Language of document : ECLI:EU:T:2009:361

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (première chambre)

28 septembre 2009 (*)

« Procédure – Taxation des dépens »

Dans l’affaire T‑420/03 DEP,

El Corte Inglés, SA, établie à Madrid (Espagne), représentée par Mes J. Rivas Zurdo et E. López Leiva, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. I. de Medrano Caballero, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

les autres parties à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

José Matías Abril Sánchez et Pedro Ricote Saugar, demeurant à Madrid, représentés par Me J. M. Iglesias Monravá, avocat,

ayant pour objet une demande de taxation des dépens à rembourser par la partie requérante aux parties intervenantes à la suite de l’arrêt du Tribunal (quatrième chambre) du 17 juin 2008, El Corte Inglés/OHMI – Abril Sánchez et Ricote Saugar (BoomerangTV) (T‑420/03, Rec. p. II‑837),

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (première chambre),

composé de Mme V. Tiili, président, M. F. Dehousse et Mme I. Wiszniewska-Białecka (rapporteur), juges,

greffier : M.  E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Faits, procédure et conclusions des parties

1        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 17 décembre 2003, la requérante, El Corte Inglés, SA a introduit un recours tendant à l’annulation de la décision de la deuxième chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) du 1er octobre 2003 (affaire R 88/2003‑2), relative à une procédure d’opposition entre El Corte Inglés, SA et MM. J. M. Abril Sánchez et P. Ricote Saugar.

2        Les intervenants, MM. J. M. Abril Sánchez et P. Ricote Saugar, sont intervenus dans le litige pour demander, d’une part, le rejet du recours et, d’autre part, l’acceptation de l’enregistrement de la marque BoomerangTV pour les services compris dans la classe 41 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié. Ils ont également proposé que le Tribunal adopte une mesure d’instruction.

3        Le 30 septembre 2004, le Tribunal a adressé aux intervenants une demande de production de documents.

4        Par ordonnance du président de la quatrième chambre du Tribunal du 13 octobre 2005, les parties entendues, la procédure dans l’affaire au principal a été suspendue jusqu’au prononcé de l’arrêt de la Cour dans l’affaire OHMI/Kaul, C‑29/05 P, qui est intervenu le 13 mars 2007 (Rec. p. I‑2213).

5        Dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 du règlement de procédure du Tribunal, le Tribunal a invité les parties à présenter par écrit leurs observations sur les conséquences qu’elles tiraient de l’arrêt OHMI/Kaul, point 4 supra, aux fins du recours dans l’affaire au principal.

6        Par arrêt du 17 juin 2008, El Corte Inglés/OHMI – Abril Sánchez et Ricote Saugar (BoomerangTV) (T‑420/03, Rec. p. II‑837), le Tribunal a rejeté le recours et condamné la requérante aux dépens, sur le fondement de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure.

7        Après avoir invité la requérante à leur régler les dépens à hauteur de 8 165,35 euros et au vu de l’absence d’accord avec la requérante relatif tant au montant des dépens qu’à leurs modalités de paiement, les intervenants, par requête déposée au greffe du Tribunal le 5 mars 2009, ont formé, au titre de l’article 92 du règlement de procédure, une demande de taxation des dépens par laquelle ils ont invité le Tribunal à fixer le montant des dépens récupérables, dont le remboursement incombe à la requérante, à 8 165,35 euros.

8        Par mémoire déposé au greffe du Tribunal le 23 avril 2009, la requérante a sollicité le rejet de la demande des intervenants et la fixation des dépens par le Tribunal à un montant qui ne devrait pas excéder 3 300 euros, en ce compris les dépenses justifiées de 1 233,90 euros.

 En droit

9        Aux termes de l’article 92, paragraphe 1, du règlement de procédure, s’il y a contestation sur les dépens récupérables, le Tribunal statue par voie d’ordonnance non susceptible de recours à la demande de la partie intéressée, l’autre partie entendue en ses observations.

10      Aux termes de l’article 91, sous b), du règlement de procédure, sont considérés comme dépens récupérables les frais indispensables exposés par les parties aux fins de la procédure, notamment les frais de déplacement et de séjour et la rémunération d’un agent, d’un conseil ou d’un avocat. Il découle de cette disposition que les dépens récupérables sont limités, d’une part, à ceux exposés aux fins de la procédure devant le Tribunal et, d’autre part, à ceux qui ont été indispensables à ces fins (voir ordonnance du Tribunal du 28 juin 2004, Airtours/Commission, T‑342/99 DEP, Rec. p. II‑1785, point 13, et la jurisprudence citée).

11      En ce qui concerne le contentieux relatif aux droits de la propriété intellectuelle, l’article 136, paragraphe 2, du règlement de procédure précise que sont également considérés comme dépens récupérables les frais indispensables exposés par les parties aux fins de la procédure devant la chambre de recours ainsi que les frais exposés aux fins de la production, prévue par l’article 131, paragraphe 4, deuxième alinéa, du règlement de procédure, des traductions des mémoires ou des écrits dans la langue de procédure. En l’espèce, il y a toutefois lieu de constater que les frais dont les intervenants demandent le remboursement concernent uniquement la procédure devant le Tribunal.

12      Selon une jurisprudence constante, le juge communautaire n’est pas habilité à taxer les honoraires dus par les parties à leurs propres avocats, mais à déterminer le montant à concurrence duquel ces émoluments peuvent être récupérés auprès de la partie condamnée aux dépens. En statuant sur la demande de taxation des dépens, le Tribunal n’a pas à prendre en considération un tarif national fixant les honoraires des avocats ni un éventuel accord conclu à cet égard entre la partie intéressée et ses agents ou conseils (voir ordonnance Airtours/Commission, point 10 supra, point 17, et la jurisprudence citée).

13      Il est également de jurisprudence constante que, à défaut de dispositions communautaires de nature tarifaire applicables, le Tribunal doit apprécier librement les données de la cause, en tenant compte de l’objet et de la nature du litige, de son importance sous l’angle du droit communautaire ainsi que des difficultés de la cause, de l’ampleur du travail que la procédure contentieuse a pu causer aux agents ou aux conseils intervenus et des intérêts économiques que le litige a représentés pour les parties (voir ordonnance Airtours/Commission, point 10 supra, point 18, et la jurisprudence citée).

14      C’est en fonction de ces éléments qu’il convient d’apprécier le montant des dépens récupérables en l’espèce.

15      En premier lieu, le Tribunal relève qu’il ressort de l’arrêt BoomerangTV, point 6 supra, que l’affaire au principal présentait, quant à son objet et sa nature, une certaine complexité notamment sur le plan de l’interprétation, d’une part, de l’article 74, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [devenu article 76, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)], et de l’arrêt OHMI/Kaul, point 4 supra, et, d’autre part, des dispositions du règlement n° 40/94 et du règlement (CE) n° 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement n° 40/94 (JO L 303, p. 1), relatives à la preuve de l’existence des droits antérieurs invoqués au soutien d’une opposition. Il s’agissait ainsi d’un des premiers arrêts dans lequel le Tribunal était amené à interpréter l’arrêt OHMI/Kaul, point 4 supra, qui avait précisé la portée du principe de continuité fonctionnelle entre divisions d’opposition et chambres de recours de l’OHMI. Le litige revêtait donc une certaine importance sous l’angle du droit communautaire, contrairement à ce que prétend la requérante.

16      En deuxième lieu, le Tribunal constate que, si l’affaire en cause représentait évidemment un certain intérêt économique pour les intervenants, en l’absence d’éléments concrets apportés par ces derniers, cet intérêt économique ne saurait être considéré comme ayant été d’une importance inhabituelle.

17      En troisième lieu, s’agissant de l’ampleur du travail que la procédure a pu engendrer pour le conseil des intervenants, le Tribunal rappelle que la possibilité pour le juge communautaire d’apprécier la valeur du travail effectué dépend de la précision des informations fournies (voir ordonnance Airtours/Commission, point 10 supra, point 30, et la jurisprudence citée).

18      En l’espèce, les intervenants ont produit, en annexe à leur demande de taxation des dépens, une facture et des pièces justificatives relatives, d’une part, à une note d’honoraires d’un montant total de 7 150 euros et, d’autre part, aux frais de voyage et de séjour de leur conseil à Luxembourg (Luxembourg) aux fins de la procédure orale, s’élevant à 1 233,90 euros [932,10 euros au titre des frais de voyage, 104,55 euros au titre des frais d’hôtel et 197,25 euros au titre de débours (déplacements et repas)]. À cet égard, il y a lieu de relever à titre liminaire que le total de ces sommes individuelles dont les intervenants demandent le remboursement s’élève à 8 383,90 euros. Cependant, les intervenants ne concluent qu’au remboursement de 8 165,35 euros. Il conviendra donc en toute hypothèse de ne pas fixer le total des dépens récupérables à une somme supérieure à 8 165,35 euros.

19      S’agissant de la note d’honoraires, si elle comporte une indication des actes rédigés et des démarches accomplies par le conseil des intervenants dans le cadre de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt BoomerangTV, point 6 supra, elle n’indique pas le taux horaire ou le temps passé pour chaque poste visé et n’est donc pas détaillée, comme le fait valoir la requérante. Or, l’absence d’informations plus précises concernant les taux horaires et le temps passé pour chaque poste rend particulièrement difficile la vérification des dépens exposés aux fins de la procédure devant le Tribunal et de ceux qui ont été indispensables à ces fins et place le Tribunal dans une situation d’appréciation nécessairement stricte des honoraires récupérables en l’espèce [voir ordonnance du Tribunal du 25 janvier 2007, Royal County of Berkshire Polo Club/OHMI – Polo/Lauren (ROYAL COUNTY OF BERKSHIRE POLO CLUB), T‑214/04 DEP, non publiée au Recueil, point 18, et la jurisprudence citée].

20      Cependant, le Tribunal estime que les montants avancés pour la rédaction des actes de procédure et pour la représentation des intervenants à l’audience sont raisonnables, que ces montants aient été établis sur la base d’un taux horaire non précisé ou sur une base forfaitaire. À cet égard, le fait, indiqué par la requérante, que la charge de réfuter les arguments développés dans la requête incombait essentiellement à l’OHMI n’est pas pertinent, dès lors qu’il est constant que les intervenants n’ont pas simplement conclu au soutien des conclusions de l’OHMI, mais ont pleinement participé à la procédure en produisant divers mémoires et en assistant à l’audience.

21      De même, ne peuvent être considérés comme des postes de dépenses indus, au motif qu’il s’agirait d’actes qui ne seraient pas imputables à la requérante, ceux liés au certificat attestant de la qualité d’avocat du conseil des intervenants, à la lettre informant de la participation du conseil des intervenants à l’audience et au mémoire du 3 août 2005 relatif à la suspension de la procédure dans l’affaire au principal. En effet, il ressort du règlement de procédure et du dossier relatif à la procédure au principal qu’il s’agit soit d’actes indispensables aux fins de la procédure devant le Tribunal, soit d’actes dont la production a été expressément demandée par le Tribunal et qui, à ce titre, doivent également être considérés comme indispensables aux fins de la procédure. Il s’agit donc bien d’actes relevant de la notion de dépens récupérables au sens de l’article 91, sous b), du règlement de procédure.

22      Toutefois, considérant le caractère imprécis de la note d’honoraires en cause et la circonstance que le Tribunal est, de ce fait, conformément à la jurisprudence rappelée au point 19 ci-dessus, placé dans une situation d’appréciation nécessairement stricte des honoraires récupérables, le montant des dépens récupérables à ce titre devra être légèrement revu à la baisse et fixé à 6 500 euros.

23      Il y a lieu d’augmenter ce montant des frais de voyage et d’hôtel exposés par le conseil des intervenants à Luxembourg, représentant 1 036,65 euros. Il y a toutefois lieu de considérer comme excessif, comme l’indique la requérante, le montant de 197,25 euros dont le remboursement est demandé au titre des frais de déplacements et de repas, considérant l’absence de pièces justificatives, autres que la facture présentée aux intervenants par leur conseil, qui attesteraient de la réalité des dépenses encourues à cet effet. Le montant des dépens récupérables à ce titre devra donc être diminué et fixé à 100 euros.

24      Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, le Tribunal estime qu’il sera fait une juste appréciation des dépens récupérables par les intervenants au titre de la procédure devant le Tribunal en fixant leur montant à 7 636,65 euros, lequel montant tient compte de toutes les circonstances de l’affaire jusqu’au moment de l’adoption de la présente ordonnance.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

ordonne :

Le montant total des dépens à rembourser par El Corte Inglés, SA à MM.  José Matías Abril Sánchez et Pedro Ricote Saugar est fixé à 7 636,65 euros.

Fait à Luxembourg, le 28 septembre 2009.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       V. Tiili


* Langue de procédure : l’espagnol.