Language of document : ECLI:EU:T:2010:289

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre) 

7 juillet 2010 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire figurative stabilator – Marque communautaire verbale antérieure STABILAT – Motif relatif de refus – Absence de risque de confusion – Absence de similitude des produits et des services – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009] »

Dans l’affaire T‑60/09,

Herhof-Verwaltungsgesellschaft mbH, établie à Solms (Allemagne), représentée par Mes A. Zinnecker et T. Bösling, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. G. Schneider, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Stabilator sp. z o.o., établie à Gdynia (Pologne), représentée par MM. Kacprzak, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’OHMI du 16 décembre 2008 (affaires R 483/2008-4 et R 705/2008-4), relative à une procédure d’opposition entre Herhof-Verwaltungsgesellschaft mbH et Stabilator sp. z o.o.,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de M. O. Czúcz (rapporteur), président, Mme I. Labucka et M. K. O’Higgins, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 16 février 2009,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 2 juin 2009,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 8 juin 2009,

vu le mémoire en réplique déposé au greffe du Tribunal le 6 août 2009,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 8 octobre 2004, l’intervenante, Stabilator sp. z o.o., a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits et les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 19, 37 et 42, au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent notamment à la description suivante :

–        classe 19 : « Matériaux de construction non métalliques » ;

–        classe 37 : « Services de construction, contrôle de la construction, restauration de bâtiments et autres objets d’ingénierie, préservation de bâtiments et autres objets d’ingénierie, services de démolition, montage d’échafaudages, prêt de machines et outils de construction » ;

–        classe 42 : « Services architecturaux, recherches techniques en construction, conseils en construction, expertise d’ingénierie en construction, conception de constructions ».

4        La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 32/2005, du 8 août 2005.

5        Le 18 octobre 2005, la requérante, Herhof-Verwaltungsgesellschaft mbH, a formé opposition, au titre de l’article 42 du règlement n° 40/94 (devenu article 41 du règlement n° 207/2009), à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits et les services visés au point 3 ci-dessus. L’opposition était fondée sur un risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009], entre la marque demandée et la marque communautaire verbale antérieure STABILAT, enregistrée le 9 octobre 2002, sous le numéro 1681824, pour les produits et les services suivants :

–        classe 1 : « Produits de recyclage, à savoir biogaz » ;

–        classe 7 : « Installations de compostage ; installations de stabilisation des déchets résiduels » ;

–        classe 11 : « Installations de production de biogaz à base de déchets ; installations thermiques de récupération des déchets ; installations de nettoyage des fumées ; installations de traitement et/ou de nettoyage de l’air et/ou des fumées » ;

–        classe 20 : « Conteneurs à compost en béton pour composter les déchets » ;

–        classe 37 : « Travaux d’installation d’installations de compostage, installations de production de biogaz à base de déchets, installations de traitement et/ou de nettoyage de l’air et/ou des fumées, installations de stabilisation des déchets résiduels et installations thermiques de récupération des déchets » ;

–        classe 40 : « Production d’énergie thermique et électrique provenant d’installations de recyclage ; compostage de déchets, transformation de déchets en biogaz, stabilisation de déchets et transformation thermique de déchets pour le compte de tiers et contre rémunération » ;

–        classe 42 : « Analyses chimiques et physiques, en particulier de compost, de terres et de matériaux de construction, ainsi que de biogaz, d’air et de fumées ; conception, à savoir création du concept et prise en charge de la construction d’installations de compostage, d’installations de production de biogaz à base de déchets, d’installations de traitement et/ou de nettoyage de l’air et/ou des fumées, d’installations de stabilisation des déchets résiduels et d’installations thermiques de récupération des déchets ».

6        Le 21 février 2008, la division d’opposition de l’OHMI a fait droit à l’opposition en ce qui concerne l’ensemble des produits et des services pour lesquels l’enregistrement a été demandé, à l’exception des « services de démolition » relevant de la classe 37.

7        Le 14 mars 2008, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 57 à 62 du règlement n° 40/94 (devenus articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009), contre la décision de la division d’opposition, en demandant son annulation dans la mesure où l’opposition avait été rejetée en ce qui concerne les « services de démolition ».

8        Le 21 avril 2008, l’intervenante a également formé un recours auprès de l’OHMI contre cette décision, en demandant son annulation en ce que l’enregistrement de la marque demandée avait été refusé pour les produits et les services mentionnés au point 3 ci-dessus.

9        Par décision du 16 décembre 2008 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’OHMI a considéré qu’il n’y avait pas de risque de confusion entre les deux marques et a, par conséquent, rejeté le recours de la requérante et fait droit au recours de l’intervenante. Elle a motivé cette conclusion en indiquant que, même si les signes en conflit étaient similaires, comme l’avait considéré la division d’opposition, les produits et les services en cause ne l’étaient pas.

10      À cet égard, en premier lieu, elle a considéré qu’il ressortait de la spécification des produits et des services de la requérante que les activités de celle-ci étaient axées sur la production d’énergie thermique et électrique provenant d’installations de recyclage et sur le compostage et le recyclage de déchets en vue de produire du biogaz – et que, de ce fait, la requérante était considérée comme faisant partie du réseau des fournisseurs d’énergie – alors que les produits et les services visés par la demande de marque étaient des matériaux et des services généraux de construction pour lesquels la requérante ne bénéficierait pas de protection. En deuxième lieu, elle en a déduit que, alors que les produits et les services de la requérante étaient proposés à des collectivités locales responsables de la gestion de déchets, les produits et les services visés par la demande de marque s’adressaient à des particuliers et à des professionnels de la construction. En troisième lieu, elle a considéré que les produits et les services visés par la demande de marque et ceux visés par la marque antérieure n’étaient pas complémentaires dès lors que, même si les produits des deux marques pouvaient éventuellement s’adresser au même public, une installation de production de biogaz ou de traitement des déchets n’est construite ni en même temps que des logements ou des bâtiments publics ni dans le but spécifique de faire fonctionner ceux-ci. En quatrième lieu, s’agissant spécifiquement du lien invoqué par la requérante entre les « services de démolition » de l’intervenante et ses services de recyclage des déchets relevant de la classe 40, la chambre de recours a considéré qu’un tel lien n’existait pas, dès lors, d’une part, que les services de la requérante ne couvraient pas le recyclage de matériaux de construction qui ne servent pas de matière première pour la production de biogaz, et, d’autre part, qu’un élargissement de la protection acquise dans un domaine déterminé du recyclage ne saurait être justifié, le processus de recyclage différant en fonction du type de matériau à recycler.

 Conclusions des parties

11      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

12      L’OHMI et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

13      La requérante soulève un moyen unique tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

 Arguments des parties

14      La requérante fait valoir qu’il existe entre les produits et les services en conflit au moins un certain degré de similitude qui, associé à la similitude des signes, est de nature à faire naître un risque de confusion dans l’esprit du public.

15      À cet égard, en premier lieu, elle fait valoir que la chambre de recours n’a pas fait de comparaison concrète des produits et des services en cause et s’est bornée à déduire de l’ensemble des produits et des services désignés par chacune des marques en conflit une « tendance générale ». La requérante affirme ainsi que la chambre de recours a fondé son appréciation sur le fait qu’elle serait une entreprise du secteur de l’énergie et du traitement des déchets, alors que l’intervenante appartiendrait au secteur du bâtiment, et sur le fait que l’absence de similitude entre ces branches d’activité impliquerait une absence de similitude entre les produits et les services proposés par les deux entreprises.

16      Elle fait valoir que cette approche est erronée dès lors que, conformément à la jurisprudence, la comparaison doit porter sur les produits et les services tels que mentionnés dans la liste de chacune des marques et non sur les produits et les services pour lesquels elles sont utilisés ni, a fortiori, sur les branches d’activité dans lesquelles les entreprises concernées sont prétendument actives.

17      En second lieu, elle soutient qu’il existe une similitude, premièrement, entre les produits et les services de l’intervenante relevant des classes 19 et 37 et les « analyses chimiques et physiques, en particulier de matériaux de construction » visés par sa marque, deuxièmement, entre les « services de construction » de l’intervenante et les travaux d’installation visés par sa marque, troisièmement, entre ses services relevant de la classe 42 et ceux de l’intervenante relevant de la même classe et, quatrièmement, entre les « services de démolition » de l’intervenante et ses services relevant de la classe 40.

18      L’OHMI et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

 Appréciation du Tribunal

19      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

20      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 à 33, et la jurisprudence citée].

21      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du Tribunal du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, Rec. p. II‑43, point 42, et la jurisprudence citée].

22      Selon une jurisprudence constante, pour apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire [voir arrêt du Tribunal du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, Rec. p. II‑2579, point 37, et la jurisprudence citée].

23      À titre principal, la requérante reproche, en substance, à la chambre de recours d’avoir fait une lecture erronée de la description des produits et des services protégés par la marque antérieure en se fondant, non sur les termes du registre, mais, par une lecture d’ensemble de la liste enregistrée, sur la branche d’activité dans laquelle elle serait prétendument active. Elle considère que la chambre de recours a ainsi réduit la protection accordée à sa marque, dès lors qu’elle se serait fondée sur une définition des produits et des services protégés par cette dernière plus restreinte que celle qui découle du registre. Ainsi, notamment en considérant qu’il s’agissait de produits et de services propres d’un fournisseur d’énergie destinés à un public spécifique (collectivités locales et agriculteurs), la chambre de recours aurait limité le nombre des produits et des services protégés par la marque antérieure en excluant qu’ils puissent s’adresser à des ménages.

24      Il convient de relever que, même si la chambre de recours a effectivement affirmé que la requérante était considérée comme un fournisseur d’énergie, elle s’est fondée à cet égard sur la description des produits et des services, et non sur des informations ne figurant pas au registre, telles que leur utilisation réelle. Elle a ainsi considéré qu’il ressortait de la description des différents produits et services protégés par la marque antérieure qu’ils étaient d’une nature très spécifique et qu’ils ne seraient pas fournis par une entreprise commercialisant des produits et des services relatifs à une activité de construction générale, mais par une entreprise spécialisée dans le traitement de déchets pour la production d’énergie, et qu’ils ne seraient proposés qu’à un public très spécifique (collectivités locales et agriculteurs).

25      Il en résulte que, indépendamment du fait que la décision attaquée fasse référence spécifiquement au type d’activité dans laquelle la requérante serait active, la chambre de recours s’est bornée à examiner, conformément à l’objectif de la comparaison des produits et des services en cause, le type d’entreprise qui fournit les différents produits et services visés par chacune des marques en conflit afin d’apprécier si le public risque de croire, étant donné la similitude entre les signes, qu’ils proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées.

26      Cette constatation générale ne permet certes pas d’exclure que la chambre de recours puisse avoir commis une erreur en appréciant le type d’entreprise qui fournit habituellement certains des produits ou des services en cause, et ce en raison, notamment, d’une lecture restrictive de la description figurant sur la liste enregistrée pour la marque antérieure, influencée par les autres produits ou services visés. Or, cette question ne peut être tranchée qu’après un examen concret des appréciations de la chambre de recours concernant chacun des produits et des services pour lesquels l’enregistrement a été demandé.

27      Il convient, par conséquent, d’examiner les arguments des parties quant à la comparaison entre les produits et les services visés par les deux marques en conflit.

28      En premier lieu, la requérante soutient qu’il existe une similitude entre, d’une part, ses services d’« analyses chimiques et physiques, en particulier de matériaux de construction », relevant de la classe 42, et, d’autre part, les produits et les services de l’intervenante relevant des classes 19 et 37 (« Matériaux de construction non métalliques » et « Services de construction, contrôle de la construction, restauration de bâtiments et autres objets d’ingénierie, préservation de bâtiments et autres objets d’ingénierie, services de démolition, montage d’échafaudages, prêt de machines et outils de construction »).

29      Il ressort des points 24 et 25 de la décision attaquée que la chambre de recours a considéré à cet égard que les « analyses chimiques et physiques, en particulier de matériaux de construction », ainsi que les analyses de compost et de terres, étaient des services d’analyses de matériaux recyclables de nature très pointue, qui seraient proposés, à la différence des produits et des services visés par la demande d’enregistrement, par une entreprise spécialisée en matière de production de biogaz et de recyclage de déchets organiques et non par une entreprise de construction générale. La chambre de recours a également considéré que la requérante ne bénéficiait d’aucune protection pour la production de matériaux de construction, ni pour des services de construction en général ou pour la planification et la conception de bâtiments et de constructions.

30      La requérante se borne à affirmer qu’il existe un degré de similitude élevé entre la fabrication et la vente de matériaux de construction et les « analyses chimiques et physiques, en particulier de matériaux de construction », dès lors que l’utilisation desdits matériaux est en général impossible si leurs propriétés techniques ne sont pas connues et que, par conséquent, la personne qui les acquiert ou les transforme s’intéressera aux informations relatives à leurs caractéristiques techniques. Par ailleurs, le public pertinent serait le même dès lors que ses services ne s’adresseraient pas uniquement à des collectivités locales ou à des agriculteurs. Elle ajoute qu’il ressort du site Internet du premier producteur mondial de matériaux de construction que celui-ci propose à la fois des matériaux de construction et des analyses physiques de construction. Enfin, elle considère que, pour ces mêmes raisons, il existe une similitude entre les services de la classe 37 visés par la marque demandée et ses services d’« analyses chimiques et physiques, en particulier de matériaux de construction ».

31      Ces arguments ne permettent pas de considérer que la chambre de recours a commis une erreur d’appréciation. En effet, s’il est certes vrai que l’utilisation de matériaux de construction exige de connaître leurs propriétés techniques, il n’en reste pas moins que rien ne permet de considérer que les entreprises de production de matériaux de construction offrent des services d’analyses desdits produits à des tiers. Si ces entreprises réalisent nécessairement des recherches pour améliorer leurs produits et communiquent à leurs clients l’information quant aux caractéristiques techniques desdits produits, cela n’implique pas qu’ils offrent à des tiers des services d’analyses de produits de construction.

32      Par ailleurs, l’argument de la requérante selon lequel les produits et les services en cause s’adressent au même public n’est pas de nature à démontrer qu’il y a une similitude entre eux dès lors que beaucoup de produits et de services complètement différents s’adressent au même public.

33      S’agissant des preuves fournies par la requérante quant aux activités d’un producteur de matériaux de construction, il convient de constater qu’elles ont été présentées pour la première fois devant le Tribunal et, par conséquent, sont irrecevables. En effet, il convient de rappeler que le recours porté devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’OHMI au sens de l’article 63 du règlement n° 40/94 (devenu article 65 du règlement n° 207/2009). Dès lors, la fonction du Tribunal n’est pas de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des preuves présentées pour la première fois devant lui. L’admission de ces preuves est contraire à l’article 135, paragraphe 4, du règlement de procédure du Tribunal, selon lequel les mémoires des parties ne peuvent pas modifier l’objet du litige devant la chambre de recours [arrêts du Tribunal du 6 mars 2003, DaimlerChrysler/OHMI (Calandre), T‑128/01, Rec. p. II‑701, point 18, et du 19 novembre 2008, Rautaruukki/OHMI (RAUTARUUKKI), T‑269/06, non publié au Recueil, point 13]. En tout état de cause, les extraits cités dans la requête ne démontrent pas que le producteur en cause offre à ses clients des services d’analyses de matériaux de construction, mais uniquement que l’une des sociétés du groupe compte parmi ses missions la recherche et le développement de matériaux et de produits sans qu’il soit précisé qu’elle offre des services en dehors du groupe.

34      En deuxième lieu, la requérante soutient qu’il existe une similitude entre, d’une part, ses services de mise en place d’installations de traitement de déchets, relevant de la classe 37, et, d’autre part, les « services de construction » de l’intervenante.

35      La chambre de recours a considéré à cet égard, aux points 24 à 26 de la décision attaquée, que les services de la classe 37 protégés par la marque de la requérante étaient des services spécifiques de planification et de mise en place d’installations spécialisées dans le secteur de l’industrie du recyclage offrant des solutions pour le compostage, le recyclage thermique, la stabilisation chimique et biologique de déchets résiduels et le nettoyage de l’air pollué, notamment lors du processus de biodégradation. Elle a considéré que ces services étaient destinés à des collectivités locales ou à des agriculteurs et ne concernaient pas des installations destinées ou, au moins, adaptées aux bâtiments en général. Elle a, dès lors, estimé que lesdits services seraient proposés par une entreprise spécialisée en matière de production de biogaz et de recyclage de déchets organiques et qu’ils ne seraient pas proposés, à la différence des services visés par la demande de marque, par des sociétés de construction générale.

36      La requérante fait valoir que ses services relèvent, comme ceux de l’intervenante, de la notion de « services de construction ». À cet égard, elle affirme que ses services d’installation ne s’adressent pas uniquement aux collectivités locales ou aux exploitations agricoles, mais s’adressent à toute catégorie d’entreprises et de ménages et que, par conséquent, ils sont destinés au même public que les services de construction de l’intervenante.

37      Force est de constater que ces arguments ne suffisent pas à démontrer que la chambre de recours a commis une erreur d’appréciation. En effet, les services de la classe 37 protégés par la marque de la requérante sont des services qui, bien que pouvant impliquer non seulement une installation dans une construction préexistante, mais aussi une nouvelle construction, sont très spécifiques et sont proposés par des entreprises spécialisées dans le domaine du traitement des déchets et non par des sociétés de construction générale.

38      En tout état de cause, la requérante n’a produit devant l’OHMI aucune preuve permettant de considérer que les sociétés de construction générale proposent des services d’installation du type de ceux protégés par sa marque, ou ont des sociétés liées à elles qui le font, et que le public pertinent, que ce soit des collectivités locales ou des agriculteurs, comme il a été indiqué par la chambre de recours, ou tout type d’entreprise ainsi que les ménages, comme le prétend la requérante, s’adresse à de telles sociétés afin de faire mettre en place des installations du type de celles protégées par la marque antérieure. En outre, il convient d’ajouter que, dans l’énoncé de la classe 37 de l’arrangement de Nice, les services de construction sont énumérés séparément des services d’installation, ce qui renforce l’appréciation selon laquelle les services d’installation ne font pas nécessairement partie des services de construction.

39      Par ailleurs, en ce qui concerne l’argument selon lequel le public sera le même pour les deux types de services, il convient de l’écarter pour les motifs indiqués au point 32 ci-dessus. En tout état de cause, il y a lieu de constater que, tout en définissant le public pertinent pour les produits et les services de la requérante de manière différente de celle dont cette dernière le définit, la chambre de recours a reconnu que ledit public pouvait être le même que celui concerné par les produits et les services visés par la demande d’enregistrement, dès lors que les collectivités locales peuvent faire construire des bâtiments publics ou des logements. La requérante ne conteste cependant pas l’appréciation développée par la chambre de recours à la suite de cette affirmation, selon laquelle, même en tenant compte de ce public commun, les services en cause n’étaient pas similaires dès lors qu’une installation du type de celles visées par la marque antérieure « ne sera construite ni en même temps que des logements ou des bâtiments publics, ni dans le but spécifique de faire fonctionner ceux-ci ».

40      En troisième lieu, la requérante soutient qu’il existe une similitude entre les services relevant de la classe 42 qui sont couverts par chacune des marques en conflit. Ainsi, elle affirme qu’il existe une similitude entre, d’une part, les services d’analyses chimiques et physiques de terres et de matériaux de construction ainsi que les services de conception et de prise en charge de la construction d’installations notamment de compostage, de production de biogaz et de stabilisation des déchets résiduels et, d’autre part, les services architecturaux, la conception de constructions et les conseils en construction ainsi que les recherches techniques en construction.

41      Quant au contenu de la décision attaquée à cet égard, il convient de renvoyer au point 29 ci-dessus où ont été exposées les considérations de la chambre de recours quant au type d’entreprise qui fournirait les services d’analyses chimiques et physiques de matériaux de construction. Pour ce qui est de ses considérations relatives au type d’entreprise qui fournirait les services de conception et de prise en charge de la construction d’installations du type protégé par la marque de la requérante, il convient de renvoyer au point 35 ci-dessus, où ses considérations relatives à la mise en place de telles installations ont été exposées, ces considérations étant transposables auxdits services.

42      La requérante fait valoir à cet égard que l’ensemble des services en cause est directement lié à des activités du secteur de la construction. S’agissant, en particulier, de ses services en matière d’analyses chimiques et physiques de terres et de matériaux de construction, le refus de reconnaître ce lien ne saurait être motivé par le fait qu’ils seraient limités à des activités relevant du domaine de l’élimination des déchets, dès lors que le registre ne contient pas cette limitation.

43      Il convient, tout d’abord, d’écarter l’argument de la requérante pour ce qui est de la comparaison entre les services de l’intervenante relevant de la classe 42 et ses services de conception d’installations de compostage, de production de biogaz à base de déchets, de traitement de l’air et des fumées et de stabilisation des déchets résiduels ainsi que de la conception d’installations thermiques de récupération des déchets. En effet, tout comme ses services relevant de la classe 37, ces services sont très spécifiques et le public ne considérera pas, par conséquent, qu’ils sont fournis par une entreprise de construction générale, ou par une entreprise liée à celle-ci, et ce, en substance, pour les motifs exposés aux points 37 à 39 ci-dessus.

44      Pour ce qui est de l’argument visant la comparaison entre les services de l’intervenante relevant de la classe 42 et les services de la requérante d’analyses chimiques et physiques de terres et de matériaux de construction, il convient de rappeler que la liste de la marque antérieure est libellée comme suit : « analyses chimiques et physiques, en particulier de compost, de terres et de matériaux de construction, ainsi que de biogaz, d’air et de fumées ». Il ressort de cette description que les services en cause de la requérante ne consistent pas spécifiquement en des services d’analyses de terres et de matériaux de construction, mais en des services d’analyses chimiques et physiques d’un ensemble de matières et de gaz. Dès lors, le fait que la liste de la requérante ne limite pas expressément les services d’analyses de terres et de matériaux de construction à des activités relevant du domaine spécifique de l’élimination des déchets n’empêche pas de considérer que la marque antérieure a été enregistrée, comme l’indique la chambre de recours, pour des services de nature très pointue sans relation avec les services de construction. Dans ces circonstances et en l’absence d’autres arguments de la requérante, il y a lieu de considérer que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en considérant que les services ainsi protégés par la marque antérieure ne seront pas proposés par une entreprise de construction générale ou par une entreprise liée.

45      En quatrième lieu, la requérante soutient qu’il existe une similitude entre les « services de démolition » de l’intervenante et ses services relevant de la classe 40, à savoir ceux correspondant à la description suivante : « Production d’énergie thermique et électrique provenant d’installations de recyclage ; compostage de déchets, transformation de déchets en biogaz, stabilisation de déchets et transformation thermique de déchets pour le compte de tiers et contre rémunération ».

46      La chambre de recours a conclu, au point 35 de la décision attaquée, à l’absence de similitude de ces services au motif que ceux protégés par la marque de la requérante ne couvraient pas le recyclage de déchets inorganiques, notamment de nombreux matériaux de construction, qui ne servent pas de matière première pour la production de biogaz, et qu’un élargissement de la protection acquise dans un domaine déterminé du recyclage ne saurait être justifié, le processus de recyclage différant en fonction du type de matériau à recycler.

47      La requérante fait valoir que les services en cause se complètent et sont souvent proposés par la même entreprise. Elle affirme que la démolition de bâtiments ne produit pas seulement des déchets inorganiques, mais également de grosses quantités de bois et que ce dernier fait partie des matières premières les plus importantes dans la production de biogaz. Elle invoque à cet égard l’article d’une revue spécialisée sur la production d’énergie à partir de la biomasse ainsi que le manuscrit d’un discours prononcé lors d’une conférence sur l’utilisation de la biomasse, qui indiquerait que le bois tiré notamment des déchets encombrants représentait, en octobre 2008, près de 16,5 % du volume total de biomasse de Berlin.

48      Ces arguments ne permettent pas d’infirmer l’appréciation de la chambre de recours. En effet, s’il n’est pas contesté que la démolition de bâtiments ne produit pas seulement des déchets inorganiques, la requérante ne prouve pas qu’une partie importante des déchets utilisés pour la production du biogaz provienne de la démolition de bâtiments, ni qu’une partie importante des déchets résultant de démolitions puisse être utilisée comme biomasse pour la production de biogaz. En outre, les déchets, organiques ou non, résultant de démolitions ne seront pas nécessairement utilisés dans le secteur de la production d’énergie, mais pourront, comme l’indique l’intervenante, être recyclés en tant que matière première d’autres activités.

49      Par ailleurs, il n’y a pas de raison de considérer que les services en cause présentent un caractère complémentaire. Il y a lieu de rappeler, à cet égard, que les services complémentaires sont ceux entre lesquels existe un lien étroit, en ce sens que l’un est indispensable ou important pour l’usage de l’autre, de sorte que les consommateurs peuvent penser que la responsabilité de la fourniture de ces services incombe à la même entreprise (arrêt easyHotel, point 21 supra, point 57). Or, il n’apparaît pas que les services relevant de la classe 42 protégés par la marque de la requérante soient indispensables ou importants pour l’usage des services de démolition ou, inversement, que ces derniers soient indispensables ou importants pour les clients des services relevant de la classe 42 protégés par la marque de la requérante. Comme le soutient l’OHMI, le fait que les déchets résultant d’une prestation de service déterminée puissent servir de matière première pour la fourniture d’un autre service ne permet pas d’établir un rapport de complémentarité au sens de la jurisprudence.

50      Enfin, s’agissant du manuscrit d’un discours et de l’article invoqués par la requérante, il convient de constater qu’ils ont été produits pour la première fois devant le Tribunal et sont, par conséquent, irrecevables (voir point 33 ci-dessus). En tout état de cause, le fait que le bois, tiré notamment des déchets encombrants, représentait, en octobre 2008, près de 16,5 % du volume total de biomasse de Berlin ne démontre pas que les sociétés qui produisent de l’énergie à partir d’installations de recyclage ou qui offrent des services de compostage de matières organiques ou de stabilisation et de transformation thermique de déchets proposent elles-mêmes des services de démolition de bâtiments ni, inversement, que les sociétés proposant de tels services produisent également de l’énergie ou qu’elles offrent des services de compostage de matières organiques ou de stabilisation et de transformation thermique des déchets. Le fait que certaines entreprises de démolition trient et recyclent les déchets résultant des démolitions dans des produits secondaires, ainsi qu’il ressort des preuves présentées par la requérante devant la chambre de recours, n’infirme pas cette conclusion, dès lors que les activités de production d’énergie, de compostage ainsi que de stabilisation et de transformation thermique des déchets requièrent une expertise très spécifique allant au-delà de celle nécessaire pour le recyclage de la plupart des déchets résultant des démolitions.

51      Au vu de ce qui précède, il y a lieu de considérer que la requérante n’a pas démontré que la chambre de recours a commis une erreur d’appréciation en considérant que les produits et les services visés par les marques en conflit n’étaient pas similaires et que, par conséquent, il n’existait pas de risque de confusion entre elles.

52      Dans ces circonstances, le moyen unique de la requérante doit être rejeté et, partant, le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

53      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Herhof-Verwaltungsgesellschaft mbH est condamnée aux dépens.

Czúcz

Labucka

O’Higgins

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 7 juillet 2010.

Signatures


* Langue de procédure : l’allemand.