Language of document : ECLI:EU:T:2023:312

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

7 juin 2023 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne figurative BROOKS ENGLAND – Marque de l’Union européenne verbale antérieure BROOKS – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001] – Usage sérieux de la marque antérieure – Article 43, paragraphe 2, du règlement no 40/94 (devenu article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001) »

Dans l’affaire T‑63/22,

Brooks England Ltd, établie à Smethwick (Royaume-Uni), représentée par Mes S.  Feltrinelli et K. Manhaeve, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par MM. T. Klee et D. Gája, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Brooks Sports, Inc., établie à Seattle, Washington (États-Unis), représentée par Mes C. Spintig et S. Pietzcker, avocats,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de M. F. Schalin, président, Mmes P. Škvařilová-Pelzl et G. Steinfatt (rapporteure), juges,

greffier : M. G. Mitrev, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 1er février 2023,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Brooks England Ltd, demande l’annulation de la décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 22 novembre 2021 (affaire R 2432/2020-4) (ci-après la « décision attaquée »).

I.      Antécédents du litige

2        Le 9 septembre 2003, la requérante a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe figuratif suivant :

Image not found

3        La marque demandée désignait, notamment, les produits relevant des classes 18 et 25 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 18 : « Mallettes, sacs à main, havresacs, sacs à dos, bourses, tous pour le cyclisme » ;

–        classe 25 : « Vestes, shorts, pantalons, jerseys, salopettes, top, justaucorps, tous pour le cyclisme ; accessoires d’habillement pour le cyclisme, tels que gants, chaussettes, chaussures, bonnets ».

4        Le 16 novembre 2004, l’intervenante, Brooks Sports, Inc., a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

5        L’opposition était fondée sur la marque de l’Union européenne verbale antérieure BROOKS, désignant les produits relevant de la classe 25 et correspondant à la description suivante : « chaussures d’athlétisme ».

6        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1) [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

7        La procédure d’opposition a été suspendue à plusieurs reprises entre les années 2007 et 2018 en raison de négociations en cours entre les parties en vue de parvenir à un accord.

8        À la suite de la demande formulée par la requérante le 19 décembre 2018, l’EUIPO a invité l’intervenante à apporter la preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure invoquée à l’appui de l’opposition. Cette dernière a déféré à ladite demande dans le délai imparti.

9        Le 19 octobre 2020, la division d’opposition a partiellement fait droit à l’opposition et a refusé l’enregistrement de la marque demandée pour les « accessoires d’habillement pour le cyclisme, tels que gants, chaussettes, chaussures, bonnets » compris dans la classe 25.

10      Le 18 décembre 2020, l’intervenante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, contre la décision de la division d’opposition en tant qu’elle a partiellement rejeté l’opposition.

11      Par la décision attaquée, la chambre de recours a accueilli le recours. En substance, elle a considéré, en premier lieu, que les éléments de preuve produits par l’intervenante établissaient l’usage sérieux de la marque antérieure pour les « chaussures d’athlétisme » relevant de la classe 25. En second lieu, elle a conclu à l’existence d’un risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, pour l’ensemble des produits en cause.

II.    Conclusions des parties

12      La requérante conclut, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        à titre principal, annuler intégralement la décision attaquée et, par conséquent, déclarer que la marque demandée doit être enregistrée pour tous les produits en cause ;

–        à titre subsidiaire, annuler partiellement la décision attaquée dans la mesure où celle-ci a fait droit à l’opposition pour les produits relevant de la classe 18 ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens afférents à la procédure devant la chambre de recours et devant le Tribunal.

13      L’EUIPO et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

III. En droit

A.      Sur le droit applicable ratione temporis

14      Compte tenu de la date d’introduction de la demande d’enregistrement en cause, à savoir le 9 septembre 2003, qui est déterminante aux fins de l’identification du droit matériel applicable, les faits de l’espèce sont régis par les dispositions matérielles du règlement no 40/94 (voir, en ce sens, arrêts du 8 mai 2014, Bimbo/OHMI, C‑591/12 P, EU:C:2014:305, point 12, et du 18 juin 2020, Primart/EUIPO, C‑702/18 P, EU:C:2020:489, point 2 et jurisprudence citée).

15      Par suite, en l’espèce, en ce qui concerne les règles de fond, il convient d’entendre les références faites par la chambre de recours dans la décision attaquée à l’article 42, paragraphe 2, du règlement no 207/2009, dans sa version initiale, et à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, comme visant l’article 43, paragraphe 2, et l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 40/94, d’une teneur identique. Il en va de même pour les références faites par la requérante, dans ses écritures, aux dispositions de l’article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001.

16      En outre, aux termes de l’article 80 du règlement délégué (UE) 2018/625 de la Commission, du 5 mars 2018, complétant le règlement 2017/1001, et abrogeant le règlement délégué (UE) 2017/1430 (JO 2018, L 104, p. 1), le règlement (CE) no 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement (CE) no 40/94 du Conseil sur la marque communautaire (JO 1995, L 303, p. 1), continue de s’appliquer aux procédures en cours jusqu’à leur terme lorsque le règlement délégué 2018/625 ne s’applique pas, conformément à son article 82.

17      Selon l’article 82, paragraphe 2, sous d), du règlement délégué 2018/625, l’article 10 ne s’applique pas aux demandes de preuve de l’usage déposées avant le 1er octobre 2017.

18      Or, la demande de preuve de l’usage a été déposée par la requérante le 19 décembre 2018, de sorte que l’article 10 du règlement délégué 2018/625 est applicable en l’espèce.

B.      Sur la recevabilité de certains éléments de preuve et d’un grief de la requérante

1.      Sur la recevabilité des éléments de preuve produits pour la première fois devant le Tribunal

19      Ainsi que cela a été confirmé lors de l’audience, l’EUIPO et l’intervenante contestent la recevabilité de l’annexe A.5 de la requête, ainsi que les données extraites de sites Internet qui figurent au point 28 de la requête, au motif que celles-ci ont été produites pour la première fois devant le Tribunal.

20      À cet égard, il y a lieu de constater que ni l’annexe A.5 de la requête, qui consiste en un rapport d’Eurostat relatif au secteur de la chaussure dans l’Union européenne pour l’année 2006, ni les données figurant au point 28 de la requête, qui constituent des extraits de sites Internet dans lesquels figurent des descriptions des chaussures commercialisées par l’intervenante sous la marque antérieure, ne faisaient partie du dossier administratif présenté devant la chambre de recours.

21      Ces éléments de preuve, qui sont donc produits pour la première fois devant le Tribunal, ne peuvent pas être pris en considération. En effet, le recours devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’EUIPO au sens de l’article 72 du règlement 2017/1001, de sorte que la fonction du Tribunal n’est pas de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des documents présentés pour la première fois devant lui. Il convient donc d’écarter les éléments susvisés sans qu’il soit nécessaire d’examiner leur force probante [voir, en ce sens, arrêt du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI – LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T‑346/04, EU:T:2005:420, point 19 et jurisprudence citée].

2.      Sur la recevabilité du grief de la requérante tiré de l’absence d’usage sérieux de la marque antérieure

22      L’intervenante soutient que le grief de la requérante selon lequel la marque antérieure n’a pas fait l’objet d’un usage sérieux au sens de l’article 43, paragraphe 2, du règlement no 40/94, ne s’inscrit pas dans le moyen unique de la requérante tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), dudit règlement, de sorte que ce grief doit être rejeté comme irrecevable.

23      En vertu de l’article 21, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, applicable à la procédure devant le Tribunal, conformément à l’article 53, premier alinéa, du même statut, et de l’article 177, paragraphe 1, sous d), du règlement de procédure du Tribunal, la requête doit, notamment, contenir l’objet du litige, les moyens et arguments invoqués ainsi qu’un exposé sommaire desdits moyens. Ces éléments doivent être suffisamment clairs et précis pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant sans autres informations. Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il est nécessaire, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit, sur lesquels celui-ci se fonde, ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même [voir arrêt du 8 juillet 2020, Dinamo/EUIPO (Favorit), T‑729/19, non publié, EU:T:2020:314, point 11 et jurisprudence citée].

24      S’il convient d’admettre que l’énonciation des moyens du recours n’est pas liée à la terminologie et à l’énumération du règlement de procédure et que si la présentation de ces moyens, par leur substance plutôt que par leur qualification légale, peut suffire, c’est à la condition toutefois que lesdits moyens se dégagent de la requête avec suffisamment de netteté (voir arrêt du 8 juillet 2020, Favorit, T‑729/19, non publié, EU:T:2020:314, point 12 et jurisprudence citée).

25      En l’espèce, la requérante n’a certes formellement invoqué qu’un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 40/94. Toutefois, il n’en demeure pas moins que, dans le cadre de ce moyen, la requérante a avancé un premier grief concret et étayé, tiré de l’absence d’usage sérieux de la marque antérieure. Or, ce faisant, elle invoque, en substance, un premier moyen tiré d’une violation de l’article 43, paragraphe 2, du règlement no 40/94. Ainsi, contrairement à ce que soutient l’intervenante, la circonstance que le grief tiré de l’absence d’usage sérieux de la marque antérieure ait été avancé dans le cadre d’un moyen tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 40/94, ne saurait entraîner son irrecevabilité, mais uniquement sa requalification par le Tribunal.

26      Il s’ensuit que l’argument de l’intervenante tiré de l’irrecevabilité du grief de la requérante tiré de l’absence d’usage sérieux de la marque antérieure doit être rejeté comme non fondé.

C.      Sur le bien-fondé des moyens

27      À l’appui du recours, la requérante soulève, en substance, deux moyens tirés, le premier, de la violation de l’article 43, paragraphe 2, du règlement no 40/94 et, le second, de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), dudit règlement.

1.      Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 43, paragraphe 2, du règlement no 40/94

28      La requérante soutient en substance que la chambre de recours a violé l’article 43, paragraphe 2, du règlement no 40/94 en concluant que les éléments de preuve produits par l’intervenante démontraient suffisamment l’usage sérieux de la marque antérieure.

29      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

30      L’article 43, paragraphe 2, du règlement no 40/94 dispose que, « [s]ur requête du demandeur, le titulaire d’une marque communautaire antérieure qui a formé opposition apporte la preuve que, au cours des cinq années qui précèdent la publication de la demande de marque communautaire, la marque communautaire antérieure a fait l’objet d’un usage sérieux dans la Communauté pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et sur lesquels l’opposition est fondée, […] pour autant qu’à cette date la marque antérieure était enregistrée depuis cinq ans au moins » et que, « [à] défaut d’une telle preuve, l’opposition est rejetée ».

31      En l’espèce, la chambre de recours a considéré la période comprise entre le 16 août 1999 et le 15 août 2004 comme étant la période de cinq ans pour laquelle il incombait à l’intervenante de démontrer un usage sérieux de la marque antérieure, ce que les parties ne contestent pas.

32      Dans l’interprétation de la notion d’« usage sérieux », il convient de prendre en compte le fait que la ratio legis de l’exigence selon laquelle la marque antérieure doit avoir fait l’objet d’un usage sérieux ne vise ni à évaluer la réussite commerciale d’une entreprise, ni à contrôler sa stratégie économique, ni encore à réserver la protection des marques à leurs seules exploitations commerciales quantitativement importantes [voir arrêt du 11 avril 2019, Fomanu/EUIPO – Fujifilm Imaging Germany (Représentation d’un papillon), T‑323/18, non publié, EU:T:2019:243, point 23 et jurisprudence citée].

33      Selon une jurisprudence constante, une marque fait l’objet d’un usage sérieux lorsqu’elle est utilisée conformément à sa fonction essentielle, qui est de garantir l’identité d’origine des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée, aux fins de créer ou de conserver un débouché pour ces produits et ces services, à l’exclusion d’usages à caractère symbolique ayant pour seul objet le maintien des droits conférés par la marque (arrêt du 3 juillet 2019, Viridis Pharmaceutical/EUIPO, C‑668/17 P, EU:C:2019:557, point 38 ; voir également, par analogie, arrêt du 11 mars 2003, Ansul, C‑40/01, EU:C:2003:145, point 43). De plus, la condition relative à l’usage sérieux de la marque exige que celle-ci, telle qu’elle est protégée sur le territoire pertinent, soit utilisée publiquement et vers l’extérieur [voir arrêt du 4 avril 2019, Hesse et Wedl & Hofmann/EUIPO (TESTA ROSSA), T‑910/16 et T‑911/16, EU:T:2019:221, point 29 et jurisprudence citée].

34      L’appréciation du caractère sérieux de l’usage de la marque doit reposer sur l’ensemble des faits et des circonstances propres à établir la réalité de l’exploitation commerciale de celle-ci dans la vie des affaires, en particulier les usages considérés comme justifiés dans le secteur économique concerné pour maintenir ou créer des parts de marché au profit des produits ou des services protégés par la marque, la nature de ces produits ou de ces services, les caractéristiques du marché, l’étendue et la fréquence de l’usage de la marque [arrêt du 8 juillet 2004, Sunrider/OHMI – Espadafor Caba (VITAFRUIT), T‑203/02, EU:T:2004:225, point 40 ; voir également, par analogie, arrêt du 11 mars 2003, Ansul, C‑40/01, EU:C:2003:145, point 43].

35      Enfin, il convient de procéder à une appréciation globale qui tienne compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce et qui implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte [arrêt du 8 juillet 2020, Euroapotheca/EUIPO – General Nutrition Investment (GNC LIVE WELL), T‑686/19, non publié, EU:T:2020:320, point 35].

36      À cet égard, en vertu de l’article 10, paragraphes 3 et 4, du règlement délégué 2018/625, la preuve de l’usage d’une marque doit porter sur le lieu, la durée, l’importance et la nature de l’usage qui a été fait de la marque et se limite, en principe, à la production de pièces justificatives, comme des emballages, des étiquettes, des barèmes de prix, des catalogues, des factures, des photographies et des annonces dans les journaux, ainsi qu’aux déclarations écrites visées à l’article 97, paragraphe 1, sous f), du règlement 2017/1001.

37      En vue d’apporter la preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure, l’intervenante a fourni les éléments de preuve suivants :

–        quatre accords de distribution et de licence (pièces nos 1A-1E), ainsi que trois contrats d’agence (pièces nos 1F‑1H) ;

–        seize bons de commande émis par le distributeur de l’intervenante pour le Royaume-Uni et l’Irlande pour des chaussures entre le 30 septembre 1999 et le 8 juillet 2003 (pièce no 2) ;

–        dix-huit factures émises par le distributeur de l’intervenante pour le Royaume-Uni et l’Irlande pour des chaussures entre le 19 octobre 1999 et le 28 août 2003 à l’intention de détaillants au Royaume‑Uni (pièce no 3) ;

–        sept listes de prix pour des chaussures BROOKS pour l’Allemagne, l’Espagne, l’Italie, la France et l’Autriche pour la période 2001-2004 (pièces nos 4A-4G) ;

–        des listes du chiffre d’affaires des clients du distributeur de l’intervenante pour le Royaume-Uni et l’Irlande pour la période 1999-2003 (pièce no 5) ;

–        un courriel, daté du 24 juin 2019, envoyé au représentant de l’intervenante par un représentant du distributeur de l’intervenante pour le Royaume-Uni et l’Irlande, intitulé « Brooks Evidence 1999-2003 » (pièce no 6) ;

–        un extrait d’une présentation en allemand (pièce no 7) ;

–        des extraits de présentations en anglais comprenant des données correspondant à 2003 et à 2004, certaines concernant l’Allemagne, l’Autriche, l’Espagne, la France et l’Italie (pièces nos 8A-8B) ;

–        une présentation intitulée « 2003 International Sales Meeting – Fall 2002 » (pièce no 9) ;

–        un document intitulé « History of Brooks Sports Inc. » (pièce no 10) ;

–        un résumé de l’histoire de l’intervenante en anglais, issue de son site Internet (pièce no 11) ;

–        dix articles de magazines sur des chaussures BROOKS tirés d’un site Internet entre 2000 et 2004, indiquant des prix en livres sterling (pièces nos 12A-12J) ;

–        une présentation du magazine Runner’s World, comprenant les abonnés, le lectorat et les chiffres de diffusion de 2007-2008 (pièce no 13) ;

–        un article tiré d’un magazine allemand, qui comprend un essai des chaussures de course à pied Brooks Adrenaline GTS II (pièce no 14) ;

–        un extrait d’un article en ligne, daté d’avril 2003 (pièce no 15) ;

–        des captures d’écran de plusieurs sites Internet de l’intervenante obtenues par le biais de l’outil Wayback Machine (pièces nos 16A-16H) ;

–        une déclaration sous serment de l’analyste juridique et de la responsabilité sociale de l’intervenante datée du 24 juin 2019 (pièce no 17).

a)       Sur le lieu et la durée de l’usage

38      Aux points 47 et 48 de la décision attaquée, la chambre de recours a indiqué en substance que les éléments de preuve montraient un usage de la marque antérieure au moins au Royaume-Uni au cours de la période pertinente.

39      En l’espèce, s’agissant de la durée de l’usage, il y a lieu de constater que la grande majorité des éléments de preuve relèvent de la période pertinente, à l’exception seulement du courriel daté du 24 juin 2019 (pièce no 6), des deux documents concernant l’histoire de l’intervenante qui ont été imprimés le 23 juin 2019 (pièces nos 10 et 11), de la présentation du magazine Runner’s World qui concerne des données de 2007 et 2008 (pièce no 13) et la déclaration sous serment datée du 24 juin 2019 (pièce no 17).

40      S’agissant du lieu de l’usage, il convient de constater, en particulier, que les contrats d’agence conclus par l’intervenante (pièces nos 1F‑1H) ainsi que les listes de prix (pièces nos 4A-4G) indiquent que des chaussures de course à pied (« running shoes ») BROOKS ont fait l’objet d’une commercialisation notamment en Espagne, en Italie et en France. De même, les accords de distribution et de licence conclus par l’intervenante font référence à la distribution et à la concession de licence pour des chaussures d’athlétisme, de sport et d’extérieur sous la marque antérieure dans plusieurs États membres de l’Union, dont le Royaume-Uni (pièce no 1E). Par ailleurs, les bons de commande (pièce no 2) et les factures (pièce no 3) qui sont tous émis par le distributeur de l’intervenante pour le Royaume-Uni et l’Irlande avec lequel elle a conclu un accord de distribution et de licence (pièce no 1E), ainsi que les articles de magazines (pièces nos 12A-12J) qui présentent les chaussures de l’intervenante ainsi que leur prix en livres sterling, confirment que les chaussures de l’intervenante ont été commercialisées au Royaume-Uni sous la marque antérieure. Aussi, dès lors que le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord était toujours membre de l’Union au cours de la période pertinente pour établir l’usage sérieux de la marque antérieure, il y a lieu de prendre en compte ce territoire afin de déterminer le lieu de l’usage de cette marque [arrêt du 8 juin 2022, Muschaweck/EUIPO – Conze (UM), T‑293/21, EU:T:2022:345, point 84 (non publié)].

41      Force est dès lors de constater, à l’instar de la chambre de recours, que la marque antérieure a fait l’objet d’un usage dans l’Union et, à tout le moins, au Royaume-Uni au cours de la période pertinente. La requérante n’avance, par ailleurs, aucun argument de nature à remettre en cause cette conclusion.

b)      Sur la nature de l’usage

42      Au point 49 de la décision attaquée, la chambre de recours a d’abord considéré en substance que les éléments de preuve démontraient un usage de la marque antérieure verbale BROOKS, mais aussi des signes figuratifs Image not found, Image not found et Image not found qui n’altèrent pas le caractère distinctif de la marque telle qu’elle a été enregistrée. Cette appréciation n’est pas remise en cause par la requérante.

43      Aux points 50 à 54 de la décision attaquée, la chambre de recours a ensuite indiqué en substance que les éléments de preuve montraient un usage pour des chaussures de course à pied (« running shoes ») ainsi que des chaussures de course (« racing shoes »), et que ces chaussures de sport pouvaient être utilisées non seulement pour la course à pied (« running ») ou la course (« racing »), mais aussi pour toute autre activité, y compris pour le travail ou d’autres activités quotidiennes, en fonction de préférences personnelles. Elle a ainsi considéré que l’usage de la marque antérieure devait être reconnu pour les « chaussures d’athlétisme », qui constituaient une catégorie de produits suffisamment circonscrite.

44      En premier lieu, la requérante soutient en substance que l’intervenante n’a prouvé un usage limité de la marque antérieure que pour des chaussures de course à pied (« running shoes »).

45      À cet égard, il y a lieu de constater que les contrats d’agence et les accords de distribution et de licence (pièces nos 1A-1H) ainsi qu’une des captures d’écran du site Internet de l’intervenante (pièce no 16G) indiquent que celle-ci produit et commercialise sous la marque antérieure des chaussures de course à pied (« running shoes ») ainsi que des chaussures désignées comme chaussures d’athlétisme, de sport et d’extérieur. En outre, les noms des produits figurant dans les bons de commande et les factures émis par le distributeur de l’intervenante pour le Royaume-Uni et l’Irlande (pièces nos 2 et 3), lorsqu’ils sont mis en relation avec les différents noms et types de chaussures commercialisées par l’intervenante qui figurent dans les listes de prix (pièces nos 4A-4G), démontrent que la marque antérieure est utilisée, en particulier, pour des chaussures de course à pied et des chaussures de course (« running », « trail/outdoor running », « racing »). Par ailleurs, de nombreuses images de chaussures figurant dans la présentation intitulée « 2003 International Sales Meeting – Fall 2002 » (pièce no 9) montrent que cette marque a été apposée sur ces produits. Enfin, les articles de magazine (pièces nos 12A-12J, 14 et 15) mentionnent la marque antérieure dans chacun des noms des chaussures de l’intervenante qui y sont présentées.

46      Il s’ensuit que les éléments de preuve fournis par l’intervenante démontrent un usage de la marque antérieure tant pour des chaussures de course à pied (« running shoes ») que pour des chaussures de course (« racing shoes »), comme l’a relevé à juste titre la chambre de recours aux points 51 et 52 de la décision attaquée.

47      En second lieu, la requérante reproche à la chambre de recours d’avoir considéré, au point 54 de la décision attaquée, que les chaussures de sport visées par les preuves de l’usage de la marque antérieure pouvaient être utilisées non seulement pour la course à pied (« running ») ou la course (« racing »), mais aussi pour toute autre activité, de sorte que ledit usage devait être reconnu pour les « chaussures d’athlétisme », qui constituent une catégorie de produits suffisamment circonscrite. D’une part, elle considère que la chambre de recours a conféré, à tort, un sens large aux « chaussures d’athlétisme » en les assimilant à des chaussures de sport. Selon elle, si les chaussures de sport sont susceptibles d’être utilisées tant pour des activités sportives que pour des activités quotidiennes, tel n’est pas le cas des « chaussures d’athlétisme » qui sont uniquement utilisées pour des activités d’athlétisme. D’autre part, elle a précisé, en réponse à une question du Tribunal lors de l’audience, que, contrairement à ce qu’a retenu la chambre de recours, les chaussures de course à pied (« running shoes ») constituaient une sous-catégorie autonome au sein de la catégorie plus générale des « chaussures d’athlétisme ».

48      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, si une marque a été enregistrée pour une catégorie de produits ou de services suffisamment large pour que puissent être distinguées, en son sein, plusieurs sous-catégories susceptibles d’être envisagées de manière autonome, la preuve de l’usage sérieux de la marque pour une partie de ces produits ou services n’emporte protection que pour la ou les sous-catégories dont relèvent les produits ou services pour lesquels la marque a été effectivement utilisée [voir arrêt du 2 mars 2022, Apologistics/EUIPO – Kerckhoff (apo-discounter.de), T‑140/21, non publié, EU:T:2022:110, point 21 et jurisprudence citée].

49      En ce qui concerne des produits ou des services rassemblés au sein d’une catégorie large, susceptible d’être subdivisée en plusieurs sous-catégories autonomes, il est nécessaire d’exiger du titulaire de la marque antérieure d’apporter la preuve de l’usage sérieux de cette marque pour chacune de ces sous-catégories autonomes. Dans ce contexte, l’étendue des catégories de produits ou de services pour lesquels la marque antérieure a été enregistrée est un élément déterminant de l’équilibre entre, d’une part, le maintien et la préservation des droits exclusifs conférés au titulaire de la marque antérieure et, d’autre part, leur limitation afin d’éviter qu’une marque utilisée de manière partielle jouisse d’une protection étendue au seul motif qu’elle a été enregistrée pour une large gamme de produits ou de services (arrêt du 16 juillet 2020, ACTC/EUIPO, C‑714/18 P, EU:C:2020:573, points 39 et 43).

50      Il ressort également de la jurisprudence que le critère de finalité ou de destination est un critère primordial dans la définition d’une sous-catégorie de produits ou de services dans la mesure où le consommateur recherche avant tout un produit ou un service qui pourra répondre à ses besoins spécifiques (voir arrêt du 2 mars 2022, apo-discounter.de, T‑140/21, non publié, EU:T:2022:110, point 23 et jurisprudence citée).

51      En revanche, si une marque a été enregistrée pour des produits ou des services définis de façon tellement précise et circonscrite qu’il n’est pas possible d’opérer des divisions significatives à l’intérieur de la catégorie concernée, alors la preuve de l’usage sérieux de la marque pour lesdits produits ou services couvre nécessairement toute cette catégorie (voir arrêt du 2 mars 2022, apo-discounter.de, T‑140/21, non publié, EU:T:2022:110, point 24 et jurisprudence citée).

52      En effet, si la notion de l’usage partiel a pour fonction de ne pas rendre indisponibles des marques dont il n’a pas été fait usage pour une catégorie de produits donnée, elle ne doit néanmoins pas avoir pour effet de priver le titulaire de la marque antérieure de toute protection pour des produits qui, sans être rigoureusement identiques à ceux pour lesquels il a pu prouver un usage sérieux, ne sont pas essentiellement différents de ceux-ci et relèvent d’un même groupe qui ne peut être divisé autrement que de façon arbitraire. Il convient à cet égard d’observer qu’il est en pratique impossible au titulaire d’une marque d’apporter la preuve de l’usage de celle-ci pour toutes les variantes imaginables des produits concernés par l’enregistrement. Par conséquent, la notion de « partie de produits ou de services » ne peut s’entendre de toutes les déclinaisons commerciales de produits ou de services analogues, mais seulement de produits ou de services suffisamment différenciés pour pouvoir constituer des catégories ou sous-catégories cohérentes [voir arrêt du 18 octobre 2016, August Storck/EUIPO – Chiquita Brands (Fruitfuls), T‑367/14, non publié, EU:T:2016:615, point 29 et jurisprudence citée].

53      En l’espèce, il y a lieu de rappeler que la marque antérieure a été enregistrée pour les « chaussures d’athlétisme » relevant de la classe 25 et que les preuves de l’usage de ladite marque concernent les chaussures de course à pied (« running shoes ») et les chaussures de course (« racing shoes ») (voir point 46 ci-dessus). Il convient dès lors d’examiner si les chaussures de course à pied et de course constituent une sous-catégorie cohérente susceptible d’être envisagée de manière autonome par rapport aux « chaussures d’athlétisme » ou si ces produits font partie d’un même groupe de produits désigné par le terme « chaussures d’athlétisme » dont la division en sous-catégories serait arbitraire.

54      À cet égard, selon la définition du dictionnaire en ligne Oxford Learner’s Dictionaries fournie par la requérante, l’adverbe « athlétiquement » signifie « d’une manière liée à des sports, tels [que] la course à pied, le saut et le lancer ». Il ressort ainsi clairement de cette définition que le terme « athlétique » renvoie au sport en général, étant donné que les sports spécifiques mentionnés dans cette définition sont introduits par la locution « tels que », indiquant ainsi que cette définition ne se limite pas aux sports explicitement mentionnés, comme le fait valoir à juste titre l’EUIPO. Il y a ainsi lieu d’en déduire que des « chaussures d’athlétisme » correspondent à des chaussures qui sont conçues pour faire du sport en général. De plus, il est notoire que des chaussures de course à pied (« running shoes ») ou de course (« racing shoes ») peuvent être utilisées non seulement pour faire de la course à pied, qui constitue d’ailleurs une activité athlétique selon la définition fournie par la requérante, mais aussi pour toute autre activité, en particulier d’autres activités sportives, comme l’a également relevé à juste titre l’EUIPO.

55      Il s’ensuit que les chaussures de course à pied (« running shoes ») et les chaussures de course (« racing shoes ») ont la même destination et finalité que les « chaussures d’athlétisme ». Ainsi, contrairement à ce que soutient la requérante, il ne saurait être considéré que les chaussures de course à pied ou de course constituent une sous-catégorie autonome au sens de la jurisprudence citée au point 49 ci-dessus par rapport aux « chaussures d’athlétisme » étant donné qu’une telle division de cette dernière catégorie serait arbitraire.

56      Dans ces circonstances et compte tenu de la jurisprudence rappelée aux points 51 et 52 ci-dessus, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en considérant que l’usage de la marque antérieure devait être reconnu pour les « chaussures d’athlétisme » relevant de la classe 25, lesquelles constituent une catégorie suffisamment circonscrite.

57      Cette conclusion ne saurait être remise en cause par l’argument de la requérante selon lequel, en substance, les « chaussures d’athlétisme » ne seraient pas équivalentes à des chaussures de sport. En effet, ainsi qu’il a été relevé au point 54 ci-dessus, le terme « athlétique » fait référence au sport et, notamment, à la course à pied. Dans ces conditions, la chambre de recours pouvait considérer, à juste titre, au point 54 de la décision attaquée, que les chaussures de course à pied (« running shoes ») et les chaussures de course (« racing shoes ») visées par les preuves de l’usage de la marque antérieure constituaient des chaussures de sport et, partant, des « chaussures d’athlétisme ».

58      De même, pour autant que la requérante soutient en substance que certaines chaussures d’athlétisme, telles que des chaussures de cyclisme ou de football, ne seraient pas susceptibles d’être utilisées pour toute autre activité en raison de leurs semelles spécifiques, il suffit de relever que les preuves de l’usage de la marque antérieure ne concernent que les chaussures de course à pied (« running shoes ») et les chaussures de course (« racing shoes »), de sorte qu’il n’y a pas lieu de déterminer, en l’espèce, si les chaussures de cyclisme ou de football constituent une sous-catégorie cohérente susceptible d’être envisagée de manière autonome au sein de la catégorie plus générale des « chaussures d’athlétisme ».

c)      Sur l’importance de l’usage

59      Au point 55 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré en substance qu’une appréciation globale des éléments de preuve de l’intervenante, en particulier les bons de commande (pièce no 2), les factures (pièce no 3) et les informations sur les ventes figurant dans le courriel du 24 juin 2019 (pièce no 6) et dans la déclaration sous serment (pièce no 17), indiquait que la marque antérieure avait fait l’objet d’un usage suffisamment important au Royaume-Uni.

60      La requérante fait valoir que le nombre de paires de chaussures que l’intervenante aurait vendues au Royaume-Uni ne suffit pas à prouver l’usage sérieux de la marque antérieure, compte tenu du volume des ventes de chaussures sur l’ensemble du territoire de l’Union dont la chambre de recours aurait dû tenir compte.

61      S’agissant de l’importance de l’usage, il convient de tenir compte, notamment, du volume commercial de l’ensemble des actes d’usage, d’une part, et de la durée de la période pendant laquelle des actes d’usage ont été accomplis ainsi que de la fréquence de ces actes, d’autre part. Cette appréciation implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte. Ainsi, un faible volume de produits ou services commercialisés sous ladite marque peut être compensé par une forte intensité ou une certaine constance dans le temps de l’usage de cette marque et inversement. Toutefois, plus le volume commercial de l’exploitation de la marque est limité, plus il est nécessaire que le détenteur de la marque apporte des indications supplémentaires permettant d’écarter d’éventuels doutes quant au caractère sérieux de l’usage de la marque concernée [voir arrêt du 15 septembre 2011, centrotherm Clean Solutions/OHMI – Centrotherm Systemtechnik (CENTROTHERM), T‑427/09, EU:T:2011:480, points 28 et 29 et jurisprudence citée].

62      Il n’est pas possible de déterminer a priori, de façon abstraite, quel seuil quantitatif devrait être retenu pour déterminer si l’usage a ou non un caractère sérieux. Une règle de minimis, qui ne permettrait pas à l’EUIPO ou, sur recours, au Tribunal d’apprécier l’ensemble des circonstances du litige qui leur est soumis, ne peut dès lors être fixée. Ainsi, lorsqu’il répond à une réelle justification commerciale, un usage même minime peut être suffisant pour établir l’existence d’un caractère sérieux (voir arrêt du 11 mai 2006, Sunrider/OHMI, C‑416/04 P, EU:C:2006:310, point 72 et jurisprudence citée).

63      En l’espèce, premièrement, il convient de relever que, en particulier, les seize bons de commande émis par le distributeur de l’intervenante pour le Royaume-Uni et l’Irlande pour des chaussures de course à pied (« running shoes ») et des chaussures de course (« racing shoes ») entre le 30 septembre 1999 et le 8 juillet 2003 (pièce no 2), les dix-huit factures émises par ce même distributeur entre le 19 octobre 1999 et le 28 août 2003 à l’intention de différents détaillants établis dans plusieurs villes du Royaume-Uni (pièce no 3) et les sept listes de prix pour des chaussures de l’intervenante commercialisées en Allemagne, en Espagne, en Italie, en France et en Autriche pour la période 2001-2004 (pièces nos 4A-4G), démontrent que l’usage de la marque antérieure s’est fait à plusieurs reprises au cours de la période pertinente, publiquement et vers l’extérieur. En effet, l’usage de la marque d’une société de production par une société de distribution économiquement liée à celle-ci est présumé être un usage de ladite marque fait avec le consentement du titulaire et est donc à considérer comme fait par le titulaire, conformément à l’article 15, paragraphe 3, du règlement no 40/94 [voir arrêt du 17 février 2011, J & F Participações/OHMI – Plusfood Wrexham (Friboi), T‑324/09, non publié, EU:T:2011:47, point 32 et jurisprudence citée], ainsi que l’a relevé à juste titre la chambre de recours au point 48 de la décision attaquée.

64      Deuxièmement, les éléments de preuve, tels que les bons de commande (pièce no 2), les factures (pièce no 3), les articles de magazines (pièces nos 12A-12J, 14 et 15) et les captures d’écran des sites Internet de l’intervenante (pièces nos 16A-16H), montrent que la marque antérieure a été utilisée de manière régulière tout au long de la période pertinente, à savoir entre 1999 et 2004.

65      Troisièmement, il ressort du courriel du 24 juin 2019 envoyé par un ancien représentant commercial du distributeur de l’intervenante pour le Royaume-Uni et l’Irlande (pièce no 6) ainsi que de la déclaration sous serment d’un représentant de l’intervenante (pièce no 17), que 155 558 chaussures d’athlétisme et vêtements ont été vendus entre 1999 et 2003 au Royaume-Uni et en Irlande pour un chiffre d’affaires total de 3 304 877 livres sterling (GBP), dont 3 134 957 GBP ont été réalisés grâce à la vente de chaussures d’athlétisme (soit près de 95 % du chiffre d’affaires total).

66      Certes, il ressort de la jurisprudence que les déclarations émanant d’une personne qui a des liens étroits avec la partie concernée telles que celles mentionnées au point 65 ci-dessus sont d’une valeur probante de moindre importance que celles des tiers et que, de ce fait, elles ne peuvent pas, à elles seules, constituer une preuve suffisante de l’usage de la marque [voir, en ce sens, arrêts du 17 mars 2016, Naazneen Investments/OHMI, C‑252/15 P, non publié, EU:C:2016:178, point 61, et du 5 mars 2020, Dekoback/EUIPO – DecoPac (DECOPAC), T‑80/19, non publié, EU:T:2020:81, point 55].

67      Toutefois, le courriel du 24 juin 2019 (pièce no 6) et la déclaration sous serment (pièce no 17) sont corroborés, notamment, par les seize bons de commande (pièce no 2) qui indiquent qu’entre 140 et 1 596 paires de chaussures ont été commandées par le distributeur de l’intervenante au Royaume-Uni entre le 30 septembre 1999 et le 8 juillet 2003 pour des montants allant de 4 256 à 33 516 dollars des États-Unis (USD), ainsi que par les dix-huit factures (pièce no 3) qui indiquent qu’entre 3 et 190 paires de chaussures ont été, à tout le moins, vendues entre le 19 octobre 1999 et le 28 août 2003 à différents clients au Royaume-Uni pour des montants allant de 121 à 7 517 GBP.

68      Ainsi, si le volume des ventes de chaussures de l’intervenante au cours de la période pertinente ne paraît pas particulièrement important, sans pour autant pouvoir être qualifié de faible, il convient toutefois de tenir compte du fait que, notamment, les éléments de preuve montrent un usage régulier de la marque antérieure qui s’est opéré tout au long de la période pertinente (voir point 64 ci-dessus), que le nombre de chaussures commercialisées figurant dans les éléments de preuve ne concerne que le Royaume-Uni et l’Irlande, ainsi que du caractère concurrentiel du marché des chaussures d’athlétisme, comme l’a relevé à juste titre la chambre de recours.

69      Dans ces conditions, c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu que la marque antérieure avait été utilisée dans une tentative sérieuse de créer et de conserver un débouché pour les produits pertinents, de sorte que l’usage de ladite marque pouvait être considéré comme suffisamment important.

70      Cette conclusion ne saurait être remise en cause par l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours aurait dû comparer le volume des ventes de chaussures de l’intervenante avec le volume du marché des chaussures dans l’ensemble de l’Union. En effet, une telle comparaison tendrait à minorer l’importance relative des ventes de l’intervenante, sans fournir de justification particulière quant à la nécessité d’apprécier l’usage sérieux de la marque antérieure par rapport à l’ensemble des ventes de chaussures dans l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 18 octobre 2016, Fruitfuls, T‑367/14, non publié, EU:T:2016:615, points 45 à 48).

71      Il résulte ainsi de l’ensemble des considérations qui précèdent que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en concluant, au point 56 de la décision attaquée, à l’existence d’un usage sérieux de la marque antérieure pour les « chaussures d’athlétisme » relevant de la classe 25. Il convient dès lors de rejeter le premier moyen comme non fondé.

2.      Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 40/94

72      La requérante soutient en substance que la chambre de recours a violé l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 40/94 en concluant à l’existence d’un risque de confusion entre les signes en conflit.

73      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 40/94, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

74      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

75      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 40/94, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

76      Lorsque la protection de la marque antérieure s’étend à l’ensemble de l’Union, il y a lieu de prendre en compte la perception des marques en conflit par le consommateur des produits en cause sur ce territoire. Toutefois, pour refuser l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne, il suffit qu’un motif relatif de refus au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 40/94 existe dans une partie de l’Union [voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 76 et jurisprudence citée]. De même, il ressort de la jurisprudence que le constat d’un risque de confusion pour une partie non négligeable du public pertinent est suffisant pour accueillir une opposition formée contre une demande d’enregistrement [voir arrêt du 24 juin 2014, Hut.com/OHMI – Intersport France (THE HUT), T‑330/12, non publié, EU:T:2014:569, point 58 et jurisprudence citée].

a)      Sur le public pertinent

77      Selon la jurisprudence, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, EU:T:2007:46, point 42 et jurisprudence citée].

78      Au point 58 de la décision attaquée, la chambre de recours a d’abord relevé que, la marque antérieure étant une marque de l’Union européenne, le territoire pertinent en vue d’apprécier le risque de confusion est celui de l’Union. Toutefois, dans la mesure où il suffit que le motif relatif de refus existe dans une partie de l’Union ou pour une partie non négligeable du public pertinent (voir point 76 ci-dessus), elle a concentré son analyse sur le public anglophone. Cette appréciation n’est pas contestée par la requérante.

79      Au point 59 de la décision attaquée, la chambre de recours a ensuite considéré que les produits compris dans les classes 18 et 25 visés par la marque demandée et les produits compris dans la classe 25 visés par la marque antérieure, bien que destinés en partie à des activités sportives, s’adressaient au grand public, dont le niveau d’attention était moyen.

80      À cet égard, la requérante soutient en substance que les produits en cause ne sont pas partiellement, mais entièrement destinés à des activités sportives et que le public pertinent est composé non seulement du grand public, mais aussi de commerçants ayant des connaissances techniques spécifiques. En outre, le niveau d’attention du public pertinent serait élevé étant donné que, d’une part, l’achat de chaussures de sport ainsi que de vêtements et de sacs de cyclisme nécessiterait des recherches préalables concernant les caractéristiques techniques, les technologies récentes et les avis d’autres consommateurs, et, d’autre part, le niveau des prix de ces produits serait généralement plus élevé en raison de leurs caractéristiques techniques, de sorte qu’ils ne se prêteraient pas à un achat quotidien ou fréquent.

81      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

82      À cet égard, il y a lieu de constater que les produits visés par la marque demandée, à savoir, en substance, des vêtements et des sacs pour le cyclisme, ainsi que les chaussures d’athlétisme visées par la marque antérieure, sont des produits de consommation courante et peuvent être achetés aussi bien par les consommateurs pratiquant régulièrement du sport ou du vélo, que par ceux qui n’en pratiquent qu’occasionnellement. Il s’ensuit que les produits visés par les signes en conflit s’adressent au grand public, indépendamment du fait qu’ils puissent être destinés exclusivement ou non à des activités sportives. En effet, contrairement à ce que soutient la requérante, les produits en cause sont fréquemment achetés et utilisés par le consommateur de l’Union, ils ne sont ni onéreux, ni rares, leur acquisition et leur utilisation ne nécessitent pas de connaissances spécifiques et n’ont pas d’impact grave sur la santé, le budget ou la vie du consommateur [voir, en ce sens, arrêts du 16 octobre 2013, Zoo Sport/OHMI – K-2 (zoo sport), T‑455/12, non publié, EU:T:2013:531, points 36, 39 et 42 ; du 19 octobre 2017, Leopard/EUIPO – Smart Market (LEOPARD true racing), T‑7/15, non publié, EU:T:2017:731, points 14, 15 et 32, et du 1er mars 2018, Shoe Branding Europe/EUIPO – adidas (Position de deux bandes parallèles sur une chaussure), T‑629/16, EU:T:2018:108, point 107 et jurisprudence citée].

83      C’est donc à juste titre que la chambre de recours a conclu que les produits visés par les signes en conflit s’adressaient au grand public, dont le niveau d’attention était moyen.

b)      Sur la comparaison des produits

84      Pour apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés ou encore la circonstance que lesdits produits ou services sont fréquemment vendus dans les mêmes points de vente spécialisés, qui est de nature à faciliter la perception par le consommateur concerné des liens étroits existant entre eux et à renforcer l’impression que la responsabilité de la fabrication de ces produits ou la fourniture de ces services incombe à la même entreprise [arrêt du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 23 ; voir, également, arrêt du 2 juin 2021, Himmel/EUIPO – Ramirez Monfort (Hispano Suiza), T‑177/20, EU:T:2021:312, points 44 et 45 et jurisprudence citée].

85      Au point 62 de la décision attaquée, la chambre de recours a d’abord indiqué, à titre liminaire, que les vêtements et sacs conçus pour le cyclisme étaient non seulement destinés aux cyclistes professionnels et amateurs, mais également au consommateur moyen utilisant un vélo. Il serait aussi courant que la grande majorité des vêtements et accessoires conçus pour le cyclisme ou pour le sport en général soient portés au lieu des vêtements et accessoires ordinaires, dans le cadre d’autres activités quotidiennes décontractées. En outre, les vêtements et accessoires adaptés aux cyclistes seraient fournis non seulement dans les magasins spécialisés en cyclisme, mais aussi dans les magasins de sport en général.

86      Aux points 63 à 66 de la décision attaquée, la chambre de recours a ensuite considéré en substance que les « mallettes, sacs à main, havresacs, sacs à dos, bourses, tous pour le cyclisme » relevant de la classe 18 visés par la marque demandée étaient, à tout le moins, faiblement similaires aux « chaussures d’athlétisme » relevant de la classe 25 couvertes par la marque antérieure, tandis que les « vestes, shorts, pantalons, jerseys, salopettes, top, justaucorps, tous pour le cyclisme » relevant de la classe 25 visés par la marque demandée étaient moyennement similaires aux « chaussures d’athlétisme » relevant de la même classe couvertes par la marque antérieure.

87      La requérante soutient en substance que les produits relevant des classes 18 et 25 visés par la marque demandée ne présentent aucune similitude avec les « chaussures d’athlétisme » relevant de la classe 25 couvertes par la marque antérieure.

88      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

1)      Sur la comparaison des produits relevant de la classe 18 visés par la marque demandée avec les produits relevant de la classe 25 couverts par la marque antérieure

89      Aux points 63 et 64 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré en substance que les produits concernés étaient, à tout le moins, faiblement similaires, dans la mesure où, d’une part, les « mallettes, sacs à main, havresacs, sacs à dos, bourses, tous pour le cyclisme » relevant de la classe 18 pouvaient être utilisés tant par des cyclistes professionnels, que par toute personne roulant à bicyclette ou s’adonnant à d’autres activités, tandis que les « chaussures d’athlétisme » relevant de la classe 25 incluent les chaussures de sport en général, y compris celles pour le cyclisme et, d’autre part, les produits en cause pourraient tous être vendus dans les mêmes établissements, cibleraient les mêmes consommateurs, pourraient provenir des mêmes fabricants et utiliser les mêmes canaux de distribution.

90      La requérante soutient en substance qu’il n’existe aucune similitude entre les produits concernés, dans la mesure où ils ne partagent pas la même destination, ne sont ni en concurrence ni complémentaires et sont fabriqués par des entreprises différentes et vendus à travers de canaux de distribution différents.

91      À cet égard, il y a lieu de constater que les produits relevant de la classe 18 visés par la marque demandée, à savoir, en substance, des sacs pour le cyclisme, sont des contenants d’objets divers, tandis que les « chaussures d’athlétisme » relevant de la classe 25 couvertes par la marque antérieure sont des produits vestimentaires, de sorte qu’ils ne partagent pas la même nature. En outre, comme le fait valoir à juste titre la requérante, les produits en cause ne présentent pas non plus la même destination étant donné que les sacs pour le cyclisme servent essentiellement à transporter des objets, tandis que les chaussures d’athlétisme ont pour fonction première de couvrir le corps humain, le cacher, le parer et le protéger. Il s’ensuit que les produits en cause ne sont pas substituables et n’ont, dès lors, pas de caractère concurrent [voir, en ce sens, arrêt du 1er mars 2005, Sergio Rossi/OHMI – Sissi Rossi (SISSI ROSSI), T‑169/03, EU:T:2005:72, point 57].

92      Toutefois, il y a lieu d’observer, comme l’a fait en substance la chambre de recours, que les sacs pour le cyclisme peuvent être utilisés non seulement par des cyclistes expérimentés ou amateurs, mais aussi par des personnes s’adonnant, notamment, à d’autres activités sportives. En effet, rien n’exclut de pouvoir utiliser les sacs visés par la marque demandée pour d’autres activités que le cyclisme, dès lors qu’ils permettent de transporter toutes sortes d’objets, tels que des vêtements et des chaussures de sport [voir, en ce sens, arrêt du 19 octobre 2017, Aldi/EUIPO – Sky (SKYLITe), T‑736/15, non publié, EU:T:2017:729, point 72]. De même, contrairement à ce que soutient la requérante, les « chaussures d’athlétisme » peuvent être utilisées pour pratiquer toutes sortes d’activités sportives et elles incluent des chaussures de sport en général, y compris des chaussures pour le cyclisme. Il s’ensuit que les produits concernés peuvent être fabriqués par les mêmes entreprises et vendus dans les mêmes points de vente, notamment les magasins de vente d’articles de sport, qui peuvent proposer tant les produits visés par la marque demandée, que les produits visés par la marque antérieure. La chambre de recours pouvait dès lors conclure à bon droit que les produits concernés sont, à tout le moins, faiblement similaires.

93      Cette conclusion ne saurait être remise en cause par les autres arguments de la requérante.

94      Premièrement, la requérante reproche à la chambre de recours de ne pas avoir expliqué en quoi le fait que les produits relevant de la classe 18 puissent être utilisés à d’autres fins que le cyclisme serait pertinent aux fins de conclure à leur similitude avec les « chaussures d’athlétisme ». De même, elle soutient que la chambre de recours n’a pas non plus précisé en quoi il lui appartenait de prouver que les sacs pour le cyclisme ne pourraient pas être utilisés pour d’autres activités et en quoi cela aurait pu modifier la conclusion selon laquelle les produits concernés sont similaires. Toutefois, ainsi qu’il a déjà été relevé au point 92 ci-dessus et comme cela ressort du point 64 de la décision attaquée, la circonstance que les sacs pour le cyclisme visés par la marque demandée et les chaussures d’athlétisme visées par la marque antérieure sont tous susceptibles d’être utilisés lors de la pratique d’activités sportives en général démontre qu’ils sont susceptibles d’être vendus dans les mêmes points de vente, notamment des magasins de vente d’articles de sport, et donc de partager les mêmes canaux de distribution, ce qui constitue un facteur de similitude, conformément à la jurisprudence rappelée au point 84 ci-dessus. Par ailleurs, il en découle également que la chambre de recours pouvait considérer à juste titre que les produits en cause étaient fréquemment produits par les mêmes fabricants.

95      Deuxièmement, la requérante soutient que l’arrêt du 29 avril 2014, Asos/OHMI – Maier (ASOS) (T‑647/11, non publié, EU:T:2014:230, points 48 à 52), démontre que les produits concernés ne sont pas similaires. Toutefois, il suffit de constater que les produits comparés dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt se distinguent à certains égards des produits visés par la marque demandée et des chaussures d’athlétisme visées par la marque antérieure, de sorte que la jurisprudence invoquée par la requérante ne permet pas de démontrer que les produits concernés ne sont pas similaires.

2)      Sur la comparaison des produits relevant de la classe 25 visés par la marque demandée avec les produits relevant de la même classe couverts par la marque antérieure

96      Aux points 65 et 66 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré en substance que les « vestes, shorts, pantalons, jerseys, salopettes, top, justaucorps, tous pour le cyclisme » étaient moyennement similaires aux « chaussures d’athlétisme » dans la mesure où, premièrement, les vêtements visés par la marque demandée peuvent être portés pour faire du cyclisme dans le cadre d’une activité sportive, mais aussi par toute personne se déplaçant à bicyclette ou pour d’autres activités, tandis que les chaussures d’athlétisme visées par la marque antérieure incluent des chaussures de sport en général, y compris celles pour le cyclisme. Par ailleurs, les produits en cause auraient la même destination, à savoir couvrir et protéger des parties du corps humain contre les conditions extérieures, pourraient être fabriqués à partir des mêmes matériaux, s’adresseraient aux mêmes utilisateurs finals et pourraient être produits par les mêmes fabricants et commercialisés par les mêmes canaux de distribution.

97      La requérante soutient que les produits concernés ne sont pas similaires étant donné que, d’une part, l’athlétisme et le cyclisme sont des segments différents du secteur du sport, et, d’autre part, les chaussures de course à pied (« running shoes ») ainsi que les vêtements et chaussures de cyclisme présentent des caractéristiques techniques spécifiques qui leur sont propres et qui contribuent à les rendre très différents aux yeux du consommateur. Les produits en cause seraient dès lors différents par leur nature, leur destination et leur utilisation, et ne seraient ni complémentaires ni substituables.

98      À cet égard, il y a lieu de relever que les vêtements pour le cyclisme visés par la marque demandée partagent la même nature que les « chaussures d’athlétisme » couvertes par la marque antérieure, dans la mesure où ils constituent tous des produits vestimentaires. Ils partagent également la même destination étant donné qu’ils servent à couvrir le corps humain, le cacher, le parer et le protéger, bien que les chaussures se rapportent aux pieds tandis que les vêtements se rapportent aux autres parties du corps humain.

99      Par ailleurs, dès lors que les produits concernés constituent des produits vestimentaires conçus pour être utilisés, en particulier, dans le cadre d’une activité sportive, ils peuvent être fabriqués par les mêmes entreprises et vendus dans les mêmes points de vente, notamment des magasins de vente d’articles de sport, qui peuvent proposer tant les vêtements visés par la marque demandée, que les chaussures couvertes par la marque antérieure [voir, en ce sens, arrêt du 10 septembre 2008, Tsakiris-Mallas/OHMI – Late Editions (exē), T‑96/06, non publié, EU:T:2008:330, points 30 et 31].

100    Il s’ensuit que, même si la requérante fait valoir à juste titre qu’une partie au moins des vêtements conçus spécialement pour le cyclisme ne conviennent ni aux activités quotidiennes, ni à d’autres activités sportives, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que les produits concernés étaient moyennement similaires.

101    Cette conclusion ne saurait être remise en cause par l’argument de la requérante selon lequel l’athlétisme et le cyclisme constituent des segments différents du secteur du sport, dès lors que le terme « athlétique » fait référence au sport en général. En effet, selon le Collins English Dictionary en ligne, le terme « athletic » est un synonyme de « sports ». Ainsi, le terme « athlétisme » inclut le cyclisme, qui constitue une discipline sportive. De même, si les « chaussures d’athlétisme » couvertes par la marque antérieure et les vêtements de cyclisme visés par la marque demandée pourraient certes présenter des caractéristiques techniques spécifiques qui leur sont propres, comme le fait valoir la requérante, cela ne saurait remettre en cause le fait qu’ils partagent la même nature et la même destination, ainsi que cela a été constaté au point 98 ci-dessus, de sorte que le consommateur considérera ces produits comme similaires.

c)      Sur la comparaison des signes

102    Selon la jurisprudence, deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents, à savoir les aspects visuel, phonétique et conceptuel [voir arrêt du 17 février 2011, Annco/OHMI – Freche et fils (ANN TAYLOR LOFT), T‑385/09, EU:T:2011:49, point 26 et jurisprudence citée]. À cet égard, il ressort de la jurisprudence que le fait qu’une marque demandée soit composée exclusivement de la marque antérieure à laquelle un autre mot est accolé donne une indication de la similitude entre ces deux marques [arrêts du 21 mars 2011, Visti Beheer/OHMI – Meister (GOLD MEISTER), T‑372/09, non publié, EU:T:2011:97, point 27, et du 7 mars 2013, FairWild Foundation/OHMI – Wild (FAIRWILD), T‑247/11, non publié, EU:T:2013:112, point 31].

103    En outre, l’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des marques en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par celles-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

104    En l’espèce, il y a lieu de constater, à l’instar de la chambre de recours aux points 68 et 69 de la décision attaquée, que la marque antérieure se compose uniquement de l’élément verbal « brooks », tandis que la marque demandée comprend, d’une part, l’élément verbal « brooks », de plus grande taille, écrit en lettres majuscules noires et dont les lettres « o » sont imbriquées et, d’autre part, l’élément verbal « england », de plus petite taille, écrit également en lettres majuscules noires et placé en dessous de l’élément verbal « brooks ».

105    S’agissant de l’élément distinctif et dominant de la marque demandée, la chambre de recours a considéré en substance, au point 70 de la décision attaquée, que l’élément verbal « brooks » revêtait une signification pour le public anglophone de l’Union, mais qu’il demeurait distinctif au regard des produits visés par la marque demandée. En revanche, l’élément verbal « england », de plus petite taille, serait compris par l’ensemble du public de l’Union et véhiculerait des informations évidentes et directes concernant l’origine géographique des produits visés par la marque demandée. De plus, la stylisation de ladite marque jouerait un rôle secondaire. La chambre de recours a ainsi conclu que l’élément verbal « brooks », en raison également de sa position et de sa taille, constituait la partie dominante et la plus distinctive de la marque demandée.

106    À cet égard, la requérante fait seulement valoir que la circonstance que le terme « england » correspond à un lieu géographique ne signifie pas pour autant que celui-ci transmet des informations évidentes au sujet de l’origine géographique des produits en cause. En effet, conformément à l’arrêt du 4 mai 1999, Windsurfing Chiemsee (C‑108/97 et C‑109/97, EU:C:1999:230, points 32 et 37), les facteurs à prendre en compte pour établir l’existence d’une association correspondraient à la connaissance plus ou moins grande qu’ont les milieux intéressés du nom géographique, des caractéristiques du lieu désigné et de la catégorie de produits ou de services concernée. Or, le terme « england » ne serait pas associé aux produits visés par la marque demandée, il n’y aurait pas de reconnaissance et de notoriété généralisées de la haute qualité de ces produits en Angleterre et il ne saurait raisonnablement être supposé que ce pays sera associé à la qualité et à la notoriété de ces produits à l’avenir, de sorte que le rôle joué par ce terme dans la comparaison des signes ne saurait être inexistant.

107    À cet égard, il y a lieu de constater, à l’instar de la chambre de recours, que l’élément verbal « brooks » de la marque demandée est distinctif, compte tenu du fait que celui-ci signifie « petits ruisseaux » en anglais et qu’il n’est donc pas descriptif des produits relevant des classes 18 et 25 visés par la marque demandée. En revanche, s’il ne ressort certes pas des éléments du dossier que l’élément verbal « england » est associé aux produits visés par la marque demandée, il n’en demeure pas moins qu’il ne joue pas un rôle décisif dans l’apparence de ladite marque et n’est pas très distinctif, dès lors qu’il ne se réfère qu’à un lieu géographique [voir, en ce sens, arrêts du 28 mars 2017, Regent University/EUIPO – Regent’s College (REGENT UNIVERSITY), T‑538/15, non publié, EU:T:2017:226, point 53, et du 10 mars 2021, Hauz 1929/EUIPO – Houzz (HAUZ LONDON), T‑66/20, non publié, EU:T:2021:125, point 35] et qu’il n’apparaît que dans une petite taille par rapport à l’élément verbal « brooks » et est placé en-dessous de celui-ci. Dans ces conditions, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que l’élément verbal « brooks » constituait l’élément dominant et le plus distinctif de la marque demandée.

108    S’agissant de la comparaison visuelle, phonétique et conceptuelle des signes, la chambre de recours a d’abord considéré, au point 71 de la décision attaquée, que la similitude visuelle était élevée dans la mesure où les signes en cause partageaient l’élément distinctif « brooks », qui était l’élément dominant de la marque demandée et le seul élément de la marque antérieure, et ne se distinguaient que par l’élément verbal « england » de la marque demandée, lequel était descriptif et secondaire, ainsi que par les aspects figuratifs de la marque demandée qui étaient plutôt décoratifs et avaient une incidence moindre sur l’impression visuelle. Ensuite, elle a constaté, au point 72 de la décision attaquée, que la similitude phonétique était également élevée, compte tenu du fait que lesdits signes coïncidaient par le son produit par l’élément commun « brooks », qu’ils ne différaient que par l’élément secondaire « england » de la marque demandée, à supposer que celui-ci soit prononcé, et que les aspects figuratifs de la marque demandée n’avaient aucune incidence sur la comparaison phonétique. Enfin, la chambre de recours a considéré en substance, au point 73 de la décision attaquée, que la similitude conceptuelle était élevée pour la partie du public comprenant la signification du terme anglais « brooks », par rapport à laquelle elle avait limité son examen (voir point 78 ci-dessus).

109    La requérante n’avance aucun argument spécifique à l’encontre des appréciations de la chambre de recours quant à la similitude visuelle, phonétique et conceptuelle des signes. En tout état de cause, aucun élément du dossier ne remet en cause ces appréciations.

110    Dans ces conditions, il y a lieu de constater que c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que les signes en cause étaient très similaires sur les plans visuel, phonétique et conceptuel pour la partie anglophone du public pertinent.

d)      Sur le risque de confusion

111    L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74].

112    Par ailleurs, le risque de confusion est d’autant plus élevé que le caractère distinctif de la marque antérieure s’avère important (arrêt du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, EU:C:1997:528, point 24).

113    Après avoir relevé en substance, au point 74 de la décision attaquée, que le caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure devait être considéré comme moyen, la chambre de recours a considéré en substance, aux points 77 et 78 de la décision attaquée, qu’il existait un risque de confusion pour la partie anglophone du public pertinent faisant preuve d’un niveau d’attention moyen, compte tenu du fait que, en particulier, les produits relevant de la classe 25 visés par les signes en conflit étaient moyennement similaires, les produits relevant de la classe 18 visés par la marque demandée étaient, à tout le moins, faiblement similaires aux produits relevant de la classe 25 couverts par la marque antérieure et les signes en cause étaient très similaires sur les plans visuel, phonétique et conceptuel.

114    La requérante soutient en substance que le signe faisant l’objet de la marque demandée existe depuis longtemps et qu’il est reconnu et associé à la requérante en ce qui concerne notamment les sacs, les vêtements et les accessoires de vélo, en Allemagne et au Royaume-Uni. Dans ce contexte, les lettres « o » stylisées de l’élément verbal « brooks » et l’élément verbal supplémentaire « england » de la marque demandée permettraient d’exclure tout risque de confusion entre les signes en conflit.

115    L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

116    À cet égard, il y a lieu de rappeler que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur d’appréciation en constatant que le niveau d’attention du public pertinent était moyen (voir points 82 et 83 ci-dessus), que les produits relevant de la classe 18 visés par la marque demandée étaient similaires au moins à un faible degré aux « chaussures d’athlétisme » relevant de la classe 25 couvertes par la marque antérieure, tandis que les produits relevant de la classe 25 visés par les signes en conflit étaient similaires à un degré moyen (voir points 92 et 100 ci-dessus), et que les signes en cause étaient similaires à un degré élevé sur les plans visuel, phonétique et conceptuel pour la partie anglophone du public pertinent (voir points 109 et 110 ci-dessus).

117    En outre, dans la mesure où le terme « brooks », qui signifie « petits ruisseaux » en anglais, n’est ni descriptif ni évocateur des « chaussures d’athlétisme » relevant de la classe 25 visées par la marque antérieure, la chambre de recours n’a pas non plus commis d’erreur d’appréciation en constatant, au point 74 de la décision attaquée, que la marque antérieure avait un caractère distinctif intrinsèque moyen. Cela n’est d’ailleurs pas contesté par la requérante.

118    Dans ces circonstances, et compte tenu de la jurisprudence rappelée au point 111 ci-dessus, c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 40/94.

119    Cette conclusion ne saurait être remise en cause par l’argument de la requérante selon lequel elle utilise le signe constituant la marque demandée depuis de nombreuses années et qu’il jouit d’une notoriété en Allemagne et au Royaume-Uni. En effet, d’une part et ainsi que l’a relevé à juste titre l’EUIPO, les circonstances relatives à l’utilisation de la marque demandée avant l’introduction de la demande d’enregistrement de celle-ci en tant que marque de l’Union européenne ne sont pas pertinentes aux fins de la présente procédure d’opposition. C’est la date d’introduction de cette demande qui, dans le cadre d’une telle procédure, est pertinente pour l’appréciation du risque de confusion [voir, en ce sens, arrêt du 26 janvier 2022, Diego/EUIPO – Forbo Financial Services (WOOD STEP LAMINATE FLOORING), T‑498/20, non publié, EU:T:2022:26, point 109]. D’autre part, seule la renommée de la marque antérieure peut être prise en compte pour apprécier le risque de confusion [voir, en ce sens, arrêt du 13 décembre 2012, Natura Selection/OHMI – Ménard (natura), T‑461/11, non publié, EU:T:2012:693, point 62 et jurisprudence citée].

120    De même, ni l’élément verbal supplémentaire « england », ni la stylisation des lettres « o » de l’élément verbal « brooks » de la marque demandée, ne permettent de remettre en cause l’existence d’un risque de confusion entre les signes en conflit, compte tenu du fait que l’élément verbal « england » présente un caractère distinctif faible (voir point 107 ci-dessus) et que la stylisation des lettres « o » de l’élément verbal « brooks » présente un caractère purement décoratif, comme l’a relevé à juste titre la chambre de recours aux points 70 et 71 de la décision attaquée.

121    Il ressort de tout ce qui précède que la première branche du premier chef de conclusions et le deuxième chef de conclusions visant, respectivement, à l’annulation totale ou partielle de la décision attaquée doivent être rejetés, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de la deuxième branche du premier chef de conclusions de la requérante visant à ce qu’il soit déclaré que la marque demandée doit être enregistrée.

122    Partant, le recours doit être rejeté dans son ensemble.

 Sur les dépens

123    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

124    La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Brooks England Ltd est condamnée aux dépens.

Schalin

Škvařilová-Pelzl

Steinfatt

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 7 juin 2023.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.