Arrêt du Tribunal (troisième chambre) du 28 mai 2013 – Al Matri/Conseil
(affaire T‑200/11)
« Politique étrangère et de sécurité commune – Mesures restrictives prises à l’encontre de certaines personnes et entités au regard de la situation en Tunisie – Gel des fonds – Défaut de base juridique »
1. Actes des institutions – Motivation – Obligation – Portée – Mesures restrictives à l’encontre de certaines personnes et entités au regard de la situation en Tunisie – Gel des fonds des personnes impliquées dans des détournements de fonds publics et des personnes physiques ou morales, entités ou organismes leur étant associés – Décision s’inscrivant dans un contexte connu de l’intéressé lui permettant de comprendre la portée de la mesure prise à son égard – Admissibilité d’une motivation sommaire – Limites – Motivation ne pouvant consister en une formulation générale et stéréotypée [Art. 296 TFUE ; charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, art. 41, § 2, c) ; décision du Conseil 2011/79] (cf. points 29-35)
2. Union européenne – Politique étrangère et de sécurité commune – Mesures restrictives à l’encontre de certaines personnes et entités au regard de la situation en Tunisie – Gel des fonds des personnes impliquées dans des détournements de fonds publics et des personnes physiques ou morales, entités ou organismes leur étant associés – Gel de fonds pour blanchiment d’argent imposé par une décision de mise en œuvre – Recouvrement des notions de détournement de fonds publics et de blanchiment d’argent – Absence – Présomption d’un rapport nécessaire entre les actes de blanchiment d’argent commis par les membres de la famille des dirigeants du pays avec des détournements de fonds publics – Absence – Défaut de base légale de la décision de mise en œuvre – Annulation (Décisions du Conseil 2011/72, art. 1er, § 1, et 2011/79) (cf. points 41-50, 61-64, 66, 69)
3. Union européenne – Contrôle juridictionnel de la légalité des actes des institutions – Mesures restrictives à l’encontre de certaines personnes et entités au regard de la situation en Tunisie – Gel des fonds des personnes impliquées dans des détournements de fonds publics et des personnes physiques ou morales, entités et organismes leur étant associés – Appréciation de la légalité en fonction des éléments d’information disponibles au moment de l’adoption de la décision (Décision du Conseil 2011/79) (cf. point 72)
4. Procédure juridictionnelle – Décision remplaçant en cours d’instance la décision attaquée – Élément nouveau – Extension des conclusions et moyens initiaux (Règlement de procédure du Tribunal, art. 48, § 2) (cf. point 80)
5. Recours en annulation – Intérêt à agir – Notion – Recours susceptible de procurer un bénéfice au requérant – Intérêt devant perdurer jusqu’au prononcé de la décision juridictionnelle – Caducité en cours d’instance de l’acte attaqué – Perte de l’intérêt à agir du requérant – Non-lieu à statuer (Art. 263 TFUE ; décision du Conseil 2011/79) (cf. point 83)
6. Recours en annulation – Arrêt d’annulation – Effets – Limitation par la Cour – Mesures restrictives à l’encontre de certaines personnes, entités et organismes au regard de la situation en Tunisie – Annulation à deux moments différents de deux actes comportant des mesures restrictives identiques – Risque d’atteinte sérieuse à la sécurité juridique – Maintien des effets du premier de ces actes jusqu’à la prise d’effet de l’annulation du second (Art. 264 TFUE ; statut de la Cour de justice, art. 60 ; règlement du Conseil nº 101/2011 ; décision du Conseil 2011/79) (cf. points 86-89)
Objet
Demande d’annulation, en premier lieu, de la décision d’exécution 2011/79/PESC du Conseil, du 4 février 2011, mettant en œuvre la décision 2011/72/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de certaines personnes et entités au regard de la situation en Tunisie (JO L 31, p. 40), en deuxième lieu, du règlement (UE) n | o | 101/2011 du Conseil, du 4 février 2011, concernant des mesures restrictives à l’encontre de certaines personnes, entités et organismes au regard de la situation en Tunisie (JO L 31, p. 1), et, en troisième lieu, de la décision 2012/50/PESC du Conseil, du 27 janvier 2012, modifiant la décision 2011/72 (JO L 27, p. 11), en tant que ces actes visent le requérant. |
Dispositif
1) | | La décision d’exécution 2011/79/PESC du Conseil, du 4 février 2011, mettant en œuvre la décision 2011/72/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de certaines personnes et entités au regard de la situation en Tunisie et le règlement (UE) no 101/2011 du Conseil, du 4 février 2011, concernant des mesures restrictives à l’encontre de certaines personnes, entités et organismes au regard de la situation en Tunisie sont annulés en tant qu’ils visent M. Fahed Mohamed Sakher Al Matri. |
2) | | Les effets de la décision d’exécution 2011/79 à l’égard de M. Al Matri sont maintenus jusqu’à la prise d’effet de l’annulation du règlement no 101/2011 en tant qu’il vise M. Al Matri. |
3) | | Il n’y a pas lieu de statuer sur le surplus du recours. |
4) | | Le Conseil de l’Union européenne est condamné à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par M. Al Matri. |
5) | | La Commission européenne et la République tunisienne supporteront leurs propres dépens. |