Language of document : ECLI:EU:T:2023:724

ARRÊT DU TRIBUNAL (neuvième chambre)

15 novembre 2023 (*)

« Fonction publique – Fonctionnaires – Réaffectation dans l’intérêt du service – Décision avec effet rétroactif adoptée en exécution d’arrêts du juge de l’Union – Article 266 TFUE – Articles 22 bis et 22 quater du statut – Irrégularité de la procédure précontentieuse – Principe de bonne administration – Droit d’être entendu – Principe d’impartialité – Délai raisonnable – Devoir de sollicitude – Responsabilité – Préjudice moral »

Dans l’affaire T‑790/21,

PL, représenté par Me N. de Montigny, avocate,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par Mme M. Brauhoff et M. L. Vernier, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre),

composé de MM. L. Truchot, président, H. Kanninen et M. Sampol Pucurull (rapporteur), juges,

greffier : Mme H. Eriksson, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 15 mars 2023,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 270 TFUE, le requérant, PL, demande, d’une part, l’annulation de la décision de la Commission européenne du 16 février 2021 procédant à sa réaffectation avec effet rétroactif à la direction générale (DG) « Mobilité et transports » à compter du 1er janvier 2013 (ci-après la « décision attaquée ») ainsi que de la décision du 16 septembre 2021 rejetant partiellement sa réclamation (ci-après la « décision rejetant partiellement la réclamation ») et, d’autre part, la réparation des préjudices matériels et moraux qu’il aurait subis.

I.      Antécédents du litige

2        Le présent litige concerne la réaffectation du requérant de la délégation de la Commission en Cisjordanie et dans la bande de Gaza à Jérusalem-Est (ci-après la « délégation »), où il travaillait depuis le 16 février 2012, à la DG « Mobilité et transports », à compter du 1er janvier 2013 (ci-après la « réaffectation litigieuse »).

3        La décision attaquée fait suite à l’annulation par le juge de l’Union européenne de deux décisions précédentes ordonnant la réaffectation litigieuse et au retrait par la Commission d’une troisième décision ayant la même portée (ci-après, prises ensemble, les « trois premières décisions de réaffectation »).

4        Le contexte factuel entourant l’adoption de ces décisions est le suivant.

5        Le 20 décembre 2012, le requérant a été informé par un courriel que la réaffectation litigieuse avait été approuvée la veille (ci-après la « première décision de réaffectation »). Cette décision a été contestée par le requérant devant le Tribunal de la fonction publique (affaire F‑96/13).

6        Les circonstances dans lesquelles la première décision de réaffectation a été adoptée ont été décrites aux points 2 à 14 de l’arrêt du 15 avril 2015, PL/Commission (F‑96/13, ci-après l’« arrêt F‑96/13 », EU:F:2015:29), comme suit :

« 2 Le requérant est fonctionnaire à la Commission. À l’époque des faits, il était classé au grade AD 11 et était initialement affecté à l’unité “Ressources financières” de la direction “Ressources communes” de la DG “Mobilité”. Par décision de l’[autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’“AIPN”)] du 16 janvier 2012, il a été transféré à l’unité “Finances, contrats, audit” de la direction “[Politique de v]oisinage” de la DG “Développement et coopération – EuropeAid” (ci-après la “DG ‘Développement et coopération’”) et affecté comme chef de section à la délégation […], avec effet au 16 février 2012.

3      Alors qu’il exerçait ses fonctions à la tête de la section “Finances, contrats et audit” de la délégation, cette dernière a fait l’objet d’une mission d’audit de la Cour des comptes européenne ayant pour objet le programme dénommé [confidentiel] (1). À la fin de leur mission, les auditeurs de la Cour des comptes ont signalé des inadéquations dans la gestion de ce programme. Durant la même période, le requérant a fait part à divers intervenants de ses préoccupations quant à de prétendues irrégularités dans la gestion dudit programme, de ses inquiétudes concernant les activités d’une organisation internationale titulaire de plusieurs contrats conclus avec la DG “Développement et coopération”, de ses interrogations au sujet d’un risque de conflit d’intérêts résultant des liens de certains agents locaux de la délégation avec cette organisation internationale et de ses soupçons de corruption dans le cadre de la mise en œuvre, par ladite organisation, d’un projet de l’Union européenne dénommé [confidentiel]. Par ailleurs, la section “Finances, contrats et audit” de la délégation, qui gère le programme [confidentiel], a fait l’objet d’enquêtes de l’Office européen de lutte antifraude […] ouvertes en 2011 et en 2013.

4      Le 15 octobre 2012, [A], l[a] représentant[e] du personnel de la délégation (ci-après la “représentant[e] du personnel”), a adressé au chef de la délégation une note, signée par 21 membres de la délégation […], dénonçant la frustration d’une partie du personnel à la suite d’un changement d’approche dans la manière de procéder au sein de la section “Finances, contrats et audit” de la délégation au cours des sept mois durant lesquels le requérant en avait assuré la direction. Ce changement d’approche aurait causé de forts retards dans la gestion des projets, voire le blocage de certains d’entre eux, ainsi qu’une perte de crédibilité vis-à-vis des partenaires de l’Union. L[a] représentant[e] du personnel faisait aussi état dans cette note de ce que des comportements inappropriés compromettant l’intégrité professionnelle de membres du personnel avaient été rapportés durant les sept mois précédents et que ceux-ci continuaient à se produire. La note se terminait par un appel à la hiérarchie pour que celle-ci trouve rapidement une solution à cette situation décrite comme étant devenue insupportable.

5      Les 22 et 23 octobre 2012, le chef de l’unité “Finances, contrats et audit” de la direction “[Politique de v]oisinage” de la DG “Coopération et développement” dont relevait le requérant (ci-après le “chef d’unité du requérant”) s’est rendu en mission à la délégation et s’est entretenu avec les collègues de l’intéressé, celui-ci étant absent.

6      Une réunion tenue à Bruxelles le 25 octobre 2012, en présence notamment du chef d’unité du requérant et du requérant, a été consacrée au comportement de ce dernier et aux problèmes de communication opposant les sections “Finances, contrats et audit” et “Opérations” au sein de la délégation.

7      Le 9 novembre 2012, l[a] représentant[e] du personnel a adressé un courriel au chef d’unité du requérant afin de se plaindre de ce que le comportement de celui-ci s’était encore aggravé. Selon l[a] représentant[e] du personnel, le requérant reprochait désormais au personnel d’avoir parlé au chef d’unité lors de la mission des 22 et 23 octobre 2012. Dans le même courriel, l[a] représentant[e] du personnel demandait qu’une mesure préventive soit prise pour protéger le personnel de tout harcèlement.

8      Par la voie de courriels du chef de la délégation et du directeur général adjoint de la DG “Développement et coopération” du 12 novembre 2012, ainsi que de son chef d’unité du 13 novembre suivant, le requérant a été mis en garde quant au caractère inapproprié de son comportement et quant aux problèmes de communication que sa section et lui-même suscitaient. Selon les supérieurs hiérarchiques du requérant, ces difficultés affectaient le travail de la délégation et les relations politiques que l’Union entretenait dans la région.

9      Le 20 novembre 2012, le requérant a été informé téléphoniquement de sa réaffectation au siège et a reçu un courriel du chef de l’unité “Ressources humaines dans les délégations” de la DG “Développement et coopération” lui “confirm[ant sa] réaffectation au siège, à [sa] DG d’origine[, la DG ‘Mobilité’]”. Le même courriel précisait que, “[d]ans quelques jours, le temps de finaliser les procédures[,] [il] recevr[ait] une notification officielle” et l’invitait à prendre le solde de ses congés avant la fin de l’année, ce qui allait le “conduire à quitter prochainement la délégation”.

10      Par courriels des 28 et 29 novembre 2012, le requérant a demandé, respectivement, à son chef de délégation et à son chef d’unité de lui communiquer une liste précise des faits auxquels ils faisaient allusion dans leurs courriels des 12 et 13 novembre précédents afin de pouvoir y répondre.

11      Le 4 décembre 2012, le requérant a informé le chef de l’unité “Ressources humaines dans les délégations” de la DG “Développement et coopération” qu’il préparait son départ, mais qu’il n’avait pas encore reçu la notification officielle de la décision de réaffectation mentionnée dans son courriel du 20 novembre 2012, alors qu’il devait accomplir les formalités de déménagement.

12      Le 6 décembre 2012, le chef de délégation a répondu au courriel du requérant du 28 novembre précédent en lui faisant savoir que les problèmes qu’il avait évoqués étaient récurrents et qu’il ne pouvait en prendre note chaque fois qu’il recevait une plainte le concernant.

13      Le 10 décembre 2012, le requérant a, de nouveau, demandé au chef de la délégation de lui fournir des preuves étayant les reproches qu’il lui faisait. Le 12 décembre suivant, le chef de la délégation l’a invité, pour toute autre communication, à s’adresser au service des ressources humaines compétent.

14      Le 20 décembre 2012, un agent de l’unité “Gestion de la carrière et de la performance” de la DG “Ressources humaines et sécurité” a adressé un courriel au requérant l’informant que sa réaffectation vers les “DG [et] unité : MOVE.SRD (Bruxelles)”, c’est-à-dire vers la DG “Mobilité”, “a[vait] été approuvée” par le chef d’équipe “Mouvements du personnel” de l’unité “Gestion de la carrière et de la performance” en sa qualité d’AIPN en date du 19 décembre 2012, avec prise d’effet au 1er janvier 2013. L’auteur du courriel précisait aussi que cette réaffectation avait pour base légale l’article 7, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne dans sa version alors applicable […], que “ce mouvement [était] enregistré et p[ouvait] être consulté [via le système informatique de gestion du personnel appelé] ‘Sys[p]er 2’”, qu’une copie dudit courriel serait versée dans le dossier du requérant et qu’“aucun acte papier ne sera[it] établi”. »

7        À compter du 1er janvier 2013, le requérant a été promu au grade AD 12 dans le cadre de l’exercice de promotion 2013.

8        Le 16 janvier 2015, le requérant a été affecté à la représentation de la Commission à Londres (Royaume-Uni).

9        Par l’arrêt F‑96/13, rendu le 15 avril 2015, le Tribunal de la fonction publique a annulé la première décision de réaffectation, en raison d’une violation des droits de la défense du requérant.

10      Le 15 octobre 2015, après plusieurs échanges entre la Commission et le requérant, une réunion a eu lieu dans le cadre de l’exécution de l’arrêt F‑96/13 entre la cheffe de l’unité « Gestion de la carrière et de la performance » de la DG « Ressources humaines et sécurité » (ci-après l’« unité DG RH.B4 ») et le requérant, en présence également de son conseil et de deux autres chefs d’unité (ci-après la « réunion du 15 octobre 2015 »).

11      Au cours de cette réunion, la cheffe de l’unité DG RH.B4 a informé le requérant de son intention, en tant qu’autorité investie du pouvoir de nomination (AIPN), d’ordonner, en exécution de l’arrêt F‑96/13, la réaffectation litigieuse de manière rétroactive. Elle a expliqué que l’objet de la réunion était de donner au requérant la possibilité de faire ses remarques avant qu’elle ne prenne cette décision.

12      La cheffe de l’unité DG RH.B4 s’est référée au dossier de l’époque qui révélait, selon elle, une conduite inappropriée du requérant. À cet égard, certains courriels datant du 27 juillet 2012, du 18 septembre 2012, des 3, 5 et 14 octobre 2012 et des 12 et 13 novembre 2012 ont été mentionnés au cours de la réunion.

13      Le requérant s’est prononcé sur le contexte des courriels. Il a également expliqué la dénonciation faite à sa hiérarchie le 3 octobre 2012 concernant l’organisation internationale mentionnée au point 6 ci-dessus. Il a aussi indiqué que, entre le 13 et 20 novembre 2012, des évènements, qu’il ignorait toujours, avaient eu lieu et conduit l’administration à ordonner la réaffectation litigeuse. Selon lui, il existait un lien, qui devait faire l’objet d’une enquête, entre cette réaffectation et sa dénonciation. Les raisons invoquées par la cheffe de l’unité DG RH.B4 auraient été jugées insuffisantes dans l’arrêt F‑96/13.

14      Le 22 décembre 2015, la cheffe de l’unité DG RH.B4 a ordonné la réaffectation litigieuse avec effet rétroactif au 1er janvier 2013 (ci-après la « deuxième décision de réaffectation »).

15      Pour fonder cette décision, la cheffe de l’unité DG RH.B4 a constaté une « situation de communication extrêmement tendue » entre le requérant et ses collègues tant à la délégation qu’au siège, ce qui pouvait, selon elle, être de nature à affecter de façon substantielle le bon fonctionnement de la délégation. À cet égard, elle a expressément fait référence aux courriels datant du 18 septembre au 13 novembre 2012 qui avaient été présentés par l’administration au requérant lors de la réunion du 15 octobre 2015, en citant quelques extraits.

16      Le requérant a contesté devant le Tribunal la deuxième décision de réaffectation. Par arrêt du 13 décembre 2018, PL/Commission (T‑689/16, ci-après l’« arrêt T‑689/16 », non publié, EU:T:2018:925), cette décision a été annulée, au motif qu’elle avait été adoptée par une autorité incompétente, eu égard à la protection conférée au requérant par l’article 22 bis du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut ») en sa qualité d’informateur.

17      À la suite de cette annulation, le chef faisant fonction de l’unité DG RH.B4 a de nouveau adopté la réaffectation litigieuse par une décision du 25 juin 2019, avec effet rétroactif au 1er janvier 2013 (ci-après la « troisième décision de réaffectation »).

18      Par requête introduite le 18 mai 2020 (affaire T‑308/20), le requérant a demandé l’annulation de la troisième décision de réaffectation, en raison, notamment, de l’incompétence de l’auteur de l’acte.

19      Par une lettre du 27 juillet 2020, la directrice générale de la DG « Ressources humaines et sécurité » (ci-après la « directrice générale de la DG RH ») a informé le requérant de sa volonté de retirer la troisième décision de réaffectation et de la remplacer par une nouvelle décision prise par elle-même, en qualité d’AIPN. Elle a précisé que cette décision aurait pour objet la réaffectation litigieuse, avec effet rétroactif au 1er janvier 2013. La directrice générale de la DG RH a invité le requérant à présenter ses observations éventuelles préalablement à l’adoption d’une nouvelle décision.

20      Par une lettre du 13 août 2020, le requérant a demandé à la directrice générale de la DG RH de préciser les raisons qui l’avaient conduite à considérer que le chef faisant fonction de l’unité DG RH.B4 n’était pas l’AIPN compétente pour décider sa réaffectation. Considérant que, eu égard au retrait annoncé de la troisième décision de réaffectation, il bénéficiait toujours de la condition d’informateur, il a fait valoir que la nouvelle décision devait être adoptée dans le respect de l’article 22 bis du statut. Par ailleurs, il a fait observer que le retrait de la troisième décision de réaffectation aurait des répercussions sur la recevabilité du recours introduit dans l’affaire T‑308/20. Enfin, il a demandé à la Commission de prendre position sur ces questions.

21      Par une lettre du 7 septembre 2020, la directrice générale de la DG RH a indiqué que, à la lumière des motifs de l’arrêt T‑689/16, il apparaissait que la décision de réaffectation ne pouvait être prise que par elle. Cette dernière a également précisé que le retrait de la troisième décision de réaffectation visait à mettre en œuvre cet arrêt de la manière la plus incontestable qui soit, sans attendre l’issue de la procédure engagée dans le cadre de l’affaire T‑308/20. Dans ce but, elle a réitéré son invitation au requérant à présenter des observations sur la décision envisagée, mentionnée dans la lettre du 27 juillet 2020.

22      Par une lettre du 17 septembre 2020, le requérant a rappelé les circonstances dans lesquelles la première décision de réaffectation avait été prise. En particulier, cette réaffectation lui aurait été annoncée le 20 novembre 2012, soit moins d’un mois après la communication à sa hiérarchie de possibles irrégularités dans la gestion du programme [confidentiel], de ses inquiétudes concernant les activités d’une organisation titulaire de plusieurs contrats conclus avec la DG « Développement et coopération – EuropeAid » (ci-après la « DG “Développement et coopération” »), de ses interrogations quant aux risques de conflit d’intérêts résultant des liens de certains agents locaux et contractuels de la délégation avec cette organisation et de soupçons de corruption dans le cadre de la mise en œuvre, par cette organisation, du projet [confidentiel]. Le requérant a également rappelé les raisons ayant conduit le Tribunal de la fonction publique à annuler la première décision de réaffectation, en faisant référence aux points 66 et 67 de l’arrêt F‑96/13. Il a également fait valoir que, au cours de la réunion du 15 octobre 2015, la Commission n’avait pas fourni d’éléments nouveaux, ni précisé aucun grief qui serait intervenu après le 13 novembre 2012. Le requérant n’aurait donc pas pu faire valoir utilement ses observations. Le requérant a également rappelé que, depuis le 10 octobre 2016, il avait demandé à être entendu par la directrice générale de la DG RH sur sa situation, caractérisée par sept réaffectations depuis le 1er janvier 2013 dans l’intérêt du service, à des emplois créés spécialement à cet effet et supprimés après son départ. La troisième décision de réaffectation aurait également été adoptée sans que le requérant ait pu présenter utilement ses observations. Si, comme la directrice générale de la DG RH l’avait annoncé, cette décision devait être retirée ultérieurement, il appartiendrait alors à la Commission d’indiquer au requérant les motifs précis de la réaffectation litigieuse pour lui permettre de présenter utilement ses observations. La Commission devrait également s’assurer que la nouvelle décision serait prise dans le respect des dispositions qui régissaient son statut d’informateur. Compte tenu de la complexité de l’affaire, datant de 2012, le requérant a demandé à être reçu par la directrice générale de la DG RH afin d’examiner, dans un premier temps de manière informelle, les éléments de nature à mettre fin à cette situation.

23      Par une lettre du 9 octobre 2020, la directrice générale de la DG RH a indiqué au requérant qu’il disposait de tous les éléments pertinents lui permettant d’exercer utilement son droit d’être entendu. À cet égard, elle a mentionné les procès-verbaux de la réunion du 15 octobre 2015 établis par l’administration et par le requérant, desquels ressortaient, selon elle, les motifs pris en compte par la cheffe de l’unité DG RH.B4 pour adopter la deuxième décision de réaffectation. La directrice générale de la DG RH a rappelé que cette décision avait été annulée par le Tribunal au seul motif tiré de l’incompétence de son auteur. Dès lors, elle a invité le requérant à lui faire part, dans un délai de deux semaines, de ses observations, en joignant les procès-verbaux à la lettre. De surcroît, elle a communiqué au requérant la décision de retrait de la troisième décision de réaffectation. Elle a précisé que le retrait avait vocation à mettre fin à l’irrégularité existante liée à l’incompétence de l’auteur de cette décision et que ce retrait serait suivi de l’adoption d’une nouvelle décision de réaffectation du requérant, après l’avoir entendu.

24      Par une lettre du 31 octobre 2020, le requérant a fait valoir que, ainsi qu’il ressortait des points 60, 61 et 66 de l’arrêt F‑96/13, sa hiérarchie avait adressé des reproches sur son comportement après le 13 novembre 2012 qu’il n’avait pas été en mesure de contester. Les évènements postérieurs à cette date n’auraient pas été éclaircis lors de la réunion du 15 octobre 2015, au cours de laquelle la Commission se serait bornée à relire les échanges de courriels intervenus entre le requérant et le chef de la délégation, d’une part, et avec son chef d’unité à la DG « Développement et coopération », d’autre part. Le requérant a rappelé qu’il avait demandé sans succès à avoir accès à une note portant le cachet du 26 novembre 2012 adressée aux membres de la commission pour la gestion des ressources dans les délégations (ci-après le « Comdel ») à son sujet ainsi qu’à l’ensemble des documents s’y rapportant et, plus particulièrement, à ceux transmis en 2012 par la DG « Développement et coopération » au service juridique de la Commission et à ceux détenus par ce dernier. Selon le requérant, le Tribunal de la fonction publique a définitivement jugé que les motifs antérieurs au 13 novembre 2012 ne pouvaient motiver légalement la réaffectation litigieuse. Selon lui, les informations qu’il avait fournies à sa hiérarchie, sans réaction de celle-ci, avaient été communiquées par la Cour des comptes européenne à l’Office européen de lutte antifraude (OLAF), qui l’avait convoqué à quatre reprises. Sur la base de ces mêmes éléments, la Commission aurait annulé tous les contrats de gestion indirecte passés avec l’organisation en cause dans le cadre du programme [confidentiel]. Ces mêmes éléments auraient conduit le chef de la mission d’audit de la Cour des comptes à faire état expressément, au cours d’une réunion, de corruption, de fraude, de népotisme et de collusion. En tant que chef de la section « Finances, contrats et audit » dans la délégation, le requérant était tenu de prendre les mesures de nature à préserver les intérêts de l’Union. Les motifs d’une éventuelle nouvelle décision de réaffectation qui, selon lui, n’apparaissent pas dans la lettre du 27 juillet 2020, devaient donc être objectifs, clairs et précis pour lui permettre de les contester lors d’une audition avec l’AIPN compétente, qu’il sollicitait en tant qu’informateur, afin de régulariser sa situation administrative et de le rétablir dans son honneur et sa dignité professionnels.

25      Par ordonnance du 25 novembre 2020, PL/Commission (T‑308/20, non publiée, EU:T:2020:571), le Tribunal a constaté que le recours introduit par le requérant contre la troisième décision de réaffectation était devenu sans objet à la suite de son retrait. La Commission a été condamnée à supporter les dépens de l’instance, car il a été considéré que, en retirant la troisième décision de réaffectation, elle avait implicitement reconnu que sa procédure d’adoption n’était pas exempte de critiques.

26      Par un courriel du 11 décembre 2020, le requérant a réitéré auprès de la directrice générale de la DG RH sa demande d’être entendu au cours d’une réunion.

27      Le 16 février 2021, la directrice générale de la DG RH a adopté la décision attaquée.

28      Aux trois premiers considérants de la décision attaquée, la directrice générale de la DG RH a indiqué que les différents écrits échangés en 2012 entre le requérant et sa hiérarchie, que ce soit à la DG « Développement et coopération » à Bruxelles (Belgique) ou au sein de la délégation, faisaient état d’une « situation relationnelle […] devenant de plus en plus intenable » et que, dans le but d’apaiser la situation au sein de la délégation, il convenait de décider la réaffectation litigieuse, l’administration disposant d’une large marge d’appréciation dans l’organisation de ses services.

29      La directrice générale de la DG RH a ensuite rappelé les procédures ayant conduit à l’adoption des trois premières décisions de réaffectation et les raisons ayant justifié, selon le cas, leur annulation par le juge de l’Union ou son retrait par la Commission.

30      Au douzième considérant de la décision attaquée, la directrice générale de la DG RH a considéré que le requérant bénéficiait des dispositions de l’article 22 bis du statut et que, par conséquent, elle était l’AIPN compétente pour décider la réaffectation litigieuse.

31      Après avoir considéré que le requérant avait pu exercer son droit d’être entendu dans le cadre des échanges décrits aux points 19 à 24 ci-dessus, la directrice générale de la DG RH a indiqué, au dernier considérant de la décision attaquée, qu’il convenait de « régulariser la situation administrative » du requérant avec effet rétroactif au 1er janvier 2013, en adoptant une nouvelle décision avec le même contenu que la deuxième décision de réaffectation et fondée sur les mêmes motifs, exposés aux trois premiers considérants de la décision attaquée.

32      Dans le courriel de transmission de la décision attaquée, daté également du 16 février 2021, la directrice générale de la DG RH a indiqué au requérant que, au cours des années précédant l’adoption de cette décision, il avait eu amplement l’opportunité d’exprimer son point de vue sur la réaffectation litigieuse et les raisons qui la justifiaient, de sorte qu’une réunion bilatérale entre elle et lui ne lui semblait pas nécessaire.

33      Le 17 mai 2021, le requérant a introduit une réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut contre la décision attaquée, en sollicitant, notamment, son retrait, l’annulation de toutes les autres décisions prises à son égard par des autorités incompétentes eu égard à sa condition d’informateur et la suppression dans le système informatique de gestion du personnel de la Commission dénommé « Sysper 2 » de toute autre décision administrative prise de manière irrégulière entre 2013 et 2022 ainsi que le versement des sommes de 100 000 et 250 000 euros au titre, respectivement, du préjudice matériel et du préjudice moral allégués.

34      La réclamation a été présentée à l’aide d’un formulaire de couverture, qui se référait à l’article 22 quater du statut et devait être adressé à l’unité « Recours et suivi des cas » de la DG « Ressources humaines et sécurité » (ci-après l’« unité DG RH.E2 ») de la Commission. Le formulaire et la réclamation ont été accompagnés d’une lettre du requérant, adressée à la directrice générale de la DG RH, indiquant qu’il s’agissait d’une réclamation fondée sur l’article 22 quater du statut. Le formulaire, la réclamation et la lettre ont été envoyés conjointement par courriel à l’unité DG RH.E2.

35      Par un courriel du 31 mai 2021, adressé au requérant, l’unité DG RH.E2 a accusé réception de l’envoi fait le 17 mai 2021, en se référant à la réclamation « introduite au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut » et en joignant un document nommé « Déclaration de confidentialité concernant la protection des données à caractère personnel ». Par ce même courriel, le requérant a été invité à présenter, s’il l’estimait utile, tout nouveau document concernant sa réclamation dans un délai de quinze jours.

36      Par un courriel du 3 juin 2021, le requérant a demandé à l’unité DG RH.E2 que certains aspects du courriel du 31 mai 2021 soient clarifiés, après validation de la directrice générale de la DG RH en tant qu’AIPN compétente. En premier lieu, il a fait observer que la réclamation avait été introduite sur la base de l’article 22 quater du statut. En deuxième lieu, il a demandé la communication des règles internes prévues par l’AIPN pour le traitement des réclamations au titre de cette disposition. En troisième lieu, il a demandé que le délai de quinze jours qui lui avait été accordé pour présenter tout document utile soit suspendu dans l’attente d’une réponse à sa demande de clarification. Par ailleurs, il a demandé le respect de la confidentialité garantie par le statut pour ce type d’affaires.

37      Par un courriel du 4 juin 2021, une personne de l’unité DG RH.E2 a précisé que la réclamation introduite par le requérant sur le fondement de l’article 22 quater du statut serait traitée par cette unité, conformément à l’article 90, paragraphe 2, du statut et ainsi qu’il ressortait de l’Information administrative no 79-2013, du 19 décembre 2013, concernant l’introduction de demandes au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut, des réclamations en application de l’article 90, paragraphe 2, du statut et des demandes d’assistance sur le fondement de l’article 24 du statut, transmise en pièce jointe.

38      Par la décision rejetant partiellement la réclamation, notifiée au requérant le 16 septembre 2021, le membre de la Commission chargé des ressources humaines et de la sécurité (ci-après le « membre de la Commission chargé de la DG RH »), agissant en qualité d’AIPN, a partiellement fait droit à la réclamation du requérant en acceptant de retirer de son dossier Sysper 2 la troisième décision de réaffectation et toutes les mentions relatives à l’article 22 bis du statut concernant les décisions de réaffectation. La réclamation a été rejetée pour le surplus. S’agissant de la demande indemnitaire introduite dans la réclamation, le membre de la Commission chargé de la DG RH l’a jugée dépourvue de lien avec la décision attaquée, puisque le préjudice allégué résultait, selon lui, d’une succession d’évènements intervenus depuis 2013. Par conséquent, cette partie de la réclamation a été requalifiée en demande au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut. Le membre de la Commission chargé de la DG RH a indiqué qu’il n’était pas l’AIPN compétente pour le traitement de cette demande et que, dans ces conditions, une réponse y serait donnée dans une décision différente.

II.    Conclusions des parties

39      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée et, pour autant que de besoin, la décision rejetant partiellement la réclamation ;

–        constater la carence de la Commission à prendre les mesures d’exécution des arrêts F‑96/13 et T‑689/16 dans le respect de leurs motifs et de la violation de l’autorité de la chose jugée ;

–        condamner la Commission au paiement d’indemnités d’un montant de 250 000 euros en réparation du préjudice matériel et d’un montant de 100 000 euros en réparation du préjudice moral subi ;

–        condamner la Commission aux dépens.

40      La Commission conclut à ce qui plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner le requérant aux dépens.

III. En droit

A.      Sur l’objet du recours

41      Par son premier chef de conclusions, le requérant demande l’annulation de la décision attaquée et, « pour autant que de besoin », celle de la décision rejetant partiellement la réclamation.

42      Conformément au principe d’économie de la procédure, le juge peut décider qu’il n’y a pas lieu de statuer spécifiquement sur les conclusions dirigées contre la décision portant rejet de la réclamation lorsqu’il constate que celles-ci sont dépourvues de contenu autonome et se confondent, en réalité, avec celles dirigées contre la décision contre laquelle la réclamation a été présentée (voir arrêt du 24 avril 2017, HF/Parlement, T‑584/16, EU:T:2017:282, point 72 et jurisprudence citée).

43      En l’espèce, les conclusions en annulation de la décision rejetant partiellement la réclamation ne se confondent pas avec celles dirigées contre la décision attaquée. En effet, au soutien des premières, le requérant dénonce spécifiquement une violation des garanties accordées aux informateurs par l’article 22 quater du statut concernant le traitement des réclamations qu’ils présentent dans le cadre de la procédure précontentieuse. D’une part, dans le cadre du premier moyen, le requérant fait valoir que la réclamation n’a pas été examinée par une AIPN compétente. D’autre part, au soutien de la première branche du troisième moyen, il affirme que le traitement singulier de sa réclamation, garanti par l’article 22 quater du statut, n’a pas été assuré.

44      Or, le requérant doit pouvoir faire contrôler par le juge de l’Union la régularité de la procédure de réclamation, qui a pour objet de permettre et de favoriser un règlement amiable du différend surgi entre le fonctionnaire et l’administration et d’imposer à l’autorité dont dépend le fonctionnaire de réexaminer sa décision, dans le respect des règles, à la lumière des objections éventuelles de celui‑ci (voir, en ce sens, arrêt du 19 juin 2015, Z/Cour de justice, T‑88/13 P, EU:T:2015:393, points 143 à 146 et jurisprudence citée).

45      Dans ces circonstances, il convient de statuer non seulement sur les conclusions en annulation de la décision attaquée, mais également sur celles qui portent sur la décision rejetant partiellement la réclamation.

46      En outre, il y a lieu de relever que, par son deuxième chef de conclusions, le requérant demande que le Tribunal constate la carence de la Commission à prendre les mesures d’exécution des arrêts F‑96/13 et T‑689/16 dans le respect de leurs motifs et de la violation de l’autorité de la chose jugée.

47      En réponse à une question du Tribunal posée lors de l’audience, le requérant a précisé que son deuxième chef de conclusions portait sur l’une des illégalités qui fondaient la demande indemnitaire formulée dans son troisième chef de conclusions.

48      Il convient donc d’interpréter ensemble les deuxième et troisième chefs de conclusions comme étant un seul chef de conclusions, de nature indemnitaire.

B.      Sur les conclusions en annulation

49      À l’appui de ses conclusions en annulation, le requérant invoque trois moyens, tirés :

–        le premier, de l’incompétence de l’autorité administrative ayant rejeté la réclamation ;

–        le deuxième, de la violation de l’article 266 TFUE, de l’autorité de la chose jugée et du principe de non-rétroactivité, d’un détournement de procédure, d’une violation de ses garanties procédurales ainsi que du droit d’être entendu de manière effective et conformément à l’objectif recherché par ce droit ;

–        le troisième, d’une violation de l’article 22 bis du statut, du devoir d’assistance et de sollicitude dans le cadre de la procédure de réaffectation, de l’article 22 quater du statut et de la protection attachée aux informateurs, des devoirs de diligence, de neutralité, d’impartialité, d’objectivité, de son droit au traitement équitable de son dossier par l’administration et de ses attentes légitimes ainsi que d’un détournement de procédure.

1.      Considérations liminaires

50      À titre liminaire, il convient de rappeler les obligations qui incombent à l’administration lorsqu’elle décide de réaffecter un fonctionnaire.

51      Les décisions de réaffectation sont soumises, en ce qui concerne la sauvegarde des droits et des intérêts légitimes des fonctionnaires concernés, aux règles de l’article 7, paragraphe 1, du statut. En vertu de cette disposition, l’AIPN affecte, par voie de nomination ou de mutation, dans le seul intérêt du service et sans considération de nationalité, chaque fonctionnaire à un emploi de son groupe de fonctions correspondant à son grade.

52      Les institutions disposent, à ce titre, d’un large pouvoir d’appréciation dans l’organisation de leurs services en fonction des missions qui leur sont confiées et dans l’affectation, en vue de celles-ci, du personnel qui se trouve à leur disposition, à la condition, cependant, d’une part, que cette affectation se fasse dans l’intérêt du service et, d’autre part, qu’elle respecte l’équivalence entre le grade et l’emploi (voir arrêt du 27 octobre 2022, CE/Comité des régions, C‑539/21 P, non publié, EU:C:2022:840, point 44).

53      Des difficultés relationnelles internes, lorsqu’elles causent des tensions préjudiciables au bon fonctionnement d’un service, peuvent justifier la réaffectation d’un fonctionnaire dans l’intérêt du service, sans le consentement du fonctionnaire concerné, a fortiori lorsque ce service est investi de missions diplomatiques. Une telle mesure peut même être prise indépendamment de la question de la responsabilité des incidents en cause (voir arrêt du 12 octobre 2022, Paesen/SEAE, T‑88/21, EU:T:2022:631, point 213 et jurisprudence citée).

54      Le requérant ayant été considéré comme un informateur de bonne foi au sens de l’article 22 bis, paragraphe 3, du statut, il convient également de rappeler les garanties dont il bénéficiait dans le cadre de l’adoption de la décision attaquée.

55      La protection prévue par l’article 22 bis, paragraphe 3, du statut est accordée, sans aucune formalité, aux fonctionnaires ayant donné des informations de bonne foi sur des faits qui laissent présumer l’existence d’une activité illégale, et cela du simple fait d’avoir fourni lesdites informations (voir, en ce sens, arrêt du 12 décembre 2014, AN/Commission, T‑512/13 P, EU:T:2014:1073, points 30 et 31).

56      Le fait qu’une décision défavorable à un fonctionnaire ou agent fasse suite, chronologiquement, à la communication, par ce dernier, d’informations au titre de l’article 22 bis du statut doit conduire le Tribunal, lorsqu’il est saisi d’un recours dirigé contre cette décision, à examiner le moyen tiré de la violation de ces dispositions avec une vigilance particulière. Il convient néanmoins de rappeler que cette disposition n’offre pas au fonctionnaire une protection contre toute décision susceptible de lui faire grief, mais seulement contre les décisions liées aux dénonciations effectuées par lui (voir, en ce sens, arrêt du 13 décembre 2017, CJ/ECDC, T‑692/16, non publié, EU:T:2017:894, points 109 et 110).

57      S’agissant de la charge de la preuve, le point 3 de la communication SEC(2012) 679 final du vice-président Šefčovič à la Commission, du 6 décembre 2012, sur les lignes directrices relatives à la transmission d’informations en cas de dysfonctionnements graves (whistleblowing) (ci-après les « lignes directrices relatives à l’alerte professionnelle ») précise qu’il appartient à la personne prenant une mesure défavorable à l’encontre de l’informateur d’établir que cette mesure a été motivée par des raisons autres que la notification de dysfonctionnements.

58      Enfin, l’article 22 quater du statut impose à l’AIPN de chaque institution d’établir des règles internes concernant, notamment, les informations fournies aux fonctionnaires visés à l’article 22 bis, paragraphe 1, du statut sur le traitement des faits rapportés par eux, la protection de leurs intérêts légitimes et leur vie privée ainsi que la procédure de traitement de leurs réclamations. Ces dernières doivent être traitées de manière confidentielle et, lorsque les circonstances le justifient, avant l’expiration des délais fixés à l’article 90 du statut.

59      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner les moyens avancés par le requérant au soutien de ses conclusions en annulation de la décision attaquée et de la décision rejetant partiellement la réclamation.

2.      Sur le premier moyen, tiré de l’incompétence de l’autorité administrative ayant rejeté la réclamation

60      Le requérant conteste la compétence du membre de la Commission chargé de la DG RH pour rejeter sa réclamation, introduite, selon lui, au titre de l’article 22 quater du statut et non au titre de l’article 90, paragraphe 2, dudit statut. Selon le requérant, aucun texte ne permettrait de reconnaître cette compétence. Cette dernière n’aurait d’ailleurs pas été reconnue par le requérant dans sa réclamation. Dans la réplique, le requérant ajoute que c’est l’unité DG RH.E2 qui a traité cette réclamation, le membre de la Commission chargé de la DG RH s’étant contenté de la signer. Toutefois, cette délégation ou cet appui administratif ne seraient pas prévus par le droit applicable.

61      La Commission conteste les arguments du requérant comme étant soit irrecevables car tardifs, soit non fondés.

62      À cet égard, il y a lieu de constater que la décision attaquée a été adoptée, sans délégation, par la directrice générale de la DG RH en tant qu’AIPN compétente, suivant les règles rappelées aux points 47 et 48 de l’arrêt T‑689/16.

63      Or, conformément au point 12 du tableau V de l’annexe I de la décision (2013) 3288 de la Commission, du 4 juin 2013, relative à l’exercice des pouvoirs dévolus par le statut des fonctionnaires à l’AIPN et à l’autorité habilitée à conclure les contrats d’engagement (AHCC), telle que modifiée par la décision C(2014) 9864 de la Commission, du 16 décembre 2014 (ci-après la « décision AIPN/AHCC de la Commission »), les réclamations présentées à l’encontre de décisions prises à l’égard des fonctionnaires de tous les grades sont normalement présentées devant la directrice générale de la DG RH. Toutefois, la note en bas de page no 2 afférente au point 12 du tableau prévoit que, si la directrice générale de la DG RH a adopté une décision sans délégation de pouvoir, comme c’est le cas en l’espèce (voir point 62 ci-dessus), la réponse à la réclamation introduite contre cette décision doit être apportée par le membre de la Commission chargé de la DG RH.

64      Certes, le point 12 du tableau V de l’annexe I de la décision AIPN/AHCC de la Commission porte sur les réclamations fondées sur l’article 90, paragraphe 2, du statut, alors que le requérant se prévaut également de l’article 22 quater du statut.

65      Toutefois, l’article 22 quater du statut se réfère lui-même aux réclamations émanant de fonctionnaires concernant la manière dont ils ont été traités après ou du fait de s’être acquittés de leurs obligations au titre de l’article 22 bis du statut, en renvoyant, notamment, à l’article 90 du statut.

66      Dans ces conditions, le membre de la Commission chargé de la DG RH était compétent pour statuer sur la réclamation du requérant.

67      S’agissant du grief du requérant tiré du traitement de sa réclamation par l’unité DG RH.E2, il y a lieu de constater que ni l’article 22 quater du statut, ni la décision AIPN/AHCC de la Commission, ni les lignes directrices relatives à l’alerte professionnelle n’empêchent cette unité d’apporter un soutien à l’AIPN compétente. En outre, le requérant ne produit aucun élément de nature à prouver son argument selon lequel le membre de la Commission chargé de la DG RH se serait contenté de signer le projet de décision proposé par les services. Dès lors, sans qu’il soit besoin d’examiner leur caractère tardif, il convient de considérer que ces griefs ne sont pas fondés.

68      Il résulte de ce qui précède que le premier moyen doit être rejeté.

3.      Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation de l’article 266 TFUE, de l’autorité de la chose jugée et du principe de non-rétroactivité, d’un détournement de procédure et d’une violation des garanties procédurales ainsi que du droit d’être entendu 

69      Le deuxième moyen est divisé en trois branches.

70      La première branche est tirée d’une « violation des droits de la défense, du droit d’être entendu, de l’absence d’une enquête administrative, d’une violation du principe du contradictoire et du principe d’égalité des armes, de l’article 41 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et du droit à une bonne administration ainsi que du délai raisonnable ».

71      Les deuxième et troisième branches, que le Tribunal examinera de manière conjointe, sont tirées, en substance, de plusieurs violations concernant la manière dont les arrêts F‑96/13 et T‑689/16 ont été exécutés par la Commission.

a)      Sur la première branche, tirée d’une violation des droits de la défense et du droit d’être entendu, de l’absence d’une enquête administrative, d’une violation du principe du contradictoire, du principe d’égalité des armes, de l’article 41 de la Charte et du droit à une bonne administration ainsi que du délai raisonnable

72      À titre liminaire, il y a lieu de relever, à l’instar de la Commission, que, dans l’intitulé de cette branche, le requérant invoque la violation des principes du contradictoire et de l’égalité des armes, propres aux droits de la défense, également mentionnés. Toutefois, ces griefs ne sont pas développés par la suite. Or, en vertu de l’article 76, sous d), du règlement de procédure du Tribunal, la requête doit contenir l’objet du litige, les moyens et arguments invoqués ainsi qu’un exposé sommaire de ces moyens. La requête ne répondant pas, en ce qui concerne ces griefs, aux exigences établies par cette disposition, ils doivent être déclarés irrecevables.

73      Au soutien de cette branche, le requérant avance, en substance, deux griefs, tirés de la violation, premièrement, de son droit d’être entendu et, deuxièmement, du droit à une bonne administration garanti par l’article 41 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte ») en l’absence d’enquête administrative et en raison du dépassement d’un délai raisonnable.

1)      Sur la violation du droit d’être entendu

74      À l’appui de ce grief, le requérant fait valoir que les trois premiers considérants de la décision attaquée contiennent une interprétation rétroactive des faits qui ne figurait pas dans les trois premières décisions de réaffectation et à propos de laquelle il n’a pas été entendu. En outre, il n’aurait pas été informé avant la décision attaquée du fait que l’AIPN compétente allait prendre en considération des échanges intervenus avec sa hiérarchie en 2012.

75      Le requérant ajoute que la directrice générale de la DG RH a refusé l’organisation d’un entretien avec lui, alors que la Commission avait affirmé devant le Tribunal dans le cadre de l’affaire T‑308/20 que la décision attaquée serait adoptée après l’avoir dûment entendu. Selon le requérant, au cours de cet entretien, il aurait pu, pour la première fois, être entendu par l’AIPN compétente sur le lien entre l’information qu’il avait communiquée au titre de l’article 22 bis du statut, sensible et confidentielle à l’égard des services, et la réaffectation litigieuse, sollicitée par son ancienne hiérarchie à la délégation, soumise à l’enquête de l’OLAF, par pure rétorsion.

76      Or, au lieu d’entendre le requérant au cours d’un entretien bilatéral, la directrice générale de la DG RH se serait contentée de tenir compte des échanges intervenus en 2015 entre le requérant et l’administration, au sujet des reproches de sa hiérarchie, dans le cadre d’une procédure au cours de laquelle il n’avait pas pu bénéficier des garanties accordées par l’article 22 bis du statut, en termes de confidentialité, devant une AIPN compétente. Le requérant n’aurait pas non plus pu bénéficier de ces garanties dans le cadre des échanges intervenus avec l’administration immédiatement après le retrait de la troisième décision de réaffectation.

77      Enfin, le requérant estime qu’il ne pouvait pas être utilement entendu presque neuf ans après les faits reprochés.

78      La Commission soutient que les arguments du requérant doivent être rejetés.

79      À cet égard, il est opportun de rappeler que le contenu du droit fondamental d’être entendu implique que l’intéressé ait la possibilité d’influencer le processus décisionnel en cause, ce qui est de nature à garantir, notamment, que la décision constitue le résultat d’une mise en balance appropriée de l’intérêt du service et de l’intérêt personnel de la personne concernée (voir arrêt du 13 décembre 2017, CJ/ECDC, T‑692/16, non publié, EU:T:2017:894, point 80 et jurisprudence citée).

80      En l’espèce, conformément à la jurisprudence, la directrice générale de la DG RH, en sa qualité d’AIPN, devait prendre une décision en exécution des arrêts d’annulation, en se replaçant à la date à laquelle la première décision de réaffectation avait été adoptée (voir, en ce sens, arrêt du 13 décembre 2017, CJ/ECDC, T‑692/16, non publié, EU:T:2017:894, point 56 et jurisprudence citée).

81      Lorsque, comme en l’occurrence, une décision ne peut être prise que dans le respect du droit d’être entendu, l’intéressé doit être mis en mesure de faire connaître utilement son point de vue au sujet de la mesure envisagée, dans le cadre d’un échange écrit ou oral engagé par l’administration et dont la preuve incombe à celle-ci (voir arrêt du 10 janvier 2019, RY/Commission, T‑160/17, EU:T:2019:1, point 45 et jurisprudence citée).

82      Il convient d’observer que la violation des droits de la défense du requérant dans le cadre de l’adoption de la première décision de réaffectation a été constatée par le juge de l’Union dans l’arrêt F‑96/13 dans les circonstances rappelées au point 6 ci-dessus. En particulier, le Tribunal de la fonction publique a constaté que si le requérant ne pouvait pas ignorer en 2012 la perception négative de son comportement par ses collègues et par la hiérarchie, la conséquence envisagée par l’AIPN, à savoir la réaffectation litigieuse, n’avait pas été exposée avant l’adoption de cette première décision, sans qu’il puisse donc faire valoir son point de vue. Par ailleurs, selon le juge de l’Union, il ressortait du dossier que la hiérarchie du requérant avait adressé des reproches relatifs à son comportement après le 13 novembre 2012, qu’il n’avait pas été en mesure de contester.

83      Or, la décision attaquée n’a pas été adoptée dans les mêmes conditions.

84      En effet, au cours de la réunion du 15 octobre 2015, mentionnée dans la décision attaquée, il a notamment été indiqué au requérant que les éléments contenus dans une succession de courriels datant de la période allant du 18 septembre au 13 novembre 2012 étaient susceptibles de justifier la réaffectation litigieuse. Aucun élément postérieur à cette date n’a été mis en exergue par la Commission. Ainsi qu’il ressort des procès-verbaux détaillés de cette réunion, le requérant a pu exprimer son point de vue sur ces éléments et expliquer le contexte dans lequel les courriels avaient été envoyés, qui incluait ses soupçons concernant l’organisation mentionnée au point 6 ci-dessus et les informations qu’il avait communiquées à la hiérarchie depuis le 3 octobre 2012.

85      Dans le cadre de l’adoption de la décision attaquée, la directrice générale de la DG RH a pris en considération les procès-verbaux de ces réunions, au cours desquelles le requérant avait fait valoir son point de vue. Par ailleurs, après avoir annoncé le retrait de la troisième décision de réaffectation, la directrice générale de la DG RH a invité le requérant, à trois reprises, à présenter des observations au sujet du contexte dans lequel les première et deuxième décisions de réaffectation avaient été adoptées et qui ressortait, selon elle, de ces procès-verbaux.

86      À la lumière de ces éléments, il y a lieu de considérer que le droit d’être entendu rappelé au point 79 ci-dessus a été respecté.

87      Les arguments du requérant ne remettent pas en cause cette conclusion.

88      En premier lieu, contrairement à ce que le requérant fait valoir, les trois premiers considérants de la décision attaquée ne contiennent pas une nouvelle interprétation rétroactive des faits litigieux. En effet, ainsi qu’il ressort du dernier considérant de cette décision, ces trois considérants se limitent à reprendre, en substance, le contenu de la deuxième décision de réaffectation décrit au point 15 ci-dessus.

89      En deuxième lieu, dans sa lettre du 9 octobre 2020, la directrice générale de la DG RH a communiqué au requérant les procès-verbaux de la réunion du 15 octobre 2015, qui mentionnent les échanges de courriels intervenus entre lui et sa hiérarchie. Il ressort, en substance, de cette lettre que la directrice générale de la DG RH envisageait de prendre en considération les éléments contenus dans ces procès-verbaux, sur lesquels elle a invité le requérant à présenter des observations.

90      En troisième lieu, ainsi qu’il ressort de l’ordonnance du 25 novembre 2020, PL/Commission (T‑308/20, non publiée, EU:T:2020:571), la Commission a certes précisé devant le Tribunal qu’elle envisageait d’entendre le requérant après le retrait de la troisième décision de réaffectation. Toutefois, conformément à la jurisprudence rappelée au point 81 ci-dessus, le respect du droit d’être entendu n’exige pas que l’intéressé fasse connaître son point de vue au cours d’une réunion, ses observations pouvant être recueillies dans le cadre d’un échange écrit, comme cela a été le cas en l’espèce.

91      En quatrième lieu, il est vrai que, en sa qualité d’informateur, le requérant a été entendu au cours de la réunion du 15 octobre 2015 par une AIPN incompétente. Cependant, les éléments discutés pendant cette réunion ont été décrits de manière détaillée dans deux procès-verbaux, l’un d’entre eux ayant été établi par le requérant lui-même. Ainsi, ces procès-verbaux pouvaient valablement être pris en considération par la directrice générale de la DG RH aux fins de l’adoption de la décision attaquée, après avoir donné au requérant la possibilité d’apporter des éléments supplémentaires.

92      En cinquième lieu, comme le fait valoir la Commission, rien n’empêchait le requérant d’apporter, en réponse aux trois sollicitations de la directrice générale de la DG RH, des précisions sur les irrégularités qu’il avait dénoncées lorsqu’il travaillait au sein de la délégation. Ces dénonciations, sous la forme de courriels adressés à sa hiérarchie, avaient déjà été mentionnées au cours de la réunion du 15 octobre 2015 et devant le juge de l’Union dans le cadre des affaires F‑96/13 et T‑689/16. Par ailleurs, le respect des garanties alléguées par le requérant concernant sa qualité d’informateur sera examiné ci-après dans le cadre de l’analyse troisième moyen.

93      En dernier lieu, l’argument du requérant selon lequel il ne pouvait pas être utilement entendu presque neuf ans après les faits doit également être écarté. En effet, le requérant et la Commission ont longuement échangé par écrit depuis 2013 au sujet de la réaffectation litigieuse, y compris devant le juge de l’Union. Dès lors, en dépit du temps écoulé, le requérant était en mesure d’exposer utilement son point de vue à la directrice générale de la DG RH sur les circonstances dans lesquelles la première décision de réaffectation avait été adoptée.

94      Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de conclure que le grief tiré d’une violation du droit d’être entendu n’est pas fondé et doit être écarté.

2)      Sur la violation de l’article 41, paragraphe 1, de la Charte en l’absence d’enquête administrative et en raison d’un dépassement du délai raisonnable

95      En premier lieu, le requérant fait valoir que, dans la décision attaquée, la directrice générale de la DG RH s’est prononcée en 2021 sur sa situation entre le 1er janvier 2013 et le 16 janvier 2015, date de sa réaffectation à la représentation de la Commission à Londres, sans que le délai intervenu puisse être raisonnablement et légitimement justifié, en violation de l’article 41, paragraphe 1, de la Charte. Le requérant ajoute que les illégalités successives de la Commission ne sauraient légitimer ce délai. Selon lui, il n’était pas possible de régulariser sa situation a posteriori et il aurait dû être indemnisé.

96      En deuxième lieu, le requérant avance que le principe de bonne administration, garanti par l’article 41, paragraphe 1, de la Charte, exigeait une analyse minutieuse, effective et concrète de tous les éléments, de manière diligente, laquelle impliquait, pour la Commission, de réunir tous les éléments de fait et de droit nécessaires à l’exercice de son pouvoir d’appréciation. Selon lui, le respect de ces obligations imposait à la directrice générale de la DG RH de mener une enquête administrative sur les faits, vieux de neuf ans, au lieu de fonder sa conclusion sur les procès-verbaux de la réunion du 15 octobre 2015, tenue par une AIPN incompétente, au cours de laquelle certains échanges incomplets entre le requérant et sa hiérarchie, antérieurs au 13 novembre 2012  et opérés en violation des règles de protection attachée au statut d’informateur, auraient été évoqués.

97      En troisième lieu, le requérant fait valoir, dans la réplique, que la directrice générale de la DG RH aurait dû gérer son dossier seule, sans l’assistance de ses services et qu’il lui revenait de démontrer que la réaffectation litigieuse ne découlait en rien, de manière directe ou indirecte, des faits qui étaient à l’origine de la reconnaissance de sa qualité d’informateur. Son supérieur hiérarchique était une personne concernée par les faits ayant fait l’objet de l’enquête de l’OLAF liée aux informations qu’il avait transmises en sa qualité d’informateur.

98      La Commission conclut au rejet des arguments du requérant comme étant soit irrecevables car tardifs, soit non fondés.

99      Il convient d’examiner d’abord les deuxième et troisième griefs du requérant, qui concernent la manière dont la directrice générale de la DG RH a examiné sa situation, avant d’analyser le premier grief, qui porte sur le dépassement du délai raisonnable.

100    S’agissant du deuxième grief du requérant, tiré de l’obligation pour la directrice générale de la DG RH de mener une enquête, il y a lieu de rappeler que le droit de l’Union exige que les procédures administratives se déroulent dans le respect des garanties conférées par le principe de bonne administration, consacré par l’article 41 de la Charte. Parmi ces garanties figure l’obligation pour l’institution compétente d’examiner avec soin et impartialité tous les éléments pertinents d’une affaire et de réunir tous les éléments de fait et de droit nécessaires à l’exercice de son pouvoir d’appréciation ainsi que d’assurer le bon déroulement et l’efficacité des procédures qu’elle met en œuvre (voir arrêt du 11 juillet 2019, BP/FRA, T‑888/16, non publié, EU:T:2019:493, point 162 et jurisprudence citée).

101    En l’espèce, même si les faits litigieux datent de 2012, la directrice générale de la DG RH disposait des éléments nécessaires à l’exercice de son pouvoir d’appréciation. En particulier, elle a pris en compte les procès-verbaux détaillés de la réunion du 15 octobre 2015, au cours de laquelle la situation dans la délégation avait été discutée avec le requérant. Certes, comme il a été indiqué au point 91 ci-dessus, cette réunion s’est déroulée devant une AIPN incompétente. Toutefois, les procès-verbaux mentionnent des éléments précis et objectifs, repris dans la motivation de la deuxième décision de réaffectation, sur lesquels le requérant a été invité à se prononcer de nouveau par la directrice générale de la DG RH le 9 octobre 2020. Par ailleurs, les constats faits par le juge de l’Union dans l’arrêt F‑96/13 contribuaient également à établir les faits litigieux.

102    Dès lors, il ne saurait être reproché à la directrice générale de la DG RH de ne pas avoir mené d’enquête après le retrait de la troisième décision de réaffectation.

103    S’agissant du troisième grief du requérant, avancé dans la réplique, selon lequel la directrice générale de la DG RH aurait dû adopter la décision attaquée sans l’assistance de ses services, il y a lieu de constater, sans qu’il soit besoin d’examiner son caractère tardif, qu’il n’est pas tiré de la violation du droit à une bonne administration, mais de celle des garanties dont il bénéficierait en sa qualité d’informateur. Ce grief est également formulé, en substance, par le requérant dans le cadre du troisième moyen, tiré d’une violation des articles 22 bis et 22 quater du statut de sorte qu’il sera examiné dans le cadre de ce moyen.

104    S’agissant du premier grief du requérant, tiré du dépassement du délai raisonnable dans le cadre de l’adoption de la décision attaquée en violation de l’article 41, paragraphe 1, de la Charte, il convient de rappeler que l’obligation d’observer un délai raisonnable dans la conduite des procédures administratives constitue un principe général du droit de l’Union dont le juge de l’Union assure le respect et qui est repris comme une composante du droit à une bonne administration par l’article 41, paragraphe 1, de la Charte (voir arrêt du 11 novembre 2020, AV et AW/Parlement, T‑173/19, non publié, EU:T:2020:535, point 131 et jurisprudence citée).

105    Le caractère raisonnable de la durée d’une procédure administrative s’apprécie en fonction des circonstances propres à chaque affaire et, notamment, du contexte de celle-ci, des différentes étapes procédurales que l’institution a suivies, du comportement des parties au cours de la procédure, de la complexité ainsi que de l’enjeu du litige pour les différentes parties intéressées (voir arrêt du 14 septembre 2010, AE/Commission, F‑79/09, EU:F:2010:99, point 105 et jurisprudence citée).

106    En l’espèce, l’adoption de la décision attaquée, portant sur la réaffectation litigieuse plus de huit ans après les faits reprochés, s’explique principalement par l’annulation des première et deuxième décisions de réaffectation et par le retrait par la Commission de la troisième décision de réaffectation.

107    Comme l’indique la Commission, seulement quatre mois se sont écoulés entre ce retrait et la décision attaquée.

108    Toutefois, il ne s’agit que de la dernière étape d’une procédure administrative qui a dû être reprise, en raison de l’erreur commise par la Commission dans la troisième décision de réaffectation, en exécution de l’arrêt T‑689/16, rendu le 13 décembre 2018.

109    Or, l’écoulement d’un délai de plus de deux ans entre l’arrêt T‑689/16, dont l’exécution ne revêtait pas de complexité, et la décision attaquée n’est pas raisonnable.

110    Il en va de même du délai de plus de huit ans qui s’est écoulé entre les faits reprochés et la décision attaquée, adoptée le 16 février 2021 avec effet rétroactif au 1er janvier 2013.

111    Certes, ce délai est en partie imputable aux interruptions dues au contrôle juridictionnel et aux nombreux échanges entre le requérant et la Commission dans le cadre de l’exécution des arrêts F‑96/13 et T‑689/16.

112    Toutefois, la Commission a reconnu lors de l’audience que le retrait de la troisième décision de réaffectation prise en exécution de l’arrêt T‑689/16 avait contribué à retarder l’issue de la procédure administrative. Or, en raison des erreurs successives commises par la Commission et constatées dans les arrêts F‑96/13 et T‑689/16, cette procédure était déjà longue.

113    Dès lors, la décision attaquée n’a pas été adoptée dans un délai raisonnable.

114    Cela étant, il convient de rappeler que la violation du principe du respect du délai raisonnable ne justifie pas, en règle générale, l’annulation de la décision prise à l’issue d’une procédure administrative. En effet, ce n’est que lorsque l’écoulement excessif du temps est susceptible d’avoir une incidence sur le contenu même de la décision adoptée à l’issue de la procédure administrative que le non-respect du principe du délai raisonnable affecte la validité de la procédure administrative (voir arrêt du 17 mai 2018, Commission/AV, T‑701/16 P, EU:T:2018:276, point 46 et jurisprudence citée). Dans le cas contraire, l’annulation de cette décision aurait pour principale conséquence pratique l’effet pervers de prolonger encore la procédure au motif que celle-ci a été trop longue (voir, en ce sens, arrêt du 2 octobre 2013, Nardone/Commission, F‑111/12, EU:F:2013:140, point 62 et jurisprudence citée).

115    En l’espèce, contrairement à ce que le requérant indique, l’écoulement excessif du temps n’a pas eu d’incidence sur le contenu même de la décision attaquée.

116    En effet, ainsi qu’il a été jugé au point 93 ci-dessus, le délai entre les faits reprochés et la date d’adoption de la décision attaquée n’a pas empêché le requérant d’exposer à la directrice générale de la DG RH son point de vue sur la réaffectation litigieuse. De même, comme cela est indiqué au point 101 ci-dessus, malgré l’écoulement du temps, la directrice générale de la DG RH disposait de tous les éléments nécessaires pour prendre sa décision.

117    Dès lors, la violation du délai raisonnable garanti par l’article 41, paragraphe 1, de la Charte ne justifie pas l’annulation de la décision attaquée.

118    Partant, la première branche avancée au soutien du deuxième moyen doit être rejetée.

b)      Sur les deuxième et troisième branches du deuxième moyen, relatives à l’exécution des arrêts F96/13 et T689/16

119    La deuxième branche avancée au soutien du deuxième moyen est intitulée « Factuels jurisprudentiels non contestés, aveu de l’absence du respect du but procédural et du détournement de procédure, non-respect du devoir de sollicitude et de la protection attachée à l’informateur ».

120    La troisième branche est tirée d’une « violation des principes et règles relatifs à la rétroactivité et à la sécurité juridique[, d’une] violation des principes d’impartialité (objective et subjective)[, de la] volonté d’adopter une même décision ayant la même portée et fondée sur les mêmes motifs en lieu et place de compenser la perte d’une chance de voir respecter ses droits procéduraux en temps utile et de manière effective ».

121    Dans le cadre de ces deux branches, que le Tribunal examinera ensemble, le requérant fait une série de constats et dénonce plusieurs violations concernant la manière dont les arrêts F‑96/13 et T‑689/16 ont été exécutés par la Commission.

122    Les arguments avancés au soutien des deux branches sont répétitifs et, sauf exception, ne sont pas spécifiquement rattachés aux violations invoquées dans les intitulés des branches. Il est toutefois possible d’identifier deux séries d’arguments.

123    La première série d’arguments avancés par le requérant peut être rattachée au détournement de procédure, au non-respect du devoir de sollicitude et à la violation du principe d’impartialité.

124    La seconde série d’arguments vient au soutien de la violation du principe de non-rétroactivité, de l’article 266 TFUE et de la protection attachée à l’informateur.

125    Il y a lieu d’examiner d’abord cette seconde série d’arguments.

1)      Sur la violation des principes de non-rétroactivité et de sécurité juridique, de l’article 266 TFUE et de la protection attachée à l’informateur dans le cadre de l’exécution des arrêts F96/13 et T689/16

126    Le requérant fait valoir en substance que la Commission n’a pas expliqué les raisons pour lesquelles, en adoptant la décision attaquée, elle a dérogé au principe de non-rétroactivité, alors qu’il n’était plus possible, pour elle, de se pencher sur une situation si ancienne et définitivement close, d’autant plus dans le respect de la protection des garanties procédurales attachées à sa qualité d’informateur. L’exécution des arrêts F‑96/13 et T‑689/16 impliquait donc de renoncer à la réaffectation litigieuse et d’indemniser le requérant.

127    La Commission conteste les arguments du requérant comme étant soit irrecevables, soit non fondés.

128    À cet égard, il convient de rappeler la jurisprudence constante selon laquelle, pour se conformer à un arrêt d’annulation et lui donner pleine exécution, l’institution est tenue de respecter non seulement le dispositif de l’arrêt, mais également les motifs qui ont amené à celui-ci et en constituent le soutien nécessaire, en ce sens qu’ils sont indispensables pour déterminer le sens exact de ce qui a été jugé dans le dispositif. Ce sont, en effet, ces motifs qui, d’une part, identifient la disposition exacte considérée comme illégale et, d’autre part, font apparaître les raisons exactes de l’illégalité constatée dans le dispositif et que l’institution concernée doit prendre en considération en remplaçant l’acte annulé. Par ailleurs, l’article 266 TFUE impose à l’institution concernée d’éviter que tout acte destiné à remplacer l’acte annulé soit entaché des mêmes irrégularités que celles identifiées dans l’arrêt d’annulation. Ces principes s’appliquent à plus forte raison lorsque l’arrêt d’annulation en cause a acquis l’autorité de la chose jugée (voir arrêt du 10 novembre 2010, OHMI/Simões Dos Santos, T‑260/09 P, EU:T:2010:461, point 70 et jurisprudence citée).

129    Pour se conformer à l’obligation que fait peser sur elle l’article 266 TFUE, l’institution doit adopter des mesures concrètes susceptibles d’éliminer l’illégalité commise à l’égard de la personne concernée. Ainsi, selon la jurisprudence, elle ne saurait exciper des difficultés pratiques que pourrait impliquer la remise de la partie requérante dans la situation juridique dans laquelle elle se trouvait antérieurement à l’adoption de l’acte ayant été annulé pour se soustraire à cette obligation (voir arrêt du 8 décembre 2014, Cwik/Commission, F‑4/13, EU:F:2014:263, point 79 et jurisprudence citée).

130    Ce n’est qu’à titre subsidiaire, lorsque l’exécution d’un arrêt d’annulation se heurte à des obstacles majeurs, que l’institution concernée peut satisfaire à ses obligations en prenant une décision de nature à compenser équitablement le désavantage résultant pour l’intéressé de la décision annulée. Dans ce contexte, l’administration peut établir un dialogue avec lui en vue de parvenir à un accord lui offrant une compensation équitable de l’illégalité dont il a été victime (voir arrêt du 8 décembre 2014, Cwik/Commission, F‑4/13, EU:F:2014:263, point 80 et jurisprudence citée).

131    Enfin, il ressort de la jurisprudence rappelée au point 80 ci-dessus que l’annulation d’une décision comporte un effet rétroactif qui impose à l’autorité de prendre une décision en se replaçant à la date à laquelle la décision annulée a été adoptée. Il convient cependant de distinguer cette question de celle du caractère rétroactif de la nouvelle décision prise par l’administration afin de remplacer l’acte annulé. En effet, selon la jurisprudence, le principe de la sécurité des situations juridiques, qui constitue un principe général du droit de l’Union, s’oppose en règle générale à ce que la portée dans le temps d’un acte voie son point de départ fixé à une date antérieure à sa publication. Selon une jurisprudence constante, il peut cependant en être autrement à titre exceptionnel, lorsque le but à atteindre l’exige et lorsque la confiance légitime des intéressés est dûment respectée (voir arrêt du 5 septembre 2014, Éditions Odile Jacob/Commission, T‑471/11, EU:T:2014:739, point 102 et jurisprudence citée). Cette confiance naît lorsque l’administration fournit à l’intéressé des assurances précises, inconditionnelles et concordantes, émanant de sources autorisées et fiables, qui font naître à son égard des espérances fondées. En outre, ces assurances doivent être conformes aux dispositions du statut et aux normes applicables en général (voir arrêt du 7 novembre 2013, Cortivo/Parlement, F‑52/12, EU:F:2013:173, point 85 et jurisprudence citée).

132    En l’espèce, contrairement à ce que la Commission soutient, le moyen tiré de la violation de l’article 266 TFUE est suffisamment expliqué dans la requête dans le respect des obligations imposées par l’article 76, sous d), du règlement de procédure. Ce grief est donc recevable.

133    Conformément aux principes rappelés aux points 128 et 129 ci-dessus, la Commission devait exécuter les arrêts F‑96/13 et T‑689/16 en respectant non seulement leurs dispositifs, mais également les motifs qui avaient amené à ceux-ci et qui en constituaient le soutien nécessaire, en éliminant l’illégalité commise à l’égard du requérant et en évitant que la nouvelle décision soit entachée des mêmes irrégularités que celles identifiées dans ces arrêts.

134    Or, dans l’arrêt F‑96/13, le juge de l’Union a uniquement constaté la violation des droits de la défense du requérant dans les circonstances rappelées au point 82 ci-dessus, ce qui a conduit à l’annulation de la première décision de réaffectation. S’agissant de l’arrêt T‑689/16, le juge de l’Union a seulement relevé l’incompétence de la cheffe de l’unité DG RH.B4 pour adopter la deuxième décision de réaffectation.

135    L’exécution des arrêts F‑96/13 et T‑689/16 imposait donc à la directrice générale de la DG RH, en sa qualité d’AIPN compétente, d’examiner la situation du requérant à la date d’adoption de la première décision de réaffectation en lui donnant la possibilité de s’exprimer sur les tensions alléguées et les conséquences qu’elle envisageait d’en tirer en sa qualité d’AIPN compétente, à savoir la réaffectation litigieuse avec effet rétroactif au 1er janvier 2013.

136    Après avoir entendu le requérant, la directrice générale de la DG RH a confirmé que les tensions vécues au sein de la délégation avaient engendré une situation relationnelle de plus en plus intenable et que la réaffectation litigieuse était justifiée. Dès lors, selon elle, la confirmation de la première décision de réaffectation et la régularisation de la situation administrative du requérant s’imposaient. Ce but exigeait que la décision attaquée ait un effet rétroactif, conformément à la jurisprudence rappelée au point 131 ci-dessus.

137    Contrairement à ce que le requérant suggère, sans invoquer d’arguments précis à cette fin, le principe de sécurité juridique n’a pas été enfreint par cet effet rétroactif, dès lors que ni le juge de l’Union ni l’administration n’ont jamais remis en cause le bien-fondé de la réaffectation litigieuse depuis 2012, ni a fortiori donné au requérant des assurances précises, inconditionnelles et concordantes de nature à faire naître une confiance légitime, conformément à la jurisprudence mentionnée au point 131 ci-dessus.

138    Partant, la décision attaquée pouvait avoir un effet rétroactif dans le respect des critères rappelés au point 131 ci-dessus.

139    Par ailleurs, il convient de relever que l’exécution des arrêts F‑96/13 et T‑689/16 ne se heurtait pas à des obstacles majeurs au sens de la jurisprudence mentionnée au point 130 ci-dessus. En effet, comme cela est indiqué aux points 93 et 101 ci-dessus, l’écoulement du temps n’a pas empêché le requérant d’exercer pleinement son droit d’être entendu par la directrice générale de la DG RH, ni à cette dernière d’avoir tous les éléments de contexte pour se prononcer sur les faits litigieux, de sorte que la Commission pouvait remédier aux illégalités identifiées dans ces arrêts en adoptant une nouvelle décision et n’était pas tenue de compenser équitablement le requérant. Ainsi la décision attaquée a été prise dans le respect de l’article 266 TFUE.

140    Enfin, le requérant n’explique pas les raisons pour lesquelles le fait de devoir examiner une situation si ancienne en exécution des arrêts F‑96/13 et T‑689/16 ne garantirait pas le respect de la protection des garanties procédurales attachées à sa qualité d’informateur.

141    Sur cette base, il y a lieu de rejeter la seconde série d’arguments avancés par le requérant au soutien des deuxième et troisième branches du deuxième moyen.

2)      Sur le détournement de procédure, le non-respect du devoir de sollicitude et la violation du principe d’impartialité

142    Au soutien de la première série d’arguments identifiée au point 123 ci-dessus rattachés au détournement de procédure, au non-respect du devoir de sollicitude et à la violation du principe d’impartialité, le requérant fait valoir que, en exécution des arrêts F‑96/13 et T‑689/16, la Commission n’a jamais eu la moindre intention de revoir sa position concernant la réaffectation litigieuse.

143    Selon le requérant, le sens de la décision attaquée était annoncé dès le départ dans les échanges qui l’ont précédée. Face à un fait accompli, la directrice générale de la DG RH se serait limitée à adopter la même décision avec effet rétroactif, en officialisant une réaffectation qui serait illégale depuis le 1er janvier 2013. En témoignerait la nécessité de « régulariser » la situation administrative du requérant mentionnée dans la décision attaquée le fait que la première décision de réaffectation avait dû être formalisée après son adoption le 20 novembre 2012 ainsi que l’affirmation de la Commission devant le juge de l’Union dans l’affaire T‑689/16 selon laquelle il était « peu probable » que la directrice générale de la DG RH ait adopté une décision différente en 2015 par rapport à la décision prise par la cheffe de l’unité DG RH.B4. Le requérant estime que la rétroactivité recherchée a influencé la portée de l’acte et non l’inverse. La Commission ne se serait pas souciée concrètement du but poursuivi par les « étapes procédurales imposées » dans les arrêts F‑96/13 et T‑689/16, notamment de permettre au requérant d’avoir réellement une chance d’influencer l’AIPN dans le cadre d’une analyse objective et impartiale. En l’espèce, le requérant aurait été entendu par simple formalité.

144    À cet égard, il y a lieu de relever d’emblée que le requérant avance en substance les mêmes arguments au soutien de toutes les violations alléguées, alors que les notions d’« impartialité », de « détournement de procédure » et de « devoir de sollicitude » ont une portée bien précise.

145    L’exigence d’impartialité recouvre, d’une part, l’impartialité subjective, en ce sens qu’aucun membre de l’institution concernée chargé de l’affaire ne doit manifester de parti pris ou de préjugé personnel, l’impartialité personnelle se présumant jusqu’à preuve du contraire, et, d’autre part, l’impartialité objective, en ce sens que l’institution doit offrir des garanties suffisantes pour exclure à cet égard tout doute légitime (voir, en ce sens, arrêt du 16 juin 2021, PL/Commission, T‑586/19, non publié, EU:T:2021:370, points 107 et 110 et jurisprudence citée).

146    La notion de « détournement de pouvoir » se réfère à l’usage de ses pouvoirs par une autorité administrative dans un but autre que celui en vue duquel ils ont été conférés. Une décision n’est entachée de détournement de pouvoir que si elle apparaît, sur la base d’indices objectifs, pertinents et concordants, avoir été prise pour atteindre des fins autres que celles excipées (voir arrêt du 19 juin 2013, BY/AESA, F‑81/11, EU:F:2013:82, point 69 et jurisprudence citée).

147    Enfin, le devoir de sollicitude de l’administration à l’égard de ses agents reflète l’équilibre des droits et des obligations réciproques que le statut a créés dans les relations entre l’autorité publique et les agents du service public. Ce devoir ainsi que le principe de bonne administration impliquent notamment que, lorsqu’elle se prononce sur la situation d’un fonctionnaire, l’autorité compétente prenne en considération l’ensemble des éléments susceptibles de déterminer sa décision et que, ce faisant, elle tienne compte non seulement de l’intérêt du service, mais aussi de celui du fonctionnaire concerné (voir arrêt du 25 juin 2003, Pyres/Commission, T‑72/01, EU:T:2003:176, point 77 et jurisprudence citée).

148    Les arguments du requérant doivent être examinés à la lumière de ces principes.

149    En premier lieu, il ne saurait être reproché à la directrice générale de la DG RH d’avoir exposé au requérant, dans le cadre des échanges rappelés aux points 19 à 24 ci-dessus, le sens de la décision qu’elle envisageait de prendre. En effet, l’absence de communication de cette information par l’administration avant l’adoption de la première décision de réaffectation a justifié son annulation par le juge de l’Union dans l’arrêt F‑96/13, en raison de la violation des droits de la défense du requérant.

150    En deuxième lieu, l’emploi du terme « régularisation » dans la décision attaquée ne dénote pas non plus de parti pris ou de préjugé personnel de la part de la directrice générale de la DG RH, ni l’existence d’un détournement de procédure. En effet, les illégalités affectant les première et deuxième décisions de réaffectation constatées par le juge de l’Union dans les arrêts F‑96/13 et T‑689/16 ne concernaient pas le bien-fondé de la réaffectation litigieuse, mais les conditions d’adoption de ces décisions. Si le juge de l’Union n’a pas exclu dans ces affaires l’adoption d’une décision différente en exécution de ses arrêts, cette dernière impliquait de remédier aux illégalités constatées, conformément à la jurisprudence rappelée aux points 128 et 129 ci-dessus.

151    En troisième lieu, les conditions d’adoption de la première décision de réaffectation, qui ont été jugées irrégulières dans l’arrêt F‑96/13, n’affectent pas celles de la décision attaquée. Cette dernière a d’ailleurs été adoptée dans le but de remédier aux irrégularités constatées.

152    En quatrième lieu, l’affirmation de la Commission dans le cadre de l’affaire T‑689/16 selon laquelle il était peu probable que la directrice générale de la DG RH ait pris en 2015 une décision différente de celle adoptée par la cheffe de l’unité DG RH.B4 ne constitue qu’une prise de position de son service juridique dans le cadre du contentieux devant le Tribunal, qui n’exclut pas, par ailleurs, un résultat différent.

153    Enfin, s’agissant de l’argument du requérant selon lequel il n’aurait été entendu par la directrice générale de la DG RH que par simple formalité, il ne repose sur aucun indice objectif.

154    Au contraire, il convient de constater que, ainsi qu’il a été relevé au point 85 ci-dessus, le requérant a été invité à trois reprises à présenter ses observations sur l’intention de la directrice générale de la DG RH de régulariser sa situation administrative en confirmant la réaffectation litigieuse.

155    La première série d’arguments avancés par le requérant au soutien des deuxième et troisième branches n’est donc pas fondée.

156    À la lumière de l’ensemble de considérations qui précèdent, le deuxième moyen doit être rejeté.

4.      Sur le troisième moyen, tiré d’une violation de l’article 22 bis du statut, du devoir d’assistance et de sollicitude, de l’article 22 quater du statut, des devoirs de diligence, de neutralité, d’impartialité et d’objectivité, du droit au traitement équitable du dossier du requérant et de ses attentes légitimes ainsi que d’un détournement de procédure

157    Ce moyen est divisé en quatre branches, la première, tirée d’une violation de l’article 22 quater du statut, la deuxième, tirée d’une violation du devoir de sollicitude, la troisième, tirée d’une violation des principes d’objectivité, d’impartialité et de neutralité de l’AIPN compétente ainsi que d’une violation des principes d’égalité de traitement et de non-discrimination et, la quatrième, tirée d’une violation des règles en matière de charge de la preuve établies dans les lignes directrices relatives à l’alerte professionnelle.

158    À titre liminaire, il convient de relever, à l’instar de la Commission, que, bien que la violation du devoir d’assistance soit invoquée dans l’intitulé du présent moyen, aucune argumentation n’est présentée à son soutien dans la requête. Ce grief ne répond donc pas aux exigences imposées par l’article 76, sous d), du règlement de procédure et doit donc être déclaré irrecevable. Il en va de même du grief tiré d’une violation des attentes légitimes du requérant. Cette dernière est mentionnée dans l’intitulé du moyen, mais elle n’est pas développée de manière suffisamment claire dans la requête.

159    Ces précisions ayant été apportées, il convient d’analyser d’abord les première et quatrième branches avancées par le requérant au soutien du troisième moyen, avant d’examiner les deux autres branches.

a)      Sur la première branche du troisième moyen, tirée d’une violation de l’article 22 quater du statut

160    Le requérant fait valoir que l’article 22 quater du statut impose à la Commission d’adopter des règles de traitement confidentiel des réclamations introduites par une personne ayant la qualité d’informateur lorsqu’elle s’estime victime d’acte de représailles. Selon le requérant, ces règles sont supposées viser les trois aspects mentionnés par l’article 22 quater, second alinéa, dudit statut. Or, aucune règle incluant ces trois aspects n’existerait. Les seules règles qui auraient été adoptées par la Commission sur le fondement de l’article 22 quater du statut concerneraient les délais de traitement, la charge de la preuve et la compétence de la directrice générale, et non les services, pour statuer en tant qu’AIPN.

161    Le requérant ajoute que le traitement singulier des demandes des informateurs, garanti par l’article 22 quater du statut, impose que l’AIPN compétente agisse seule, sans l’aide des services, et que l’informateur soit protégé, en évitant qu’il soit soumis aux mêmes règles que les autres fonctionnaires ou agents, en devant systématiquement divulguer sa condition d’informateur et la justification de cette dernière.

162    La Commission conteste les arguments du requérant.

163    À titre liminaire, il y a lieu de noter qu’il n’est pas contesté que l’article 22 quater du statut devait être respecté dans le cadre de l’adoption de la décision attaquée.

164    L’article 22 quater du statut dispose ce qui suit :

« Conformément aux articles 24 et 90, chaque institution met en place une procédure pour le traitement des réclamations émanant de fonctionnaires concernant la manière dont ils ont été traités après ou du fait de s’être acquittés de leurs obligations au titre de l’article 22 bis ou 22 ter. L’institution concernée veille à ce que de telles réclamations soient traitées de manière confidentielle et, lorsque les circonstances le justifient, avant l’expiration des délais fixés à l’article 90.

L’autorité investie du pouvoir de nomination de chaque institution établit des règles internes concernant, entre autres :

–        les informations fournies aux fonctionnaires visés à l’article 22 bis, paragraphe 1, ou à l’article 22 ter, sur le traitement des faits rapportés par eux ;

–        la protection des intérêts légitimes de ces fonctionnaires et de leur vie privée ; et

–        la procédure de traitement des réclamations visées au premier alinéa du présent article. »

165    L’article 22 quater du statut a été introduit par le règlement (UE, Euratom) no 1023/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 22 octobre 2013, modifiant le statut des fonctionnaires de l’Union européenne et le régime applicable aux autres agents de l’Union européenne (JO 2013, L 287, p. 15), dans le but d’imposer aux AIPN de chaque institution l’obligation d’établir des règles internes visant à accorder des garanties à des informateurs, y compris une procédure pour le traitement des réclamations concernant la manière dont ils ont été traités après ou du fait de s’être acquittés de leurs obligations au titre des articles 22 bis et 22 ter du statut.

166    Contrairement à ce que fait valoir le requérant, l’article 22 quater, second alinéa, du statut n’exige pas que toutes les règles applicables aux informateurs, y compris lorsqu’ils introduisent des réclamations, soient prévues dans un seul acte.

167    En ce qui concerne la Commission, certaines garanties visées par l’article 22 quater du statut étaient déjà prévues avant l’entrée en vigueur de cette disposition dans le cadre des lignes directrices relatives à l’alerte professionnelle.

168    Plusieurs mesures de protection des informateurs sont mentionnées dans ces lignes directrices, parmi lesquelles figure la confidentialité de l’identité de l’informateur, que la Commission s’engage à respecter. En vertu de cette règle, son nom n’est pas dévoilé aux personnes potentiellement impliquées dans les actes répréhensibles ni à quiconque n’ayant pas strictement besoin de le connaître, sauf si l’informateur autorise personnellement la divulgation de son identité ou s’il s’agit d’une exigence dans le cadre des poursuites pénales qui pourraient résulter de ces actes. Les règles régissant la charge de la preuve, mentionnées au point 57 ci-dessus et dont se prévaut le requérant, sont également prévues en tant que mesure de protection des informateurs. Par ailleurs, il est précisé que, pour que la Commission soit à même de prendre des mesures de protection, le membre du personnel concerné doit se faire connaître auprès de l’institution en tant qu’informateur.

169    La décision AIPN/AHCC de la Commission, mentionnée au point 63 ci-dessus, prévoit également des règles spécifiques concernant les décisions de réaffectation d’un fonctionnaire ayant dénoncé des dysfonctionnements conformément aux procédures prévues à cet égard. Ainsi qu’il ressort des points 47 et 48 de l’arrêt T‑689/16, de telles décisions ne peuvent être prises que par la directrice générale de la DG RH, sans délégation. Ainsi qu’il a été indiqué au point 63 ci-dessus, la décision AIPN/AHCC de la Commission fixe également la compétence du membre de la Commission chargé de la DG RH pour statuer sur les réclamations introduites par ce fonctionnaire contre la décision de réaffectation.

170    Ces règles sont complétées par l’Information administrative no 79-2013 mentionnée au point 37 ci-dessus. Cette dernière confère à l’unité DG RH.D 2 (désormais nommée DG RH.E2) la compétence pour traiter toutes les demandes et réclamations, y compris celles présentées par des informateurs, dans le but que l’AIPN compétente prenne une décision. Cette communication prévoit que les réclamations introduites sur le fondement de l’article 22 quater du statut doivent recevoir, si les circonstances le justifient, une réponse motivée dans des délais inférieurs à ceux prévus par l’article 90 du statut. Il est également prévu que des réclamations portant sur des sujets sensibles ne soient pas discutées lors des consultations interservices.

171    Ces règles sont encore complétées par celles qui figurent dans la déclaration de confidentialité concernant la protection des données à caractère personnel mentionnée au point 35 ci-dessus. Conformément à cette déclaration, qui fait également référence à l’article 22 quater du statut, l’accès aux données personnelles contenues dans la réclamation est accordé uniquement au personnel autorisé qui en a strictement besoin. Des mécanismes de protection des données personnelles, tels que l’accès restreint au sein de la DG « Ressources humaines et sécurité » au disque dur de l’unité DG RH.E2, sont mis en place. Par ailleurs, il est rappelé que les membres de cette unité sont tenus par le devoir de confidentialité et de discrétion.

172    Enfin, il y a lieu de relever que la réclamation émanant d’un informateur peut être présentée, comme cela a été le cas en l’espèce, à l’aide d’un formulaire de couverture qui se réfère à l’article 22 quater du statut. La référence à cette disposition dans le formulaire de réclamation permet à l’unité DG RH.E2 d’identifier dès son dépôt son caractère sensible et de garantir le respect des mesures de protection aux informateurs, rappelées aux points 165 à 171 ci-dessus.

173    Il en résulte que, contrairement à ce que le requérant fait valoir, la Commission a adopté des règles spécifiques concernant le traitement des réclamations émanant d’informateurs, conformément à l’article 22 quater du statut.

174    S’agissant de l’argument du requérant selon lequel il aurait fallu que l’AIPN compétente agisse sans l’aide des services, une telle exigence n’est imposée ni par l’article 22 quater du statut ni par aucune des règles internes mentionnées aux points 167 à 172 ci-dessus. Par ailleurs, la confidentialité de l’identité de l’informateur est suffisamment protégée par ces règles.

175    Enfin, s’agissant de l’argument du requérant selon lequel la protection conférée aux personnes ayant dénoncé des dysfonctionnements viserait à éviter qu’ils se voient obligés de divulguer systématiquement leur statut d’informateurs et la justification de ce dernier à toute personne chargée des réclamations, les règles rappelées aux points 168 à 172 ci-dessus n’exigent pas que ces personnes décrivent le détail des dysfonctionnements dénoncés dans leurs réclamations. En revanche, comme cela est indiqué dans les lignes directrices relatives à l’alerte professionnelle, ces personnes doivent se faire connaître auprès de l’institution en tant qu’informateurs afin que les services puissent assurer les mesures de protection prévues par les règles adoptées conformément à l’article 22 quater du statut.

176    À la lumière de ces considérations, la première branche du troisième moyen doit être rejetée.

b)      Sur la quatrième branche du troisième moyen, tirée de la violation des règles en matière de charge de la preuve établies dans les lignes directrices relatives à l’alerte professionnelle

177    Le requérant fait valoir que, conformément au point 3 des lignes directrices relatives à l’alerte professionnelle, c’est à la personne prenant une mesure défavorable à l’encontre de l’informateur qu’incombe la charge de prouver qu’aucun lien n’existe entre les informations transmises au titre des obligations figurant à l’article 22 bis du statut et cette mesure. Or, en voulant régulariser une période révolue, la Commission n’aurait jamais cherché à protéger le requérant contre la réaffectation litigieuse alors qu’elle était hautement préjudiciable.

178    La Commission conclut au rejet des arguments du requérant comme étant soit irrecevables, soit non fondés.

179    À titre liminaire, il convient d’observer que le requérant n’a pas invoqué l’existence d’une erreur manifeste d’appréciation tendant à contester le constat, dans la décision attaquée, de l’existence de difficultés relationnelles internes au sein de la délégation.

180    Le requérant fait valoir, en revanche, que les règles relatives à la charge de la preuve établies dans les lignes directrices relatives à l’alerte professionnelle ont été enfreintes en raison du fait que la directrice générale de la DG RH n’a pas démontré l’absence de lien entre la réaffectation litigieuse et ses dénonciations.

181    Il y a lieu de relever que la Commission ne conteste pas que les règles régissant la charge de la preuve prévues au point 3 des lignes directrices relatives à l’alerte professionnelle, mentionnées au point 57 ci-dessus, s’appliquaient en l’espèce.

182    Le point 3 des lignes directrices relatives à l’alerte professionnelle dispose ce qui suit :

« Tout membre du personnel qui rapporte une irrégularité grave sera protégé contre les actes de représailles, pour autant qu’il agisse de bonne foi et dans le respect des dispositions des présentes lignes directrices. En ce qui concerne la charge de la preuve, il appartiendra à la personne prenant une mesure défavorable à l’encontre de l’informateur d’établir que cette mesure a été motivée par des raisons autres que la notification de dysfonctionnements. »

183    Il convient donc d’examiner si la directrice générale de la DG RH a établi à suffisance de droit que la réaffectation litigieuse avait été motivée par des raisons autres que la dénonciation de dysfonctionnements par le requérant.

184    Dans la décision attaquée, telle que complétée par la décision rejetant partiellement la réclamation, la réaffectation litigieuse est motivée par les difficultés relationnelles internes, qui ressortaient de plusieurs courriels datant de la période allant du 18 septembre au 13 novembre 2012. En réponse à la réclamation, il est indiqué que la réaffectation litigieuse n’était pas motivée par les dénonciations formulées par le requérant en 2012. En outre, les problèmes interpersonnels entre le requérant et ses collègues sont mentionnés.

185    À cet égard, il y a lieu de constater que, si la dénonciation du requérant du 3 octobre 2012 a pu rendre plus difficiles les relations entre ce dernier, sa hiérarchie et ses collègues, il était question en l’espèce de problèmes interpersonnels et d’attitude au sein de la délégation qui précédaient cette dénonciation et qui pouvaient justifier la réaffectation litigieuse, conformément à la jurisprudence rappelée aux points 52 et 53 ci-dessus.

186    Comme cela est indiqué par la Commission, ces problèmes sont mis en évidence, notamment, dans le courriel adressé par le chef de la délégation au requérant le 18 septembre 2012 et mentionné au cours de la réunion du 15 octobre 2015 (voir point 12 ci-dessus).

187    Dans ce courriel, le chef de la délégation a indiqué au requérant qu’il s’agissait de la deuxième fois dans un court laps de temps qu’il demandait à ses collègues des excuses. Le chef de la délégation s’est demandé pourquoi ces collègues faisaient certains commentaires et a rappelé au requérant que le respect était une voie à double sens, sous-entendant qu’il n’était pas exempt de reproches à ce titre. Par ailleurs, il a pris la défense de la personne à laquelle le requérant demandait des excuses. Ainsi, bien que le contexte auquel fait référence le courriel ne soit pas identifiable à sa seule lecture, celui-ci permet d’identifier l’existence de problèmes interpersonnels affectant la délégation et qui précédaient la dénonciation.

188    De même, dans le courriel du 12 novembre 2012 adressé au requérant, mentionné également au cours de la réunion du 15 octobre 2015 (voir point 12 ci-dessus), le chef de la délégation a évoqué des problèmes de communication ainsi que les plaintes de plusieurs collègues selon lesquelles le requérant avait adopté une attitude verbale et non verbale inappropriée. Dans ce courriel, le chef de la délégation a également demandé au requérant de changer immédiatement son attitude, son comportement ainsi que sa communication.

189    Il ressort de ces courriels que les incidents étaient liés à l’attitude du requérant et n’étaient pas isolés et qu’il avait été alerté à plusieurs reprises de ces difficultés relationnelles.

190    En s’appuyant sur ces éléments, la Commission s’est acquittée de la charge de la preuve qui lui incombait en vertu des règles rappelées aux points 181 et 182 ci-dessus, en établissant que la réaffectation litigieuse avait été motivée par des raisons autres que la notification de dysfonctionnements opérée par le requérant au titre de l’article 22 bis du statut.

191    La quatrième branche du troisième moyen n’est donc pas fondée et doit être écartée.

c)      Sur la deuxième branche du troisième moyen, tirée d’une violation du devoir de sollicitude

192    Le requérant allègue que seul l’intérêt du service a été pris en considération dans le cadre de sa réaffectation à des postes successifs en surnombre, créés pour lui depuis 2013, alors que son intérêt personnel et son statut d’informateur auraient dû être également pris en compte, après l’avoir entendu sur le sujet dans le but de lui garantir la meilleure protection.

193    La Commission conteste les arguments du requérant.

194    Il convient de rappeler que la violation du devoir de sollicitude a également été invoquée par le requérant dans la deuxième branche du deuxième moyen, liée à un prétendu détournement de pouvoir et à la violation du principe d’impartialité. Au soutien de ces griefs, qui ont été rejetés (voir points 142 à 155 ci-dessus), le requérant a fait valoir que, en exécution des arrêts F‑96/13 et T‑689/16, la Commission n’avait jamais eu la moindre intention de revoir sa position concernant la réaffectation litigieuse.

195    Dans le cadre de la présente branche, le requérant dénonce une violation du devoir de sollicitude à un autre titre, lié à l’absence de prise en compte de son intérêt personnel.

196    À cet égard, il convient de rappeler que, si, en vertu du devoir de sollicitude, l’autorité compétente est tenue, lorsqu’elle apprécie l’intérêt du service, de prendre en considération l’ensemble des éléments qui sont susceptibles de déterminer sa décision, notamment l’intérêt de l’agent concerné, la prise en compte de l’intérêt personnel du fonctionnaire ne saurait aller jusqu’à interdire à l’AIPN de réaffecter un fonctionnaire contre son gré si c’est dans l’intérêt du service (voir arrêt du 28 octobre 2004, Meister/OHMI, T‑76/03, EU:T:2004:319, point 192 et jurisprudence citée).

197    Ainsi qu’il ressort de l’analyse de la première branche du deuxième moyen, le requérant a été mis en mesure à plusieurs reprises d’exposer son point de vue sur la réaffectation litigieuse. Cette dernière n’a pas empêché sa promotion au grade AD 12 dans le cadre de l’exercice de promotion 2013. S’agissant de l’intérêt du service, le requérant ne conteste pas les difficultés relationnelles mises en avant par la Commission.

198    À la lumière de ces constats, il y a lieu de rejeter la deuxième branche du troisième moyen.

d)      Sur la troisième branche, tirée de la violation des principes d’objectivité, d’impartialité et de neutralité de l’AIPN compétente ainsi que de la violation des principes d’égalité de traitement et de non-discrimination

199    Le requérant fait valoir que l’administration a reconnu avoir agi uniquement pour corriger les illégalités successives, sans avoir comme objectif la protection qui lui était due en raison de son statut d’informateur, en violation du devoir de neutralité, d’impartialité et d’objectivité.

200    Le requérant ajoute que le Comdel aurait dû être consulté par l’AIPN compétente. Si ce comité avait été informé dès 2012 de la motivation erronée au soutien de la réaffectation litigieuse et de la qualité d’informateur du requérant ainsi que de ses soupçons de corruption liés à l’organisation mentionnée au point 6 ci-dessus, une autre décision aurait vraisemblablement été prise. En effet, la DG « Budget » est membre de ce comité et ses services sont ceux qui avaient formellement introduit un avertissement contre cette organisation internationale.

201    La Commission conclut au rejet des arguments du requérant comme étant soit irrecevables, soit non fondés.

202    S’agissant des griefs tirés d’une violation des devoirs de neutralité, d’impartialité et d’objectivité, il y a lieu de relever, à l’instar de la Commission, que le requérant réitère les arguments déjà examinés et rejetés dans le cadre de la deuxième branche du deuxième moyen, au soutien d’une violation du principe d’impartialité, selon lesquels la Commission s’est limitée à régulariser la situation administrative du requérant, sans avoir comme objectif de réexaminer sa situation. Pour les raisons exposées aux points 144 à 155 ci-dessus, ces griefs ne sont pas fondés.

203    S’agissant de la violation des principes d’égalité de traitement et de non-discrimination, mentionnée dans l’intitulé de cette branche, la Commission observe, à juste titre, que le requérant n’avance aucun argument au soutien de ces griefs, de sorte que la requête n’est pas, sur ce point, conforme aux exigences imposées par l’article 76, sous d), du règlement de procédure. Ces griefs sont donc irrecevables.

204    Les seuls arguments avancés par le requérant au soutien de cette branche qui n’ont pas été traités dans le cadre d’autres moyens concernent l’absence de consultation du Comdel.

205    À cet égard, il y a lieu de constater, à l’instar de la Commission, que le requérant n’allègue pas la violation d’une disposition spécifique de la décision de la Commission du 10 octobre 2012 relative à la gestion de ses ressources dans les délégations de l’Union, qui régit le Comdel et ses modalités de consultation.

206    Les arguments relatifs au Comdel viennent au soutien de la violation des principes d’objectivité, d’impartialité et de neutralité de l’AIPN compétente, invoquée dans le cadre de la présente branche. À cet égard, le requérant précise, dans la réplique, que l’intervention du Comdel aurait, à tout le moins, apporté un élément objectif d’apparence de neutralité et d’objectivation de la décision attaquée, puisqu’un tiers aurait pu donner son appréciation sur le dossier.

207    À supposer que la requête puisse être considérée, sur ce point, comme étant conforme aux exigences posées par l’article 76, sous d), du règlement de procédure, il convient d’observer que la compétence de la directrice générale de la DG RH pour statuer sur les réaffectations de personnes ayant dénoncé des dysfonctionnements, rappelée au point 48 de l’arrêt T‑689/16, vise précisément à accorder aux informateurs les garanties supplémentaires d’impartialité, d’objectivité et de neutralité demandées par le requérant.

208    Par ailleurs, il n’est pas contesté que le Comdel avait été consulté avant l’adoption de la première décision de réaffectation. Or, en exécution de l’arrêt F‑96/13, la Commission devait uniquement remédier à l’illégalité qui avait entaché cette décision et qui concernait la violation des droits de la défense du requérant.

209    De surcroît, même dans l’hypothèse où il devait être considéré que le Comdel aurait dû être consulté par la directrice générale de la DG RH avant l’adoption de la décision attaquée, il y a lieu de rappeler qu’une irrégularité procédurale n’entraîne l’annulation en tout ou en partie d’une décision que s’il est établi que, en l’absence de cette irrégularité, la procédure administrative aurait pu aboutir à un résultat différent et, par conséquent, la décision attaquée aurait pu avoir un contenu différent (voir arrêt du 2 mars 2010, Evropaïki Dynamiki/EMSA, T‑70/05, EU:T:2010:55, point 103 et jurisprudence citée).

210    Or, aucun élément du dossier ne permet d’établir que, en cas de nouvelle consultation du Comdel, la procédure aurait pu aboutir à un résultat différent. En effet, comme il a été constaté aux points 184 à 190 ci-dessus, la réaffectation litigieuse était motivée par les difficultés relationnelles vécues dans la délégation et était sans lien avec la notification de dysfonctionnements à l’égard desquels la DG « Budget » aurait pu, le cas échéant, réagir au sein du Comdel.

211    Dès lors, il y a lieu de rejeter la troisième branche et, partant, le troisième moyen comme étant, en partie, irrecevable et, en partie, non fondé.

212    Il résulte de l’ensemble de considérations qui précèdent que les conclusions en annulation doivent être rejetées.

C.      Sur les conclusions indemnitaires

213    Le requérant demande au Tribunal de condamner la Commission au paiement d’indemnités d’un montant de 250 000 euros en réparation du préjudice matériel subi et d’un montant de 100 000 euros en réparation du préjudice moral allégué.

214    S’agissant des illégalités invoquées, tout d’abord, le requérant se réfère aux trois premières décisions de réaffectation, en faisant valoir qu’elles ont été successivement annulées ou retirées au motif qu’elles étaient illégales.

215    Ensuite, le requérant fait valoir que la décision attaquée a été prise, notamment, en violation de son droit d’être entendu et de ses droits de la défense, sans respecter les normes relatives à la protection des informateurs, dont la qualité, le contenu de la protection et l’absence de limitation dans le temps avaient déjà été clarifiés par le juge de l’Union. Selon le requérant, les trois premières décisions de réaffectation seraient entachées des mêmes illégalités. Au cours de l’audience, en réponse à une question posée par le Tribunal, le requérant a précisé que l’exécution incorrecte des arrêts F‑96/13 et T‑689/16 en violation de l’article 266 TFUE fondait également sa demande indemnitaire.

216    Enfin, le requérant formule une série de chefs d’illégalité. Il affirme avoir été réassigné sept fois contre sa volonté depuis 2013 à des postes en surnombre, créés pour lui, sans qu’ait jamais été prise entièrement en compte la portée des annulations successives. La DG « Ressources humaines et sécurité » n’aurait fourni aucun soutien pendant ces réaffectations. La directrice générale de la DG RH aurait systématiquement refusé de le recevoir alors que le juge de l’Union a estimé que les prétendus motifs de réaffectation avaient une connotation subjective qui imposait à l’AIPN compétente d’entendre elle-même le requérant. Il aurait été mis sur une liste noire et catalogué comme « litigieux », sans que l’administration cherche à comprendre sa situation en tant qu’informateur. Ses demandes d’assistance auraient toutes été rejetées alors qu’aucune règle n’aurait été adoptée concernant la mise en œuvre de la protection attachée à l’informateur. Il y aurait eu une violation systématique de la confidentialité de ses données personnelles causées par les décisions de réaffectation. À l’exception de la décision attaquée, les décisions de réaffectation successives auraient été adoptées par une autorité incompétente.

217    S’agissant du préjudice allégué, d’une part, le requérant soutient avoir subi un dommage moral, évalué devant le Tribunal à 100 000 euros, dû à trois facteurs. Premièrement, le requérant dénonce une atteinte à sa réputation, à sa dignité personnelle et professionnelle ainsi qu’à sa crédibilité professionnelle en raison du fait que la Commission l’aurait maintenu illégalement dans une situation irrégulière, niant la portée des enseignements des arrêts successivement prononcés. Deuxièmement, le requérant se réfère à l’incertitude de sa situation administrative depuis plus de neuf ans, en raison de la succession des décisions illégales de réaffectation, dont deux ont été annulées par le Tribunal, ce qui démontrerait une mauvaise administration et un manque de diligence qui lui auraient causé de l’anxiété et du stress. Troisièmement, le requérant dénonce les changements successifs de position et de fonctions depuis la première décision de réaffectation, sans soutien particulier malgré son statut d’informateur.

218    D’autre part, le requérant soutient avoir subi un préjudice matériel, évalué à 250 000 euros lié, premièrement, à des frais précontentieux démultipliés depuis l’annulation de la première décision de réaffectation, deuxièmement, à la situation d’incertitude juridictionnelle et administrative, caractérisée par son affectation depuis 2013 à des postes en surnombre, ce qui a conduit à un retard dans sa carrière et à être perçu par sa hiérarchie comme un « mouton noir » qui dérange, et, troisièmement, à l’impossibilité pour lui de pouvoir bénéficier des conditions fixées à l’annexe X du statut et d’une carrière internationale ainsi que de bénéficier d’une promotion sur la base des résultats de son investissement professionnel.

219    La Commission conclut au rejet des conclusions indemnitaires comme étant soit irrecevables, soit non fondées.

220    À cet égard, il y a lieu de rappeler que, dans le cadre d’une demande en dommages et intérêts formulée par un fonctionnaire ou par un agent, l’engagement de la responsabilité d’une institution, d’un organe ou d’un organisme de l’Union suppose la réunion d’un ensemble de conditions concernant l’illégalité du comportement qui lui est reproché, la réalité du dommage allégué et l’existence d’un lien de causalité entre le comportement et le préjudice invoqué. Les trois conditions d’engagement de la responsabilité sont cumulatives, ce qui implique que, dès lors que l’une d’entre elles n’est pas satisfaite, la responsabilité de l’institution ne peut être engagée [voir arrêt du 16 juin 2021, CE/Comité des régions, T‑355/19, EU:T:2021:369, point 142 (non publié) et jurisprudence citée].

221    Il convient de rappeler également que la procédure précontentieuse en matière de recours indemnitaire diffère selon que le dommage dont la réparation est demandée résulte d’un acte faisant grief au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut ou d’un comportement de l’administration dépourvu de caractère décisionnel. Dans le premier cas, il appartient à l’intéressé de saisir, dans les délais impartis, l’administration d’une réclamation dirigée contre l’acte en cause. Dans le second cas, en revanche, la procédure administrative doit débuter par l’introduction d’une demande au sens de l’article 90, paragraphe 1, du statut, visant à obtenir un dédommagement, et se poursuivre, le cas échéant, par une réclamation dirigée contre la décision de rejet de cette demande (voir arrêt du 13 décembre 2012, A/Commission, T‑595/11 P, EU:T:2012:694, point 111 et jurisprudence citée).

222    S’agissant des conclusions indemnitaires liées à l’exécution de la chose jugée conformément à l’article 266 TFUE, tirées de ce que les décisions adoptées ne permettraient de compenser que partiellement les conséquences de l’illégalité commise, elles peuvent également être présentées dans la réclamation à l’encontre de ces décisions, sans que la recevabilité du recours soit subordonnée à la présentation d’une demande sur le fondement de l’article 90, paragraphe 1, du statut (voir, en ce sens, arrêt du 13 septembre 2011, AA/Commission, F‑101/09, EU:F:2011:133, point 75 et jurisprudence citée).

223    Enfin, en vertu d’une jurisprudence constante, un fonctionnaire qui a omis d’introduire, dans les délais prévus aux articles 90 et 91 du statut, un recours en annulation contre un acte lui faisant prétendument grief ne saurait, par le biais d’une demande d’indemnisation du préjudice causé par cet acte, réparer cette omission et se ménager ainsi de nouveaux délais de recours. Il ne saurait non plus se prévaloir de la prétendue illégalité de cet acte dans le cadre d’un recours en indemnité. De manière générale, un fonctionnaire ne saurait, par le biais d’une demande en indemnité, chercher à obtenir un résultat identique à celui que lui aurait procuré le succès d’un recours en annulation qu’il a omis d’intenter en temps utile (voir arrêt du 18 novembre 2014, McCoy/Comité des régions, F‑156/12, EU:F:2014:247, point 96 et jurisprudence citée).

224    En l’espèce, il y a lieu d’examiner d’abord les chefs d’illégalité mentionnés au point 216 ci-dessus, dont la recevabilité est contestée par la Commission, avant d’examiner les illégalités invoquées par le requérant concernant les décisions successives relatives à la réaffectation litigieuse décrites aux points 214 et 215 ci-dessus.

225    Dans la réplique, le requérant précise que les allégations rappelées au point 216 ci-dessus n’étaient qu’une contextualisation des recours ayant abouti à des annulations successives par le juge de l’Union.

226    Au cours de l’audience, le requérant a fait valoir que la description, dans ces allégations, du traitement que l’administration lui a réservé depuis la première décision de réaffectation permet de fournir des éléments de chronologie utiles pour que le Tribunal juge en l’espèce le respect du délai raisonnable. Par ailleurs, les décisions prises par l’administration à son égard depuis le 1er janvier 2013 seraient entachées de la même illégalité qui affecte la réaffectation litigieuse et qui tient à l’absence de prise en considération de sa condition d’informateur. De surcroît, cette réaffectation et le fait d’être perçu comme un « mouton noir » à la suite de ses dénonciations seraient à l’origine des réaffectations successives.

227    À l’instar de la Commission, il y a lieu de considérer que les allégations du requérant rappelées au point 216 ci-dessus sont irrecevables, conformément à la jurisprudence rappelée aux points 221 à 223 ci-dessus. En effet, le préjudice dont la réparation est demandée concernant ces chefs d’illégalité ne découle pas de la décision attaquée, ni de l’exécution des arrêts F‑96/13 et T‑689/16, mais d’une série de comportements non décisionnels de l’administration ainsi que d’autres actes faisant grief antérieurs à la décision attaquée que le requérant a omis de contester devant le Tribunal.

228    En toute hypothèse, ces chefs d’illégalité ne sont pas fondés. En effet, les allégations du requérant partent, en substance, de la prémisse que la réaffectation litigieuse, telle que confirmée par la décision attaquée avec effet rétroactif au 1er janvier 2013, a été décidée en raison de ses dénonciations et qu’elle a conditionné de ce fait sa carrière postérieure.

229    Or, ainsi qu’il a été conclu au point 190 ci-dessus, la Commission s’est acquittée de la charge de la preuve qui lui incombait et a établi à suffisance de droit que la réaffectation litigieuse était motivée par des raisons autres que les dénonciations formulées par le requérant. Par ailleurs, dans ses arrêts rendus dans les affaires F‑96/13 et T‑689/16, le juge de l’Union n’a pas remis en cause le bien-fondé de la réaffectation litigieuse.

230    En ce qui concerne les illégalités mentionnées au point 215 ci-dessus, elles ont également été invoquées par le requérant au soutien des conclusions en annulation de la décision attaquée et de la décision rejetant partiellement la réclamation.

231    À cet égard, il suffit de rappeler que, conformément à une jurisprudence constante, les conclusions tendant à la réparation d’un préjudice matériel ou moral doivent être rejetées lorsqu’elles présentent un lien étroit avec les conclusions en annulation qui, comme en l’espèce, ont elles-mêmes été rejetées comme étant irrecevables ou non fondées (voir arrêt du 24 avril 2017, HF/Parlement, T‑570/16, EU:T:2017:283, point 69 et jurisprudence citée).

232    Enfin, s’agissant de l’adoption d’une succession de décisions de réaffectation illégales mentionnée au point 214 ci-dessus, la Commission fait valoir, à juste titre, que les demandes indemnitaires liées aux illégalités constatées dans les arrêts F‑96/13 et T‑689/16 entachant les première et deuxième décisions de réaffectation ont déjà été examinées et rejetées par le juge de l’Union dans ces arrêts. Ces griefs se heurtent donc à l’autorité de la chose jugée et sont irrecevables.

233    S’agissant du retrait en cours d’instance de la troisième décision de réaffectation pour cause d’illégalité (affaire T‑308/20), il ressort de l’analyse figurant aux points 109 à 113 ci-dessus que ce retrait a contribué à retarder une procédure administrative déjà longue, de sorte que la décision attaquée n’a pas été adoptée dans un délai raisonnable, en violation de l’article 41, paragraphe 1, de la Charte.

234    Cette illégalité n’a cependant pas conduit à l’annulation de la décision attaquée, car il n’a pas été établi que la méconnaissance en l’espèce de ce délai avait pu affecter son contenu (voir points 115 à 117 ci-dessus).

235    Toutefois, conformément à la jurisprudence, la violation du délai raisonnable peut conduire le juge de l’Union à condamner l’administration, même d’office, au paiement d’une indemnité pour le préjudice moral occasionné par cette violation (voir, en ce sens, arrêt du 14 septembre 2011, A/Commission, F‑12/09, EU:F:2011:136, points 225 et 226 et jurisprudence citée).

236    En l’espèce, au soutien de sa demande indemnitaire pour préjudice moral, le requérant fait valoir notamment que, en raison des erreurs successives entachant les trois premières décisions de réaffectation, la Commission a créé une situation d’incertitude qui a persisté dans le temps concernant sa situation, ce qui constitue un cas de mauvaise administration et de manque de diligence qui lui a causé de l’anxiété et du stress au-delà de ce qui peut être considéré comme étant raisonnable.

237    Le requérant demande au Tribunal de condamner la Commission à lui verser une somme de 100 000 euros pour tous les dommages moraux allégués, sans faire de distinction entre eux.

238    Même si le requérant n’a pas donné d’indications permettant de quantifier précisément le dommage lié à son état d’incertitude prolongé dans le temps, le Tribunal considère, contrairement à ce que soutient la Commission, que cette circonstance ne fait pas obstacle à la possibilité de fixer ex æquo et bono un montant de nature à réparer un tel préjudice, dont l’existence, en l’espèce, peut être établie.

239    À cet égard, il y a lieu de tenir compte du fait que la durée particulièrement longue de la procédure administrative, ayant conduit à l’adoption de la décision attaquée plus de huit ans après les faits, est due aux erreurs successives de l’administration, qui ont pu engendrer un état d’incertitude et d’anxiété chez le requérant concernant sa situation, d’autant plus qu’il se prévalait de sa condition d’informateur.

240    Dans ces conditions, le Tribunal estime qu’il sera fait une juste appréciation du préjudice moral subi par le requérant en le fixant en l’espèce, ex æquo et bono, à un montant de 3 000 euros.

241    Eu égard à ce qui précède, il y a lieu d’accueillir partiellement les conclusions indemnitaires, à concurrence d’un montant de 3 000 euros, et de les rejeter pour le surplus.

IV.    Sur les dépens

242    Aux termes de l’article 134, paragraphe 3, du règlement de procédure, si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs, chaque partie supporte ses propres dépens. Toutefois, si cela apparaît justifié au vu des circonstances de l’espèce, le Tribunal peut décider que, outre ses propres dépens, une partie supporte une fraction des dépens de l’autre partie.

243    Dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de décider que la Commission supportera, outre ses propres dépens, la moitié des dépens du requérant, en condamnant ce dernier à supporter l’autre moitié restante de ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre)

déclare et arrête :

1)      La Commission européenne est condamnée à verser une indemnité de 3 000 euros à PL.

2)      Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      La Commission est condamnée à supporter, outre ses propres dépens, la moitié des dépens encourus par PL, quisupportera l’autre moitié de ses dépens.

Truchot

Kanninen

Sampol Pucurull

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 15 novembre 2023.

Signatures


*      Langue de procédure : le français.


1 Données confidentielles occultées.