Language of document : ECLI:EU:T:2011:257

ARRÊT DU TRIBUNAL (chambre des pourvois)

8 juin 2011 (*)

« Pourvoi – Fonction publique – Fonctionnaires – Pension d’invalidité – Recours déclaré partiellement fondé en première instance pour défaut de motivation de la décision attaquée – Article 78 du statut – Mise à la retraite pour cause d’invalidité – Commission d’invalidité »

Dans l’affaire T‑20/09 P,

ayant pour objet un pourvoi formé contre l’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (première chambre) du 4 novembre 2008, Marcuccio/Commission (F‑41/06, non encore publié au Recueil), et tendant à l’annulation de cet arrêt,

Commission européenne, représentée par M. J. Currall et Mme C. Berardis-Kayser, en qualité d’agents, assistés de Me A. Dal Ferro, avocat,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant

Luigi Marcuccio, demeurant à Tricase (Italie), représenté par Me G. Cipressa, avocat,

partie demanderesse en première instance,

LE TRIBUNAL (chambre des pourvois),

composé de MM. M. Jaeger, président, N. J. Forwood et A. Dittrich (rapporteur), juges,

greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,

rend le présent

Arrêt

1        Par son pourvoi introduit au titre de l’article 9 de l’annexe I du statut de la Cour de justice, la Commission des Communautés européennes demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (première chambre) du 4 novembre 2008, Marcuccio/Commission (F‑41/06, non encore publié au Recueil, ci-après l’« arrêt attaqué »), par lequel celui-ci a annulé la décision de la Commission du 30 mai 2005 de mettre M. Marcuccio à la retraite pour cause d’invalidité et de lui accorder le bénéfice d’une allocation d’invalidité (ci-après la « décision du 30 mai 2005 »).

 Cadre juridique

2        Selon l’article 53 du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le « statut »), le fonctionnaire reconnu par la commission d’invalidité comme remplissant les conditions prévues à l’article 78 du statut est mis d’office à la retraite le dernier jour du mois au cours duquel est prise la décision de l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») constatant l’incapacité définitive pour le fonctionnaire d’exercer ses fonctions.

3        L’article 59, paragraphe 1, quatrième alinéa, du statut prévoit :

« L’[AIPN] peut saisir la commission d’invalidité du cas du fonctionnaire dont les congés cumulés de maladie excèdent douze mois pendant une période de trois ans. »

4        L’article 73, paragraphe 1, premier alinéa, première phrase, du statut prévoit que, dans les conditions fixées par une réglementation établie d’un commun accord des institutions des Communautés, après avis du comité du statut, le fonctionnaire est couvert, dès le jour de son entrée en service, contre les risques de maladie professionnelle et les risques d’accident. L’article 73, paragraphe 2, sous b) et c), du statut, définit les prestations garanties en cas d’invalidité permanente totale et partielle.

5        L’article 78 du statut dispose :

« Dans les conditions prévues aux articles 13 à 16 de l’annexe VIII [du statut], le fonctionnaire a droit à une pension d’invalidité lorsqu’il est atteint d’une invalidité permanente considérée comme totale et le mettant dans l’impossibilité d’exercer des fonctions correspondant à un emploi de sa carrière.

Lorsque l’invalidité résulte d’un accident survenu dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice des fonctions, d’une maladie professionnelle ou d’un acte de dévouement accompli dans un intérêt public ou du fait d’avoir exposé ses jours pour sauver une vie humaine, le taux de la pension d’invalidité est fixé à 70 % du traitement de base du fonctionnaire.

Lorsque l’invalidité est due à une autre cause, le taux de la pension d’invalidité est égal au taux de la pension d’ancienneté à laquelle le fonctionnaire aurait eu droit à 65 ans s’il était resté en service jusqu’à cet âge.

[…] ».

 Faits à l’origine du litige

6        Les faits qui sont à l’origine du litige sont énoncés dans l’arrêt attaqué dans les termes suivants :

« 7      Le requérant, fonctionnaire de grade A 7 à la direction générale (DG) ‘Développement’ de la Commission, a été affecté à Luanda au sein de la délégation de la Commission en Angola en tant que fonctionnaire stagiaire à compter du 16 juin 2000, puis comme fonctionnaire titulaire à compter du 16 mars 2001.

8      Suite à un contact, le 29 octobre 2001, alors qu’il ouvrait des courriers parvenus à la délégation par valise diplomatique et provenant du siège de la Commission à Bruxelles, avec une poudre blanche contenant, selon lui, des traces du bacille de l’anthrax, le requérant a, le 3 décembre 2002, saisi […] l’AIPN […] d’une demande en vue d’obtenir la reconnaissance de cet accident au titre de l’article 73 du statut. Un recours introduit contre le rejet implicite de cette demande a été rejeté par arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 5 juillet 2005, Marcuccio/Commission (T‑9/04, RecFP p. I‑A‑195 et II‑881).

9      À compter du 4 janvier 2002, le requérant s’est trouvé en congé de maladie à son domicile à Tricase (Italie).

10      Par décision du 18 mars 2002, l’AIPN a réaffecté le requérant au siège de la DG ‘Développement’ à Bruxelles.

11      Suite aux absences prolongées du requérant pour maladie, la Commission a, par décision du 14 février 2003, notifiée à celui-ci par note du 20 février suivant, saisi la commission d’invalidité du cas de l’intéressé, ce en application de l’article 59, paragraphe 1, du statut (ci-après la ‘décision du 14 février 2003’).

12      Par note du 27 mars 2003, parvenue à la Commission le 15 avril 2003, le requérant a désigné le docteur U. pour le représenter au sein de la commission d’invalidité.

13      Par note du 26 mai 2003, reçue par le requérant le 30 mai suivant, celui-ci a été informé de la désignation du docteur M. chargé de représenter la Commission au sein de la commission d’invalidité.

14      Le 14 juillet 2003, le requérant a informé l’AIPN, par l’intermédiaire du directeur général de la DG ‘Développement’ de la Commission, de sa nouvelle adresse, Lungomare Cristoforo Colombo, n° 10 – 73030 Tricase […], demandant toutefois que tout acte de la Commission continue à lui être envoyé à son ancienne adresse, via Palestrina, n° 4 – 73039 Tricase […].

15      Par note du 14 octobre 2003, que le requérant admet avoir reçue, la Commission l’a informé que le docteur M. avait pris contact avec le docteur U. pour s’accorder sur la nomination du troisième médecin et l’a invité à s’abstenir de toute activité susceptible de retarder ou d’empêcher la procédure de constitution de la commission d’invalidité. Elle l’a également informé que, en l’absence d’accord sur la désignation du troisième médecin, la Commission saisirait la Cour pour qu’un médecin soit commis d’office par le président de celle-ci.

16      Par note du service médical de la Commission (ci-après le ‘service médical’) du 6 février 2004, le requérant a été informé qu’il serait soumis à un examen médico-légal. À cette note était annexée la copie d’une autre note, portant également la date du 6 février 2004, dont l’original avait été adressé au docteur C., directeur de l’Azienda U.S.L. LE/2 de Maglie (dépendant du service sanitaire national pour la Région des Pouilles), et qui décrivait de manière détaillée l’examen médical auquel ce médecin était invité à procéder (ci-après la ‘note adressée au directeur de l’Azienda U.S.L. LE/2 de Maglie’).

17      Le docteur M. et le docteur U. n’étant pas parvenus à s’accorder pour désigner le troisième médecin de la commission d’invalidité, le président de la Cour a, le 14 juillet 2004, sur demande de la Commission, commis d’office le docteur Ba. en qualité de troisième membre de la commission d’invalidité.

18      Par lettre du 11 octobre 2004, le service médical a convoqué le requérant au cabinet du docteur Ba. à Rome (Italie) afin d’y être examiné par la commission d’invalidité le 4 novembre 2004. Cet examen n’a cependant pas eu lieu, le docteur U. ayant présenté sa démission par lettre du 26 octobre 2004 adressée à la Commission le 3 novembre suivant par télécopie. De plus, le requérant, qui prétend n’avoir reçu la convocation à cet examen médical que le 8 novembre 2004, était absent du lieu où aurait dû se tenir ledit examen.

19      Par note du 17 novembre 2004, la Commission a informé le requérant qu’il lui appartenait, du fait de la démission du docteur U., de désigner un autre médecin pour le représenter au sein de la commission d’invalidité (ci-après la ‘note du 17 novembre 2004’). Le requérant indique ne pas avoir reçu cette note.

20      Par une note du 4 janvier 2005, le requérant a été convoqué une nouvelle fois pour un examen médical devant se tenir le 20 janvier 2005 au service médical à Bruxelles. Toutefois, par une note du 13 janvier 2005, envoyée à la Commission le 17 janvier 2005 et parvenue à celle-ci le 21 janvier suivant, le requérant a informé le service médical qu’il ne pourrait, pour des raisons médicales, se rendre à cet examen. À cette note était annexé un certificat médical du 13 janvier 2005 indiquant que l’intéressé était dans l’impossibilité de se déplacer pendant une période estimée à 10 jours.

21      Le 25 février 2005, le docteur Bi., du service médical, a rendu visite au requérant à son domicile de Tricase […], sans toutefois effectuer un examen médical de l’intéressé.

22      Le docteur M., médecin désigné par la Commission, ayant été, pour des raisons médicales, empêché de poursuivre son mandat, la Commission a nommé, le 7 mars 2005, le docteur Bi. pour le remplacer.

23      Par lettre du 15 avril 2005, que le requérant indique avoir reçue le 23 mai suivant, la Commission l’a informé que la Cour avait commis d’office le professeur S. afin de le représenter en qualité de deuxième médecin ‘pour une nouvelle commission d’invalidité’.

24      Selon la Commission, les deux médecins ainsi désignés, soit le docteur Bi. et le professeur S., se seraient accordés, le 27 avril 2005, sur la désignation du docteur Ma. comme troisième médecin de la commission d’invalidité.

25      Par lettre recommandée du 3 mai 2005, dont un exemplaire a été envoyé à chacune des deux adresses indiquées par le requérant dans sa lettre du 14 juillet 2003, à savoir, d’une part, via Palestrina, n° 4 – 73039 Tricase […], et d’autre part, Lungomare Cristoforo Colombo, n° 10 – 73030 Tricase […], la commission d’invalidité a invité, une nouvelle fois, le requérant à se soumettre à un examen médical devant avoir lieu, le 27 mai 2005, au cabinet du professeur S. à Lecce (Italie). Selon la Commission, l’exemplaire de la lettre du 3 mai 2005 envoyé à la première adresse aurait été remis au requérant le 8 juin 2005, tandis que l’exemplaire envoyé à la seconde adresse n’aurait pu être délivré et aurait été retourné à l’expéditeur. Toutefois, toujours selon la Commission, l’intéressé aurait, dès le 11 mai 2005, été informé de ce que l’exemplaire envoyé à cette seconde adresse aurait été déposé au bureau de poste de Tricase.

26      Par une note du 6 mai 2005, le requérant a informé la Commission de sa nouvelle adresse de résidence, sise via delle Conce civico 5 bis – 73039 Tricase […]. Il précisait toutefois que la Commission, si elle l’estimait opportun, pouvait continuer à lui envoyer ses courriers à l’adresse via Palestrina n° 4 – 73039 Tricase […], à moins que ces courriers ne soient urgents, auquel cas ils devraient lui être envoyés à sa nouvelle adresse.

27      Par une note du 23 mai 2005, le requérant a contesté, notamment, la nomination du professeur S. pour le représenter (ci-après la ‘note du 23 mai 2005’).

28      Le requérant ne s’étant pas présenté à l’examen médical devant avoir lieu le 27 mai 2005 à Lecce […], la commission d’invalidité s’est rendue le jour même à Tricase […] dans le but de rencontrer l’intéressé à son domicile. Cette tentative n’ayant pas abouti, la commission d’invalidité a établi un procès-verbal dans lequel elle constatait son impossibilité d’examiner le requérant tout en émettant l’hypothèse que celui-ci serait atteint d’un syndrome anxio-dépressif (‘sindrome Anxio-Depressiva’) (ci-après le ‘procès-verbal du 27 mai 2005’). La commission d’invalidité a également procédé à l’appréciation de l’état de santé de l’intéressé en se fondant sur le dossier médical produit au cours de la procédure et a estimé, dans un avis daté du 27 mai 2005, que celui-ci devait être regardé comme atteint d’une invalidité permanente et totale (ci-après l’’avis de la commission d’invalidité’).

29      La première page de l’avis de la commission d’invalidité était libellée comme suit :

‘La commission d’invalidité composée des :

1°Dr [Bi.]          désignée par la [Commission]

2°Prof [S.]          désigné par la Cour […],

3°Dr [Ma.]          [désigné d’un commun accord par le docteur Bi. et                                      le professeur S.]

a, lors de sa réunion du 27 mai 2005, décidé, après examen [de la documentation] de M. Luigi M[arcuccio], né le 7 [juillet] 1965, fonctionnaire auprès de la Commission européenne, que celui-ci

est atteint/[…]

d’une invalidité permanente considérée comme totale et le mettant dans l’impossibilité d’exercer des fonctions correspondant à un emploi de sa carrière et que pour ce motif il est obligé :

- de suspendre son activité à la Commission,

[…]

La commission d’invalidité déclare que l’invalidité de M. Luigi Marcuccio

[…]/ne résulte pas

–        d’un accident survenu dans l’exercice de ses fonctions,

–        d’un acte de dévouement accompli dans un intérêt public ou

–        du fait d’avoir exposé ses jours pour sauver une vie humaine

[signatures des trois membres de la commission d’invalidité]’

30      La mention ‘de la documentation’ au vu de laquelle aurait été examiné l’état de santé du requérant a été rajoutée à la main sur le texte dactylographié de l’avis.

31      Par [la] décision du 30 mai 2005, notifiée au requérant par une note datée du même jour et à laquelle était annexé l’avis de la commission d’invalidité, l’AIPN a, en application de l’article 53 du statut, mis le requérant à la retraite à compter du 31 mai 2005 et lui a accordé le bénéfice d’une allocation d’invalidité fixée conformément à l’article 78, paragraphe 3, du statut […].

32      La décision du 30 mai 2005 était libellée ainsi :

‘Vu le statut […], en particulier son article 53 ;

vu la décision de la Commission du 28 avril 2004 relative à l’exercice des pouvoirs conférés par le [s]tatut à l’[AIPN] ;

vu la décision du 14 février 2005 de l’[AIPN], de soumettre à la commission d’invalidité le cas de M. Luigi M[arcuccio], fonctionnaire de grade A*8 auprès de la [d]irection générale [du d]éveloppement ;

vu les conclusions de la commission d’invalidité du 27 mai 2005 qui constatent que M. Luigi Marcuccio est atteint d’une invalidité permanente considérée comme totale et le mettant dans l’impossibilité d’exercer des fonctions correspondant à un emploi de son grade ;

[…]’.

33      Par lettre du 8 juin 2005, reçue par la commission d’invalidité le 21 juin suivant, le requérant s’est plaint de ne pas avoir reçu la convocation à l’examen médical prévu pour le 27 mai 2005.

34      Par note du 10 juin 2005, le service médical de la Commission a rejeté les griefs que le requérant avait formulés dans sa note du 23 mai 2005 (ci-après la ‘note du 10 juin 2005’).

35      Le 2 août 2005, le requérant a présenté une réclamation visant, d’une part, à l’annulation de la décision du 30 mai 2005 ainsi que des actes de désignation des membres de la commission d’invalidité, et, d’autre part, à obtenir le remboursement du préjudice prétendument subi. Dans sa réclamation, le requérant critique, entre autres, le défaut de motivation dont serait entachée la décision du 30 mai 2005. Le 20 août 2005, le requérant a présenté un complément à cette réclamation.

36      Par note du 18 novembre 2005, le requérant a demandé que lui soit fournie une motivation plus concrète concernant l’avis de la commission d’invalidité.

37      Par décision du 16 décembre 2005, communiquée au requérant dans sa version en langue française au moyen d’une note datée du même jour, l’AIPN a rejeté l’ensemble de la réclamation du 2 août 2005. Une décision de rejet du complément à la réclamation a également été prise le 22 décembre 2005.

38      Par arrêt du 24 novembre 2005, Marcuccio/Commission (T‑236/02, RecFP p. I‑A‑365 et II‑1621), le Tribunal de première instance a rejeté le recours visant à l’annulation de la décision de réaffectation du 18 mars 2002. Sur pourvoi du requérant, la Cour, par arrêt du 6 décembre 2007, Marcuccio/Commission (C‑59/06 P, Rec. p. I‑182*), a annulé l’arrêt du Tribunal de première instance du 24 novembre 2005, Marcuccio/Commission, précité, et a renvoyé l’affaire devant celui-ci.

39      À la demande du requérant, une version en langue italienne de la décision du 16 décembre 2005 rejetant la réclamation lui a été communiquée par une note du 19 janvier 2006. »

 Procédure et conclusions des parties devant le Tribunal de la fonction publique

7        Par requête déposée au greffe du Tribunal de la fonction publique le 12 avril 2006, le requérant a introduit un recours, qui a été enregistré sous le numéro d’affaire F‑41/06.

8        Les conclusions de M. Marcuccio en première instance sont énoncés au point 42 de l’arrêt attaqué dans les termes suivants :

«       –       annuler chacun des actes qui lui ont été communiqués ensemble le 6 juillet 2005, à savoir :

–        la décision du 30 mai 2005 ;

–        pour autant que nécessaire, la note datée du 30 mai 2005 ;

–        le ‘prétendu’ avis de la commission d’invalidité sans numéro de référence ni date ni lieu de signature ;

–        annuler, dans la mesure nécessaire, la décision du 16 décembre 2005 portant rejet de sa réclamation introduite contre les actes dont l’annulation est demandée par le présent recours, qui lui a été communiquée le 20 janvier 2006 (ci-après la ‘décision de rejet de la réclamation’), accompagnée d’une note de transmission datée du 16 décembre 2005 portant le même numéro de référence que le rejet de la réclamation ;

–        annuler, dans la mesure nécessaire, la note de transmission du 16 décembre 2005 ;

–        annuler, dans la mesure nécessaire, la note du 19 janvier 2006 et son annexe, à savoir, selon le signataire de ladite note, la ‘traduction en langue italienne du rejet de la réclamation’, reçues par lui le 31 janvier 2006 ;

–        annuler, dans la mesure nécessaire, la décision du 22 décembre 2005 reçue par lui le 20 janvier 2006 par laquelle il a été informé qu’aucune suite ne serait réservée au complément à sa réclamation, envoyé par lui à l’AIPN (ci-après ‘la décision de rejet du complément à la réclamation’) ;

–        annuler la note du 6 février 2004 ainsi que, si nécessaire, la note datée du 6 février 2004, ces deux notes lui étant parvenues, la première en copie simple et la seconde en original, le 17 février 2004 ;

–        annuler le ‘procès-verbal du 27 mai 2005’ (ainsi désigné au troisième paragraphe de la page 7 de la traduction de la décision de rejet de la réclamation) dont on ne connaît ni les éléments constitutifs, ni les signatures, ni le contenu effectif ou prétendu par la partie défenderesse exception faite des affirmations de la Commission à son sujet que l’on peut lire dans ladite traduction ;

–        annuler tout autre acte provenant de la Commission et antérieur, subséquent ou connexe à ceux mentionnés ;

–        condamner la Commission au paiement en sa faveur, à titre de réparation du dommage matériel, du dommage moral et du dommage substantiel subis par lui en raison de l’émission, de la mise en œuvre, de l’exécution et de l’entrée en vigueur de la décision du 30 mai 2005, de la note adressée au directeur de l’Azienda U.S.L. LE/2 de Maglie et enfin de la décision de rejet de la réclamation, ainsi qu’en raison des actes illégaux ayant abouti à la décision du 30 mai 2005, des sommes suivantes, sous réserve d’augmentation dans l’attente de l’aboutissement du recours :

–        a) 150 000 (cent cinquante mille) euros, et en outre ;

–        b) de la somme correspondant à la différence entre les revenus mensuels qui lui ont été accordés à la suite de l’exécution de la décision du 30 mai 2005 et ceux qu’il aurait perçus en l’absence de cette décision et si, par ailleurs, la décision qui fait l’objet de l’arrêt du Tribunal de première instance du 24 novembre 2005, Marcuccio/Commission, arrêt faisant l’objet d’un pourvoi, portant la référence C‑59/06 P, devant la Cour, n’avait pas été prise ;

–        condamner la Commission au paiement en sa faveur de la somme que le Tribunal estimera juste et équitable, à titre de réparation du dommage moral et du dommage substantiel qu’il a subis en raison des comportements positifs, même autres que les décisions dont l’annulation est demandée par le présent recours, ainsi que des omissions de la partie défenderesse dans le cadre de la procédure de quo, qui ne peuvent être distingués des actes dont l’annulation est demandée par le présent recours, y compris les affirmations portant atteinte à son honneur et à sa dignité contenues dans les actes de la procédure de quo ;

–        condamner la Commission au paiement en sa faveur des intérêts légaux calculés sur les différences entre les revenus mensuels, à raison de 10 % l’an avec capitalisation annuelle, à partir des dates (dies a quo) auxquelles chacune des différences entre les revenus mensuels aurait dû être payée au requérant, jusqu’à la date (dies ad quem) du paiement effectif ;

–        condamner la Commission au paiement en sa faveur des intérêts légaux, à raison de 10 % l’an avec capitalisation annuelle, à partir de la date (dies a quo) à laquelle la réclamation est parvenue à la partie défenderesse et jusqu’à la date (dies ad quem) du paiement effectif, sur la somme susmentionnée de 150 000 euros ;

–        condamner la Commission au remboursement en sa faveur de tous les dépens de la procédure. »

9        La Commission a conclu, en première instance, à ce que le Tribunal de la fonction publique rejette le recours au motif qu’il est dénué de fondement et partiellement irrecevable et statue sur les dépens comme de droit.

10      Selon le point 44 de l’arrêt attaqué, M. Marcuccio a, à titre de mesures d’instruction, demandé, en première instance, « d’une part, à obtenir le texte de la ‘décision de la Commission du 28 avril 2004 relative à l’exercice des pouvoirs conférés par le [s]tatut à l’[AIPN]’, d’autre part, que soit ordonnée une expertise grammaticale de la note du 17 novembre 2004 afin de vérifier son contenu exact », ainsi qu’« à être admis à prouver par le recours à des témoins les circonstances de fait concernant la visite du docteur Bi., le 25 février 2005, à son domicile ».

 Sur l’arrêt attaqué

11      Par l’arrêt attaqué, le Tribunal de la fonction publique a déclaré irrecevables tous les chefs de conclusions de M. Marcuccio tendant à l’annulation, à l’exception de celui concernant la décision de la Commission du 30 mai 2005, pour les motifs suivants :

« 53      Il convient de rappeler, à titre liminaire, que, selon une jurisprudence constante, constituent des actes ou décisions susceptibles de faire l’objet d’un recours en annulation les seules mesures produisant des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts du requérant, en modifiant, de façon caractérisée, la situation juridique de celui-ci (arrêt de la Cour du 11 novembre 1981, IBM/Commission, 60/81, Rec. p. 2639, point 9 ; arrêts du Tribunal de première instance du 15 juin 1994, Pérez Jiménez/Commission, T‑6/93, RecFP p. I‑A‑155 et II‑497, point 34, et du 22 mars 1995, Kotzonis/CES, T‑586/93, Rec. p. II‑665, point 28). Lorsqu’il s’agit d’actes ou de décisions dont l’élaboration s’effectue en plusieurs phases, notamment au terme d’une procédure interne, il résulte de cette même jurisprudence qu’en principe ne constituent un acte attaquable que les mesures qui fixent définitivement la position de l’institution au terme de cette procédure, à l’exclusion des mesures intermédiaires dont l’objectif est de préparer la décision finale. De plus, en matière de recours de fonctionnaires, les actes préparatoires d’une décision ne font pas grief au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut et ne peuvent être contestés que de façon incidente lors d’un recours contre les actes annulables (arrêts Pérez Jiménez/Commission, précité, points 34 et 35, ainsi que Kotzonis/CES, précité, point 29).

54      En l’espèce, si la décision du 30 mai 2005 constitue un acte faisant grief au sens de l’article 91, paragraphe 1, du statut, tel n’est pas le cas de la note du 6 février 2004, de la note adressée au directeur de l’Azienda U.S.L. LE/2 de Maglie, du procès-verbal du 27 mai 2005 ainsi que de l’avis de la commission d’invalidité, ceux-ci n’étant que des actes préparatoires à la décision du 30 mai 2005. De même, les notes des 30 mai 2005, 16 décembre 2005 et 19 janvier 2006, par lesquelles l’AIPN a communiqué au requérant la décision du 30 mai 2005 ainsi que les versions en langues française et italienne de la décision de rejet de la réclamation, ne constituent pas davantage des actes faisant grief.

55      Enfin, il importe de souligner que la demande tendant à l’annulation de ‘tout autre acte provenant de la [partie défenderesse] et antérieur, subséquent ou connexe à ceux mentionnés’ est dépourvue de toute précision permettant d’identifier l’acte ou les actes en question. »

12      Au point 57 de l’arrêt attaqué, le Tribunal de la fonction publique a résumé les cinq moyens en annulation soulevés par M. Marcuccio, qui étaient tirés :

«–       du ‘[d]éfaut absolu de motivation, en raison notamment du manque de logique, de la redondance, des contradictions et des incohérences’ ;

–        de la ‘[v]iolation des droits de la défense et de l’article 9 de l’annexe II [d]u [s]tatut’ ;

–        de l’existence de ‘[v]ices de procédure, [d’une] violation du droit applicable et [d’une] violation des formes substantielles’ ;

–        de la ‘[v]iolation du devoir de sollicitude et du devoir de bonne administration’ ;

–        du ‘[d]étournement de pouvoir et de la violation du principe ‘neminem laedere’ ».

13      Ensuite, le Tribunal de la fonction publique a examiné le premier moyen et annulé la décision du 30 mai 2005, pour les motifs suivants :

« 61      Il convient, tout d’abord, de rappeler que l’exigence posée par l’article 253 CE, également présente à l’article 25, deuxième alinéa, du statut, a pour but de permettre au juge communautaire d’exercer son contrôle sur la légalité des décisions faisant grief et de fournir aux intéressés une indication suffisante pour savoir si ces décisions sont bien fondées ou si elles sont entachées d’un vice permettant d’en contester la légalité. Il en résulte que la motivation doit, en principe, être communiquée à l’intéressé en même temps que la décision lui faisant grief et que l’absence de motivation ne saurait être régularisée par le fait que l’intéressé apprend les motifs de la décision au cours de la procédure devant le juge communautaire (voir arrêts de la Cour du 26 novembre 1981, Michel/Parlement, 195/80, Rec. p. 2861, point 22, et du 28 février 2008, Neirinck/Commission, C‑17/07 P, non encore publié au Recueil, point 50).

62      En l’espèce, force est d’abord de constater que si la décision du 30 mai 2005 fait référence, dans ses trois premiers visas, aux dispositions juridiques pertinentes qui ont été appliquées et en particulier à l’article 53 du statut, elle ne comporte aucun élément de fait propre à la situation concrète du requérant.

63      Le quatrième et dernier visa de la décision du 30 mai 2005 se réfère néanmoins à l’avis de la commission d’invalidité. Il convient donc d’examiner si les conclusions de ladite commission figurant dans cet avis sont suffisamment motivées.

64      À cet égard, il résulte d’une jurisprudence constante que le but des dispositions relatives aux commissions médicale et d’invalidité est de confier à des experts médicaux l’appréciation définitive de toutes les questions d’ordre médical. Le contrôle juridictionnel ne saurait s’étendre aux appréciations médicales proprement dites, qui doivent être tenues pour définitives dès lors qu’elles sont intervenues dans des conditions régulières. En revanche, le contrôle juridictionnel peut s’exercer sur la régularité de la constitution et du fonctionnement de ces commissions, ainsi que sur celle des avis qu’elles émettent. Sous cet aspect, le Tribunal est compétent pour examiner si l’avis contient une motivation permettant d’apprécier les considérations sur lesquelles les conclusions qu’il contient sont basées et s’il a établi un lien compréhensible entre les constatations médicales qu’il comporte et les conclusions auxquelles arrive la commission (arrêt de la Cour du 10 décembre 1987, Jänsch/Commission, 277/84, Rec. p. 4923, point 15 ; arrêts du Tribunal de première instance du 27 février 1992, Plug/Commission, T‑165/89, Rec. p. II‑367, point 75, et du 15 décembre 1999, Nardone/Commission, T‑27/98, RecFP p. I‑A‑267 et II‑1293, point 87).

65      En l’espèce, il y a lieu de relever que l’avis de la commission d’invalidité est, de manière manifeste, dépourvu de toute motivation dans la mesure où il se limite purement et simplement à constater et, dans le même temps, à conclure que le requérant est atteint d’une invalidité considérée comme totale et le mettant dans l’impossibilité d’exercer ses fonctions. Par conséquent, il n’est pas possible, à la seule lecture de cet avis, de vérifier l’existence d’un lien compréhensible entre les constatations médicales faites par la commission d’invalidité et les conclusions auxquelles elle est parvenue.

66      Certes, selon une jurisprudence constante il peut être remédié à un éventuel défaut de motivation par une motivation adéquate fournie au stade de la réponse à la réclamation, cette dernière motivation étant censée coïncider avec la motivation de la décision contre laquelle la réclamation a été dirigée (arrêt du Tribunal de première instance du 18 septembre 2003, Lebedef e.a./Commission, T‑221/02, RecFP p. I‑A‑211 et II‑1037, point 62 ; arrêts du Tribunal du 7 novembre 2007, Hinderyckx/Conseil, F‑57/06, non encore publié au Recueil, point 25, et du 8 avril 2008, Bordini/Commission, F‑134/06, non encore publié au Recueil, point 63). Toutefois, dans le cas d’espèce, la décision de rejet de la réclamation ne fournit aucun élément permettant de comprendre les motifs pour lesquels, selon la commission d’invalidité, il convenait que le requérant fût mis à la retraite pour invalidité. En particulier, la seule référence faite dans cette décision à une expertise médicale que le docteur U. aurait réalisée le 25 janvier 2004, ne saurait être regardée, en l’absence de toute précision concernant le contenu de cette expertise, comme une motivation adéquate au sens de la jurisprudence précitée.

67      En tout état de cause, le procès-verbal du 27 mai 2005 qui mentionne que le requérant souffrirait d’un syndrome anxio-dépressif […] ne permet pas au Tribunal de connaître et de vérifier les considérations sur lesquelles les conclusions qu’il contient sont basées et s’il a établi un lien compréhensible entre les constatations médicales qu’il comporte et les conclusions auxquelles est parvenue la commission. En effet, un syndrome anxio-dépressif peut se manifester selon des manières et à des degrés très divers et n’implique pas que la personne qui en souffre soit nécessairement regardée comme atteinte d’une invalidité permanente et totale la mettant dans l’impossibilité d’exercer des fonctions correspondant à un emploi de son groupe de fonctions.

68      Quant à l’argument de la Commission tiré de ce que le requérant aurait eu connaissance du ‘contexte’ dans lequel est intervenue sa mise en invalidité et que, dès lors, une motivation spécifique ne serait pas nécessaire, il ne saurait être accueilli. En effet, la Commission n’apporte aucune précision sur la nature et l’étendue de cette prétendue connaissance et n’établit pas, en tout état de cause, qu’une telle connaissance aurait permis au requérant d’apprécier les considérations médicales ayant conduit la commission d’invalidité à constater son invalidité permanente et totale. Or, l’imprécision d’une telle connaissance ne saurait remplacer l’obligation de motivation de l’acte attaqué, ceci d’autant moins que l’acte en question est une décision mettant, contre son gré, un fonctionnaire à la retraite pour invalidité.

69      Enfin, il importe de souligner que par une note du 18 novembre 2005, le requérant a expressément demandé que lui soit fournie une motivation plus concrète de la décision du 30 mai 2005, demande à laquelle la Commission n’a pas répondu.

70      La décision du 30 mai 2005 étant entachée d’un défaut de motivation, le premier moyen doit donc être accueilli.

71      Dès lors, et sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur les autres griefs et moyens soulevés par le requérant à l’appui de ses conclusions en annulation, notamment ceux concernant la régularité de la composition de la commission d’invalidité, la décision du 30 mai 2005 doit être annulée. »

14      Ensuite, le Tribunal de la fonction publique a condamné la Commission à verser à M. Marcuccio la somme de 3 000 euros et a rejeté le recours pour le surplus, pour les motifs suivants :

« 75      Il est de jurisprudence constante que l’engagement de la responsabilité non contractuelle de la Communauté, notamment dans les litiges relevant des relations entre ladite Communauté et ses agents, suppose la réunion de trois conditions, à savoir l’illégalité du comportement reproché aux institutions communautaires, la réalité du dommage et l’existence d’un lien de causalité entre le comportement critiqué et le préjudice invoqué. Les trois conditions précitées d’engagement de la responsabilité de la Communauté sont cumulatives, ce qui implique que, dès lors que l’une de celles-ci n’est pas satisfaite, la responsabilité de la Communauté ne peut être engagée (voir, notamment, arrêt du Tribunal de première instance du 12 septembre 2007, Combescot/Commission, T‑249/04, non encore publié au Recueil, point 49, faisant l’objet d’un pourvoi pendant devant la Cour, affaire C-525/07 P ; arrêts du Tribunal du 2 mai 2007, Giraudy/Commission, F‑23/05, non encore publié au Recueil, point 88, et du 9 octobre 2007, Bellantone/Cour des comptes, F‑85/06, non encore publié au Recueil, point 87, et la jurisprudence citée).

76      C’est à la lumière de ces principes qu’il convient d’analyser les conclusions indemnitaires.

Sur les conclusions tendant à l’indemnisation du prétendu préjudice résultant de la décision du 30 mai 2005

77      En l’espèce, le requérant demande la condamnation de la Commission à lui payer, premièrement, une somme de 150 000 euros, deuxièmement, une somme égale à la différence entre les revenus qu’il perçoit depuis sa mise en invalidité et ceux dont il aurait bénéficié s’il n’avait pas fait l’objet d’une telle mesure.

78      S’agissant des conclusions tendant à la condamnation de la Commission à payer au requérant une somme égale à la différence entre les revenus qu’il perçoit depuis sa mise en invalidité et ceux dont il aurait bénéficié s’il n’avait pas fait l’objet d’une telle mesure, il y a lieu de rappeler que même dans l’hypothèse où une faute d’une institution est établie, la responsabilité de la Communauté ne peut être effectivement engagée qu’une fois établies la réalité et la consistance du préjudice (arrêt du Tribunal de première instance du 12 décembre 1996, Stott/Commission, T‑99/95, Rec. p. II‑2227, point 72).

79      Or, en l’état, le Tribunal n’est en mesure d’apprécier ni la réalité ni la consistance des chefs de préjudice allégués, dès lors que la Commission doit encore adopter les mesures d’exécution du présent arrêt d’annulation, conformément aux dispositions de l’article 233 CE (voir arrêt du Tribunal de première instance du 8 juin 2006, Pérez-Díaz/Commission, T‑156/03, RecFP p. II‑A‑2‑649, point 75).

80      Les conclusions indemnitaires doivent donc, dans cette mesure, être rejetées comme prématurées.

81      S’agissant des conclusions tendant à la condamnation de la Commission à payer au requérant la somme de 150 000 euros – conclusions qu’il convient d’interpréter comme poursuivant la réparation du préjudice moral qui aurait résulté de la décision du 30 mai 2005 –, il importe de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’annulation d’un acte attaqué peut constituer, en elle-même, une réparation adéquate et, en principe, c’est-à-dire en l’absence dans ledit acte de toute appréciation explicitement négative des capacités du requérant susceptible de le blesser, suffisante de tout préjudice moral que celui-ci peut avoir subi (arrêt du Tribunal de première instance du 8 juillet 2004, Schochaert/Conseil, T‑136/03, RecFP p. I‑A‑215 et II‑957, point 34).

82      En l’espèce, la décision du 30 mai 2005, dans la mesure où elle conclut à l’invalidité totale et permanente du requérant et à son incapacité d’effectuer les tâches de ses fonctions, comporte une appréciation négative de ses capacités. L’annulation de la décision du 30 mai 2005 ne saurait donc constituer, en elle-même, une réparation adéquate du préjudice moral subi par le requérant.

83      Toutefois, la décision du 30 mai 2005 n’ayant été annulée qu’en raison d’un défaut de motivation, la question reste ouverte de savoir si l’intéressé est ou non atteint d’une invalidité permanente considérée comme totale et le mettant dans l’impossibilité d’exercer des fonctions correspondant à un emploi de son groupe de fonctions. Le seul préjudice moral dont peut dès lors se prévaloir le requérant est celui résultant de la méconnaissance par la Commission de l’obligation de motivation à laquelle elle était tenue.

84      Par ailleurs, il convient de tenir compte du fait que le Tribunal, dans son ordonnance du 6 décembre 2007, Marcuccio/Commission (F‑40/06, non encore publiée au Recueil, point 50), ainsi que le Tribunal de première instance, dans son ordonnance du 17 mai 2006, Marcuccio/Commission (T‑241/03, RecFP p. II‑A‑2‑517, point 65), ont déjà constaté que le requérant s’est obstiné à faire preuve d’obstruction vis-à-vis de la Commission en refusant de coopérer avec elle. La présente affaire constitue la continuation de cette approche dans la mesure où le requérant a tenté de faire obstruction au mandat de la commission d’invalidité en refusant de coopérer avec celle-ci. C’est donc le requérant lui-même qui a contribué à la prolongation de cette situation d’incertitude dans laquelle la procédure d’invalidité et sa mise en invalidité l’ont placé.

85      Dans ces conditions, et eu égard aux circonstances particulières de l’espèce, il serait fait une juste réparation du préjudice moral subi par le requérant en condamnant la Commission à lui verser la seule somme de 3 000 euros, en ce compris tous intérêts échus au jour du présent arrêt.

Sur les conclusions tendant à l’indemnisation du prétendu préjudice résultant des actes ayant abouti à l’édiction de la décision du 30 mai 2005

86      Il convient de rappeler que, lorsque le recours tend à la réparation d’un préjudice prétendument causé par un comportement de l’administration dépourvu de caractère décisionnel, la procédure administrative doit débuter, conformément à l’article 90, paragraphe 1, du statut, par une demande de l’intéressé invitant l’AIPN à réparer ce préjudice. C’est seulement contre la décision de rejet de cette demande que l’intéressé peut saisir l’administration d’une réclamation, conformément au paragraphe 2 de cet article (arrêt du Tribunal de première instance du 10 juin 2004, Alvarez Moreno/Commission, T‑153/01 et T‑323/01, RecFP p. I‑A‑161 et II‑719, point 99).

87      En l’espèce, dès lors que le prétendu préjudice dont le requérant sollicite, par les conclusions susmentionnées, la réparation, trouve son origine dans les actes préparatoires à la décision du 30 mai 2005, lesquels doivent être regardés, ainsi qu’il a été rappelé au point 86 ci-dessus, comme des comportements de l’administration dépourvus de caractère décisionnel, la procédure administrative précédant l’introduction du recours aurait dû impérativement débuter par une demande de l’intéressé invitant l’AIPN à réparer ce préjudice et se poursuivre, le cas échéant, par une réclamation dirigée contre la décision de rejet de ladite demande. Tel n’ayant pas été le cas, les conclusions susmentionnées doivent être rejetées comme irrecevables.

Sur les conclusions tendant à l’indemnisation du prétendu préjudice résultant des actes d’exécution de la décision du 30 mai 2005 ainsi que des ‘comportements positifs, même autres que les décisions dont l’annulation est demandée par le présent recours’

88      Il importe de relever que les conclusions susmentionnées ne sont assorties d’aucune précision permettant de déterminer avec certitude les actes et les comportements dénoncés par le requérant. Il en va en particulier ainsi de la référence à de prétendus ‘comportements positifs, même autres que les décisions dont l’annulation est demandée par le présent recours’. Dans ces conditions, ces conclusions, qui ne satisfont pas aux obligations découlant de l’article 21 du statut de la Cour, sont irrecevables.

89      Il résulte de tout ce qui précède que la Commission doit être condamnée à verser au requérant la somme de 3 000 euros. »

15      Enfin, le Tribunal de la fonction publique a rejeté l’ensemble des demandes tendant à ce que soient ordonnées des mesures d’instruction pour les motifs suivants :

« 90      Au titre des mesures d’instruction, le requérant sollicite d’abord que lui soit communiqué le texte de la ‘décision de la Commission du 28 avril 2004 relative à l’exercice des pouvoirs conférés par le [s]tatut à l’[AIPN]’. Toutefois, il convient de constater que la Commission a annexé à son mémoire en défense le texte de cette décision. Cette demande est donc devenue sans objet.

91      Le requérant demande également à être admis à prouver, par témoins, les circonstances de la visite, le 25 février 2005, du docteur Bi. à son domicile. Ces circonstances n’ayant pas d’effet sur la décision du Tribunal, il y a lieu de rejeter cette demande.

92      Enfin, est dénuée de tout fondement la demande du requérant visant à ce que soit ordonnée une expertise grammaticale de la note du 17 novembre 2004, afin, selon l’intéressé, ‘de vérifier que, selon cette note, il convien[drait] de lire, non pas que le [docteur U.] aurait présenté sa démission de ses fonctions de membre de la commission d’invalidité, mais au contraire, que le [docteur U.] aurait informé le service médical de la Commission que le requérant avait présenté sa propre démission’. En effet, le requérant n’étant pas membre de la commission d’invalidité, il ne pouvait, par voie de conséquence, en être démissionnaire. »

16      Pour ce qui est des dépens, le Tribunal de la fonction publique a arrêté que, le recours ayant été accueilli en partie, la Commission supporte, outre ses propres dépens, les deux tiers des dépens de M. Marcuccio et que ce dernier supporte le tiers de ses propres dépens (point 97 de l’arrêt attaqué).

 Sur le pourvoi

17      Par mémoire déposé au greffe du Tribunal le 16 janvier 2009, la Commission a formé le présent pourvoi.

18      Le 31 juillet 2009, M. Marcuccio a déposé son mémoire en réponse, dans lequel il a également formé un pourvoi incident contre l’arrêt attaqué.

19      La procédure écrite a été clôturée le 14 octobre 2009, sans que la Commission présente, au titre de l’article 143, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, une demande visant à compléter le pourvoi par un mémoire en réplique ou, au titre de l’article 143, paragraphe 2, du règlement de procédure, un mémoire en réplique, limité au pourvoi incident.

20      Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 27 novembre 2009, M. Marcuccio a formulé une demande au titre de l’article 146 du règlement de procédure, aux fins d’être entendu dans le cadre de la phase orale de la procédure.

21      Compte tenu de l’expiration du mandat du juge rapporteur auquel l’affaire avait été initialement attribuée, celle-ci a été réattribuée à un autre juge rapporteur le 5 mai 2010.

22      La composition de la chambre des pourvois ayant été modifiée, la présente affaire a été attribuée au présent juge rapporteur le 23 septembre 2010.

23      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (chambre des pourvois) a fait droit à la demande de M. Marcuccio au titre de l’article 146 du règlement de procédure et a ouvert la procédure orale.

24      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 19 janvier 2011.

25      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler l’arrêt attaqué ;

–        renvoyer l’affaire devant le Tribunal de la fonction publique.

26      M. Marcuccio conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le pourvoi principal comme étant irrecevable ou, à titre subsidiaire, comme étant non fondé ;

–        annuler l’arrêt attaqué pour autant qu’il limite le montant à lui verser à la somme de 3 000 euros et pour autant qu’il rejette le recours pour le surplus ;

–        annuler l’arrêt attaqué pour autant qu’il décide sur les dépens ;

–        annuler la phrase suivante figurant au point 8 de l’arrêt attaqué : « Un recours introduit contre le rejet implicite de cette demande a été rejeté par arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 5 juillet 2005, Marcuccio/Commission […]. » ;

–        annuler le point 13 de l’arrêt attaqué ;

–        annuler la phrase suivante figurant au point 17 de l’arrêt attaqué : « Le docteur M. et le docteur U. n’étant pas parvenus à s’accorder pour désigner le troisième médecin de la commission d’invalidité […]. » ;

–        annuler la phrase suivante figurant au point 19 de l’arrêt attaqué : « Par note du 17 novembre 2004, la Commission a informé le requérant qu’il lui appartenait, du fait de la démission du docteur U., de désigner un autre médecin pour le représenter au sein de la commission d’invalidité […]. » ;

–        annuler la phrase suivante figurant au point 66 de l’arrêt attaqué : « […] un éventuel défaut de motivation par une motivation adéquate fournie au stade de la réponse à la réclamation […]. » ;

–        annuler les points 79, 80 et 83 de l’arrêt attaqué ;

–        annuler la phrase suivante figurant au point 84 de l’arrêt attaqué : « […] le requérant a tenté de faire obstruction au mandat de la commission d’invalidité […]. » ;

–        annuler toute référence contenue dans l’arrêt attaqué, notamment à son point 84, relative à sa prétendue attitude d’obstruction vis-à-vis de la Commission ;

–        annuler le point 85 de l’arrêt attaqué dans la mesure où la somme de 3 000 euros est réputée l’indemniser complètement du préjudice subi ;

–        annuler les points 87, 88, 90, 92, 93 et 97 de l’arrêt attaqué ;

–        confirmer l’annulation de la décision de la Commission du 30 mai 2005 ;

–        constater l’inexistence ex lege de la note du 6 février 2004 ;

–        condamner la Commission au paiement en sa faveur, à titre de réparation du dommage matériel, du dommage moral et du dommage substantiel subis par lui en raison de l’émission, de la mise en œuvre, de l’exécution et de l’entrée en vigueur de la décision du 30 mai 2005, de la note adressée au directeur de l’Azienda U.S.L. LE/2 de Maglie (Italie) et enfin de la décision de rejet de la réclamation, ainsi qu’en raison des actes illégaux ayant abouti à la décision du 30 mai 2005, des sommes suivantes, sous réserve d’augmentation dans l’attente de l’aboutissement du pourvoi :

a) 147 000 euros, à savoir la différence entre 150 000 euros demandés dans les conclusions de première instance et 3 000 euros déjà versés par la Commission en exécution de l’arrêt attaqué, et en outre,

b) de la somme correspondant à la différence, à partir de la date de la décision de la Commission du 30 mai 2005 et jusqu’à l’arrêt attaqué, entre les revenus mensuels qui lui ont été accordés à la suite de l’exécution de cette décision et ceux qu’il aurait perçus en l’absence de cette décision et si, par ailleurs, la décision de la Commission dont l’annulation est demandée dans l’affaire T‑236/02 n’avait jamais été prise ;

–        condamner la Commission au paiement en sa faveur de la somme que le Tribunal estimera juste et équitable, à titre de réparation du dommage moral et du dommage substantiel qu’il a subis en raison des comportements positifs, même autres que les décisions dont l’annulation est demandée par le recours de première instance, ainsi que des omissions de la Commission dans le cadre de la procédure ayant abouti à la décision du 30 mai 2005, qui ne peuvent être distingués des actes dont l’annulation est demandée par le recours de première instance, y compris les affirmations portant atteinte à son honneur et à sa dignité contenues dans les actes de cette procédure ;

–        condamner la Commission au paiement en sa faveur des intérêts légaux calculés sur les différences entre les revenus mensuels, à raison de 10 % l’an avec capitalisation annuelle, à partir des dates (dies a quo) auxquelles chacune des différences entre les revenus mensuels aurait dû être payée au requérant, jusqu’à la date (dies ad quem) du paiement effectif ;

–        condamner la Commission au paiement en sa faveur des intérêts légaux, à raison de 10 % l’an avec capitalisation annuelle, à partir de la date (dies a quo) à laquelle la réclamation est parvenue à la Commission et jusqu’à la date (dies ad quem) du paiement effectif, sur la somme susmentionnée de 147 000 euros ;

–        condamner la Commission aux dépens, y compris ceux relatifs à la procédure qui s’est déroulée devant le Tribunal de la fonction publique ;

–        à titre subsidiaire aux conclusions de confirmation, constatation et condamnation susmentionnées, renvoyer l’affaire devant le Tribunal de la fonction publique.

 En droit

27      Le pourvoi principal, introduit par la Commission, tend à l’annulation de l’arrêt attaqué, tandis que le pourvoi incident, introduit par M. Marcuccio conformément à l’article 141, paragraphe 1, du règlement de procédure, tend à l’annulation partielle de cet arrêt.

 Sur le pourvoi principal

28      À l’appui du pourvoi principal, la Commission soulève un moyen unique, tiré d’une erreur de droit entachant l’appréciation du Tribunal de la fonction publique. Premièrement, ce Tribunal aurait considéré à tort que la décision du 30 mai 2005, lue à la lumière de l’avis de la commission d’invalidité, devait contenir une motivation permettant d’apprécier la régularité de l’avis que cette commission avait émis. Deuxièmement, à supposer même qu’une telle motivation soit exigée, le Tribunal de la fonction publique aurait commis une erreur de droit en considérant que la motivation de la décision du 30 mai 2005 n’était pas suffisante. Troisièmement, ledit Tribunal aurait considéré à tort que l’invalidité totale et permanente de M. Marcuccio et son incapacité à effectuer les tâches correspondant à ses fonctions comportait une appréciation négative de ses capacités.

29      M. Marcuccio conclut au rejet du pourvoi principal comme étant irrecevable et, en tout état de cause, non fondé.

 Sur la recevabilité du pourvoi principal

30      M. Marcuccio fait valoir que le pourvoi principal est irrecevable. La Commission lui aurait versé, le 21 novembre 2008, le montant de 3 000 euros en référence expresse à l’affaire tranchée en première instance sans se réserver de former le présent pourvoi. Cela faisant, elle aurait acquiescé à l’arrêt attaqué. Dès lors, elle aurait renoncé au droit d’appel et l’arrêt attaqué aurait force de chose jugée.

31      Indépendamment de l’examen de la question de savoir si la notion d’acquiescement est d’application dans le cadre du recours en annulation contre une décision adoptée par une institution communautaire, il convient de rappeler qu’il ressort de l’article 233 CE que l’institution dont émane l’acte annulé est tenue de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt.

32      En l’espèce, le Tribunal de la fonction publique a, en vertu du point 2 du dispositif de l’arrêt attaqué, condamné la Commission à verser à M. Marcuccio la somme de 3 000 euros. Conformément à l’article 244 CE, les arrêts du Tribunal de la fonction publique ont force exécutoire dans les conditions fixées à l’article 256 CE. Il s’ensuit que la Commission se trouvait dans l’obligation de verser à M. Marcuccio la somme de 3 000 euros.

33      Dès lors que, en vertu de l’article 12 de l’annexe I du statut de la Cour de justice, le pourvoi devant le Tribunal n’a pas d’effet suspensif, le simple fait que la Commission a versé à M. Marcuccio ladite somme en vue d’exécuter l’arrêt du Tribunal de la fonction publique n’impliquait pas qu’elle renonçait à former un pourvoi. En tout état de cause, la renonciation à l’exercice d’une voie de recours, dans la mesure où elle entraîne la perte d’un droit, ne saurait entraîner l’irrecevabilité d’un recours que dans l’hypothèse où la renonciation pourrait être constatée de manière claire et inconditionnelle (arrêt du Tribunal du 8 septembre 2009, ETF/Landgren, T‑404/06 P, Rec. p. II‑2841, point 80). Tel n’est manifestement pas le cas en l’espèce. L’ordre de versement du 21 novembre 2008, mentionnant seulement l’affaire tranchée en première instance aux fins de son identification, ne fait aucunement état d’une telle renonciation.

34      La présente fin de non-recevoir doit donc être rejetée.

 Sur l’étendue de l’obligation de motivation des décisions de mise à la retraite pour cause d’invalidité

–       Arguments des parties

35      La Commission fait valoir que l’étendue de l’obligation de motivation est fonction de la nature et du contexte de la décision en cause. En l’espèce, la seule exigence posée par les articles 53, 59 et 78 du statut serait l’existence d’une constatation d’invalidité effectuée par la commission d’invalidité. Cette commission aurait pour mission d’effectuer des constatations médicales qui seraient définitives, aussi longtemps qu’elles seraient acquises dans des conditions régulières et que le caractère contradictoire de ses débats et, plus généralement, la défense des intérêts du fonctionnaire seraient assurés par la présence dans cette commission d’un médecin désigné par lui, ou d’office, pour le représenter.

36      Selon la Commission, la seule motivation requise dans le cas d’une décision de mise en invalidité serait celle permettant de vérifier que les conditions précitées sont réunies, à savoir que la commission d’invalidité, dûment constituée, a constaté l’existence d’une invalidité considérée comme permanente et empêchant l’intéressé d’exercer ses fonctions. L’exigence d’un lien compréhensible entre les constatations médicales opérées par cette commission et ses conclusions ne serait présente que dans le contexte des procédures relevant de l’article 73 du statut.

37      Les allusions à une telle exigence figurant dans quelques arrêts rendus en matière d’invalidité s’expliqueraient par le fait que soit ils concernaient des situations où la question de l’éventuelle origine professionnelle de l’invalidité était posée, d’où un recoupement avec la question posée dans le cadre d’une procédure relevant de l’article 73 du statut, soit ils concernaient des situations particulières où une motivation supplémentaire était nécessaire.

38      En raison de ce recoupement, la jurisprudence aurait également reconnu le bien-fondé d’une méthode consistant, pour la commission d’invalidité, à constater immédiatement l’existence de l’invalidité, au titre de l’article 78 du statut, tout en suspendant son avis sur l’origine professionnelle de la maladie l’ayant engendrée à l’avis que la commission médicale devait encore rendre au titre de l’article 73 du statut.

39      Selon la Commission, il suffit que le juge de l’Union puisse exercer son contrôle juridictionnel sur la régularité de la procédure ayant mené à la conclusion de l’existence de l’invalidité. Il ne lui appartiendrait pas de contrôler le diagnostic quant au motif de cette invalidité, cette dernière étant une question exclusivement médicale. Ce ne serait que dans les procédures engagées au titre de l’article 73 du statut et dans les cas où l’origine professionnelle de l’invalidité est contestée qu’il serait nécessaire de motiver davantage la décision en cause en identifiant la maladie et son origine. L’exigence d’une telle motivation pour les procédures d’invalidité relevant de l’article 78 du statut risquerait d’alourdir inutilement ces procédures, qui ne prendraient normalement que peu de temps.

40      Tant la décision du 30 mai 2005 que l’avis de la commission d’invalidité sur lequel elle est fondée auraient été établis selon des modèles utilisés depuis bien longtemps et dont l’adéquation n’aurait pas été mise en doute par la jurisprudence.

41      Enfin, la Commission souligne que les procédures relevant, respectivement, des articles 73 et 78 du statut sont différentes.

42      M. Marcuccio conteste l’argumentation de la Commission.

–       Appréciation du Tribunal

43      La Commission fait, en substance, grief au Tribunal de la fonction publique d’avoir commis une erreur de droit en considérant, alors que s’appliquait l’article 78 du statut, que la décision du 30 mai 2005, lue à la lumière de l’avis de la commission d’invalidité, devait contenir une motivation permettant d’apprécier la régularité de l’avis que cette commission avait émis, à savoir une motivation permettant d’apprécier les considérations sur lesquelles étaient fondées les conclusions qu’il contenait et l’établissement d’un lien compréhensible entre les constatations médicales qu’il comportait et les conclusions auxquelles arrivait ladite commission.

44      En revanche, selon la Commission, il est suffisant que la motivation de la décision du 30 mai 2005, lue à la lumière de l’avis de la commission d’invalidité, fournisse à l’intéressé une indication relative à la régularité de la constitution de la commission d’invalidité et au constat de l’existence d’une invalidité considérée comme permanente et empêchant l’intéressé d’exercer ses fonctions.

45      Il y a lieu de relever que le Tribunal a déjà jugé, en cas d’application de l’article 78 du statut, que le juge de l’Union est compétent pour examiner la régularité de l’avis émis par la commission d’invalidité, à savoir si cet avis contient une motivation permettant d’apprécier les considérations sur lesquelles les conclusions qu’il contient sont fondées et s’il a établi un lien compréhensible entre les constatations médicales qu’il comporte et les conclusions auxquelles arrive la commission (arrêts du Tribunal du 27 février 1992, Plug/Commission, T‑165/89, Rec. p. II‑367, point 75 ; du 23 mars 1993, Gill/Commission, T‑43/89 RV, Rec. p. II‑303, point 36 ; du 21 mars 1996, Otten/Commission, T‑376/94, RecFP p. I‑A‑129 et II‑401, point 47 ; du 16 juin 2000, C/Conseil, T‑84/98, RecFP p. I‑A‑113 et II‑497, point 43, et du 23 novembre 2004, O/Commission, T‑376/02, RecFP p. I‑A‑349 et II‑1595, point 29).

46      Contrairement à la thèse défendue par la Commission, il ne résulte pas de cette jurisprudence que son application soit limitée à la question de l’éventuelle origine professionnelle de l’invalidité ou aux situations particulières.

47      En effet, s’agissant de la prétendue limitation de l’application de la jurisprudence citée au point 45 ci-dessus à la question de l’éventuelle origine professionnelle de l’invalidité, il convient d’admettre que, dans la plupart des arrêts cités à ce point, à savoir les arrêts Plug/Commission, points 75 à 83, Gill/Commission, points 36 à 40, et O/Commission, points 62 à 75, cette jurisprudence a effectivement été appliquée dans le contexte de l’examen de l’éventuelle origine professionnelle de l’invalidité.

48      Toutefois, dans l’arrêt Otten/Commission, point 45 supra (points 47 à 54), le Tribunal a mentionné la jurisprudence citée au point 45 ci-dessus sans pour autant examiner la régularité de l’avis de la commission d’invalidité, dès lors que la question qui se posait dans cette affaire était celle de savoir si cette commission était régulièrement composée. En outre, dans l’arrêt O/Commission, point 45 supra, la jurisprudence citée au point 45 ci-dessus a été mentionnée tout au début de l’appréciation du Tribunal, dans le cadre de laquelle ce dernier s’est également prononcé sur la régularité de la constitution de la commission d’invalidité et la régularité des travaux de cette commission (points 41 à 53 de cet arrêt).

49      Le fait que, dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du Tribunal du 14 mai 1998, Lucaccioni/Commission (T‑165/95, RecFP p. I‑A‑203 et II‑627), la Commission a pu accorder à l’intéressé une pension d’invalidité conformément à l’article 78, troisième alinéa, du statut, s’agissant d’une invalidité due à une autre cause que celles énoncées au deuxième alinéa de cet article, tandis que l’examen de l’origine professionnelle de l’invalidité, mené dans le cadre d’une procédure relevant de l’article 73 du statut, n’était pas encore terminé, ne saurait non plus soutenir l’argumentation de la Commission. En effet, cette affaire concernait un cas particulier, dès lors que l’origine professionnelle de l’invalidité ne jouait, pour ce qui était de la pension d’invalidité relevant de l’article 78 du statut, aucun rôle, parce que le taux de cette pension était identique, qu’il soit calculé sur la base d’une invalidité d’origine professionnelle relevant de l’article 78, deuxième alinéa, du statut ou sur la base d’une invalidité en raison d’une autre cause, relevant de l’article 78, troisième alinéa, du statut (arrêt Lucaccioni/Commission, précité, point 145).

50      S’agissant de la prétendue limitation de l’application de la jurisprudence citée au point 45 ci-dessus à des situations particulières, le Tribunal a appliqué cette jurisprudence, dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt C/Conseil, point 45 supra, dans le cadre d’un moyen tiré d’une violation des formes substantielles.

51      Contrairement à ce qu’allègue la Commission, le contrôle juridictionnel de la régularité de l’avis de la commission d’invalidité dans cette affaire n’était pas dû à une situation particulière. Si, dans cette affaire, la question de l’applicabilité de l’article 59, paragraphe 1, quatrième alinéa, du statut était certes ouverte, celle-ci ne concernait cependant que la régularité de la saisine de la commission d’invalidité, et non la régularité de l’avis de cette commission. Selon la Commission, la requérante, dans cette affaire, aurait, à plusieurs reprises, demandé à l’administration d’indiquer pourquoi elle la croyait invalide. À cet égard, il convient de constater que, avant l’adoption de la décision la déclarant atteinte d’une invalidité totale et permanente, l’intéressée n’avait pas envoyé de telles demandes. En revanche, elle avait constamment contesté la base légale de la saisine de la commission d’invalidité, à savoir l’article 59, paragraphe 1, quatrième alinéa, du statut (arrêt C/Conseil, point 45 supra, points 2 à 29). Pour ce qui est, enfin, de la production d’un rapport médical contredisant le diagnostic indiqué par la commission d’invalidité dans cette affaire, force est de constater que ce rapport n’a été produit que dans le cadre de la procédure de réclamation en vertu de l’article 90, paragraphe 2, du statut, donc après l’adoption de la décision déclarant la requérante atteinte d’une invalidité totale et permanente (arrêt C/Conseil, point 45 supra, point 33). En tout état de cause, dans le cadre de l’appréciation du moyen qui lui était soumis dans cette affaire, le Tribunal n’a aucunement indiqué que l’application de la jurisprudence pertinente était due à la situation particulière de l’espèce.

52      Il y a lieu d’ajouter qu’il n’existe aucune raison substantielle s’opposant à l’application de la jurisprudence citée au point 45 ci-dessus au cas d’espèce.

53      S’agissant de l’argument de la Commission selon lequel l’exigence d’une motivation identifiant la maladie et son origine pour les procédures d’invalidité engagées au titre de l’article 78 du statut risquerait d’alourdir inutilement ces procédures, qui ne prendraient normalement que peu de temps, il convient de relever que, compte tenu des effets permanents, sauf nouvelles circonstances, d’une mise à la retraite pour cause d’invalidité totale et permanente et des graves effets d’une telle mise à la retraite, celui-ci ne saurait prospérer.

54      En revanche, l’exercice du contrôle juridictionnel sur la régularité de la constitution et du fonctionnement de ces commissions ainsi que sur celle des avis qu’elles émettent est un corollaire de l’absence de contrôle juridictionnel sur les appréciations médicales proprement dites, qui doivent être tenues pour définitives dès lors qu’elles sont intervenues dans des conditions régulières (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 4 octobre 1991, Commission/Gill, C‑185/90 P, Rec. p. I‑4779, point 24, et arrêt C/Conseil, point 45 supra, point 43, et la jurisprudence citée). Le but des dispositions relatives aux commissions médicale et d’invalidité étant de confier à des experts médicaux l’appréciation définitive de toutes les questions d’ordre médical, la protection des droits des fonctionnaires concernés doit toutefois être assurée par l’exercice du contrôle juridictionnel tel qu’énoncé au point 45 ci-dessus.

55      En outre, il convient de relever que les conséquences d’une mise à la retraite pour motif d’invalidité sont graves pour la carrière d’un fonctionnaire (voir, en ce sens, arrêt C/Conseil, point 45 supra, point 67), d’autant plus si, comme en l’espèce, cette mise à la retraite est envisagée contre le gré du fonctionnaire concerné. Ces conséquences peuvent, à tout le moins, être aussi graves que celles résultant de l’application de l’article 73 du statut, pour lequel la Commission ne conteste pas que le contrôle juridictionnel porte également sur la régularité de l’avis émis par la commission médicale.

56      Enfin, il convient de relever que, contrairement à ce qu’allègue la Commission, la jurisprudence selon laquelle les intérêts du fonctionnaire, au sein de la commission d’invalidité, sont sauvegardés par la présence d’un médecin ayant sa confiance (arrêt de la Cour du 19 janvier 1988, Biedermann/Cour des comptes, 2/87, Rec. p. 143, point 10, et arrêt Otten/Commission, point 45 supra, point 47), ne saurait faire obstacle à l’exercice du contrôle juridictionnel sur la régularité de l’avis de la commission d’invalidité. En effet, cette jurisprudence concerne le fonctionnement régulier de la commission d’invalidité, qui peut également être contrôlé par le juge de l’Union, mais qui n’est pas en cause en l’espèce.

57      Au vu de tout ce qui précède, l’argumentation de la Commission doit être rejetée.

 Sur l’adéquation de la motivation de la décision du 30 mai 2005

–       Arguments des parties

58      La Commission souligne que, au vu du contexte de l’affaire, la motivation contenue dans sa réponse à la réclamation et dans le procès-verbal de la commission d’invalidité du 27 mai 2005 (ci-après le « procès-verbal ») était suffisante.

59      M. Marcuccio conteste l’argumentation de la Commission. Selon lui, l’allégation de la Commission selon laquelle le point 28 de l’arrêt attaqué ne reprend pas la totalité des faits ni la totalité du procès-verbal de la commission d’invalidité est inopérante, car le pourvoi porterait seulement sur des moyens de droit. En outre, il aurait contesté les affirmations relatives à son prétendu comportement et la mention de ce comportement dans le procès-verbal n’aurait, en tout état de cause, aucune valeur ni aucune importance.

60      Selon lui, il n’est pas constaté dans le procès-verbal qu’il soit atteint d’une invalidité. Celui-ci contiendrait seulement une « hypothèse diagnostique », de sorte que la décision du 30 mai 2005 ne serait, en aucun cas, motivée. Par ailleurs, puisque la commission d’invalidité ne se serait jamais constituée ex lege, la décision du 30 mai 2005 ne serait pas non plus motivée de ce fait.

–       Appréciation du Tribunal

61      La Commission fait, en substance, grief au Tribunal de la fonction publique d’avoir commis une erreur de droit en considérant, au point 66 de l’arrêt attaqué, que, aux fins de remédier à un éventuel défaut de motivation de la décision du 30 mai 2005, la réponse à la réclamation n’avait pas fourni d’explication utile et la référence à l’expertise du docteur U. était insuffisante à cet égard. Par ailleurs, les considérations figurant au point 67 de l’arrêt attaqué concernant le procès-verbal seraient entachées d’une erreur de droit et, contrairement aux considérations mentionnées au point 68 de l’arrêt attaqué, le contexte de l’affaire aurait été connu de M. Marcuccio.

62      À cet égard, il convient de rappeler que la question de la portée de l’obligation de motivation constitue une question de droit qui est soumise au contrôle du Tribunal dans le cadre d’un pourvoi. En effet, le contrôle de la légalité d’une décision qui est exercé dans ce cadre par le Tribunal doit nécessairement prendre en considération les faits sur lesquels le Tribunal de la fonction publique s’est fondé pour aboutir à sa conclusion selon laquelle la motivation était suffisante ou insuffisante (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 20 novembre 1997, Commission/V, C‑188/96 P, Rec. p. I‑6561, point 24).

63      En l’espèce, la Commission ne conteste pas la constatation du Tribunal de la fonction publique, figurant aux points 62 et 65 de l’arrêt attaqué, selon laquelle la décision du 30 mai 2005 ne comportait aucun élément de fait propre à la situation concrète de M. Marcuccio et selon laquelle l’avis en cause était dépourvu de toute motivation. Cependant, selon la Commission, le Tribunal de la fonction publique a commis une erreur de droit en considérant que ce défaut de motivation n’avait pas été corrigé au stade de la réponse à la réclamation, au vu du contexte de l’affaire.

64      Le point 66 de l’arrêt attaqué indique que la décision de rejet de la réclamation ne fournit aucun élément permettant de comprendre les motifs pour lesquels, selon la commission d’invalidité, il convenait que M. Marcuccio fût mis à la retraite pour invalidité et que, en particulier, la seule référence faite, dans cette décision, à une expertise médicale que le docteur U. aurait réalisée le 25 janvier 2004 ne saurait être regardée, en l’absence de toute précision concernant le contenu de cette expertise, comme une motivation adéquate. En outre, il ressort du point 68 de l’arrêt attaqué que le Tribunal de la fonction publique a considéré que le contexte dans lequel était intervenue la mise en invalidité de M. Marcuccio n’était pas connu de ce dernier.

65      À cet égard, il importe de relever, premièrement, à l’instar du Tribunal de la fonction publique (point 66 de l’arrêt attaqué), qu’il peut être remédié à un éventuel défaut de motivation par une motivation adéquate fournie au stade de la réponse à la réclamation, cette dernière motivation étant censée coïncider avec la motivation de la décision contre laquelle la réclamation a été dirigée (arrêt du Tribunal du 18 septembre 2003, Lebedef e.a./Commission, T‑221/02, RecFP p. I‑A‑211 et II‑1037, point 62).

66      Deuxièmement, il convient de rappeler que le juge de première instance est seul compétent, d’une part, pour constater les faits, sauf dans le cas où l’inexactitude matérielle de ses constatations résulterait des pièces du dossier qui lui ont été soumises, et, d’autre part, pour apprécier ces derniers. Seule la dénaturation des éléments de preuve produits devant ce juge constitue donc une question de droit soumise, comme telle, au contrôle du Tribunal (voir point 81 ci-après).

67      En l’espèce, force est de relever que les constatations du Tribunal de la fonction publique étaient inexactes, dans la mesure où il a considéré, au point 68 de l’arrêt attaqué, que le contexte dans lequel était intervenue la mise en invalidité de M. Marcuccio n’était pas connu de ce dernier. En effet, il ressort du dossier de première instance que l’expertise médicale du docteur U., réalisée le 25 janvier 2004, à laquelle la décision de rejet de la réclamation a fait expressément référence afin de permettre de comprendre les motifs pour lesquels, selon la commission d’invalidité, il convenait que M. Marcuccio fût mis à la retraite pour invalidité, était connue de ce dernier, qui l’avait transmise lui-même, le 14 février 2004, à la commission d’invalidité.

68      À cet égard, il convient de rappeler qu’il résulte d’une jurisprudence bien établie qu’un acte faisant grief est suffisamment motivé dès lors qu’il est intervenu dans un contexte connu de l’intéressé, qui lui permet de comprendre la portée de la mesure prise à son égard (voir arrêt du Tribunal du 14 octobre 2009, Bank Melli Iran/Conseil, T‑390/08, Rec. p. II‑3967, point 82, et la jurisprudence citée). Dès lors que tel est le cas en l’espèce, du fait que M. Marcuccio avait connaissance de ladite expertise médicale, le Tribunal de la fonction publique a commis une erreur de droit en considérant, aux points 66 et 68 de l’arrêt attaqué, que, au stade de la réponse à la réclamation, la Commission n’avait pas fourni une motivation adéquate.

69      Sans qu’il y ait besoin pour le Tribunal de se prononcer sur la question de savoir si les considérations du Tribunal de la fonction publique, figurant au point 67 de l’arrêt attaqué, relatives au procès-verbal sont entachées d’une erreur de droit, l’argumentation de la Commission doit donc être accueillie.

 Sur l’indemnité pour préjudice moral

–       Arguments des parties

70      La Commission fait valoir que le Tribunal de la fonction publique a commis une erreur de droit en considérant, au point 82 de l’arrêt attaqué, que toute décision reconnaissant une invalidité comportait une appréciation négative des qualités du fonctionnaire qui devait, dès lors, faire l’objet d’un dédommagement, en plus de l’annulation de la décision relative à ladite invalidité.

71      M. Marcuccio conteste l’argumentation de la Commission.

–       Appréciation du Tribunal

72      Le Tribunal de la fonction publique a considéré, au point 82 de l’arrêt attaqué, que la décision du 30 mai 2005, dans la mesure où elle concluait à l’invalidité totale et permanente de M. Marcuccio et à son incapacité d’effectuer les tâches correspondant à ses fonctions, comportait une appréciation négative de ses capacités. N’ayant pas indiqué de particularités du cas d’espèce, le Tribunal de la fonction publique a, en substance, considéré que la mise à la retraite illégale pour motif d’invalidité totale et permanente, au titre de l’article 78 du statut, causait au fonctionnaire intéressé un préjudice moral qui ne pouvait être réparé de manière adéquate par la seule annulation de la décision en cause. Il a, par conséquent, condamné la Commission à verser à M. Marcuccio la somme de 3 000 euros en tant que réparation de ce préjudice.

73      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence, l’annulation d’un acte entaché d’illégalité peut constituer en elle-même la réparation adéquate et, en principe, suffisante de tout préjudice moral que cet acte peut avoir causé, à moins que la partie requérante ne démontre avoir subi un préjudice moral détachable de l’illégalité fondant l’annulation et insusceptible d’être intégralement réparé par cette annulation (voir arrêt du Tribunal du 6 juin 2006, Girardot/Commission, T‑10/02, RecFP p. I‑A‑2-129 et II-A-2-609, point 131, et la jurisprudence citée).

74      En considérant que la mise à la retraite illégale pour motif d’invalidité totale et permanente, au titre de l’article 78 du statut, causait au fonctionnaire intéressé, en elle-même, un préjudice moral qui ne pouvait être réparé de manière adéquate par la seule annulation de la décision en cause, le Tribunal de la fonction publique n’a pas indiqué d’éléments susceptibles de démontrer que le prétendu préjudice moral était détachable de l’illégalité fondant l’annulation et insusceptible d’être intégralement réparé par l’annulation de la décision du 30 mai 2005.

75      Il convient de relever que le constat d’une invalidité permanente considérée comme totale et mettant l’intéressé dans l’impossibilité d’exercer des fonctions correspondant à un emploi de sa carrière, au titre de l’article 78 du statut, repose sur des considérations d’ordre purement médical exprimées par des experts médicaux au cours de la procédure d’invalidité. Ce constat présente la description objective et neutre de l’état de santé de l’intéressé, lequel est notamment, aux yeux de tous, totalement indépendant de sa volonté ou de ses intentions (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 18 septembre 2002, Puente Martín/Commission, T‑29/01, RecFP p. I‑A‑157 et II‑833, point 65). Une telle description ne comporte donc en elle-même, sauf circonstances particulières, aucune appréciation négative de l’intéressé.

76      Il s’ensuit que le Tribunal de la fonction publique a commis une erreur de droit en ce qu’il a considéré, au point 82 de l’arrêt attaqué, que la décision du 30 mai 2005, dans la mesure où elle concluait à l’invalidité totale et permanente de M. Marcuccio et à son incapacité à effectuer les tâches correspondant à ses fonctions, comportait une appréciation négative de ses capacités, de sorte que l’annulation de cette décision ne constituait pas en elle-même la réparation adéquate et suffisante de tout préjudice moral causé par cet acte.

77      L’argumentation de la Commission doit donc être accueillie.

 Sur le pourvoi incident

78      À l’appui du pourvoi incident, M. Marcuccio soulève dix moyens, tirés de dénaturations des faits, de défauts de motivation de l’arrêt attaqué et d’autres erreurs de droit. Il convient d’examiner les griefs contenus dans ces moyens en suivant la structure de l’arrêt attaqué.

 Sur les griefs concernant les faits constatés dans l’arrêt attaqué

–       Arguments des parties

79      M. Marcuccio fait valoir, en substance, que l’arrêt attaqué est entaché de dénaturations des faits et d’un défaut de motivation. En effet, contrairement à la considération mentionnée au point 8 de l’arrêt attaqué, le Tribunal n’aurait pas rejeté son recours dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 5 juillet 2005, Marcuccio/Commission (T‑9/04, RecFP p. I‑A‑195 et II‑881). En outre, contrairement à la considération figurant au point 13 de l’arrêt attaqué, le docteur M. n’aurait pas été désigné par la Commission dans la commission d’invalidité, comme l’attesterait le fait qu’il ne serait pas identifiable dans la note du 26 mai 2003. De plus, dès lors que le docteur M. n’aurait pas été désigné, il n’aurait pu, contrairement à la considération mentionnée au point 17 de l’arrêt attaqué, parvenir à s’accorder avec le docteur U. pour désigner le troisième médecin de la commission d’invalidité. Par ailleurs, contrairement à la considération exprimée au point 19 de l’arrêt attaqué, il ne ressortirait pas de la note du 17 novembre 2004 que le docteur U. ait donné sa démission de la commission d’invalidité.

80      La Commission conteste l’argumentation de M. Marcuccio.

–       Appréciation du Tribunal

81      Il résulte d’une jurisprudence constante de la Cour, en tant que juge du pourvoi, que le juge de première instance est seul compétent, d’une part, pour constater les faits, sauf dans le cas où l’inexactitude matérielle de ses constatations résulterait des pièces du dossier qui lui ont été soumises, et, d’autre part, pour apprécier ces faits. L’appréciation des faits par le juge de première instance ne constitue donc pas, sous réserve du cas de la dénaturation des éléments de preuve produits devant ce juge, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle du Tribunal (voir arrêt du Tribunal du 8 septembre 2008, Kerstens/Commission, T‑222/07 P, non encore publié au Recueil, points 60 et 61, et la jurisprudence citée).

82      Une telle dénaturation doit apparaître de façon manifeste des pièces du dossier, sans qu’il soit nécessaire de procéder à une nouvelle appréciation des faits et des preuves (arrêts de la Cour du 28 mai 1998, New Holland Ford/Commission, C‑8/95 P, Rec. p. I‑3175, point 72 ; du 6 avril 2006, General Motors/Commission, C‑551/03 P, Rec. p. I‑3173, point 54, et du 21 septembre 2006, JCB Service/Commission, C‑167/04 P, Rec. p. I-8935, point 108 ; arrêt Kerstens/Commission, point 81 supra, point 62).

83      En l’espèce, s’agissant de la considération figurant au point 8 de l’arrêt attaqué, il y a lieu de constater que le Tribunal a effectivement annulé la décision implicite de la Commission qui était en litige (arrêt Marcuccio/Commission, point 79 supra). Toutefois, cette inexactitude matérielle commise par le Tribunal de la fonction publique n’est pas de nature à invalider l’arrêt attaqué, dès lors qu’aucune partie du dispositif de cet arrêt n’est fondée sur l’arrêt Marcuccio/Commission, point 79 supra. Cet argument de M. Marcuccio doit donc être écarté comme inopérant.

84      Pour ce qui est des points 13 et 17 de l’arrêt attaqué, force est de juger que les constatations du Tribunal de la fonction publique ne sont pas inexactes. En effet, il ressort clairement de la note du 26 mai 2003 que le docteur M., médecin-conseil au service médical de la Commission, a été désigné comme médecin représentant la Commission au sein de la commission d’invalidité. S’agissant, enfin, du point 19 de l’arrêt attaqué, le Tribunal de la fonction publique n’a pas dénaturé les éléments de preuve dont il disposait en considérant que le docteur U. avait démissionné. Certes, dans la note du 17 novembre 2004, la Commission a indiqué que le docteur U. avait informé le service médical que M. Marcuccio avait présenté sa démission. Toutefois, le Tribunal de la fonction publique pouvait valablement conclure du contexte et, en particulier, du fait que, par la même note, M. Marcuccio a été prié de désigner un autre médecin pour le représenter au sein de la commission d’invalidité, que cette note contenait l’information de la démission du docteur U. et non de celle de M. Marcuccio.

85      Enfin, il convient de relever, dans la mesure où M. Marcuccio fait valoir que l’arrêt attaqué est entaché d’un défaut de motivation en raison de l’inexactitude des constatations qui y figurent, que ce grief se confond, en substance, avec celui relatif à une prétendue dénaturation des faits, tel qu’examiné auparavant, et qu’il n’est pas corroboré par une argumentation spécifique.

86      Par conséquent, l’argumentation concernant les faits constatés dans l’arrêt attaqué doit être rejetée comme étant, d’une part, inopérante et, d’autre part, non fondée.

 Sur le grief concernant les considérations relatives à la recevabilité du recours de première instance

–       Arguments des parties

87      M. Marcuccio soutient, en substance, que le Tribunal de la fonction publique a commis une erreur de droit en ce qu’il a considéré, au point 54 de l’arrêt attaqué, que la note du 6 février 2004, qui serait en réalité la note adressée au directeur de l’Azienda U.S.L. LE/2 de Maglie, était un acte préparatoire. Il s’agirait d’un acte qui serait affecté d’une illégalité tellement grave qu’il devrait être déclaré inexistant.

88      La Commission conteste l’argumentation de M. Marcuccio.

–       Appréciation du Tribunal

89      Il convient de relever que le Tribunal de la fonction publique n’a pas commis d’erreur de droit en considérant que la note du 6 février 2004, à laquelle était annexée la note adressée au directeur de l’Azienda U.S.L. LE/2 de Maglie, ne constituait pas un acte attaquable. Le Tribunal de la fonction publique pouvait, à bon droit, conclure que les notes en cause n’étaient que des actes préparatoires à la décision du 30 mai 2005. En effet, par ces notes, M. Marcuccio a été informé qu’il serait soumis à un examen médico-légal par la commission d’invalidité aux fins d’évaluer son état de santé. La Commission n’a fixé définitivement sa position concernant l’invalidité de M. Marcuccio que dans la décision du 30 mai 2005.

90      L’argumentation de M. Marcuccio, selon laquelle la note du 6 février 2004 est affectée d’une illégalité tellement grave qu’elle devrait être déclarée inexistante, ne saurait invalider, en l’espèce, le raisonnement du Tribunal de la fonction publique, au point 53 de l’arrêt attaqué, non contesté par M. Marcuccio, selon lequel, lorsqu’il s’agit d’actes ou de décisions dont l’élaboration s’effectue en plusieurs phases, notamment au terme d’une procédure interne, constituent, en principe, des actes attaquables les mesures qui fixent définitivement la position de l’institution au terme de cette procédure, à l’exclusion des mesures intermédiaires dont l’objectif est de préparer la décision finale. En effet, à supposer même que cet acte soit déclaré inexistant, il n’en resterait pas moins qu’il a été adopté lors de la phase préparatoire de la procédure administrative, de sorte qu’il ne saurait être contesté que de façon incidente, à l’occasion d’un recours dirigé contre la décision du 30 mai 2005 fixant définitivement la position de l’institution.

91      Par conséquent, ce grief doit être rejeté.

 Sur les griefs concernant les motifs d’annulation de l’arrêt attaqué

–       Arguments des parties

92      M. Marcuccio fait valoir, en substance, que le Tribunal de la fonction publique a commis une erreur de droit en considérant, au point 66 de l’arrêt attaqué, qu’il pouvait être remédié à un éventuel défaut de motivation par une motivation adéquate fournie au stade de la réponse à la réclamation. Selon M. Marcuccio, une telle considération ne peut être conciliée avec celle figurant au point 61 de l’arrêt attaqué, à savoir que la motivation doit, en principe, être communiquée à l’intéressé en même temps que la décision lui faisant grief.

93      La Commission conteste l’argumentation de M. Marcuccio.

–       Appréciation du Tribunal

94      Force est de constater que le Tribunal de la fonction publique a, à bon droit, appliqué, au point 66 de l’arrêt attaqué, la jurisprudence selon laquelle il peut être remédié à un éventuel défaut de motivation par une motivation adéquate fournie au stade de la réponse à la réclamation, cette dernière motivation étant censée coïncider avec la motivation de la décision contre laquelle la réclamation a été dirigée (voir point 65 ci-dessus).

95      Il s’ensuit que ce grief doit être rejeté.

 Sur les griefs concernant les motifs de rejet des demandes en indemnité

–       Arguments des parties

96      S’agissant, premièrement, de sa demande de réparation du préjudice matériel qu’il aurait subi en raison de la différence entre les revenus mensuels qui lui ont été accordés à la suite de l’exécution de la décision du 30 mai 2005 et ceux qu’il aurait perçus en l’absence de cette décision (ci-après la « différence de revenu »), M. Marcuccio souligne, en substance, que le Tribunal de la fonction publique a commis une erreur de droit en considérant, aux points 78 à 80 de l’arrêt attaqué, que ce préjudice était hypothétique. Ledit préjudice serait déterminé, liquide et exigible. En outre, le juge disposerait d’une compétence de pleine juridiction en matière pécuniaire dans les litiges opposant l’Union et ses agents. Dans ce contexte, il aurait également demandé la réparation du préjudice matériel qu’il aurait subi en raison de la perte d’autres avantages, demande à laquelle le Tribunal de la fonction publique n’aurait pas répondu (points 73, 78 et 79 de l’arrêt attaqué).

97      S’agissant, deuxièmement, des considérations relatives à sa demande de réparation du préjudice moral qu’il aurait subi, M. Marcuccio fait valoir, en substance, que l’arrêt attaqué est entaché d’un défaut de motivation en ce que le Tribunal de la fonction publique a considéré, au point 84 de cet arrêt, qu’il s’était obstiné à faire preuve d’obstruction vis-à-vis de la Commission et que la présente affaire constituait la continuation de cette approche, dans la mesure où il avait tenté de faire obstruction au mandat de la commission d’invalidité. Selon lui, sur la base des faits de la présente affaire, son comportement ne pourrait être considéré comme obstructionniste. En outre, le mandat de la commission d’invalidité et les reproches concrets concernant son comportement ne seraient pas clairement identifiés. Par ailleurs, il n’existerait pas de lien de causalité entre son prétendu comportement obstructionniste et l’illégalité de la décision du 30 mai 2005.

98      De plus, le Tribunal de la fonction publique aurait commis une erreur de droit en ce qu’il aurait considéré, au point 83 de l’arrêt attaqué, que, la décision du 30 mai 2005 n’ayant été annulée qu’en raison d’un défaut de motivation, la question restait ouverte de savoir si l’intéressé était ou non atteint d’une invalidité et que le seul préjudice moral dont il pouvait, dès lors, se prévaloir était celui résultant de la méconnaissance par la Commission de l’obligation de motivation à laquelle elle était tenue. En effet, selon lui, la décision du 30 mai 2005 ayant été annulée, il doit être regardé comme n’ayant jamais été atteint d’une invalidité. Par ailleurs, le préjudice moral résulterait, en tout état de cause, de tous les vices de la procédure en cause ainsi que du fait que la question soit restée ouverte aussi longtemps. Dès lors qu’il aurait également soulevé d’autres moyens, ceux-ci auraient dû être examinés par le Tribunal de la fonction publique, afin de se prononcer sur le montant de l’indemnisation. Faute de l’avoir fait, le Tribunal de la fonction publique a, selon lui, entaché l’arrêt attaqué d’un défaut de motivation.

99      S’agissant, troisièmement, des considérations relatives à sa demande d’indemnisation du préjudice qui résulterait des actes ayant abouti à l’édiction de la décision du 30 mai 2005, M. Marcuccio souligne, en substance, que le Tribunal de la fonction publique a commis une erreur de droit en considérant, au point 87 de l’arrêt attaqué, que sa demande de réparation du préjudice découlant d’actes préparatoires était irrecevable, en ce qu’elle n’avait pas été précédée d’une demande au titre de l’article 90 du statut et d’une réclamation. Selon lui, lorsqu’il existe un lien étroit entre un recours en annulation et une action tendant à obtenir la réparation d’un préjudice, cette dernière est recevable sans devoir être précédée de la procédure précontentieuse visée à l’article 90 du statut. En l’espèce, les actes préparatoires en cause seraient clairement rattachés à la décision du 30 mai 2005. Par ailleurs, la fusion de toutes les actions tendant à la réparation d’un préjudice serait, en l’espèce, raisonnable.

100    S’agissant, quatrièmement, des considérations relatives à l’indemnisation du préjudice qu’il aurait subi en raison de divers comportements positifs, même autres que les décisions dont l’annulation était demandée dans le cadre du recours de première instance, M. Marcuccio fait valoir, en substance, que le Tribunal de la fonction publique a commis une dénaturation des faits et une erreur de droit en considérant, au point 88 de l’arrêt attaqué, que ses conclusions n’étaient assorties d’aucune précision permettant de déterminer avec certitude les actes et les comportements qu’il avait dénoncés. Il s’agirait, en particulier, des convocations répétées pour pratiquer des examens médicaux, de la demande de se soumettre à une visite devant un collège médical, des violations répétées de ses droits relatives à la nomination des membres de la commission d’invalidité, du mandat du docteur B. de procéder à un examen médical à son domicile, des affirmations figurant dans le procès-verbal sur son prétendu comportement et des affirmations contenues dans plusieurs actes de la Commission qui seraient gravement attentatoires à son honneur et à sa dignité.

101    La Commission conteste l’argumentation de M. Marcuccio.

–       Appréciation du Tribunal

102    S’agissant, premièrement, de la demande en indemnité en raison de la différence de revenu, il importe de relever que, à supposer même que M. Marcuccio n’ait pas été mis à la retraite à partir du 31 mai 2005 en raison de l’annulation de la décision du 30 mai 2005 et qu’il ait gardé son statut de fonctionnaire en activité après cette date, le Tribunal de la fonction publique n’a pas commis d’erreur de droit en considérant, au point 79 de l’arrêt attaqué, qu’il n’était en mesure d’apprécier ni la réalité ni la consistance des chefs de préjudice allégués, dès lors que la Commission devait encore adopter les mesures d’exécution de l’arrêt attaqué, conformément aux dispositions de l’article 233 CE.

103    En effet, conformément à l’article 233 CE, la Commission est tenue de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt attaqué, à savoir, en l’espèce, d’adopter notamment les mesures nécessaires concernant la rémunération de M. Marcuccio. En vertu de l’article 12 de l’annexe I du statut de la Cour de justice, le pourvoi devant le Tribunal n’a pas d’effet suspensif. Dans la mesure où la Commission n’avait pas encore adopté ces mesures, le Tribunal de la fonction publique pouvait, à bon droit, considérer, au point 80 de l’arrêt attaqué, que les conclusions indemnitaires en cause devaient être rejetées comme prématurées.

104    Pour ce qui est de l’affirmation de M. Marcuccio selon laquelle le Tribunal de la fonction publique n’a pas répondu à sa demande concernant les autres avantages auxquels a droit un fonctionnaire en activité, il y a lieu de relever qu’une telle demande n’a pas été formulée. En effet, les conclusions en indemnité de M. Marcuccio, reprises au point 42 de l’arrêt attaqué, mentionnaient seulement la différence de revenu et non la perte d’autres avantages.

105    S’agissant, deuxièmement, de sa demande en indemnité en raison d’un prétendu préjudice moral, il a déjà été constaté que, en considérant que la mise à la retraite illégale pour motif d’invalidité totale et permanente, au titre de l’article 78 du statut, causait au fonctionnaire intéressé, en tant que telle, un préjudice moral qui ne pouvait être réparé de manière adéquate par la seule annulation de la décision en cause, le Tribunal de la fonction publique avait commis une erreur de droit (voir points 73 à 76 ci-dessus).

106    Il s’ensuit que les griefs concernant les considérations du Tribunal de la fonction publique figurant aux points 83 et 84 de l’arrêt attaqué, concernant le montant de l’indemnisation devant être alloué en réparation du prétendu préjudice moral subi par l’intéressé, ne sauraient prospérer. En effet, ces considérations ont servi non pas à fonder la réparation du préjudice moral, mais à apprécier le niveau d’une telle réparation. Étant donné que les considérations fondant la réparation du préjudice moral autre que celui subi à la suite de l’annulation de la décision du 30 mai 2005 sont entachées d’une erreur de droit, les griefs concernant les considérations sur le niveau de cette réparation, à supposer même qu’ils soient fondés, ne sauraient modifier l’examen, dans le cadre du pourvoi, des considérations du Tribunal de la fonction publique concernant le préjudice moral en cause et sont donc inopérants.

107    S’agissant, troisièmement, des demandes en indemnité en raison d’un prétendu préjudice résultant des actes ayant abouti à l’édiction de la décision du 30 mai 2005, le Tribunal de la fonction publique pouvait à bon droit considérer, au point 87 de l’arrêt attaqué, que celles-ci devaient être rejetées comme irrecevables.

108    En effet, il ressort d’une jurisprudence bien établie que, lorsqu’il existe un lien direct entre un recours en annulation et une demande en indemnité, cette dernière est certes recevable en tant qu’accessoire du recours en annulation, sans qu’elle doive nécessairement être précédée d’une demande invitant l’AIPN à réparer le préjudice prétendument subi et d’une réclamation contestant le bien-fondé du rejet implicite ou explicite de la demande (voir arrêts du Tribunal du 9 février 1994, Latham/Commission, T‑3/92, RecFP p. I‑A‑23 et II‑83, point 37, et du 10 juin 2004, Alvarez Moreno/Commission, T‑153/01 et T‑323/01, RecFP p. I‑A‑161 et II‑719, point 100, et la jurisprudence citée).

109    Toutefois, les demandes en indemnité fondées sur les actes ayant abouti à l’édiction de la décision du 30 mai 2005 ne sont pas, du seul fait du caractère préparatoire à cette décision des actes en question et sans autre précision de la part de M. Marcuccio permettant de déterminer la relation concrète entre ceux-ci et ladite décision, étroitement liées à la demande d’annulation de cette même décision. Il ne ressort ni de l’arrêt attaqué ni de l’argumentation de M. Marcuccio énoncée dans le cadre de ce pourvoi qu’un prétendu défaut de ces actes ait été la source de l’illégalité reprochée dans le cadre de la demande en annulation (voir, en ce sens, arrêt Alvarez Moreno/Commission, point 108 supra, point 102). Si ces demandes en indemnité tendaient, en réalité, à obtenir la réparation des préjudices prétendument causés par le non-respect de la procédure relative à la mise en retraite pour cause d’invalidité, elles seraient fondées sur des préjudices résultant de fautes et d’omissions que la Commission aurait commises relatives à chaque acte en cause et non sur le préjudice résultant du fait que M. Marcuccio a été mis en retraite pour cause d’invalidité, de sorte que, même dans cette hypothèse, un tel lien étroit n’existerait pas (voir, en ce sens, arrêt Latham/Commission, point 108 supra, point 39).

110    S’agissant, quatrièmement, des demandes en indemnité en raison d’un prétendu préjudice résultant des actes d’exécution de la décision du 30 mai 2005 ainsi que de comportements positifs, même autres que les décisions dont l’annulation était demandée dans le cadre du recours de première instance, il y a lieu de relever que le Tribunal de la fonction publique pouvait à bon droit considérer, au point 88 de l’arrêt attaqué, que ces demandes étaient irrecevables, dès lors qu’elles n’étaient assorties d’aucune précision permettant de déterminer avec certitude les actes et les comportements dénoncés par M. Marcuccio et qu’elles ne satisfaisaient donc pas à l’article 21 du statut de la Cour de justice.

111    En effet, en ce qui concerne la prétendue dénaturation des éléments de preuve en ce que le Tribunal de la fonction publique n’aurait pas tenu compte des informations précises qui lui auraient été soumises concernant ces actes et ces comportements, il convient de relever que M. Marcuccio énumère, dans le mémoire en réponse, les différents actes et comportements auxquels il a fait référence en première instance, sans pour autant indiquer si et, le cas échéant, où une telle précision aurait déjà été apportée en première instance. Force est de constater que, dans la mesure où ce mémoire ne contient pas de référence précise au dossier de première instance pour fonder ce grief, il est irrecevable, dès lors qu’il n’est pas suffisamment clair et précis pour permettre à l’autre partie de préparer son mémoire en réplique, en vertu de l’article 143, paragraphe 2, du règlement de procédure, et au juge de statuer sur le recours, le cas échéant, sans autres informations à l’appui. À cet égard, il convient de rappeler que même un renvoi global aux écrits autres que le pourvoi ne saurait pallier l’absence des éléments essentiels de l’argumentation en droit, qui, en vertu de l’article 138, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure, doivent figurer dans le pourvoi (voir ordonnance du Tribunal du 22 juin 2009, Nijs/Cour des comptes, T‑376/08 P, non encore publiée au Recueil, point 24, et la jurisprudence citée). Il s’ensuit que ce grief est irrecevable pour autant qu’il concerne une prétendue dénaturation des éléments de preuve.

112    En ce qui concerne la prétendue erreur de droit qu’aurait commise le Tribunal de la fonction publique en considérant que les conclusions concernant les demandes indemnitaires en cause, n’étant assorties d’aucune précision permettant de déterminer avec certitude les actes et les comportements dénoncés par M. Marcuccio, étaient irrecevables, il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’article 21, premier alinéa, du statut de la Cour de justice et de l’article 35, paragraphe 1, sous d) et e), du règlement de procédure du Tribunal de la fonction publique, toute requête introductive d’instance doit contenir un exposé sommaire des moyens invoqués. Selon une jurisprudence constante, cet exposé doit être suffisamment clair et précis pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au juge de statuer sur le recours, le cas échéant, sans autres informations à l’appui. Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il faut, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci se fonde ressortent d’une façon cohérente et compréhensible du texte de la requête elle-même (voir arrêt du Tribunal du 30 septembre 2009, Skareby/Commission, T‑193/08 P, non encore publié au Recueil, point 59, et la jurisprudence citée).

113    Or, en l’espèce, les conclusions en cause n’étant pas suffisamment claires et précises pour permettre de déterminer avec certitude les actes et les comportements dénoncés par M. Marcuccio, le Tribunal de la fonction publique pouvait valablement considérer que celles-ci étaient irrecevables.

114    Au vu de tout ce qui précède, les griefs de M. Marcuccio concernant les motifs de rejet de ses demandes en indemnité ne sauraient être accueillis.

 Sur les griefs concernant le rejet des demandes de mesures d’instruction

–       Arguments des parties

115    M. Marcuccio souligne, en substance, que le Tribunal de la fonction publique a commis une erreur de droit et une dénaturation des faits en ce qu’il a considéré, au point 90 de l’arrêt attaqué, que la Commission avait produit le texte de sa décision du 28 avril 2004, relative à l’exercice des pouvoirs conférés par le statut à l’AIPN (ci-après la « décision du 28 avril 2004 »). La Commission n’aurait produit qu’un document incomplet, dont il manquerait la table X, indiquée à l’annexe I de ce document.

116    En outre, sa demande visant à ce que soit ordonnée une expertise grammaticale de la note du 17 novembre 2004 aurait été rejetée par le Tribunal de la fonction publique, au point 92 de l’arrêt attaqué, au moyen d’une argumentation incompréhensible, de sorte que l’arrêt attaqué serait entaché d’un défaut de motivation.

117    La Commission conteste l’argumentation de M. Marcuccio.

–       Appréciation du Tribunal

118    S’agissant, premièrement, des considérations du Tribunal de la fonction publique, figurant au point 90 de l’arrêt attaqué, selon lesquelles la Commission a annexé au mémoire en défense le texte de la décision du 28 avril 2004, de sorte que la demande de M. Marcuccio de lui communiquer ce texte serait devenue sans objet, il convient de relever que la Commission n’avait pas transmis, en annexe du mémoire en défense de première instance, le texte complet de cette décision. Ainsi, les dispositions spécifiques au personnel affecté dans les pays tiers relevant du Service extérieur de la Commission, se trouvant dans la table X, n’étaient pas incluses dans le texte transmis par la Commission.

119    Toutefois, la communication du texte incomplet de la décision du 28 avril 2004 au cours de la procédure de première instance n’était pas susceptible de remettre en cause le sort réservé aux conclusions de M. Marcuccio. En effet, s’agissant des conclusions en annulation, la décision du 30 mai 2005 a, de toute façon, été annulée par l’arrêt attaqué pour défaut de motivation. S’agissant des conclusions en indemnité en raison de la différence de revenu, celles-ci étant fondées sur l’illégalité de la décision du 30 mai 2005, qui a été constatée par le Tribunal de la fonction publique, la communication du texte incomplet de la décision du 28 avril 2004 n’a donc aucune incidence sur l’accueil ou le rejet de ces conclusions. Il en va de même en ce qui concerne les conclusions relatives au prétendu préjudice moral, le Tribunal de la fonction publique ayant commis, de toute façon, une erreur de droit à cet égard (voir points 72 à 76 ci-dessus). Pour ce qui est des conclusions concernant le prétendu préjudice résultant des actes ayant abouti à l’édiction de la décision du 30 mai 2005 et de celles concernant le prétendu préjudice résultant des actes d’exécution de cette décision ainsi que des comportements positifs, même autres que les décisions dont l’annulation était demandée dans le cadre du recours de première instance, il convient de rappeler que celles-ci étaient irrecevables (voir points 107 à 113 ci-dessus).

120    Il s’ensuit que ce grief doit être écarté.

121    S’agissant, deuxièmement, des considérations du Tribunal de la fonction publique figurant au point 92 de l’arrêt attaqué, par lesquelles il a rejeté la demande de M. Marcuccio visant à ce que soit ordonnée une expertise grammaticale de la note du 17 novembre 2004, il a déjà été constaté que le Tribunal de la fonction publique pouvait valablement conclure du contexte et, en particulier, du fait que, par la même note, M. Marcuccio avait été prié de désigner un autre médecin pour le représenter au sein de la commission d’invalidité, que cette note contenait l’information de la démission du docteur U. et non de celle de M. Marcuccio (voir point 84 ci-dessus). Il s’ensuit que l’arrêt attaqué n’est pas entaché d’un défaut de motivation à cet égard.

122    Par conséquent, les griefs concernant le rejet des demandes de mesures d’instruction doivent être rejetés dans leur ensemble.

 Sur les griefs concernant la condamnation aux dépens

–       Arguments des parties

123    M. Marcuccio fait valoir, en substance, que le Tribunal de la fonction publique a commis une erreur de droit en ce qu’il a considéré, au point 97 de l’arrêt attaqué, que le recours avait été accueilli en partie. En réalité, la Commission aurait succombé en l’essentiel de ses moyens.

124    La Commission conteste l’argumentation de M. Marcuccio.

–       Appréciation du Tribunal

125    Il importe de relever que la considération du Tribunal de la fonction publique, mentionnée au point 97 de l’arrêt attaqué, selon laquelle le recours était accueilli en partie n’est pas en contradiction avec l’affirmation de M. Marcuccio selon laquelle la Commission a succombé en l’essentiel de ses moyens. En outre, il convient de constater que, en décidant que la Commission supporterait ses propres dépens ainsi que deux tiers de ceux exposés par M. Marcuccio, le Tribunal de la fonction publique a même considéré que la Commission avait succombé en l’essentiel de ses moyens.

126    Il s’ensuit que ce grief doit être rejeté.

 Conclusion

127    Il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi principal doit être accueilli dans son intégralité, dès lors que le Tribunal de la fonction publique a commis des erreurs de droit en ce qu’il a annulé la décision du 30 mai 2005 en raison d’un défaut de motivation (voir points 61 à 69 ci-dessus) et en ce qu’il a condamné la Commission à verser à M. Marcuccio la somme de 3 000 euros, en considérant que la décision du 30 mai 2005, dans la mesure où elle concluait à l’invalidité totale et permanente de M. Marcuccio et à son incapacité à effectuer les tâches correspondant à ses fonctions, comportait une appréciation négative de ses capacités, de sorte que l’annulation de cette décision ne constituait pas en elle-même la réparation adéquate et suffisante de tout préjudice moral causé par cet acte (voir points 72 à 77 ci-dessus).

128    En revanche, le pourvoi incident doit être rejeté dans son intégralité.

129    Par conséquent, il y a lieu d’annuler partiellement l’arrêt attaqué, dans la mesure où le Tribunal de la fonction publique a annulé la décision du 30 mai 2005 et dans la mesure où il a condamné la Commission à verser à M. Marcuccio la somme de 3 000 euros (points 1 et 2 du dispositif de l’arrêt attaqué).

 Sur les conséquences de l’annulation partielle de l’arrêt attaqué

130    Conformément à l’article 13, paragraphe 1, de l’annexe I du statut de la Cour de justice, lorsque le pourvoi est fondé, le Tribunal annule la décision du Tribunal de la fonction publique et statue lui-même sur le litige. Il renvoie l’affaire devant le Tribunal de la fonction publique pour qu’il statue lorsque le litige n’est pas en état d’être jugé.

131    En l’espèce, il ressort du point 71 de l’arrêt attaqué que le Tribunal de la fonction publique n’a pas statué sur les autres griefs et moyens soulevés par M. Marcuccio à l’appui de ses conclusions en annulation, notamment ceux concernant la régularité de la composition de la commission d’invalidité. Dans ces circonstances, le Tribunal considère que le présent litige n’est pas en état d’être jugé. Dès lors, il y a lieu de renvoyer l’affaire devant le Tribunal de la fonction publique pour qu’il statue sur les moyens, à l’exception du premier, résumés au point 57 de l’arrêt attaqué.

 Sur les dépens

132    Le pourvoi principal étant accueilli dans son intégralité en raison de l’annulation des points 1 et 2 du dispositif de l’arrêt attaqué, il y a également lieu d’annuler les points 4 et 5 du dispositif de l’arrêt attaqué, qui condamnaient, d’une part, la Commission à supporter, outre ses propres dépens, les deux tiers des dépens de M. Marcuccio et, d’autre part, M. Marcuccio à supporter le tiers de ses propres dépens.

133    L’affaire étant renvoyée devant le Tribunal de la fonction publique, il convient de réserver les dépens afférents à la présente procédure de pourvoi.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (chambre des pourvois)

déclare et arrête :

1)      L’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (première chambre) du 4 novembre 2008, Marcuccio/Commission (F‑41/06), est annulé dans la mesure où le Tribunal de la fonction publique a annulé la décision de la Commission européenne du 30 mai 2005 de mettre M. Marcuccio à la retraite pour cause d’invalidité et de lui accorder le bénéfice d’une allocation d’invalidité, dans la mesure où il a condamné la Commission à verser à M. Marcuccio la somme de 3 000 euros et dans la mesure où il a réparti les dépens en fonction desdites annulation et condamnation (points 1, 2, 4 et 5 du dispositif de cet arrêt).

2)      L’affaire est renvoyée devant le Tribunal de la fonction publique.

3)      Les dépens sont réservés.

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 8 juin 2011.

Signatures


* Langue de procédure : l’italien.