ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)
30 septembre 1998 (1)
«Politique agricole commune Police sanitaire Encéphalopathie spongiforme
bovine Recours en indemnisation Règlement (CE) n° 1357/96 Primes
supplémentaires Recours en annulation Association d'opérateurs
économiques Irrecevabilité»
Dans l'affaire T-149/96,
Confederazione Nazionale Coltivatori Diretti (Coldiretti), organisation syndicale de
droit italien, établie à Rome,
110 exploitants agricoles, dont les noms figurent en annexe au présent arrêt, établis
en Italie,
représentés par Mes Roberto G. Aloisio, avocat au barreau de Rome, et Fabrizio
Massoni, avocat au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg en
l'étude de Me Jim Penning, 31, Grand-rue,
contre
Conseil de l'Union européenne , représenté initialement par Mme Moyra Sims-Robertson, conseiller juridique, et M. Marco Umberto Moricca, membre du service
juridique, puis par Mme Sims-Robertson et M. Ignacio Díez Parra, conseiller
juridique, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M.
Alessandro Morbilli, directeur général de la direction des affaires juridiques de la
Banque européenne d'investissement, 100, boulevard Konrad Adenauer,
et
Commission des Communautés européennes , représentée par MM. Paolo Ziotti
et James Macdonald Flett, membres du service juridique, en qualité d'agents, ayant
élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du
service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,
ayant pour objet, d'une part, une demande d'indemnisation au titre des articles 178
et 215, deuxième alinéa, du traité CE, visant à la réparation du préjudice
prétendument subi par les requérants du fait d'actes et d'omissions du Conseil et
de la Commission, à la suite de l'apparition de la maladie connue sous le nom
d'encéphalopathie spongiforme bovine, et, d'autre part, une demande d'annulation
du règlement (CE) n° 1357/96 du Conseil, du 8 juillet 1996, prévoyant des
paiements supplémentaires à faire en 1996 au titre des primes visées dans le
règlement (CEE) n° 805/68 portant organisation commune des marchés dans le
secteur de la viande bovine, et modifiant ce règlement (JO L 175, p. 9),
LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (cinquième chambre),
composé de MM. J. Azizi, président, R. García-Valdecasas et M. Jaeger, juges,
greffier: Mme B. Pastor, administrateur principal,
vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 10 mars 1998,
rend le présent
Arrêt
Faits à l'origine du litige
- 1.
- L'encéphalopathie spongiforme bovine (ci-après «ESB»), maladie dite «de la vache
folle», fait partie d'un groupe de maladies appelées encéphalopathies spongiformes
transmissibles, qui se caractérisent par une dégénérescence du cerveau et l'aspect
spongieux de ses cellules nerveuses à l'analyse microscopique.
- 2.
- L'origine probable de l'ESB serait une modification de la préparation des aliments
destinés aux bovins et contenant des protéines provenant de moutons atteints de
la maladie dite «tremblante du mouton». La maladie se caractérise par une
période d'incubation de plusieurs années, pendant laquelle elle ne peut pas être
détectée tant que l'animal est en vie.
- 3.
- L'ESB a été détectée pour la première fois au Royaume-Uni en 1986. Depuis 1988,
plus de 160 000 cas confirmés d'ESB ont été identifiés dans le cheptel de cet État
membre et des cas sporadiques d'ESB se sont également déclarés en France, en
Irlande, au Portugal et en Suisse .
- 4.
- Pour faire face à cette maladie et aux conséquences en découlant, outre les
diverses mesures adoptées par le Royaume-Uni, la Communauté européenne a,
depuis le mois de juillet 1988, adopté un certain nombre de décisions, notamment
celles exposées ci-après.
- 5.
- La décision 89/469/CEE, du 28 juillet 1989, relative à certaines mesures de
protection contre l'ESB au Royaume-Uni (JO L 225, p. 51), a introduit un certain
nombre de restrictions aux échanges intracommunautaires de bovins nés au
Royaume-Uni avant le mois de juillet 1988, c'est-à-dire avant la date à laquelle
avaient été décrétées dans ce pays, d'une part, l'interdiction de vendre des aliments
destinés aux ruminants et contenant des protéines de ruminants, ainsi que, d'autre
part, l'interdiction de nourrir les ruminants avec de tels aliments [«Ruminant Feed
Ban», contenu dans le Bovine Spongiform Encephalopathy Order (1988, SI
1988/1039), modifié ultérieurement].
- 6.
- Cette décision a été modifiée par la décision 90/59/CEE de la Commission, du 7
février 1990 (JO L 41, p. 23), laquelle a généralisé l'interdiction d'exporter des
bovins du Royaume-Uni, exception faite de ceux destinés à l'abattage avant l'âge
de six mois.
- 7.
- La décision 89/469, du 28 juillet 1989, précitée, a été modifiée une seconde fois par
la décision 90/261/CEE de la Commission, du 8 juin 1990 (JO L 146, p. 29), qui a
établi que le respect de l'interdiction imposée au Royaume-Uni de ne pas exporter
d'animaux de plus de six mois devait être garanti par l'apposition sur les animaux
d'une marque spéciale et par l'emploi d'un système de fiches informatisées pour
permettre l'identification des animaux. Elle a en outre exigé l'insertion de la phrase
suivante dans le certificat de salubrité accompagnant les viandes bovines non
désossées en provenance du Royaume-Uni: «Viandes fraîches bovines issues de
bovins ne provenant pas d'exploitations où l'ESB a été confirmée au cours des deux
années précédentes». Quant aux viandes désossées, elle a prescrit que le certificat
de salubrité mentionne qu'il s'agissait de «viandes fraîches dont on [avait] éliminé,
pendant la découpe, des tissus nerveux et lymphatiques visibles», à savoir ceux qui,
de l'avis des experts, étaient susceptibles de contenir l'agent infectant.
- 8.
- Ces décisions ont été, à leur tour, remplacées par la décision 94/474/CE de la
Commission, du 27 juillet 1994, concernant certaines mesures de protection contre
l'ESB et abrogeant les décisions 89/469/CEE et 90/200/CEE (JO L 194, p. 96), qui
reprenait leur contenu en le modifiant partiellement. La nouvelle décision faisait
passer de deux à six ans la période pendant laquelle il ne fallait pas que des cas
d'ESB eussent été confirmés dans l'exploitation où les bovins avaient été élevés,
afin que fût permise l'exportation de leurs viandes non désossées vers d'autres
États membres de la Communauté. Elle interdisait l'exportation à partir du
Royaume-Uni de tous les matériels et produits provenant de ruminants non traités
selon les systèmes admis sur la base de la décision 94/382/CE de la Commission,
du 27 juin 1994, relative à l'agrément de systèmes de traitement thermique de
remplacement pour la transformation des déchets de ruminants au regard de
l'inactivation des agents de l'encéphalopathie spongiforme (JO L 172, p. 25), et
applicable à partir du 1er janvier 1995.
- 9.
- La décision 94/474, du 27 juillet 1994, précitée, a été à son tour modifiée par la
décision 95/287/CE de la Commission, du 18 juillet 1995 (JO L 181, p. 40). Celle-ci
a imposé le test Elisa officiel d'identification de la protéine de ruminant contenue
dans les aliments destinés aux ruminants. Elle a également modifié le contenu des
certificats de salubrité accompagnant les viandes expédiées du Royaume-Uni et, par
suite, la portée des contrôles devant être effectués par les autorités nationales
compétentes. En ce qui concerne notamment les viandes obtenues à partir de
bovins âgés de plus de deux ans et demi, le certificat devait assurer que les bovins,
au Royaume-Uni, avaient séjourné uniquement dans des exploitations où aucun cas
d'ESB n'avait été confirmé au cours des six années précédentes, ou que, dans le cas
contraire, il s'agissait de viandes fraîches désossées sous forme de muscle,
débarrassées des tissus adhérents, y compris les tissus nerveux et lymphatiques
apparents.
- 10.
- La décision 90/134/CEE de la Commission, du 6 mars 1990, portant deuxième
modification de la directive 82/894/CEE du Conseil concernant la notification des
maladies des animaux dans la Communauté et modifiant temporairement la
fréquence de la notification concernant l'ESB (JO L 76, p. 23), a ajouté l'ESB à la
liste des maladies soumises à notification par la directive 82/894/CEE du Conseil,
du 21 décembre 1982, concernant la notification des maladies des animaux dans la
Communauté (JO L 378, p. 58), afin de garantir une information rapide et
indispensable à l'application des mesures de protection prévues par la
réglementation communautaire. Cette dernière directive a été modifiée une
troisième fois par la décision 92/450/CEE de la Commission, du 30 juillet 1992
(JO L 248, p. 77), qui a prorogé jusqu'au 31 décembre 1997 l'obligation de
notification hebdomadaire des foyers de la maladie, prévue par la décision 90/134,
du 6 mars 1990, précitée.
- 11.
- La décision 90/200/CEE de la Commission, du 9 avril 1990, établissant des
exigences supplémentaires pour certains tissus et organes en ce qui concerne l'ESB
(JO L 105, p. 24), a introduit une série de mesures destinées à limiter les échanges
intracommunautaires de certains tissus et organes provenant d'animaux de l'espèce
bovine en relation avec l'ESB, en particulier des tissus et organes provenant de
bovins âgés de plus de six mois à l'abattage.
- 12.
- La décision 92/290/CEE de la Commission, du 14 mai 1992, relative à certaines
mesures de protection contre l'ESB en ce qui concerne les embryons de bovins
dans le Royaume-Uni (JO L 152, p. 37), a imposé à tous les États membres de
veiller à ne pas expédier vers d'autres États membres de la Communauté des
embryons des espèces bovines provenant de femelles chez lesquelles l'existence de
l'ESB était confirmée ou suspectée.
- 13.
- La décision 94/381/CE de la Commission, du 27 juin 1994, concernant certaines
mesures de protection relatives à l'ESB et à l'alimentation à base de protéines
dérivées de mammifères (JO L 172, p. 23), a interdit dans l'ensemble de la
Communauté l'utilisation de protéines dérivées de toutes les espèces de
mammifères dans l'alimentation des ruminants, exception faite de la possibilité pour
les États membres d'adopter un système permettant de différencier les protéines
transformées dérivées de ruminants de celles dérivées de non-ruminants. Le
contenu de cette décision a été modifié et clarifié par la décision 95/60/CE de la
Commission, du 6 mars 1995 (JO L 55, p. 43).
- 14.
- Par un communiqué du 20 mars 1996, le Spongiform Encephalopathy Advisory
Committee (ci-après «SEAC»), organisme scientifique indépendant chargé de
conseiller le gouvernement du Royaume-Uni, a fait état de dix cas d'une variante
de la maladie de Creutzfeldt-Jakob identifiés chez des personnes âgées de 42 ans
au plus.
- 15.
- Ce communiqué était ainsi rédigé:
«Bien qu'il n'existe aucune preuve directe d'un lien, compte tenu des données
actuelles et en l'absence de toute alternative crédible, l'explication actuellement la
plus probable est que ces cas sont liés à une exposition à l'ESB avant l'instauration,
en 1989, de l'interdiction de certains abats de viande bovine spécifiés. Il s'agit là
d'un motif de grande inquiétude.»
- 16.
- Le même jour, le ministre de l'Agriculture, de la Pêche et de l'Alimentation du
Royaume Uni a pris la décision d'interdire, d'une part, la vente et la fourniture de
farines de viande et d'os provenant de mammifères, ainsi que leur utilisation dans
l'alimentation destinée à tous les animaux d'élevage, y compris la volaille, les
chevaux et les poissons d'élevage et, d'autre part, la vente de viandes provenant de
bovins âgés de plus de 30 mois pour la consommation humaine.
- 17.
- Au même moment, un certain nombre d'États membres et de pays tiers ont adopté
des mesures interdisant l'importation de bovins ou de viande bovine en provenance
du Royaume-Uni ou, s'agissant des mesures prises par certains pays tiers, de
l'Union européenne.
- 18.
- Le 22 mars 1996, le comité scientifique vétérinaire de l'Union européenne (ci-après
«comité scientifique vétérinaire») a conclu que les données disponibles ne
permettaient pas de prouver la transmissibilité de l'ESB à l'homme. Cependant,
compte tenu de l'existence d'un risque à cet égard, lequel avait d'ailleurs toujours
été pris en considération par le comité, celui-ci a préconisé que les mesures
récemment adoptées par le Royaume-Uni, relatives au désossage des carcasses de
bovins âgés de plus de 30 mois dans des établissements agréés, soient mises en
oeuvre pour ce qui concerne les échanges intracommunautaires et que la
Communauté adopte les mesures appropriées relatives à l'interdiction de
l'utilisation de farines de viande et d'os dans l'alimentation des animaux. Le comité
estimait en outre que tout contact entre la moelle épinière, d'une part, et le gras,
les os et la viande, d'autre part, devait être exclu, faute de quoi la carcasse devait
être traitée comme abats de viande bovine spécifiés. Enfin, il recommandait la
poursuite des recherches relatives à la question de la transmissibilité de l'ESB à
l'être humain.
- 19.
- Le 24 mars 1996, le SEAC a confirmé ses premières recommandations, mais a
souligné qu'il n'était pas en mesure de confirmer s'il existait ou non un lien causal
entre l'ESB et la variante de la maladie de Creutzfeldt-Jakob découverte
récemment. Il a souligné que cette question requérait de plus amples études
scientifiques.
- 20.
- Le 27 mars 1996, la Commission a adopté la décision 96/239/CE, relative à
certaines mesures d'urgence en matière de protection contre l'ESB (JO L 78, p. 47,
ci-après «décision 96/239»).
- 21.
- Le cinquième considérant de cette décision est libellé comme suit:
«considérant que, dans la situation actuelle, une prise de position définitive sur le
risque de la transmissibilité de l'ESB à l'homme n'est pas possible; que l'existence
du risque ne peut être exclue; que l'incertitude qui en résulte a créé de grandes
préoccupations auprès des consommateurs; que, dans ces conditions et à titre de
mesure d'urgence, il paraît approprié d'interdire de façon transitoire l'expédition
de tout bovin et de toute viande bovine ou produit obtenu à partir de celle-ci, du
territoire du Royaume-Uni vers les autres États membres; que les mêmes
interdictions doivent s'appliquer concernant les exportations vers les pays tiers, afin
d'éviter des détournements de trafic».
- 22.
- Son article 1er dispose:
«Dans l'attente d'un examen global de la situation et nonobstant les dispositions
communautaires adoptées en matière de protection contre l'ESB, le Royaume-Uni
n'expédie pas de son territoire vers les autres États membres et les pays tiers:
de bovins vivants, de leurs spermes et embryons,
des viandes de l'espèce bovine abattu[e]s au Royaume-Uni,
des produits obtenus à partir d'animaux de l'espèce bovine abattus au
Royaume-Uni, qui sont susceptibles d'entrer dans la chaîne alimentaire
humaine ou animale, et les produits destinés à usage médical, cosmétique
ou pharmaceutique,
des farines de viande et d'os provenant de mammifères.»
- 23.
- A la suite de deux avis des 9 et 18 avril 1996 du comité scientifique vétérinaire,
cette décision 96/239 a été modifiée par la décision 96/362/CE de la Commission,
du 11 juin 1996 (JO L 139, p. 17), qui lève l'interdiction d'exporter le sperme de
bovins et d'autres produits comme la gélatine, le phosphate dicalcique, les
aminoacides et peptides, les suifs et les produits ou dérivés de suifs, à la condition
qu'ils soient produits selon les méthodes décrites à l'annexe à la décision, dans des
établissements sous contrôle vétérinaire officiel.
- 24.
- Au même moment, un groupe d'experts internationaux, convoqués par
l'Organisation mondiale de la santé, se réunissait à Genève, avec la participation
de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) et
de l'Office international des épizooties (OIE). Ces experts sont également parvenus
à la conclusion que le lien entre l'ESB et la variante de la maladie de Creutzfeldt-Jakob n'était pas établi, mais que l'explication la plus probable des cas de cette
dernière maladie découverts au Royaume-Uni était l'exposition de la population
britannique à l'ESB. Ils ont recommandé en particulier que tous les pays veillent
à ce que les animaux atteints d'encéphalopathie spongiforme transmissible soient
abattus et à ce que toutes les parties de l'animal et tous les produits obtenus à
partir de celui-ci soient éliminés de telle manière que l'agent infectant ne puisse
pénétrer dans aucune chaîne alimentaire. Ils ont en outre estimé nécessaire de
revoir leurs méthodes de traitement des carcasses pour garantir l'inactivation
effective des agents responsables de l'encéphalopathie spongiforme transmissible.
- 25.
- Dès le mois d'avril 1996, la Communauté a adopté une série de mesures de soutien
au marché de la viande bovine dans l'ensemble de la Communauté, élargissant
notamment de façon sensible les conditions de l'intervention. Au titre de ces
mesures, le Conseil a adopté le règlement (CE) n° 1357/96, du 8 juillet 1996,
prévoyant des paiements supplémentaires à faire en 1996 au titre des primes visées
dans le règlement (CEE) n° 805/68 portant organisation commune des marchés
dans le secteur de la viande bovine, et modifiant ce règlement (JO L 175, p. 9, ci-après «règlement n° 1357/96»).
- 26.
- Par requête déposée au greffe du Tribunal le 21 mai 1996, enregistrée sous le
numéro T-76/96, une association professionnelle, The National Farmers' Union, et
quatre sociétés opérant dans le secteur de l'industrie bovine britannique ont
demandé l'annulation de la décision 96/239. Par requête déposée au greffe du
Tribunal le 25 mai 1996, enregistrée sous le numéro T-76/96 R, ils ont sollicité le
sursis à l'exécution de cette décision, en application de l'article 185 du traité CE.
- 27.
- Par requête déposée au greffe de la Cour le 24 mai 1996, enregistré sous le
numéro C-180/96, le Royaume-Uni a demandé l'annulation de la même décision
et de certains autres actes s'y référant. Par acte séparé déposé au greffe de la Cour
le même jour, enregistré sous le numéro C-180/96 R, il a demandé le sursis à
l'exécution de la décision 96/239 et/ou l'octroi de certaines mesures provisoires.
- 28.
- Par ordonnance du 12 juillet 1996, Royaume-Uni/Commission (C-180/96 R, Rec.
p. I-3903), la Cour a rejeté la demande de sursis à exécution présentée par la
partie requérante. Par ordonnance du 13 juillet 1996, The National Farmers' Union
e.a./Commission (T-76/96 R, Rec. p. II-815), le président du Tribunal a également
rejeté la demande de sursis à exécution présentée par les parties requérantes.
- 29.
- Par ordonnance du Tribunal du 5 décembre 1996, l'affaire T-76/96, The National
Farmers' Union e.a./Commission, a été radiée à la suite du désistement des parties
requérantes.
- 30.
- Par arrêt du 5 mai 1998, Royaume-Uni/Commission (C-180/96, non encore publié
au Recueil), la Cour a rejeté le recours en annulation présenté par l'État membre
requérant.
Procédure et conclusions des parties
- 31.
- Par requête déposée au greffe du Tribunal le 23 septembre 1996, les requérants,
la Confederazione Nazionale Coltivatori Diretti (Coldiretti), organisation syndicale
de droit italien, établie à Rome, à laquelles sont associés les éleveurs italiens par
l'intermédiaire des fédérations régionales et provinciales, ainsi que 110 éleveurs
individuels, ont introduit le présent recours contre le Conseil, la Commission et le
comité vétérinaire permanent.
- 32.
- Par ordonnance du Tribunal (cinquième chambre) du 12 mars 1997, le recours a
été déclaré irrecevable en ce qui concerne le comité vétérinaire permanent.
- 33.
- Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (cinquième chambre) a décidé d'ouvrir
la procédure orale et de procéder à des mesures d'organisation de la procédure
consistant à demander à la Commission de produire les conclusions de la
commission d'enquête instituée par le Parlement européen sur l'ESB rendues le 7
février 1997. Le 9 octobre 1997, la Commission a produit le document sollicité.
- 34.
- Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux
questions orales du Tribunal lors de l'audience publique qui s'est déroulée le 10
mars 1998.
- 35.
- Les requérants concluent à ce qu'il plaise au Tribunal:
condamner solidairement les parties défenderesses, en vertu de l'article 215,
deuxième alinéa, du traité, à payer à chacun des requérants, en fonction de
ce qui lui est dû, une somme en réparation du préjudice à constater en
cours d'instance, majorée d'intérêts moratoires au taux de 10 % et adaptée
en fonction de l'érosion monétaire jusqu'à son versement effectif;
annuler le règlement n° 1357/96, pour autant qu'il limite le montant de la
réparation à verser aux éleveurs et que, de toute manière, il ne quantifie la
réparation qu'en se référant aux pertes de revenus et non à l'augmentation
des coûts;
condamner aux dépens la ou les parties défenderesses jugées responsables.
- 36.
- Lors de l'audience, les requérants ont affirmé que, dans l'hypothèse où le Tribunal
accueillerait la thèse des parties défenderesses selon laquelle le règlement
n° 1357/96 ne limite pas la responsabilité extracontractuelle de la Communauté, ils
renonceraient à leurs conclusions en annulation de ce règlement.
- 37.
- Le Conseil conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:
déclarer la demande d'indemnisation manifestement irrecevable en ce qui
concerne la Coldiretti;
en tout état de cause, rejeter la demande d'indemnisation comme non
fondée;
déclarer la demande d'annulation du règlement n° 1357/96 manifestement
irrecevable;
en tout état de cause, la rejeter comme non fondée;
condamner les requérants aux dépens.
- 38.
- La Commission conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:
déclarer irrecevable la demande d'annulation du règlement n° 1357/96;
déclarer irrecevable la demande d'indemnisation présentée par la Coldiretti;
déclarer irrecevable la demande d'indemnisation, pour autant qu'elle se
fonde sur un droit à la protection de la santé reconnu à tout citoyen de la
Communauté;
rejeter la demande d'indemnisation pour le surplus;
condamner les requérants aux dépens.
- 39.
- Les requérants demandent une expertise destinée à définir les mesures techniques
indispensables pour empêcher l'apparition et la diffusion de l'ESB en ce qui
concerne les viandes bovines, et à quantifier le préjudice, actuel et ultérieur, subi
et à subir par chacun des requérants dans la présente affaire tant en termes dedamnum emergens que de lucrum cessans. A cet égard, ils se réservent le droit de
mettre à la disposition du Tribunal, et/ou du collège d'experts à désigner, toute
documentation nécessaire aux fins de la présente affaire.
Sur les conclusions en indemnisation
Sur la recevabilité
Sur l'exception d'irrecevabilité tirée par le Conseil d'un défaut de conformité de la
requête à l'article 44, paragraphe, 1, sous c), du règlement de procédure
Arguments des parties
- 40.
- Le Conseil rappelle que, conformément à une jurisprudence constante relative à
la portée de l'article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure, toute
requête doit présenter l'objet du litige et l'exposé sommaire des moyens invoqués
de manière suffisamment claire et précise pour permettre au défendeur de
préparer sa défense et au juge communautaire de statuer sur le recours, le cas
échéant, sans autres informations à l'appui.
- 41.
- Pour ce qui est plus précisément des recours en indemnisation comme celui de
l'espèce, il invoque une jurisprudence bien établie d'après laquelle une requête qui
ne permet pas au Tribunal d'identifier le préjudice subi par le requérant ne satisfait
pas aux exigences minimales que l'article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement
de procédure établit pour qu'un recours soit recevable (ordonnance du Tribunal
du 29 novembre 1993, Koelman/Commission, T-56/92, Rec. p. II-1267).
- 42.
- Il soutient que les requérants n'ont manifestement pas satisfait à cette condition,
puisqu'ils ne précisent ni la nature exacte ni l'étendue du préjudice directement
subi par chacun d'eux. Il rappelle notamment que, dans leur requête, ils demandent
au Tribunal de charger un groupe d'experts de l'évaluation du montant à verser à
chacun d'eux et qu'ils affirment que le préjudice a affecté l'ensemble des éleveurs
de bovins en Italie.
- 43.
- Dès lors, la demande d'indemnisation devrait être rejetée comme étant
manifestement irrecevable pour manque de cohérence, de clarté et de précision.
- 44.
- Lors de l'audience, les requérants ont contesté cette exception d'irrecevabilité en
rappelant que le Conseil et la Commission reconnaissent l'existence des préjudices
causés aux éleveurs. Ils ont ajouté que la quantification exacte du dommage est une
charge excessive à laquelle ils ne peuvent pas faire face, raison pour laquelle ils ont
demandé au Tribunal une expertise technique.
Appréciation du Tribunal
- 45.
- En vertu de l'article 19 du statut (CE) de la Cour et de l'article 44, paragraphe 1,
sous c), du règlement de procédure du Tribunal, toute requête doit indiquer l'objet
du litige et l'exposé sommaire des moyens invoqués.
- 46.
- Cette indication doit être suffisamment claire et précise pour permettre à la partie
défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas
échéant, sans autres informations à l'appui. Afin de garantir la sécurité juridique
et une bonne administration de la justice, il faut, pour qu'un recours soit recevable,
que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels se fonde celui-ci
ressortent, à tout le moins sommairement, mais d'une façon cohérente et
compréhensible, du texte de la requête elle-même (voir arrêts de la Cour du 13
décembre 1990, Commission/Grèce, C-347/88, Rec. p. I-4747, point 28, et du 31
mars 1992, Commission/Danemark, C-52/90, Rec. p. I-2187, points 17 et suivants;
ordonnance Koelman/Commission, précitée, point 21; arrêt du Tribunal du 18
septembre 1996, Asia Motor France e.a./Commission, T-387/94, Rec. p. II-961,
point 106; ordonnance du Tribunal du 21 novembre 1996, Syndicat des producteurs
de viande bovine e.a./ Commission, T-53/96, Rec. p. II-1579, point 21, et arrêt du
Tribunal du 29 janvier 1998, Dubois et Fils/Conseil et Commission, T-113/96, Rec.
p. II-125, point 29).
- 47.
- Pour satisfaire à ces exigences, une requête visant à la réparation des dommages
causés par une institution communautaire doit contenir des éléments qui
permettent d'identifier, notamment, le préjudice que le requérant prétend avoir
subi et, plus précisément, le caractère et l'étendue de ce préjudice (ordonnance
Koelman/Commission, précitée, points 22 à 24, et arrêt du Tribunal du 13
décembre 1995, Exporteurs in Levende Varkens e.a./Commission, T-481/93 et T-484/93, Rec. p. II-2941, point 75).
- 48.
- En l'espèce, la requête évoque, dans ses pages 18 et 19, les différentes catégories
des préjudices subis par les éleveurs de viande bovine, à savoir, premièrement, le
damnum emergens lié à une vente des animaux vivants au-dessous du prix de
revient, à un prix de vente qui, selon les requérants, serait inférieur à 40 % de ce
que les éleveurs attendaient, deuxièmement, le damnum emergens lié aux coûts
d'entretien des animaux invendus à la fin du cycle d'engraissement, troisièmement,
le lucrum cessans lié aux ventes d'animaux manquées pour l'année en cours et,
quatrièmement, le lucrum cessans lié à l'effondrement persistant de la
consommation de viande bovine dans les prochaines années.
- 49.
- Si les mémoires des requérants ne quantifient pas de façon définitive les préjudices
subis par chaque éleveur, ils contiennent néanmoins, aux annexes 10 et 11 à la
requête, des estimations détaillées des pertes prétendument subies par le cheptel
bovin italien, et les critères et paramètres suivis dans leurs estimations y sont
indiqués. Nonobstant l'apport de telles estimations, les requérants soulignent les
énormes difficultés qu'ils ont rencontrées pour évaluer et quantifier correctement
le préjudice subi par chacun des éleveurs. Ils indiquent que c'est précisément pour
cette raison qu'ils ont demandé que cette constatation complexe soit réalisée par
un collège d'experts.
- 50.
- Dans ces conditions, il y a lieu d'admettre que la requête, complétée par les
informations produites dans les annexes, est suffisamment précise quant à la nature
et au caractère des préjudices invoqués et que ni les parties défenderesses ni le
Tribunal n'ont été empêchés de connaître l'étendue approximative des préjudices
allégués. Dès lors, les parties ont pu, sans autres informations à l'appui, préparer
leur défense et le Tribunal est en mesure de statuer sur le recours, sans préjudice
d'un éventuel besoin de précisions ultérieures sur la portée exacte des dommages
subis par chacun des requérants.
- 51.
- Par conséquent, le Conseil soutient à tort que la requête ne remplit pas les
conditions de clarté et de précision requises par l'article 44, paragraphe 1, sous c),
du règlement de procédure.
- 52.
- Par suite, il y a lieu de rejeter l'exception d'irrecevabilité soulevée.
Sur l'exception d'irrecevabilité tirée par les parties défenderesses d'un défaut
d'intérêt à agir de la Coldiretti
Arguments des parties
- 53.
- Les parties défenderesses contestent la recevabilité de la demande de réparation
présentée par la Coldiretti. Elles se réfèrent à la jurisprudence selon laquelle une
organisation constituée pour la défense des intérêts collectifs d'une catégorie
déterminée de justiciables n'est pas fondée à introduire une demande visant à
obtenir une indemnisation des préjudices subis par ses adhérents. Selon le juge
communautaire, un droit à agir au titre de l'article 215 du traité ne serait reconnu
à des associations professionnelles que dans le cas où elles peuvent faire valoir en
justice ou bien un intérêt propre, distinct de celui de leurs membres, ou bien un
droit à réparation qui leur a été cédé par d'autres personnes (arrêt de la Cour du
18 mars 1975, Union syndicale e.a./Conseil, 72/74, Rec. p. 401, points 20 à 22, et
arrêt Exporteurs in Levende Varkens e.a./Commission, précité, point 64;
ordonnance Syndicat des producteurs de viande bovine e.a./Commission, précitée,
point 28). Or, il ne serait pas établi dans la requête, même implicitement, que la
Coldiretti a subi un dommage propre ou qu'elle exerce un droit à réparation que
ses membres lui auraient cédé. la Coldiretti n'aurait ni prouvé ni même soutenu
que l'une de ces hypothèses se vérifie en l'espèce. En conséquence, sa demande
serait manifestement irrecevable.
- 54.
- Les requérants admettent que la Coldiretti est une association sans personnalité
juridique. L'association aurait néanmoins le droit d'agir. Le défaut de personnalité
juridique n'aurait pas d'importance et ne l'empêcherait nullement d'être un sujet
de droit distinct des associés, doté d'une capacité d'agir propre. Pour cette raison,
la Coldiretti aurait un intérêt à voir établie la responsabilité des institutions et/ou
de leurs fonctionnaires dans la réalisation des préjudices visés dans la requête.
- 55.
- Elle aurait le droit d'agir, car les associations non reconnues comme elle seraient
dotées d'une personnalité morale distincte de la personnalité de leurs membres,
même si sous l'angle de la responsabilité patrimoniale elles ne jouissent pas
d'une autonomie patrimoniale complète.
Appréciation du Tribunal
- 56.
- Comme la Commission l'a précisé, l'exception d'irrecevabilité examinée n'est pas
fondée sur des arguments liés à la forme juridique de la requérante ou à son
absence de personnalité morale en droit italien, mais se rattache aux conditions
fixées par la jurisprudence communautaire relative à l'intérêt à agir d'une
association professionnelle.
- 57.
- Un droit d'agir au titre de l'article 215 du traité n'est reconnu à des associations
professionnelles que dans le cas où elles peuvent faire valoir en justice ou bien un
intérêt propre distinct de celui de leurs membres ou bien un droit à réparation qui
leur a été cédé par d'autres personnes (arrêt de la Cour du 4 octobre 1979, 238/78,
Ireks-Arkady/Conseil et Commission, Rec p. 2955, point 5; arrêt Exporteurs in
Levende Varkens e.a./Commission, précité, points 76 et 77, et ordonnance Syndicat
des producteurs de viande bovine e.a./Commission, précitée, points 28 et 29).
- 58.
- S'il est vrai, comme l'ont fait valoir les requérants à l'audience, que la Coldiretti
représente les intérêts des agriculteurs et des éleveurs (article 2 de ses statuts), il
n'en demeure pas moins que seules des associations et non des éleveurs individuels
peuvent figurer parmi ses membres. En effet, selon l'article 7 de ses statuts, la
Coldiretti est une confédération composée des fédérations régionales et des
fédérations provinciales de cultivateurs et éleveurs directs. Aux termes de l'article
10, peuvent également en devenir membres les organisations d'entrepreneurs
agricoles qui poursuivent des buts analogues à ceux de la Coldiretti.
- 59.
- Or, la Coldiretti n'invoque aucun préjudice propre dont elle demanderait
l'indemnisation, ni ne fait valoir une cession de droits ou un mandat explicite
l'habilitant à présenter une demande de réparation des préjudices subis par les
associations adhérentes et leurs membres, éleveurs individuels.
- 60.
- Il s'ensuit qu'elle ne justifie d'aucun intérêt à agir en l'espèce.
- 61.
- Dès lors, les conclusions en indemnisation doivent être rejetées comme irrecevables
en tant qu'elles sont présentées par la Coldiretti.
Sur l'exception d'irrecevabilité tirée par la Commission de ce que la demande se
fonde sur un droit à la protection de la santé reconnu à tout citoyen de la
Communauté
Arguments des parties
- 62.
- La Commission observe que les requérants, en rappelant la nécessité de protéger
les intérêts économiques des consommateurs et la protection de leur droit à la
santé, et en faisant valoir le préjudice que les «citoyens communautaires» auraient
subi en raison de la crise de l'ESB, intentent une action, non pas dans leur propre
intérêt, mais dans l'intérêt général de tous leurs concitoyens européens, qu'ils
prétendent de cette façon implicitement représenter. Dans ces conditions, l'intérêt
propre des requérants se confondrait avec l'intérêt de la collectivité ou des
consommateurs. Or, une action destinée à protéger l'intérêt collectif ne serait pas
reconnue en droit communautaire.
- 63.
- La Commission rappelle par ailleurs la jurisprudence relative à l'irrecevabilité des
recours en indemnisation lorsqu'ils ne contiennent aucun élément, même sommaire,
permettant d'identifier les trois éléments clés, à savoir le préjudice subi (son
caractère et son importance), le comportement illicite des institutions
communautaires et l'existence d'un lien de causalité (arrêts de la Cour du 21 mai
1976, Roquette frères/Commission, 26/74, Rec. p. 677, points 22 à 24, et du
Tribunal du 10 juillet 1990, Automec/Commission, T-64/89, Rec. p. II-367, point
73). Elle en conclut que le recours est irrecevable également pour défaut de
détermination du préjudice sur la santé prétendument subi par les requérants.
Appréciation du Tribunal
- 64.
- La Commission fait une interprétation erronée de la requête, lorsqu'elle considère
que les requérants intentent une action dans l'intérêt général de tous leurs
concitoyens européens.
- 65.
- Certes, dans un passage de la requête, les requérants évoquent les articles 3, sous
o), 129 et 129 A du traité et rappellent que, en vertu de ces dispositions, les
institutions communautaires sont chargées de contribuer à garantir un niveau élevé
de protection de la santé et des intérêts des consommateurs. Néanmoins, compte
tenu du contexte dans lequel sont énoncées ces affirmations, du libellé des
conclusions de la requête et de l'absence de référence, dans leurs mémoires, à des
dommages causés à la santé de personnes, force est de constater que les requérants
n'invoquent pas de dommages à la santé de quiconque et qu'ils ne sollicitent pas
de réparation à cet égard.
- 66.
- Dès lors, il y a lieu de rejeter l'exception d'irrecevabilité soulevée par la
Commission.
Sur le fond
Arguments des parties
Sur l'existence d'un comportement illégal du Conseil et de la Commission
- 67.
- Les requérants soutiennent que les institutions communautaires, et la Commission
en particulier, ont fait un mauvais usage des «pouvoirs-devoirs» que la législation
en vigueur leur attribue pour prévenir la propagation de l'ESB et qu'elles portent
ainsi la responsabilité des graves perturbations intervenues sur le marché de la
viande bovine.
- 68.
- Ils observent que la mission fondamentale de la Communauté proclamée à l'article
2 du traité serait précisée par une série de missions particulières confiées à la
Communauté par diverses dispositions du traité.
- 69.
- Les requérants relèvent en particulier que:
selon l'article 39 du traité, la politique agricole commune a pour but
d'accroître la productivité, de relever le revenu individuel de ceux qui
travaillent dans l'agriculture, de stabiliser les marchés, de garantir la sécurité
des approvisionnements et d'assurer des prix raisonnables aux
consommateurs;
aux termes de l'article 129 du traité, la Communauté contribue à assurer un
niveau élevé de protection de la santé humaine;
l'article 129 A traite de la protection des consommateurs.
- 70.
- Pour les requérants, bien que la Commission, dès 1989, ait été informée des
nombreux foyers d'ESB découverts au Royaume-Uni et des risques importants de
transmission de la maladie par les animaux vivants, les institutions communautaires
se sont abstenues de prendre les précautions nécessaires pour éviter la propagation
de l'épidémie et elles se sont limitées à des interventions qui se sont ultérieurement
avérées insuffisantes et inefficaces.
- 71.
- Plus précisément, les requérants soutiennent que la Commission:
n'a pas exercé ses pouvoirs de surveillance afin de garantir que les États
membres fassent le nécessaire pour assurer que les bovins et porcins
d'élevage, de rente ou de boucherie destinés aux échanges
intracommunautaires ne constituent pas une source de propagation de
maladies contagieuses;
n'a pas fait, dans la perspective de l'achèvement du marché intérieur, ce qui
était nécessaire pour garantir la protection de la santé et des intérêts
économiques des consommateurs en ce qui concerne les échanges
intracommunautaires de denrées alimentaires, en harmonisant et en rendant
plus efficace, à cette fin, le contrôle officiel des denrées susmentionnées, sur
la base des directives du Conseil 89/397/CEE, du 14 juin 1989, relative au
contrôle officiel des denrées alimentaires (JO L 186, p. 23), 92/59/CEE, du
29 juin 1992, relative à la sécurité générale des produits (JO L 228, p. 24),
et 93/99/CEE, du 29 octobre 1993, relative à des mesures additionnelles
concernant le contrôle officiel des denrées alimentaires (JO L 290, p. 14) ;
n'a pas adopté les mesures de sauvegarde et de contrôle nécessaires pour
prévenir la propagation de maladies susceptibles de comporter de graves
risques pour les animaux ou la santé de l'homme, comme celles visées par
les directives du Conseil 89/662/CEE, du 11 décembre 1989, relative aux
contrôles vétérinaires applicables dans les échanges intracommunautaires
dans la perspective de la réalisation du marché intérieur (JO L 395, p. 13),
et 90/425/CEE, du 26 juin 1990, relative aux contrôles vétérinaires et
zootechniques applicables dans les échanges intracommunautaires de
certains animaux vivants et produits dans la perspective de la réalisation du
marché intérieur (JO L 224, p. 29).
- 72.
- En particulier, les requérants reprochent à la Commission de n'avoir pas exercé les
pouvoirs suivants reconnus par la directive 89/662, du 11 décembre 1989, précitée,
à savoir:
celui, prévu à l'article 8, paragraphe 1, d'envoyer sur place une mission
d'inspection, de charger un vétérinaire officiel de vérifier les faits et de
demander à l'État membre d'intensifier les contrôles;
celui, prévu aux articles 9, paragraphe 2, et 15, d'envoyer ses représentants
sur place pour examiner les mesures prises par l'autorité nationale et
émettre un avis sur ces mesures;
celui, prévu à l'article 9, paragraphe 3, de prendre des mesures
conservatoires et de les soumettre ensuite au comité vétérinaire permanent;
celui, prévu aux articles 9, paragraphe 4, 16, paragraphes 2 et 3, et 17,
d'arrêter les mesures, les recommandations et les décisions nécessaires.
- 73.
- Ils soutiennent par ailleurs que plusieurs mesures et comportements adoptés par
les institutions démontrent leur négligence.
- 74.
- En premier lieu, la décision 94/474, du 27 juillet 1994, précitée, concernant
certaines mesures de protection contre l'ESB, a autorisé les exportations de viande
bovine fraîche en provenance du Royaume Uni, à la seule condition que soit
ajoutée, dans le certificat de salubrité, la formule neutre suivante: «viande bovine
fraîche désossée sous forme de muscle, débarrassée des tissus adhérents, y compris
des tissus nerveux et lymphatiques apparents». Or, selon les requérants, une telle
mesure n'était manifestement pas de nature à stopper la propagation de l'épidémie.
- 75.
- En second lieu, la décision 95/287, du 18 juillet 1995, précitée, a autorisé, dans une
perspective que rien n'aurait justifié, l'exportation des viandes bovines originaires
du Royaume Uni, même en provenance d'exploitations dans lesquelles un ou
plusieurs cas d'ESB avaient été confirmés, à la seule condition que la formule
anodine susvisée soit apposée sur le certificat de salubrité.
- 76.
- Au soutien des observations précédentes et de l'allégation d'une responsabilité de
la Communauté fondée sur l'article 215 du traité, les requérants invoquent les
conclusions du rapport de la commission d'enquête sur l'ESB constituée par le
Parlement européen pour la détermination des éventuelles responsabilités
politiques de la Commission et du Conseil. Ils renvoient en particulier à certains
passages dudit rapport.
- 77.
- En ce qui concerne la nature juridique de la responsabilité invoquée, les requérants
concluent qu'il s'agirait en l'espèce d'une responsabilité objective fondée sur un
comportement fautif. Les parties défenderesses auraient commis des fautes en
manquant à leur devoir d'agir pour limiter la propagation d'une épidémie et à celui
de réagir contre le manquement continu du Royaume-Uni à ses obligations
découlant des dispositions adoptées pour lutter contre la maladie. Dès lors que le
«résultat» n'aurait pas du tout été atteint et que, au contraire, le comportement
des institutions se serait traduit par un résultat opposé à celui qu'elles devaient
avoir en vue, leur obligation d'indemnisation serait manifeste, sans même qu'il soit
nécessaire d'examiner chacune des négligences des parties défenderesses aux fins
de leur condamnation.
- 78.
- Les institutions communautaires ne pourraient se retrancher derrière des notions
comme celles d'«activité législative» et de «pouvoir d'appréciation», parce qu'il
leur est également reproché plusieurs omissions et actes d'ordre administratif et
que le pouvoir discrétionnaire dont elles disposent pour adopter ou non une
disposition ne saurait se traduire par un comportement arbitraire.
- 79.
- Lors de l'audience, les requérants ont déclaré que, en définitive, ils reprochent aux
institutions communautaires de ne pas avoir adopté en 1990 les mêmes mesures
qu'elles ont adoptées en 1996, à savoir une interdiction des ventes bovines en
provenance du Royaume-Uni vers l'Europe continentale.
- 80.
- La Commission rappelle les dispositions adoptées par la Communauté pour faire
face à la crise de l'ESB. Ainsi, à la lumière des progrès successifs accomplis dans
la connaissance de l'épidémiologie de la maladie, la Commission a adopté, à partir
de 1989, diverses mesures destinées, d'une part, à prévenir la propagation de l'ESB
dans les États membres autres que le Royaume-Uni, où avaient été repérés les
premiers foyers, et, d'autre part, à éradiquer cette maladie. Ces mesures seraient
allées de pair avec celles prises simultanément par les autorités du Royaume-Uni.
- 81.
- La Commission observe que, pour conclure à l'illégalité de son comportement, il
faut analyser le caractère adéquat des mesures adoptées à partir du mois de juillet
1989, à la suite de la publication du rapport du SEAC sur l'évolution de la
pathologie au Royaume-Uni, rapport qui constatait les premiers cas d'ESB et faisait
état des connaissances scientifiques sur le sujet. Le caractère adéquat de ces
mesures devrait être apprécié au regard des connaissances scientifiques disponibles
au moment de leur adoption. Sur ce point, la Commission rappelle qu'elle a
demandé à plusieurs reprises au comité scientifique vétérinaire, et notamment au
sous-groupe ESB spécialement constitué, de débattre de la question et de donner
son avis sur différents problèmes liés à la maladie. Elle ajoute qu'elle a organisé
deux symposiums internationaux sur ce thème, en novembre 1990 et en septembre
1993, qu'elle a participé à l'organisation d'une conférence internationale qui s'esttenue en septembre 1993 et qu'elle a, par ailleurs, contribué au financement de la
recherche en la matière.
- 82.
- Selon elle, il serait incompatible avec les responsabilités incombant aux institutions
en vertu de l'article 39 du traité d'adopter, face à l'apparition d'une pathologie
déterminée, des mesures restrictives n'ayant ni justification ni fondement
scientifique raisonnable. Or, pendant longtemps, les milieux scientifiques auraient
jugé que la transmission de la maladie à l'homme était assez improbable et le
comité scientifique vétérinaire se serait exprimé en ce sens dans ses avis des 27
septembre 1989 , 8 janvier 1990 , 6 juin 1990 et 17 janvier 1992 . Ce point de vue
aurait en outre été partagé par l'Office international des épizooties (OIE), dans son
rapport de septembre 1990 , ainsi que par l'Organisation mondiale de la santé
(OMS) dans un rapport de 1991.
- 83.
- Ce ne serait qu'à partir de 1993 que les éventuels liens entre l'ESB et la maladie
de Creutzfeldt-Jakob chez l'homme auraient fait l'objet de réflexions et de
vérifications approfondies, même s'il ne s'agissait alors que d'une pure «hypothèse
de travail» ne rencontrant à l'époque aucun soutien dans le monde médical et
scientifique.
- 84.
- A cet égard, la Commission se réfère au mémorandum de l'OMS de 1993 relatif
à l'évolution de l'ESB au Royaume-Uni , aux conclusions des experts du groupe ad
hoc de l'OIE chargé de l'ESB lors du symposium qui s'est déroulé à Paris en
septembre 1994, aux conclusions auxquelles est parvenue l'OMS au terme d'un
symposium tenu sur le thème de l'ESB à Genève du 17 au 19 mai 1995 et, enfin,
aux avis du comité scientifique pour l'alimentation du 21 septembre 1995 et du
comité scientifique vétérinaire des 7 et 20 novembre 1995.
- 85.
- Selon elle, ce sont les nouvelles informations publiées le 20 mars 1996 dans le
cadre du communiqué du SEAC qui ont rendu nécessaire l'adoption d'urgence de
mesures de restriction, objet de la décision 96/239, dans la mesure où, dans ce
communiqué, on soutenait pour la première fois dans les milieux scientifiques que
l'agent responsable de l'ESB était probablement un agent pathogène dangereux
pour la santé de l'homme.
- 86.
- Il serait donc incorrect d'évaluer a posteriori le comportement des institutions
communautaires antérieur à cette date. Tant que la possibilité de transmission de
l'ESB à l'homme est restée une pure hypothèse scientifique, la Commission aurait
estimé que la conciliation des différents intérêts en jeu, à savoir ceux des
opérateurs du secteur concernant notamment la stabilité du marché et ceux des
consommateurs, était réalisée de manière adéquate par l'interdiction d'expédier à
partir du Royaume-Uni des bovins vivants de plus de six mois et toute une série
de produits susceptibles de véhiculer la maladie. Or, selon une jurisprudence
constante, le principe de proportionnalité, qui fait partie des principes généraux du
droit communautaire, exigerait que les actes des institutions communautaires ne
dépassent pas les limites de ce qui est approprié et nécessaire à la réalisation des
objectifs légitimement poursuivis par la réglementation en cause, étant entendu
que, lorsqu'un choix s'offre entre plusieurs mesures appropriées, il convient de
recourir à la moins contraignante, et que les inconvénients causés ne doivent pas
être démesurés par rapport aux buts visés (arrêt de la Cour du 29 février 1996,
France et Irlande/Commission, C-296/93 et C-307/93, Rec. p. I-795, point 30).
Partant, on ne pourrait imputer à la Commission une erreur en ce qui concerne
l'évaluation opérée avant le 20 mars 1996 des risques liés à l'ESB en fonction des
connaissances scientifiques de l'époque.
- 87.
- Elle conclut à l'inexistence d'un comportement illégal de sa part et, dès lors, au
rejet du recours au fond.
- 88.
- Le Conseil soutient également que le recours en indemnisation n'est pas fondé. Il
rappelle les conditions nécessaires pour l'engagement de la responsabilité
extracontractuelle de la Communauté et remarque qu'il incombe aux requérants
d'établir l'illégalité du comportement de la Communauté face à la propagation de
l'épidémie d'ESB.
- 89.
- Pour ce qui est des actes du Conseil et de la Commission adoptés dans le secteur
vétérinaire et considérés comme inadéquats par les requérants pour enrayer la
propagation de l'ESB, il se réfère à la jurisprudence constante de la Cour d'après
laquelle dans un contexte de normes communautaires caractérisé par l'exercice d'un
large pouvoir discrétionnaire, indispensable à la mise en oeuvre de la politique
agricole commune, la responsabilité de la Communauté ne pourrait être engagée
que de manière exceptionnelle dans les cas où l'institution concernée aurait
méconnu de manière manifeste et grave les limites qui s'imposent à l'exercice de
ses pouvoirs (arrêts de la Cour du 2 décembre 1971, Zuckerfabrik
Schöppenstedt/Conseil, 5/71, Rec. p. 975, point 115, et du 5 décembre 1979,
Amylum et Tunnel Refineries/Conseil et Commission, 116/77 et 124/77, Rec.
p. 3497, point 13).
- 90.
- Il fait valoir qu'il a conféré à la Commission la compétence pour adopter des
mesures de sauvegarde ou de protection destinées à protéger la santé humaine et
animale, tout en réservant des compétences d'exécution aux États membres.
- 91.
- En outre, il rappelle le partage des compétences existant entre lui et la Commission
dans le domaine vétérinaire. Il souligne qu'il ressort du traité lui-même, et en
particulier des articles 5, 145 et 155, que la législation dans ce domaine doit être
mise en oeuvre conjointement par les États membres et la Commission. Il ajoute
qu'il appartient à la Commission de lui soumettre des propositions afin qu'il puisse
adopter des dispositions législatives spécifiques concernant l'ESB et que, depuis
l'apparition de l'épidémie en 1986, il n'a été saisi à aucun moment d'une
proposition de la Commission visant spécifiquement à lutter contre l'ESB. Par
conséquent, il conteste que la législation cadre ait été inadéquate, dès lors qu'il
avait déjà habilité la Commission à prendre, dans l'exercice de son pouvoir
d'appréciation, les mesures qu'elle jugerait nécessaires face à des zoonoses, même
nouvelles, tout en réservant certaines compétences aux États membres.
- 92.
- Il considère que les requérants n'ont pas démontré qu'il a adopté des actes
constituant une violation grave et manifeste d'une règle supérieure de droit
protégeant les particuliers et qu'il a manqué à une obligation d'agir, puisque qu'il
n'a pas compétence d'exécution dans ce domaine et qu'il ne peut agir de sa propre
initiative en l'absence de propositions de la Commission.
- 93.
- Dès lors, il estime qu'une des conditions de sa responsabilité n'est pas remplie et
que, par suite, la demande d'indemnisation doit être rejetée sans examen de la
question de l'existence de faits dommageables ni celle d'un lien de causalité.
Sur l'existence d'un préjudice et d'un lien de causalité
- 94.
- Les requérants allèguent que le préjudice réparable est constitué, d'une part, par
le damnum emergens occasionné par la vente au-dessous du prix courant d'animaux
vivants en raison de l'effondrement des prix sur le marché et par des coûts plus
importants d'entretien des animaux invendus à la fin du cycle d'engraissement, et,
d'autre part, par le lucrum cessans dû aux ventes manquées pour l'année en cours
et à l'effondrement constant de la consommation de viande bovine dans les
prochaines années.
- 95.
- Ils sollicitent une expertise aux fins de la détermination du montant des dommages
subis par chacun des éleveurs, précisant qu'ils se réservent le droit de mettre à la
disposition du Tribunal et/ou des consultants à désigner toute documentation
nécessaire à cet effet.
- 96.
- Lors de l'audience, ils ont déclaré que, si les institutions avaient décidé en 1990 un
embargo total à l'égard des ventes bovines en provenance du Royaume Uni, le
marché de la viande bovine dans les autres États membres ne se serait pas écroulé,
car de telles mesures auraient immédiatement circonscrit le foyer d'infection au
Royaume-Uni et auraient été interprétées par les consommateurs comme un signal
très fort de contrôle de la part des institutions communautaires. Par conséquent,
le défaut d'action des institutions serait le facteur à l'origine du préjudice causé par
la chute du marché.
- 97.
- La Commission ne conteste pas l'ampleur des pertes économiques subies,
notamment par les éleveurs, en raison de la crise de l'ESB. Cependant, elle estime
que les requérants n'ont nullement démontré que le préjudice qu'ils ont subi trouve
son origine dans le comportement des institutions communautaires. La chute de la
demande de viande bovine à l'origine du préjudice invoqué aurait été provoquée,
comme la Cour l'aurait reconnu dans son ordonnance du 12 juillet 1996, Royaume-Uni/Commission, précitée (point 87), et comme l'auraient admis implicitement les
requérants eux-mêmes dans leur requête (p. 18), par la déclaration du 20 mars
1996 du SEAC concernant l'existence probable d'un lien entre l'ESB et la variante
de la maladie de Creutzfeldt-Jakob.
- 98.
- Le Conseil ne conteste pas que des préjudices peuvent avoir été subis, mais
soutient que les requérants ne précisent ni la nature exacte ni l'étendue du
préjudice directement subi par chacun d'eux, comme le démontrerait, notamment,
la demande d'expertise présentée au Tribunal.
Appréciation du Tribunal
- 99.
- L'engagement de la responsabilité de la Communauté dans le cadre de l'article 215,
deuxième alinéa, du traité est subordonné à la réunion d'un ensemble de conditions
en ce qui concerne l'illégalité du comportement reproché aux institutions
communautaires, la réalité du dommage et l'existence d'un lien de causalité entre
le comportement de l'institution et le préjudice allégué (arrêts de la Cour du 27
mars 1990, Grifoni/CEEA, C-308/87, Rec. p. I-1203, point 6, et du 7 mai 1992,
Pesquerias De Bermeo et Naviera Laida/Commission, C-258/90 et C-259/90, Rec.
p. I-2901, point 42; arrêt du Tribunal du 18 septembre 1995, Blackspur e.a./Conseil
et Commission, T-168/94, Rec. p. II-2627, point 38).
- 100.
- En l'espèce, il convient d'examiner d'abord la question de l'existence d'un lien de
causalité entre le comportement prétendument illégal des institutions
communautaires et le préjudice invoqué par les requérants.
- 101.
- Un lien de causalité au sens de l'article 215, deuxième alinéa, du traité est admis
lorsqu'il existe un lien direct de cause à effet entre la faute commise par
l'institution concernée et le préjudice invoqué, lien dont il appartient aux
requérants d'apporter la preuve (arrêts de la Cour du 14 juillet 1961, Société
commerciale Antoine Vloeberghs/Haute Autorité, 9/60 et 12/60, Rec. p. 391, 428,
et du 30 janvier 1992, Finsider e.a./Commission, C-363/88 et C-364/88, Rec. p. I-359, point 25; arrêt Blackspur e.a./Conseil et Commission, précité, point 40).
- 102.
- La faute alléguée par les requérants consiste essentiellement dans l'adoption de
normes et de mesures insuffisantes, erronées ou inadéquates, pour faire face à
l'ESB. Plus précisément, elle consisterait dans le défaut d'adoption, en 1990, d'une
décision de confinement total ou d'interdiction de circulation vers l'Europe
continentale des produits de viande bovine en provenance du Royaume-Uni, telle
que celle prise en mars 1996. Ce serait donc la persistance de cette omission entre
1990 et 1996, mais aussi l'insuffisance des mesures adoptées pendant cette période,
qui constitueraient le comportement illégal reproché aux institutions.
- 103.
- Les parties défenderesses ne contestent pas l'existence d'un préjudice économique
subi par les éleveurs bovins du continent à la suite des événements survenus
pendant le mois de mars 1996.
- 104.
- Il apparaît, d'une part, que l'existence de l'ESB au sein du cheptel du Royaume-Uni, détectée pour la première fois en 1986, est un fait largement connu, plus de
160 000 cas d'ESB ayant été confirmés dans cet État membre depuis 1988, et,
d'autre part, que des cas sporadiques d'ESB se sont également déclarés en France,
en Irlande, au Portugal et en Suisse.
- 105.
- A partir de 1989, les institutions communautaires ont adopté une série de
dispositions (voir ci-dessus points 4 à 13) dont l'objet était de faire face à la crise
de l'ESB. Cependant, ces mesures, bien que destinées à prévenir la propagation de
l'ESB dans les États membres de la Communauté autres que le Royaume-Uni, à
éradiquer la maladie et à éliminer ses effets nocifs, ne comportaient pas un
confinement total du cheptel bovin et des produits de viande bovine du Royaume-Uni sur le territoire de celui-ci, car certains animaux vivants âgés de moins de six
mois issus des vaches pour lesquelles l'ESB n'avait été ni confirmée ni suspectée,
et certains produits de viande bovine, sperme et embryons, pouvaient continuer à
être commercialisés sur le continent jusqu'à l'adoption par la Commission de la
décision 96/239.
- 106.
- Malgré la connaissance de la maladie et l'absence d'embargo total avant le mois
de mars de 1996, la confiance des consommateurs dans la viande bovine n'a pas été
altérée, comme le démontre le fait que la demande n'a pas diminué brusquement
jusqu'au 20 mars 1996. A cet égard, ni la connaissance de l'existence de cette
maladie au sein du cheptel bovin du Royaume-Uni, de sa gravité et de la possibilité
de propagation parmi les animaux du continent, ni l'absence de certitude quant à
la question de savoir si la viande vendue sur le continent pouvait ou non provenir
d'animaux contaminés, ni, enfin, l'appréciation par l'opinion publique des
comportements des parties défenderesses dans leur lutte contre l'ESB n'ont
provoqué chez les consommateurs une réaction semblable à celle produite par le
communiqué du SEAC en mars de 1996.
- 107.
- Comme le souligne à juste titre la Commission, les requérants eux-mêmes
reconnaissent dans leur requête (p. 18) qu'ils n'avaient aucune raison de prévoir
une modification de la demande et que, lorsque le cycle d'engraissement a
commencé en novembre 1995, ils pouvaient légitimement s'attendre à une demande
de viande bovine au moins égale à celle de l'année précédente.
- 108.
- Ce n'est que le 20 mars 1996 que la probable transmissibilité de la maladie à
l'homme a été annoncée par le SEAC lorsque, faisant état de dix cas d'une variante
de la maladie de Creutzfeldt-Jakob identifiés chez des personnes âgées de 42 ans
au plus, il a proclamé: «Bien qu'il n'existe aucune preuve directe d'un lien, compte
tenu des données actuelles et en l'absence de toute alternative crédible,
l'explication actuellement la plus probable est que ces cas sont liés à une exposition
à l'ESB avant l'instauration, en 1989, de l'interdiction de certains abats de viande
bovine spécifiés. Il s'agit là d'un motif de grande inquiétude.»
- 109.
- La nouvelle information contenue dans ce communiqué était celle du passage d'une
hypothèse à une possibilité de lien entre l'ESB et la maladie de Creutzfeldt-Jakob.
Par conséquent, même si l'ESB existait auparavant, c'est cette nouvelle information
qui a modifié de façon sensible la perception chez les consommateurs du danger
que cette maladie représentait pour la santé humaine (arrêt du 5 mai 1998,
Royaume-Uni/Commission, précité, points 52 et 53).
- 110.
- A la suite du communiqué en question, les autorités du Royaume-Uni ont adopté
des mesures d'urgence, comme la décision d'interdire, d'une part, la vente et la
fourniture de farines de viande et d'os provenant de mammifères, ainsi que leur
utilisation dans l'alimentation destinée à tous les animaux d'élevage, y compris la
volaille, les chevaux et les poissons d'élevage et, d'autre part, la vente de viandes
provenant de bovins âgés de plus de 30 mois pour la consommation humaine. Au
même moment, un certain nombre d'États membres et de pays tiers ont adopté des
mesures interdisant l'importation de bovins ou de viande bovine en provenance du
Royaume-Uni ou, s'agissant des mesures prises par certains pays tiers, de l'Union
européenne.
- 111.
- Comme les requérants eux-mêmes l'ont reconnu, le communiqué du SEAC, ainsi
que les mesures adoptées par les États membres, ont été l'objet d'une large
couverture médiatique dans la Communauté, la nature et l'extension de ladite
couverture ayant eu ensuite une incidence importante et directe sur les
préoccupations immédiates des consommateurs. A cet égard, le Tribunal constate
que, dans certains passages de l'annexe 8 à leur requête, les requérants eux-mêmes
attribuent en grande partie la crise du secteur au traitement alarmiste, d'après eux
irresponsable, qui aurait été réservé par les journaux et télévisions aux découvertes
sur la possible transmissibilité de la maladie à l'homme. Ainsi, à la page 1 du
document intitulé «La filière de la viande bovine en Italie: ESB Situation et
perspectives», il est indiqué: «La filière des viandes bovines traverse dans l'Union
européenne et en Italie un moment dramatique de difficultés rendu encore plus
grave par les informations alarmistes de la presse et de la télévision en ce qui
concerne la possible transmission à l'homme de l'ESB, qui ont entraîné une chute
sensible et imprévue de la consommation et qui, en l'absence de contre-mesures
adéquates, risquent de faire entrer le secteur dans une crise irréversible.» Il est
précisé ensuite à la page 4: «La variable ESB peut donner un coup de grâce au
secteur, compte tenu de l'alarmisme injustifié et irresponsable de la presse et de
la télévision uniquement préoccupées de sensationnel, sans la moindre tentative
d'informer avec clarté et objectivité.»
- 112.
- Il n'est pas contesté que c'est à partir de ce moment que la chute du marché de la
viande bovine est intervenue, causée par une baisse sensible de la demande.
- 113.
- Dès lors, force est de constater que l'écroulement de la demande à l'origine des
préjudices invoqués en l'espèce a été provoqué par les effets du communiqué du
SEAC sur l'opinion publique, c'est-à-dire, par la préoccupation que la connaissance
de la possible transmissibilité à l'homme de la maladie de l'ESB a entraînée chez
les consommateurs de viande bovine en Europe.
- 114.
- C'est d'ailleurs dans ce sens que la Cour a conclu, dans son ordonnance du 12
juillet 1996, Royaume-Uni/Commission, précitée (point 87), que la chute de la
demande de viande bovine a été provoquée, une semaine avant l'adoption de la
décision 96/239, par l'annonce le 20 mars 1996, par le SEAC et le gouvernement
du Royaume-Uni lui-même, de la probabilité d'un lien entre l'ESB et la variante
de la maladie de Creutzfeldt-Jakob.
- 115.
- Toutefois, il y a lieu d'examiner si les requérants ont apporté des preuves ou des
indices de nature à démontrer qu'il y a eu une relation de cause à effet entre les
actions et omissions prétendument fautifs des parties défenderesses et les
préjudices allégués.
- 116.
- Le Tribunal constate, à cet égard, que les requérants se sont bornés à affirmer
qu'une intervention drastique intervenue en temps utile aurait eu l'effet de
circonscrire immédiatement le foyer de l'infection au Royaume-Uni et aurait évité
des effets sur le marché européen. Certes, dans les circonstances de l'espèce, il est
difficile de déterminer ce qui se serait passé si les institutions communautaires
avaient décidé en 1990 un embargo total à l'égard du marché du Royaume-Uni.
Néanmoins, les requérants n'ont produit aucun élément ou indice de nature à
étayer la plausibilité de leur thèse en démontrant que de telles mesures auraient
pu empêcher la chute de la demande après l'annonce, le 20 mars 1996, de la
possibilité de transmission de la maladie à l'homme.
- 117.
- Rien n'indique que, nonobstant un embargo total décidé dès l'année 1990, le
marché n'aurait pas quand même chuté au moment de la publication
d'informations sur la transmissibilité de la maladie à l'homme, en raison des
préoccupations que cette publication aurait suscitées chez les consommateurs, de
la même manière que la publication du 20 mars 1996.
- 118.
- En effet, la peur des consommateurs n'est pas liée directement aux importations
de viande bovine contaminée provenant du Royaume Uni, mais à la possible
transmissibilité de la maladie à l'homme. Dès lors, il est peu probable que, dans un
tel cas de figure, l'annonce de l'adoption, dès 1990, de toutes les mesures adéquates
pour lutter contre la propagation de la maladie aurait pu éviter qu'une forte crainte
ne s'installât chez les consommateurs.
- 119.
- A cet égard, il y a lieu de constater que les conclusions du communiqué du SEAC
ayant déclenché la perte de confiance des consommateurs étaient tirées de l'étude
de dix cas de maladie de Creutzfeldt-Jacob apparus chez des consommateurs, cas
dont l'explication la plus probable, d'après l'avis du SEAC, résidait dans l'exposition
à l'agent de l'ESB avant 1989, c'est-à-dire pendant une période antérieure à la date
à laquelle la Communauté aurait dû adopter les mesures demandées par les
requérants.
- 120.
- En outre, d'autres circonstances étaient de nature à susciter des craintes des
consommateurs, comme:
le fait que, depuis 1988, des cas d'ESB avaient également été repérés sur
le continent, ce qui pouvait rendre moins efficaces les mesures de
confinement du marché du Royaume-Uni;
la possibilité que des viandes bovines en provenance du Royaume-Uni
entrent sur le continent en dépit d'un tel embargo;
la très longue période d'incubation, de cinq à dix ans, de la maladie de
l'ESB chez les bovins, impliquant que les animaux pouvaient avoir contracté
la maladie sans en présenter les signes cliniques pendant ce temps-là;
les doutes sérieux subsistant encore aujourd'hui quant à la façon dont les
animaux peuvent être contaminés.
- 121.
- Enfin, il y a lieu de relever que le SEAC faisait d'ailleurs état dans son avis de
l'incertitude relative au nombre de cas susceptibles de se déclarer dans l'avenir.
- 122.
- Dans ces conditions, il n'est pas établi que la chute de la demande a été
provoquée par des actions et omissions prétendument fautives des parties
défenderesses. Par ailleurs, il n'est pas démontré que, même si les parties
défenderesses avaient adopté les mesures que les requérants leur reprochent ne pas
avoir prises, les éleveurs de bovins n'auraient pas également subi un préjudice à la
suite de la chute du marché.
- 123.
- Eu égard à ce qui précède, le Tribunal estime que l'existence d'un lien de causalité
entre le préjudice allégué et le comportement prétendument fautif des institutions
communautaires n'est pas établie.
- 124.
- Partant, il y a lieu de rejeter les conclusions en indemnisation comme non fondées,
sans qu'il soit nécessaire de se prononcer, d'une part, sur la réunion en l'espèce des
autres conditions d'une responsabilité extracontractuelle de la Communauté, à
savoir l'illégalité des comportements reprochés aux institutions et la réalité du
dommage, ainsi que, d'autre part, sur la demande d'expertise présentée par les
requérants.
Sur les conclusions en annulation du règlement n° 1357/96
Arguments des parties
- 125.
- Les requérants demandent l'annulation du règlement n° 1357/96, qui a prévu le
paiement de primes supplémentaires aux éleveurs de bovins «en vue de préserver
l'avenir de ce secteur». Ces dispositions seraient illégales, dans la mesure où elles
prévoient l'octroi de primes supplémentaires pour les diminutions de revenus deséleveurs et non pour l'augmentation des coûts qu'ils ont été contraint de supporter.
Le paiement de ces primes supplémentaires ne pourrait priver les victimes des
dommages d'une réparation intégrale de ceux-ci.
- 126.
- Le règlement attaqué serait atteint d'un défaut de motivation, de sorte qu'il
violerait l'article 190 du traité. En particulier, il ne préciserait pas pourquoi le
Conseil a eu recours au paiement de primes supplémentaires au lieu de réparer le
préjudice, pourquoi le montant des primes-réparations a été fortement limité par
rapport aux préjudices effectivement causés, ni, enfin, pourquoi le Conseil n'a pas
pris en considération l'augmentation des coûts que subissent aujourd'hui les
éleveurs.
- 127.
- Néanmoins, les requérants précisent qu'ils ne demandent l'annulation de ce
règlement que s'il s'oppose à leur demande de réparation intégrale du préjudice
subi.
- 128.
- Le Conseil et la Commission soulèvent une exception d'irrecevabilité en ce qui
concerne les conclusions en annulation de ce règlement. Selon eux, les requérants
autres que la Coldiretti ne sont pas individuellement concernés par celui-ci. Quant
à la Coldiretti, elle n'aurait pas établi que sa position de négociatrice aurait été
affectée par l'acte en question, et elle ne justifierait pas s'être substituée à des
éleveurs membres de l'organisation qui auraient été en situation d'introduire eux-mêmes un recours.
- 129.
- La Commission fait valoir que l'objectif poursuivi par le règlement attaqué n'est
pas, comme l'estiment à tort les requérants, celui d'introduire une limitation de la
responsabilité éventuelle de la Communauté pour le prétendu retard avec lequel
elle a fait face à l'urgence sanitaire, mais celui d'arrêter des mesures d'urgence
d'aide au revenu des éleveurs afin de faire face aux difficultés exceptionnelles du
marché dues à la crise de l'ESB . Elle observe que, en tout état de cause, cette
limite ne traduit en aucune façon une volonté des institutions communautaires de
limiter la réparation à laquelle les requérants prétendent avoir droit.
- 130.
- Le Conseil fait valoir également que l'objectif du règlement n'a manifestement
aucun lien avec le droit d'intenter une action au titre de l'article 215 du traité.
- 131.
- Dans leur réplique, les requérants affirment que, dans la mesure où le Conseil et
la Commission ont exclu de façon absolue toute influence du règlement n° 1357/96
sur la question de leur responsabilité extracontractuelle, il n'est pas nécessaire de
répliquer aux exceptions d'irrecevabilité soulevées. Ils concluent qu'il n'existe plus
de raison d'aborder la question de l'annulation du règlement, à condition que le
Tribunal confirme la thèse des parties défenderesses.
- 132.
- A l'audience, ils ont réaffirmé que, si le Tribunal accueille cette thèse, il pourra
considérer qu'ils renoncent à leurs conclusions en annulation.
Appréciation du Tribunal
- 133.
- Le Tribunal constate que le Conseil et la Commission, tant dans leurs mémoires
que lors de l'audience, ont confirmé que le règlement n° 1357/96 n'est pas de
nature à limiter la responsabilité extracontractuelle de la Communauté.
- 134.
- Effectivement, il résulte du texte des premier et deuxième considérants du
règlement attaqué que l'objectif poursuivi par celui-ci n'est pas, comme l'ont estimé
à tort les requérants, d'introduire une limitation de la responsabilité éventuelle de
la Communauté pour le prétendu retard avec lequel elle a fait face à l'urgence
sanitaire, mais d'arrêter des mesures d'urgence d'aide au revenu des éleveurs, afin
de faire face aux difficultés exceptionnelles du marché dues à la crise de l'ESB, en
vue de préserver l'avenir de ce secteur.
- 135.
- Dans ces circonstances, il n'est pas nécessaire de statuer sur la recevabilité ni sur
le fond. Il suffit de prendre acte de la renonciation des requérants à leurs
conclusions en annulation et de constater qu'il n'y a pas lieu de statuer sur lesdites
conclusions.
Sur les dépens
- 136.
- Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie
qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Les requérants
ayant succombé en leurs conclusions, il y a lieu de les condamner aux dépens,
conformément aux conclusions en ce sens des parties défenderesses.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (cinquième chambre)
déclare et arrête:
1) Les conclusions en indemnisation présentées par l'organisation syndicale
Confederazione Nazionale Coltivatori Diretti (Coldiretti) sont rejetées
comme irrecevables.
2) Les conclusions en indemnisation présentées par les autres requérants,
exploitants agricoles, sont rejetées comme non fondées.
3) Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions en annulation du règlement
(CE) n° 1357/96 du Conseil, du 8 juillet 1996, prévoyant des paiements
supplémentaires à faire en 1996 au titre des primes visées dans le
règlement (CEE) n° 805/68 portant organisation commune des marchés
dans le secteur de la viande bovine, et modifiant ce règlement.
4) Les requérants sont condamnés aux dépens.
Azizi García-Valdecasas
Jaeger
|
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 30 septembre 1998.
Le greffier
Le président
H. Jung
J. Azizi
Table des matières
Faits à l'origine du litige
II - 2
Procédure et conclusions des parties
II - 8
Sur les conclusions en indemnisation
II - 10
Sur la recevabilité
II - 10
Sur l'exception d'irrecevabilité tirée par le Conseil d'un défaut de conformité de
la requête à l'article 44, paragraphe, 1, sous c), du règlement de procédure
II - 10
Arguments des parties
II - 10
Appréciation du Tribunal
II - 11
Sur l'exception d'irrecevabilité tirée par les parties défenderesses d'un défaut
d'intérêt à agir de la Coldiretti
II - 12
Arguments des parties
II - 12
Appréciation du Tribunal
II - 13
Sur l'exception d'irrecevabilité tirée par la Commission de ce que la demande se
fonde sur un droit à la protection de la santé reconnu à tout citoyen de la
Communauté
II - 14
Arguments des parties
II - 14
Appréciation du Tribunal
II - 14
Sur le fond
II - 15
Arguments des parties
II - 15
Sur l'existence d'un comportement illégal du Conseil et de la
Commission
II - 15
Sur l'existence d'un préjudice et d'un lien de causalité
II - 21
Appréciation du Tribunal
II - 21
Sur les conclusions en annulation du règlement n° 1357/96
II - 26
Arguments des parties
II - 26
Appréciation du Tribunal
II - 27
Sur les dépens
II - 28