Language of document : ECLI:EU:T:2011:78

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

9 mars 2011 (*)

« Marque communautaire – Procédure de nullité – Marque communautaire verbale 5 HTP – Motif absolu de refus – Signes ou indications devenus usuels – Article 7, paragraphe 1, sous d), du règlement (CE) n° 207/2009 – Caractère distinctif acquis par l’usage – Article 52, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑190/09,

Longevity Health Products, Inc., établie à Nassau (Bahamas), représentée par Me J. E. Korab, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. S. Schäffner, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Performing Science LLC, établie à Las Vegas, Nevada (États-Unis), représentée par Me D. Plasser, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’OHMI du 21 avril 2009 (affaire R 595/2008-4), relative à une procédure de nullité entre Performing Science LLC et Longevity Health Products, Inc.,

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de MM. E. Moavero Milanesi (rapporteur), président, N. Wahl et S. Soldevila Fragoso, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 13 mai 2009,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 13 août 2009,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 31 juillet 2009,

vu la réplique déposée au greffe du Tribunal le 5 novembre 2009,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 9 septembre 2002, la requérante, Longevity Health Products, Inc., a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal 5 HTP.

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent notamment de la classe 5 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Produits pharmaceutiques, produits vétérinaires, préparations hygiéniques, substances diététiques à usage médical, préparations à base d’oligo-éléments pour la consommation humaine et animale ; compléments alimentaires à usage médical, compléments alimentaires minéraux, préparations vitaminées ».

4        La marque communautaire 5 HTP a été enregistrée le 13 janvier 2004.

5        Le 27 octobre 2006, l’intervenante, Performing Science LLC, a formé une demande en nullité de la marque communautaire 5 HTP au titre de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 40/94 [devenu article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009]. Les motifs invoqués étaient ceux visés par l’article 7, paragraphe 1, sous d) et g), du règlement n° 40/94 [devenu article 7, paragraphe 1, sous d) et g), du règlement n° 207/2009].

6        Le 6 mars 2008, la division d’annulation a accueilli la demande en nullité pour tous les produits de la classe 5, sur la base du motif visé à l’article 7, paragraphe 1, sous d), du règlement n° 40/94.

7        Le 1er avril 2008, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 57 à 62 du règlement n° 40/94 (devenus articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009), contre la décision de la division d’annulation.

8        Par décision du 21 avril 2009 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours. En particulier, elle a considéré, premièrement, que le signe 5 HTP était utilisé, dans le commerce des produits de la classe 5, en tant qu’abréviation conforme à la nomenclature chimique de la substance 5‑hydroxytryptophane (un acide aminé protéinogène à effet thymoleptique, sédatif et amaigrissant), deuxièmement, que la division d’annulation n’avait pas commis d’erreur en incluant dans le public concerné les spécialistes en matière médicale, troisièmement, que la différence par rapport à l’orthographe correcte de l’abréviation de cette substance (comprenant un trait d’union), à savoir 5-HTP, était négligeable, quatrièmement, que le signe 5 HTP était habituellement utilisé dans le langage courant ou les usages honnêtes en matière commerciale et, cinquièmement, que la requérante n’avait pas prouvé que sa marque avait acquis un caractère distinctif par l’usage, conformément à l’article 52, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, puisque la documentation produite à cette fin montrait que ledit signe était utilisé en tant qu’indication descriptive de l’unique principe actif des produits vendus par la requérante et non en tant que marque.

 Conclusions des parties

9        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer le recours recevable ;

–        annuler la décision attaquée et rejeter la demande en nullité de l’intervenante ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

10      L’OHMI et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur la recevabilité

11      Sans soulever formellement une exception d’irrecevabilité, l’OHMI conteste la recevabilité du recours pour défaut de preuve de l’établissement régulier du mandat du représentant de la requérante qualifié à cet effet, en vertu de l’article 44, paragraphe 5, sous b), du règlement de procédure du Tribunal.

12      La requérante estime que la preuve demandée a été établie.

13      À cet égard, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 44, paragraphe 5, du règlement de procédure, « [s]i le requérant est une personne morale de droit privé, il joint à sa requête : […] b) la preuve que le mandat donné à l’avocat a été régulièrement établi par un représentant qualifié à cet effet ».

14      En l’espèce, la requérante a produit, en annexe à la requête, une copie du mandat portant la date du 20 novembre 2006, la signature de Me J. Korab et une seconde signature. Ainsi qu’il ressort de la requête, cette seconde signature a été apposée par M. Z. afin d’établir la preuve que ce dernier était autorisé à donner le mandat à Me Korab, la requérante ayant produit, en annexe à la requête, une procuration générale du 12 janvier 1998, une déclaration sous serment du même jour émanant de Mme N. et un « certificate of incumbency » (liste certifiée des administrateurs avec leurs fonctions), établi par un notaire le 30 juillet 2007. Il ressort, à suffisance de droit, de ladite procuration générale et de ladite déclaration sous serment que M. G. avait donné procuration générale à M. Z. En effet, même si, ainsi que l’OHMI l’a souligné, la signature figurant sur la procuration générale n’est pas lisible, l’identité de la personne qui l’a signée ressort de ladite déclaration sous serment dans laquelle Mme N. a confirmé que la procuration en faveur de M. Z. avait été établie et signée par M. G. Il ressort du « certificate of incumbency » que M. G. était le directeur et président de la requérante et qu’il occupait cette position à la date à laquelle il a établi un pouvoir en faveur de M. Z., signataire du mandat donné à Me Korab. Dans ces conditions, il a été établi sur la base de preuves documentaires que ce dernier était autorisé à représenter la requérante [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 9 décembre 2009, Longevity Health Products/OHMI – Merck (Kids Vits), T‑484/08, non encore publié au Recueil, point 17, et ordonnance du Tribunal du 2 décembre 2008, Longevity Health Products/OHMI – Hennig Arzneimittel (Cellutrim), T‑169/07, non publiée au Recueil, point 17].

15      Dans la mesure où l’OHMI fait valoir qu’un « certificate of incumbency » doit être établi par une personne qui détient le pouvoir de signature au nom de la personne morale et que la signature dudit certificat émanant d’un « Registered Office » (siège social enregistré) n’est pas suffisante, il convient de relever qu’il ne s’appuie, pour étayer cette affirmation, que sur des informations qu’il a recueillies sans les spécifier. Une telle argumentation ne saurait remettre en question la régularité dudit certificat, étant donné qu’il a été établi par un avocat en sa qualité de notaire (voir, en ce sens, arrêt Kids Vits, précité, point 18, et ordonnance Cellutrim, précitée, point 18).

16      Par conséquent, la fin de non-recevoir soulevée par l’OHMI doit être rejetée.

 Sur le fond

17      La requérante soulève, en substance, deux moyens, tirés de la violation, respectivement, de l’article 7, paragraphe 1, sous d), et de l’article 52, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous d), du règlement n° 207/2009.

–       Arguments des parties

18      La requérante soutient que, dans la décision attaquée, la chambre de recours a violé l’article 7, paragraphe 1, sous d), du règlement n° 207/2009, dans la mesure où elle a considéré que le motif absolu de refus d’enregistrement qui y était énoncé justifiait l’annulation de la marque 5 HTP.

19      Selon la requérante, le public pertinent, que celui-ci soit composé de spécialistes ou non, est à même de faire la différence entre la marque 5 HTP et le signe 5‑HTP, désignation officielle du 5‑hydroxytryptophane.

20      En ce qui concerne les spécialistes, à savoir le personnel médical vétérinaire et pharmaceutique, ils pourraient aisément comprendre ladite différence, leur formation leur permettant de saisir que même des modifications minimes des formulations chimiques ou des formules moléculaires peuvent modifier considérablement la structure des substances chimiques et leurs propriétés.

21      Il s’ensuivrait que la nécessité, soulignée par la chambre de recours dans la décision attaquée, de permettre au public concerné d’utiliser des dénominations devenues usuelles ne serait pas en conflit avec le maintien de la marque communautaire 5 HTP, les spécialistes continuant à employer l’appellation chimique exacte, le cas échéant sous la forme abrégée, qui ne coïnciderait pas intégralement avec ladite marque.

22      Selon la requérante, cette même conclusion vaudrait également pour le public composé de personnes qui, tout en n’étant pas des spécialistes, sont concrètement intéressées par les produits visés par la marque 5 HTP et se procurent, dès lors, les informations nécessaires avant d’acheter ces produits.

23      S’agissant, enfin, du public composé par des personnes non intéressées par les produits en cause et qui ne recueillent donc aucune information préalable à leur égard, la requérante estime qu’il n’existe pas de « lien intellectuel » conduisant à rattacher la marque 5 HTP à la substance 5-hydroxytryptophane. Ainsi, l’existence d’un obstacle à l’enregistrement résultant de l’article 7, paragraphe 1, sous d) du règlement n° 207/2009 ne serait pas non plus établie en ce qui concerne ce public.

24      L’OHMI et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

–       Appréciation du Tribunal

25      Il y a lieu de rappeler que, l’article 7, paragraphe 1, sous d), du règlement n° 207/2009 empêche l’enregistrement de marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications devenus usuels dans le langage courant ou dans les habitudes loyales et constantes du commerce.

26      Selon la jurisprudence, cette disposition doit être interprétée en ce sens qu’elle ne s’oppose à l’enregistrement d’une marque que lorsque les signes ou les indications dont cette marque est exclusivement composée sont devenus usuels dans le langage courant ou dans les habitudes loyales et constantes du commerce pour désigner les produits ou les services pour lesquels ladite marque est présentée à l’enregistrement (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 4 octobre 2001, Merz & Krell, C‑517/99, Rec. p. I‑6959, point 31). Ainsi, le caractère usuel d’une marque ne peut être apprécié que, d’une part, par rapport aux produits ou aux services visés par la marque, même si la disposition en cause ne fait pas une référence explicite à ceux-ci, et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public ciblé [arrêts du Tribunal du 16 mars 2006, Telefon & Buch/OHMI – Herold Business Data (WEISSE SEITEN), T‑322/03, Rec. p. II‑835, point 49, et du 23 octobre 2008, TIM et TTV/OHMI – Past Perfect (PAST PERFECT), T‑133/06, non publié au Recueil, point 51].

27      S’agissant du public ciblé, il convient de constater que le caractère usuel d’un signe s’apprécie en tenant compte de l’attente présumée d’un consommateur moyen du type de produit en cause qui est censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé [arrêts du Tribunal du 5 mars 2003, Alcon/OHMI – Dr. Robert Winzer Pharma (BSS), T‑237/01, Rec. p. II‑411, point 38, et WEISSE SEITEN, précité, point 50].

28      En outre, bien qu’il existe un chevauchement évident des champs d’application respectifs de l’article 7, paragraphe 1, sous c), et de l’article 7, paragraphe 1, sous d), du règlement n° 207/2009, l’exclusion de l’enregistrement des marques visées par cette dernière disposition n’est pas fondée sur la nature descriptive de ces marques, mais sur l’usage en vigueur dans les milieux dont relève le commerce des produits et des services pour lesquels lesdites marques ont été présentées à l’enregistrement (arrêts BSS, précité, point 39, et WEISSE SEITEN, précité, point 51).

29      Enfin, des signes ou des indications composant une marque qui sont devenus usuels dans le langage courant ou dans les habitudes loyales et constantes du commerce pour désigner les produits ou les services visés par cette marque ne sont pas propres à distinguer les produits ou les services d’une entreprise de ceux d’autres entreprises et ne remplissent donc pas la fonction essentielle de ladite marque (arrêt BSS, précité, point 40, et WEISSE SEITEN, précité, point 52).

30      En l’espèce, il y a lieu d’observer que la marque en cause a été enregistrée pour certains produits relevant de la classe 5 et que, dès lors, le caractère usuel du signe 5 HTP doit être analysé par rapport à ces produits.

31      En outre, il ressort de la jurisprudence que, lorsque les produits en cause sont des produits pharmaceutiques, comme c’est en substance le cas en l’espèce, le public pertinent est constitué, d’une part, des professionnels de la médecine et, d’autre part, des patients en tant que consommateurs finals desdits produits [arrêts du Tribunal du 13 février 2008, Sanofi-Aventis/OHMI – GD Searle (ATURION), T‑146/06, non publié au Recueil, point 25, et du 21 octobre 2008, Aventis Pharma/OHMI – Nycomed (PRAZOL), T‑95/07, non publié au Recueil, point 27]. Par ailleurs, le signe 5 HTP n’étant pas lié à l’une des langues de l’Union européenne en particulier, il convient de considérer comme public pertinent les spécialistes en matière médicale et les consommateurs finals des produits en cause dans l’ensemble de l’Union.

32      À cet égard, il y a lieu d’observer que, au point 17 de la décision attaquée, la chambre de recours a affirmé qu’il était correct de se placer du point de vue du public spécialisé en matière médicale et a ainsi rejeté l’argument de la requérante selon lequel la division d’annulation aurait dû limiter le public pertinent aux consommateurs finals, qui ne connaîtraient ni l’abréviation 5 HTP ni la substance 5‑hydroxytryptophane, au lieu d’y inclure également les spécialistes en matière médicale. Dès lors, la décision attaquée n’indique pas clairement si la chambre de recours a considéré que le public pertinent était composé seulement desdits spécialistes ou également des consommateurs finals.

33      Toutefois, à supposer même que la chambre de recours ait exclu ces derniers du public pertinent, cette circonstance serait sans incidence sur sa conclusion selon laquelle l’article 7, paragraphe 1, sous d), du règlement n° 207/2009 justifiait l’annulation de la marque de la requérante. En effet, ainsi que le reconnaît désormais la requérante elle-même (voir point 22 ci-dessus), les consommateurs finals des produits relevant de la classe 5, tout en n’étant pas des spécialistes, disposent des connaissances en la matière, puisqu’ils se procurent les informations nécessaires avant d’acheter ces produits et apprennent ainsi quels sont les signes devenus usuels dans le langage courant pour les désigner. Cette conclusion est conforme à la jurisprudence selon laquelle les consommateurs finals des produits pharmaceutiques sont censés être raisonnablement bien informés, attentifs et avisés, dès lors que ces produits affectent leur état de santé (voir arrêt PRAZOL, précité, point 29, et la jurisprudence citée).

34      En ce qui concerne, ensuite, l’argument de la requérante relatif aux personnes non intéressées par les produits en cause, il convient de rappeler que la notion de public pertinent est liée à l’examen des destinataires des produits concernés, car c’est par rapport à ceux-ci que la marque doit développer sa fonction essentielle, à savoir garantir au consommateur ou à l’utilisateur final l’identité d’origine du produit ou du service désigné par la marque, en lui permettant de distinguer, sans confusion possible, ce produit ou ce service de ceux qui ont une autre provenance [arrêt du Tribunal du 29 septembre 2010, CNH Global/OHMI (Combinaison des couleurs rouge, noire et grise pour un tracteur), T‑378/07, non encore publié au Recueil, point 38].

35      Au vu de ces considérations, il y a lieu d’observer que ledit argument de la requérante est dépourvu de toute pertinence, dans la mesure où, compte tenu de la fonction essentielle de la marque, rappelée au point 34 ci-dessus, la définition du public concerné en l’espèce ne saurait inclure des personnes non intéressées à l’achat des produits vendus par la requérante (voir, en ce sens, arrêt Combinaison des couleurs rouge, noire et grise pour un tracteur, précité, points 39 et 41).

36      S’agissant des arguments de la requérante relatifs aux spécialistes et aux consommateurs finals, force est de constater que celle-ci ne conteste pas la conclusion de la chambre de recours selon laquelle l’article 7, paragraphe 1, sous d), du règlement n° 207/2009 justifie l’annulation d’une marque visant les produits de la classe 5 et composée seulement de l’abréviation officielle de la substance 5‑hydroxytryptophane, mais se limite à soutenir que le signe 5 HTP n’est pas une telle abréviation, en raison de l’absence de trait d’union.

37      À cet égard, premièrement, il y a lieu d’observer que la requérante ne produit aucun élément susceptible de remettre en cause l’appréciation de la chambre de recours, figurant au point 25 de la décision attaquée, selon laquelle, que ce soit avec ou sans trait d’union, le signe 5 HTP correspond à la représentation abrégée d’une formule chimique et que, en tout état de cause, le public pertinent, malgré ses connaissances, n’attache pas d’importance à une telle distinction.

38      Deuxièmement, ainsi que le fait remarquer à juste titre l’intervenante, puisque le motif absolu de refus énoncé à l’article 7, paragraphe 1, sous d), du règlement n° 207/2009 ne porte pas sur l’hypothèse selon laquelle le signe concerné est descriptif de propriétés ou de caractéristiques des produits ou services visés, il importe peu de savoir si le public pertinent en l’espèce connaît le signe 5 HTP en tant qu’abréviation exacte de la substance 5‑hydroxytryptophane, ce qui compte étant de savoir si ce public considère qu’il s’agit là d’une désignation courante des produits tels que ceux vendus par la requérante.

39      Troisièmement, il découle de la jurisprudence qu’un trait d’union n’est pas susceptible de faire une différence pour le public pertinent lorsque l’acception conceptuelle des termes qu’il pourrait séparer est indépendante de son éventuelle présence [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 23 septembre 2009, Arcandor/OHMI – dm drogerie markt (S-HE), T‑391/06, non publié au Recueil, point 43]

40      Par ailleurs, il convient de relever que, comme le fait remarquer l’intervenante, dans le langage parlé, le trait d’union n’est en tout état de cause pas prononcé si bien que le signe 5 HTP est, pour le public pertinent, devenu usuel pour désigner des produits contenant la substance 5‑hydroxytryptophane.

41      Sur la base des considérations qui précèdent, force est de constater que le premier moyen de la requérante n’est pas fondé.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 52, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009.

–       Arguments des parties

42      La requérante fait valoir que la chambre de recours a commis une erreur de droit en niant qu’elle avait apporté la preuve que la marque 5 HTP avait acquis un caractère distinctif par l’usage, conformément à l’article 52, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009.

43      À cet égard, la requérante fait observer que les preuves d’usage qu’elle a produites ne plaident pas, comme le prétend la chambre de recours, en faveur d’un obstacle à l’enregistrement.

44      L’OHMI et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

–       Appréciation du Tribunal

45      Il y a lieu de rappeler que le caractère distinctif d’une marque, y compris celui acquis par l’usage au sens de l’article 7, paragraphe 3, et de l’article 52, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, doit être apprécié par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement de la marque a été demandé et en tenant compte de la perception présumée du public pertinent (voir, en ce sens, arrêt BSS, précité, point 51, et la jurisprudence citée).

46      Pour pouvoir bénéficier de l’article 52, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, la marque dont la nullité est demandée doit avoir acquis un caractère distinctif entre la date de son enregistrement et celle de la demande de nullité [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 15 octobre 2008, Powerserv Personalservice/OHMI – Manpower (MANPOWER), T‑405/05, Rec. p. II‑2883, point 127, et du 28 octobre 2009, BCS/OHMI – Deere (Combinaison des couleurs verte et jaune), T‑137/08, Rec. p. II‑4047, point 49]. Il appartient au titulaire de la marque de produire les preuves appropriées et suffisantes pour démontrer que celle-ci a acquis un tel caractère [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 12 décembre 2002, eCopy/OHMI (ECOPY), T‑247/01, Rec. p. II‑5301, point 47, et du 3 décembre 2003, Audi/OHMI (TDI), T‑16/02, Rec. p. II‑5167, point 67].

47      À cet égard, il est de jurisprudence constante que, aux fins de l’appréciation de l’acquisition par une marque d’un caractère distinctif à la suite de l’usage qui en a été fait, peuvent être prises en considération, notamment, la part de marché détenue par la marque, l’intensité, l’étendue géographique et la durée de l’usage de cette marque, l’importance des investissements faits par l’entreprise pour la promouvoir, la proportion des milieux intéressés qui identifie le produit comme provenant d’une entreprise déterminée grâce à la marque ainsi que les déclarations de chambres de commerce et d’industrie ou d’autres associations professionnelles (arrêts BSS, précité, point 50, et Combinaison des couleurs verte et jaune, précité, point 31).

48      Par ailleurs, la question de savoir si un terme, qui est usuel dans le langage courant ou dans les habitudes loyales du commerce, a acquis un caractère distinctif par l’usage dépend, notamment, de la perception de celui-ci par le public ciblé, soit comme le nom générique du produit en cause, soit comme le signe distinctif d’une entreprise déterminée. Dès lors, les efforts du titulaire sont pris en considération dans la mesure où ils ont des résultats objectifs dans la perception du terme en cause par le public pertinent (arrêt BSS, précité, point 55).

49      En l’espèce, la requérante, pour prouver que la marque 5 HTP a acquis un caractère distinctif par l’usage, a présenté devant l’OHMI des listes de prix et des informations concernant ses produits.

50      La chambre de recours a, en substance, considéré, au point 39 de la décision attaquée, que, puisque, dans ces documents, le signe 5 HTP était utilisé manifestement en tant qu’indication descriptive de l’unique principe actif des produits en cause et que les explications fournies avec ces produits attiraient explicitement l’attention sur cette signification, cet usage ne remplissait pas les conditions énoncées à l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009, mais contribuait uniquement à renforcer la fonction de l’indication en tant que dénomination usuelle du produit.

51      À cet égard, il y a lieu d’observer que la requérante ne fournit, dans ses écritures devant le Tribunal, aucun élément susceptible de remettre en cause cette évaluation de la chambre de recours, mais se limite à l’affirmation, non étayée, que les preuves de l’usage qu’elle avait présentées devant l’OHMI était suffisantes.

52      La requérante n’ayant pas expliqué en quoi l’utilisation des documents mentionnés ci-dessus permettait de prouver que celle-ci avait donné lieu à une prise de conscience par le public pertinent du fait que le signe 5 HTP était une marque et non une dénomination usuelle dans le domaine pharmacologique (voir, en ce sens, arrêt BSS, précité, point 57), il y a lieu de relever que la chambre de recours a considéré, à juste titre, que la requérante n’avait pas démontré que sa marque avait acquis un caractère distinctif par l’usage au sens de l’article 7, paragraphe 3, et de l’article 52, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009.

53      Dès lors, il convient de rejeter également le deuxième moyen invoqué par la requérante et, partant, le recours dans son ensemble, sans qu’il y ait lieu de se prononcer sur la recevabilité du deuxième chef de conclusions de la requérante en ce qu’il vise à ce que le Tribunal rejette la demande en nullité de l’intervenante.

 Sur les dépens

54      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Longevity Health Products, Inc. est condamnée aux dépens.

Moavero Milanesi

Wahl

Soldevila Fragoso

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 9 mars 2011.

Signatures


* Langue de procédure : l’allemand.