Language of document : ECLI:EU:T:2013:605

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

21 novembre 2013 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire figurative ancotel. – Marque communautaire figurative antérieure ACOTEL – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑443/12,

Equinix (Germany) GmbH, anciennement ancotel GmbH, établie à Francfort-sur-le-Main (Allemagne), représentée par Me H. Truelsen, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par Mme A. Poch, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI ayant été

Acotel SpA, établie à Rome (Italie),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’OHMI du 3 août 2012 (affaire R 1895/2011‑4), relative à une procédure d’opposition entre Acotel SpA et ancotel GmbH, devenue Equinix (Germany) GmbH,

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de M. D. Gratsias (rapporteur), président, Mme M. Kancheva et M. C. Wetter, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 5 octobre 2012,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 24 janvier 2013,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 14 août 2003, la requérante, ancotel GmbH, devenue Equinix (Germany) GmbH, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant, exclusivement dans la police de caractères Monaco et de couleurs rouge et grise :

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3        Les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent, notamment, de la classe 38 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Télécommunications ».

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 45/2005, du 7 novembre 2005.

5        Le 3 février 2006, Acotel SpA a formé opposition, au titre de l’article 42 du règlement n° 40/94 (devenu article 41 du règlement n° 207/2009), à l’enregistrement de la marque demandée, notamment pour les services visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition, formée en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous b), du règlement n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 2, sous b), du règlement n° 207/2009], était notamment fondée sur la demande de marque communautaire figurative désignant les services relevant de la classe 38 et correspondant à la description visée au point 3 ci‑dessus, introduite par Acotel le 27 décembre 1999 et tendant à l’enregistrement du signe reproduit ci-après :

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7        Le 10 avril 2008, ce signe a été enregistré comme marque communautaire figurative sous le numéro 1442268.

8        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009].

9        Le 28 juillet 2008, la division d’opposition a accueilli l’opposition en ce qui concerne la demande d’enregistrement de marque communautaire pour les services visés au point 3 ci-dessus. Elle a, à cet égard, considéré que les signes en conflit étaient similaires et que les services de la classe 38, visés par eux, étaient identiques. La division d’opposition a rejeté l’opposition pour le surplus.

10      Le 25 septembre 2008, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 57 à 62 du règlement n° 40/94 (devenus articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009), contre la décision de la division d’opposition.

11      En réponse aux observations d’Acotel sur le recours, la requérante a, par lettre du 17 février 2009, limité, au sens de l’article 44, paragraphe 1, du règlement n° 40/94 (devenu article 43, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009), sa demande d’enregistrement de marque communautaire, en ce qui concerne les services de la classe 38, aux services correspondant à la description suivante : « Télécommunications, à savoir services de colocation, de téléhousing et d’interconnexion ».

12      Par décision du 19 juin 2009, la première chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours et confirmé la décision de la division d’opposition.

13      La requérante a, en vertu de l’article 65 du règlement n° 207/2009, introduit un recours devant le Tribunal contre cette décision. Par arrêt du 24 mai 2011, ancotel/OHMI – Acotel (ancotel.), (T‑408/09, non publié au Recueil, ci‑après l’« arrêt ancotel. I »), le Tribunal a fait droit au recours et a annulé la décision susvisée de la chambre de recours.

14      Le Tribunal a constaté que les services visés par la marque demandée sont destinés à des professionnels, alors que le libellé des services visés par la marque antérieure est suffisamment large pour inclure tout type de services de télécommunications. Il a ainsi conclu que sont visés par la marque antérieure aussi bien les services destinés au grand public que des services plus spécifiques destinés à des utilisateurs professionnels, dont, notamment, les services visés par la marque demandée (arrêt ancotel. I, point 13 supra, points 41 et 42). Dans ces conditions, le Tribunal a considéré que le risque de confusion en l’espèce devait être apprécié en tenant compte de la perception des signes et des services en cause par le public restreint et spécialisé auquel s’adressent les services visés par la marque demandée (arrêt ancotel. I, point 13 supra, point 44). Ce n’est que ce seul public qui peut être confronté, à la fois, aux marques demandée et antérieure (voir, en ce sens, arrêt ancotel. I, point 13 supra, point 45). Dès lors que la chambre de recours, dans sa décision susmentionnée, avait considéré que, pour apprécier le risque de confusion entre les marques en conflit en l’espèce, il convenait de considérer que le public pertinent était constitué de consommateurs moyens de l’ensemble des États membres, elle avait, selon le Tribunal, commis une erreur de droit qui avait vicié l’ensemble de son appréciation de l’éventuel risque de confusion entre lesdites marques, si bien que sa décision devait être annulée (arrêt ancotel. I, point 13 supra, points 49, 50 et 52).

15      Par décision du 20 septembre 2011, communiquée aux parties à la procédure devant l’OHMI le 27 octobre suivant, le présidium des chambres de recours de l’OHMI a réattribué l’affaire à la quatrième chambre de recours.

16      Par décision du 3 août 2012 (ci‑après la « décision attaquée »), notifiée à la requérante le 7 août 2012, la quatrième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours de la requérante et a confirmé la décision de la division d’opposition, qui avait accueilli l’opposition et rejeté la demande d’enregistrement de marque communautaire pour les services visés au point 3 ci-dessus. En substance, la chambre de recours a considéré que les services visés par les marques en conflit étaient identiques (décision attaquée, point 13) et que lesdites marques présentaient une similitude visuelle moyenne et une similitude phonétique élevée, alors que le résultat d’une comparaison conceptuelle entre elles était neutre (décision attaquée, points 16 à 18). Dans le cadre d’une appréciation globale du risque de confusion entre lesdites marques, la chambre de recours a considéré que, étant donné leur degré de similitude visuelle et phonétique ainsi que l’identité des services qu’elles visent, il existait un tel risque même dans le cas du public pertinent, composé de professionnels et présentant un niveau d’attention plus élevé (décision attaquée, point 24).

 Conclusions des parties

17      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

18      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

19      La requérante invoque un moyen unique tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

20      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, aux termes de cette disposition, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

21      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 à 33, et la jurisprudence citée].

22      Par ailleurs, ainsi que le Tribunal l’a relevé dans son arrêt ancotel. I (point 29), l’appréciation du risque de confusion, au sens de la disposition susvisée, n’est pas effectuée dans l’abstrait, mais doit être fondée sur la perception que le public pertinent aura des signes en conflit et des produits et des services qu’ils désignent.

23      Il convient dès lors, au regard des différents griefs formulés par la requérante dans le cadre de son moyen unique, d’examiner si la chambre de recours a, dans la décision attaquée, fait une application correcte de la disposition concernée, telle qu’interprétée par la jurisprudence citée ci‑dessus.

 Sur le public pertinent

24      Ainsi qu’il a déjà été relevé au point 14 ci‑dessus, dans l’arrêt ancotel. I (point 44), le Tribunal a jugé que le risque de confusion en l’espèce devait être apprécié en tenant compte de la perception des signes et des services en cause par le public restreint et spécialisé auquel s’adressent les services visés par la marque demandée. Ainsi qu’il ressort du point 23 de la décision attaquée, c’est effectivement sur la perception dudit public que la chambre de recours a fondé son appréciation du risque de confusion entre les marques en conflit en l’espèce. La chambre a, en outre, considéré qu’il convenait de présumer que le niveau d’attention dudit public était « supérieur à la normale ». Ces considérations, au demeurant non contestées par la requérante, doivent être approuvées.

25      Par ailleurs, la marque antérieure étant une marque communautaire, il convient de tenir compte de la perception des marques en conflit par le public pertinent dans l’ensemble de l’Union européenne.

 Sur la comparaison des signes

26      Selon la jurisprudence constante, afin d’apprécier le degré de similitude existant entre deux ou plusieurs marques en conflit, il y a lieu de déterminer leur degré de similitude visuelle, phonétique et conceptuelle et, le cas échéant, d’évaluer l’importance qu’il convient d’attacher à ces différents éléments, en tenant compte de la catégorie de produits ou de services en cause et des conditions dans lesquelles ils sont commercialisés (arrêts de la Cour du 12 janvier 2006, Ruiz‑Picasso e.a./OHMI, C‑361/04 P, Rec. p. I‑643, point 37, et du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, Rec. p. I‑4529, point 36).

 Sur la comparaison visuelle

27      Ainsi qu’il résulte du point 16 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que les marques en conflit en l’espèce présentaient une similitude visuelle moyenne. La chambre de recours a rappelé qu’il s’agissait, dans les deux cas, de marques figuratives. Elle a considéré que leurs éléments verbaux respectifs (« ancotel » et « ACOTEL ») étaient dominants et présentaient une similitude élevée, dans la mesure où l’élément verbal de la marque demandée ne se distinguait de celui de la marque antérieure que par l’ajout d’un « n » après la lettre initiale « a ». Les six autres lettres de l’élément verbal de la marque demandée seraient les mêmes que celles de l’élément verbal de la marque antérieure.

28      En outre, la chambre de recours a considéré que le fait que l’élément verbal de la marque demandée est écrit en lettres minuscules, alors que celui de la marque antérieure est écrit en lettres majuscules, était « moins pertinent », dès lors que « [l]a perception de l’élément verbal en tant que tel prévaut sur l’écriture […] même dans le cas de marques […] figuratives ». De plus, les autres éléments graphiques des marques en conflit présentent, selon la chambre de recours, une importance mineure et ne remettent pas en cause la perception des éléments verbaux. En particulier, les lettres « t » de la marque demandée et « O » de la marque antérieure seraient clairement lisibles, malgré leurs formes particulières. Par ailleurs, à l’exception de la lettre « t » et du point à la fin, qui seraient de couleur rouge, la marque demandée serait, tout comme la marque antérieure, écrite en noir. La chambre de recours a précisé, à cet égard, que, bien que l’autre couleur revendiquée pour la marque demandée fût le gris, la marque demandée apparaissait « en réalité comme étant en noir » (à l’exception, bien évidemment, de la lettre « t » et du point à la fin de l’élément verbal). La chambre de recours a conclu que, « [d]ans l’ensemble, compte tenu également des différences mineures dans la façon dont les éléments verbaux sont représentés graphiquement, la similitude visuelle [entre les marques en conflit] est moyenne ».

29      La requérante fait valoir que, lors de la comparaison des éléments verbaux des marques en conflit, il convient de tenir compte du fait que la partie finale « tel » sera perçue, par le public en cause, comme renvoyant à la notion de télécommunications et comme étant, ainsi, descriptive des services concernés.

30      Selon la requérante, il en résulte que ce sont les parties initiales des éléments verbaux des marques en conflit (« anco » et « ACO ») qui doivent être confrontées dans le cadre d’une comparaison visuelle. Or, pour des termes aussi courts, même de faibles différences suffiraient pour exclure une similitude. Ainsi, la lettre supplémentaire « n » de l’élément verbal de la marque demandée équilibrerait le poids des syllabes « an » et « co », qui se distingueraient nettement, sur le plan visuel, de la combinaison des syllabes « a » et « co » de l’élément verbal de la marque antérieure. La différence de perception visuelle des marques en conflit est, selon la requérante, renforcée par la différence importante existant entre leurs éléments figuratifs respectifs.

31      Une argumentation analogue avait été avancée par la requérante dans son recours dans la procédure ayant donné lieu à l’arrêt ancotel. I. Le Tribunal ayant, dans ce même arrêt, fait droit au recours pour d’autres motifs, il n’a pas examiné cette argumentation. Toutefois, la chambre de recours, dans la décision attaquée (point 19), l’a prise en considération et a relevé à son égard ce qui suit : « Dans la mesure où [la requérante] a également suggéré de considérer la syllabe ‘tel’ comme étant faible, cette approche équivaut à une dissection artificielle des éléments verbaux [des marques en conflit] en syllabes individuelles, ce qui est incompatible avec l’approche requise qui consiste à considérer les marques dans leur ensemble. En outre, la correspondance des signes ne se limite pas aux lettres ‘tel’, la première partie (‘anco’ et ‘ACO’) étant également similaire. »

32      Il y a lieu de rappeler, à cet égard, que, selon la jurisprudence, dans le cadre de l’examen de l’existence d’un risque de confusion, il convient d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants. Ce n’est que si tous les autres composants d’une marque complexe sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant [arrêt OHMI/Shaker, point 26 supra, points 41 et 42 et arrêt du Tribunal du 24 septembre 2008, Anvil Knitwear/OHMI – Aprile e Aprile (Aprile), T‑179/07, non publié au Recueil, point 50].

33      Il résulte de cette jurisprudence que c’est à juste titre que la chambre de recours a refusé de faire, lors de la comparaison des marques en conflit en l’espèce, abstraction totale des parties finales identiques « tel » de leurs éléments verbaux respectifs. En outre, il est, certes, exact que ces trois lettres renvoient au terme « télécommunications » ou à des termes analogues dans les différentes langues de l’Union et, ainsi, à la description des services en cause en l’espèce. Toutefois, si cette constatation est suffisante pour exclure que les marques en conflit soient considérées comme similaires au seul motif de l’identité de la partie finale de leurs éléments verbaux respectifs, comme l’a rappelé à juste titre la chambre de recours, il ne s’agit pas du seul élément commun entre elles sur le plan visuel.

34      En effet, la partie initiale de chaque élément verbal comporte les mêmes trois lettres (« a », « c » et « o »), apparaissant dans le même ordre, avec la seule différence que la lettre « n » vient s’intercaler entre « a » et « c » dans l’élément verbal de la marque demandée. Or, s’il s’agit certainement d’un élément de différenciation entre les éléments verbaux des marques en conflit, il n’est pas, contrairement à ce que fait valoir la requérante, suffisant pour exclure toute similitude entre ces éléments et, encore moins, entre ces marques.

35      La chambre de recours a, en outre, correctement identifié certains autres points de différenciation entre les marques en conflit, à savoir l’utilisation, pour l’écriture des éléments verbaux des marques antérieure et demandée, de lettres, respectivement, majuscules et minuscules, la présence d’un point à la fin de l’élément verbal de la marque demandée ainsi que leurs éléments figuratifs différents, correctement décrits au point 16 de la décision attaquée. Cependant, ces différences visuelles, si elles peuvent certainement justifier la conclusion de la chambre de recours, selon laquelle ces deux marques ne présentent, sur le plan visuel, qu’une similitude moyenne, ne suffisent pas pour exclure une telle similitude et étayer la thèse de la requérante, selon laquelle il n’existe aucune similitude visuelle entre lesdites marques.

36      Il convient, en outre, de relever que c’est à juste titre que la chambre de recours a constaté que, bien que l’autre couleur revendiquée pour la marque demandée fût, outre le rouge, le gris, les parties de ladite marque censées être en gris apparaissent, en réalité, comme étant en noir et, donc, ont le même aspect que la marque antérieure, qui se présente en noir et blanc. Cette constatation n’est, d’ailleurs, pas contestée par la requérante.

37      Compte tenu de l’ensemble de ces considérations, il convient de conclure que la chambre de recours a correctement apprécié la similitude, sur le plan visuel, entre les deux marques en conflit et que sa conclusion, selon laquelle il existe, entre elles, une similitude moyenne, est correcte.

 Sur la comparaison phonétique

38      Au point 17 de la décision attaquée, la chambre de recours a relevé ce qui suit : « Sur le plan phonétique les mots ‘ancotel’ et ‘ACOTEL’ sont similaires à un degré élevé. Le ‘n’ supplémentaire n’introduit qu’un changement mineur qui n’affecte pas le nombre et la structure des syllabes. Cette appréciation ne dépend pas des différentes langues de l’Union. »

39      La requérante soutient que, tout comme dans le cadre de la comparaison visuelle entre les marques en conflit (voir points 29 et 30 ci‑dessus), il convient de faire abstraction de l’élément final « tel » des éléments verbaux desdites marques et de ne comparer que leurs parties initiales, « anco » et « ACO ». Elle fait valoir que ces deux parties se prononcent de façons différentes, respectivement, « ako », bref et dur, et « ang-ko », qui est nettement plus doux. Il s’ensuit, selon elle, que ces deux éléments se distinguent très nettement l’un de l’autre également sur le plan phonétique.

40      Ces arguments n’emportent pas la conviction. Il ne fait guère de doute que la présence, dans l’élément verbal de la marque demandée, de la lettre additionnelle « n » constitue un élément de différenciation de la prononciation de cet élément verbal de celle de l’élément verbal de la marque antérieure. En fonction de la langue maternelle et des habitudes de chaque locuteur, cette lettre sera prononcée de manière distincte ou sa présence aura pour résultat la nasalisation de la voyelle précédente (« a ») ou de la consonne suivante (« c »). Cependant, la différence qui en résulte dans la prononciation respective des deux éléments verbaux est mineure. Il convient donc de conclure que la chambre de recours n’a commis aucune erreur lorsqu’elle a considéré que, sur le plan phonétique, les marques en conflit présentent une similitude élevée.

 Sur la comparaison conceptuelle

41      Au point 18 de la décision attaquée, la chambre de recours a relevé ce qui suit, au sujet de la comparaison conceptuelle entre les marques en conflit : « La comparaison conceptuelle reste neutre. Aucun des signes n’a de signification en soi. Si, par hypothèse, ‘tel’ était perçu comme évoquant des services de ‘télécoms’, cela ne ferait que renforcer la similitude. »

42      Ces considérations, au demeurant non contestées par la requérante, sont correctes et doivent être approuvées.

 Sur la comparaison des services concernés

43      Au point 13 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté que les services visés par les marques en conflit étaient identiques, dès lors que les services visés par la marque antérieure incluaient ceux visés par la marque demandée. Cette conclusion est correcte et conforme à la jurisprudence constante [voir arrêt du Tribunal du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI – LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T‑346/04, Rec. p. II‑4891, point 34, et la jurisprudence citée] ainsi qu’aux considérations de l’arrêt ancotel. I (point 42).

44      La requérante déclare contester l’appréciation de la chambre de recours « en ce qui concerne la similitude des services en conflit » et considère qu’il y a, dès lors, lieu d’examiner si la chambre de recours a commis une erreur en constatant qu’il n’existe pas, entre les services visés par les marques en conflit, « de différences suffisantes […] pour exclure un risque de confusion chez le public pertinent ».

45      Selon la requérante, les services visés par les marques en conflit « ne sont pas proposés conjointement aux publics concernés » et, pour ce motif, ne peuvent pas être considérés comme étant complémentaires ou liés les uns aux autres. Les « publics ciblés respectifs » disposeraient d’un tel niveau de connaissances spécialisées qu’il serait inexact de présumer que les services visés par la marque demandée et ceux visés par la marque antérieure seraient similaires.

46      Ces arguments ne sauraient prospérer, dès lors qu’ils sont fondés sur la prémisse erronée que les marques en conflit couvrent chacune un type de service différent, dont il convient d’apprécier l’éventuelle similitude. Or, ainsi qu’il a déjà été relevé, le libellé des services couverts par la marque antérieure est suffisamment large pour inclure les services visés par la marque demandée. Partant, il est en l’espèce question d’un seul type de services, en d’autres termes des services identiques, destinés à un seul public, celui identifié au point 24 ci‑dessus, lequel sera, ainsi, susceptible d’être confronté à des offres de tels services désignés aussi bien par la marque demandée que par la marque antérieure.

 Sur l’appréciation globale du risque de confusion

47      Dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion entre les marques en conflit, la chambre de recours a considéré que le caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure est normal et s’est abstenue, pour « des raisons d’économie de procédure », d’examiner si Acotel avait prouvé un caractère distinctif élevé de ladite marque en Italie, résultant de l’usage qui en avait été fait (point 22 de la décision attaquée). En outre, dès lors que le public pertinent en l’espèce est composé de professionnels, la chambre de recours a considéré qu’« [il était] raisonnable de prendre, comme point de départ, un niveau d’attention du public supérieur à la normale » (point 23 de la décision attaquée).

48      La chambre de recours a poursuivi ainsi, au point 24 de la décision attaquée : « Toutefois, au regard du degré de similitude visuelle et phonétique qui, sur le plan phonétique, est même plus élevé que la normale, ainsi que de l’identité des services en conflit, et tenant également compte du fait que la marque antérieure n’est pas faible, il existe un risque de confusion dans le cadre d’une appréciation globale, même dans le cas d’un niveau d’attention plus élevé. »

49      La requérante considère que cette conclusion est erronée. Elle fait valoir, à cet égard, que les marques en conflit ne se présenteront pas conjointement au public pertinent. Toutefois, pour les motifs énoncés au point 46 ci‑dessus, cette affirmation est inexacte.

50      La requérante reproche également à la chambre de recours d’avoir constaté l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit, sans effectuer une « pondération entre le degré de similitude et le risque de confusion, en fonction du professionnalisme du public concerné ». Selon elle, une différenciation entre, d’une part, le degré de similitude et, d’autre part, le niveau d’attention justifié par le professionnalisme est indispensable pour garantir la prise en compte de la transparence du marché pour les personnes concernées qui existe notamment dans le domaine des télécommunications. La simple indication qu’il a été tenu compte d’une similitude plus élevée que la moyenne ne satisferait pas à ces exigences. Tout au contraire, une délimitation compréhensible ferait défaut. En effet, il serait possible d’envisager le cas d’un public spécialisé à tel point qu’un risque de confusion est exclu, sauf en cas d’identité aussi bien des signes que des produits ou services concernés. L’on pourrait partir de cette hypothèse lorsque, comme en l’espèce, le public visé connaîtrait tous les fournisseurs présents sur le marché.

51      Ces arguments ne convainquent pas. Tout d’abord, ainsi qu’il a déjà été relevé ci‑dessus dans le cadre de la comparaison des marques en conflit des points de vue visuel et phonétique, la chambre de recours ne s’est pas contentée d’une simple indication quant à l’existence d’une similitude plus élevée que la moyenne. Au contraire, elle a procédé à une comparaison détaillée desdites marques, sur les plans visuel et phonétique. Ce n’est que sur ce dernier plan qu’elle a constaté une similitude élevée des marques en conflit (point 40 ci‑dessus), alors que, sur le plan visuel, elle a conclu qu’il existe, entre elles, une similitude moyenne (point 35 ci‑dessus).

52      Ensuite, il y a lieu de relever que le niveau d’attention du public concerné constitue, incontestablement, un élément à prendre en considération lors de l’appréciation du risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. La chambre de recours s’est conformée à cette obligation et elle a correctement considéré, dans la décision attaquée, que le public concerné en l’espèce, constitué des professionnels spécialisés, fera preuve d’un niveau d’attention élevé.

53      Cependant, contrairement à ce que considère la requérante, il ne saurait être admis qu’il existe des cas où, en raison du niveau d’attention dont fait preuve le public concerné, tout risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, et, partant, toute possibilité d’application de cette disposition peuvent, a priori, être exclus. Il y a lieu, au contraire, de procéder, dans chaque cas individuel, à une appréciation globale de ce risque, comme le requiert la jurisprudence constante citée au point 21 ci‑dessus. Dans le cadre de cette appréciation globale, le niveau d’attention du public concerné ne constitue qu’un des différents éléments à prendre en considération.

54      Il échet également de préciser qu’il est question du niveau d’attention dont fera preuve le public pertinent lors de l’examen de la provenance commerciale des produits ou des services en cause. Le fait que le public en cause sera plus attentif à l’identité du producteur ou fournisseur du produit ou du service qu’il souhaite se procurer ne signifie pas, en revanche, qu’il examinera dans le moindre détail la marque à laquelle il sera confronté, ou qu’il la comparera minutieusement à une autre marque. En effet, même pour un public faisant preuve d’un niveau d’attention élevé, il n’en demeure pas moins que le consommateur moyen n’a que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différentes marques, mais doit se fier à l’image imparfaite qu’il en a gardée en mémoire [arrêt de la Cour du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, Rec. p. I‑3819, point 26 et, arrêt du Tribunal du 31 janvier 2012, Spar/OHMI – Spa Group Europe (SPA GROUP), T‑378/09, non publié au Recueil, point 20].

55      En l’espèce, comme l’a constaté à juste titre la chambre de recours, les marques en conflit présentent une similitude élevée sur le plan phonétique, si bien qu’il est assez difficile de les distinguer, même pour un public faisant preuve d’un niveau d’attention élevé. Sur le plan visuel, ce même public ne manquera certainement pas de remarquer les différences considérables existant entre les éléments figuratifs desdites marques. Il n’en reste pas moins que les éléments verbaux des deux marques, qui occupent une place prépondérante dans l’impression d’ensemble créée par chacune d’entre elles, quoique écrits dans une police différente, sont quasiment identiques. Ils ne se distinguent que par la présence de la lettre « n » en deuxième position dans la marque demandée, la présence d’un point à la fin de la même marque étant négligeable et susceptible d’être ignorée par le public pertinent.

56      Il ne peut pas être présumé qu’un nombre significatif de membres du public pertinent remarqueront la présence d’une lettre supplémentaire dans la marque demandée, compte tenu du fait que, comme le relève la jurisprudence citée au point 54 ci‑dessus, ils n’auront gardé en mémoire qu’une image non parfaite de la marque antérieure. Quant aux différences d’éléments figuratifs existant entre les deux marques, il est possible, compte tenu de la grande similitude existant entre leurs éléments verbaux, que, confronté à une image de la marque demandée, le public concerné la percevra comme une version actualisée et modernisée de la marque antérieure, plutôt que comme une marque distincte, indiquant une provenance commerciale différente. Il s’ensuit que les différences entre les éléments figuratifs des marques en conflit ne suffisent pas pour exclure un risque de confusion.

57      Compte tenu également de l’identité des services visés par les deux marques, il convient, sur la base des considérations qui précèdent, de conclure que c’est à juste titre et sans violer l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 que la chambre de recours a considéré que, malgré le niveau d’attention élevé dont fera preuve le public pertinent, il existe, en l’espèce, un risque de confusion entre les marques en conflit. Il convient, par conséquent, de rejeter le recours.

 Sur les dépens

58      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Equinix (Germany) GmbH est condamnée aux dépens.

Gratsias

Kancheva

Wetter

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 21 novembre 2013.

Signatures


* Langue de procédure : l’allemand.