fonctionnaires occupant un poste de directeur bénéficient d’une augmentation du traitement mensuel. L’affectation irrégulière de la requérante sur un emploi de conseiller principal la priverait donc de ce droit.

171    La requérante fait valoir que la décision de réorganisation comporte deux dispositions faisant grief. D’une part, elle comporterait la création de six fonctions provisoires de conseillers principaux de grade A 2, appelées à disparaître à terme indéfini, et, d’autre part, elle supprimerait une direction et une fonction de directeur, précisément celle à laquelle aurait été affectée la requérante. Il ne s’agirait pas d’un acte purement confirmatif, car la création provisoire de fonctions de conseillers principaux aurait été, dans l’esprit de la Commission, une création intérimaire qui serait venue à échéance au plus tard le 29 septembre 2003. La décision de réorganisation, du 1er octobre 2003, aurait donc donné une portée nouvelle à la réaffectation de la requérante, en tous points distincte de celle qui la caractérisait à la date du 9 juillet 2003, car la mesure d’urgence à caractère temporaire serait devenue une création, mais avec un terme indéterminé, de postes de conseillers principaux.

172    De même, la suppression d’une direction et d’une fonction de directeur constituerait une atteinte non motivée à la situation juridique de la requérante et un changement d’attitude de la Commission par rapport à ses décisions des 9 et 23 juillet 2003. Supprimer cette direction et cette fonction reviendrait donc à fermer les portes autant que possible à une réaffectation de la requérante en qualité de directeur au sein d’Eurostat.

173    S’agissant de la prétendue faute consistant à ne pas avoir respecté la procédure précontentieuse en deux étapes, la requérante précise que la Commission avait clairement caractérisé la situation d’affectation en qualité de conseiller principal de situation temporaire, précisant ce qui en commanderait la fin. Une telle présentation aurait été explicitement relayée et confirmée par M. V. A., directeur général. En effet, par un courrier électronique du 11 juillet 2003, celui-ci aurait averti les conseillers principaux d’Eurostat qu’ils seraient contactés par M. D. G. le jour même en vue d’un entretien qui devait prendre place dans le cadre du « suivi de la procédure qui pourrait [leur] permettre d’être réintégré comme directeur ». Dans ces circonstances, une demande aurait été sans objet.

174    En ce qui concerne l’argument de la Commission selon lequel la requérante n’a pas formulé de moyen à l’appui de son recours en annulation contre la décision de réorganisation, la requérante renvoie aux points 31, 34, 36 et 38 de la requête.

 Appréciation du Tribunal

175    L’existence d’un acte faisant grief est une condition indispensable de la recevabilité de tout recours en annulation formé, en vertu de l’article 91, paragraphe 1, du statut, par les fonctionnaires contre l’institution dont ils relèvent. Selon une jurisprudence constante, seul fait grief l’acte qui – dépassant les simples mesures d’organisation internes du service – est susceptible d’affecter directement, individuellement et définitivement la situation statutaire d’un fonctionnaire (ordonnance de la Cour du 3 décembre 1992, Moat/Commission, C‑32/92 P, Rec. p. I‑6379, points 9 et 10 ; ordonnance du Tribunal du 11 mai 1992, Whitehead/Commission, T‑34/91, Rec. p. II‑1723, point 21 ; arrêts du Tribunal du 30 juin 1993, Devillez e.a./Parlement, T‑46/90, Rec. p. II‑699, point 12 ; W/Commission, précité, points 45 et 46, et Fronia/Commission, T‑51/01, précité, point 25).

176    La requérante demande l’annulation de la décision de réorganisation « fixant le nouvel organigramme [d’Eurostat] et ne comportant aucune mesure de réaffectation [la concernant] dans ce cadre, alors qu’une autre mesure individuelle de réaffectation est ordonnée par ailleurs ».

177    Sa demande doit donc être comprise en ce sens qu’elle conteste la décision de réorganisation en ce qu’elle ne met pas fin à son affectation en tant que conseiller principal et ne la réaffecte pas à un poste de directeur.

178    Dans la mesure où la requérante conteste la décision de réorganisation en ce qu’elle ne la réaffecte pas à un poste de directeur, force est de constater que la requérante aurait dû introduire une demande, au sens de l’article 90, paragraphe 1, du statut, suivie éventuellement d’une réclamation, au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut.

179    Pour autant que la requérante conteste la décision de réorganisation en ce qu’elle ne met pas fin à son affectation en tant que conseiller principal, il y a lieu de rappeler que, ainsi qu’il a été exposé dans le cadre du premier moyen, cette décision revêtait un caractère provisoire, dans l’attente des résultats des différentes enquêtes de la task-force et du service d’audit interne.

180    Par ailleurs, il y a lieu d’analyser la décision de réorganisation comme comportant, en substance, deux aspects, le premier étant constitué de la réorganisation des services proprement dite, et le second étant constitué d’un faisceau de décisions individuelles maintenant la réaffectation des directeurs à des fonctions de conseillers principaux « appelées à disparaître à terme », opérée initialement par les décisions de réaffectation du 9 juillet 2003, en tant que corollaire de la réorganisation (ci-après les « décisions de réaffectation du 1er octobre 2003 »). Il s’ensuit que ce second aspect de la décision de réorganisation fait grief à la requérante, laquelle est donc recevable à en demander l’annulation. En outre, contrairement aux affirmations de la Commission dans ses écritures, la décision de réaffectation du 1er octobre 2003 ne saurait être qualifiée de purement confirmative de la décision de réaffectation du 9 juillet 2003, compte tenu de ce que la décision de réaffectation du 1er octobre 2003 n’est pas motivée par le souci d’assurer la sérénité et le bon déroulement des enquêtes, lesquelles étaient arrivées à leur terme, mais par la nécessité de procéder à la réorganisation des services d’Eurostat. La Commission a d’ailleurs affirmé, lors de l’audience, que cette décision n’était pas confirmative de la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 quant à ses motifs.

181    En ce qui concerne la réorganisation des services d’Eurostat, la requérante critique, dans son mémoire en réplique, la décision de réorganisation en ce qu’elle procède à la suppression d’une direction et donc d’un poste de directeur et en ce qu’elle prévoit le pourvoi aux emplois de nouveaux directeurs par voie de mutation, de promotion ou de nomination externe et non par voie de réaffectation des conseillers principaux. À cet égard, il suffit de constater qu’il s’agit de nouveaux moyens introduits en cours d’instance qui doivent être rejetés comme irrecevables, conformément à l’article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure.

182    À titre surabondant, bien qu’il s’agisse de la suppression de la direction à laquelle la requérante était affectée, conformément à la jurisprudence, cet aspect de la réorganisation de la décision de réorganisation ne peut pas être considéré comme un acte faisant grief à la requérante en lui enlevant directement, individuellement et définitivement la possibilité d’être nommée à un poste de directeur lors de la réorganisation (voir, en ce sens, arrêt Fronia/Commission, précité, points 26 et 27). Il en va de même de la décision de pourvoir aux nouveaux postes de directeurs par voie d’avis de vacance.

183    En outre, pour autant que la demande de la requérante doive être comprise comme visant à contester le nouvel organigramme en tant que tel, il suffit de constater qu’il s’agit d’un document établi au sein d’une institution et d’un document interne qui ne réunit pas les caractéristiques d’un acte administratif, qui ne produit pas d’effets juridiques et qui a une finalité strictement informative (voir, en ce sens, arrêt Fronia/Commission, précité, point 28). La requérante n’est donc pas recevable à en demander l’annulation.

184    Il résulte de tout ce qui précède que la demande de la requérante visant à l’annulation de la décision de réorganisation n’est recevable que dans la mesure où elle concerne la décision de réaffectation du 1er octobre 2003.

2.     Sur le fond

 Arguments des parties

185    Dans sa requête, la requérante n’invoque aucun moyen autonome quant à la demande visant à l’annulation de la décision de réaffectation du 1er octobre 2003, mais inclut cette demande au sein des moyens concernant la demande visant à l’annulation de la décision de réaffectation du 9 juillet 2003.

186    Elle fait toutefois valoir, dans ce cadre, que la décision de réaffectation du 1er octobre 2003 viole également l’article 7 du statut en ce qu’il n’y a aucun intérêt du service justifiant le maintien des anciens directeurs dans les fonctions de conseillers principaux. En outre, la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 aurait été temporaire, dans l’attente du résultat des investigations visant à mettre en évidence le rôle des directeurs dans les irrégularités commises (« screening ») et de la fin des enquêtes conformément à la mission de la task-force visant à permettre à la Commission de prendre les mesures de gestion et d’organisation en vue d’assurer le respect de la réglementation financière et des règles afférentes à la bonne administration au sein d’Eurostat.

187    La requérante fait valoir, par ailleurs, que la décision de réaffectation du 1er octobre 2003 ne contient aucune motivation formelle.

188    La requérante estime enfin que la décision de réaffectation du 1er octobre 2003, en ce qu’elle reconduit pour une période indéterminée son affectation à un emploi de conseiller principal, constitue un changement d’attitude de la Commission qui a, dès lors, manqué à l’obligation de respect des décisions internes qu’elle avait volontairement édictées, et dont elle ne pouvait ensuite s’écarter sans préciser les raisons qui l’amenaient à ce faire (arrêt du Tribunal du 21 janvier 2004, Robinson/Parlement, T‑328/01, RecFP p. I‑A‑5 et II‑23, point 50), violant ainsi le principe de confiance légitime.

189    La Commission fait valoir que la requérante n’est pas fondée à soutenir que la décision de réaffectation du 1er octobre 2003 a été adoptée en violation du principe de protection de la confiance légitime. En effet, la requérante n’avancerait aucunement des assurances précises, inconditionnelles et concordantes que lui aurait fournies l’administration au sujet d’une nouvelle réaffectation à une fonction de directeur. Au contraire, les seules déclarations de la Commission à cet égard seraient assorties de maintes conditions et réserves.

190    En tout état de cause, comme il ressortirait de son chef de conclusions par lequel la requérante attaque la décision de réorganisation « en tant qu’elle ne comporte aucune mesure de réaffectation [la concernant] en qualité de directeur », ses arguments tendraient, en substance, à démontrer la prétendue illégalité de l’omission, de la part de la Commission, de la réaffecter en qualité de directeur. Or, la légalité de la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 ne saurait être mise en cause par ces arguments, dès lors que la légalité d’un acte communautaire devrait être appréciée en fonction des éléments de fait et de droit existant à la date où l’acte a été adopté (arrêt Wieme/Commission, précité, point 56). Dès lors que, selon la requérante, la Commission aurait été obligée de la réaffecter en tant que directeur, à la fin de la période « provisoire », elle aurait dû réagir au non-respect de cette prétendue obligation par une demande invitant la Commission à procéder à une telle réaffectation.

 Appréciation du Tribunal

191    En premier lieu, en ce qui concerne l’existence de l’intérêt du service, il convient de rappeler que, conformément à la jurisprudence citée au point 62 ci-dessus, compte tenu de l’étendue du pouvoir d’appréciation des institutions dans l’évaluation de l’intérêt du service, le contrôle du Tribunal portant sur le respect de la condition relative à l’intérêt du service doit se limiter à la question de savoir si l’AIPN s’est tenue dans des limites raisonnables, non critiquables, et n’a pas usé de son pouvoir d’appréciation de manière manifestement erronée.

192    En l’espèce, il ressort du procès-verbal du 1er octobre 2003, cité au point 15 ci-dessus, que la Commission a approuvé la modification de l’organigramme d’Eurostat telle que reprise dans la communication sur le nouvel organigramme, comprenant la suppression d’une direction et d’une fonction de directeur de grade A 2 ainsi que la publication des avis de vacance pour les postes de directeurs. Dans la communication sur le nouvel organigramme, on constate la « confirmation de la création provisoire de 6 fonctions A 2 de conseillers principaux, qui sont appelées à disparaître à terme ».

193    En l’espèce, il ressort de la communication sur le nouvel organigramme que la réorganisation des services d’Eurostat était motivée par la nécessité de recentrer Eurostat sur ses activités de base, de simplifier sa structure organisationnelle et de répondre aux défis de l’élargissement. S’agissant de l’encadrement supérieur, cette communication ajoute qu’« il est proposé – étant donné les exigences qu’impliquent les nouvelles tâches et responsabilités des différentes directions – de publier tous les postes de directeur de la nouvelle structure ».

194    Compte tenu de ce que, d’une part, la requérante ne démontre aucunement que la Commission a fait usage de ses pouvoirs de manière manifestement erronée en considérant que la nouvelle organisation d’Eurostat entraînait la nécessité de pourvoir les postes de directeur par voie d’avis de vacance et, par voie de conséquence, de maintenir le conseillers principaux en place et, d’autre part, ainsi qu’il a été exposé précédemment, le grief de la requérante pris d’un détournement de pouvoir dont serait responsable M. V. A. doit être rejeté comme irrecevable et, en tout état de cause, non fondé, il y a lieu de considérer que la Commission n’a pas dépassé les limites du large pouvoir d’appréciation dont elle bénéficie dans l’évaluation de l’intérêt du service justifiant que la requérante soit maintenue dans ses fonctions de conseiller principal le 1er octobre 2003.

195    En deuxième lieu, en ce qui concerne la motivation de la décision de réaffectation du 1er octobre 2003, il convient de rappeler que, si une simple mesure d’organisation interne, prise dans l’intérêt du service, ne porte pas atteinte à la position statutaire du fonctionnaire ou au principe de correspondance entre le grade et l’emploi, l’administration n’est pas tenue de la motiver (arrêt du 7 mars 1990, Hecq/Commission, précité, point 14, et arrêt Cwik/Commission, précité, point 62).

196    En tout état de cause, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence, l’obligation de motivation a pour but, d’une part, de fournir à l’intéressé une indication suffisante pour apprécier le bien-fondé de la décision prise par l’administration et l’opportunité d’introduire un recours devant le Tribunal et, d’autre part, de permettre à ce dernier d’exercer son contrôle. Son étendue doit être appréciée en fonction des circonstances concrètes, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que le destinataire peut avoir à recevoir des explications (arrêt Morello/Commission, précité, point 28).

197    En outre, une décision est suffisamment motivée dès lors qu’elle est intervenue dans un contexte connu du fonctionnaire concerné qui lui permet de comprendre la portée de la mesure prise à son égard (arrêts W/Commission, précité, point 141 ; Campoli/Commission, précité, point 50, et Cwik/Commission, précité, point 63).

198    En l’espèce, aux termes du procès-verbal du 1er octobre 2003, la Commission a approuvé la modification de l’organigramme d’Eurostat telle que reprise dans la communication sur le nouvel organigramme. Cette communication présente des explications détaillées relatives à la réorganisation ainsi que les motifs qui la justifient. Référence y est également faite à la note d’information de M. Solbes du 23 juillet 2003, dans laquelle celui-ci explique les raisons pour lesquelles il est nécessaire d’adapter l’organigramme d’Eurostat.

199    Dès lors, compte tenu du contexte dans lequel la décision de réaffectation du 1er octobre 2003 est intervenue, et qui était connu de la requérante, il y a lieu de considérer que cette dernière a été en mesure d’en apprécier la légalité ainsi que l’opportunité de la soumettre à un contrôle juridictionnel.

200    Enfin, en troisième lieu, en ce qui concerne le grief de la requérante pris de ce la Commission aurait violé le principe de confiance légitime en maintenant sa réaffectation à l’issue des enquêtes, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le droit de réclamer la protection de la confiance légitime, qui est un des principes fondamentaux du droit communautaire, s’étend à tout particulier qui se trouve dans une situation de laquelle il ressort que l’administration communautaire, en lui fournissant des assurances précises, inconditionnelles et concordantes, émanant de sources autorisées et fiables, a fait naître chez lui des espérances fondées (voir arrêt du Tribunal du 8 décembre 2005, Reynolds/Parlement, T‑237/00, non encore publié au Recueil, point 139, et la jurisprudence citée).

201    Or, s’il est vrai que, ainsi qu’il a été exposé ci-dessus, la décision de réaffectation du 1er octobre 2003 maintient la requérante dans ses fonctions de conseiller principal pour des motifs différents de ceux justifiant sa réaffectation initiale en date du 9 juillet 2003, cette circonstance ne saurait être considérée comme contraire au principe de confiance légitime.

202    En effet, bien que, contrairement aux affirmations de la Commission et conformément à ce qui a été constaté précédemment, la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 ait revêtu un caractère provisoire, il ne saurait être considéré que l’administration communautaire a fourni à la requérante des assurances précises, inconditionnelles et concordantes selon lesquelles sa réaffectation prendrait nécessairement fin à l’issue des enquêtes menées au sein d’Eurostat.

203    Ainsi, le procès-verbal du 9 juillet 2003 indique que « la Commission demande que des clarifications soient rapidement apportées concernant la situation de ces directeurs de façon à permettre leur éventuelle reprise dès que possible ». De même, dans son courrier électronique adressé à la requérante le 11 juillet 2003, M. V. A. informe simplement la requérante de ce que M. D. G. la contactera dans le cadre de « la procédure qui pourrait lui permettre d’être réintégrée comme directeur ». Enfin, en réponse à la lettre de la requérante du 4 août 2003, MM. Kinnock et Solbes ont indiqué qu’ils pouvaient assurer à la requérante que « M. Prodi, Mme Schreyer et [eux-mêmes] all[aient] recommander au collège l’adoption d’autres mesures appropriées à la première occasion possible mais [qu’]une telle opportunité ne [pourrait] se présenter que si elle [était] compatible avec la position de précaution qui [était] manifestement essentielle ».

204    S’il ressort de ces éléments que, antérieurement à la décision de réaffectation du 1er octobre 2003, la réintégration de la requérante en tant que directeur faisait partie des hypothèses envisageables à l’issue des enquêtes, il n’en demeure pas moins que cette réintégration a été présentée à la requérante comme hypothétique et conditionnelle, de sorte que lesdits éléments n’ont pu faire naître une confiance légitime à son bénéfice.

205    Il résulte de tout ce qui précède que la demande en annulation de la décision de réaffectation du 1er octobre 2003 doit être rejetée et qu’il convient, par voie de conséquence, de rejeter la demande d’annulation visant la décision de réorganisation.

 Sur la demande en indemnité

1.     Arguments des parties

206    La requérante demande au Tribunal de condamner la Commission à lui verser la somme de 25 000 euros, à titre de réparation du préjudice moral qu’elle prétend avoir subi.

207    La décision de réaffectation du 9 juillet 2003 et la décision de réorganisation accréditeraient, en effet, de manière irréversible l’idée qu’elle aurait participé aux prétendus dysfonctionnements d’Eurostat, malgré son arrivée à cette direction générale postérieurement à la période au cours de laquelle les actes en cause auraient été commis.

208    Or, cette circonstance porterait atteinte tant à son honneur qu’à sa réputation et à sa crédibilité professionnelles, non seulement au sein de la Commission, mais aussi dans les milieux professionnels internationaux dans lesquels elle serait connue. En effet, par ses fonctions passées et présentes au sein de la Commission, la requérante aurait acquis une certaine notoriété en politique, notamment dans des forums internationaux. Dans ces forums, le fait qu’elle ait été traitée de la même manière que les autres hauts fonctionnaires d’Eurostat alimenterait nécessairement des suspicions et des rumeurs à son égard.

209    À ces éléments s’ajouterait le fait que rien ne permet de penser qu’elle sera réintégrée dans son ancien poste de directeur.

210    Enfin, un préjudice lui aurait déjà été causé par le fait qu’elle se serait vu priver des compétences inhérentes à la fonction de directeur.

211    Par ailleurs, dans son mémoire en réplique, la requérante demande que la Commission soit condamnée, au titre de la réparation de son préjudice matériel, à lui payer une somme, qu’il lui appartiendra de chiffrer, correspondant à l’augmentation du traitement mensuel qui aurait dû lui être versée depuis le 1er mai 2004 en vertu de l’article 7, paragraphe 4, de l’annexe XIII du nouveau statut. En effet, elle aurait indûment été privée, à compter de cette date, de ce supplément salarial qui lui aurait été versé si elle n’avait pas été privée de son emploi de directeur.

212    Premièrement, la Commission fait valoir que la requérante n’a pu apporter la preuve de l’illégalité d’actes commis par la Commission.

213    Deuxièmement, dans la mesure où la décision de réorganisation ne ferait pas grief à la requérante, aucun préjudice ne pourrait en résulter.

214    Troisièmement, l’annulation d’un acte de l’administration attaqué par un fonctionnaire constituerait, en elle-même, une réparation adéquate et, en principe, suffisante de tout préjudice moral que ce dernier pourrait avoir subi, sauf lorsque l’acte illégal de l’administration comporte une appréciation des capacités ou du comportement du fonctionnaire susceptible de le blesser (arrêts de la Cour du 7 février 1990, Culin/Commission, C‑343/87, Rec. p. I‑225, points 25 à 29, et du Tribunal du 23 mars 2000, Rudolph/Commission, T‑197/98, RecFP p. I‑A‑55 et II‑241, point 98). Or, en l’espèce, ni la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 ni la décision de réorganisation ne comporteraient la moindre appréciation de cette nature pouvant être considérée comme blessante pour la requérante. En effet, ces décisions auraient été prises dans le seul intérêt du service et sans considération d’un quelconque comportement individuel de la requérante. La requérante n’aurait produit aucun élément dont il découlerait que l’annulation de ces décisions pourrait être insuffisante pour réparer le prétendu préjudice moral qu’elle aurait subi. Partant, à supposer même que les décisions attaquées soient illégales, la demande en indemnité ne serait pas fondée, dès lors que l’annulation de ces décisions serait suffisante pour réparer le prétendu préjudice moral de la requérante.

2.     Appréciation du Tribunal

215    À titre liminaire, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 44, paragraphe 1, du règlement de procédure, la partie requérante a l’obligation de définir l’objet du litige et de présenter ses conclusions dans l’acte introductif d’instance. Si l’article 48, paragraphe 2, du même règlement permet, dans certaines circonstances, la production de moyens nouveaux en cours d’instance, cette disposition ne peut, en aucun cas, être interprétée comme autorisant la partie requérante à saisir le Tribunal de conclusions nouvelles et à modifier ainsi l’objet du litige (arrêts du Tribunal du 18 septembre 1992, Asia Motor France e.a./Commission, T‑28/90, Rec. p. II‑2285, point 43, et du 12 juillet 2001, T. Port/Conseil, T‑2/99, Rec. p. II‑2093, point 34 ; voir également, par analogie, arrêt de la Cour du 25 septembre 1979, Commission/France, 232/78, Rec. p. 2729, point 3).

216    En l’espèce, force est de constater que la requérante a introduit sa demande de réparation du préjudice matériel qu’elle prétend avoir subi au stade du mémoire en réplique. Toutefois, force est de constater que la requérante avait déjà introduit, dans le cadre de la requête, une demande visant à la réparation du préjudice moral allégué et que ce n’est qu’après l’introduction du recours, et avant le dépôt du mémoire en réplique, que le nouveau statut est entré en vigueur. Compte tenu de ce que la demande de réparation du préjudice matériel doit être considérée comme directement liée à la demande d’annulation de la décision de réaffectation du 9 juillet 2003, il y a donc lieu d’admettre la recevabilité de la demande de réparation du préjudice matériel résultant de l’augmentation du traitement mensuel dont la requérante aurait été privée depuis le 1er mai 2004 en application de l’article 7, paragraphe 4, du nouveau statut, ce que la Commission ne conteste d’ailleurs pas.

217    Quant au fond de la demande de réparation, il convient de rappeler que la responsabilité non contractuelle de la Communauté suppose la réunion d’un ensemble de conditions tenant à l’illégalité du comportement reproché aux institutions, à la réalité du dommage et à l’existence d’un lien de causalité entre le comportement allégué et le préjudice invoqué. Ainsi, doit être rejetée la demande introduite par un fonctionnaire visant à obtenir réparation du préjudice moral et matériel qui lui aurait été causé par l’illégalité du comportement de l’organe communautaire, dès lors que cette illégalité n’est pas établie (arrêts W/Commission, précité, point 165, et Cwik/Commission, précité, point 72).

218    En l’espèce, il résulte de l’examen des moyens avancés par la requérante à l’appui de sa demande en annulation des décisions de réaffectation du 9 juillet et du 1er octobre 2003 que celles-ci ne sont entachées d’aucun vice susceptible d’affecter leur légalité. La demande de réparation du préjudice matériel subi du fait de l’augmentation de traitement mensuel dont la requérante aurait été privée en raison de sa réaffectation doit donc être rejeté comme non fondée.

219    Toutefois, le Tribunal a également considéré, dans le cadre de l’examen du troisième moyen, que les formes données à la communication au public de la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 avaient nécessairement produit, à l’égard de celui-ci, ou à tout le moins d’une partie de celui-ci, l’impression que la requérante était mêlée aux irrégularités commises au sein d’Eurostat.

220    Ainsi, si les décisions attaquées ne sauraient, en soi, être entachées d’illégalité, il n’en reste pas moins que, en agissant de la sorte, la Commission a commis une faute de service de nature à engager sa responsabilité à l’égard de la requérante, dès lors que ladite faute est étroitement liée à la décision de réaffectation du 9 juillet 2003 faisant l’objet de la demande en annulation.

221    Or, il ne saurait être nié que, en donnant l’impression, par la voie d’un communiqué de presse librement accessible au public, que la requérante était, ne serait-ce que de manière éloignée ou indirecte, associée aux malversations en cause ou, à tout le moins, qu’une telle suspicion pesait sur elle, une telle faute a causé un préjudice moral à la requérante, dès lors qu’elle l’a placée dans la situation de devoir continuellement se justifier vis-à-vis tant de ses collègues que des personnes extérieures à Eurostat.

222    Dans ces circonstances, le Tribunal considère qu’un euro symbolique constitue une indemnisation adéquate de la requérante pour le préjudice moral qu’elle a subi du fait de la faute de service commise par la Commission.

 Sur les dépens

223    Aux termes de l’article 87, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement de procédure, le Tribunal peut répartir les dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs, étant entendu que, en vertu de l’article 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les dépens exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci.

224    En l’espèce, le recours ayant été accueilli en partie, il sera fait une juste appréciation de la cause en décidant que la partie défenderesse supportera, outre ses propres dépens, y compris ceux afférents à la procédure en référé devant le Tribunal, le cinquième des dépens exposés par la requérante, y compris ceux afférents à la procédure en référé.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      La Commission est condamnée à verser à la requérante la somme d’un euro à titre de dommages et intérêts pour faute de service.

2)      Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      La Commission supportera ses propres dépens, y compris ceux afférents à la procédure en référé devant le Tribunal, et le cinquième des dépens exposés par la requérante, y compris ceux afférents à la procédure en référé devant le Tribunal.

4)      La requérante supportera quatre cinquièmes de ses propres dépens, y compris ceux afférents à la procédure en référé devant le Tribunal.

Jaeger

Tiili

Czúcz

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 7 février 2007.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       M. Jaeger

Table des matières

Faits à l’origine du recours

Procédure et conclusions des parties

Sur la demande visant à l’annulation de la décision de réaffectation du 9 juillet 2003

1.  Observation préliminaire

2.  Sur la recevabilité

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

3.  Sur le fond

Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, du statut

Sur l’intérêt du service

–  Arguments des parties

–  Appréciation du Tribunal

Sur l’équivalence des emplois

–  Arguments des parties

–  Appréciation du Tribunal

Sur le deuxième moyen, tiré de la violation du principe d’égalité de traitement

Sur le troisième moyen, tiré du détournement de pouvoir et de procédure ainsi que de la violation du devoir de sollicitude, du principe de bonne administration et du droit d’être entendu

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

Sur le quatrième moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

Sur la demande visant à l’annulation de la décision de réorganisation

1.  Sur la recevabilité

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

2.  Sur le fond

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

Sur la demande en indemnité

1.  Arguments des parties

2.  Appréciation du Tribunal

Sur les dépens



* Langue de procédure : le français.