Language of document : ECLI:EU:T:2021:435

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

14 juillet 2021 (*)

« Fonction publique – Fonctionnaires – Procédure de nomination à un poste de directeur – Avis de vacance – Rejet de la candidature du requérant et nomination d’un autre candidat – Obligation de motivation – Exception d’illégalité des actes fixant les règles internes de procédure – Irrégularité de la procédure de recrutement – Erreur manifeste d’appréciation – Inexactitude des informations communiquées à l’AIPN – Transparence – Égalité de traitement – Responsabilité – Préjudice matériel et moral »

Dans l’affaire T‑670/19,

Fernando Carbajo Ferrero, demeurant à Bruxelles (Belgique), représenté par Mes L. Levi et M. Vandenbussche, avocates,

partie requérante,

contre

Parlement européen, représenté par M. I. Terwinghe et Mme C. González Argüelles, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 270 TFUE et tendant, d’une part, à l’annulation de la décision du Parlement du 10 décembre 2018 de rejet de la candidature du requérant et de nomination d’un autre candidat au poste de directeur des médias de la direction générale de la communication et, d’autre part, à obtenir réparation du préjudice que le requérant aurait prétendument subi du fait de cette décision,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de MM. S. Gervasoni, président, L. Madise (rapporteur) et J. Martín y Pérez de Nanclares, juges,

greffier : M. L. Ramette, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 4 mars 2021,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige et faits postérieurs à l’introduction du recours

1        Le requérant, M. Fernando Carbajo Ferrero, est un fonctionnaire entré au service du Parlement européen le 21 avril 1986. En août 1999, il a été promu au grade A 3, devenu par la suite le grade A*14 puis AD 14. Il a exercé, ainsi qu’en attestent son curriculum vitae et les décisions de nomination pertinentes, diverses fonctions au sein du Parlement dans les domaines de la presse, de l’information, de la culture et des médias.

2        Le poste de directeur à la direction des médias de la direction générale de la communication (ci-après le « directeur des médias de la DG “Communication” »), étant vacant depuis le 28 février 2017, le président du Parlement a procédé, le 27 février 2018, à la publication, sur le fondement de l’article 29, paragraphe 1, sous a), du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut »), de l’avis de vacance interne n° AD/03-COMM (ci-après « l’avis de vacance »). La date limite pour le dépôt des candidatures était fixée au 23 mars 2018.

3        Le 22 mars 2018, le requérant a répondu à l’avis de vacance et présenté sa candidature au poste de directeur des médias de la DG « Communication ».

4        En l’absence de directeur des médias, le directeur général de la direction générale (DG) « Communication » a attribué au requérant des responsabilités ad intérim afin d’assurer la continuité du service de cette direction à partir du 1er juin 2018.

5        À la suite de la publication de l’avis de vacance, le Parlement a reçu trois candidatures dans le délai imparti. Le Parlement a toutefois décidé d’élargir ses possibilités de choix afin de pourvoir le poste de directeur des médias de la DG « Communication ». C’est ainsi que, le 27 mars 2018, il a publié, sur le fondement de l’article 29, paragraphe 1, sous b), du statut, l’avis de transfert PE/AD/03 (ci-après « l’avis de transfert »). Par ailleurs, le 13 avril 2018, l’avis de recrutement PE/216/S (ci-après « l’avis de recrutement »), fondé sur l’article 29, paragraphe 2, du statut, a été publié au Journal officiel de l’Union européenne (JO 2018, C 132 A, p. 1).

6        L’avis de recrutement indiquait comme date limite pour le dépôt des candidatures le 27 avril 2018. Au total, seize candidats ont présenté leur candidature, dont trois sur la base de l’avis de vacance, un en réponse à l’avis de transfert et douze sur la base de l’avis de recrutement. Parmi ces candidats figurait A qui, en répondant à l’avis de recrutement, avait déposé sa candidature au poste de directeur des médias de la DG « Communication » le 26 avril 2018.

7        Dans le cadre de la nomination du directeur des médias de la DG « Communication », un comité consultatif pour la nomination des hauts fonctionnaires (ci-après le « Comité consultatif ») a été constitué conformément à la décision du bureau du Parlement (ci-après le « Bureau ») du 16 mai 2000 fixant les différentes étapes de la procédure de sélection des hauts fonctionnaires, telle que modifiée par la décision du Bureau du 18 février 2008 (ci-après la « décision fixant les étapes de la procédure »).

8        Lors de sa réunion du 4 octobre 2018, le Comité consultatif a adopté des critères d’analyse comparative des candidatures et a établi, sur le fondement de ces critères, une liste de candidats recommandés pour un entretien.

9        Lors de la réunion du Bureau le 22 octobre 2018, la liste des candidats recommandés par le Comité consultatif et proposés pour un entretien a été mise à la disposition des membres du Bureau par le secrétaire général du Parlement, ensemble avec les noms des candidats qui n’avaient pas été retenus pour des raisons d’irrecevabilité ou à la suite d’un examen comparatif. La liste incluait les motivations du Comité consultatif quant à chaque candidat sur le fondement des critères d’analyse comparative mentionnés au point 8 ci-dessus. Selon le procès-verbal de ladite réunion, le Bureau a approuvé à l’unanimité les recommandations du Comité consultatif. Parmi tous les candidats invités à un entretien figuraient le requérant, qui avait postulé à l’avis de vacance, A, qui avait postulé à l’avis de recrutement, et B, la seule candidate qui avait postulé à l’avis de transfert.

10      Avant de rencontrer les candidats, le Comité consultatif a adopté sept sujets ou thèmes lui permettant de procéder à une analyse et à un classement des candidatures à la suite des entretiens.

11      Le requérant, ainsi que les autres candidats, ont été entendus par le Comité consultatif le 19 novembre 2018.

12      Sur la base des entretiens avec les candidats, le Comité consultatif a établi un rapport motivé, classant ces derniers par ordre de mérite et y a annexé une recommandation. Ce rapport a été mis à la disposition du Bureau par le secrétaire général le 2 décembre 2018 et a fait l’objet de discussions par ledit Bureau lors d’une réunion qui a eu lieu le 10 décembre 2018. Le procès-verbal de cette réunion révèle que le Comité consultatif a proposé de nommer au poste de directeur des médias de la DG « Communication », par ordre de priorité correspondant à l’adéquation des compétences par rapport au poste à pourvoir et aux performances des candidats lors des entretiens, en première position A, en deuxième position le requérant et en troisième position B. Le Bureau, en qualité d’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN »), a décidé de suivre la recommandation du Comité consultatif et a retenu, par conséquent, la candidature de A.

13      Le 11 décembre 2018, le directeur général de la DG « Communication », porte-parole du Parlement, a informé l’ensemble du personnel de la DG « Communication » de l’issue des procédures de recrutement pour les emplois de directeur des médias et de directeur des Campagnes et remercié le requérant pour avoir assuré ad intérim, depuis juin 2018, l’ensemble des responsabilités des ressources humaines et financières ainsi que la coordination de la direction des médias de la DG « Communication », outre ses propres tâches de chef de l’unité « Audiovisuel » de la même direction.

14      Par courrier électronique du 12 décembre 2018, le secrétaire général a notifié au requérant la décision de ne pas retenir sa candidature au poste de directeur des médias de la DG « Communication » et de nommer A à ce poste (ci-après la « décision attaquée »).

15      Le 8 mars 2019, le requérant a introduit une réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut à l’encontre de la décision attaquée.

16      Cette réclamation a été rejetée par une décision de l’AIPN datée du 21 juin 2019 et notifiée au requérant le 9 juillet 2019 (ci-après la « décision de rejet de la réclamation »).

17      Par courrier du 11 septembre 2019, le requérant a demandé au président du Parlement un complément d’information et des éclaircissements quant au contenu de la décision de rejet de la réclamation. Le Parlement a répondu par lettre adressée au requérant postérieurement à l’introduction du litige.

18      Le 21 octobre 2019, le Parlement a répondu par lettre recommandée au courrier du requérant du 11 septembre 2019.

 Procédure et conclusions des parties

19      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 1er octobre 2019, le requérant a introduit le présent recours.

20      Le 20 décembre 2019, le Parlement a déposé au greffe du Tribunal le mémoire en défense.

21      Le 6 février 2020, le requérant a introduit une demande de dépôt d’une réplique. Le 13 février 2020, le Tribunal a décidé de faire droit à cette demande.

22      La réplique et la duplique ont été déposées au greffe du Tribunal respectivement le 24 mars et le 13 mai 2020.

23      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 4 mars 2021.

24      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        annuler, pour autant que de besoin, la décision de rejet de la réclamation ;

–        condamner le Parlement à la réparation du préjudice matériel subi ;

–        condamner le Parlement à l’allocation d’une somme de 10 000 euros fixée ex æquo et bono et « à titre provisionnel » en réparation du préjudice moral subi ;

–        condamner le Parlement aux dépens.

25      Le requérant a demandé au Tribunal d’ordonner au Parlement la production de divers documents et lors de l’audience, ainsi qu’il en a été pris acte dans le procès-verbal, il a retiré sa demande, sauf en ce qui concerne le rapport sur les entretiens complets et la recommandation établis par le Comité consultatif. En effet, le requérant a indiqué qu’il estimait que la lettre du Parlement du 21 octobre 2019 mentionnée au point 18 ci-dessus et l’annexe B4 au mémoire en défense répondaient, en substance, à ces demandes visant à obtenir la liste des sujets ou des thèmes abordés par les candidats lors des entretiens menés au cours de la procédure, la liste des critères d’évaluation des mérites utilisés par le Comité consultatif et le procès-verbal de délibération du Bureau en vue de sa décision de recrutement.

26      Le Parlement conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme étant en partie irrecevable et en partie non fondé ;

–        à titre subsidiaire, rejeter le recours comme non fondé dans tous ses éléments ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

 Sur les conclusions en annulation

27      S’agissant des conclusions du requérant tendant à l’annulation de la décision de rejet de la réclamation, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, dans le cas où une telle décision est dépourvue de contenu autonome, des conclusions formellement dirigées contre cette décision ont pour effet de saisir le Tribunal de l’acte contre lequel la réclamation a été présentée (voir, en ce sens, arrêts du 17 janvier 1989, Vainker/Parlement, 293/87, EU:C:1989:8, point 8, et du 14 décembre 2017, RL/Cour de justice de l’Union européenne, T‑21/17, EU:T:2017:907, point 26).

28      En l’espèce, il convient de constater que la décision de rejet de la réclamation est dépourvue de contenu autonome. En effet, elle ne fait que confirmer, en substance, la décision attaquée. Dès lors, le recours doit être regardé comme étant dirigé contre ce dernier acte, dont la légalité doit être examinée en prenant également en considération la motivation figurant dans le rejet de la réclamation (voir, en ce sens, arrêt du 11 novembre 2020, AD/ECHA, T‑25/19, non publié, EU:T:2020:536, point 34) .

29      S’agissant des conclusions tendant à l’annulation de la décision attaquée, le requérant soulève cinq moyens, tirés, premièrement, de la violation de l’obligation de motivation, deuxièmement, du fait que « la [décision fixant les étapes de la procédure] et l’article 6 de l’avis de recrutement, de façon combinée ou séparée, sont illégaux en ce qu’ils méconnaissent le principe de bonne administration, de sécurité juridique et de non-discrimination et violent l’article 27 du statut, et qu’en toute hypothèse, la procédure de [sélection] suivie en l’espèce serait illégale pour les mêmes motifs », troisièmement, d’une erreur manifeste d’appréciation et de la méconnaissance de l’intérêt du service, quatrièmement, de la violation des règles d’objectivité et d’impartialité et de l’article 41 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte ») et, cinquièmement, de la violation du devoir de sollicitude.

30      Il convient d’examiner successivement la fin de non-recevoir soulevée par le Parlement à l’encontre du deuxième moyen, l’exception d’illégalité soulevée dans le cadre de la première branche du deuxième moyen, le premier moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation, la seconde branche du deuxième moyen, tirée des irrégularités affectant les différentes étapes de la procédure de sélection mise en place, et le troisième moyen, tiré d’une erreur manifeste d’appréciation.

 Sur la fin de non-recevoir relative au deuxième moyen

31      Par son deuxième moyen, le requérant fait valoir, d’une part, que la décision fixant les étapes de la procédure et l’article 6 de l’avis de recrutement, de façon combinée ou séparée, sont illégaux en ce qu’ils méconnaissent les principes de bonne administration, de sécurité juridique et de non-discrimination et violent l’article 27 du statut. D’autre part, le requérant soutient que, même si les actes en question ne devaient pas être jugés illégaux, la procédure de recrutement suivie en l’espèce demeurerait illégale pour les mêmes motifs.

32      Le Parlement soulève une fin de non-recevoir à l’encontre du deuxième moyen, en faisant valoir que la décision dont le requérant soulève l’illégalité ou demande l’annulation ne serait pas identifiée de manière suffisamment précise et que, par conséquent, ce moyen devrait être rejeté comme irrecevable au motif qu’il méconnaît les exigences prévues à l’article 76, sous d), du règlement de procédure du Tribunal.

33      Le requérant conteste la fin de non-recevoir soulevée par le Parlement.

34      Il convient de rappeler que, en vertu de l’article 21, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, applicable à la procédure devant le Tribunal en vertu de l’article 53, premier alinéa, du même statut, et de l’article 76, sous d), du règlement de procédure, toute requête doit indiquer l’objet du litige, les moyens et arguments invoqués ainsi qu’un exposé sommaire desdits moyens. Selon une jurisprudence constante, qui s’applique également aux moyens fondés sur une exception d’illégalité (voir, en ce sens, arrêt du 14 juillet 2016, Alesa/Commission, T‑99/14, non publié, EU:T:2016:413, points 87 à 91 et jurisprudence citée), cette indication doit être suffisamment claire et précise pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant, sans autres informations à l’appui. Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il faut, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci se fonde ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même (ordonnance du 21 mai 1999, Asia Motor France e.a./Commission, T‑154/98, EU:T:1999:109, point 55, et arrêt du 25 janvier 2018, BSCA/Commission, T‑818/14, EU:T:2018:33, points 94 et 95).

35      Plus particulièrement, s’il convient d’admettre, d’une part, que l’énonciation des moyens du recours n’est pas liée à la terminologie et à l’énumération du règlement de procédure et, d’autre part, que la présentation de ces moyens, par leur substance plutôt que par leur qualification légale, peut suffire, c’est à la condition toutefois que lesdits moyens se dégagent de la requête avec suffisamment de netteté. En outre, la seule énonciation abstraite des moyens dans la requête ne répond pas aux exigences du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et du règlement de procédure, et les termes « exposé sommaire des moyens », employés dans ces textes, signifient que la requête doit expliciter en quoi consiste le moyen sur lequel le recours est fondé (voir arrêt du 13 mai 2020, Agmin Italy/Commission, T‑290/18, non publié, EU:T:2020:196, point 96 et jurisprudence citée).

36      En l’espèce, il importe d’observer que, comme il le souligne pertinemment, le requérant, par son deuxième moyen, d’une part, conteste la légalité des règles internes de procédure, reprises dans la décision fixant les étapes de la procédure et dans l’article 6 de l’avis de recrutement sous plusieurs aspects. Il fait notamment valoir que les actes en question sont illégaux au motif qu’ils n’édictent pas de règles claires, précises et certaines et qu’ils ne permettent pas une évaluation des mérites objective et transparente, effectuée avec soin et impartialité et répondant aux objectifs de l’article 27 du statut. D’autre part, dans le cadre dudit moyen, le requérant soutient que, même si ces instruments ne devaient pas être illégaux en tant que tels, la procédure suivie en l’espèce serait illégale et violerait les mêmes principes.

37      Ainsi, le deuxième moyen comporte deux branches distinctes et ce n’est que dans le cadre de la première branche que le requérant vise à remettre en cause la légalité de deux actes juridiques, à savoir la décision fixant les étapes de la procédure et l’article 6 de l’avis de recrutement, fixant les règles pour le déroulement d’une procédure de sélection au sein du Parlement.

38      Dans le cadre de la seconde branche dudit moyen, le requérant fait valoir que, même à supposer que la décision fixant les étapes de la procédure et l’article 6 de l’avis de recrutement soient légaux, la procédure de sélection suivie n’a pas respecté les principes de bonne administration, de sécurité juridique et de non-discrimination et a violé l’article 27 du statut. En d’autres termes, la phrase, utilisée par le requérant, selon laquelle « [e]n toute hypothèse, la procédure de [sélection] suivie en l’espèce est illégale pour les mêmes motifs », doit être comprise en ce sens que le requérant, en dehors de l’exception d’illégalité soulevée par la première branche du deuxième moyen, fait valoir, au soutien de sa demande d’annulation de la décision attaquée, que cette dernière a été adoptée à la suite d’une procédure entachée d’illégalités. Ces illégalités ne découleraient pas de l’application d’actes juridiques illégaux présentant un caractère contraignant, mais résulteraient de la méconnaissance des principes de droit de l’Union européenne et de la disposition du statut précités.

39      Ainsi, pour autant que la fin de non-recevoir soulevée par le Parlement concerne la première branche du deuxième moyen, il y a lieu de relever qu’il ressort clairement de la requête et de la réplique que, dans le cadre de cette branche, le requérant soulève une exception d’illégalité de deux actes, la décision fixant les étapes de la procédure et l’article 6 de l’avis de recrutement. Par ailleurs, il importe de noter que le Parlement a été en mesure de comprendre que l’exception d’illégalité visait ces actes et a été en mesure de se défendre au fond.

40      Pour autant que la fin de non-recevoir soulevée par le Parlement concerne la seconde branche du deuxième moyen, il importe d’observer que, le requérant, en se plaçant dans l’hypothèse où la décision fixant les étapes de la procédure et l’article 6 de l’avis de recrutement seraient jugés légaux, invoque des illégalités de la procédure de sélection résultant de la violation des principes de bonne administration, de sécurité juridique et de non-discrimination ainsi que de la violation de l’article 27 du statut.

41      Par ailleurs, force est de constater que le Parlement a été en mesure d’identifier les arguments soulevés par le requérant dans le cadre de la seconde branche du deuxième moyen pour démontrer que la procédure de sélection n’avait pas respecté certains principes du droit de l’Union et le statut, et a été en mesure d’y répondre au fond.

42      Au vu de ce qui précède, il y a lieu de conclure que les actes dont la légalité est contestée se dégagent du deuxième moyen, avec suffisamment de netteté.

43      Il y a donc lieu de rejeter la fin de non-recevoir soulevée par le Parlement à l’encontre du deuxième moyen et tirée de ce que le moyen en question ne permet pas d’identifier les actes dont la légalité est contestée.

 Sur la première branche du deuxième moyen, tirée d’une exception d’illégalité soulevée à l’encontre de la décision fixant les étapes de la procédure et de l’article 6 de l’avis de recrutement

44      Dans le cadre de la première branche du deuxième moyen, le requérant fait valoir que la décision fixant les étapes de la procédure « et/ou » l’article 6 de l’avis de recrutement, pour le cas où la procédure de recrutement aurait suivi celle prévue par cet article, ne garantissent pas le degré de prévisibilité requis par le droit de l’Union et, notamment, violent l’article 27 du statut ainsi que les principes de bonne administration, de sécurité juridique et de non-discrimination.

45      Le Parlement conteste les arguments du requérant.

46      Tout d’abord, il convient de rappeler le contenu des actes visés par l’exception d’illégalité soulevée par le requérant. Ensuite, il importe d’établir si ladite exception répond aux exigences définies par la jurisprudence et est donc recevable, enfin, dans l’affirmative, d’apprécier son bien-fondé.

47      En premier lieu, tout d’abord, il convient de rappeler que le point 4 de la décision fixant les étapes de la procédure, dont le préambule indique qu’elle concerne la « nomination aux postes de directeur général et directeur de l’organigramme (Autorité investie du pouvoir de nomination : le Bureau) », prévoit que :

« a)      Le Comité établit, sur la base du texte de l’avis de vacance, des critères qu’il appliquera dans son analyse comparative des mérites des candidats.

b)      Le Comité examine les candidatures au regard des conditions de forme de l’avis de vacance, procède à l’analyse comparative des mérites des candidats et établit la liste des candidats qu’il recommande d’inviter aux entretiens. Cette liste est accompagnée d’une motivation précisant, pour chaque candidat, les raisons pour lesquelles son nom a été inclus ou exclu de la liste.

Si le nombre de candidatures est limité, le Comité peut décider de ne pas procéder à l’analyse comparative des mérites des candidats et de recommander au Bureau que tous les candidats soient invités aux entretiens.

c)      Le Secrétaire général transmet au Bureau, pour évaluation, la liste établie par le Comité, complétée des motivations individuelles et accompagnée de l’avis de vacance, de la liste et des curricul[um] vitae de tous les candidats, ainsi que des critères d’analyse comparative adoptés par le Comité.

d)      Le Bureau arrête la liste des candidats à convoquer à un entretien.

e)      Le Comité procède à des entretiens avec les candidats désignés par le Bureau et établit un rapport d’entretien signé par tous les membres.

f)      Le Secrétaire général transmet au Président et au Bureau ce rapport, accompagné d’une recommandation ».

48      Selon le point 5 de la décision fixant les étapes de la procédure, « [s]ur proposition du Président, le Bureau arrête sa décision » et « [l]e Bureau peut procéder au préalable à l’audition des candidats mentionnés sur la liste. »

49      Ensuite, il importe de rappeler que l’article 6 de l’avis de recrutement, intitulé « Procédure de sélection » est rédigé comme suit :

« En vue d’aider dans son choix l’autorité investie du pouvoir de nomination, le [C]omité consultatif pour la nomination des hauts fonctionnaires établira la liste des candidats et recommandera au bureau du Parlement européen les personnes à inviter à un entretien. Le bureau arrêtera la liste de ces personnes ; le comité procédera aux entretiens et soumettra son rapport final au bureau pour décision. Dans ce cadre, le bureau pourra procéder à l’audition des candidats. »

50      Enfin, d’une part, il y a lieu de noter que le requérant lui-même remarque qu’il ressort de la décision de rejet de la réclamation que la procédure de sélection suivie pour la nomination du directeur des médias de la DG « Communication » s’est déroulée en suivant la décision fixant les étapes de la procédure. D’autre part, il est constant que, même si l’avis de recrutement ne se réfère pas explicitement à la décision fixant les étapes de la procédure, la procédure énoncée au point 6 dudit avis reprend, en substance, la procédure de sélection décrite dans la décision fixant les étapes de la procédure. En effet, ledit article 6 de l’avis de recrutement ne fait que rappeler le rôle du Comité consultatif et énoncer sommairement la procédure de sélection à suivre.

51      Ainsi, au regard du libellé de la décision fixant les étapes de la procédure et de l’article 6 de l’avis de recrutement ainsi que des indications fournies par la décision de rejet de la réclamation, telles que rappelées par le requérant lui-même, il y a lieu d’examiner l’exception d’illégalité dirigée contre la décision fixant les étapes de la procédure en ce que c’est la procédure de sélection prévue par cette décision que le Parlement a suivie pour la nomination du directeur des médias de la DG « Communication », les considérations développées au regard de ladite décision s’appliquant également à l’article 6 de l’avis de recrutement, étant donné que ce dernier reproduit en substance le contenu de cette décision.

52      En deuxième lieu, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’article 277 TFUE est l’expression d’un principe général assurant à toute partie le droit de contester par voie incidente, en vue d’obtenir l’annulation d’un acte contre lequel elle peut former un recours, la validité d’un acte de portée générale adopté par une institution de l’Union constituant la base de l’acte attaqué, si cette partie ne disposait pas du droit d’introduire un recours direct contre un tel acte, dont elle subit ainsi les conséquences sans avoir été en mesure d’en demander l’annulation (voir arrêts du 8 septembre 2020, Commission et Conseil/Carreras Sequeros e.a., C‑119/19 P et C‑126/19 P, EU:C:2020:676, point 67 et jurisprudence citée, et du 24 octobre 2018, Fernández González/Commission, T‑162/17 RENV, non publié, EU:T:2018:711, point 56 et jurisprudence citée).

53      La portée d’une exception d’illégalité doit être limitée à ce qui est indispensable à la solution du litige. Il en résulte que l’acte général dont l’illégalité est soulevée doit être applicable, directement ou indirectement, à l’espèce qui fait l’objet du recours et qu’il doit exister un lien juridique direct entre l’acte individuel attaqué et l’acte général en question. À cet égard, l’existence d’un tel lien de connexité peut se déduire, notamment, du constat que l’acte attaqué au principal repose essentiellement sur une disposition de l’acte général dont la légalité est contestée. Enfin, il convient de préciser que l’illégalité de l’acte de portée générale sur lequel l’acte individuel est fondé ne peut conduire à l’annulation de l’acte de portée générale, mais seulement de l’acte individuel qui en est tiré (voir arrêts du 8 septembre 2020, Commission et Conseil/Carreras Sequeros e.a., C‑119/19 P et C‑126/19 P, EU:C:2020:676, points 68 et 69 et jurisprudence citée, et du 24 octobre 2018, Fernández González/Commission, T‑162/17 RENV, non publié, EU:T:2018:711, point 57 et jurisprudence citée). L’article 277 TFUE a, en effet, pour but de protéger le justiciable contre l’application d’un acte de portée générale illégal, sans que soit pour autant mis en cause l’acte de portée générale lui-même, devenu inattaquable par l’écoulement des délais prévus à l’article 263 TFUE. Ainsi, un arrêt constatant l’inapplicabilité d’un acte de portée générale n’a l’autorité de la chose jugée qu’à l’égard des parties au litige ayant donné lieu à cet arrêt (voir arrêt du 24 octobre 2018, Fernández González/Commission, T‑162/17 RENV, non publié, EU:T:2018:711, point 57 et jurisprudence citée).

54      En l’occurrence, premièrement, il importe de noter que la décision fixant les étapes de la procédure est l’acte qui régit la procédure de sélection et qui s’applique à tous les candidats à un recrutement à un poste de directeur général ou de directeur du Parlement. Ainsi, ladite décision est assimilable à un acte de portée générale en ce qu’elle s’applique à des situations déterminées objectivement et comporte des effets juridiques à l’égard d’une catégorie de personnes envisagées de manière générale et abstraite (voir, en ce sens, arrêt du 6 novembre 2018, Scuola Elementare Maria Montessori/Commission, Commission/Scuola Elementare Maria Montessori et Commission/Ferracci, C‑622/16 P à C‑624/16 P, EU:C:2018:873, point 31 et jurisprudence citée).

55      Deuxièmement, force est de constater que le requérant ne disposait pas de la possibilité d’introduire un recours direct contre la décision fixant les étapes de la procédure, au motif que cette décision lui a fait grief uniquement en ce qu’elle a régi la procédure de sélection du candidat nommé au poste de directeur des médias de la DG « Communication ».

56      Troisièmement, la décision attaquée ayant été adoptée en suivant la procédure de sélection prévue par la décision fixant les étapes de la procédure, il y a lieu de reconnaître qu’il existe, au sens de la jurisprudence (voir, en ce sens, arrêt du 8 septembre 2020, Commission et Conseil/Carreras Sequeros e.a., C‑119/19 P et C‑126/19 P, EU:C:2020:676, point 69), un lien juridique direct entre la décision fixant les étapes de la procédure et la décision attaquée.

57      Partant, le requérant est recevable à contester, par voie incidente dans le cadre de son recours en annulation dirigé contre la décision attaquée, la légalité de la décision fixant les étapes de la procédure.

58      Ladite conclusion ne saurait être infirmée par la fin de non-recevoir soulevée par le Parlement et tirée de ce que le requérant ne peut pas contester la légalité de la décision fixant les étapes de la procédure pour autant que cette dernière concerne les phases de la procédure de recrutement, à la suite desquelles sa candidature a été retenue.

59      À ce titre, il suffit de constater que c’est l’application de la décision fixant les étapes de la procédure dans son ensemble qui a, en l’espèce, conduit à l’adoption de la décision attaquée. Partant, le requérant est en droit d’en contester la légalité dans son intégralité.

60      En troisième lieu, afin d’apprécier le bien-fondé de l’exception d’illégalité en cause, d’une part, il convient de souligner que le Parlement dispose d’une large marge d’appréciation aux fins d’adopter des règles internes, dans l’objectif de mettre en œuvre l’article 27, paragraphe 1, du statut, selon lequel « [l]e recrutement doit viser à assurer à l’institution le concours de fonctionnaires possédant les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité, recrutés sur une base géographique aussi large que possible parmi les ressortissants des États membres ». D’autre part, en adoptant la décision fixant les étapes de la procédure, le Parlement s’est librement imposé des règles internes à suivre pour la nomination aux postes de directeur général et de directeur de l’organigramme.

61      Il convient également de rappeler, d’une part, que les directives internes prises par les institutions de l’Union ne sauraient légalement, en aucun cas, poser des règles qui dérogeraient aux dispositions du statut. D’autre part, il résulte de la jurisprudence qu’une décision interne ne saurait avoir pour conséquence que l’institution renonce au respect des principes généraux de droit, tels que les principes d’égalité de traitement et de confiance légitime (voir, en ce sens, arrêt du 24 octobre 2018, Fernández González/Commission, T‑162/17 RENV, non publié, EU:T:2018:711, point 80 et jurisprudence citée).

62      Selon une jurisprudence constante, le principe d’égalité de traitement, principe général du droit de l’Union, n’est violé que lorsque des situations comparables sont traitées de manière différente ou que des situations différentes sont traitées de manière identique, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié (voir arrêt du 14 juillet 2005, Le Voci/Conseil, T‑371/03, EU:T:2005:290, point 77 et jurisprudence citée).

63      Selon le principe de bonne administration, visé à l’article 41 de la Charte et liant directement les institutions, organes et organismes de l’Union, toute personne, y compris donc le personnel de l’Union, a le droit de voir ses affaires traitées impartialement et équitablement et dans un délai raisonnable.

64      Le principe de sécurité juridique, qui a pour corollaire celui de protection de la confiance légitime, exige, selon une jurisprudence constante, qu’une législation entraînant des conséquences défavorables à l’égard des particuliers soit claire et précise et que son application soit prévisible pour les justiciables (voir arrêt du 7 juin 2005, VEMW e.a., C‑17/03, EU:C:2005:362, point 80 et jurisprudence citée).

65      Au soutien de son exception d’illégalité de la décision fixant les étapes de la procédure, le requérant avance plusieurs griefs. Premièrement, ladite décision ne prévoirait pas que le Comité consultatif se dote de critères pour la comparaison des mérites des candidats lors de leurs entretiens en vue d’un classement par ordre de mérite, ni que ces critères soient communiqués à l’AIPN. Deuxièmement, ladite décision n’indiquerait pas sur quelle base la recommandation du Comité consultatif au Bureau serait établie. Troisièmement, la décision en question ne préciserait pas que l’AIPN dispose de l’ensemble des dossiers des candidats et qu’elle prend sa décision à la lumière de l’ensemble de ces dossiers. Quatrièmement, la décision fixant les étapes de la procédure ne prévoirait pas la communication aux candidats des critères de comparaison des mérites.

66      En ce qui concerne l’argument tiré de ce que la décision fixant les étapes de la procédure violerait, pour les motifs rappelés au point 65 ci-dessus, l’article 27, paragraphe 1, du statut (voir point 60 ci-dessus), il importe de noter que cet article se limite à définir l’objectif primordial qui doit guider toute mesure en matière de recrutement du personnel de l’Union, à savoir la sélection des meilleurs professionnels au profit des institutions. Ledit article n’identifie pas de manière précise les règles internes dont une institution doit se doter pour réglementer une procédure de sélection.

67      En l’espèce, l’objectif visé à l’article 27, paragraphe 1, du statut, à savoir la sélection des professionnels possédant les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité, recrutés sur une base géographique la plus large possible parmi les ressortissants des États membres de l’Union, a été respecté par le Parlement au moyen de l’adoption de la décision fixant les étapes de la procédure. Dans la mesure où cette décision prévoit une sélection des candidatures sur la base d’une analyse comparative des mérites, elle poursuit l’objectif visé audit article du statut.

68      S’agissant de la question de savoir si les insuffisances de la décision fixant les étapes de la procédure, dénoncées par le requérant et mentionnées au point 65 ci-dessus, portent atteinte aux principes de bonne administration, d’égalité de traitement et de sécurité juridique, il convient d’observer ce qui suit.

69      Premièrement, les critères d’analyse comparative des mérites ne sont, d’après la jurisprudence, subordonnés à aucune condition de publication. En effet, l’AIPN peut appliquer, dans le cadre d’une procédure spéciale de recrutement fondée sur l’article 29, paragraphe 2, du statut, des critères qui ne sont pas fixés directement dans l’avis de vacance, dans l’avis de transfert ou dans l’avis de recrutement et partant ne sont pas publiés au Journal officiel. Cela vaut également pour un comité de sélection, tel que le Comité consultatif en l’espèce, auquel l’AIPN a délégué son droit de sélection (voir, en ce sens, arrêt du 19 mai 1983, Mavridis/Parlement, 289/81, EU:C:1983:142, point 16).

70      Deuxièmement, il convient de constater que la décision fixant les étapes de la procédure se limite à établir un cadre général permettant au Comité consultatif d’accomplir son rôle consistant à assister le Bureau dans le choix d’un candidat pour le poste à pourvoir. L’absence des indications mentionnées au point 65 ci-dessus découle du large pouvoir discrétionnaire reconnu aux institutions lorsqu’elles se dotent de règles internes établissant la procédure à suivre pour le recrutement de fonctionnaires possédant les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité.

71      En l’occurrence, l’absence d’indication des critères d’analyse comparative des mérites dans la décision fixant les étapes de la procédure est susceptible de répondre à l’exigence de permettre au Comité consultatif d’établir ces critères d’une manière différente selon les conditions fixées dans les avis de vacance d’emploi adoptés par le Parlement.

72      En outre, l’absence de précisions dans la décision fixant les étapes de la procédure, quant au contenu et à la manière dont la recommandation est établie, répond à l’exigence d’accorder au Comité consultatif la liberté de choisir comment procéder, lors des entretiens des candidats retenus, à une analyse comparative de leurs compétences et de leurs prestations, ainsi que de choisir comment transmettre son appréciation et les éléments utiles au Bureau en vue de la nomination du directeur des médias de la DG « Communication ». Le fait que la décision fixant les étapes de la procédure n’établit pas en détail la manière dont la recommandation est rédigée et ne précise pas davantage que les dossiers des candidats sont mis à la disposition du Bureau ensemble avec le rapport sur les entretiens et la recommandation ne suffit pas pour considérer que la décision fixant les étapes de la procédure enfreint les principes de bonne administration, d’égalité de traitement et de non-discrimination. En effet, la décision fixant les étapes de la procédure s’étant limitée à encadrer, dans les grandes lignes, la procédure de sélection qui est suivie de manière identique pour tous les candidats, elle est de nature à assurer un traitement égal de ces derniers ainsi que l’objectivité du choix entre ceux-ci.

73      De plus, dans la mesure où la décision fixant les étapes de la procédure décrit de manière suffisamment claire les étapes de la procédure de sélection suivie et où il n’apparaît pas que le Parlement, lors de l’adoption de cette décision dans le cadre de son large pouvoir discrétionnaire, ne s’est pas tenu dans des limites raisonnables, le requérant ne saurait soutenir qu’elle ne garantit pas le degré de prévisibilité requis par le droit de l’Union et enfreint de ce fait le principe de sécurité juridique.

74      Aucun des motifs d’illégalité avancés par le requérant n’ayant prospéré, il y a lieu de rejeter l’exception d’illégalité.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation

75      Le requérant affirme, en substance, que le Parlement n’a pas apporté, dans la décision attaquée, malgré le complément d’information contenu dans la décision de rejet de la réclamation, une motivation suffisante au rejet de sa candidature, conformément à l’article 41 de la Charte et à l’article 25, paragraphe 2, du statut. Ce manque de motivation ne lui permettrait pas de comprendre de quelle manière les performances et les mérites des candidats ont été évalués et pour quelles raisons ceux du candidat retenu, A, ont été considérés comme supérieurs aux siens.

76      Le requérant souligne, à cet égard, que, dans sa réclamation contre la décision attaquée, il avait fait valoir, premièrement, qu’il n’avait pas reçu d’informations quant aux motifs pour lesquels sa candidature avait été considérée comme étant moins méritante que celle du candidat retenu par le Bureau, deuxièmement, qu’il ignorait si le Bureau avait suivi le rapport du Comité consultatif ainsi que sa recommandation, troisièmement, qu’il ignorait également sur la base de quels critères les candidatures respectives avaient été évaluées tant par le Comité consultatif que par le Bureau et, quatrièmement, qu’il ignorait le contenu des échanges ayant eu lieu lors de la réunion du Bureau relative à la nomination de l’emploi de directeur des médias de la DG « Communication ».

77      Le requérant ajoute que, dans la décision de rejet de la réclamation, l’AIPN n’a pas précisé, premièrement, quels étaient les trois critères établis par le Comité consultatif, conformément au point 4 de la décision fixant les étapes de la procédure, ni quels étaient ceux utilisés pour procéder à l’analyse comparative des mérites des candidats en vue de la phase d’entretiens, ni si les mêmes critères avaient été utilisés pour tous les candidats lors de leur entretien, deuxièmement, quels étaient les sujets ou thèmes abordés lors des entretiens, ni s’ils étaient identiques pour tous les candidats et, troisièmement, quels étaient les critères sur la base desquels le Bureau avait mené son analyse comparative des mérites.

78      Bien que le Bureau ait annexé à la décision de rejet de la réclamation un extrait du rapport établi par le Comité consultatif sur la prestation du requérant lors de l’entretien, et bien que le Bureau ait fourni, dans cette dernière décision, les motifs pour lesquels A a été préféré au requérant, ce dernier estime que la décision de rejet de la réclamation n’est également pas conforme à l’obligation de motivation. En effet, le requérant note, à cet égard, qu’il ne lui a été communiqué qu’un extrait du rapport du Comité consultatif, ce qui l’empêche de prendre connaissance de l’entière appréciation, par ce dernier, de sa performance. Finalement, le requérant relève que la décision de rejet de sa réclamation contient des appréciations qui ne figurent pas dans l’extrait du rapport du Comité consultatif.

79      Dans la réplique, premièrement, le requérant fait valoir que l’extrait du rapport cité dans le mémoire en défense, qui serait issu de la partie « Conclusions » de celui-ci, ne correspond ni au texte de la décision de rejet de la réclamation, ni à celui de l’annexe de cette décision. Les informations que le Parlement fournirait au compte-gouttes démontreraient un manque de transparence. Dans la mesure où le Parlement affirmerait que le profil d’A était plus adapté au poste que celui du requérant et où cette affirmation reposerait explicitement sur les appréciations figurant dans le rapport du Comité consultatif, il aurait été tenu de produire soit tout le rapport de ce Comité, soit les parties de ce rapport mettant en évidence une comparaison des mérites du requérant et d’A, ainsi que la conclusion selon laquelle le profil de ce dernier était plus adapté au poste à pourvoir que celui du requérant. Cependant, tant l’extrait cité dans le mémoire en défense que l’extrait annexé à la décision de rejet de la réclamation se référeraient uniquement à l’évaluation du seul requérant (qui serait d’ailleurs excellente). Ainsi ces informations ne répondraient pas aux exigences résultant du respect de l’obligation de motivation.

80      Deuxièmement, le requérant souligne que les trois critères d’évaluation lui ont été communiqués tardivement, puisqu’ils l’ont été après le stade du rejet de la réclamation et même postérieurement à l’expiration du délai de recours. Le Parlement estimerait à tort que, le requérant ayant été admis aux entretiens sur la base de ces critères, ces derniers ne lui feraient pas grief. En effet, d’une part, la décision fixant les étapes de la procédure ne préciserait pas quels sont les critères ayant fondé l’analyse comparative des mérites des candidats à l’issue des entretiens, pour autant qu’il en existe, et rien ne permettrait d’exclure que le Comité consultatif ait pris ces mêmes critères en compte lors de son analyse comparative des mérites et du classement des candidats pendant les entretiens et en vue de la recommandation faite au Bureau. D’ailleurs, les raisons qui lui auraient été fournies pour justifier sa non-sélection sembleraient en partie coïncider avec ces critères. D’autre part, le requérant souligne que, comme il ressort de la décision de rejet de la réclamation, tous les documents relatifs à la procédure de recrutement et aux candidatures étaient à la disposition des membres du Bureau. Ainsi, ce dernier aurait pu avoir accès auxdits critères d’évaluation au moment de sa décision. En outre, le requérant met en exergue que, dans le procès-verbal du 10 décembre 2018, le président a fait référence à la décision du bureau du 22 octobre 2018 d’adopter des recommandations concernant les candidats à inviter aux entretiens et que cette décision se réfère nécessairement aux critères en cause. Selon le requérant, dans la mesure où ces critères reflètent les conditions de l’avis de vacance, ils sont donc restés pertinents tout au long de la procédure, y compris lors de l’adoption de la décision attaquée, et il avait donc le droit de se les voir communiquer en temps utile.

81      Troisièmement, selon le requérant, le Parlement ne saurait soutenir que l’extrait du rapport des entretiens le concernant fait clairement état des sujets ou des thèmes abordés lors des entretiens. En effet, les réponses données lors de l’entretien, telles qu’elles figurent dans ledit extrait, ne donneraient pas une vision claire des thèmes établis préalablement par le Comité et il n’appartiendrait pas au requérant d’identifier des informations ou de formuler des suppositions quant aux thèmes choisis pour mener les entretiens et apprécier les prestations des candidats.

82      Quatrièmement, le Parlement resterait encore en défaut d’indiquer sur la base de quels critères s’est effectuée l’analyse comparative des mérites par le Comité consultatif lors des entretiens et ensuite par l’AIPN.

83      Le Parlement conteste les arguments du requérant.

84      Il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, l’exigence de motivation posée par l’article 296 TFUE, également présente à l’article 25, deuxième alinéa, du statut, a pour but de permettre au juge de l’Union d’exercer son contrôle sur la légalité des décisions faisant grief et de fournir aux intéressés une indication suffisante pour savoir si ces décisions sont bien fondées ou si, au contraire, elles sont entachées d’un vice permettant d’en contester la légalité. Il en résulte que la motivation doit, en principe, être communiquée à l’intéressé en même temps que la décision lui faisant grief et que l’absence de motivation ne saurait être régularisée par le fait que l’intéressé apprend les motifs de la décision au cours de la procédure devant le juge de l’Union (voir arrêt du 14 juin 2018, Spagnolli e.a./Commission, T‑568/16 et T‑599/16, EU:T:2018:347, point 68 et jurisprudence citée).

85      Selon une jurisprudence établie, l’AIPN est tenue à une obligation de motivation, à tout le moins au stade du rejet de la réclamation introduite par le candidat écarté contre la décision rejetant sa candidature ou contre celle portant nomination d’un autre candidat. La motivation de la décision explicite de rejet d’une réclamation déposée en vertu de l’article 90, paragraphe 2, du statut est censée coïncider avec la motivation de la décision contre laquelle la réclamation était dirigée (voir arrêt du 7 février 2019, Duym/Conseil, T‑549/17, non publié, EU:T:2019:72, point 24 et jurisprudence citée).

86      Il convient également de relever que le complément de motivation, au stade de la décision de rejet de la réclamation, est conforme à la finalité de l’article 90, paragraphe 2, du statut, aux termes duquel la décision sur la réclamation est elle-même motivée. Cette disposition implique nécessairement, en effet, que l’autorité amenée à statuer sur la réclamation ne soit pas liée par la seule motivation, le cas échéant insuffisante, voire inexistante dans le cas d’une décision implicite de rejet, de la décision faisant l’objet de la réclamation (voir arrêt du 7 février 2019, Duym/Conseil, T‑549/17, non publié, EU:T:2019:72, point 25 et jurisprudence citée).

87      Si l’absence totale de motivation du rejet de la candidature d’un fonctionnaire candidat à un emploi à pourvoir dans le cadre d’une procédure de recrutement ne peut être couverte par des explications fournies par l’AIPN après l’introduction d’un recours juridictionnel, en revanche, une simple insuffisance de précision dans la motivation fournie dans le cadre de la procédure précontentieuse n’est pas de nature à justifier l’annulation de la décision entreprise lorsque des précisions complémentaires sont apportées par l’administration en cours d’instance (voir, en ce sens, arrêt du 11 juillet 2007, Konidaris/Commission, T‑93/03, EU:T:2007:209, point 43 et jurisprudence citée).

88      Enfin, le caractère suffisant de la motivation doit être apprécié en fonction des circonstances concrètes de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que le destinataire peut avoir à recevoir des explications (voir arrêt du 9 juillet 2019, VY/Commission, T‑253/18, non publié, EU:T:2019:488, point 49 et jurisprudence citée).

89      En l’espèce, par la décision attaquée, notifiée au requérant par courriel du 12 décembre 2018, le Parlement a informé ce dernier qu’il n’était pas nommé au poste de directeur des médias de la DG « Communication » et lui a communiqué le nom du candidat retenu.

90      Dans la décision de rejet de la réclamation du 21 juin 2019, premièrement, l’AIPN a indiqué au requérant que, conformément au point 4 de la décision fixant les étapes de la procédure, le Comité consultatif avait établi trois critères sur la base des avis de vacance, de transfert et de recrutement pertinents. Ces critères avaient permis de sélectionner sept candidats parmi les douze candidatures admissibles et les candidats sélectionnés avaient été invités à participer aux entretiens. Deuxièmement, l’AIPN a précisé que, avant de rencontrer les candidats, le Comité consultatif avait établi une liste de sujets ou de thèmes à aborder pendant les entretiens et que les thèmes choisis étaient identiques pour tous les candidats, de sorte que tous s’étaient vu poser les mêmes questions et avaient été évalués de la même façon. Troisièmement, l’AIPN a souligné que la prestation de chacun des candidats avait été évaluée et répertoriée dans un rapport sur les entretiens, établi en application du point 4 de la décision fixant les étapes de la procédure (note à l’attention du Bureau, Rapport sur les entretiens, du 2 décembre 2018). L’AIPN a également informé le requérant que le rapport sur sa prestation était annexé à la décision de rejet de la réclamation. Quatrièmement, l’AIPN a indiqué que le Comité consultatif avait recommandé plusieurs candidats au Bureau en les présentant dans un ordre de priorité qui correspondait à la qualité de leurs compétences et de leurs performances lors des entretiens. En particulier, la candidature du requérant avait été présentée en deuxième position derrière celle du candidat finalement retenu, et la recommandation du Comité consultatif avait été signée par l’ensemble de ses membres. Cinquièmement, l’AIPN a souligné que le Bureau avait statué en disposant, en salle, de l’ensemble des documents utiles, à savoir des dossiers personnels de tous les candidats (curriculum vitae et lettres de motivation), d’un tableau qui résumait leurs candidatures et du rapport sur les entretiens du Comité consultatif et que les membres qui le souhaitaient étaient ainsi mis en mesure de consulter les documents en question avant la réunion. Selon l’AIPN, c’est donc en suivant une procédure conforme au statut et aux règles internes que le Bureau a décidé de suivre la recommandation du Comité consultatif et a retenu un autre candidat que le requérant.

91      Il ressort donc de la décision de rejet de la réclamation que le requérant a été informé sur la procédure de sélection suivie et sur les règles internes qui ont été appliquées.

92      La décision de rejet de la réclamation a notamment indiqué au requérant que, lors de la première phase de la procédure de sélection, le Comité consultatif avait, sur la base des avis de vacance, de l’avis de transfert et de l’avis de recrutement, établi trois critères d’analyse comparative des mérites lui ayant permis de sélectionner sept candidats parmi les douze candidatures admissibles.

93      S’agissant de l’argument du requérant visant à soutenir que le respect de l’obligation de motivation exigeait que les critères d’analyse comparative des mérites lui soient communiqués dans le cadre de la décision de rejet de la réclamation, il convient d’observer que, au regard des informations pertinentes révélées, premièrement, par la décision fixant les étapes de la procédure, deuxièmement, par les avis de vacance, de transfert et de recrutement concernés et, troisièmement, par la décision de rejet de la réclamation, l’absence de précisions sur les trois critères d’analyse comparative des candidatures adoptés par le Comité consultatif ne saurait être comparée à une absence totale de motivation insusceptible, en tant que telle, d’être complétée en cours d’instance conformément à la jurisprudence citée au point 87 ci-dessus.

94      À cet égard, tout d’abord, il convient d’écarter l’argument du Parlement selon lequel, étant donné que, sur la base desdits critères, le requérant a été inclus sur la liste des candidats recommandés pour un entretien, ces critères ne lui feraient pas grief. En effet, il doit être possible, pour le requérant, de vérifier que tant sa candidature que celle des concurrents sélectionnés répondent aux mêmes critères de sélection et que ces critères ont été adoptés sur la base des avis de vacance, de transfert et de recrutement concernés (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 4 juillet 1996, Parlement/Innamorati, C‑254/95 P, EU:C:1996:276, point 27 et jurisprudence citée). Il ressort de cette jurisprudence que le respect du secret entourant les travaux d’un comité de sélection, ayant fait le tri des candidatures lors d’une première phase de la procédure, ne s’oppose pas à la communication aux candidats des critères d’appréciation qui sont à la base de la sélection faite.

95      Ensuite, il importe de noter qu’il ressort du dossier produit devant le Tribunal que, dans le cadre de la présente procédure, le Parlement a annexé au mémoire en défense, notamment, la lettre recommandée envoyée au requérant le 21 octobre 2019 et reçue par ce dernier le 24 octobre 2019. Cette lettre a fourni au requérant les informations qu’il avait demandées par lettre du 11 septembre 2019 (voir point 17 ci‑dessus). Plus précisément, dans le cadre de sa lettre recommandée du 21 octobre 2019, le Parlement a communiqué au requérant les critères d’analyse comparative des mérites établis par le Comité consultatif. Ces critères étaient les suivants :

« 1)      expérience spécifique dans les domaines mentionnés dans l’avis de vacance ou de recrutement : direction d’un grand service dans le domaine des médias, de la presse et de l’audiovisuel ;

2)      administration ou gestion : expérience en gestion (dans des domaines tels que les ressources humaines, la gestion, la budgétisation, les finances, etc.) ;

3)      expérience internationale : expérience de travail dans un environnement européen et/ou international. »

96      Il y a donc lieu de constater que, conformément à la jurisprudence mentionnée au point 87 ci‑dessus, le Parlement a, par sa lettre recommandée du 21 octobre 2019, communiqué au requérant des informations complétant celles contenues dans la décision de rejet de la réclamation en ce qui concerne les critères d’analyse comparative des mérites établis par le Comité consultatif aux fins de l’établissement de la liste des candidats recommandés au Bureau pour un entretien.

97      S’agissant de l’argument du requérant visant à faire valoir que l’absence d’indications détaillées, dans la décision de rejet de la réclamation, de la liste des sept sujets ou thèmes établis par le Comité consultatif pour comparer les performances des différents candidats lors des entretiens est constitutive d’une violation de l’obligation de motivation, il importe d’observer ce qui suit.

98      Contrairement à ce qu’affirme le Parlement, le rapport concernant l’entretien du requérant, annexé à la décision de rejet de la réclamation ne suffit pas, à lui seul, pour identifier les sujets ou thèmes abordés par le Comité consultatif lors des entretiens. En effet, ledit rapport, ainsi que le reconnaît le Parlement lui-même, contient un extrait de l’entretien du requérant qui évoque sa motivation à postuler au poste de directeur des médias de la DG « Communication », fondée sur son expérience et son ancienneté de service dans le secteur de la communication. Ledit rapport expose l’avis du requérant quant à l’exigence que les différents types de médias transmettent un message cohérent, présente les idées du requérant pour la prochaine année électorale, résume son avis sur la meilleure manière d’exploiter les médias pendant les séances plénières ou les visites de haut niveau, mentionne son point de vue sur la politique d’égalité des sexes dans le domaine des médias et sur les ressources dont la direction des médias doit disposer en termes de personnel du grade assistant ou administrateur. Le rapport en question se conclut par la considération selon laquelle le requérant a décrit les aspects extérieurs des médias, mais a été moins fort dans la description des procédures du Parlement.

99      Ce n’est qu’à la suite de la communication, par la lettre recommandée du 21 octobre 2019 mentionnée au point 95 ci-dessus, des sept sujets ou thèmes sur la base desquels le Comité consultatif a comparé les prestations des différents candidats lors de leurs entretiens qu’il est possible d’apprécier s’il ressort du rapport d’entretien du requérant que lesdits sujets ou thèmes ont été abordés lors de l’entretien de ce dernier. Ces sujets ou thèmes étaient les suivants :

« 1)      La motivation pour poser sa candidature et la vision stratégique et le planning de la direction.

2)      Comment s’assurer que tous les canaux de communication sont utilisés pour transmettre un message cohérent, conformément au cadre d’exécution stratégique ?

3)      Les priorités de communication pour la prochaine année électorale.

4)      Comment tirer le meilleur parti des visites de haut niveau, des dossiers législatifs importants et des séances plénières du point de vue des médias ?

5)      La promotion de la politique d’égalité des sexes.

6)      Les défis liés à l’arrêt des activités et à la détermination des priorités négatives.

7)      Comment tirer le meilleur parti des possibilités de mise à niveau des postes AST en postes AD dans un contexte de tâches de plus haut niveau et de rareté des ressources ? »

100    La lecture de la liste de sujets ou de thèmes en cause permet au requérant d’apprécier s’il a pu s’exprimer sur ceux-ci. Ainsi, dans la mesure où le requérant a finalement reçu les informations détaillées concernant les sujets ou thèmes abordés lors des entretiens, il y a lieu de constater que le manque de précision de la décision de rejet de la réclamation en ce qui concerne la communication des sujets ou thèmes en question a été palliée immédiatement après l’introduction du présent recours juridictionnel et, précisément, ainsi que le souligne le Parlement, le jour même de la signification, par le greffe du Tribunal, du présent recours au Parlement. Par ailleurs, le requérant a pu prendre position sur ces informations dans la réplique.

101    S’agissant de l’argument du requérant visant à faire valoir que l’absence de communication de l’intégralité du rapport sur les entretiens de tous les candidats établi par le Comité consultatif ou de la partie dudit rapport concernant le candidat retenu est constitutive d’une violation de l’obligation de motivation, il convient de rappeler, d’une part, qu’il ressort de la jurisprudence que l’obligation de motivation doit être conciliée, dans le cadre, comme en l’espèce, d’une procédure de recrutement en vue de pourvoir un emploi vacant, avec le respect du secret qui entoure les travaux du comité de sélection, lequel s’oppose tant à la divulgation des attitudes prises par les membres individuels du comité de sélection qu’à la révélation de tous les éléments ayant trait à des appréciations de caractère personnel ou comparatif concernant les candidats (voir arrêt du 11 décembre 2012, Trentea/FRA, F‑112/10, EU:F:2012:179, point 90 et jurisprudence citée).

102    D’autre part, il importe de noter qu’il ressort de la décision de rejet de la réclamation que, s’agissant notamment des motifs pour lesquels la candidature d’A a été considérée comme meilleure que celle du requérant, l’AIPN a précisé qu’il ressortait du rapport du Comité consultatif sur les entretiens, dans lequel les réponses des candidats aux différentes questions posées étaient consignées, que ce dernier avait évalué les performances du requérant et celles d’A comme étant globalement « excellentes », mais que, toutefois, A s’était distingué par un entretien brillant marqué par une description plus approfondie des procédures du Parlement et par la proposition d’un plan d’action dynamique répondant pertinemment aux préoccupations actuelles du service tant sur le plan du management (ressources humaines et financières) que sur le plan plus technique de l’utilisation des médias (publics cibles et contenus des messages). L’AIPN a ajouté que, sur la base d’une analyse comparative menée par le Bureau, ce dernier avait considéré que, en plus de la présentation orale, les compétences d’A étaient globalement meilleures que celles du requérant. En effet, pour ce qui était de la formation et de l’expérience professionnelle, notamment dans des fonctions d’encadrement, A avait fait valoir la variété interinstitutionnelle de ses expériences et le haut niveau des fonctions exercées dans le domaine de la communication, impliquant la connaissance et la négociation de dossiers particulièrement sensibles.

103    Il s’ensuit que, malgré l’absence de communication au requérant de l’intégralité du rapport sur les entretiens, les informations qui lui ont été fournies dans la décision de rejet de la réclamation en ce qui concerne les raisons ayant conduit l’AIPN à choisir un autre candidat permettent au requérant d’apprécier si ladite décision est bien fondée ou si, au contraire, elle est entachée d’un vice permettant d’en contester la légalité et au juge de l’Union de contrôler sa légalité.

104    Le manque de précision de la motivation de la décision de rejet de la réclamation en ce qui concerne la communication des critères d’évaluation et les sujets ou thèmes établis par le Comité consultatif ayant été compensé en cours d’instance (voir points 96 et 100 ci-dessus), elle ne justifie donc pas l’annulation de la décision attaquée (voir, en ce sens, arrêt du 11 juillet 2007, Konidaris/Commission, T‑93/03, EU:T:2007:209, point 43 et jurisprudence citée).

105    S’agissant des arguments du requérant selon lesquels le Comité consultatif n’aurait pas précisé sur la base de quels critères il aurait comparé les mérites des candidats lors des entretiens et n’aurait pas davantage indiqué si ces critères ont été communiqués à l’AIPN (voir points 79, 80 et 82 ci-dessus), d’une part, il importe de noter que le requérant avance ces mêmes arguments dans le cadre de la seconde branche du deuxième moyen du recours. D’autre part, il y a lieu de constater que, par ces arguments tirés d’un manque de transparence de la procédure de sélection, le requérant ne fait pas valoir une violation de l’obligation de motivation, mais conteste, en substance, le déroulement de la procédure de sélection ayant conduit à l’adoption de la décision attaquée et le bien-fondé de cette dernière.

106    Au regard de ce qui précède, il y a donc lieu de rejeter le premier moyen tiré de la violation de l’obligation de motivation et d’examiner les arguments rappelés au point 105 ci-dessus dans le cadre de l’analyse de la seconde branche du deuxième moyen visant à faire valoir que la procédure de sélection est entachée d’illégalités.

 Sur la seconde branche du deuxième moyen, tirée de ce que la procédure de sélection suivie viole l’article 27 du statut ainsi que les principes de sécurité juridique, de transparence, de bonne administration et d’égalité de traitement

107    Par la seconde branche du deuxième moyen, le requérant fait valoir que, à supposer que la décision fixant les étapes de la procédure soit légale, la procédure de sélection suivie ne garantit pas un degré suffisant de prévisibilité et va à l’encontre des principes de sécurité juridique, de transparence, de bonne administration et d’égalité de traitement, ainsi que de l’article 27 du statut.

108    Plus précisément, le requérant fait valoir, premièrement, que la procédure de sélection se serait déroulée de façon non transparente et contraire aux principes de droit de l’Union rappelés au point 107 ci-dessus, en raison de l’absence de clarté quant aux critères d’analyse comparative des mérites utilisés par le Comité consultatif lors des entretiens et quant au fait que ces critères, s’ils ont été effectivement adoptés et utilisés, aient été communiqués au Bureau en son rôle d’AIPN censée adopter la décision de nomination. Deuxièmement, la procédure de sélection serait illégale en raison de l’absence d’informations sur le contenu de la recommandation adressée par le Comité consultatif au Bureau en qualité d’AIPN ainsi qu’en raison de l’absence de précisions sur les éléments mis à la disposition de ce dernier en vue de l’adoption de la décision de nomination. En d’autres termes, le requérant dénonce l’absence de précisions sur la question de savoir si le Bureau disposait ou non de l’ensemble des dossiers des candidats et s’il a réellement examiné ceux-ci avant d’adopter la décision de nomination. Troisièmement, l’illégalité de la procédure de sélection résulterait de l’absence de communication aux candidats des critères d’analyse comparative des mérites et du contenu complet du rapport d’entretiens établi par le Comité consultatif.

109    Le Parlement rétorque qu’il y a lieu d’écarter le moyen tiré de l’illégalité de la procédure suivie en l’espèce. Premièrement, il fait valoir que la procédure de sélection suivie a permis à l’AIPN de procéder, dans l’exercice de son large pouvoir d’appréciation, à un examen scrupuleux des dossiers de candidature et de choisir le candidat qui répondait le mieux aux exigences énoncées dans les avis de vacance, de transfert ou de recrutement. Deuxièmement, la procédure de sélection suivie serait conforme aux règles du statut. En effet, le Comité consultatif, disposant de la liberté de s’organiser conformément aux règles établies par la décision fixant les étapes de la procédure, serait en mesure de prévoir des critères permettant une analyse comparative des mérites des candidats et de pouvoir inviter certains de ceux-ci à des entretiens. Le Comité consultatif transmettrait par la suite son avis non contraignant à l’approbation du Bureau, qui arrêterait la liste de ces candidats retenus pour un entretien ou pourrait écarter l’appréciation du Comité consultatif. Enfin, il découlerait de la procédure appliquée que le Comité consultatif s’est doté d’une liste de sujets ou de thèmes à aborder lors des entretiens servant à l’évaluation des candidats, ce qui serait conforme à l’article 4, sous e), de la décision fixant les étapes de la procédure. Troisièmement, en fournissant au requérant l’extrait du rapport des entretiens le concernant, il aurait été possible pour ce dernier d’identifier les éléments de son évaluation effectuée par le Comité consultatif. Le Parlement ajoute que l’AIPN est tenue de prendre la décision de nomination en conformité avec les règles du statut. À cet égard, le requérant n’avancerait aucun argument de nature à remettre en cause cette pratique à la lumière des exigences de l’article 27 du statut. Quatrièmement, contrairement à ce qu’affirme le requérant, le contrôle de la légalité de la procédure serait possible puisque l’AIPN aurait respecté son devoir de motivation. En outre, la communication de critères d’évaluation aux candidats ne serait, d’après une jurisprudence constante relative à l’article 29, paragraphe 2, du statut, subordonnée à aucune condition de publication.] Les critères d’analyse comparative des mérites seraient encadrés par l’avis de recrutement ayant pour but d’informer les potentiels candidats des conditions requises afin de postuler au poste à pourvoir, mais ne devraient pas être communiqués préalablement à des épreuves ou à des entretiens sous peine de faire obstacle à une analyse comparative utile en conformité avec l’article 27 du statut.

110    En l’espèce, il convient de vérifier si, ainsi que le fait valoir le requérant, l’AIPN n’a pas pu procéder à un examen comparatif des candidatures avec soin et impartialité, dans l’intérêt du service et conformément aux principes de sécurité juridique, de bonne administration et d’égalité de traitement des fonctionnaires, au motif qu’elle n’a pas été informée des critères d’analyse comparative des mérites qui ont été appliqués par le Comité consultatif lors des entretiens avec les candidats et qu’elle n’a pas davantage été informée sur la question de savoir si les mêmes critères ont été appliqués lors des différentes étapes de la procédure de sélection.

111    Premièrement, le respect du principe d’égalité de traitement lors du déroulement d’une procédure de sélection de fonctionnaires impose que des critères d’analyse comparative soient établis préalablement au recrutement concerné (voir, en ce sens, arrêt du 3 mars 1993, Booss et Fischer/Commission, T‑58/91, EU:T:1993:15, point 67).

112    Deuxièmement, il importe de souligner qu’il ressort également de la jurisprudence citée au point 111 ci-dessus que les critères d’analyse comparative des mérites ne doivent pas changer pendant la procédure de sélection. En effet, il convient de prévenir le risque que lesdits critères puissent être adaptés en fonction des candidatures reçues.

113    Troisièmement, les critères d’analyse comparative des mérites doivent être transmis à l’AIPN afin de lui permettre de connaître et de comprendre la manière dont les mérites des candidats ont été appréciés tant lors de la première étape, à savoir lors de la sélection des candidats à inviter pour un entretien, que lors de la seconde étape de la procédure de sélection, à savoir lors des entretiens des candidats aux fins de leur classement selon un ordre de préférence. En effet, il ressort de la jurisprudence que le rapport d’un comité de présélection ne peut pas se limiter à contenir l’indication du nom du ou des candidats retenus par ledit comité, d’une mention quant à l’adoption à l’unanimité ou non de l’avis du comité de présélection, ou encore en un rappel de la procédure et des critères d’évaluation suivis. Ce rapport doit contenir tous les éléments d’évaluation nécessaires permettant à l’AIPN d’exercer correctement, à l’issue de la procédure de sélection, ses larges prérogatives en matière de nomination dans le strict respect des règles et des conditions qu’elle s’est elle-même fixées. Un rapport ainsi établi doit permettre à l’AIPN de comprendre l’évaluation, effectuée par le comité de sélection, des candidats retenus et de procéder ensuite elle-même, à l’issue d’un examen comparatif, au choix du candidat le plus approprié à l’exercice des fonctions faisant l’objet des avis de vacance, de transfert ou de recrutement (voir, en ce sens, arrêt du 17 octobre 2013, BF/Cour des comptes, F‑69/11, EU:F:2013:151, point 44).

114    Quatrièmement, si l’administration jouit d’un large pouvoir d’appréciation quant aux modalités d’organisation de la procédure de sélection, il appartient néanmoins au juge de l’Union d’exercer son contrôle dans la mesure nécessaire pour assurer un traitement égal des candidats et l’objectivité du choix entre ceux-ci opéré par l’administration (voir, en ce sens, arrêt du 12 mars 2008, Giannini/Commission, T‑100/04, EU:T:2008:68, points 132 et 133 et jurisprudence citée).

115    En premier lieu, s’agissant de la fixation à l’avance des critères d’analyse comparative des mérites, force est de constater que, selon les informations fournies par la décision de rejet de la réclamation et par le Parlement lui-même, le Comité consultatif a préalablement établi, lors de la première phase de la procédure de sélection, conformément à la décision fixant les étapes de la procédure, trois critères d’analyse comparative des mérites des candidats sur la base des avis de vacance, de transfert et de recrutement concernés (voir point 95 ci-dessus). Ces critères ont permis audit Comité de faire le tri des candidatures reçues et d’établir une liste de candidats à soumettre au Bureau pour approbation afin d’inviter ultérieurement les candidats retenus à un entretien.

116    En deuxième lieu, s’agissant de l’exigence de ne pas modifier les critères d’analyse comparative au cours de la procédure de sélection, il ressort de la décision de rejet de la réclamation et il est confirmé par le Parlement lui-même que, lors de la seconde phase de la procédure de sélection, consistant en des entretiens avec les candidats dont le nom était inclus dans la liste établie par le Comité consultatif et approuvée par le Bureau, ledit Comité a élaboré une liste de sept thèmes ou sujets (voir point 99 ci-dessus) servant à l’évaluation des candidats.

117    Or, s’il est possible d’admettre que la liste de thèmes ou de sujets en cause a pu permettre au Comité consultatif d’obtenir, lors des entretiens, des renseignements comparables et d’apprécier les prestations orales des candidats, il convient néanmoins de constater que, ainsi qu’il a été d’ailleurs confirmé par le Parlement lors de l’audience, l’analyse des réponses des candidats aux questions posées par le Comité consultatif, pendant les entretiens, sur la base de ladite liste et leur classement par ordre de mérite ont été effectués, par ledit Comité, sans tenir compte des trois critères d’analyse comparative des mérites fixés sur la base des avis de vacance, de transfert et de recrutement lors de la première phase de la procédure de sélection et préalablement à la réception des candidatures.

118    En d’autres termes, s’il est possible de poser des questions aux candidats, ces questions ne doivent pas devenir de nouveaux critères d’analyse comparative des mérites adoptés au cours de la procédure de sélection après avoir déjà reçu et trié les candidatures. Par ailleurs, il ressort de la jurisprudence que le respect du principe d’égalité de traitement, dans le cadre d’une procédure de sélection, exige que le Comité consultatif soit tenu de réduire le risque d’inégalité de traitement inhérent au caractère limité du nombre de questions pouvant être posées lors d’un examen à propos d’un sujet déterminé (voir, en ce sens, arrêt du 12 mars 2008, Giannini/Commission, T‑100/04, EU:T:2008:68, point 133 et jurisprudence citée).

119    Un classement par ordre de mérite ne saurait donc reposer uniquement sur des réponses fournies par les candidats sur sept sujets ou thèmes de discussion abordés lors des entretiens. Une telle approche ne répond pas aux exigences, rappelées aux points 111 et 112 ci-dessus, de garantir que l’appréciation comparative des qualifications et des compétences des candidats soit effectuée en se fondant sur des critères d’analyse comparative des mérites préalablement établis sur la base des avis de vacance, de transfert et de recrutement, et insusceptibles d’être modifiés au cours de la procédure de sélection. Par ailleurs, force est de constater que la décision fixant les étapes de la procédure prévoit l’adoption des critères d’évaluation comparative des mérites au début de la procédure, à savoir avant la réception des candidatures, et ne prévoit pas la possibilité que ces critères soient modifiés au stade des entretiens.

120    En troisième lieu, s’agissant de l’exigence que l’AIPN dispose des critères d’analyse comparative des mérites afin d’assurer un traitement égal des candidats et l’objectivité de choix entre ceux-ci, rappelée au point 113 ci-dessus, il y a lieu de relever que, en l’espèce, le Parlement se borne à alléguer que la liste des thèmes ou des sujets de discussion abordés pendant les entretiens était incluse dans le rapport sur les entretiens.

121    Cependant, le procès-verbal de la réunion du Bureau du 10 décembre 2018 indique uniquement que le Bureau disposait du rapport sur les entretiens établi par le Comité consultatif, sans davantage de précisions quant à son contenu. En outre, l’extrait dudit rapport concernant uniquement le requérant et annexé à la décision de rejet de la réclamation ne contient pas la liste des sujets ou des thèmes abordés lors de son entretien. À ce titre, le Parlement soutient à tort que ladite liste peut se déduire des réponses du requérant résumées dans ledit extrait (voir point 98 ci-dessus).

122    En effet, d’une part, il ne saurait être admis que le Bureau, en tant qu’AIPN, soit tenu de déduire la liste des thèmes ou des sujets utilisés par le Comité consultatif pour l’évaluation des candidats des seules réponses des candidats résumées dans le rapport sur les entretiens.

123    D’autre part, il y a lieu de constater que, certes, le Parlement soutient que la liste des thèmes ou des sujets abordés lors des entretiens a été communiquée au Bureau en sa qualité d’AIPN. Toutefois, il explique également que les critères d’analyse comparative des mérites des candidats n’ont pas été appliqués lors des entretiens ou lors de l’analyse des réponses aux questions posées pendant les entretiens ayant abouti au classement des candidats par ordre de mérite. Par ailleurs, le Parlement ne soutient pas que le Bureau, en sa qualité d’AIPN, a été informé, dans le cadre du rapport sur les entretiens ou de la recommandation rédigés par le Comité consultatif, que les critères d’analyse comparative des mérites ont été « remplacés » par les sept sujets ou thèmes utilisés pour poser des questions aux candidats lors des entretiens et n’ont donc plus été utilisés pour comparer les mérites des candidats lors desdits entretiens.

124    Au regard des considérations développées aux points 111 à 123 ci‑dessus, il y a lieu de constater que le Parlement n’a pas établi que les mêmes critères d’analyse comparative des mérites ont été utilisés pendant les différentes phases de la procédure de sélection, ni que le Bureau, en sa qualité d’AIPN, a été informé du fait que les critères établis par le Comité consultatif avant la réception des candidatures n’ont pas été utilisés pour comparer les mérites des candidats lors des entretiens. Il en découle qu’il n’est pas démontré que la procédure de sélection suivie s’est déroulée de manière à assurer le respect du principe de bonne administration, qui aurait exigé davantage de transparence, et que cette procédure a garanti le respect du principe d’égalité de traitement.

125    Au regard de tout ce qui précède, il y a donc lieu d’accueillir la seconde branche du deuxième moyen, en ce qu’elle critique l’absence de transparence des différentes étapes de la procédure de recrutement et la violation consécutive du principe de bonne administration et du principe d’égalité de traitement, et de considérer que la décision attaquée a été adoptée à la suite d’une procédure irrégulière.

 Sur le troisième moyen, tiré d’une erreur manifeste d’appréciation et de la méconnaissance de l’intérêt du service

126    Dans le cadre du troisième moyen, tiré d’une erreur manifeste d’appréciation et de la méconnaissance de l’intérêt du service, le requérant affirme, en substance, que, en rejetant sa candidature et en nommant A au poste de directeur des médias de la DG « Communication », l’AIPN a commis une erreur manifeste d’appréciation. Cette erreur porterait, premièrement, sur les conditions des avis de vacance, de l’avis de transfert et de l’avis de recrutement, au motif qu’A ne répondrait manifestement pas aux conditions de l’emploi à pourvoir. Deuxièmement, ladite erreur porterait sur la mise en comparaison des mérites d’A avec ceux du requérant, au motif que le parcours, l’expérience, les compétences et les qualifications du requérant seraient sans nulle comparaison avec ceux d’A et au motif que l’AIPN aurait reçu des informations erronées sur le parcours professionnel du requérant. Troisièmement, le requérant n’aurait pas fait l’objet d’un traitement équitable au motif que, lors de son entretien devant le Comité consultatif, il ne se serait pas vu poser des questions identiques à celles posées à A. Plus précisément, il ne se serait pas vu poser la question relative aux procédures du Parlement et la question de la stratégie en termes de gestion des ressources humaines, qui semblent avoir été décisives pour la nomination d’A.

127    S’agissant du troisième moyen, il convient d’examiner tout d’abord les arguments soulevés dans le cadre de la deuxième branche, selon lesquels l’AIPN a été mal informée au sujet du parcours professionnel du requérant et n’a donc pas pu correctement examiner ses compétences et qualifications.

128    Dans le cadre de la deuxième branche du troisième moyen, le requérant fait valoir, notamment, que les membres du Bureau, agissant en qualité d’AIPN, auraient été mal informés sur ses compétences et qualifications professionnelles et n’auraient donc pas pu examiner avec soin et impartialité sa candidature. En effet, l’extrait du rapport sur les entretiens concernant sa candidature et ayant servi de base pour l’adoption de la décision attaquée mentionnerait que le requérant a été chef d’unité au sein de la DG « Communication » depuis 2009. Cependant le requérant aurait été nommé chef de ladite unité en 1999, à savoir une dizaine d’années avant, et aurait en outre fait fonction de chef de division en « 1993/95 » toujours au sein de la même DG « Communication » du Parlement. Par ailleurs, ledit extrait du rapport sur les entretiens omettrait de préciser son expérience antérieure de plus de dix ans comme directeur de la représentation du Parlement en Espagne et toute autre responsabilité exercée au Parlement tout à fait pertinente.

129    Le Parlement rétorque, premièrement, que la réponse à la réclamation précise que tant les performances du requérant que celles d’A ont été considérées comme globalement excellentes, mais que « sur la base de l’analyse comparative qu’il a menée, le Bureau a considéré qu’en plus de la prestation orale, les compétences [d’A] étaient globalement meilleures que [celles du requérant]. »

130    Deuxièmement, le Parlement fait valoir que le fait que le requérant remplisse toutes les conditions de l’avis de vacance ne démontre pas d’une manière automatique que l’AIPN a commis une erreur manifeste d’appréciation en lui préférant un autre candidat qualifié, pour des motifs tenant compte de l’intérêt du service.

131    Troisièmement, le Parlement confirme que l’expérience interinstitutionnelle est une des appréciations positives et déterminantes qui ont été retenues par l’AIPN en l’espèce. Par ailleurs, selon le Parlement, le fait, pour un candidat, d’avoir assuré l’intérim dans l’emploi concerné ainsi que le fait de disposer d’une longue expérience au sein de la DG « Communication » ne constituent pas des éléments décisifs pouvant l’emporter sur l’intérêt du service.

132    Quatrièmement, lors de l’audience, le Parlement a reconnu que l’extrait du rapport sur les entretiens contenait une inexactitude en ce qui concerne la date à laquelle le requérant a été nommé chef d’unité au sein de la DG « Communication ». Cependant, selon le Parlement, ladite inexactitude ne démontre pas que le Bureau, en sa qualité d’AIPN, a mal évalué le parcours professionnel du requérant, au motif que les dossiers des candidats étaient tout de même tenus à sa disposition.

133    À titre liminaire, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’AIPN est tenue de respecter les avis de vacance, de transfert et de recrutement qu’elle a arrêtés, puisque de tels avis, approuvés dans le cadre de l’article 29 du statut, déterminent les conditions relatives à l’accès à l’emploi dont il s’agit. Ainsi, la fonction desdits avis est, d’une part, d’informer les intéressés d’une façon aussi exacte que possible sur la nature des conditions requises pour occuper le poste à pourvoir afin de les mettre en mesure d’apprécier s’il y a lieu pour eux de faire acte de candidature et, d’autre part, de fixer le cadre de légalité au regard duquel l’institution entend procéder à l’examen comparatif des mérites des candidats (voir arrêt du 29 mai 1997, Contargyris/Conseil, T‑6/96, EU:T:1997:76, point 97 et jurisprudence citée).

134    L’AIPN ne respecte pas ce cadre de légalité si elle ne s’avise des conditions particulières requises pour remplir le poste à pourvoir qu’après la publication de l’avis de vacance, au vu des candidats qui se sont présentés, et si elle prend en considération, lors de l’examen des candidatures, d’autres conditions que celles qui figurent dans les avis de vacance, de transfert et de recrutement. Une telle démarche priverait en effet ces avis du rôle essentiel qu’ils doivent jouer dans la procédure de recrutement, à savoir informer les intéressés d’une façon aussi exacte que possible de la nature des conditions pour occuper le poste en question (voir arrêt du 29 mai 1997, Contargyris/Conseil, T‑6/96, EU:T:1997:76, point 98 et jurisprudence citée).

135    En outre, il importe de rappeler que, selon la jurisprudence, tant les conditions générales indiquées dans le sommaire des avis de vacance, de transfert ou de recrutement que les conditions spécifiques indiquées se rapportant au poste concerné constituent les conditions requises au titre desdits avis (voir, en ce sens, arrêt du 7 février 2019, Duym/Conseil, T‑549/17, non publié, EU:T:2019:72, point 60 et jurisprudence citée).

136    Selon une jurisprudence constante, l’AIPN dispose, en particulier lorsque le poste à pourvoir est de grade élevé, d’un large pouvoir d’appréciation dans la comparaison des mérites des candidats à un tel poste (voir arrêt du 9 juillet 2002, Tilgenkamp/Commission, T‑158/01, EU:T:2002:180, point 50 et jurisprudence citée). L’exercice de ce large pouvoir d’appréciation en matière de nomination suppose que l’AIPN examine avec soin et impartialité les dossiers de candidature et qu’elle observe consciencieusement les exigences énoncées dans les avis de vacance, de transfert ou de recrutement auxquels les candidats postulent, de sorte qu’elle est tenue d’écarter tout candidat qui ne répond pas à ces exigences. Lesdits avis concernant l’emploi à pourvoir constituent, en effet, le cadre légal que l’AIPN s’impose à elle-même et qu’elle doit respecter scrupuleusement (voir, en ce sens, arrêts du 9 juillet 2002, Tilgenkamp/Commission, T‑158/01, EU:T:2002:180, point 51 et jurisprudence citée, et du 7 février 2019, Duym/Conseil, T‑549/17, non publié, EU:T:2019:72, point 56 et jurisprudence citée).

137    Il appartient au Tribunal d’examiner si, eu égard aux considérations qui ont pu conduire l’administration à son appréciation, celle-ci s’est tenue dans des limites raisonnables et n’a pas usé de son pouvoir de manière manifestement erronée. Le Tribunal ne saurait donc substituer son appréciation des qualifications des candidats à celle de l’AIPN (voir arrêt du 7 février 2019, Duym/Conseil, T‑549/17, non publié, EU:T:2019:72, point 58 et jurisprudence citée).

138    En l’espèce, il y a lieu d’apprécier si l’AIPN, en rejetant la candidature du requérant et en retenant celle d’A, n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation résultant de la prise en compte d’informations matériellement inexactes.

139    En ce qui concerne l’expérience professionnelle du requérant, il importe de noter que, contrairement à ce qu’affirme le Parlement, il ne ressort pas de l’extrait du rapport sur les entretiens annexés à la décision de rejet de la réclamation que le Comité consultatif a dûment pris en compte son expérience professionnelle au sein de la DG « Communication ». En effet, comme le fait pertinemment valoir le requérant, ledit extrait indique que ce dernier était chef d’unité de la DG « Communication » depuis 2009, tandis que le requérant précise, sans être contesté sur ce point par le Parlement, avoir été chef d’unité de ladite direction générale depuis 1999. En outre, le Tribunal constate que, dans ledit extrait, il n’est pas mentionné que le requérant avait assumé ad intérim les responsabilités liées au poste à pourvoir depuis le 1er juin 2018, comme cela ressort du courriel du 7 novembre 2018 adressé par le directeur général de la DG « Communication » au personnel de ladite direction (voir point 4 ci-dessus) et comme cela est également confirmé par le Parlement dans ses écritures. Or, de telles informations, relatives à l’expérience managériale acquise par le requérant, étaient importantes pour que les membres du Bureau, qui ne sont pas censés connaître les détails du parcours professionnel des membres de l’encadrement de l’institution, apprécient les mérites de la candidature du requérant.

140    C’est en vain, premièrement, que le Parlement se prévaut de l’arrêt du 19 septembre 1996, Brunagel/Parlement (T‑158/94, EU:T:1996:122), afin de tenter de démontrer que le fait que le requérant a assuré l’intérim dans l’emploi concerné ou le fait qu’il dispose d’une longue expérience au sein de la direction concernée ne constituent pas des éléments pertinents lorsqu’il s’agit de poursuivre l’intérêt du service.

141    En effet, d’une part, au point 73 de l’arrêt du 19 septembre 1996, Brunagel/Parlement (T‑158/94, EU:T:1996:122), le Tribunal a uniquement indiqué, au regard des particularités de l’affaire qui lui était soumise, que, si une expérience interne au sein d’une institution était toujours un mérite pertinent pour obtenir un poste, cette expérience n’était pas présentée comme particulièrement requise par l’avis de recrutement en cause.

142    D’autre part, en l’espèce, l’expérience au sein de la DG « Communication » du Parlement n’était certes pas requise par les avis de vacance, de transfert ou de recrutement. Toutefois, une « expérience spécifique dans les domaines mentionnés dans l’avis de vacance ou de recrutement : direction d’un grand service dans le domaine des médias, de la presse et de l’audiovisuel » était « particulièrement requise » par le critère d’analyse comparative des mérites des candidats, préalablement établi par le Comité consultatif sur la base des avis de vacance, de transfert et de recrutement pertinents.

143    Deuxièmement, même à supposer que, comme le fait valoir le Parlement, les dossiers des candidats aient demeuré à la disposition des membres du Bureau, il y a lieu d’observer que le Parlement n’explique pas pourquoi lesdits membres auraient dû avoir la nécessité de vérifier l’exactitude des informations contenues dans le rapport sur les entretiens. Le Parlement ne démontre pas davantage que les membres du Bureau ont consulté notamment le dossier du requérant. Ainsi, il convient de reconnaître que, comme le fait valoir le requérant, les membres du Bureau ont été mal informés sur son parcours professionnel.

144    Ainsi, il convient de constater que, dans la mesure où l’AIPN n’a pas été correctement informée par le Comité consultatif de l’expérience professionnelle du requérant, cela a pu contribuer à une appréciation et à une comparaison erronées, de la part du Bureau en sa qualité d’AIPN, des mérites du requérant par rapport à ceux d’A.

145    Il y a donc lieu d’accueillir les arguments soulevés dans le cadre de la deuxième branche du troisième moyen et, par conséquent, ce moyen, en ce qu’il fait valoir que la décision attaquée est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation, résultant du fait que la candidature d’A a été choisie sans que l’AIPN ait été correctement informée de l’expérience professionnelle du requérant.

146    Au regard de l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de constater que la décision attaquée a été adoptée à la suite d’une procédure irrégulière (voir point 125 ci-dessus) et qu’elle a été entachée d’une erreur manifeste d’appréciation résultant de l’inexactitude des informations transmises à l’AIPN (voir point 145 ci-dessus). Partant, il y a lieu d’accueillir les conclusions en annulation et d’annuler la décision attaquée, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres arguments soulevés par le requérant à l’appui du troisième moyen, ni les quatrième et cinquième moyens.

 Sur les conclusions indemnitaires

147    Le requérant fait valoir que, en cas d’annulation de la décision attaquée, l’AIPN devrait reprendre la procédure de recrutement et que, de ce fait, cela devrait emporter son recrutement au poste de directeur à la direction des médias de la DG « Communication », puisqu’il était classé en deuxième position. À supposer que le Parlement n’agisse pas en ce sens, le requérant demande la réparation du préjudice matériel correspondant à la perte de revenus entre sa rémunération, fixée au grade AD 14, échelon 8, et la rémunération de l’emploi de directeur de grade AD 15, échelon 2, ainsi que l’indemnisation des conséquences pécuniaires en découlant en termes de pension. Plus précisément, le requérant estime que, pour respecter l’effet rétroactif d’une annulation, le Parlement serait dans l’obligation de réparer sa perte de revenus liée à une absence de recrutement au grade AD 15, échelon 2, à la date du 12 décembre 2018, à laquelle il a reçu la notification de la décision attaquée.

148    Ainsi qu’il en a été pris acte dans le procès-verbal de l’audience, le requérant a, en réponse à une question du Tribunal, précisé qu’il avait perdu une chance sérieuse d’être nommé au poste de directeur des médias de la DG « Communication ». La perte de revenus résultant de cette perte de chance pouvait être déterminée en tenant compte d’une période commençant le 12 décembre 2018, date de notification de la décision de ne pas retenir sa candidature pour l’emploi de directeur des médias et de nommer A à cet emploi, et se terminant à la date de survenance du premier des deux événements suivants : l’adoption de la nouvelle décision de nomination d’un directeur des médias remplaçant la décision annulée ou le départ à la retraite du requérant.

149    En outre, le requérant prétend que la décision attaquée a porté atteinte à sa dignité et à son intégrité psychologique. Il soutient qu’il s’est senti blessé et humilié par le rejet de sa candidature, après 33 ans de « bons et loyaux services ». De surcroît, le rejet de sa candidature aurait permis à un candidat dont l’expérience ne serait absolument pas comparable avec la sienne de devenir son supérieur hiérarchique. Le requérant revendique, en réparation de ce préjudice moral qu’il aurait subi, une somme devant être fixée par le Tribunal à 10 000 euros. L’augmentation du montant demandé par le requérant devant le Tribunal par rapport à celui de 5 000 euros qu’il avait demandé dans le cadre de sa réclamation en dommage et intérêts résulterait de l’absence de réponse utile apportée par le Parlement à sa réclamation et du maintien de la décision attaquée.

150    Le Parlement estime que, en cas d’annulation de la décision attaquée, il conviendrait de recommencer la procédure de recrutement et que, dès lors, la nomination du requérant ne serait pas automatique.

151    Le Parlement soutient que le préjudice matériel invoqué par le requérant doit être évalué à la lumière de la jurisprudence issue de l’arrêt du 6 juin 2006, Girardot/Commission (T‑10/02, EU:T:2006:148, point 100), qui établit que ce préjudice peut être apprécié en fonction du caractère sérieux de la prétendue chance d’être nommé au poste. Le Parlement ajoute que l’argumentation du requérant selon laquelle le Parlement serait tenu de réparer la différence mensuelle entière entre le grade AD 15, échelon 2, et le grade AD 14, échelon 8, ne tiendrait pas compte de la chance pour le requérant d’être nommé au poste litigieux, qui serait très réduite, et serait partant sans fondement.

152    Quant à la demande indemnitaire portant sur le préjudice moral, le Parlement estime qu’une éventuelle annulation de la décision attaquée constituerait, en elle-même, une réparation adéquate de ce préjudice. En toute hypothèse, le requérant n’aurait pas démontré avoir subi un préjudice moral détachable de l’illégalité alléguée.

153    Il ressort d’une jurisprudence constante que, dans le cadre d’une demande en dommages et intérêts formulée par un fonctionnaire ou par un agent, la responsabilité de l’Union suppose la réunion d’un ensemble de conditions en ce qui concerne l’illégalité du comportement reproché aux institutions, la réalité du dommage et l’existence d’un lien de causalité entre le comportement et le préjudice invoqué (voir arrêt du 16 décembre 2010, Commission/Petrilli, T‑143/09 P, EU:T:2010:531, point 45 et jurisprudence citée).

154    À cet égard, il convient de préciser que le contentieux en matière de fonction publique au titre de l’article 270 TFUE et des articles 90 et 91 du statut, y compris celui visant à la réparation d’un dommage causé à un fonctionnaire ou à un agent, obéit à des règles particulières et spéciales par rapport à celles découlant des principes généraux régissant la responsabilité non contractuelle de l’Union dans le cadre de l’article 268 et de l’article 340, deuxième alinéa, TFUE. En effet, il ressort notamment du statut que, à la différence de tout autre particulier, le fonctionnaire ou l’agent de l’Union est lié à l’institution dont il dépend par une relation juridique d’emploi comportant un équilibre de droits et d’obligations réciproques spécifiques, qui est reflété par le devoir de sollicitude de l’institution à l’égard de l’intéressé. Cet équilibre est essentiellement destiné à préserver la relation de confiance qui doit exister entre les institutions et leurs fonctionnaires aux fins de garantir aux citoyens le bon accomplissement des missions d’intérêt général dévolues aux institutions. Il s’ensuit que, lorsqu’elle agit en tant qu’employeur, l’Union est soumise à une responsabilité accrue, se manifestant par l’obligation de réparer les dommages causés à son personnel par toute illégalité commise en sa qualité d’employeur (voir arrêt du 16 décembre 2010, Commission/Petrilli, T‑143/09 P, EU:T:2010:531, point 46 et jurisprudence citée).

155    S’agissant du comportement illégal en question, ainsi qu’il ressort de l’examen des différents moyens soulevés par le requérant (voir points 110 à 125 et 137 à 146 ci-dessus), il a été conclu à l’irrégularité de la procédure de recrutement et, au surplus, à l’illégalité de la décision attaquée résultant du fait que l’AIPN a pris sa décision sur la base d’informations entachées d’inexactitude (voir point 145 ci-dessus).

156    S’agissant de la réalité du préjudice, en l’occurrence matériel, il est de jurisprudence constante que celui‑ci doit être dûment établi et certain (voir, en ce sens, arrêt du 21 février 2008, Commission/Girardot, C‑348/06 P, EU:C:2008:107, point 54). En particulier, lorsque le préjudice allégué consiste en une perte de chance, celle-ci doit, d’une part, avoir été réelle (voir, en ce sens, arrêts du 5 octobre 2004, Eagle e.a./Commission, T‑144/02, EU:T:2004:290, point 165, et du 6 juin 2006, Girardot/Commission, T‑10/02, EU:T:2006:148, point 96) et, d’autre part, cette perte doit être définitive (voir arrêt du 24 octobre 2018, Fernández González/Commission, T‑162/17 RENV, non publié, EU:T:2018:711, point 110).

157    Quant au degré de certitude du lien de causalité, il est atteint lorsque l’illégalité commise par une institution de l’Union a, de façon certaine, privé une personne non pas nécessairement d’un recrutement, dont l’intéressé ne pourra jamais prouver qu’il se serait produit, mais d’une chance sérieuse d’être recruté comme fonctionnaire ou agent, avec comme conséquence pour l’intéressé un préjudice matériel consistant en une perte de revenus (arrêt du 24 octobre 2018, Fernández González/Commission, T‑162/17 RENV, non publié, EU:T:2018:711, point 111).

158    En l’espèce, tout d’abord, il ressort de la décision de rejet de la réclamation que le requérant avait posé sa candidature pour le poste de directeur des médias de la DG « Communication », visé par l’avis de vacance, et que sa candidature, lors de la procédure de recrutement, avait été inscrite sur la liste des candidats, approuvée par la suite par le Bureau, en ce qu’elle répondait aux critères d’analyse comparative des mérites établis par le Comité consultatif sur la base des avis de vacance, de transfert et de recrutement.

159    Ensuite, force est de constater que le requérant démontre avoir travaillé pendant environ trente ans au sein du Parlement, dont les dix dernières années en tant que chef de l’unité « Audiovisuel » de la DG « Communication ».

160    En outre, il ressort des pièces produites par le requérant qu’il avait déjà assumé les responsabilités du poste à pourvoir depuis juin 2018 et qu’il avait été publiquement remercié pour cela.

161    De surcroît, il ressort de la décision de rejet de la réclamation que le requérant avait été invité à un entretien devant le Comité consultatif, que sa performance avait été jugée comme étant globalement « excellente », au point qu’il avait été classé deuxième par ordre de mérite dans la recommandation accompagnant le rapport d’entretien transmis au Bureau aux fins de l’adoption de la décision de nomination. Cela indique que le profil et l’expérience du requérant répondaient au profil recherché pour le poste de directeur de médias de la DG « Communication » et étaient susceptibles de présenter un intérêt pour l’institution concernée.

162    Il s’ensuit que la candidature du requérant avait une chance sérieuse d’être retenue, en l’absence des illégalités commises par le Parlement, pour le poste visé par l’avis de vacance.

163    Par conséquent, sur la base des éléments relevés aux points 159 à 162 ci-dessus, il convient de considérer que l’illégalité commise par le Parlement a privé, de façon certaine, le requérant d’une chance sérieuse d’être recruté au poste visé par l’avis de vacance, au sens de la jurisprudence rappelée aux points 156 et 157 ci-dessus.

164    S’agissant de la question de savoir si cette perte de chance est définitive, il convient de relever que le requérant a définitivement perdu une chance d’être recruté « plus tôt », à savoir à compter du 12 décembre 2018, date de notification de la décision attaquée. En effet, même si, à la suite du présent arrêt, le Parlement organisait une nouvelle procédure de sélection et même s’il n’est pas exclu que le requérant puisse présenter à nouveau sa candidature, il n’en demeure pas moins que ses chances d’être recruté sur le poste en question sont fortement réduites compte tenu de l’imminence de son départ à la retraite.

165    Selon la jurisprudence, pour déterminer le montant de l’indemnité à verser au titre de la perte d’une chance, il convient, après avoir identifié la nature de la chance dont le fonctionnaire ou l’agent a été privé, de déterminer la date à partir de laquelle il aurait pu bénéficier de cette chance, puis de quantifier ladite chance et, enfin, de préciser quelles ont été pour lui les conséquences financières de cette perte de chance (voir arrêt du 24 octobre 2018, Fernández González/Commission, T‑162/17 RENV, non publié, EU:T:2018:711, point 118).

166    En l’espèce, le requérant a donné une évaluation chiffrée du montant devant servir de base au calcul du montant de l’indemnité liée à la perte de chance. Il a notamment indiqué que le dommage matériel qu’il a subi correspondrait à la perte de revenus entre sa rémunération, fixée au grade AD 14, échelon 8, et la rémunération de l’emploi de directeur de grade AD 15, échelon 2. Il a précisé, sans être démenti sur ce point par le Parlement, qu’il existait une différence salariale mensuelle de 450 euros entre son salaire de base, s’élevant à 16 700,39 euros, et le salaire correspondant au grade AD 15, échelon 2, s’élevant à 17 150,26 euros. De plus, en réponse à une mesure d’organisation de la procédure, le requérant a fourni une évaluation approximative de ses droits à pension en se fondant sur un départ à la retraite à la date du 1er mai 2022. À ce titre, il a calculé ses droits à pension en prenant en compte, dans une première hypothèse, son traitement de base au grade AD 14, échelon 8, et, dans une seconde hypothèse, son traitement de base au grade AD 15, échelon 2. Dans le cadre de sa réponse, le requérant a fourni plusieurs estimations qui résultaient de différentes méthodes de calcul, afin de se voir accorder la perte de revenus consistant en la différence entre les droits à pension acquis en qualité d’AD 14, échelon 8, et ceux à acquérir en qualité d’AD 15, échelon 2.

167    Il ressort de la jurisprudence que, lorsque cela est possible, la chance dont un fonctionnaire ou un agent a été privé doit être déterminée objectivement, sous la forme d’un coefficient mathématique résultant d’une analyse précise. Cependant, lorsque ladite chance ne peut pas être quantifiée de cette manière, il est admis que le préjudice subi puisse être évalué ex æquo et bono (voir arrêt du 16 décembre 2020, VP/Cedefop, T‑187/18, non publié, EU:T:2020:613, point 199 et jurisprudence citée).

168    En l’espèce, certes, le requérant a définitivement perdu une chance réelle et sérieuse d’être nommé directeur des médias de la DG « Communication » à compter du 12 décembre 2018, date de notification de la décision de ne pas retenir sa candidature à l’emploi de directeur des médias et de nommer A à cet emploi. Cependant, bien que le requérant ait proposé une évaluation chiffrée de son préjudice matériel, compte tenu des circonstances de l’espèce, cette évaluation ne saurait être retenue. En effet, il n’est pas possible de quantifier correctement cette chance et de préciser les conséquences financières de la perte de chance, au motif qu’un calcul correct du préjudice matériel du requérant dépendrait de diverses hypothèses, notamment s’agissant de la durée totale de la carrière du requérant au sein du Parlement ou encore de l’éventuelle nomination qui pourrait intervenir à la suite d’une nouvelle procédure de recrutement. Par conséquent, il y a lieu d’évaluer, compte tenu de toutes les circonstances de l’affaire, le préjudice subi ex æquo et bono (voir, en ce sens, arrêt du 16 décembre 2020, VP/Cedefop, T‑187/18, non publié, EU:T:2020:613, point 200 et jurisprudence citée). Par ailleurs, cette estimation forfaitaire, ex æquo et bono, du préjudice permet d’accorder au requérant une somme dont il aura immédiatement la disposition, au lieu de versements mensuels pendant une période d’une durée non déterminée (voir, en ce sens, arrêt du 13 septembre 2011, AA/Commission, F‑101/09, EU:F:2011:133, point 105).

169    Dans les circonstances de l’espèce, il sera fait une juste appréciation de l’entier préjudice matériel subi par le requérant, en condamnant le Parlement à lui verser, ex æquo et bono, la somme forfaitaire de 40 000 euros. Cette estimation forfaitaire, ex æquo et bono, du préjudice matériel du requérant tient compte non seulement de son grade actuel, du grade qu’il aurait pu détenir s’il avait été nommé directeur des médias, de la durée de sa carrière professionnelle et de la période pendant laquelle il aurait pu espérer percevoir une pension correspondant à ces fonctions de directeur, mais aussi de la circonstance que, en exécution du présent arrêt, le requérant percevra une somme dont il aura immédiatement la disposition.

170    S’agissant du préjudice moral allégué par le requérant, résultant de l’atteinte à sa dignité et à son intégrité psychologique à la suite du rejet de sa candidature après plus de trente ans de services ainsi que de la circonstance que le candidat retenu, arrivé au Parlement en janvier 2015 sur le poste de chef d’unité du service de recherche du Parlement, chargé de la recherche et des études académiques, comme l’affirme le requérant sans être démenti par le Parlement, est devenu son supérieur hiérarchique, il y a lieu d’observer ce qui suit.

171    Dans la mesure où, ainsi que cela ressort de la décision de rejet de la réclamation, les performances du requérant ont été jugées comme étant globalement « excellentes » (voir point 102 ci-dessus), il ne saurait être considéré que ce dernier a subi une atteinte à sa « dignité et/ou à son intégrité psychologique ». S’agissant de l’atteinte à son avenir professionnel, il y a lieu de constater que les conséquences matérielles de celle-ci seront réparées par le versement d’une indemnité en réparation du préjudice matériel. En outre, la réponse à sa réclamation était suffisamment précise pour lui permettre d’apprécier l’opportunité d’introduire le présent recours. Enfin, en tout état de cause, il convient de considérer que l’annulation de la décision attaquée suffit à réparer le préjudice moral du requérant.

172    Il s’ensuit qu’il convient de rejeter la demande de réparation du préjudice moral.

173    Dans ces circonstances, il y a lieu d’accueillir partiellement la demande en indemnité formulée par le requérant en ce qu’elle porte sur la réparation du préjudice matériel et de la rejeter pour le surplus.

174    Compte tenu de l’ensemble de ce qui précède, il y a lieu, d’une part, d’annuler la décision attaquée et, d’autre part, de condamner le Parlement à verser au requérant, à titre de réparation du préjudice matériel qu’il a subi, une somme s’élevant à 40 000 euros.

 Sur les demandes de mesures d’organisation de la procédure

175    Ainsi que cela a été précisé au point 25 ci-dessus, le requérant a, lors de l’audience, maintenu une seule demande de mesure d’organisation de la procédure, à savoir celle qui vise à obtenir le rapport sur les entretiens complet et la recommandation établis par le Comité consultatif.

176    Le Parlement s’oppose à ladite mesure demandée par le requérant.

177    À cet égard, il convient d’indiquer que, eu égard aux éléments du dossier et aux motifs du présent arrêt, les éléments mis à la disposition du Tribunal ont été suffisants afin d’apprécier la légalité de la décision attaquée et d’annuler celle-ci. Il n’y a donc pas lieu de faire droit à ladite demande du requérant.

 Sur les dépens

178    En vertu de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

179    Le Parlement ayant, pour l’essentiel, succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions du requérant.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision du Parlement européen du 10 décembre 2018 de rejet de la candidature du requérant et de nomination d’un autre candidat au poste de directeur des médias de la direction générale de la communication est annulée.

2)      Le Parlement est condamné à verser au requérant, à titre de réparation du préjudice matériel, une somme de 40 000 euros.

3)      Le recours est rejeté pour le surplus.

4)      Le Parlement est condamné aux dépens.

Gervasoni

Madise

Martín y Pérez de Nanclares

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 14 juillet 2021.

Le greffier

 

Le président

E. Coulon

 

S. Papasavvas


Table des matières


Antécédents du litige et faits postérieurs à l’introduction du recours

Procédure et conclusions des parties

En droit

Sur les conclusions en annulation

Sur la fin de non-recevoir relative au deuxième moyen

Sur la première branche du deuxième moyen, tirée d’une exception d’illégalité soulevée à l’encontre de la décision fixant les étapes de la procédure et de l’article 6 de l’avis de recrutement

Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation

Sur la seconde branche du deuxième moyen, tirée de ce que la procédure de sélection suivie viole l’article 27 du statut ainsi que les principes de sécurité juridique, de transparence, de bonne administration et d’égalité de traitement

Sur le troisième moyen, tiré d’une erreur manifeste d’appréciation et de la méconnaissance de l’intérêt du service

Sur les conclusions indemnitaires

Sur les demandes de mesures d’organisation de la procédure

Sur les dépens


*      Langue de procédure : le français.