Language of document : ECLI:EU:T:2004:330

Arrêt du Tribunal

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)
10 novembre 2004 (1)

« Marque communautaire – Marque figurative représentant la forme d'un emballage à tortillons (forme de papillote) des bonbons – Objet de la demande – Motif absolu de refus – Article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 40/94 – Caractère distinctif acquis par l'usage – Article 7, paragraphe 3, du règlement (CE) n° 40/94 – Droit d'être entendu – Article 73, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 40/94 – Examen d'office des faits – Article 74, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 40/94 »

Dans l'affaire T-402/02,

August Storck KG, établie à Berlin (Allemagne), représentée par Mes H. Wrage-Molkenthin, T. Reher, A. Heise et I. Rohr, avocats, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par MM. B. Müller et G. Schneider, en qualité d'agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d'annulation de la décision de la deuxième chambre de recours de l'OHMI, du 18 octobre 2002 (affaire R 0256/2001-2), refusant l'enregistrement d'une marque représentant un emballage à tortillons (forme de papillote),



LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (quatrième chambre),



composé de M. H. Legal, président, Mme V. Tiili et M. M. Vilaras, juges,

greffier : Mme B. Pastor, greffier adjoint,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 27 décembre 2002,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 22 avril 2003,

à la suite de l'audience du 16 juin 2004,

rend le présent



Arrêt




Antécédents du litige

1
Le 30 mars 1998, la requérante a présenté une demande de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié.

2
La marque dont l’enregistrement a été demandé porte sur la représentation, en perspective, d’une forme d’emballage à tortillons (forme de papillote), reproduite ci-après :

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3
La requérante a qualifié sa marque de figurative et a revendiqué la couleur « marron clair (caramel) ».

4
Les produits pour lesquels l’enregistrement de la marque a été demandé relèvent de la classe 30 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que modifié, et correspondent à la description suivante : « Bonbons ».

5
Par communication du 3 août 1998, l’examinateur a informé la requérante que sa marque n’était pas susceptible d’être admise à l’enregistrement en vertu de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

6
Par lettre du 5 octobre 1998, la requérante a présenté ses observations sur les objections de l’examinateur. Après avoir qualifié la marque demandée de tridimensionnelle, la requérante a indiqué que la particularité de la forme d’emballage en cause résidait dans son éclat doré qui lui conférait le minimum de caractère distinctif requis. En tout état de cause, la marque demandée aurait acquis un caractère distinctif pour les « caramels » en raison de l’usage qui a été fait de ladite marque.

7
Par décision du 19 janvier 2001, après avoir précisé que la demande de la requérante concernait une marque figurative, l’examinateur l’a rejetée au motif que la marque demandée était dépourvue de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 et qu’elle n’avait pas acquis un caractère distinctif par l’usage pour les caramels, au sens de l’article 7, paragraphe 3, du même règlement.

8
Le 13 mars 2001, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre de l’article 59 du règlement n° 40/94, contre la décision de l’examinateur. Dans ce recours, la requérante a demandé l’annulation de la décision de l’examinateur dans son ensemble. Dans le mémoire du 18 mai 2001 exposant les motifs de son recours, la requérante a réitéré l’assertion selon laquelle la marque demandée était une marque tridimensionnelle, en précisant qu’elle combinait trois couleurs différentes, à savoir le jaune transparent, le doré brillant et le blanc. À titre subsidiaire, elle a indiqué qu’il y avait lieu de limiter la liste des produits visés par la marque déposée aux seuls « bonbons au caramel » si l’enregistrement de la marque devait être refusé pour manque de caractère distinctif intrinsèque et pour manque de caractère distinctif acquis par l’usage pour des « bonbons ».

9
Par décision du 18 octobre 2002 (ci-après la « décision attaquée »), notifiée à la requérante le 31 octobre 2002, la deuxième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours, au motif que la marque demandée n’était pas distinctive au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 et qu’elle ne pouvait pas non plus être enregistrée en application de l’article 7, paragraphe 3, du même règlement.

10
En substance, la chambre de recours a estimé que la marque demandée, quelle que soit sa nature, figurative ou tridimensionnelle, devait être refusée à l’enregistrement en vertu de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94. S’agissant, en particulier, de la couleur d’emballage en cause, la chambre de recours, après avoir rappelé que la couleur revendiquée dans la demande de marque était le « marron clair (caramel) », a affirmé qu’elle ne parvenait pas à discerner, sur la reproduction graphique de la marque déposée, les trois couleurs invoquées par la requérante dans son mémoire exposant les motifs du recours. Sur cette reproduction, la couleur apparaîtrait plutôt comme dorée ou comme comportant un ton de doré dont l’utilisation pour des emballages de bonbons serait habituelle et fréquente dans le commerce. En outre, elle a estimé que les éléments produits par la requérante ne permettaient pas de prouver que la marque demandée ait acquis un caractère distinctif pour les bonbons en général ou, notamment, pour les caramels, après l’usage qui avait été fait de ladite marque.


Procédure et conclusions des parties

11
Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 26 mai 2003, la requérante a demandé, conformément à l’article 135, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, l’autorisation de déposer un mémoire en réplique, autorisation qui n’a pas été accordée par le président de la quatrième chambre du Tribunal.

12
La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

annuler la décision attaquée ;

condamner l’OHMI aux dépens.

13
L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

rejeter le recours ;

condamner la requérante aux dépens.


Sur l’objet du litige

Arguments des parties

14
La requérante revient sur la qualification de la marque demandée en se référant tantôt à une marque figurative, tantôt à une marque tridimensionnelle.

15
Quant à la couleur revendiquée, la requérante affirme que, contrairement à ce qu’a estimé la chambre de recours au point 16 de la décision attaquée, il résulte de la représentation graphique de la marque déposée que celle-ci comprend trois couleurs. Le centre de la marque serait doré, tandis que les parties latérales, enroulées, seraient toutes deux blanches et jaune transparent. Par le contraste des matières entre le film transparent et le film opaque, la marque donnerait l’impression d’être tricolore.

16
Enfin, tout en contestant la décision attaquée dans son ensemble, la requérante reproche à la chambre de recours d’avoir refusé à tort de reconnaître le caractère enregistrable de la marque demandée et d’avoir aussi rejeté la demande de marque pour les seuls « bonbons au caramel », à la suite de la limitation de la liste des produits visés par la demande de marque, à laquelle elle aurait procédé par le mémoire exposant les motifs de son recours devant la chambre de recours de l’OHMI, si l’enregistrement de la marque devait être refusé pour manque de caractère distinctif intrinsèque pour les bonbons. En effet, l’enregistrement de la marque à l’égard des « bonbons au caramel » ne saurait, en tout état de cause, être refusé, conformément à l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94.

17
L’OHMI fait observer que la marque demandée est une marque figurative et rappelle qu’elle a été qualifiée comme telle dans la demande d’enregistrement de la requérante.

18
En ce qui concerne la couleur de la marque demandée, l’OHMI rappelle, tout d’abord, que la requérante avait revendiqué, dans sa demande, la couleur « marron clair (caramel) ». Il se réfère, ensuite, aux constatations de la chambre de recours, aux points 16 et 17 de la décision attaquée, selon lesquelles, d’une part, la couleur sur la reproduction graphique de la marque déposée apparaît plutôt comme dorée ou comme comportant un ton de doré que comme « marron clair (caramel) » et, d’autre part, la nature tricolore (jaune transparent, doré brillant et blanc) de ladite reproduction est impossible à discerner. Or, la reproduction d’une marque figurative serait plus précise que tout autre descriptif et primerait sur les descriptions éventuellement divergentes qui pourraient en être faites. Dans la mesure où la chambre de recours a manifestement fondé sa décision sur la reproduction graphique de la marque demandée, il importerait peu que l’on en caractérise la couleur comme comportant un « ton de doré », ainsi que l’a fait la chambre de recours, ou bien comme tricolore, ainsi que le suggère la requérante.

19
Quant à la limitation de la liste des produits aux seuls « bonbons au caramel », demandée subsidiairement par la requérante dans le mémoire exposant les motifs de son recours devant la chambre de recours, l’OHMI renvoie au point 28 de la décision attaquée et soutient que la dissociation du marché des bonbons de celui des caramels n’aurait aucune incidence en l’espèce, ni du point de vue de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 ni du point de vue de l’article 7, paragraphe 3, dudit règlement.

Appréciation du Tribunal

20
Compte tenu de l’argumentation divergente des parties sur certains éléments de la demande d’enregistrement de la marque en cause, il convient d’examiner, successivement, la catégorie de la marque demandée, la couleur revendiquée et les produits visés par cette marque.

Sur la catégorie de la marque demandée

21
Ainsi qu’il ressort du formulaire ad hoc de demande de marque rempli par la requérante, l’enregistrement a été demandé pour une marque figurative. Toutefois, devant l’examinateur et la chambre de recours, la requérante a qualifié la marque de tridimensionnelle. La chambre de recours, au point 23 de la décision attaquée, a considéré que, aux fins de l’appréciation du caractère distinctif intrinsèque de la marque demandée, il importait peu qu’il s’agisse d’une marque figurative ou tridimensionnelle. Selon la chambre de recours, « […] dans un cas il s’agit de la configuration d’un emballage de bonbon et, dans l’autre, de la représentation graphique d’un bonbon emballé dans un emballage normal pour bonbons […] ». Devant le Tribunal, la requérante est à nouveau revenue sur le caractère de la marque demandée (voir, point 14 ci-dessus).

22
Dans ces conditions, et dans la mesure où la requérante n’a, en tout état de cause, pas introduit une requête en modification de sa demande, au titre de l’article 44 du règlement n° 40/94 et de la règle 13 du règlement (CE) n° 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement n° 40/94 (JO L 303, p. 1), il y a lieu de considérer que la marque demandée est une marque figurative [voir, à cet égard, arrêt du Tribunal du 19 septembre 2001, Henkel/OHMI (Image d’un produit détergent), T‑30/00, Rec. p. II‑2663], constituée par la représentation d’une forme d’emballage à tortillons (forme de papillote) de produits visés par la demande de marque.

Sur la couleur revendiquée

23
Aux termes de l’article 4 du règlement n° 40/94, « [p]euvent constituer des marques communautaires tous signes susceptibles d’une représentation graphique, notamment les mots, y compris les noms de personnes, les dessins, les lettres, les chiffres, la forme du produit ou de son conditionnement, à condition que de tels signes soient propres à distinguer les produits ou les services d’une entreprise de ceux d’autres entreprises ».

24
Conformément à la règle 3, paragraphe 1, du règlement n° 2868/95, si le demandeur ne revendique pas de représentation graphique ni de couleur particulière, la marque est reproduite dans la demande en écriture standard, par exemple en lettres, en chiffres et en signes de ponctuation dactylographiés. Le paragraphe 2 de la même règle prévoit que, dans tous les cas autres que celui visé au paragraphe 1, la marque est reproduite sur une feuille séparée jointe à la demande. Enfin, conformément au paragraphe 5 de la même règle, si l’enregistrement est demandé en couleur, il en est fait mention dans la demande. Les couleurs dont la marque se compose doivent également y être indiquées. Pour la reproduction visée au paragraphe 2, il est fait usage de la reproduction en couleur de la marque.

25
En outre, il ressort de la jurisprudence qu’une représentation graphique, au sens des dispositions susvisées, doit permettre au signe d’être représenté visuellement, en particulier au moyen de figures, de lignes ou de caractères, de sorte qu’il puisse être identifié avec exactitude. Pour remplir sa fonction, la représentation graphique, au sens de l’article 4 du règlement n° 40/94, doit être claire, précise, complète par elle-même, facilement accessible, intelligible, durable et objective (voir, par analogie, arrêts de la Cour du 12 décembre 2002, Sieckmann, C‑273/00, Rec. p. I‑11737, points 46 à 55, et du 6 mai 2003, Libertel, C‑104/01, Rec. p. I‑3793, points 28 et 29).

26
Il a, ainsi, été jugé qu’un simple échantillon d’une couleur ne répond pas, en lui-même, aux exigences mentionnées au point précédent, dès lors qu’il peut s’altérer avec le temps. En revanche, l’association d’un échantillon, d’une couleur et d’une description verbale de celle-ci peut constituer une représentation graphique au sens de l’article 4 du règlement n° 40/94, à condition que la description soit claire, précise, complète par elle-même, facilement accessible, intelligible et objective. Si cette association ne remplit pas les conditions pour constituer une représentation graphique, notamment par défaut de précision ou de durabilité, cette défaillance peut, le cas échéant, être comblée par l’ajout d’une désignation de la couleur au moyen d’un code d’identification internationalement reconnu. En effet, de tels codes sont réputés être précis et stables (arrêt Libertel, précité, points 31 à 38).

27
En l’espèce, dans la partie du formulaire ad hoc réservée à l’indication de la couleur de la marque demandée, la requérante a indiqué que la couleur revendiquée était le marron clair (caramel). Se fondant sur la reproduction de la marque demandée, l’examinateur a estimé qu’elle était de couleur dorée et que les feuilles d’emballage dorées, qu’elles présentent des tons de doré ou qu’elles soient d’un doré rougeâtre, bleuâtre ou verdâtre, sont d’usage très fréquent, en particulier dans le secteur des confiseries. Devant la chambre de recours, la requérante a fait état de trois couleurs, à savoir jaune transparent, doré brillant et blanc. Après avoir rappelé que la requérante avait initialement revendiqué la couleur « marron clair (caramel) », la chambre de recours a considéré que, sur la reproduction graphique de la marque, la couleur apparaissait plutôt comme dorée ou comme comportant un ton de doré, la nature tricolore de la marque invoquée par la requérante n’étant pas discernable. La chambre de recours a ajouté qu’il n’était pas rare de rencontrer des emballages de bonbons de cette couleur et que le fait que les bonbons de la requérante étaient emballés dans un papier cellophane dans lequel était insérée une bande dorée en matière plastique n’avait aucune importance. Le résultat était selon elle identique, c’est-à-dire que les bonbons apparaissaient emballés dans un emballage doré qui n’est pas inhabituel pour les emballages de bonbons (points 14, 16 et 17 de la décision attaquée).

28
Il y a lieu de relever que, devant l’absence de description claire et précise de la couleur de la marque demandée par la requérante, la contradiction des différentes descriptions entre elles et avec la couleur apparaissant sur la reproduction graphique de la marque, l’absence de référence quelconque aux codes d’identification internationalement reconnus et à défaut d’une requête en modification de la demande visant la clarification de la description des couleurs revendiquées, conformément à l’article 44, paragraphe 2, du règlement n° 40/94, c’est à bon droit que la chambre de recours a fondé son appréciation sur la couleur prédominante apparaissant sur la reproduction graphique de la marque en cause, à savoir le doré. Par ailleurs, en réponse à une question du Tribunal, la requérante a admis, lors de l’audience, que la marque demandée était constituée d’un papier cellophane sous forme de papillote, dont la couleur prédominante était le doré.

Sur les produits visés par la marque demandée

29
Il ressort des dispositions des articles 57 à 61 du règlement n° 40/94 que les décisions des examinateurs sont susceptibles de recours devant la chambre de recours et que toute partie à une procédure ayant conduit à une décision de l’examinateur peut recourir contre cette décision pour autant que cette dernière n’a pas fait droit à ses prétentions. Aux termes de la règle 48, paragraphe 1, du règlement n° 2868/95, l’acte de recours doit comporter un certain nombre de renseignements, dont « une déclaration indiquant la décision attaquée et précisant dans quelle mesure cette décision doit être réformée ou annulée ».

30
En l’espèce, il est constant que l’examinateur a rejeté la demande de marque de la requérante en tant que marque figurative pour l’ensemble des produits visés par celle-ci, à savoir les « bonbons » relevant de la classe 30. Dans son recours du 13 mars 2001 devant la chambre de recours, la requérante a demandé l’annulation de la décision de l’examinateur dans son ensemble. Toutefois, dans son mémoire du 18 mai 2001 exposant les motifs du recours, la requérante a indiqué, à titre subsidiaire, « qu’il [convenait] de restreindre la liste des produits pour lesquels l’enregistrement de la marque [était] sollicité aux ‘bonbons au caramel’ si l’enregistrement de la marque [devait être] refusé en raison d’un manque de caractère distinctif, et ce tant inhérent qu’acquis du fait de l’utilisation de la marque, pour les ‘bonbons’ […] ».

31
La chambre de recours a considéré, au point 8 de la décision attaquée, que le recours visait, à titre principal, l’annulation de la décision de l’examinateur au motif que la marque demandée serait distinctive au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 et, subsidiairement, le caractère enregistrable de la marque, notamment pour les « caramels », en raison du caractère distinctif qu’elle aurait acquis par l’usage. Après avoir examiné les moyens du recours, la chambre de recours l’a rejeté dans son ensemble comme non fondé.

32
Dans sa requête devant le Tribunal, la requérante, tout en contestant la décision attaquée dans son ensemble, reproche à la chambre de recours d’avoir refusé à tort l’enregistrement de la marque demandée pour les seuls « bonbons au caramel » en vertu de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94, à la suite de la limitation de la liste des produits visés par la marque, avancée subsidiairement devant la chambre de recours.

33
À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 44, paragraphe 1, du règlement n° 40/94, le demandeur peut à tout moment retirer sa demande de marque communautaire ou limiter la liste de produits ou de services qu’elle contient. Ainsi, la faculté de limiter la liste de produits et de services appartient uniquement au demandeur d’une marque communautaire, qui peut, à tout moment, adresser une demande en ce sens à l’OHMI. Dans ce contexte, le retrait, entier ou partiel, d’une demande de marque communautaire ou la limitation de la liste des produits ou des services qu’elle contient doivent être réalisés de façon expresse et non conditionnelle [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 27 février 2002, Ellos/OHMI (ELLOS), T‑219/00, Rec. p. II‑753, points 60 et 61].

34
En l’espèce, ce n’est qu’à titre subsidiaire que la requérante a proposé la limitation de la liste des produits visés par la demande de marque aux « bonbons au caramel », à savoir seulement dans l’hypothèse où la chambre de recours envisagerait de rejeter cette demande pour les « bonbons ». La requérante n’a donc pas restreint la liste des produits de façon expresse et non conditionnelle, et, dès lors, la limitation en question ne saurait être prise en considération (voir, en ce sens, arrêt ELLOS, précité, point 62).

35
Par ailleurs, selon la jurisprudence, pour pouvoir être prise en considération, une limitation de la liste des produits ou des services désignés dans une demande de marque communautaire doit être réalisée selon certaines modalités particulières, sur requête en modification de la demande présentée conformément à l’article 44 du règlement n° 40/94 et à la règle 13 du règlement n° 2868/95 [arrêts du Tribunal du 9 octobre 2002, KWS Saat/OHMI (Nuance d’orange), T‑173/00, Rec. p. II‑3843, points 11 et 12 ; du 5 mars 2003, Unilever/OHMI (Tablette ovoïde), T‑194/01, Rec. p. II‑383, point 13, et du 25 novembre 2003, Oriental Kitchen/OHMI − Mou Dybfrost (KIAP MOU), T‑286/02, non encore publié au Recueil, point 30].

36
Or, ces modalités n’ont pas été respectées en l’espèce, la requérante n’ayant procédé qu’à une indication subsidiaire dans son mémoire du 18 mai 2001 quant à la limitation des produits en cause, sans présenter en ce sens de requête en modification de la demande de marque, conformément aux dispositions précitées (voir, en ce sens, arrêt Nuance d’orange, précité, point 12).

37
En tout état de cause, il résulte du point 28 de la décision attaquée que la chambre de recours a examiné la proposition de la requérante de limiter, subsidiairement, sa liste de produits aux « caramels » et a estimé qu’elle n’avait aucune incidence sur l’appréciation du caractère distinctif intrinsèque ou du caractère distinctif acquis par l’usage de la marque demandée. Selon la chambre de recours, qu’il s’agisse de bonbons ou de caramels, ses appréciations portant sur le caractère non enregistrable de la marque demandée pour les deux motifs absolus de refus susvisés ne perdent rien de leur validité.

38
Sur la base des considérations qui précèdent, le présent recours doit être interprété comme tendant à l’annulation de la décision attaquée pour violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, en ce qui concerne l’ensemble des produits visés par la marque demandée (c’est-à-dire les « bonbons »), et pour violation de l’article 7, paragraphe 3, du même règlement, en ce qui concerne lesdits produits et, notamment, les bonbons au caramel.


Sur le fond

39
À l’appui de son recours, la requérante invoque quatre moyens, tirés d’une violation, respectivement, de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de l’article 7, paragraphe 3, de l’article 74, paragraphe 1, première phrase, et de l’article 73 du règlement n° 40/94.

Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94

Arguments des parties

40
La requérante soutient que la marque demandée possède le minimum de caractère distinctif requis, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

41
Tout d’abord, l’exigence de caractère « frappant », émise par la chambre de recours au point 12 de la décision attaquée, ou de caractère particulièrement « remarquable » de la marque déposée ne répondrait à aucune nécessité. La chambre de recours aurait admis à tort que la configuration de la marque demandée serait usuelle, ne se différencierait pas de manière significative des configurations habituelles et que la couleur de l’emballage en cause serait très répandue dans le commerce. Aucun exemple ne serait cité dans la décision attaquée pour étayer ces affirmations. En revanche, la combinaison de forme et de couleur du signe déposé serait unique sur le marché et ne saurait être qualifiée d’« usuelle ». Par ailleurs, en raison de la commercialisation intensive du bonbon au caramel de la requérante, dénommé « Werther’s Original » (Werther’s Echte), la marque déposée se serait ancrée dans l’esprit des consommateurs comme l’emballage évident d’un bonbon au caramel.

42
Ensuite, la requérante fait valoir que le marché des bonbons en général et celui des bonbons au caramel en particulier se caractérisent par une très grande liberté de formes et de couleurs. La configuration concrète de la marque déposée serait particulièrement facile à retenir et relèverait d’un choix délibéré pour servir de point de repère au consommateur. Les trois couleurs de la marque déposée, que la chambre de recours, de manière incompréhensible selon la requérante, soutient n’être pas parvenue à discerner, résulteraient de la seule observation du signe en cause. Son centre serait de couleur dorée, tandis que les extrémités, formant des tortillons, seraient blanches et jaune transparent. Le contraste entre la feuille transparente et la feuille opaque ferait apparaître la marque en trois couleurs et rendrait la configuration de celle-ci inhabituelle.

43
Enfin, à l’exception du point 28 de la décision attaquée, la chambre de recours n’aurait aucunement abordé la question de la spécificité du segment particulier des « bonbons au caramel », dans lequel la pratique d’emballage différerait de celle du marché des bonbons en général, et ce malgré la proposition subsidiaire de la requérante devant la chambre de recours de limiter la liste des produits visés par la demande de marque aux caramels.

44
L’OHMI conteste l’argumentation de la requérante et soutient que la marque demandée est dépourvue de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94. En effet, tant la forme d’emballage que la couleur dorée observées sur la représentation graphique de la marque déposée seraient courantes sur le marché. Dès lors, les prétendues singularités de la marque mises en avant par la requérante ne seraient pas de nature à être perçues et mémorisées par le consommateur concerné comme une indication de l’origine commerciale du produit.

45
Ces considérations seraient à la fois valables pour le marché des bonbons en général et pour le marché des caramels en particulier. Par conséquent, ainsi que la chambre de recours l’a constaté au point 28 de la décision attaquée, la dissociation de ces deux marchés serait dépourvue de pertinence aux fins de l’appréciation du caractère distinctif de la marque en cause.

Appréciation du Tribunal

46
Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, sont refusées à l’enregistrement les « marques qui sont dépourvues de caractère distinctif ». En outre, l’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 40/94 précise que le « paragraphe 1 est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de la Communauté ».

47
Il convient de rappeler, en premier lieu, que, selon la jurisprudence, les marques visées par l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 sont, notamment, celles qui, du point de vue du public pertinent, sont communément utilisées, dans le commerce, pour la présentation des produits ou des services concernés ou à l’égard desquelles il existe, à tout le moins, des indices concrets permettant de conclure qu’elles sont susceptibles d’être utilisées de cette manière. Par ailleurs, les signes visés par cette disposition sont incapables d’exercer la fonction essentielle de la marque, à savoir celle d’identifier l’origine du produit ou du service, afin de permettre ainsi au consommateur qui acquiert le produit ou le service que la marque désigne de faire, lors d’une acquisition ultérieure, le même choix si l’expérience s’avère positive ou de faire un autre choix si elle s’avère négative [arrêts du Tribunal du 3 juillet 2003, Best Buy Concepts/OHMI (BEST BUY), T‑122/01, non encore publié au Recueil, point 20, et du 3 décembre 2003, Nestlé Waters France/OHMI (Forme d’une bouteille), T‑305/02, non encore publié au Recueil, point 28].

48
Partant, le caractère distinctif d’une marque ne peut être apprécié que, d’une part, par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement est demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent (arrêts BEST BUY, précité, point 22, et Forme d’une bouteille, précité, point 29).

49
S’agissant de la première analyse susvisée, il y a lieu de rappeler que le signe revendiqué est constitué par l’apparence de l’emballage des produits visés, à savoir la représentation d’un emballage à tortillons (forme de papillote) servant de conditionnement pour des bonbons, et non pas par la forme du produit lui-même (arrêt Forme d’une bouteille, précité, point 30).

50
En ce qui concerne le public pertinent, il convient de relever que les bonbons sont des produits de consommation courante, destinés à la consommation générale dans l’ensemble des pays de la Communauté. Il y a donc lieu d’apprécier, dans ces conditions, le caractère distinctif de la marque demandée en tenant compte de l’attente présumée d’un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé (arrêt Forme d’une bouteille, précité, point 33).

51
Il y a également lieu de rappeler que la perception des marques par le public pertinent est influencée par son niveau d’attention, qui est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause (arrêts Tablette ovoïde, précité, point 42, et Forme d’une bouteille, précité, point 34).

52
Il résulte de la décision attaquée, notamment de ses points 12, 13, 18 et 19, que la chambre de recours a examiné la marque demandée conformément aux considérations qui précèdent.

53
Il convient de relever, en deuxième lieu, que l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 ne fait aucune distinction concernant les différentes catégories de marques. Par conséquent, il n’y a pas lieu d’appliquer des critères plus sévères lors de l’appréciation du caractère distinctif des marques figuratives constituées par la représentation fidèle du produit lui-même, ou, comme c’est le cas en l’espèce, par la forme de l’emballage dudit produit, par rapport aux critères appliqués à d’autres catégories de marques (voir, en ce sens, arrêts Tablette ovoïde, précité, point 44, et Forme d’une bouteille, précité, point 35).

54
Dans ces conditions, pour apprécier si la combinaison de forme et de couleur de l’emballage en question peut être perçue par le public comme une indication d’origine, il y a lieu d’analyser l’impression d’ensemble produite par cette combinaison, ce qui n’est pas incompatible avec un examen successif des différents éléments de présentation utilisés [arrêts du Tribunal du 19 septembre 2001, Henkel/OHMI (Tablette ronde rouge et blanc), T‑337/99, Rec. p. II‑2597, point 49, et Tablette ovoïde, précité, point 54].

55
Force est de constater que la chambre de recours n’a commis aucune erreur de droit en considérant que « la configuration de la marque en cause (emballage à tortillons, couleur marron clair ou dorée) ne tranch[ait] pas fondamentalement sur les autres présentations habituelles dans le commerce » (point 14 de la décision attaquée).

56
En effet, c’est à juste titre que la chambre de recours, au point 15 de la décision attaquée, a constaté que la forme de l’emballage litigieux était « une forme d’emballage de bonbons normale et traditionnelle » et que l’on trouvait « un grand nombre de bonbons ainsi emballés sur le marché ». Il en va de même de la couleur de l’emballage en question, à savoir le marron clair (caramel), ou, ainsi qu’il ressort de la représentation graphique de la marque demandée, le doré ou le ton de doré. Ces couleurs n’ont rien d’inhabituel en elles-mêmes, et il n’est pas rare non plus de les voir utilisées pour des emballages de bonbons, comme la chambre de recours l’a pertinemment relevé au point 16 de la décision attaquée. Ainsi, c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré, au point 18 de la décision attaquée, que, en l’espèce, le consommateur moyen percevrait la marque non pas comme étant, en soi, une indication de l’origine commerciale du produit, mais comme un emballage de bonbon, ni plus ni moins, et que ces appréciations sur l’absence de caractère distinctif intrinsèque de la marque demandée demeuraient valables même si les produits visés par celle-ci devaient être les seuls « caramels » (voir point 28 de la décision attaquée).

57
Dès lors, les caractéristiques de la combinaison de forme et de couleur de la marque demandée ne sont pas suffisamment éloignées de celles des formes de base utilisées fréquemment pour l’emballage de bonbons ou de caramels et, partant, elles ne sont pas de nature à être mémorisées par le public pertinent en tant qu’indicateurs d’origine commerciale. En effet, l’emballage à tortillons (forme de papillote), dans sa couleur marron clair ou dorée, ne se différencie pas substantiellement des emballages des produits en question (bonbons, caramels), qui sont communément utilisés dans le commerce, venant ainsi naturellement à l’esprit comme une forme d’emballage typique desdits produits.

58
La référence, aux points 14 à 17 et 28 de la décision attaquée, à la pratique habituelle dans le commerce des bonbons ou des caramels, sans que des exemples concrets de cette pratique aient été fournis, ne remet pas en cause l’appréciation de la chambre de recours sur l’absence de caractère distinctif intrinsèque de la marque demandée. En effet, en considérant que la combinaison de forme et de couleur de la marque demandée n’était pas inhabituelle dans le commerce, la chambre de recours a fondé son analyse, en substance, sur des faits résultant de l’expérience pratique généralement acquise de la commercialisation de produits de consommation générale, tels que les bonbons ou les caramels, lesquels faits sont susceptibles d’être connus de toute personne et sont, notamment, connus des consommateurs de ces produits [voir, par analogie, arrêt du Tribunal du 22 juin 2004, Ruiz‑Picasso e.a./OHMI − DaimlerChrysler (PICARO), T‑185/02, non encore publié au Recueil, point 29].

59
Il convient de souligner, en troisième lieu, que, contrairement aux allégations de la requérante, le coût de réalisation de la forme d’emballage en cause ne relève pas des critères pertinents pour juger du caractère distinctif de la marque, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94. En effet, une forme dénuée de caractère distinctif, comme c’est le cas de l’emballage en l’espèce, ne saurait acquérir un tel caractère du fait du coût de sa réalisation.

60
En quatrième lieu, c’est à bon droit que la chambre de recours a évoqué, aux points 19 et 20 de la décision attaquée, le risque de monopolisation de l’emballage en question pour les bonbons, dès lors que cette analyse venait confirmer l’absence de caractère distinctif de cet emballage pour ces produits, conformément à l’intérêt général sous-tendant le motif absolu de refus fondé sur l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

61
Il convient, enfin, d’écarter l’allégation de la requérante selon laquelle la forme d’emballage en cause se serait ancrée dans l’esprit des consommateurs en tant que marque en raison de la commercialisation intensive du bonbon au caramel « Werther’s Original » sous cette forme d’emballage. En effet, à la supposer établie, une telle commercialisation ne saurait, éventuellement, être prise en considération qu’aux fins de l’appréciation du caractère distinctif de la marque demandée acquis par l’usage, et non pour apprécier le caractère distinctif intrinsèque de celle-ci.

62
Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que la marque demandée ne peut, telle qu’elle est perçue par un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, permettre d’individualiser les produits concernés et de les distinguer de ceux ayant une autre origine commerciale. Partant, elle est dépourvue de caractère distinctif par rapport à ces produits.

63
Il s’ensuit que le premier moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, doit être rejeté comme non fondé.

Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94

Arguments des parties

64
La requérante soutient que la marque demandée doit être admise à l’enregistrement du fait qu’elle a acquis, notamment pour les bonbons au caramel, un caractère distinctif par l’usage.

65
Pour constater l’usage et l’implantation de la marque, la chambre de recours aurait dû examiner la situation du marché pertinent tout comme l’histoire spécifique des emballages en général. À la lumière de l’histoire, de la situation sur le marché, des chiffres d’affaires concrets relatifs à la diffusion du produit et des résultats des sondages effectués, il s’avérerait que la marque demandée est effectivement implantée sur le marché. La chambre de recours aurait méconnu le fait que les consommateurs puissent percevoir l’emballage de façon séparée des autres marques y figurant et le considérer comme une indication d’origine.

66
À cet égard, la requérante fait valoir qu’elle utilise de manière tout à fait délibérée la marque demandée comme élément de reconnaissance de son bonbon « Werther’s Original », connu depuis des décennies, de sorte que, dans les publicités, la marque demandée est toujours affichée en grande taille et mise très nettement en évidence. En outre, le consommateur percevrait les couleurs et les formes avant de pouvoir déchiffrer avec précision une éventuelle mention écrite. Tel serait particulièrement le cas en l’espèce, étant donné que, en raison du choix des couleurs, la mention écrite sur la papillote se détacherait à peine de la couleur de la marque demandée. Seule donc serait pertinente la vision du consommateur, ainsi que l’aurait admis l’arrêt du 5 avril 2001 du Bundesgerichtshof (Allemagne), que la chambre de recours n’aurait pas pris en considération.

67
Selon la requérante, les chiffres de vente produits devant la chambre de recours sont suffisants pour établir l’usage de la marque demandée. Il n’aurait pas été nécessaire de produire des chiffres comparés pour déterminer la part de marché, notamment parce que les chiffres de vente seraient corroborés par les résultats de sondages réalisés dans différents États membres. Ces sondages feraient apparaître un degré de connaissance élevé du produit (de 59,4 à 85 % dans différents États membres de l’Union européenne). La consécration d’une marque par l’usage devrait être évaluée en fonction de son degré de connaissance et non de sa position sur le marché par rapport aux produits concurrents.

68
Enfin, la requérante se déclare prête à fournir d’autres informations, à citer des témoins et à recourir à une expertise pour établir l’usage de la marque demandée, si le Tribunal devait l’estimer pertinent.

69
L’OHMI, se référant aux critères d’appréciation du caractère distinctif d’une marque acquis par l’usage, dégagés par la jurisprudence, relève, en premier lieu, que s’il est certes vrai que les emballages de bonbons peuvent servir d’indication d’origine, à la suite de l’usage qui en a été fait, il n’en reste pas moins qu’en l’espèce les conditions requises à cet effet n’ont pu être démontrées.

70
Selon l’OHMI, c’est à juste titre que l’examinateur et la chambre de recours sont parvenus à la conclusion que les éléments de preuve soumis par la requérante n’étaient pas suffisants pour établir que la marque demandée avait acquis un caractère distinctif par l’usage.

71
D’une part, les chiffres de vente avancés par la requérante seraient insuffisants sans l’indication du volume total du marché des produits à prendre en considération ou l’évaluation des ventes d’entreprises concurrentes. En effet, dans le cas de produits de masse comme ceux de l’espèce, le critère déterminant serait la part du marché et non de simples chiffres de vente, lesquels ne suffiraient pas pour prouver que la marque est connue.

72
D’autre part, les frais publicitaires, d’un montant de 27 729 000 marks allemands (DEM), que la requérante aurait exposés en 1998 et ceux, compris entre 10 000 000 et 17 500 000 DEM environ, qui auraient été engagés lors des années 1994 à 1997 dans plusieurs États membres de l’Union européenne, ne seraient pas non plus probants. En effet, il ne serait nullement possible, au vu du tableau produit par la requérante à l’appui de cette allégation, de déterminer à quel titre les frais qu’il mentionne ont été exposés, à savoir pour le signe « Werther’s Original », pour la forme du bonbon, pour son emballage ou pour un tout autre but. En outre, ces indications ne seraient guère utiles en l’absence d’éléments permettant de se faire une idée du volume publicitaire caractérisant le marché des produits en cause.

73
Enfin, les sondages effectués dans sept États membres de l’Union européenne et en Norvège feraient référence aux signes « WERTHER’S », « Werther’s Original » ou « W.O » et ne comprendraient aucune référence à l’emballage en cause. Dès lors, la preuve que la requérante a réussi à faire connaître du public l’emballage en question n’aurait nullement été apportée. En outre, l’usage aurait dû être démontré dans tous les États membres ou régions de la Communauté où existe le motif de refus. Or, les documents présentés par la requérante ne se référeraient pas à des marchés significatifs tels que la France et l’Italie. Par ailleurs, il ne suffirait pas de prouver l’usage d’une certaine forme de produit pour que trouve à s’appliquer l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94, mais il faudrait, de surcroît, démontrer que les circonstances dudit usage sont telles que la forme en question revêt le caractère d’une marque (arrêt de la Cour du 18 juin 2002, Philips, C‑299/99, Rec. p. I‑5475, point 65).

74
En deuxième lieu, l’OHMI considère que la limitation de la liste des produits en cause aux seuls caramels, avancée à titre subsidiaire par la requérante devant la chambre de recours, ne saurait avoir d’incidence sur l’appréciation de l’acquisition par l’usage du caractère distinctif de la marque demandée.

75
En dernier lieu, la proposition de la requérante d’apporter des preuves supplémentaires pour démontrer l’usage de la marque ne saurait être acceptée. En effet, la requête devant le Tribunal porterait sur la vérification de la légalité des décisions des chambres de recours de l’OHMI au sens de l’article 63 du règlement n° 40/94, ce qui impliquerait de rejeter des pièces justificatives présentées devant le Tribunal pour la première fois sans qu’il y ait obligation de vérifier leur valeur de preuve [arrêt du Tribunal du 5 mars 2003, Alcon/OHMI − Dr. Robert Winzer Pharma (BSS), T‑237/01, Rec. p. II‑411, points 61 et 62]. Dès lors, a fortiori, le Tribunal ne pourrait demander la production de nouvelles pièces justificatives à la requérante.

Appréciation du Tribunal

76
En vertu de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94, les motifs absolus de refus visés à l’article 7, paragraphe 1, sous b) à d), de ce même règlement ne s’opposent pas à l’enregistrement d’une marque si celle-ci, pour les produits ou services pour lesquels l’enregistrement est demandé, a acquis un caractère distinctif après l’usage qui en a été fait. En effet, dans l’hypothèse visée par l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94, le fait que le signe constituant la marque en question est effectivement perçu, par le public pertinent, comme une indication de l’origine commerciale d’un produit ou d’un service est le résultat d’un effort économique du demandeur de la marque. Cette circonstance justifie d’écarter les considérations d’intérêt général sous-jacentes au paragraphe 1, sous b) à d), du même article, lesquelles exigent que les marques visées par ces dispositions puissent être librement utilisées par tous, afin d’éviter de créer un avantage concurrentiel illégitime en faveur d’un seul opérateur économique [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 2 juillet 2002, SAT.1/OHMI (SAT.2), T‑323/00, Rec. p. II‑2839, point 36, et du 29 avril 2004, Eurocermex/OHMI (Forme d’une bouteille de bière), T‑399/02, non encore publié au Recueil, point 41].

77
En premier lieu, il ressort de la jurisprudence que l’acquisition d’un caractère distinctif par l’usage de la marque exige qu’au moins une fraction significative du public pertinent identifie grâce à la marque les produits ou services concernés comme provenant d’une entreprise déterminée. Toutefois, les circonstances dans lesquelles la condition liée à l’acquisition d’un caractère distinctif par l’usage peut être regardée comme satisfaite ne sauraient être uniquement établies sur la base de données générales et abstraites, telles que des pourcentages déterminés (voir, par analogie, arrêts de la Cour du 4 mai 1999, Windsurfing Chiemsee, C‑108/97 et C‑109/97, Rec. p. I‑2779, point 52, et Philips, précité, points 61 et 62 ; arrêt Forme d’une bouteille de bière, précité, point 42).

78
En deuxième lieu, pour faire accepter l’enregistrement d’une marque en vertu de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94, le caractère distinctif acquis par l’usage d’une marque doit être démontré dans la partie de l’Union européenne où elle en était dépourvue au regard de l’article 7, paragraphe 1, sous b) à d), dudit règlement [arrêts du Tribunal du 30 mars 2000, Ford Motor/OHMI (OPTIONS), T‑91/99, Rec. p. II‑1925, point 27, et Forme d’une bouteille de bière, précité, points 43 et 47].

79
En troisième lieu, il convient de tenir compte, aux fins de l’appréciation, dans un cas d’espèce, de l’acquisition d’un caractère distinctif par l’usage, de facteurs tels que, notamment, la part de marché détenue par la marque, l’intensité, l’étendue géographique et la durée de l’usage de cette marque, l’importance des investissements faits par l’entreprise pour la promouvoir, la proportion des milieux intéressés qui identifie le produit comme provenant d’une entreprise déterminée grâce à la marque ainsi que les déclarations de chambres de commerce et d’industrie ou d’autres associations professionnelles. Si, sur la base de tels éléments, les milieux intéressés ou, à tout le moins, une fraction significative de ceux-ci, identifient grâce à la marque le produit comme provenant d’une entreprise déterminée, on doit en conclure que la condition exigée par l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94 pour l’enregistrement de la marque est remplie (arrêts Windsurfing Chiemsee, précité, points 51 et 52 ; Philips, précité, points 60 et 61, et Forme d’une bouteille de bière, précité, point 44).

80
En quatrième lieu, le caractère distinctif d’une marque, y compris celui acquis par l’usage, doit, également, être apprécié par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement de la marque est demandé et en tenant compte de la perception présumée d’un consommateur moyen de la catégorie des produits ou des services en cause normalement informé et raisonnablement attentif et avisé (voir, en ce sens, arrêt Philips, précité, points 59 et 63).

81
C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner si, dans la présente affaire, la chambre de recours a commis une erreur de droit en écartant l’argumentation de la requérante tirée de ce que la marque demandée aurait dû être admise à l’enregistrement pour les produits concernés et, notamment, pour les caramels, en vertu de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94.

82
S’agissant, tout d’abord, des arguments de la requérante fondés sur les chiffres de vente des produits concernés dans la Communauté pour la période 1994‑1998, c’est à bon droit que la chambre de recours a estimé qu’ils n’étaient pas, en l’espèce, de nature à démontrer que la marque demandée avait acquis un caractère distinctif à la suite de l’usage qui en avait été fait.

83
Au point 25 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré à suffisance de droit que les chiffres en question ne permettaient pas d’évaluer la part du marché concerné détenue par la requérante au titre de la marque demandée. En effet, malgré les renseignements concernant le nombre d’unités et de tonnes de bonbons vendus dans l’emballage en cause résultant des données en question, « une appréciation réaliste de [l]a force [de la requérante] sur le marché demeur[ait] impossible, à défaut de données sur le volume total du marché des produits à prendre en considération ou d’évaluations des ventes d’entreprises concurrentes, avec lesquelles les chiffres de la requérante [auraient pu] être mis en relation ». Dans ces conditions, c’est également à juste titre que la chambre de recours a conclu, au même point de la décision attaquée, que, à supposer même que les données chiffrées précitées aient pu permettre d’évaluer la part du marché concerné détenue par la requérante au titre de la marque demandée, elles n’auraient pas forcément prouvé que c’était « l’emballage doré à tortillons que les consommateurs concernés [percevaient] comme indication d’origine ». Cette appréciation est confirmée par le fait que les chiffres de vente en question prouvent, certes, que le bonbon au caramel « Werther’s Original » a été commercialisé par la requérante sur le marché pertinent, mais ne constituent cependant pas la preuve que la forme d’emballage en cause ait été utilisée en tant que marque pour désigner le produit concerné.

84
Ensuite, c’est également à bon droit que la chambre de recours a considéré que les frais de publicité engagés par la requérante soulevaient les mêmes problèmes que les chiffres de vente précités. Ainsi, au point 26 de la décision attaquée, la chambre de recours a pris soin de relever que les indications avancées par la requérante concernant les frais en question n’étaient guère utiles, dans la mesure où « aucun élément ne permet[tait] de se faire une idée du volume publicitaire pour le marché des produits en cause ». En outre, comme le souligne à juste titre l’OHMI, il n’est nullement possible, au vu du tableau afférent aux frais publicitaires en question, produit par la requérante, de déterminer à quel titre lesdits frais ont été exposés, à savoir pour le signe « Werther’s Original », pour la forme du produit, pour son emballage ou pour un tout autre but. Partant, ce matériel publicitaire ne saurait constituer la preuve de l’usage de la marque telle qu’elle a été demandée ni la preuve de ce que le public pertinent perçoit ladite marque comme indiquant l’origine commerciale des produits concernés (arrêt Forme d’une bouteille de bière, précité, point 51).

85
Par ailleurs, ainsi que l’a constaté la chambre de recours au même point de la décision attaquée, les frais en question étaient peu élevés « dans bon nombre d’États membres de l’Union européenne », ajoutant « que ces données [faisaient] même complètement défaut pour certains États membres ». En effet, pour aucune année de la période de référence (1994‑1998), lesdits frais ne couvrent tous les États membres de l’Union européenne.

86
À cet égard, il convient de relever que la décision attaquée ne contient aucune constatation quant à la partie de la Communauté dans laquelle la marque demandée est dépourvue de caractère distinctif. Cependant, dans le cas des marques non verbales, comme celle qui est visée en l’espèce, il y a lieu de présumer que l’appréciation de leur caractère distinctif est la même dans toute la Communauté, à moins qu’il n’existe des indices concrets en sens contraire. Dès lors qu’en l’espèce il ne ressort pas du dossier que tel soit le cas, il convient de considérer que le motif absolu de refus visé à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 40/94 existe, à l’égard de la marque demandée, dans toute la Communauté. C’est donc dans toute la Communauté que cette marque doit avoir acquis un caractère distinctif par l’usage, pour être enregistrable en vertu de l’article 7, paragraphe 3, du même règlement (arrêt Forme d’une bouteille de bière, précité, point 47 ; voir, également en ce sens, arrêt OPTIONS, précité, point 27).

87
Dans ces conditions, les frais publicitaires susvisés ne sauraient, en tout état de cause, constituer la preuve de ce que, dans toute la Communauté et pour la période 1994‑1998, le public pertinent, ou au moins une fraction significative de celui-ci, percevait la marque demandée comme indiquant l’origine commerciale des produits concernés.

88
S’agissant, enfin, des résultats des sondages soumis à l’appréciation de la chambre de recours concernant l’implantation des signes « WERTHER’S », « Werther’s Original » ou « W.O » pour les bonbons au caramel commercialisés par la requérante, la chambre de recours a indiqué à juste titre, au point 27 de la décision attaquée, que les sondages en question, réalisés dans différents États de l’Union européenne, « ne [contenaient] aucune information sur un éventuel caractère distinctif de l’emballage doré à tortillons », mais « [avaient] pour seul objet la connaissance de l’appellation ‘Werther’s Original’ ». Il convient d’ajouter, par ailleurs, que les sondages précités n’ont pas non plus été réalisés dans tous les États membres de la Communauté et que, partant, ils ne sauraient constituer, en tout état de cause, la preuve de l’implantation du signe en question en tant que marque dans toute la Communauté (voir points 78 et 86 ci-dessus).

89
Il résulte des considérations qui précèdent que la requérante n’a pas établi que la marque demandée ait acquis, dans toute la Communauté, un caractère distinctif résultant de l’usage qui en a été fait, au sens de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94, ni pour les bonbons au caramel ni pour les bonbons en général.

90
Il s’ensuit qu’il convient de rejeter également le deuxième moyen comme non fondé, sans qu’il soit nécessaire d’ordonner les mesures d’instruction demandées par la requérante.

Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’article 74, paragraphe 1, première phrase, du règlement n° 40/94

Arguments des parties

91
La requérante invoque une violation par la chambre de recours de l’article 74, paragraphe 1, première phrase, du règlement n° 40/94, en vertu duquel l’OHMI est tenu de procéder à l’examen d’office des faits. En effet, rien ne permettrait de déterminer le fondement ayant permis à la chambre de recours de procéder aux constatations factuelles formulées aux points 14 à 16 et 28 de la décision attaquée quant au caractère prétendument usuel de la configuration de la marque en cause. Par ailleurs, la requérante estime qu’il aurait fallu que l’OHMI procède à un examen supplémentaire aux fins de prouver l’implantation de la marque demandée.

92
L’OHMI soutient que le caractère usuel de la forme et de la couleur de l’emballage en question découle, ainsi qu’il ressortirait des points 14 à 16 de la décision attaquée, de l’expérience pratique. Par ailleurs, une dissociation du marché des bonbons en général de celui des caramels n’aurait aucune incidence, ni du point de vue de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 ni du point de vue de l’article 7, paragraphe 3, dudit règlement.

93
Il ajoute qu’il n’est tenu d’examiner des faits susceptibles de conférer à la marque demandée un caractère distinctif acquis par l’usage, au sens de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94, que si le demandeur les a invoqués. L’OHMI ne serait pas non plus tenu d’entreprendre lui-même d’autres examens relatifs à l’implantation de la forme d’emballage en cause [arrêt du Tribunal du 12 décembre 2002, eCopy/OHMI (ECOPY), T‑247/01, Rec. p. II‑5301, points 47 et 48].

Appréciation du Tribunal

94
La requérante fait grief à la chambre de recours d’avoir violé l’article 74, paragraphe 1, première phrase, du règlement n° 40/94, aux termes duquel, « [a]u cours de la procédure, l’[OHMI] procède à l’examen d’office des faits ». D’une part, la chambre de recours n’aurait pas étayé ses constatations portant sur le caractère « usuel » de la marque demandée, figurant aux points 14 à 16 et 28 de la décision attaquée. D’autre part, la chambre de recours aurait dû procéder à un examen supplémentaire aux fins de prouver l’usage de la marque demandée.

95
S’agissant du premier grief, il convient de le rejeter comme étant non fondé, sur la base des considérations exposées dans le cadre de l’examen du premier moyen et, notamment, aux points 55 à 58 ci-dessus.

96
Pour ce qui est du second grief, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, en ce qui concerne l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94, il n’existe, certes, pas de règle disposant que l’examen, par l’OHMI (à savoir par l’examinateur ou, le cas échéant, par la chambre de recours), est limité aux faits invoqués par les parties, contrairement à ce que prévoit l’article 74, paragraphe 1, in fine, du même règlement concernant les motifs relatifs de refus. Néanmoins, en l’absence d’une allégation du demandeur de marque relative au caractère distinctif de celle-ci acquis par l’usage, l’OHMI se trouve dans l’impossibilité matérielle de tenir compte du fait que la marque demandée a acquis un tel caractère. Dès lors, il y a lieu de considérer que, en vertu du principe ultra posse nemo obligatur (à l’impossible nul n’est obligé) et nonobstant la règle consacrée à l’article 74, paragraphe 1, première phrase, du règlement n° 40/94, selon laquelle l’OHMI « procède à l’examen d’office des faits », celui-ci n’est tenu d’examiner des faits susceptibles de conférer à la marque demandée un caractère distinctif acquis par l’usage, au sens de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94, que si le demandeur les a invoqués (arrêt ECOPY, précité, point 47).

97
En l’espèce, il est constant que la requérante a produit devant l’OHMI des éléments de preuve visant à démontrer le caractère distinctif de la marque demandée acquis par l’usage, sur lesquels la chambre de recours a fondé son appréciation. Dans ces conditions, aucune obligation supplémentaire ne pesait sur les instances de l’OHMI, et notamment pas celle d’instruire davantage le dossier sur ce point en vue de pallier l’absence de force probante des éléments de preuve fournis par la requérante. Il s’ensuit que le second grief doit être également rejeté comme non fondé ainsi que le troisième moyen dans son ensemble.

Sur le quatrième moyen, tiré de la violation de l’article 73 du règlement n° 40/94 et du droit d’être entendu

Arguments des parties

98
La requérante fait valoir qu’elle n’a pas été entendue dans la mesure nécessaire, contrairement à l’exigence posée par l’article 73 du règlement n° 40/94. Elle estime que la chambre de recours n’a pas pris en considération tous les documents qu’elle avait produits aux fins de prouver le caractère distinctif par l’usage de la marque demandée. L’offre formulée par la requérante dans sa lettre du 5 octobre 1998 (citée au point 6 ci-dessus) d’apporter, le cas échéant, des éléments supplémentaires, notamment sur l’importance de l’usage de la marque, n’aurait pas non plus été prise en compte. Enfin, la requérante propose de fournir des preuves supplémentaires pour démontrer l’implantation de la marque, si le Tribunal devait l’estimer pertinent.

99
L’OHMI rétorque qu’il ressort de la décision attaquée que la chambre de recours a examiné toutes les pièces soumises par la requérante (sondages, chiffres d’affaires, frais de publicité) et qu’elle a conclu, à juste titre, qu’elles n’étaient pas suffisantes pour démontrer l’existence du caractère distinctif de la marque demandée acquis par l’usage. Par ailleurs, l’OHMI n’aurait pas été tenu de donner suite à l’offre précitée de la requérante. Enfin, la proposition de la requérante de fournir de nouvelles preuves devant le Tribunal devrait être rejetée.

Appréciation du Tribunal

100
Selon l’article 73 du règlement n° 40/94, les décisions de l’OHMI ne peuvent être fondées que sur des motifs sur lesquels les parties ont pu prendre position.

101
En ce qui concerne, tout d’abord, l’argument de la requérante tiré de ce que la chambre de recours n’aurait pas pris en considération tous les documents produits aux fins de prouver l’usage de la marque demandée, il convient de l’écarter comme reposant sur une prémisse erronée. En effet, il ressort des points 24 à 29 de la décision attaquée que tous ces éléments ont été examinés par la chambre de recours, mais qu’ils n’ont pas été considérés comme suffisants pour démontrer le caractère distinctif par l’usage de la marque demandée. Par ailleurs, la requérante ayant produit elle-même les documents en question, elle a pu, évidemment, prendre position sur ceux-ci ainsi que sur leur pertinence.

102
Ensuite, le second grief de la requérante ne saurait non plus être retenu.

103
Il est constant que la requérante a produit devant l’examinateur une liste faisant état du volume des ventes du bonbon au caramel « Werther’s Original », exprimé en tonnes pour les années 1993 à 1997, dans plusieurs États membres de l’Union européenne (voir point 4 de la décision attaquée). L’examinateur a considéré que « [l]e chiffre d’affaires de la requérante ne permet[tait] pas d’inférer que le consommateur reconn[aissait] les bonbons à leur emballage et leur associ[ait] une seule entreprise » et que, « [à] défaut de chiffres comparatifs d’entreprises concurrentes ou de données sur le marché dans son ensemble, il [était] impossible d’apprécier les chiffres d’affaires » (voir point 5, deuxième tiret, de la décision attaquée).

104
Cependant, devant la chambre de recours, la requérante n’a produit aucun élément comparatif sur sa part de marché et celle de ses concurrents. En revanche, elle a produit des tableaux similaires sur les chiffres de vente du bonbon susvisé durant la période 1994‑1998 ainsi que d’autres éléments (sondages, frais publicitaires) qui, selon elle, démontraient l’implantation de la marque.

105
Dans ces conditions, il ne saurait être reproché aux instances de l’OHMI, et, notamment, à la chambre de recours, d’avoir fondé leur décision sur des motifs sur lesquels la requérante n’avait pas pu prendre position. Ce grief doit donc être rejeté.

106
Enfin, il convient de rejeter la demande de la requérante de fournir, le cas échéant, des preuves supplémentaires devant le Tribunal pour démontrer l’implantation de la marque demandée. À cet égard, il suffit de rappeler que, selon la jurisprudence, des éléments de preuve qui n’ont pas été produits au cours de la procédure administrative devant l’OHMI ne sauraient remettre en cause la légalité de la décision attaquée de la chambre de recours (voir arrêt Forme d’une bouteille de bière, précité, point 52, et la jurisprudence citée).

107
Par conséquent, il y a lieu de rejeter également le quatrième moyen.

108
Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, le présent recours doit être rejeté.


Sur les dépens

109
Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la partie défenderesse.


Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)
Le recours est rejeté.

2)
La requérante est condamnée aux dépens.

Legal

Tiili

Vilaras

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 10 novembre 2004.

Le greffier

Le président

H. Jung

H. Legal


1
Langue de procédure : l'allemand.