Language of document : ECLI:EU:T:2020:79

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

27 février 2020 (*)

« Procédure – Taxation des dépens »

Dans l’affaire T‑586/11 DEP,

Sal. Oppenheim jr. & Cie AG & Co. KGaA, établie à Cologne (Allemagne), représentée par Me A. Rosenow, avocat,

partie requérante,

soutenue par

République fédérale d’Allemagne,

partie intervenante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. R. Lyal, T. Maxian Rusche et Mme K. Blanck, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande de taxation des dépens à la suite de l’ordonnance du 25 octobre 2018, Oppenheim/Commission (T‑586/11, non publiée, EU:T:2018:745),

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. D. Spielmann, président, Mme O. Spineanu‑Matei (rapporteure) et M. R. Mastroianni, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Faits, procédure et conclusions des parties

1        Le 26 janvier 2011, la Commission européenne a adopté la décision 2011/527/UE concernant l’aide d’État de l’Allemagne C 7/10 (ex CP 250/09 et NN 5/10) au titre de la clause d’assainissement prévue par la loi relative à l’impôt sur les sociétés (« KStG, Sanierungsklausel ») (JO 2011, L 235, p. 26, ci-après la « décision attaquée »).

2        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 17 novembre 2011, la requérante, Sal. Oppenheim jr. & Cie AG & Co. KGaA, a introduit un recours visant à l’annulation de la décision attaquée.

3        Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 3 février 2012, la Commission a soulevé une exception d’irrecevabilité au titre de l’article 114 du règlement de procédure du Tribunal du 2 mai 1991. La requérante a déposé ses observations sur cette exception le 29 mars 2012.

4        Par acte déposé au greffe du Tribunal le 29 février 2012, la République fédérale d’Allemagne a demandé à intervenir dans la procédure au soutien des conclusions de la requérante. Par ordonnance du 2 mai 2012, le président de la huitième chambre du Tribunal a admis cette intervention. La République fédérale d’Allemagne a déposé son mémoire en intervention, limité à la recevabilité, et les autres parties ont déposé leurs observations sur celui-ci dans les délais impartis.

5        En septembre 2013, la composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, le juge rapporteur a été affecté à la neuvième chambre, à laquelle l’affaire a, par conséquent, été attribuée.

6        Par ordonnance du 17 juillet 2014, le président de la neuvième chambre a ordonné la suspension de la procédure jusqu’à la décision du Tribunal mettant fin à l’instance dans l’affaire T‑287/11, Heitkamp BauHolding/Commission, l’objet du recours dans cette affaire et celui dans l’affaire au principal étant identiques.

7        À la suite de la reprise de la procédure le 4 février 2016, le Tribunal (neuvième chambre) a, le 29 février 2016, invité les parties à présenter leurs observations quant à l’incidence, sur le litige au principal, des arrêts du 4 février 2016, GFKL Financial Services/Commission (T‑620/11, EU:T:2016:59) et Heitkamp BauHolding/Commission (T‑287/11, EU:T:2016:60).

8        Par décision du 20 juin 2016, le président de la neuvième chambre a ordonné la suspension de la procédure jusqu’aux décisions de la Cour mettant fin à l’instance dans les affaires C‑203/16 P, Andres (faillite Heitkamp BauHolding)/Commission et C‑208/16 P, Allemagne/Commission.

9        Par décision du 10 octobre 2016, l’affaire a été réattribuée à la sixième chambre et un nouveau juge rapporteur a été désigné.

10      À la suite de la reprise de la procédure le 28 juin 2018, le Tribunal (sixième chambre) a, le 6 juillet 2018, invité les parties à présenter leur observations quant à l’incidence, sur le litige au principal, des arrêts du 28 juin 2018, Andres (faillite Heitkamp BauHolding)/Commission (C‑203/16 P, EU:C:2018:505) et Allemagne/Commission (C‑208/16 P, non publié, EU:C:2018:506), dans lesquels la Cour a annulé la décision attaquée. En particulier, les parties ont été invitées à présenter leurs observations sur l’éventuel constat d’office par le Tribunal d’un non-lieu à statuer, en application de l’article 131, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal. Les parties ont présenté leurs observations dans le délai imparti.

11      Par ordonnance du 25 octobre 2018, Oppenheim/Commission (T‑586/11, non publiée, EU:T:2018:745), le Tribunal a considéré que le recours initial tendant à l’annulation de la décision attaquée était devenu sans objet et a condamné la Commission à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la requérante.

12      Par courrier du 28 janvier 2019, les représentants de la requérante ont communiqué à la Commission un état des frais supportés par la requérante. Ils ont réclamé sur le fondement de celui-ci, au titre des dépens récupérables exposés dans le cadre de la procédure ayant donné lieu à l’ordonnance du 25 octobre 2018, Oppenheim/Commission (T‑586/11, non publiée, EU:T:2018:745), un montant de 193 051,58 euros, majoré de 36 679,80 euros au titre de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA).

13      Par lettre du 22 février 2019, la Commission a rejeté la demande de la requérante et a demandé la transmission d’un nouveau décompte indiquant les dépens récupérables limités aux frais réels de rédaction des observations écrites et des recherches correspondantes ainsi qu’aux frais de déplacement d’une personne, dans la mesure du raisonnable. Elle a proposé de négocier un nombre d’heures raisonnable sur la base d’un décompte révisé et de rémunérer ces heures.

14      Par courrier du 8 mars 2019, les représentants de la requérante ont proposé de fixer le montant des dépens récupérables à 146 454,36 euros, majoré de 27 826,33 euros au titre de la TVA.

15      Le 10 mai 2019, lors d’une conversation téléphonique entre des représentants de la requérante et de la Commission, il a été indiqué que cette dernière considérait généralement qu’un montant de 30 000 euros pour une « procédure totalement menée à son terme », comprenant plusieurs échanges de mémoires et une audience, était la somme maximale des frais indispensables récupérables. Dans la mesure où, dans la procédure de l’affaire au principal, il n’y avait pas eu d’audience et il n’y avait eu, outre les observations sur l’exception d’irrecevabilité, qu’un seul « véritable » échange de mémoires, la Commission a considéré que seul un montant « clairement inférieur à 30 000 euros » n’était pas excessif.

16      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 16 juillet 2019, en application de l’article 170, paragraphe 1, du règlement de procédure, la requérante a introduit la présente demande de taxation des dépens, par laquelle elle conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        fixer le montant des dépens récupérables dans l’affaire au principal à 146 454,36 euros, majoré de 27 826,33 euros au titre de la TVA, et celui des dépens récupérables relatifs à la présente procédure de taxation à 3 000 euros, majoré de 570 euros au titre de la TVA ;

–        lui délivrer une expédition de l’ordonnance en cause aux fins d’exécution.

17      Dans le cadre de ses observations du 9 septembre 2019 sur la demande de taxation des dépens, la Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        fixer le montant des dépens récupérables de la requérante dans l’affaire au principal à 20 000 euros ;

–        fixer le montant des dépens récupérables de la requérante dans la présente procédure de taxation à 1 000 euros ;

–        considérer la TVA comme étant non récupérable en raison de l’absence de preuves détaillées d’une estimation correcte.

 En droit

18      Aux termes de l’article 170, paragraphe 3, du règlement de procédure, s’il y a contestation sur les dépens récupérables, le Tribunal statue par voie d’ordonnance non susceptible de recours à la demande de la partie intéressée, après avoir mis la partie concernée par la demande en mesure de présenter ses observations.

19      Selon l’article 140, sous b), du règlement de procédure, sont considérés comme des dépens récupérables les frais indispensables exposés par les parties aux fins de la procédure, notamment les frais de déplacement et de séjour et la rémunération d’un agent, d’un conseil ou d’un avocat. Il découle de cette disposition que les dépens récupérables sont limités, d’une part, à ceux exposés aux fins de la procédure devant le Tribunal et, d’autre part, à ceux qui ont été indispensables à ces fins [ordonnance du 26 janvier 2017, Nürburgring/EUIPO – Biedermann (Nordschleife), T‑181/14 DEP, EU:T:2017:41, point 9].

20      S’agissant des honoraires d’avocats, selon une jurisprudence constante, le juge de l’Union européenne n’est pas habilité à taxer les honoraires dus par les parties à leurs propres avocats, mais à déterminer le montant à concurrence duquel ils peuvent être récupérés auprès de la partie condamnée aux dépens. En statuant sur la demande de taxation des dépens, le Tribunal n’a pas à prendre en considération un tarif national fixant les honoraires des avocats, ni un éventuel accord conclu à cet égard entre la partie intéressée et ses agents ou conseils [voir ordonnances du 8 novembre 1996, Stahlwerke Peine-Salzgitter/Commission, T‑120/89 (92), EU:T:1996:161, point 27 et jurisprudence citée ; du 10 janvier 2002, Starway/Conseil, T‑80/97 DEP, EU:T:2002:1, point 26 et jurisprudence citée, et du 26 janvier 2017, Nordschleife, T‑181/14 DEP, EU:T:2017:41, point 10 et jurisprudence citée].

21      En outre, à défaut de dispositions de nature tarifaire, le Tribunal doit apprécier librement les données de la cause, en tenant compte de l’objet et de la nature du litige, de son importance sous l’angle du droit de l’Union ainsi que des difficultés de la cause, de l’ampleur du travail que la procédure contentieuse a pu causer aux agents ou aux conseils intervenus et des intérêts économiques que le litige a représentés pour les parties (voir ordonnances du 10 janvier 2002, Starway/Conseil, T‑80/97 DEP, EU:T:2002:1, point 27 et jurisprudence citée, et du 26 janvier 2017, Nordschleife, T‑181/14 DEP, EU:T:2017:41, point 11 et jurisprudence citée).

22      Enfin, il y lieu de relever que, lorsqu’une personne physique ou morale est assujettie à la TVA, elle a le droit de récupérer auprès des autorités fiscales la TVA payée sur les biens et les services qu’elle achète. La TVA ne représente donc pas pour elle une dépense, de sorte que les montants acquittés au titre de cette taxe ne doivent pas être pris en compte aux fins du calcul des dépens récupérables. Partant, le montant réclamé au titre de la TVA est considéré comme des dépens récupérables seulement si la personne physique ou morale qui réclame ce montant établit qu’elle n’est pas assujettie à la TVA (ordonnance du 26 janvier 2017, Nordschleife, T‑181/14 DEP, EU:T:2017:41, point 12).

23      C’est en fonction de ces éléments qu’il convient d’apprécier le montant des dépens récupérables en l’espèce.

24      La requérante demande au Tribunal de fixer le montant total des dépens récupérables à 149 454,36 euros, majoré de 28 396,33 euros au titre de la TVA. Ce montant correspondrait aux frais afférents, d’une part, à la procédure ayant donné lieu à l’ordonnance du 25 octobre 2018, Oppenheim/Commission (T‑586/11, non publiée, EU:T:2018:745), évalués à 146 454,36 euros, majorés de 27 826,33 euros au titre de TVA, et, d’autre part, à la présente procédure de taxation, évalués à 3 000 euros, majorés de 570 euros au titre de la TVA.

25      La Commission estime, en substance, que le montant total des dépens récupérables de 149 454,36 euros demandé par la requérante n’est pas justifié et sollicite qu’il soit fixé à 21 000 euros, à savoir 20 000 euros au titre de procédure de l’affaire au principal, et 1 000 euros au titre de la présente procédure de taxation. Elle allègue en outre que les éléments de preuve fournis par la requérante n’indiquent pas que toutes ses opérations ne sont pas sujettes au droit à déduction de la TVA qui lui a été facturée et soutient que cette taxe doit être considérée comme étant non récupérable en raison de l’absence de preuves détaillées d’une estimation correcte.

 Sur le caractère récupérable de la TVA

26      Il doit être constaté que, s’agissant du caractère récupérable de la TVA, la requérante fait valoir que, en sa qualité d’établissement financier, elle effectue principalement des opérations qui sont exonérées de TVA en vertu de l’article 4, sous 8, de la loi sur la taxe sur le chiffre d’affaires (Umsatzsteuergesetz ou UStG) et de l’article 135, sous b) à g), de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (JO 2006, L 347, p. 1, ci-après la « directive TVA »). Elle prétend que la question de l’applicabilité de la clause d’assainissement avait un lien direct avec l’acquisition de parts exonérées de TVA et que, dès lors, elle ne peut pas bénéficier de la déduction de la TVA qui lui a été facturée au titre de l’article 15, paragraphe 2, première phrase, sous 1, de l’UStG et de l’article 168 de la directive TVA. Partant, cette TVA serait en principe aussi remboursable.

27      La Commission reconnaît que la requérante, en tant que banque, effectue la plupart des opérations exonérées de TVA en vertu de l’article 4, sous 8, de l’UStG et de l’article 135, sous b) à g), de la directive TVA. Elle soutient que, néanmoins, en vertu de l’article 15, paragraphe 4, de l’UStG, il incombe à l’entreprise concernée de procéder à une estimation raisonnable des montants qui ne peuvent pas être déduits. Or, les éléments de preuve fournis par la requérante n’indiqueraient pas que toutes ses opérations ne sont pas sujettes au droit à déduction de la TVA qui lui a été facturée.

28      À cet égard, il convient de relever que les prestations de service des établissements de crédit sont, dans leur plus grande partie, exonérées de TVA en vertu de l’article 135, sous b) à g), de la directive TVA et, en droit allemand, de l’article 4, sous 8, de l’UStG. La déduction de la taxe d’amont n’est ainsi admise, conformément aux dispositions nationales mettant en œuvre les articles 168, 173 et 174 de la directive TVA, que pour la part des biens ou services acquis par un établissement de crédit qui est censée correspondre à des activités non exonérées ou à certaines opérations transfrontalières. Conformément à l’article 15, paragraphe 4, de l’UStG, il incombe à l’entreprise concernée de procéder à une estimation raisonnable des montants qui ne peuvent pas être déduits (voir, par analogie, ordonnance du 19 décembre 2006, WestLB/Commission, T‑228/99 DEP, non publiée, EU:T:2006:405, point 109).

29      Or, en l’espèce, une estimation des montants qui ne peuvent pas être déduits fait défaut et il n’appartient pas au Tribunal de procéder à une telle estimation. De plus, si la requérante allègue que l’applicabilité de la clause d’assainissement avait un lien direct avec l’acquisition de parts exonérées de TVA et qu’il convient dès lors de considérer que la TVA qui lui a été facturée n’est pas déductible, il convient de constater qu’elle ne fournit aucun élément probant à cet égard. Dès lors, il doit être considéré qu’elle n’a pas établi que les services juridiques ayant engendré les frais en cause correspondent à des activités exonérées. Dans ces circonstances, le montant réclamé au titre de la TVA sur les frais exposés au titre de la procédure principale et de la présente procédure ne peut pas être considéré comme des dépens récupérables (voir, par analogie, ordonnance du 26 janvier 2017, Nordschleife, T‑181/14 DEP, EU:T:2017:41, point 14). Partant, seront pris en considération les montants hors TVA.

 Sur les dépens exposés au titre de la procédure de l’affaire au principal

30      La requérante demande la somme totale de 146 454,36 euros, correspondant à 539 heures de travail que ses avocats et ses conseillers fiscaux auraient consacrées aux tâches relatives à l’affaire au principal et facturées à un tarif horaire moyen pondéré de 271 euros. Elle fait valoir que le temps considérable qui a été nécessaire résulte de l’importance de l’affaire pour le droit de l’Union, de l’extrême complexité des questions de droit soulevées et de l’importance économique de l’affaire. Il aurait été également indispensable de recourir à plusieurs avocats et conseillers fiscaux spécialisés et expérimentés.

 Sur l’objet, la nature et l’importance du litige sous l’angle du droit de l’Union et sur les difficultés de la cause

31      S’agissant, en premier lieu, de l’objet et de la nature du litige dans l’affaire au principal ayant donné lieu à l’ordonnance du 25 octobre 2018, Oppenheim/Commission (T‑586/11, non publiée, EU:T:2018:745), il y a lieu de rappeler que cette affaire consistait en un recours visant à l’annulation de la décision attaquée dans laquelle la Commission avait qualifié la clause d’assainissement prévue par la loi relative à l’impôt sur les sociétés (« KStG, Sanierungsklausel ») d’aide d’État. La Commission avait en outre examiné si la mesure pouvait être considérée comme étant compatible avec le marché intérieur et avait conclu que les aides en faveur de certains bénéficiaires pouvaient être autorisées sous la forme d’un montant d’aide limité compatible avec le marché intérieur, dans la mesure où elles remplissaient toutes les conditions d’un régime d’aides allemand qu’elle avait approuvé au sens du cadre communautaire temporaire pour les aides d’État destinées à favoriser l’accès au financement dans le contexte de la crise économique et financière actuelle (JO 2009, C 83, p. 1). En revanche, elle avait exclu que la clause d’assainissement fût compatible avec le marché intérieur sur le fondement des lignes directrices concernant les aides d’État au sauvetage et à la restructuration d’entreprises en difficulté, des lignes directrices concernant les aides d’État à finalité régionale pour la période 2007‑2013 (JO 2006, C 54, p. 13) et des lignes directrices concernant les aides d’État à la protection de l’environnement (JO 2008, C 82, p. 1) ainsi qu’au regard de l’article 107, paragraphe 3, TFUE. Enfin, elle avait enjoint à la République fédérale d’Allemagne de prendre toutes les mesures nécessaires pour récupérer l’aide octroyée illégalement auprès des bénéficiaires.

32      S’agissant, en second lieu, de l’importance du litige sous l’angle du droit de l’Union et des difficultés de la cause, l’affaire revêtait une importance certaine sous l’angle du droit de l’Union concernant deux aspects.

33      Le premier aspect était d’ordre procédural et portait sur les exigences relatives à la qualité pour agir des particuliers définies à l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, et plus particulièrement sur l’affectation individuelle de la requérante par la décision attaquée au sens de la jurisprudence découlant de l’arrêt du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission (25/62, EU:C:1963:17), ce que la Commission avait contesté en soulevant une exception d’irrecevabilité. Dans ce cadre, la question était celle de savoir si, dans le contexte de l’adoption de mesures fiscales, lorsqu’est en cause une décision de la Commission déclarant un régime d’aides incompatible avec le marché intérieur, le seul critère pertinent afin d’apprécier si un requérant est individuellement concerné, au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, par une telle décision, réside dans le fait de savoir si ce requérant est un bénéficiaire effectif ou un bénéficiaire potentiel d’une aide octroyée au titre de ce régime.

34      Le second aspect concernait le fond du litige et portait notamment sur l’un des éléments constitutifs de la notion d’« aide d’État », à savoir le caractère sélectif de la mesure en cause. Il s’agissait ainsi de déterminer la manière selon laquelle la notion de sélectivité devait être interprétée dans le contexte spécifique des mesures de fiscalité directe. En effet, l’examen de la condition relative à la sélectivité implique, en principe, de déterminer, dans un premier temps, le cadre de référence dans lequel s’inscrit la mesure concernée, cette détermination revêtant une importance accrue dans le cas de mesures fiscales, puisque l’existence même d’un avantage ne peut être établie que par rapport à une imposition dite « normale ». Dans la décision attaquée, la Commission avait qualifié la règle de la mise en non-valeur des pertes de « cadre de référence » et avait considéré la clause d’assainissement dérogeant à cette règle comme étant sélective. Dans la requête, par les trois premiers des cinq moyens soulevés, la requérante avait soutenu que la clause d’assainissement ne conférait aucun avantage sélectif et avait, en particulier, dans le cadre du premier moyen, contesté la définition du cadre de référence dans la décision attaquée.

35      Par conséquent, il y a lieu de reconnaître que les questions soulevées concernant tant la recevabilité du recours que le fond de celui-ci étaient importantes du point de vue du droit des aides d’État de l’Union et qu’elles pouvaient être qualifiées de difficiles sur le plan juridique. Néanmoins, la difficulté du litige ne saurait être considérée comme exceptionnelle, ni sur le plan des faits ni sur le plan juridique.

 Sur l’intérêt économique du litige pour la requérante

36      S’agissant de l’intérêt économique du litige pour la requérante, il doit être relevé qu’elle allègue que ledit litige revêtait une importance économique considérable à son égard, car il aurait porté sur l’exclusion, du fait de la décision attaquée, d’un report de pertes d’un montant d’environ 940 millions d’euros, à savoir environ 575 millions d’euros aux fins de l’impôt sur les sociétés et environ 365 millions d’euros aux fins de la taxe professionnelle.

37      Ainsi que la Commission le soutient, elle avait fait valoir dans l’exception d’irrecevabilité que la requérante n’avait apporté aucun élément de preuve à l’appui des chiffres mentionnés dans la requête et au point 36 ci-dessus. Cependant, dans ses observations sur ladite exception, la requérante avait cité un extrait de la lettre du Finanzamt Köln-Mitte (administration fiscale de Cologne-centre, Allemagne) du 26 mars 2012, qu’elle avait reçue après avoir fait valoir des pertes dans sa déclaration à l’impôt sur les sociétés pour l’année 2009. Dans cette lettre, l’administration fiscale de Cologne-centre avait mentionné des pertes en faveur de la requérante d’un montant de près de 579 millions d’euros qui auraient dû être évaluées, en substance, si la Commission n’avait pas adopté la décision attaquée. Partant, même en prenant en compte ce seul montant, il convient de constater que le litige revêtait une importance économique significative pour la requérante.

 Sur l’ampleur du travail causé par la procédure principale et le caractère indispensable du nombre total d’heures de travail effectuées et sur la rétribution horaire appropriée

38      S’agissant de l’ampleur du travail que la procédure principale a pu engendrer pour les représentants de la requérante, il importe de rappeler qu’il appartient au juge de tenir compte principalement du nombre total d’heures de travail pouvant apparaître comme objectivement indispensables aux fins de la procédure devant le Tribunal. À cet égard, la possibilité pour le juge de l’Union d’apprécier la valeur du travail effectué dépend de la précision des informations fournies (voir ordonnance du 26 janvier 2017, Nordschleife, T‑181/14 DEP, EU:T:2017:41, point 19 et jurisprudence citée).

39      Il convient d’ajouter que l’appréciation de l’ampleur du travail objectivement indispensable implique, au préalable, l’appréciation du taux horaire approprié. En effet, selon la jurisprudence, la prise en compte d’un niveau élevé de rémunération des avocats de la partie concernée doit avoir pour contrepartie une évaluation nécessairement stricte du nombre total d’heures de travail indispensables aux fins de la procédure contentieuse. En effet, un tel niveau peut être considéré comme approprié seulement pour rémunérer les services d’un professionnel particulièrement expérimenté (voir, en ce sens, ordonnance du 19 juin 2018, HP/Commission et eu-LISA, T‑596/16 DEP, non publiée, EU:T:2018:374, point 39 et jurisprudence citée).

40      En outre, en l’absence, dans l’état actuel du droit de l’Union, de barème à cet égard, ce n’est que dans l’hypothèse où le taux horaire moyen facturé apparaît manifestement excessif que le juge de l’Union peut s’en écarter et fixer ex æquo et bono le montant des honoraires d’avocat récupérables (ordonnance du 4 juillet 2017, AESA/Heli-Flight, C‑61/15 P‑DEP, non publiée, EU:C:2017:530, point 16).

41      Or, le taux horaire moyen de 271 euros indiqué par la requérante n’apparaît pas manifestement excessif au regard des circonstances de l’espèce exposées aux points 31 à 37 ci-dessus. Dans ces conditions, il n’y a pas lieu, pour le Tribunal, de s’en départir.

42      Concernant le nombre d’heures de travail que la requérante considère comme ayant été indispensables aux fins de la procédure de l’affaire au principal, elle demande le remboursement 539 heures de travail se décomposant ainsi :

–        premièrement, 279 heures de travail pour la préparation de la requête et de ses annexes ;

–        deuxièmement, 196 heures de travail pour la rédaction des observations sur l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission ;

–        troisièmement, 64 heures de travail pour la rédaction des observations sur la première suspension du 11 juin 2014, de la réponse aux questions écrites du Tribunal à la suite de la première reprise de la procédure du 17 mars 2016, des observations sur la seconde suspension du 14 juin 2016 ainsi que de la réponse aux questions écrites du Tribunal à la suite de la seconde reprise de la procédure du 20 juillet 2018.

43      La requérante soutient que le nombre d’heures de travail consacrées par ses conseils aux fins de la défense de ses intérêts est entièrement justifié compte tenu de ses explications quant à la complexité et à l’importance pour le droit de l’Union des questions juridiques soulevées ainsi qu’eu égard à l’intérêt financier considérable du litige pour elle-même.

44      La Commission conteste le caractère indispensable du nombre total d’heures de travail indiquées par la requérante ainsi que ses considérations relatives à la durée de la procédure de l’affaire au principal, le point culminant de l’activité des représentants de la requérante ayant clairement résidé dans la première année de cette procédure. Elle estime qu’un total de 80 heures de travail est approprié, à savoir 40 heures pour la préparation de la requête, 30 heures pour la préparation des observations sur l’exception d’irrecevabilité et 10 heures pour la préparation des quatre autres mémoires et réponses dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure.

45      À titre liminaire, il importe d’observer que le fait que la requérante a produit un relevé détaillé des heures de travail effectuées par ses conseils, pour utile qu’il soit en vue d’apprécier la nature et l’ampleur du travail fourni, ne suffit pas, en tant que tel, pour démontrer que l’ensemble des heures de travail indiquées étaient objectivement indispensables (voir, en ce sens, ordonnance du 8 octobre 2008, CDA Datenträger Albrechts/Commission, T‑324/00 DEP, non publiée, EU:T:2008:413, point 90 et jurisprudence citée).

46      En premier lieu, concernant les heures de travail relatives, d’une part, à la requête, laquelle consistait en un document de 36 pages, dont deux pages étaient consacrées à la liste des annexes, et celle de ses annexes (86 pages) et, d’autre part, aux observations sur l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission, constituée d’un document de 17 pages, dont une page comportait la liste des annexes (huit pages), il y a lieu de considérer que la difficulté des questions juridiques soulevées et l’intérêt économique du litige justifient que les conseils de la requérante y aient consacré un travail important.

47      Toutefois, les explications fournies par la requérante dans la demande de taxation des dépens ne permettent pas au Tribunal de considérer comme objectivement indispensable aux fins de la procédure devant lui le coût correspondant à l’ensemble des heures de travail de ses conseils dont elle fait état.

48      En effet, premièrement, l’affaire au principal soulevait des difficultés importantes du point de vue juridique (voir point 35 ci-dessus) et nécessitaient certes pour les conseils de la requérante un travail intense et diligent d’analyse et de préparation des écritures.

49      Cependant, il ressort des explications de la requérante ainsi que du relevé détaillé des heures de travail effectuées par ses conseils qu’elle a produit qu’un certain nombre d’heures de travail a été consacré à l’analyse de la jurisprudence et à la lecture d’articles. Or, même si lesdits conseils pouvaient avoir le besoin d’analyser la jurisprudence ou de lire des articles de doctrine, le volume d’heures qu’ils ont consacré à ces tâches, tel qu’il ressort du relevé détaillé des heures de travail produit par la requérante, apparaît excessif, compte-tenu, en particulier, du taux horaire retenu en l’espèce, lequel est approprié pour rémunérer les services d’un professionnel particulièrement expérimenté.

50      Deuxièmement, la requérante fait valoir que, bien que le nombre d’avocats impliqués n’ait pas d’importance, elle a, afin de tenir compte de la jurisprudence, renoncé à prendre en considération les frais exposés pour quatre avocats dans le calcul des frais indispensables. Les frais exposés inclus dans le montant demandé se répartiraient dès lors entre les activités de seulement sept avocats et conseillers fiscaux, ce qui ne serait pas excessif eu égard à la longueur de la procédure, à savoir près de huit ans, depuis l’adoption de la décision attaquée.

51      À cet égard, il doit être relevé, à l’instar de la Commission, que moins de sept ans, et non près de huit ans, se sont écoulés entre la publication de la décision attaquée de la Commission du 10 septembre 2011, pertinente pour l’introduction du recours, et les dernières observations de la requérante dans la procédure de l’affaire au principal du 20 juillet 2018. En outre, en raison des deux suspensions de ladite procédure, les heures de travail consacrées à la rédaction de la requête et des observations sur l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission représentent 475 des 539 heures de travail indiquées par la requérante.

52      En outre, il y a lieu de rappeler que, si, en principe, la rémunération d’un seul agent, conseil ou avocat est recouvrable, il se peut que, suivant les caractéristiques propres à chaque affaire, au premier rang desquelles figure sa complexité, la rémunération de plusieurs avocats puisse être considérée comme entrant dans la notion de « frais indispensables » au sens de l’article 140, sous b), du règlement de procédure (voir ordonnance du 6 mars 2017, Hostel Tourist World/EUIPO – WRI Nominees (HostelTouristWorld.com), T‑566/13 DEP, non publiée, EU:T:2017:158, point 28 et jurisprudence citée).

53      S’il est loisible à une partie de confier la défense de ses intérêts à plusieurs conseils, il appartient au juge de l’Union de tenir compte principalement du nombre total d’heures de travail pouvant apparaître comme objectivement indispensables aux fins de la procédure contentieuse, indépendamment du nombre d’avocats entre lesquels les prestations effectuées ont pu être réparties (voir ordonnance du 6 mars 2017, HostelTouristWorld.com, T‑566/13 DEP, non publiée, EU:T:2017:158, point 27 et jurisprudence citée).

54      Ainsi, il incombe au Tribunal d’examiner la mesure dans laquelle les prestations effectuées par l’ensemble des conseils concernés étaient nécessaires pour le déroulement de la procédure judiciaire et de s’assurer que l’engagement de deux catégories de conseil n’a pas entraîné une duplication inutile des frais (voir, en ce sens, ordonnance du 6 mars 2017, HostelTouristWorld.com, T‑566/13 DEP, non publiée, EU:T:2017:158, point 26 et jurisprudence citée).

55      Or, il ressort du relevé détaillé des heures de travail produit par la requérante que plusieurs de ses conseils ont accompli des tâches similaires en vue de la préparation et de la rédaction de la requête et des observations sur l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission.

56      Troisièmement, s’agissant plus particulièrement des heures de travail relatives à ses observations sur l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission, la requérante précise qu’elle a été rédigée par un associé, mais à un taux moyen de 110 euros, de sorte que le temps de travail que la Commission a jugé supérieur à la moyenne dans la lettre du 22 février 2019 n’a finalement pas entraîné des frais plus élevés que nécessaire. À cet égard, il doit néanmoins être relevé que, aux fins de la demande de taxation, la requérante a appliqué un taux horaire moyen pondéré de 271 euros. Partant, il convient de mettre en corrélation ce taux et le nombre d’heures consacrées à la rédaction desdites observations dont le remboursement est demandé par la requérante.

57      Or, il convient d’observer à cet égard que, comme la requérante le souligne, elle avait dans la requête exposé une argumentation selon laquelle elle disposait de la qualité pour agir. Il y a lieu de constater que, dans ses observations sur l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission, elle n’a fait que développer cette argumentation en répondant aux arguments de la Commission.

58      Partant, le Tribunal considère approprié de fixer le total du temps de travail des conseils de la requérante objectivement indispensable aux fins de préparation et de rédaction, d’une part, de la requête et, d’autre part, des observations sur l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission à, respectivement 120 heures et 50 heures.

59      En second lieu, concernant les heures de travail relatives aux observations sur la première suspension du 11 juin 2014, de la réponse aux questions écrites du Tribunal à la suite de la première reprise de la procédure du 17 mars 2016, des observations sur la seconde suspension du 14 juin 2016 ainsi que de la réponse aux questions écrites du Tribunal à la suite de la seconde reprise de la procédure du 20 juillet 2018, il convient de relever qu’aucune des questions du Tribunal adressées à la requérante ne soulevait de problèmes complexes, ni sur le plan factuel ni sur le plan juridique, et ne justifiait un temps de travail important pour un professionnel particulièrement expérimenté.

60      La requérante fait certes valoir que la rédaction des observations concernant les suspensions envisagées de la procédure de l’affaire au principal ainsi que l’incidence des décisions dans les affaires pilotes nécessitait impérativement la connaissance exacte des faits de ces affaires et l’analyse sérieuse des motifs de ces décisions. Néanmoins, d’une part, les trois premiers des quatre documents cités au point 59 ci-dessus ont été signés par le même avocat, qui, selon le relevé détaillé des heures de travail produit par la requérante, avait contribué à l’élaboration de la requête et des observations de la requérante sur l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission. D’autre part, le quatrième document a été signé par un avocat ayant participé aux travaux de préparation des quatre documents cités au point 59 ci-dessus. Enfin, un conseil de la requérante a pris part à l’élaboration de l’ensemble des documents cités au présent point. Partant, lors de la préparation et de la rédaction des quatre documents cités au point 59 ci-dessus, les conseils de la requérante disposaient déjà d’une connaissance étendue du litige leur permettant d’appréhender aisément les faits des affaires pilotes et le contenu des décisions du Tribunal et de la Cour dans ces affaires. En outre, l’argument de la requérante relatif à la durée de la procédure est dépourvu de pertinence en raison des deux périodes de suspension de la procédure de l’affaire au principal (voir point 51 ci-dessus) et, surtout, du fait que deux conseils de la requérante sont intervenus tout au long de cette procédure.

61      Par ailleurs, l’analyse des motifs des arrêts du 4 février 2016, GFKL Financial Services/Commission (T‑620/11, EU:T:2016:59) et Heitkamp BauHolding/Commission (T‑287/11, EU:T:2016:60), ainsi que des arrêts du 28 juin 2018, Andres (faillite Heitkamp BauHolding)/Commission (C‑203/16 P, EU:C:2018:505) et Allemagne/Commission (C‑208/16 P, non publié, EU:C:2018:506), ne pouvaient nécessiter, pour un professionnel particulièrement expérimenté, 34 heures de travail, dont 9,3 heures pour l’élaboration de la réponse aux questions écrites du Tribunal en vue d’un non-lieu à statuer après l’annulation de la décision attaquée par la Cour (voir point 10 ci-dessus), ainsi que cela ressort du relevé détaillé des heures de travail produit par la requérante.

62      Par conséquent, le nombre total de 64 heures de travail destinées à l’élaboration des quatre documents cités au point 59 ci-dessus est supérieur au temps pouvant être considéré comme objectivement indispensable, étant donné qu’il ne tient pas suffisamment compte des effets de synergie entre l’élaboration de ces quatre documents et de la requête ainsi que des observations sur l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission. En outre, conformément à la jurisprudence rappelée aux points 52 et 54 ci-dessus, le fait que le travail de préparation des quatre documents susmentionnés a été réparti entre plusieurs conseils implique nécessairement une certaine duplication des efforts entrepris. Partant, le Tribunal ne saurait reconnaître la totalité des heures de travail réclamées.

63      Dans ces circonstances, le Tribunal considère approprié de fixer le total du temps de travail des conseils de la requérante objectivement indispensable aux fins de préparation et de rédaction des quatre documents cités au point 59 ci-dessus à 22 heures de travail.

64      Il résulte de tout ce qui précède que le total du temps de travail des conseils de la requérante pouvant être considéré comme objectivement indispensable aux fins de la représentation de celle-ci durant la procédure de l’affaire au principal s’élève à 192 heures. Il sera dès lors fait une juste appréciation des dépens récupérables en fixant leur montant à 52 032 euros.

65      À cet égard, la requérante soutenant que le fait que les arrêts du 28 juin 2018, Andres (faillite Heitkamp BauHolding)/Commission (C‑203/16 P, EU:C:2018:505) et Allemagne/Commission (C‑208/16 P, non publié, EU:C:2018:506), ayant entraîné l’annulation de la décision attaquée, ont été rendus dans des procédures dans les affaires pilotes ne justifie pas une appréciation différente de ses frais indispensables, il y a lieu de relever que les frais indispensables pris en compte au point 64 ci-dessus sont ceux nécessaires à la rédaction des actes qu’elle a mentionnés dans sa requête en taxation, à savoir les documents cités au point 59 ci-dessus. Le temps de travail indispensable aux fins de la représentation de la requérante durant la procédure de l’affaire au principal aurait pu être plus élevé s’il y avait eu un second échange de mémoires avec la Commission ou une audience requérant la représentation de la requérante, ce qui ne s’est pas produit en raison de la suspension de la procédure de l’affaire au principal du fait des procédures dans les affaires pilotes.

 Sur les dépens exposés au titre de la présente procédure

66      La requérante demande le remboursement, au titre des frais indispensables occasionnés par la présente procédure, de 3 000 euros pour dix heures de travail.

67      La Commission admet que des dépens supplémentaires ont été encourus pour mener à bien la présente procédure, mais conteste le nombre d’heures de travail réclamé par la requérante ainsi que le taux horaire appliqué. Elle considère que quatre heures de travail à un taux horaire de 250 euros est le montant maximal à prendre en compte au titre des dépens récupérables.

68      À cet égard, il y a lieu d’observer que la requérante a indiqué un volume horaire de dix heures de travail, sans indiquer la raison pour laquelle il convenait d’appliquer un taux horaire de 300 euros. Or, s’agissant d’une procédure de taxation des dépens, qui, comme en l’espèce, ne soulève aucune difficulté particulière, le taux horaire demandé de 300 euros apparaît manifestement excessif et dès lors, conformément à la jurisprudence citée au point 40 ci-dessus, il convient de s’en écarter. Le Tribunal estime approprié de retenir un taux horaire de 250 euros.

69      De surcroît, s’il est vrai que la requérante s’est trouvée contrainte, dans la mesure où la Commission avait uniquement accepté de lui rembourser un montant « clairement inférieur à 30 000 euros » (voir point 15 ci-dessus), d’introduire une demande de taxation des dépens, il n’en demeure pas moins que, du fait du caractère excessif du montant de cette demande, les heures de travail consacrées par son avocat à justifier spécifiquement ce montant ne sauraient être considérées comme ayant été objectivement indispensables aux fins de la présente procédure (voir, en ce sens, ordonnance du 4 juillet 2017, AESA/Heli-Flight, C‑61/15 P‑DEP, non publiée, EU:C:2017:530, point 35).

70      Dans ces conditions, sur les dix heures de travail passées par les représentants de la requérante à rédiger la demande de taxation des dépens, seules huit peuvent être considérées comme ayant été objectivement indispensables aux fins de la présente procédure. Ainsi, le montant des honoraires d’avocat récupérables au titre de la présente procédure de taxation des dépens doit être fixé à 2 000 euros.

71      Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, le Tribunal estime qu’il sera fait une juste appréciation des dépens récupérables par la requérante au titre de la procédure principale et de la présente procédure en fixant leur montant à 54 032 euros, lequel montant tient compte de toutes les circonstances de l’affaire jusqu’au moment de l’adoption de la présente ordonnance.

72      Enfin, il n’y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requérante visant à ce qu’il lui soit fourni une expédition de la présente ordonnance aux fins d’exécution. En effet, une telle demande est de nature purement administrative et se situe en dehors de l’objet du présent litige portant sur la taxation des dépens récupérables de la requérante (voir, en ce sens, ordonnance du 14 novembre 2016, von Storch e.a./BCE, T‑492/12 DEP, non publiée, EU:T:2016:668, point 28 et jurisprudence citée).

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

ordonne :

Le montant total des dépens à rembourser par la Commission européenne à Sal. Oppenheim jr. & Cie AG & Co. KGaA est fixé à 54 032 euros.

Fait à Luxembourg, le 27 février 2020.

Le greffier

 

Le président

E. Coulon

 

D. Spielmann


*      Langue de procédure : l’allemand.