Language of document : ECLI:EU:T:2012:131

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (chambre des pourvois)

19 mars 2012 (*)

« Pourvoi – Fonction publique – Fonctionnaires – Rémunération – Refus d’accorder aux requérants le bénéfice d’une indemnité pour service continu ou par tours – Délai de réclamation – Tardiveté – Pourvoi en partie manifestement non fondé et en partie manifestement irrecevable »

Dans l’affaire T‑398/11 P,

ayant pour objet un pourvoi formé contre l’ordonnance du Tribunal de la fonction publique (deuxième chambre) du 10 mai 2011, Barthel e.a./Cour de justice (F‑59/10), et tendant à l’annulation de cette ordonnance,

Yvette Barthel, fonctionnaire de la Cour de justice de l’Union européenne, demeurant à Arlon (Belgique),

Marianne Reiffers, fonctionnaire de la Cour de justice de l’Union européenne, demeurant à Olm (Luxembourg),

Lieven Massez, fonctionnaire de la Cour de justice de l’Union européenne, demeurant à Luxembourg (Luxembourg),

représentés par Mes S. Orlandi, A. Coolen, J.-N. Louis, E. Marchal et D. Abreu Caldas, avocats,

parties requérantes,

l’autre partie à la procédure étant

Cour de justice de l’Union européenne, représentée par M. A. Placco, en qualité d’agent,

partie défenderesse en première instance,

LE TRIBUNAL (chambre des pourvois),

composé de MM. M. Jaeger, président, O. Czúcz et S. Papasavvas (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

1        Par leur pourvoi, introduit au titre de l’article 9 de l’annexe I du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, les requérants, Mme Yvette Barthel, Mme Marianne Reiffers et M. Lieven Massez, demandent l’annulation de l’ordonnance du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (deuxième chambre) du 10 mai 2011, Barthel e.a./Cour de justice (F‑59/10, ci-après l’« ordonnance attaquée »), par laquelle celui-ci a rejeté comme étant irrecevable leur recours tendant à l’annulation de la décision de la Cour de justice refusant de leur accorder le bénéfice d’une indemnité pour service continu ou par tours.

 Antécédents du litige

2        Les faits à l’origine du litige sont exposés aux points 2 à 7 de l’ordonnance attaquée, dans les termes suivants :

« 2      Les requérants sont fonctionnaires de la Cour de justice, affectés à l’unité ‘Support informatique’ de la direction des technologies de l’information en tant que standardistes.

3      Le 8 juin 2009, les requérants ont saisi l’autorité investie du pouvoir de nomination de la Cour de justice (ci-après l’‘AIPN’) d’une demande tendant à obtenir pour chacun d’eux l’application du règlement no 300/76, dans sa version en vigueur au moment de la demande, et le versement, avec effet rétroactif au 20 décembre 2006, de l’indemnité prévue par l’article 1er, paragraphe 1, premier tiret, dudit règlement.

4      À l’expiration du délai de quatre mois prévu à l’article 90, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le ‘statut’), soit le 8 octobre 2009, le défaut de réponse de l’AIPN à la demande mentionnée au point précédent, a fait naître une décision implicite de rejet de la demande.

5      Par mémorandum du 28 octobre 2009, le directeur général de la direction générale du personnel et des finances de la Cour de justice a informé les requérants de ce que le greffier, en sa qualité d’AIPN, avait décidé de rejeter leur demande au motif que ‘dans la mesure où [le] travail [du standard téléphonique] n’est effectué, sauf cas strictement exceptionnel, ni la nuit, ni le samedi, ni le dimanche, ni les jours fériés, [ils] ne rempliss[aient] pas la condition [prévue à] l’article 56 bis du statut […] et que, par conséquent, [ils] ne pouv[aient] pas prétendre au bénéfice de l’indemnité en question sur la base des règlements no 300/76 et no 1873/2006 pris en application dudit article 56 bis.’ Il ressort du dossier que la décision de l’AIPN a été adoptée le 26 octobre 2009.

6      Par lettre datée du 14 janvier 2010, réceptionnée le 26 janvier suivant, les requérants ont introduit une réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut à l’encontre de cette décision explicite de rejet.

7      Par décision du 20 avril 2010, le comité chargé des réclamations a rejeté la réclamation comme étant irrecevable pour cause de tardiveté. Cette décision a été notifiée aux requérants qui en ont accusé réception le 12 mai suivant. »

 Procédure en première instance et ordonnance attaquée

 Procédure devant le Tribunal de la fonction publique

3        Par requête déposée au greffe du Tribunal de la fonction publique le 20 juillet 2010, les requérants ont introduit un recours devant ledit Tribunal, enregistré sous la référence F‑59/10, qui vise à l’annulation de la décision du greffier de la Cour de justice rejetant leur demande du 8 juin 2009 de bénéficier pour chacun d’eux, à compter du 20 décembre 2006, de l’application du règlement (CECA, CEE, Euratom) no 300/76 du Conseil, du 9 février 1976, déterminant les catégories de bénéficiaires, les conditions d’attribution et les taux des indemnités qui peuvent être accordées aux fonctionnaires appelés à exercer leurs fonctions dans le cadre d’un service continu ou par tours (JO L 38, p. 1), ledit règlement ayant notamment été modifié par le règlement (CE/Euratom) no 1873/2006 du Conseil du 11 décembre 2006 (JO L 360, p. 61).

4        Les requérants ont conclu, en première instance, à ce qu’il plaise au Tribunal de la fonction publique :

–        annuler la décision du greffier de la Cour de justice rejetant leur demande du 8 juin 2009 de bénéficier, à compter du 20 décembre 2006, de l’indemnité pour service continu ou par tours ;

–        condamner la Cour de justice aux dépens.

5        Par acte séparé parvenu au greffe du Tribunal de la fonction publique le 13 septembre 2010, la Cour de justice a soulevé une exception d’irrecevabilité au titre de l’article 78 du règlement de procédure dudit Tribunal, dans laquelle elle a conclu à ce qu’il plaise à ce dernier :

–        statuer sur la recevabilité de la requête sans engager le débat au fond, conformément à l’article 78 de son règlement de procédure ;

–        déclarer le recours irrecevable par voie d’ordonnance prise en application de l’article 76 du règlement de procédure, ou, à titre subsidiaire, de l’article 78, paragraphe 3, de ce même règlement ;

–        condamner les requérants aux dépens.

6        Dans leurs observations sur l’exception d’irrecevabilité, les requérants ont conclu à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter l’exception d’irrecevabilité ou, à tout le moins, la joindre au fond ;

–        fixer un délai pour le dépôt du mémoire en défense.

 Ordonnance attaquée

7        Par l’ordonnance attaquée, prise sur le fondement de l’article 78 de son règlement de procédure, le Tribunal de la fonction publique a rejeté le recours comme étant irrecevable. Il a néanmoins, en application de l’article 88 dudit règlement de procédure, condamné la Cour de justice à supporter l’ensemble des dépens de l’instance, en raison de l’attitude de cette dernière et, notamment, de son manque de diligence pendant la procédure précontentieuse, celle-ci ayant laissé s’écouler le délai prévu à l’article 90, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut ») avant d’adopter une décision explicite de rejet de la demande des requérants.

8        Le Tribunal de la fonction publique a, tout d’abord, rappelé, au point 22 de l’ordonnance attaquée, que les délais de réclamation et de recours étaient d’ordre public et ne constituaient pas un moyen à la discrétion des parties ou du juge, lequel devait vérifier s’ils étaient respectés.

9        Il a ensuite relevé, aux points 23 et 24 de l’ordonnance attaquée, que, compte tenu du silence observé par l’administration quatre mois après l’introduction par les requérants de la demande prévue par l’article 90, paragraphe 1, du statut, une décision implicite de rejet était intervenue le 8 octobre 2009 et que, à compter de cette date, les requérants disposaient, en vertu du deuxième paragraphe de cette disposition, d’un délai de trois mois pour introduire une réclamation contre la décision implicite de rejet. Il a relevé, à cet égard, que les requérants avaient attendu jusqu’au 14 janvier 2010 pour introduire leur réclamation, soit plus de trois mois après l’intervention de la décision implicite de rejet.

10      Par ailleurs, aux points 25 et 26 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal de la fonction publique a observé que, bien que les requérants aient été informés le 28 octobre 2009 de la décision de l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») de la Cour de justice, adoptée le 26 octobre 2009, rejetant explicitement leur demande, une telle décision constituait un acte purement confirmatif selon une jurisprudence constante, à laquelle l’arrêt cité par les requérants, en l’occurrence l’arrêt du Tribunal de la fonction publique du 30 novembre 2009, Voslamber/Commission (F‑86/08, RecFP p. I-A-1-485 et II-A-1-2641), n’aurait nullement dérogé.

11      En outre, au point 27 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal de la fonction publique a conclu que, en l’absence d’une disposition dans le statut étendant la règle spécifique énoncée à l’article 91, paragraphe 3, dudit statut, au rejet d’une demande introduite au titre de l’article 90, paragraphe 1, de ce même statut, l’argument des requérants selon lequel l’AIPN aurait procédé à un réexamen de leur demande et donc pris une nouvelle décision à leur égard était inopérant. De même, il a relevé que, dans la mesure où cet argument était fondé sur le fait que l’AIPN avait sollicité l’avis interne auprès de l’un de ses services, il manquait en droit et en fait, dès lors que, d’une part, un tel avis ne constituait pas un nouveau motif de la décision, mais était venu simplement corroborer la position initialement prise par l’auteur de la décision implicite et, d’autre part, aucun élément du dossier ne permettait d’affirmer que cet avis aurait mis en lumière l’existence d’un élément de fait ou de droit nouveau qui aurait été inconnu de l’AIPN lorsqu’elle a adopté la décision implicite de rejet.

12      Enfin, aux points 28 à 30 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal de la fonction publique a constaté que la tardiveté de la réclamation n’était pas non plus remise en cause par les autres arguments invoqués par les requérants, tirés de l’erreur excusable et du droit à un recours juridictionnel effectif, alors que l’argument tiré de l’absence de motivation de la décision implicite de rejet constituait, en réalité, un grief visant à contester la légalité externe de ladite décision et qu’il était, en conséquence, inopérant pour établir la recevabilité du recours.

 Sur le pourvoi

 Procédure et conclusions des parties

13      Par mémoire déposé au greffe du Tribunal le 25 juillet 2011, les requérants ont introduit le présent pourvoi. Le 10 novembre 2011, la Cour de justice a déposé le mémoire en réponse.

14      Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 21 novembre 2011, les requérants ont renoncé à demander l’autorisation de déposer un mémoire en réplique au titre de l’article 143, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal.

15      La procédure écrite a été close le 5 décembre 2011.

16      Par lettre parvenue au greffe du Tribunal le 9 décembre 2011, les requérants ont, en vertu de l’article 146 du règlement de procédure, demandé au Tribunal d’ouvrir la phase orale de la procédure.

17      Les requérants concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler l’ordonnance attaquée ;

–        déclarer le recours recevable ;

–        renvoyer l’affaire au Tribunal de la fonction publique pour qu’elle soit jugée au fond ;

–        réserver les dépens.

18      La Cour de justice conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le pourvoi ;

–        condamner les requérants aux dépens.

 En droit

19      En vertu de l’article 145 du règlement de procédure, le Tribunal peut, lorsque le pourvoi est manifestement irrecevable ou manifestement non fondé, le rejeter à tout moment par voie d’ordonnance motivée, et ce même si une partie a demandé la tenue d’une audience (ordonnance du Tribunal du 24 septembre 2008, Van Neyghem/Commission, T‑105/08 P, RecFP p. I-B-1-49 et II-B-1-355, point 21). En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier et décide, en application de cet article, de statuer sans poursuivre la procédure.

20      À l’appui de leur pourvoi, les requérants invoquent deux moyens. Par le premier moyen, ils reprochent au Tribunal de la fonction publique d’avoir violé l’obligation de motivation découlant de l’article 296 TFUE, de l’article 36 du statut de la Cour de justice, de l’article 78, paragraphe 3, et de l’article 81, paragraphe 2, du règlement de procédure dudit Tribunal. Par le second moyen, les requérants invoquent une violation des articles 90 et 91 du statut et une erreur de droit.

 Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’obligation de motivation

21      Les requérants font valoir, premièrement, que le Tribunal de la fonction publique a méconnu son devoir, inhérent à l’obligation de motivation, d’examiner toutes les violations de droit alléguées devant lui et, en particulier, la violation de l’article 90, paragraphe 2, deuxième tiret, du statut, qu’ils auraient invoquée en première instance de manière claire et précise. En outre, ils soutiennent que le Tribunal de la fonction publique n’a pas répondu à leur argumentation développée à l’appui de l’illégalité d’une interprétation a contrario de l’article 90, paragraphe 2, du statut, par rapport à l’article 91 de ce même statut, mais qu’il s’est limité à se référer à une jurisprudence constante selon laquelle une décision portant rejet explicite d’une demande, intervenue à la suite d’une décision implicite de rejet de la même demande, serait purement confirmative. Ce faisant, le Tribunal de la fonction publique n’aurait fourni aucune explication aux requérants leur permettant de comprendre les motifs pour lesquels il a écarté leur argumentation.

22      Les requérants estiment, deuxièmement, que l’interprétation du Tribunal de la fonction publique de l’article 90 du statut, au point 22 de l’ordonnance attaquée, est discriminatoire, dès lors qu’elle prive les demandeurs, qui se voient notifier une décision explicite de rejet dans le délai pour introduire une réclamation, d’une partie du délai de réflexion prévu par le statut pour apprécier l’opportunité de saisir l’AIPN d’une réclamation contre tout acte leur faisant grief. Partant, les requérants considèrent que l’ordonnance attaquée est entachée d’une erreur de droit.

23      La Cour de justice conteste les arguments des requérants.

24      Il convient de relever, à titre liminaire, que l’argumentation des requérants relative au fait que l’interprétation de l’article 90 du statut, au point 22 de l’ordonnance attaquée, repose sur une prémisse erronée, est sans pertinence dans le cadre du présent moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation, dès lors qu’elle tend, en substance, à contester le bien fondé de la motivation. Or, cette question relève, selon une jurisprudence constante, de la légalité au fond du raisonnement du Tribunal de la fonction publique exposé dans l’ordonnance attaquée. En effet, le caractère éventuellement erroné d’une motivation n’en fait pas une motivation inexistante (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 8 juillet 2010, Sevenier/Commission, T‑368/09 P, points 24 et 25, et la jurisprudence citée).

25      Dans la mesure où les arguments relatifs à l’erreur de droit alléguée par les requérants quant à l’interprétation de l’article 90 du statut peuvent se rattacher aux arguments soulevés à l’appui du deuxième moyen, il convient de les examiner dans le cadre de celui-ci.

26      S’agissant du grief tiré de la violation de l’obligation de motivation par le Tribunal de la fonction publique, il convient de relever, tout d’abord, que la question de savoir si la motivation d’un arrêt de ce Tribunal est contradictoire ou insuffisante constitue une question de droit pouvant être, en tant que telle, invoquée dans le cadre d’un pourvoi (voir ordonnance du Tribunal du 20 juin 2011, Marcuccio/Commission, T‑256/10 P, point 23, et la jurisprudence citée).

27      Il y a lieu de rappeler, ensuite, que, selon une jurisprudence constante, l’obligation de motiver les arrêts qui incombe au Tribunal de la fonction publique, en vertu de l’article 36 du statut de la Cour et de l’article 7, paragraphe 1, de l’annexe I dudit statut, n’impose pas à celui-ci de fournir un exposé qui suivrait exhaustivement et un par un tous les raisonnements articulés par les parties au litige. La motivation peut donc être implicite, à condition qu’elle permette aux intéressés de connaître les raisons pour lesquelles les mesures en question ont été prises et au Tribunal de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle juridictionnel (voir ordonnance du Tribunal du 7 décembre 2011, Mioni/Commission, T‑274/11 P, point 34, et la jurisprudence citée).

28      En l’espèce, premièrement, le Tribunal de la fonction publique a rappelé, au point 25 de l’ordonnance attaquée, afin de rejeter l’argumentation des requérants selon laquelle la décision de rejet explicite de leur demande, prise le 26 octobre 2009, aurait été un acte faisant grief, susceptible de faire l’objet d’une réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, deuxième tiret, du statut, qu’il était de jurisprudence constante qu’une décision portant rejet explicite d’une demande, au sens de l’article 90, paragraphe 1, du statut, avait un caractère purement confirmatif. À cet égard, le Tribunal de la fonction publique a renvoyé, notamment, aux points pertinents de l’ordonnance du Tribunal de la fonction publique du 8 juillet 2009, Sevenier/Commission (F‑62/08, RecFP p. I-A-1-249 et II-A-1-1351), confirmée sur pourvoi par l’arrêt Sevenier/Commission, précité, desquels il ressortait clairement qu’une décision portant rejet explicite d’une demande intervenant après le rejet implicite de la même demande avait le caractère d’un acte purement confirmatif et n’ouvrait pas en faveur de l’intéressé un nouveau délai pour l’introduction d’une réclamation, l’article 91, paragraphe 3, second tiret, du statut n’étant pas susceptible de s’appliquer, par analogie, au stade de la demande et avant l’introduction de la réclamation.

29      Il convient de considérer que, contrairement aux allégations des requérants, le Tribunal a ainsi écarté leur argumentation selon laquelle l’article 90, paragraphe 2, du statut leur conférait le droit de saisir l’AIPN d’une réclamation, dans un délai de trois mois à compter de la date à laquelle ils ont pris connaissance de la décision de rejet explicite de leur demande, à savoir le 28 octobre 2009, en dépit du fait que cette décision était précédée d’une décision de rejet implicite, intervenue le 8 octobre 2009.

30      Deuxièmement, le Tribunal de la fonction publique a constaté, au point 26 de l’ordonnance attaquée, que, contrairement aux allégations des requérants visant à se prévaloir de la jurisprudence Voslamber/Commission, précitée, cette dernière ne dérogeait nullement à la jurisprudence constante mentionnée au point 25 de ladite ordonnance, aux termes de laquelle l’article 91, paragraphe 3, du statut n’était pas applicable en présence d’une décision explicite de rejet d’une demande, au sens de l’article 90, paragraphe 1, du statut, mais visait le cas du rejet explicite d’une réclamation, intervenue après une décision implicite de rejet de cette même réclamation et dans les délais de recours.

31      À cet égard, il y a lieu de relever que le Tribunal de la fonction publique a au demeurant constaté, au point 27 de l’ordonnance attaquée, « [l’]absence, dans le statut, d’une disposition étendant au rejet de la demande la règle énoncée à l’article 91, paragraphe 3, du statut, pour la réclamation » et a rejeté comme inopérant l’argument des requérants selon lequel la décision de rejet explicite de leur demande ne serait pas confirmative de la décision implicite de rejet l’ayant précédée. Par cette constatation, le Tribunal de la fonction publique a écarté le grief des requérants tiré de l’illégalité de l’interprétation a contrario de l’article 90, paragraphe 2, du statut, par rapport à l’article 91, paragraphe 3, de ce même statut.

32      Au vu de ce qui précède, force est de constater que le Tribunal de la fonction publique a examiné les violations de droit alléguées par les requérants (voir point 21 ci-dessus).

33      Il s’ensuit que l’ordonnance attaquée comporte une motivation suffisante, permettant aux requérants de comprendre les motifs du rejet de leur recours et au Tribunal d’exercer son contrôle juridictionnel.

34      Il résulte de ce qui précède que le grief tiré de la violation de l’obligation de motivation doit être rejeté et, partant, le premier moyen en tant qu’il a trait audit grief.

 Sur le deuxième moyen, tiré d’une erreur de droit tenant à la violation des articles 90 et 91 du statut

35      Les requérants soutiennent que le Tribunal a commis une erreur de droit en constatant que la décision implicite de rejet de leur demande, intervenue le 8 octobre 2009, constituait une décision, au sens de l’article 25, paragraphe 2, du statut, et que la décision explicite de rejet, du 26 octobre 2009, constituait un acte purement confirmatif de la première. Ils renvoient, à cet égard, aux arguments exposés dans le cadre de leur requête en première instance, qui démontreraient que, contrairement à la motivation de l’ordonnance attaquée, la décision du 26 octobre 2009 aurait été prise après un examen minutieux par l’AIPN de l’ensemble des éléments du dossier, sur la base de l’avis interne sollicité auprès des services de l’institution en cause, de sorte qu’elle contiendrait des éléments nouveaux par rapport au défaut de réponse valant décision implicite de rejet de la demande.

36      La Cour de justice réfute l’argumentation des requérants.

37      À titre liminaire, il convient de rappeler que, conformément à l’article 112, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure de la Cour, un pourvoi doit indiquer de façon précise les éléments critiqués de l’arrêt dont l’annulation est demandée ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande (ordonnance de la Cour du 23 octobre 2009, Commission/Potamianos, C‑561/08 P et C‑4/09 P, non publiée au Recueil, point 58).

38      Ainsi, ne répond pas aux exigences de motivation résultant de ces dispositions un pourvoi qui se limite à répéter ou à reproduire textuellement les moyens et les arguments qui ont été présentés devant le Tribunal de la fonction publique, y compris ceux qui étaient fondés sur des faits expressément rejetés par cette juridiction. En effet, un tel pourvoi constitue en réalité une demande visant à obtenir un simple réexamen de la requête présentée devant le Tribunal de la fonction publique, ce qui échappe à la compétence du Tribunal (ordonnance Commission/Potamianos, précitée, point 59).

39      Force est de constater, en l’espèce, que les requérants se limitent à reproduire et à renvoyer, aux points 19 à 21 de leur pourvoi, aux arguments développés dans leur recours en première instance, pour en déduire que le Tribunal de la fonction publique, en qualifiant la décision du 26 octobre 2009 de purement confirmative, a commis une erreur de droit, sans pour autant avancer d’arguments juridiques précis à l’appui de l’erreur alléguée. Partant, dans la mesure où les requérants demandent, en substance, un réexamen de leur requête en première instance par le Tribunal, leur grief doit être rejeté comme étant irrecevable.

40      S’agissant des arguments des requérants avancés dans le cadre du premier moyen, faisant état d’une discrimination à leur encontre et d’une « fiction juridique » résultant de l’interprétation par le Tribunal de la fonction publique de l’article 90 du statut, force est de constater qu’ils sont manifestement non fondés. En effet, ainsi que le Tribunal de la fonction publique l’a rappelé, à bon droit, au point 22 de l’ordonnance attaquée, les délais de réclamation et de recours prescrits par ladite disposition visent, notamment, à éviter toute discrimination ou traitement arbitraire dans l’administration de la justice.

41      Force est de relever, de surcroît, que ledit Tribunal a également relevé, au point 29 de l’ordonnance attaquée, que le fait de prendre en compte comme point de départ du délai de réclamation visé à l’article 90, paragraphe 2, du statut la date à laquelle est née, en raison du silence gardé par l’administration, la décision implicite de rejet ne s’oppose pas à un contrôle juridictionnel effectif, dès lors que le droit de saisir l’AIPN d’une réclamation s’offre aux requérants dès l’expiration du délai de quatre mois à compter du défaut de réponse à leur demande.

42      Au demeurant, l’argumentation des requérants faisant état d’une discrimination à leur égard, par rapport aux autres demandeurs qui se seraient vu adresser une décision de rejet explicite de leur demande, ne saurait prospérer, eu égard au fait que, en l’espèce, ainsi que l’a constaté le Tribunal de la fonction publique aux points 25 et 27 de l’ordonnance attaquée, la décision explicite de rejet ne constituait pas un acte faisant grief. Les requérants disposaient d’un délai identique à tout autre demandeur, au sens de l’article 90, paragraphe 1, du statut pour introduire une réclamation.

43      Au vu de ce qui précède, il convient de rejeter le second moyen en partie comme manifestement irrecevable et, pour autant qu’il a trait aux arguments présentés dans le cadre du premier moyen, comme manifestement non fondé.

44      Il s’ensuit que le recours doit être rejeté dans son ensemble.

 Sur les dépens

45      Conformément à l’article 148, premier alinéa, du règlement de procédure, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, le Tribunal statue sur les dépens.

46      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, premier alinéa, du même règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 144 de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

47      Les requérants ayant succombé en leurs conclusions et la Cour de justice ayant conclu en ce sens, les requérants supporteront leurs propres dépens ainsi que ceux exposés par la Cour de justice dans le cadre de la présente instance.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (chambre des pourvois)

ordonne :

1)      Le pourvoi est rejeté.

2)      Mme Yvette Barthel, Mme Marianne Reiffers et M. Lieven Massez supporteront leurs propres dépens ainsi que ceux exposés par la Cour de justice de l’Union européenne dans le cadre de la présente instance.

Fait à Luxembourg, le 19 mars 2012.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       M. Jaeger


* Langue de procédure : le français.