Language of document : ECLI:EU:T:2002:314

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

12 décembre 2002 (1)

«Fonctionnaires - Procédure de pourvoi aux vacances d'emploi - Motivation - Examen comparatif des candidatures et égalité de traitement des fonctionnaires - Recours en annulation - Recours en indemnité»

Dans les affaires jointes T-338/00 et T-376/00,

Carmelo Morello, fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Bruxelles (Belgique), représenté par Mes J. Sambon et P.-P. Van Gehuchten, avocats, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par Mme C. Berardis-Kayser, en qualité d'agent, assistée de Me D. Waelbroeck, avocat, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

ayant pour objet, d'une part, une demande d'annulation de la décision de la Commission de ne pas nommer le requérant au poste de chef de l'unité 2 «Automobiles, autres moyens de transport et construction mécanique connexe» au sein de la direction F «Industries des biens d'équipement et de consommation» de la direction générale «Concurrence» (COM/113/99), ainsi que de la décision de nommer un autre candidat audit poste et, d'autre part, une demande de dommages et intérêts,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (troisième chambre),

composé de MM. M. Jaeger, président, K. Lenaerts et J. Azizi, juges,

greffier: M. J. Palacio González, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l'audience du 21 novembre 2001,

rend le présent

Arrêt

Cadre réglementaire

1.
    L'article 7 du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le «statut») dispose en son paragraphe 1, premier alinéa:

«L'autorité investie du pouvoir de nomination affecte, par voie de nomination ou de mutation, dans le seul intérêt du service et sans considération de nationalité, chaque fonctionnaire à un emploi de sa catégorie ou de son cadre correspondant à son grade.»

2.
    Selon l'article 25, deuxième alinéa, du statut:

«Toute décision individuelle prise en application du présent statut doit être communiquée par écrit, sans délai, au fonctionnaire intéressé. Toute décision faisant grief doit être motivée.»

3.
    Le point 9, sous a), de l'annexe I de la décision de la Commission relative à l'«exercice des pouvoirs dévolus par le statut à l'autorité investie du pouvoir denomination (AIPN), et par le régime applicable aux autres agents (RAA) à l'autorité habilitée à conclure les contrats d'engagements (AHCC)», publiée aux Informations administratives n° 1031 du 23 février 1998, prévoit que «les pouvoirs en ce qui concerne les fonctionnaires et agents temporaires de grade A 3 et de grade A 4-5 chefs d'unités ou conseillers figurant dans les tableaux I-1 et 2 (pourvoi d'une vacance par mutation/promotion), [...] détenus par les directeurs généraux, sont exercés selon la procédure simplifiée, après accord du commissaire compétent, du commissaire chargé des questions de personnel et d'administration et du président».

4.
    Selon l'exposé des motifs relatif à la décision portant création du comité consultatif des nominations (ci-après le «CCN»):

«[A]u regard des qualifications requises dans les avis de vacance, [le CCN] aura pour mission d'apprécier les capacités et l'aptitude des candidats aux postes A 2 et A 3 aux phases de procédure de l'article 29.1.a) et c) du statut. Le [CCN] donne son avis avant que les membres intéressés de la Commission soumettent leur proposition. Le [CCN] aura la faculté d'entendre d'autres fonctionnaires; il entend notamment chaque fois le directeur général de la direction générale dans laquelle la nomination doit intervenir.»

Faits à l'origine du litige

5.
    Le requérant, fonctionnaire de grade A 4, est entré au service de la Commission le 1er février 1973 et a, depuis lors, effectué toute sa carrière au sein de la direction générale (DG) «Concurrence» (DG IV). Pendant la période allant du 1er octobre 1997 au 15 novembre 1998, il a exercé les fonctions de chef d'unité faisant fonction, avec attribution de l'intérim de grade A 3, de l'unité 1 «Cartels» de la direction E «Cartels, industries de base et énergie» (ci-après l'«unité IV.E.1»). Affecté depuis le 16 mars 1999, comme chef d'unité adjoint, à l'unité 1 «Textiles, produits cosmétiques et autres biens de consommation, industries mécaniques et électriques et industries diverses» de la direction F «Industries des biens d'équipement et de consommation» (ci-après l'«unité IV.F.1»), il a exercé les fonctions de chef d'unité faisant fonction de cette unité du 16 mars 1999 au 31 août 1999.

6.
    Par l'avis de vacance d'emploi COM/113/99, du 21 septembre 1999, l'autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l'«AIPN») a ouvert la procédure prévue à l'article 29, paragraphe 1, sous a), du statut, en vue de pourvoir à un emploi de chef d'unité, correspondant à un poste de grade A 5/A 4, dans l'unité 2 «Automobiles, autres moyens de transport et construction mécanique connexe» de la direction F de la DG «Concurrence» (ci-après l'«emploi en cause»). L'avis de vacance est libellé comme suit:

«Chef de l'unité 'Automobiles et autres moyens de transport', chargé de diriger et coordonner les travaux dans le cadre de l'application des articles 81 [CE] et 82 [CE]. Capacité à diriger et à motiver une équipe.»

7.
    Le 23 septembre 1999, le requérant s'est porté candidat à cet emploi.

8.
    Le 11 novembre 1999, le CCN s'est réuni afin d'examiner les candidatures à cet emploi. À l'issue de cette réunion, le CCN a rendu son avis, lequel a été transmis à l'AIPN. Dans ledit avis, le CCN indiquait que, compte tenu de l'acte de candidature de chaque candidat et de leur dossier personnel, il était parvenu à la conclusion que «la candidature de M. Van Ginderachter pourrait être prise en considération». Il indiquait également avoir «noté les bonnes qualifications de MM. De Bronett et Morello et de Mme Williams».

9.
    Le 12 novembre 1999, après avoir examiné les candidatures à l'emploi en cause, le directeur général de la DG «Concurrence», M. Schaub, a adressé au directeur général de la DG «Personnel et administration» une demande officielle de nomination de M. Van Ginderachter à l'emploi en cause, avec effet au 1er décembre 1999. Le 18 novembre 1999, M. Schaub a envoyé un courrier électronique à l'ensemble du personnel de la DG «Concurrence» annonçant que M. Van Ginderachter était nommé à l'emploi en cause. La date d'effet et de prise de fonctions a été fixée au 1er décembre 1999.

10.
    Le 24 novembre 1999, le requérant a reçu une lettre, non datée, du secrétaire du CCN, M. Benedetti, l'informant en ces termes:

«Suite à la publication de l'emploi de chef d'unité COM/113/99, huit candidatures ont été présentées au titre de l'article 29, paragraphe 1, sous a), du statut. Le [CCN] a pris acte que le niveau du pourvoi a été fixé par l'AIPN au moment de la publication en A 4/A 5.

Il a examiné au cours de sa réunion du 11 novembre 1999 les qualifications requises pour le titulaire de la fonction; il a ensuite examiné toutes les candidatures et il a procédé à l'audition de M. Schaub, directeur général de la DG 'Concurrence'.

À l'issue des travaux et sans préjuger les décisions finales prises par l'AIPN pour le pourvoi du poste en question, le [CCN] a émis l'avis suivant:

-    en ce qui concerne l'examen des candidatures introduites et après examen des mêmes, votre candidature ne devrait pas être prise en considération à cette occasion. Le [CCN] a cependant pris note de vos bonnes qualifications.»

11.
    Par décision du 6 janvier 2000, prenant effet au 1er décembre 1999, M. Van Ginderachter a été nommé à l'emploi en cause.

12.
    Par lettre du 20 janvier 2000, l'AIPN a informé le requérant de sa décision de ne pas retenir sa candidature pour l'emploi en cause.

13.
    Le 6 avril 2000, le requérant a introduit une réclamation au titre de l'article 90, paragraphe 2, du statut, contre, d'une part, la décision de l'AIPN de ne pas retenir sa candidature à l'emploi en cause et, d'autre part, la décision de l'AIPN de nommer M. Van Ginderachter à cet emploi.

14.
    L'AIPN ne s'étant pas prononcée sur la réclamation dans un délai de quatre mois, le 11 août 2000, une décision implicite de rejet est intervenue.

Procédure et conclusions des parties

15.
    Par requête déposée au greffe du Tribunal le 7 novembre 2000, le requérant a introduit un premier recours, enregistré sous le numéro T-338/00.

16.
    Le 8 novembre 2000, le requérant a reçu notification de la décision explicite de rejet de sa réclamation de la Commission datée du 27 octobre 2000.

17.
    Par requête déposée au greffe du Tribunal le 19 décembre 2000, le requérant a introduit un deuxième recours, enregistré sous le numéro T-376/00.

18.
    Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (troisième chambre) a décidé d'ouvrir la procédure orale et, dans le cadre des mesures d'organisation de la procédure, a invité la défenderesse à répondre par écrit à une série de questions. La défenderesse a répondu à cette demande dans le délai imparti.

19.
    Par ordonnance du président de la troisième chambre du 26 juin 2001, les affaires T-135/00, T-136/00, T-164/00, T-181/00, T-338/00, T-376/00 et T-378/00 ont été jointes aux fins de la procédure orale.

20.
    Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions du Tribunal lors de l'audience du 21 novembre 2001. Au cours de celle-ci, les parties ont, notamment été entendues sur une éventuelle jonction des affaires T-338/00 et T-376/00 aux fins de l'arrêt. Le Tribunal a décidé de joindre les affaires T-338/00 et T-376/00 aux fins de l'arrêt.

21.
    Le requérant conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    déclarer le recours recevable et fondé;

-    annuler la décision de la Commission de nommer M. Van Ginderachter au poste de chef de l'unité 2 au sein de la direction F de la DG«Concurrence» ainsi que la décision de la Commission de ne pas retenir sa candidature à cet emploi;

-    pour autant que de besoin, dans l'affaire T-338/00, annuler la décision implicite de rejet de sa réclamation et, dans l'affaire T-376/00, annuler la décision explicite de rejet de sa réclamation qui lui a été communiquée le 8 novembre 2000;

-    condamner la Commission à payer des dommages intérêts évalués, sous réserve d'augmentation ou de diminution en cours d'instance, à 120 000 euros en réparation du préjudice moral subi et à 25 000 euros en réparation du préjudice matériel subi;

-    condamner la Commission aux dépens;

-    inviter la Commission, au titre des mesures d'instruction, à produire l'ensemble des documents justifiant du travail accompli par le CCN jusqu'à sa réunion du 11 novembre 1999 et les minutes de ladite réunion, en tout cas en ce qu'elles comporteraient le compte rendu de l'audition du directeur général de la DG «Concurrence».

22.
    La Commission conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    rejeter le recours en annulation comme manifestement non fondé;

-    rejeter la demande en indemnité comme irrecevable et, en toute hypothèse, comme non fondée dans son ensemble;

-    statuer comme de droit sur les dépens

Sur la recevabilité dans l'affaire T-338/00 et dans l'affaire T-376/00

Arguments des parties

23.
    Le lendemain de l'introduction, le 7 novembre 2000, d'un premier recours enregistré sous le numéro T-338/00 contre la décision implicite de rejet de sa réclamation, le requérant a accusé réception d'une décision explicite de rejet de ladite réclamation. Le requérant a alors introduit, le 19 décembre 2000, un second recours contre cette décision explicite de rejet de sa réclamation enregistré sous le numéro T-376/00.

24.
    Dans la première affaire (T-338/00), la Commission soulève la question de la recevabilité du recours pour défaut d'objet, au motif que le requérant accepterait, en introduisant un second recours, que le premier soit devenu sans objet. Dans la deuxième affaire (T-376/00), elle fait valoir que le rejet explicite d'une réclamationest une simple confirmation de la décision de rejet implicite et que, selon une jurisprudence constante, un recours contre un acte confirmatif est irrecevable.

25.
    La Commission soutient qu'en toute hypothèse les deux recours, en ce qu'ils visent la même décision, mettent en présence les mêmes parties, sur la même base juridique et à l'appui des mêmes moyens, ne peuvent être simultanément recevables.

26.
    Le requérant souligne d'abord que la décision de rejet explicite de sa réclamation par la Commission est tardive dans la mesure où il en a reçu notification le lendemain du jour où il a introduit son premier recours (T-338/00) auprès du Tribunal.

27.
    Ensuite, il estime que la jurisprudence relative aux actes confirmatifs doit être interprétée à la lumière des enseignements de l'arrêt du Tribunal du 9 mars 2000, Nuñez/Commission (T-10/99, RecFP p. I-A-47 et II-203, point 47), en vertu duquel l'absence de motivation de la décision de rejet ne peut être couverte après l'introduction du recours.

28.
    Dès lors, il considère qu'en l'espèce la motivation tardive fournie par la décision explicite de rejet devrait être écartée des débats dans la mesure où elle ne peut utilement être considérée comme confirmative d'une décision antérieure, ni être censée apporter à celle-ci la substance de motivation qui lui faisait défaut. Il fait remarquer toutefois que la Commission se réfère explicitement au contenu de la décision explicite de rejet dans son mémoire en défense dans l'affaire T-338/00. Cette approche soulève, selon lui, un problème d'égalité des armes, dès lors qu'il n'avait pas connaissance de cette motivation explicite lors de l'introduction de son premier recours (T-338/00).

29.
    Le requérant considère toutefois qu'il serait cependant regrettable de se priver des enseignements à tirer d'un rejet explicite, même tardif, et soutient que, sur le plan argumentaire, il doit pouvoir avoir la possibilité de bénéficier d'un deuxième recours en annulation, dirigé contre la décision explicite de rejet.

Appréciation du Tribunal

30.
    Les deux affaires T-338/00 et T-376/00 concernent la même décision de nomination, à savoir la décision du 6 janvier 2000, portant nomination de M. Van Ginderachter au poste de chef de l'unité 2 de la direction F de la DG «Concurrence». L'affaire T-338/00 a été introduite par le requérant, le 7 novembre 2000, contre la décision implicite de rejet de sa réclamation du 6 avril 2000. Ayant reçu notification, le 8 novembre 2000, d'une décision explicite de rejet de sa réclamation, le requérant a introduit, le 19 décembre 2000, un nouveau recours enregistré sous le numéro T-376/00.

31.
    Il convient de relever, à titre liminaire, que la situation, en l'espèce, est différente de celle envisagée à l'article 91, paragraphe 3, deuxième tiret, in fine, du statut, selon lequel «lorsqu'une décision explicite de rejet d'une réclamation intervient après la décision implicite mais dans le délai de recours, elle fait à nouveau courir le délai de recours». En effet, en l'espèce, il n'est pas contesté que la décision explicite de rejet de la réclamation est intervenue en dehors du délai de recours.

32.
    Dans l'affaire T-338/00, il est constant que le recours a été précédé de la procédure précontentieuse et qu'il a été introduit dans le délai de trois mois à compter de la décision implicite de rejet de la réclamation. Le recours dans l'affaire T-338/00 est donc recevable. La simple circonstance selon laquelle le requérant a, ultérieurement, introduit un deuxième recours (T-376/00), ne saurait, en soi, rendre le recours T-338/00 irrecevable.

33.
    En revanche, le recours dans l'affaire T-376/00, introduit contre la décision explicite de rejet de la réclamation, est irrecevable.

34.
    En effet, ainsi que le Tribunal l'a déjà constaté dans l'ordonnance du 7 juin 1991, Weyrich/Commission (T-14/91, Rec. p. II-235, point 42), le rejet explicite d'une réclamation, après que le délai de recours contre le rejet implicite est écoulé, ne contenant aucun élément nouveau par rapport à la situation de droit ou de fait existante au moment du rejet implicite, est un acte purement confirmatif, non susceptible de faire grief. Le fait que la décision de rejet explicite contient une motivation qui faisait défaut tant dans la décision originaire de rejet de la candidature du requérant elle-même que, par définition, dans la décision de rejet implicite de sa réclamation n'en fait pas pour autant un acte faisant grief au requérant. En effet, ainsi que l'écrit l'avocat général M. Mayras, dans ses conclusions sous l'arrêt de la Cour du 28 mai 1980, Kuhner/Commission (33/79 et 75/79, Rec. p. 1677, 1701), si la décision explicite expose les motifs de la décision originaire, elle ne contient cependant aucun élément nouveau par rapport à la situation de droit ou de fait existant au moment du rejet implicite de la réclamation. De même, la Cour, dans l'arrêt Kuhner/Commission, précité, point 9, a exposé que, bien que l'usage d'introduire un second recours contre une décision explicite rejetant hors délai une réclamation d'un fonctionnaire trouve son origine dans la mauvaise habitude de la Commission de ne pas répondre aux réclamations des fonctionnaires dans le délai de quatre mois prévu à l'article 90 du statut, il n'en demeure pas moins exact qu'une décision explicite de rejet pure et simple, bien qu'elle soit susceptible de révéler les motifs de ce rejet, ne fait que confirmer la décision implicite qui l'a précédée. Il y a d'ailleurs lieu d'observer que toute décision de rejet, qu'elle soit implicite ou explicite, ne fait, si elle est pure et simple, que confirmer l'acte ou l'abstention dont le réclamant se plaint et ne constitue pas, prise isolément, un acte attaquable.

35.
    Il ne pourrait en être autrement, et la décision explicite de rejet de la réclamation ne pourrait constituer un acte faisant grief susceptible de recours que dans l'hypothèse où la décision de rejet explicite contenait un réexamen de la situationdu requérant en fonction d'éléments, de droit ou de fait, nouveaux. Or, il n'est pas contesté que tel n'est pas le cas en l'espèce, la décision explicite de rejet de la réclamation du requérant ne procédant à aucun réexamen de sa situation, mais se bornant à exposer la motivation de la décision originaire.

36.
    Il s'ensuit que le recours dans l'affaire T-376/00 est irrecevable.

37.
    Par ailleurs, la question de savoir si et, le cas échéant, dans quelle mesure la décision explicite de rejet de la réclamation peut être prise en considération sera examinée dans le cadre du moyen pris d'une violation de l'obligation de motivation.

Sur le fond

Sur la demande en annulation

38.
    À l'appui de son recours, le requérant invoque trois moyens tirés, premièrement, de la violation de l'article 25 du statut et de l'obligation de motivation, deuxièmement, de la violation de l'article 45 du statut, d'une erreur manifeste d'appréciation, de la violation de la procédure de promotion et de la violation du principe d'égalité de traitement, troisièmement, de la violation de l'article 7 du statut et d'un détournement de pouvoir.

Sur le premier moyen, pris d'une violation de l'obligation de motivation

- Arguments des parties

39.
    Le requérant estime que la Commission a violé l'article 25 du statut en ce qu'elle n'a motivé ni la décision de rejet explicite de sa candidature à l'emploi en cause, ni le rejet de sa réclamation, dans la mesure où elle ne lui a pas transmis de décision explicite.

40.
    Il rappelle que, si l'AIPN n'est pas tenue de motiver la décision de promotion à l'égard des fonctionnaires non promus, elle l'est, en revanche, s'agissant de celle portant rejet de la réclamation d'un fonctionnaire non promu (arrêt de la Cour du 7 février 1990, Culin/Commission, C-343/87, Rec. p. I-225, point 13; arrêts du Tribunal du 11 juin 1996, Anacoreta Correia/Commission, T-118/95, RecFP p. I-A-283 et II-835, point 82, et du 27 avril 1999, Thinus/Commission, T-283/97, RecFP p. I-A-69 et II-353, points 73 à 75), et que l'absence de motivation ne peut être couverte après l'introduction du recours (arrêts du Tribunal du 12 février 1992, Volger/Parlement, T-52/90, Rec. p. II-121, point 40, et Nuñez/Commission, précité, point 47).

41.
    En l'espèce, le requérant fait valoir que, en l'absence de toute décision motivée, notifiée par l'AIPN en réponse à sa réclamation, il ne dispose d'aucun élément relatif à la décision elle-même.

42.
    La lettre du secrétaire du CCN, communiquée au requérant le 24 novembre 1999, ne pourrait être considérée comme l'ayant informé du contexte de la décision, car la motivation d'un acte consultatif ou d'un acte préparatoire ne peut pallier le manque de motivation de la décision faisant grief.

43.
    Le requérant fait également valoir que, dans l'arrêt du Tribunal du 2 octobre 1996, Vecchi/Commission (T-356/94, RecFP p. I-A-437 et II-1251, points 80 et 82), avec référence à l'arrêt du Tribunal du 30 janvier 1992, Schönherr/CES (T-25/90, Rec. p. II-63), le Tribunal a rappelé que la motivation doit permettre au juge d'exercer son contrôle sur la légalité de la décision attaquée et de fournir à l'intéressé une indication suffisante pour savoir si elle est bien fondée. Le Tribunal aurait également précisé, dans ce même arrêt, que cette motivation n'est pas insuffisante lorsqu'elle indique les motifs individuels et pertinents qui justifient le rejet de la candidature du requérant, de sorte que celui-ci a été en mesure de contester la légalité de la décision attaquée et que le Tribunal a pu exercer son contrôle.

44.
    Après avoir fait observer que la décision de rejet implicite de sa réclamation ne satisfait pas aux conditions posées par la jurisprudence du Tribunal, le requérant soutient que, s'il faut admettre que la motivation de la décision de rejet explicite de sa réclamation, notifiée le 8 novembre 2000, est censée coïncider avec celle de la décision de rejet implicite, on ne trouve dans la décision de rejet explicite aucune indication des motifs individuels et pertinents susceptibles de justifier le rejet de sa candidature. Par conséquent, le premier moyen doit donc, selon lui, être déclaré bien fondé.

45.
    La Commission estime que le moyen tiré d'un défaut de motivation n'est pas fondé.

- Appréciation du Tribunal

46.
    Selon une jurisprudence constante, l'obligation de motivation, inscrite à l'article 25, deuxième alinéa, du statut, a pour but, d'une part, de fournir à l'intéressé une indication suffisante pour apprécier le bien-fondé de la décision prise par l'administration et l'opportunité d'introduire un recours devant le Tribunal et, d'autre part, de permettre à ce dernier d'exercer son contrôle. Son étendue doit être appréciée en fonction des circonstances concrètes, notamment du contenu de l'acte, de la nature des motifs invoqués et de l'intérêt que le destinataire peut avoir à recevoir des explications (arrêt Nuñez/Commission, précité, point 41).

47.
    Il ressort également de la jurisprudence que, pour juger du caractère suffisant d'une motivation, il y a lieu de la replacer dans le contexte dans lequel s'est inscrite l'adoption de l'acte attaqué (arrêt Thinus/Commission, précité, point 77).

48.
    Il convient tout d'abord d'observer que le présent moyen, tiré d'une violation de l'obligation de motivation, ne peut concerner que la légalité de la décision portant rejet de la candidature du requérant à l'emploi en cause. La légalité de la décision de nommer M. Van Ginderachter à cet emploi ne peut pas être affectée par ce moyen, dès lors que l'AIPN n'est pas tenue de motiver une décision de promotion à l'égard des candidats non promus (arrêts du Tribunal du 12 mai 1998, Wenk/Commission, T-159/96, RecFP p. I-A-193 et II-593, point 114, et du 26 janvier 2000, Gouloussis/Commission, T-86/98, RecFP p. I-A-5 et II-23, point 73).

49.
    Il y a lieu de rappeler, ensuite, que, selon une jurisprudence constante, si l'AIPN n'est pas tenue de motiver les décisions de promotion à l'égard des candidats non promus, elle est en revanche tenue de motiver sa décision portant rejet d'une réclamation déposée en vertu de l'article 90, paragraphe 2, du statut, par un candidat non promu, la motivation de cette décision étant censée coïncider avec la motivation contre laquelle la réclamation était dirigée (arrêt Anacoreta Correia/Commission, précité, point 82).

50.
    En l'espèce, ni la décision de rejet de la candidature du requérant ni la décision de rejet de la réclamation du requérant ne contiennent de motivation, cette dernière étant une décision implicite.

51.
    Toutefois, ainsi que le souligne la Commission, le requérant a été informé par lettre du secrétaire du CCN communiquée le 24 novembre 1999 que, à la suite de l'examen des qualifications requises pour le titulaire de la fonction et des huit candidatures présentées au titre de l'article 29, paragraphe 1, sous a), du statut, ainsi que de l'audition du directeur général de la DG «Concurrence», M. Schaub, le CCN a émis l'avis que sa candidature ne devrait pas être prise en considération à cette occasion.

52.
    Afin d'apprécier si cette lettre peut être considérée comme contenant une motivation suffisante, il convient de rappeler que, les promotions se faisant, aux termes de l'article 45 du statut, «au choix», l'AIPN n'est pas tenue de révéler au candidat écarté l'appréciation comparative qu'elle a portée sur lui et sur le candidat retenu pour la promotion, ni d'exposer en détail la façon dont elle a estimé que le candidat nommé remplissait les conditions de l'avis de vacance (arrêt du Tribunal du 14 juin 2001, McAuley/Conseil, T-230/99, RecFP p. I-A-127 et II-583, point 52), mais il suffit que la motivation concerne la réunion des conditions légales auxquelles le statut subordonne la régularité de la procédure (arrêt du Tribunal du 18 mars 1997, Picciolo et Caló/Comité des régions, T-178/95 et T-179/95, RecFP p. I-A-51 et II-155, point 34). Dans le cadre d'une procédure de promotion, la motivation ne doit donc pas porter sur les qualités respectives des candidats, mais sur la seule régularité de la promotion (arrêt de la Cour du 30 octobre 1974, Grassi/Conseil, 188/73, Rec. p. 1099, point 14).

53.
    Dans le cas d'espèce, il résulte de la lettre du secrétaire du CCN, reçue le 24 novembre 1999, que le requérant a reçu communication d' éléments lui permettant d'apprécier si les conditions légales auxquelles le statut subordonne la régularité de la procédure de promotion ont été respectées. Le requérant a en effet été informé par celle-ci de ce que, au cours de sa réunion du 11 novembre 1999, le CCN a procédé à l'examen des qualifications requises pour le poste et, à la suite de l'audition du directeur général de la DG «Concurrence» et de l'examen comparatif des mérites des différents candidats, a émis l'avis que sa candidature ne devait pas être prise en considération.

54.
    Même si, comme le souligne la défenderesse, la motivation de la décision litigieuse ne ressort pas tant de l'avis du CCN que de la lettre du secrétaire du CCN qui a informé le requérant du déroulement de la procédure, il convient cependant d'observer que cette motivation non seulement n'émane que d'une instance consultative, mais surtout est antérieure à l'adoption de l'acte attaqué. Dans ces conditions, la lettre du secrétaire du CCN ne saurait être considérée comme suffisant, à elle seule, à l'accomplissement du devoir d'information et de motivation prévu à l'article 25 du statut.

55.
    Toutefois, dans la mesure où la décision a été prise dans un contexte connu du requérant, elle ne saurait être considérée comme étant entachée d'une absence totale de motivation, mais d'une insuffisance de motivation. Or, il ressort de la jurisprudence que, si l'absence totale de motivation du rejet de la candidature d'un fonctionnaire candidat à un emploi à pourvoir par voie de promotion ne peut être couverte par des explications fournies par l'administration après l'introduction d'un recours juridictionnel (arrêt Volger/Parlement, précité, point 40, confirmé sur pourvoi par arrêt de la Cour du 9 décembre 1993, Parlement/Volger, C-115/92 P, Rec. p. I-6549, points 22 à 24), en revanche, une simple insuffisance de motivation fournie dans le cadre de la procédure précontentieuse n'est pas de nature à justifier l'annulation de la décision entreprise lorsque des précisions complémentaires sont apportées par l'AIPN en cours d'instance (voir arrêt de la Cour du 19 novembre 1998, Parlement/Gaspari, C-316/97 P, Rec. p. I-7597, point 29; arrêts du Tribunal du 3 mars 1993, Vela Palacios/CES, T-25/92, Rec. p. II-201, point 26; du 17 mai 1995, Benecos/Commission, T-16/94, RecFP p. I-A-103 et II-335, point 36; du 16 octobre 1996, Benecos/Commission, T-37/94, RecFP p. I-A-461 et II-1301, points 39 à 46; du 6 novembre 1997, Berlingieri Vinzek/Commission, T-71/96, RecFP p. I-A-339 et II-921, points 79 à 84, et Gouloussis/Commission, précité, points 73 à 77).

56.
    Force est de constater que, dans la mesure où la décision était entachée d'une insuffisance de motivation, la Commission a, par la suite, fourni le complément de motivation nécessaire.

57.
    En l'espèce, il ressort du dossier produit devant le Tribunal que, dans la décision explicite de rejet de la réclamation et dans le cadre de la présente procédurejudiciaire, la Commission a précisé les éléments attestant de la régularité de la procédure de promotion.

58.
    Dans la décision explicite de rejet, laquelle peut être prise en considération à titre de complément de motivation, la Commission a précisé au requérant, premièrement, les conditions requises par l'avis de vacance, deuxièmement, les différentes étapes de la procédure de sélection suivie, avec en particulier l'avis du CCN selon lequel la candidature de M. Van Ginderachter pourrait être prise en considération, troisièmement, les détails relatifs à l'expérience académique et professionnelle du candidat retenu de nature à justifier son choix.

59.
    Il y a lieu également de mentionner que le directeur général de la DG «Concurrence» a déposé une note d'observations expliquant les différentes étapes ayant conduit l'AIPN à choisir M. Van Ginderachter, à savoir publication de l'avis de vacance, introduction des candidatures, analyse des mérites relatifs des candidats par le directeur général, nomination d'un rapporteur par le CCN, préparation d'un avis par le rapporteur du CCN sur la base d'un maximum de contacts appropriés au sein de la Commission, audition par le CCN du directeur général responsable du poste à pourvoir, discussion entre les membres du CCN sur les dossiers et sur l'appréciation comparative des candidats en l'absence du directeur général, adoption de l'avis du CCN, réexamen de la situation par le directeur général à la suite de l'avis du CCN, demande de nomination du candidat choisi adressée au directeur général de la DG «Personnel et administration» et, enfin, nomination du chef d'unité. À l'occasion des réponses aux questions écrites du Tribunal, la Commission a, en outre, produit spontanément une déclaration sur l'honneur du directeur général de la DG «Concurrence», M. Schaub, dans laquelle celui-ci certifie avoir systématiquement effectué, en consultation avec les directeurs généraux adjoints et chefs d'unité des directions concernées, une analyse détaillée des mérites des candidats et avoir choisi, après un réexamen de la situation compte tenu de l'avis du CCN, le candidat qui semblait le mieux correspondre au profil de l'emploi en cause. La Commission a également fourni une copie de l'avis du CCN ainsi que le rapport de notation et le curriculum vitae du candidat nommé.

60.
    Par ailleurs, si l'AIPN est tenue de préciser les raisons pour lesquelles elle s'écarte de la proposition faite par le CCN, elle n'est en revanche pas tenue de fournir une motivation spécifique lorsque, comme en l'espèce, elle suit la proposition du CCN.

61.
    En outre, force est de constater que la communication tardive du complément de motivation n'a pas empêché le requérant d'introduire un recours devant le Tribunal et de contester utilement le rejet de sa candidature (arrêt Gouloussis/Commission, précité, point 76).

62.
    Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré d'une violation de l'obligation de motivation doit être rejeté.

Sur le moyen tiré de la violation de l'article 45 du statut, d'une erreur manifeste d'appréciation, de la violation de la procédure de promotion et de la violation du principe d'égalité de traitement

- Arguments des parties

63.
    Le requérant invoque la violation de l'article 45 du statut, de la procédure de promotion et du principe d'égalité de traitement, ainsi qu'une erreur manifeste d'appréciation, en ce que sa candidature à l'emploi en cause a été écartée alors qu'il était, selon lui, eu égard à l'appréciation de ses mérites professionnels, substantiellement plus compétent que le fonctionnaire retenu par la Commission. Il rappelle que, n'ayant pas eu connaissance de la motivation de l'acte attaqué, il peut difficilement développer ce moyen, mais considère cependant qu'il est en mesure de faire valoir des indices précis, pertinents et concordants sur le caractère manifestement déraisonnable de la procédure suivie.

64.
    En premier lieu, le requérant allègue que la Commission n'a pu procéder à la comparaison effective des mérites respectifs des différents candidats dans la mesure où l'avis de vacance, excessivement laconique, ne définissait pas les exigences et qualifications requises pour l'emploi en cause. Or, il fait valoir qu'il est de jurisprudence constante que la détermination circonstanciée des caractéristiques propres à l'emploi à pourvoir constitue, d'une part, un indicateur pour les postulants et, d'autre part, le cadre légal de la vacance à partir duquel l'institution peut mesurer les titres et mérites des différents candidats.

65.
    Le requérant estime en outre que le rejet explicite de sa réclamation, dont se prévaut la Commission, conforterait son grief dans la mesure où, dans ce document, il est indiqué que la comparaison pertinente des candidats a pu être faite notamment grâce aux précisions apportées par M. Schaub.

66.
    Il fait également observer que, si les compétences recherchées consistent dans l'application des articles 81 CE et 82 CE, la Commission devrait expliquer pourquoi son expérience de plusieurs années dans différentes unités de la DG «Concurrence» n'a pas été préférée, tandis que, si l'accent était mis sur la haute capacité à diriger une équipe administrative, il se demande pourquoi sa compétence démontrée pour la direction de l'unité IV.E.1 avec l'attribution de l'intérim de grade A 3 n'a pas été préférée.

67.
    En deuxième lieu, le requérant émet des réserves quant à la nature des éléments qui auraient permis d'établir une comparaison entre les titres et mérites des postulants, et ce tant sous l'angle de la procédure suivie qu'au regard de son dossier individuel. Il estime qu'en l'espèce la procédure ne correspondrait ni à une démarche de bonne administration ni à une appréciation raisonnable des mérites des candidats.

68.
    S'agissant de la procédure suivie, le requérant fait valoir, tout d'abord, que l'avis de vacance ne précisait pas la nature des qualifications requises pour l'emploi en cause; ensuite, que, de ce fait, le CCN n'a, sans conteste, pas été en mesure d'examiner utilement les candidatures; enfin, que la nature de l'audition du directeur général de la DG «Concurrence», M. Schaub, n'apparaît pas clairement.

69.
    Selon le requérant, cette audition était destinée soit à préciser l'avis de vacance, auquel cas elle serait irrégulière en raison du caractère tardif de cette information, soit à communiquer à l'AIPN un premier avis de classement des candidats, sous forme de «négociation informelle entre le [CCN] et l'AIPN», soit, enfin, à sonder les préférences de l'AIPN. Une telle audition serait, dans l'une ou l'autre de ces deux dernières hypothèses, irrégulière, puisqu'elle priverait le CCN de son rôle. Le requérant rappelle également que, conformément à la décision de la Commission publiée aux Informations administratives n° 1031, du 23 février 1998, le directeur général de la DG «Concurrence» constituait, en l'espèce, l'AIPN pour l'octroi de la nomination à intervenir.

70.
    En réponse à l'argumentation de la Commission tendant à expliquer que l'audition du directeur général devant le CCN était prévue dans les textes relatifs à cette instance, le requérant rétorque que, dans la mesure où un régime de large décentralisation a été mis en place, depuis 1998, pour les promotions telles que celle visée en l'espèce, ce sont les directeurs généraux eux-mêmes qui, dans le cadre de la nouvelle procédure, peuvent agir en qualité d'AIPN. Dès lors, la Commission aurait dû tenir compte de cette réforme, afin qu'en bonne administration le CCN ne reçoive pas un jugement d'une autorité à laquelle il aura à rendre un avis.

71.
    Le requérant demande que la Commission produise l'ensemble des documents justifiant du travail accompli par le CCN jusqu'à sa réunion du 11 novembre 1999 et les minutes de ladite réunion, tout au moins en ce qu'elles comporteraient le compte rendu de l'audition de M. Schaub.

72.
    S'agissant de son dossier individuel, le requérant souligne que son dernier rapport de notation n'a pas été communiqué ni connu, pas davantage qu'un rapport couvrant la période pendant laquelle il a exercé les fonctions de chef d'unité. Dans ces conditions, l'AIPN aurait pu, à tout le moins, en vertu de la jurisprudence (arrêts du Tribunal Vela Palacios/CES, précité, et du 26 octobre 1994, Marcato/Commission, T-18/93, Rec. p. I-A-215 et II-681), rechercher d'autres éléments pour compenser cette lacune. Or, la Commission se serait abstenue d'entreprendre toute démarche en ce sens, alors que cette obligation serait à la charge de l'institution en vertu de l'arrêt du Tribunal du 24 février 2000, Jacobs/Commission (T-82/98, RecFP p. I-A-39 et II-169, points 40 et 41).

73.
    Le requérant souligne également que, selon la décision de rejet explicite de sa réclamation, l'AIPN s'est fondée, pour justifier la nomination de M. VanGinderachter, sur l'appréciation de son activité comme chef d'unité adjoint à partir de 1998 jusqu'à décembre 1999. À ce propos, il souligne que, si le rapport de notation du candidat retenu a effectivement été transmis à l'administration en même temps que le sien, à savoir le 18 février 2000, il convient par conséquent de se demander comment la Commission peut affirmer avoir pris en compte les capacités de M. Van Ginderachter au vu de son dernier rapport, alors que ce document n'était disponible ni à la date de l'avis du CCN ni au moment où la décision de nomination a été prise.

74.
    Le requérant conteste, par ailleurs, l'argument de la Commission selon lequel son rapport de notation portant sur la période 1997-1999 ne contiendrait aucun élément nouveau. En effet, selon lui, ce document comporterait de meilleures appréciations analytiques que le précédent.

75.
    Il estime également que cet argument de la Commission irait à l'encontre de la jurisprudence en vertu de laquelle, en l'absence d'un rapport de notation, il appartient à l'institution défenderesse de rapporter la preuve qu'elle a respecté les garanties accordées par l'article 45 du statut aux fonctionnaires ayant vocation à la promotion et procédé à un examen comparatif des mérites des candidats à celle-ci. À cet égard, il cite l'arrêt Jacobs/Commission, précité (points 39 à 41), dans lequel le Tribunal aurait rappelé, premièrement, que ne peuvent, notamment, être valablement prises en compte par le comité de promotion, en lieu et place du rapport de notation, les déclarations du directeur général, ou de son représentant, devant ledit comité, dans la mesure où celui-ci n'était pas le premier notateur du candidat, deuxièmement, que l'établissement du rapport de notation des fonctionnaires obéit à des procédures précises qui requièrent, au minimum, la participation aussi bien de deux notateurs que du fonctionnaire noté lui-même, troisièmement que ces déclarations devaient être versées au dossier individuel du requérant.

76.
    En l'espèce, le requérant considère que les conditions posées par cette jurisprudence ne sont pas réunies. Il fait remarquer que l'audition de M. Schaub, dont se prévaut la Commission, ne répond ni aux exigences d'objectivité de l'établissement du rapport de notation ni aux exigences procédurales rappelées par le Tribunal dans son arrêt du 5 décembre 1990, Marcato/Commission, (T-82/89, Rec. p. II-735, point 76). Par conséquent, il considère que la Commission ne peut soutenir que M. Schaub a pu valablement donner son avis sur les candidats qu'il connaissait, étant donné qu'il était le notateur d'appel du requérant. Il ajoute que son dernier rapport de notation, qui lui a été transmis le 7 février 2000 par le premier notateur et qu'il a signé le 18 février 2000, n'a pas été communiqué à M. Schaub lors de la procédure de promotion en cause.

77.
    Le requérant rappelle que, dans l'arrêt Jacobs/Commission, précité, le Tribunal aurait également précisé que des éléments d'information ne peuvent pallier l'absence d'un rapport de notation que s'ils répondent à certaines conditions dont il appartient à l'institution défenderesse de prouver la réunion, à savoir,premièrement, qu'ils soient suffisamment objectifs pour permettre un contrôle juridictionnel, deuxièmement, qu'ils contiennent une appréciation des mérites du fonctionnaire effectuée par les personnes responsables de l'établissement de son rapport de notation, troisièmement, qu'ils lui aient été communiqués de manière à assurer le respect des droits de la défense, quatrièmement, qu'ils soient connus par le comité de promotion au moment de son examen comparatif des mérites de tous les candidats.

78.
    Le requérant soutient que, en l'espèce, les conditions posées par cette jurisprudence ne sont pas réunies.

79.
    Plusieurs indices confirmeraient, selon le requérant, l'absence d'un examen comparatif admissible au regard des exigences statutaires. Premièrement, il relève la circonstance selon laquelle la demande officielle de nomination de M. Van Ginderachter a été transmise par M. Schaub avant que ne puisse lui parvenir l'avis écrit du CCN ou, au mieux, l'a été au moment où lui parvenait le procès-verbal de la réunion du CCN, établi le 12 novembre 1999. Deuxièmement, le requérant fait valoir le fait que la décision de rejet explicite de sa réclamation fait expressément référence aux qualités du candidat retenu telles que mentionnées dans son rapport de notation portant sur la période 1997-1999, alors que, selon la même décision de rejet, il est établi que les informations visées dans ce document n'ont été disponibles que le 18 février 2000, date de transmission simultanée de son rapport de notation ainsi que de celui de M. Van Ginderachter à l'administration. Troisièmement, le requérant observe que la Commission soutient que les informations données par M. Schaub ont été décisives, alors qu'en vertu de la jurisprudence elles ne peuvent être valablement prises en compte. Enfin, quatrièmement, il s'interroge sur la teneur des déclarations de M. Schaub devant le CCN, dans la mesure où celui-ci n'était pas le premier notateur du candidat. En outre, ces déclarations orales devraient, selon le requérant, être versées à son dossier individuel en vertu de la jurisprudence issue de l'arrêt Jacobs/Commission, précité, ce qui n'est pas le cas en l'espèce. Le requérant souligne également que, à la date où M. Schaub a communiqué son point de vue sur les candidats, il n'avait pas connaissance des appréciations exceptionnellement élogieuses portées par le premier notateur quant à sa manière d'exercer la fonction de chef d'unité avec attribution de l'intérim A 3 ou en tant que chef d'unité adjoint.

80.
    Le requérant estime qu'au vu de ces indices il incombe à l'AIPN de faire la preuve, par des éléments objectifs susceptibles de faire l'objet d'un contrôle juridictionnel, qu'elle a respecté les garanties prévues à l'article 45 du statut accordées aux fonctionnaires ayant vocation à la promotion.

81.
    En troisième lieu, se référant à la jurisprudence du Tribunal en vertu de laquelle «la seule affirmation, énoncée de façon purement abstraite et non étayée par une quelconque pièce figurant dans le dossier produit devant le Tribunal, selon laquelle le dossier concernant l'avis de vacance [...] a permis à l'AIPN de comparer lesmérites des candidats et [...] cette dernière a effectivement procédé à cet examen, ne saurait être considérée comme suffisante pour démontrer que l'AIPN a réellement procédé, en l'espèce, à un examen comparatif des mérites des candidats» (arrêt Schönherr/CES, précité, point 26), le requérant fait remarquer que, en l'espèce, il est impossible de déterminer si l'AIPN s'est véritablement livrée à la comparaison des mérites des différents postulants, dans les conditions prévues à l'article 45 du statut, ou si elle a retenu, sans examen ni observation, la liste proposée, selon lui dans des conditions irrégulières, par le CCN. Le requérant soutient que ni le CCN ni l'AIPN n'ont reçu communication des informations de la nature de celles requises par la jurisprudence pour pouvoir procéder à une appréciation admissible des titres et mérites des différents candidats. Il fait valoir notamment que la décision de rejet explicite de sa réclamation se réfère au contenu du rapport de notation portant sur la période 1997-1999 du candidat nommé, tout en admettant qu'au moment de la nomination ce rapport n'était à la disposition ni du CCN ni de l'AIPN. Le requérant souligne en particulier que rien n'indique que le CCN et l'AIPN aient pris en compte la longue expérience qu'il aurait acquise en matière d'application des articles 81 CE et 82 CE.

82.
    Le requérant soutient qu'il y a, à l'évidence, une erreur d'appréciation et une absence de comparaison des mérites des candidats et demande au Tribunal d'inviter la Commission à produire les dossiers de ceux-ci, les procès-verbaux de la réunion du CCN et tout autre document de nature à étayer le caractère raisonnable de la décision attaquée.

83.
    La Commission soutient que les griefs et arguments du requérant ne sont pas fondés.

- Appréciation du Tribunal

84.
    Dans le cadre de son deuxième moyen, pris de la violation de l'article 45 du statut, d'une erreur manifeste d'appréciation, de la violation de la procédure de promotion et de la violation du principe d'égalité de traitement, le requérant formule différents griefs regroupés en trois branches portant sur la régularité, respectivement, de l'avis de vacance, de la procédure de promotion et de l'examen comparatif des mérites.

85.
    S'agissant de la première branche du deuxième moyen, relative au prétendu vice affectant l'avis de vacance, il convient de rappeler tout d'abord que, selon une jurisprudence constante, le rôle essentiel de l'avis de vacance est d'informer les intéressés d'une façon aussi exacte que possible de la nature des conditions requises pour occuper l'emploi dont il s'agit, afin de les mettre en mesure d'apprécier s'il y a lieu de faire acte de candidature (arrêt de la Cour du 7 février 1990, Müllers/CES, C-81/88, Rec. p. I-249, point 20, et arrêt du Tribunal du 11 décembre 1991, Frederiksen/Parlement, T-169/89, Rec. p. II-1403, point 67).

86.
    Force est de constater que, en l'espèce, l'avis de vacance a rempli cette fonction essentielle, puisqu'il a permis au requérant de faire acte de candidature pour le poste en question.

87.
    Il convient de rappeler, ensuite, que l'avis de vacance a également pour fonction de fixer le cadre de la légalité au regard duquel l'AIPN procédera à l'examen comparatif des mérites des candidats prévu par l'article 45, paragraphe 1, du statut (arrêt du 17 mai 1995, Benecos/Commission, précité, point 18).

88.
    À cet égard, il y a lieu de relever qu'il ne ressort pas du dossier, et le requérant ne le soutient d'ailleurs pas, que sa candidature aurait été écartée par l'AIPN sur la base de conditions ne figurant pas dans l'avis de vacance, ni, d'une manière plus générale, que l'AIPN aurait pris en considération, lors de l'examen des candidatures, d'autres conditions que celles figurant dans l'avis de vacance. De même, le requérant n'a pas établi, et il ne ressort pas du dossier, que le candidat finalement retenu, M. Van Ginderachter, ne satisfaisait pas aux conditions requises par l'avis de vacance. Dans ces conditions, il n'apparaît pas que l'AIPN n'a pas respecté le cadre de légalité fixé par l'avis de vacance.

89.
    Le requérant prétend cependant que l'avis de vacance est à ce point laconique qu'il n'a pas permis à l'AIPN d'effectuer un examen comparatif des mérites des différents candidats.

90.
    Il a certes été jugé, à cet égard, que l'AIPN ne respecte pas le cadre de la légalité si elle ne s'avise des conditions particulières requises pour occuper l'emploi à pourvoir qu'après la publication de l'avis de vacance, au vu des candidats qui se sont présentés, et si elle prend en considération, lors de l'examen des candidatures, d'autres conditions que celles qui figurent dans l'avis de vacance, une telle démarche privant, en effet, l'avis de vacance du rôle essentiel qu'il doit assumer dans la procédure de recrutement (arrêt Wenk/Commission, précité, point 25). Toutefois, en l'espèce, ainsi qu'il vient d'être constaté au point 88 ci-dessus, il n'apparaît pas que l'AIPN ait écarté la candidature du requérant ou fondé le choix du candidat retenu sur la base de conditions ne figurant pas dans l'avis de vacance. Le grief tiré du défaut de précision de l'avis de vacance, à le supposer fondé, est, dès lors, dépourvu de pertinence.

91.
    En outre, et en tout état de cause, force est de constater que l'avis de vacance ne peut être considéré comme étant à ce point imprécis qu'il n'aurait pas permis à l'AIPN d'effectuer une comparaison des mérites respectifs des différents candidats.

92.
    Il convient de rappeler, premièrement, à cet égard, que l'AIPN dispose d'une large marge d'appréciation pour déterminer les conditions qu'elle estime être requises pour un emploi déterminé.

93.
    Il y a lieu de constater, deuxièmement, que l'avis de vacance a indiqué que le recrutement serait effectué au grade A 4/A 5 et a précisé qu'il s'agissait d'un emploi de chef de l'unité 2 de la direction F de la DG «Concurrence». L'avis de vacance mentionne également, de façon explicite, qu'était exigée la capacité de diriger et de coordonner les travaux de l'unité en question.

94.
    De même, si, ainsi que le souligne le requérant, l'avis de vacance ne mentionne pas expressément le caractère hautement spécialisé du travail relatif à la mise en oeuvre des articles 81 CE et 82 CE, il ne fait cependant guère de doute que le travail de l'unité consiste dans l'application des règles de concurrence et que la connaissance de celles-ci était dès lors requise. La Commission a d'ailleurs confirmé cette lecture de l'avis de vacance dans la décision explicite de rejet de la réclamation.

95.
    En outre, l'examen comparatif des mérites des candidats aux fins de pourvoir à un emploi de chef d'unité peut valablement se faire sans tenir compte du domaine d'activités dans lequel ces emplois doivent s'exercer et en prenant seulement en considération les qualités intrinsèques des candidats, et notamment leur capacité à diriger une unité administrative importante.

96.
    Il résulte de ce qui précède que la première branche du deuxième moyen, tendant à soutenir que la Commission se serait placée dans une situation ne lui permettant pas de procéder à un examen comparatif des mérites des candidats, doit être rejetée comme non fondée.

97.
    Il convient d'ailleurs d'observer que, sous couvert du prétendu défaut de l'avis de vacance de poser des conditions relatives à la capacité à diriger et à la connaissance des règles en matière de concurrence, le requérant conteste en réalité que ces exigences n'ont pas conduit à retenir sa candidature plutôt que celle de M. Van Ginderachter. Dans cette mesure, ce grief ne concerne pas l'avis de vacance, mais une prétendue erreur manifeste d'appréciation. Ce grief sera examiné ci-après à l'occasion de l'examen de la troisième branche du présent moyen.

98.
    Dans le cadre de la deuxième branche du deuxième moyen, relative à la prétendue irrégularité de son dossier personnel et de la procédure de promotion suivie, le requérant formule, en substance, trois griefs.

99.
    En premier lieu, le grief selon lequel, à défaut d'avoir précisé dans l'avis de vacance les exigences et qualifications requises pour le poste à pourvoir, le CCN n'a pu effectuer un examen comparatif des mérites doit, ainsi qu'il a été jugé ci-dessus, être rejeté. En effet, il ressortait à suffisance de droit des termes de l'avis de vacance et de la pratique constante des institutions pour les emplois de cette nature que l'examen comparatif des mérites devait être fondé sur la capacité à diriger et à coordonner une équipe, sur une certaine connaissance de l'application des règles de concurrence et, plus généralement, sur les qualités professionnelleset personnelles des candidats. Il s'ensuit que tant le CCN que l'AIPN ont été pleinement en mesure d'examiner les candidatures vis-à-vis des exigences posées par l'avis de vacance.

100.
    En deuxième lieu, force est de constater que le grief pris de l'audition de M. Schaub par le CCN est non fondé. En effet, il ressort des considérants précédant la décision portant création du CCN ainsi que du compte rendu de la première réunion de cette instance que, dans les procédures de nomination, le CCN entend à chaque fois le directeur général de la direction générale dans laquelle la nomination doit intervenir. Le Tribunal a d'ailleurs déjà jugé (arrêt Wenk/Commission, précité, point 58) que l'audition du directeur général de la direction générale dont relève le poste à pourvoir participait à la procédure de comparaison effective et suffisante des mérites des candidats. Il est constant que, en l'espèce, le directeur général concerné était M. Schaub et que, conformément aux règles de fonctionnement du CCN, il a été entendu par le CCN quant aux qualifications requises pour le poste à pourvoir et quant aux éléments à prendre en compte dans l'appréciation des mérites des candidats.

101.
    La circonstance selon laquelle, depuis la réforme de janvier 1998, portant décentralisation des mesures de promotion et de nomination, les directeurs généraux agissent en qualité d'AIPN, ne supprime pas l'obligation, et certainement pas la possibilité, pour le CCN d'entendre le directeur général concerné. L'audition du directeur général concerné a pour objet d'informer le CCN quant aux qualifications requises pour le poste à pourvoir et quant à l'appréciation des mérites des candidats, ce qui n'altère pas l'indépendance du CCN pour adopter son avis ni celle dudit directeur général, en sa qualité d'AIPN, pour adopter ultérieurement la décision définitive. Le fait que, à la suite de la réforme, le directeur général concerné ait été habilité à prendre, après consultation du président de la Commission et de deux autres membres de celle-ci, les décisions de nomination n'a pas modifié la nature et la raison d'être de son audition par le CCN.

102.
    En tout état de cause, à supposer que, de lege ferenda, il puisse éventuellement être jugé souhaitable que le CCN, chargé de rendre un avis indépendant et impartial à l'AIPN, ne détermine pas son avis en recueillant l'opinion de la même AIPN, il n'en reste pas moins que les textes relatifs au CCN n'ont pas été modifiés depuis la réforme. Or, dans la mesure, notamment, où la consultation du CCN par l'AIPN ne résulte pas d'une disposition statutaire, mais constitue une simple procédure que la Commission s'est imposée à elle-même, il ne saurait être considéré qu'elle avait l'obligation de modifier les règles de fonctionnement du CCN et que l'audition du directeur général concerné par le CCN est illégale et de nature à vicier la procédure de promotion. En outre, les considérants précédant la décision portant création du CCN prévoient que ledit CCN a la faculté d'entendre d'autres fonctionnaires, ce qui montre qu'il est libre de consulter n'importe quel fonctionnaire, et donc le directeur général concerné y compris, sans que cela puisseêtre de nature à vicier la procédure de promotion. Dès lors, même à supposer - quod non - que le CCN n'avait pas l'obligation d'auditionner M. Schaub, il en avait, à tout le moins, la faculté.

103.
    Enfin, force est de constater que le requérant n'a pas établi que l'audition du directeur général par le CCN a porté atteinte à l'indépendance de l'AIPN et à son impartialité dans l'adoption de la décision de nomination attaquée.

104.
    Il s'ensuit que le grief pris de l'audition, par le CCN, du directeur général de la DG «Concurrence» doit être rejeté.

105.
    En troisième lieu, le requérant fait valoir que ni son dernier rapport de notation portant sur la période 1997-1999 ni aucune information pertinente susceptible d'en tenir lieu n'aurait été pris en compte par le CCN et l'AIPN.

106.
    Il est de jurisprudence bien établie (arrêt de la Cour du 17 décembre 1992, Moritz/Commission, C-68/91 P, Rec. p. I-6849, point 16; arrêts du Tribunal du 16 décembre 1993, Moat/Commission, T-58/92, Rec. p. II-1443, point 59, et Jacobs/Commission, précité, point 34) que le rapport de notation constitue un élément d'appréciation indispensable chaque fois que la carrière d'un fonctionnaire est prise en considération en vue de l'adoption d'une décision concernant sa promotion.

107.
    En l'espèce, il est constant que le CCN disposait du rapport de notation du requérant portant sur la période 1995-1997, lequel a été inséré dans le dossier personnel du requérant le 4 octobre 1999, après que le notateur d'appel a rendu sa décision sur l'appel interjeté contre lui par le requérant.

108.
    En revanche, le dernier rapport de notation du requérant portant sur la période 1997-1999 n'était effectivement pas à la disposition du CCN. Ce rapport de notation a été établi le 24 novembre 1999 et transmis au requérant le 18 février 2000.

109.
    Force est de constater à cet égard que, conformément à l'article 7 des dispositions générales d'exécution de l'article 43 du statut, le rapport de notation définitif du requérant devait être établi pour le 31 décembre 1999 au plus tard même en cas de saisine du notateur d'appel ou du comité paritaire. Or, le CCN ayant procédé à l'examen des candidatures et émis son avis le 11 novembre 1999 et l'AIPN, après réexamen, ayant adressé une demande officielle de M. Van Ginderachter le 12 novembre 1999, l'essentiel de la procédure de nomination s'est déroulée avant le 31 décembre 1999, seule la décision formelle de nomination étant intervenue le 6 janvier 2000. À cette époque, il n'y avait donc aucun retard dans l'établissement du rapport de notation du requérant portant sur la période 1997-1999.

110.
    Il s'ensuit que l'absence du rapport de notation portant sur la période 1997-1999 du dossier du requérant ne constituait pas une irrégularité.

111.
    En tout état de cause, et ainsi que le requérant le souligne lui-même, il résulte d'une jurisprudence constante qu'on ne peut exiger ni du comité de promotion ni de l'AIPN de retarder une décision de promotion pour le simple motif que le dernier rapport de notation d'un des candidats ferait défaut. Dans un tel cas, l'AIPN n'est pas tenue de se baser uniquement sur les rapports de notation, mais peut également fonder son appréciation sur d'autres bases telles que des informations sur sa situation administrative et personnelle (arrêt du Tribunal du 25 novembre 1993, X/Commission, T-89/91, T-21/92 et T-89/92, Rec. p. II-1235). En l'espèce, le CCN et l'AIPN disposaient du dossier personnel du requérant, qui contenait notamment le rapport de notation pour la période du 1er juillet 1995 au 30 juin 1997 ainsi que son curriculum vitae décrivant les différents postes qu'il avait occupés. De plus, le CCN a entendu le directeur général du requérant qui lui a fait part de son jugement sur les candidats qui se sont présentés au regard des caractéristiques du poste à pourvoir.

112.
    Il s'ensuit que, contrairement à ce que prétend le requérant, le CCN et l'AIPN disposaient d'informations suffisantes le concernant, leur permettant d'effectuer une comparaison utile de ses mérites avec ceux des autres candidats.

113.
    En conséquence, la deuxième branche du deuxième moyen, relative à la prétendue irrégularité du dossier personnel du requérant et de la procédure de promotion suivie, doit également être rejetée comme non fondée.

114.
    Dans le cadre de la troisième branche du deuxième moyen, le requérant soutient, en premier lieu, que rien n'établit que l'AIPN a apprécié elle-même les mérites des différents candidats au lieu de se contenter d'adopter sans examen la liste proposée dans des conditions irrégulières par le CCN.

115.
    Il convient de rappeler à cet égard, d'abord, qu'il a été constaté ci-dessus que le CCN avait à sa disposition pour établir son avis les informations nécessaires pour apprécier les titres et mérites respectifs des différents candidats et que son avis a été émis dans des conditions régulières.

116.
    Il y a lieu de relever, ensuite, que, dans sa note d'observations produite par la Commission à la suite des questions écrites posées par le Tribunal, le directeur général de la DG «Concurrence», M. Schaub, a relaté le déroulement de la procédure de nomination contestée. Il a notamment précisé avoir effectué une première analyse des mérites relatifs des candidats et avoir procédé à un réexamen de la situation à la suite de l'avis du CCN, avant l'adoption de la décision de nomination. Le requérant n'a fourni aucun élément de nature à infirmer ces affirmations. Au contraire, le dossier devant le Tribunal contient notamment l'avis du CCN, établi in tempore non suspecto, duquel il ressort qu'avant d'adopter son avis le CCN a procédé à l'audition du directeur général de la DG «Concurrence» et à un examen comparatif des mérites des candidats.

117.
    Le grief tiré d'un prétendu défaut d'examen comparatif des mérites doit donc être rejeté comme non fondé.

118.
    En deuxième lieu, le requérant soutient que l'AIPN a commis une erreur manifeste d'appréciation.

119.
    Il convient de rappeler à cet égard, d'abord, que, selon une jurisprudence constante, pour évaluer l'intérêt du service ainsi que les mérites à prendre en considération dans le cadre de la décision prévue à l'article 45 du statut, l'AIPN dispose d'un large pouvoir d'appréciation et, dans ce domaine, le juge communautaire doit se limiter à la question de savoir si, eu égard aux voies et moyens qui ont pu conduire l'administration à son appréciation, celle-ci s'est tenue dans des limites raisonnables et n'a pas usé de son pouvoir de manière manifestement erronée (arrêt de la Cour du 21 avril 1983, Ragusa/Commission, 282/81, Rec. p. 1245, point 9, et ordonnance de la Cour du 13 décembre 2001, Conseil/McAuley, C-309/01 P, non publiée au Recueil, point 18). Le Tribunal ne peut substituer son appréciation des qualifications du candidat nommé à celle de l'AIPN (arrêt du Tribunal du 19 septembre 2001, E/Commission, T-152/00, RecFP p. I-A-179 et II-813, point 29).

120.
    Il y a lieu d'observer, ensuite, que le requérant se borne, en réalité, à déduire la prétendue erreur manifeste d'appréciation du seul fait qu'il n'a pas été nommé.

121.
    Il ne saurait certes être nié que le requérant, qui est affecté à la DG «Concurrence» depuis son entrée au service de la Commission en 1973, possède une longue expérience dans l'application des articles 81 CE et 82 CE. De même, la circonstance selon laquelle il avait exercé ad interim les fonctions de chef d'unité au sein de deux unités de la DG «Concurrence» n'est pas dénuée de pertinence. Les mérites du requérant ne sont d'ailleurs pas contestés par la Commission et le CCN, qui, tout en proposant le candidat finalement nommé, a précisément noté ses bonnes qualifications pour l'emploi en cause.

122.
    Toutefois, le fait qu'un fonctionnaire ait des mérites évidents et reconnus n'exclut pas, dans le cadre de l'examen comparatif des mérites des candidats, que d'autres fonctionnaires aient des mérites supérieurs (arrêt de la Cour du 13 décembre 2001, Cubero Vermurie/Commission, C-446/00 P, Rec. p. I-10315, point 21). En particulier, il a été jugé que, pour un candidat, ni le fait d'avoir assuré l'intérim dans l'emploi concerné ni une longue période de service dans le grade inférieur ne constituent des éléments d'appréciation décisifs pouvant l'emporter sur l'intérêt du service, qui constitue le critère déterminant pour le choix parmi les candidats à une promotion (arrêt du Tribunal du 6 juillet 1999, Séché/Commission, T-112/96 et T-115/96, RecFP p. I-A-115 et II-623, point 62).

123.
    Il y a lieu d'observer également que les qualifications spécifiques requises ne devant pas nécessairement présenter un lien matériel avec le secteur d'activité de l'unité,l'expérience acquise par M. Van Ginderachter dans d'autres secteurs que celui de l'unité n'apparaît pas en soi notablement moins pertinente que celle du requérant.

124.
    En outre, ainsi que l'a fait valoir la Commission, l'examen comparatif des mérites des candidats aux fins de pourvoir à un emploi de chef d'unité dépend moins du domaine d'activités concerné que des qualités professionnelles et personnelles des candidats (voir, en ce sens, arrêt Müllers/CES, précité).

125.
    Par ailleurs, le fait que l'expérience du requérant soit, en termes quantitatifs, supérieure à celle de M. Van Ginderachter ne saurait suffire à établir que l'AIPN a commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant que les qualités démontrées par M. Van Ginderachter étaient plus pertinentes (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 16 décembre 1999, Cendrowicz/Commission, T-143/98, RecFP p. I-A-273 et II-1341, point 67).

126.
    Il résulte de ce qui précède que, eu égard aux limites du pouvoir de contrôle du Tribunal sur l'appréciation par l'AIPN de l'intérêt du service ainsi que des aptitudes des candidats pour l'emploi en cause, il n'y a pas lieu de considérer que la Commission a commis une erreur manifeste d'appréciation ou ne s'est pas tenue dans des limites raisonnables.

127.
    En troisième lieu, le grief selon lequel M. Van Ginderachter ne possédait pas les compétences requises pour le poste à pourvoir n'est manifestement pas fondé. En se bornant à alléguer, de manière vague, que M. Van Ginderachter n'aurait pu, au mieux, posséder qu'une faible connaissance et disposer de peu d'expérience dans l'application des articles 81 CE et 82 CE, le requérant n'a en effet aucunement démontré que ses connaissances et compétences en la matière étaient insuffisantes au regard des conditions requises par l'avis de vacance. Au contraire, il ressort clairement du curriculum vitae de l'intéressé que celui-ci remplissait les conditions requises par l'avis de vacance. En effet, après avoir assumé durant quatre années les fonctions de référendaire à la Cour de justice, M. Van Ginderachter a exercé de 1990 à 1998 les fonctions d'administrateur à la DG «Concurrence» et est, depuis 1998, chef d'unité adjoint de l'unité 2 «Médias et éditions musicales» de la direction C «Information, communication, multimédias» de la DG «Concurrence». En outre, il a publié une série d'articles portant sur le droit communautaire en général et sur le droit de la concurrence en particulier.

128.
    Il résulte de ce qui précède que la troisième branche du deuxième moyen n'est pas fondée et, par suite, que le deuxième moyen doit être rejeté.

Sur le moyen tiré de la violation de l'article 7 du statut et du détournement de pouvoir

- Arguments des parties

129.
    Le requérant expose que, à la suite de sa candidature à divers emplois vacants de chef d'unité au sein de la DG «Concurrence», il a pu constater que, dans le cadre de deux recours introduits à la date de la présente requête devant le Tribunal et enregistrés sous les numéros T-135/00 et T-136/00, le fonctionnaire nommé n'avait pas pris ses fonctions. Selon lui, cet élément permettrait de penser que le poste n'a pas été attribué dans l'intérêt du service mais dans celui de la personne nommée.

130.
    Des éléments multiples du dossier relatifs à la violation de l'article 45 du statut et de la procédure de promotion ainsi qu'à l'absence de toute motivation de l'acte attaqué accréditeraient, selon le requérant, la thèse d'un détournement de pouvoir. À cet égard, le requérant invoque deux indices. Il allègue, premièrement, le fait qu'il n'ait pas été tenu compte des compétences des différents postulants au regard de l'intérêt du service et des exigences propres à l'emploi à pourvoir. Deuxièmement, il avance le fait que la procédure de nomination a été accélérée - le CCN s'est réuni le 11 novembre 1999 et la nomination a été annoncée publiquement par M. Schaub dans un courrier électronique daté du 18 novembre 1999 - et qu'ainsi elle ne respecterait pas la décision n° 1031 de la Commission, du 23 février 1998, relative à l'exercice des pouvoirs dévolus par le statut à l'AIPN pour le personnel rémunéré sur le budget de fonctionnement, puisque, dans le cadre de la procédure simplifiée prévue au point 9 de cette décision, le pouvoir de l'AIPN détenu par le directeur général n'est exercé qu'après accord du membre de la Commission compétent, du membre de la Commission en charge des questions de personnel et d'administration et du président de la Commission.

131.
    Le requérant fait remarquer que l'indice pris de la précipitation de la procédure serait très sérieusement accrédité par les annexes déposées par la Commission à l'appui de son mémoire en défense. Il fait observer que les événements se sont déroulés de la façon suivante:

-    le CCN s'est réuni le 11 novembre 1999, le procès-verbal de la réunion a été rédigé le 12 novembre et l'avis n° 156 rendu par celui-ci porte la date du 18 novembre 1999;

-    dès le 12 novembre 1999, le directeur général de la DG «Personnel et administration» a demandé à sa DG de procéder à la nomination de M. Van Ginderachter, alors qu'à cette date il ne pouvait disposer de l'avis n° 156, ni probablement du procès-verbal de la réunion du CCN du 11 novembre 1999;

-    le 18 novembre 1999, le directeur général de la DG «Concurrence» a annoncé par courrier électronique la nomination de M. Van Ginderachter alors que l'administration préparait les documents pour obtenir les accords nécessaires pour cette nomination les 2 et 7 décembre 1999;

-    le membre de la Commission en charge des questions de personnel et d'administration, M. Kinnock, a marqué son accord le 8 décembre, leprésident de la Commission, le 10 décembre, le membre de la Commission en charge de la concurrence, M. Monti, le 13 décembre, et la décision de nomination de M. Van Ginderachter portait la date du 6 janvier 2000.

132.
    Le requérant en conclut que la nomination de M. Van Ginderachter a été décidée en fait avant même la rédaction de l'avis du CCN et que les accords donnés ultérieurement n'étaient que de pure forme.

133.
    La Commission estime que ce moyen n'est pas fondé.

- Appréciation du Tribunal

134.
    Selon une jurisprudence constante, la notion de détournement de pouvoir se réfère au fait, pour une autorité administrative, d'avoir usé de ses pouvoirs dans un but autre que celui en vue duquel ils lui ont été conférés. Une décision n'est entachée de détournement de pouvoir que si elle apparaît, sur la base d'indices objectifs, pertinents et concordants, avoir été prise pour atteindre des fins autres que celles excipées (arrêts du Tribunal du 5 juillet 2000, Samper/Parlement, T-111/99, RecFP p. I-A-135 et II-611, point 64, et Séché/Commission, précité, point 139).

135.
    En l'espèce, trois indices sont invoqués par le requérant pour établir que l'attribution de l'emploi en cause à M. Van Ginderachter n'a pas été faite dans l'intérêt du service.

136.
    S'agissant, en premier lieu, de ce qu'il n'aurait pas été tenu compte des compétences des différents candidats au regard de l'intérêt du service, il ressort de l'examen du deuxième moyen, auquel le requérant renvoie d'ailleurs lui-même, que les griefs sur lesquels repose cette allégation ne sont pas fondés.

137.
    En deuxième lieu, si, ainsi que le souligne le requérant, il ne peut certes être nié que la procédure de promotion a été menée avec précipitation, cette circonstance n'est cependant pas de nature à démontrer, à elle seule, que le candidat nommé était déjà connu à l'avance.

138.
    Ainsi qu'il ressort de l'examen des deux moyens précédents, la procédure de promotion suivie en l'espèce n'est entachée d'aucune irrégularité. En particulier, le CCN a émis, le 11 novembre 1999, son avis sur les candidatures à l'emploi en cause, et l'AIPN, après examen de ces candidatures et en tenant compte de l'avis du CCN, a formulé une demande officielle de nomination de M. Van Ginderachter à la DG «Personnel et administration», estimant que ce candidat était le plus qualifié au regard des exigences du poste. Ce n'est que le 6 janvier 2000, après accord du membre de la Commission compétent, du membre de la Commission en charge des questions de personnel et d'administration et du président de la Commission, que M. Van Ginderachter a été nommé au poste à pourvoir. Contrairement aux affirmations du requérant, rien n'indique que le futur titulairede l'emploi était déjà connu et, par ailleurs, l'AIPN a strictement respecté le point 9 des Informations administratives n° 1031 du 23 février 1998, dans la mesure où la décision de nomination de M. Van Ginderachter n'est intervenue qu'après accord du membre de la Commission compétent, du membre de la Commission en charge des questions de personnel et d'administration et du président de la Commission. Ainsi que le relève la Commission dans son mémoire en défense, le requérant cherche à attribuer au courrier électronique du directeur général un caractère décisionnel et un effet juridique qu'il n'a pas. En effet, la description des étapes de la procédure de promotion suivie en l'espèce démontre uniquement que la procédure a été rapide mais non irrégulière.

139.
    Par ailleurs, ainsi qu'il ressort du dossier et de l'examen du deuxième moyen, la Commission n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en nommant M. Van Ginderachter et rien, dans le dossier, n'indique que les qualités et compétences des candidats n'ont pas été appréciées au vu des exigences du poste à pourvoir et que cet examen n'a pas été fait au regard du seul intérêt du service.

140.
    Enfin, force est de constater que la décision de nomination de M. Van Ginderachter a été prise à la suite d'une procédure régulière et comporte, notamment, les visas des membres de la Commission concernés, conformément au point 9 des Informations administratives n° 1031 du 23 février 1998. L'AIPN a donc respecté la procédure établie par le statut et, par conséquent, il ne saurait non plus lui être fait grief d'un quelconque détournement de procédure constitutif d'un détournement de pouvoir.

141.
    Il résulte de ce qui précède qu'aucun des indices avancés par le requérant n'est de nature à établir un détournement de pouvoir et que le moyen doit être rejeté.

Sur la demande en réparation

Arguments des parties

142.
    Le requérant invoque l'existence, d'une part, d'un dommage moral résultant de ce que la Commission aurait recueilli, dans son dossier individuel, des informations irrégulières ou incomplètes et de ce qu'il se serait trouvé dans un état d'incertitude et d'inquiétude quant à son avenir professionnel et, d'autre part, d'un dommage matériel du fait qu'il a été écarté de l'emploi en cause et, partant, de toute chance de promotion.

143.
    S'agissant du préjudice moral, il s'appuie sur la jurisprudence constante (arrêts de la Cour du 14 juillet 1977, Geist/Commission, 61/76, Rec. p. 1419, et du 15 mars 1989, Bevan/Commission, 140/87, Rec. p. 701; arrêt du Tribunal du 8 novembre 1990, Barbi/Commission, T-73/89, Rec. p. II-619), selon laquelle un fonctionnaire qui ne possède qu'un dossier individuel irrégulier et incomplet subit un préjudice moral tenant à l'état d'incertitude et d'inquiétude dans lequel il se trouve quant à son avenir professionnel.

144.
    Le requérant considère qu'en l'espèce il n'a pas été nommé à l'emploi en cause, car l'ensemble de ses titres et mérites n'ont pu être pris en compte en raison des manquements de la Commission. Il estime que son préjudice s'élève, ex aequo et bono, à 120 000 euros.

145.
    Il fait remarquer que sa demande d'octroi de dommages et intérêts aux fins de réparer tant son préjudice moral que son préjudice matériel n'est pas liée, comme le soutient la Commission dans sa défense, à une faute de service, mais est justifiée par le fait que le dommage subi est intimement lié à l'acte faisant grief.

146.
    S'agissant du préjudice matériel, le requérant fait valoir que les irrégularités de la Commission l'ont privé d'une chance de promotion et d'un niveau de rémunération supérieur, mais également d'autres promotions à partir des grades et échelons qu'il aurait, selon lui, dû occuper. Ce préjudice s'élève selon lui ex aequo et bono, sous réserve d'augmentation ou de diminution en cours d'instance, à 25 000 euros.

147.
    La Commission, estimant que la demande en réparation se rapporte non pas à l'acte faisant grief, mais à une prétendue faute de service, soulève l'irrecevabilité de cette demande au motif qu'elle n'a pas fait l'objet de la procédure précontentieuse prévue par le statut. À titre subsidiaire, toutefois, elle estime que cette demande est manifestement non fondée

Appréciation du Tribunal

148.
    Il convient de rappeler que, lorsqu'il existe un lien direct entre le recours en annulation et une action en indemnité, cette dernière peut être déclarée recevable en tant qu'accessoire au recours en annulation sans devoir être nécessairement précédée tant d'une demande invitant l'AIPN à réparer le préjudice prétendument subi que d'une réclamation contestant le bien-fondé du rejet de cette demande (arrêts du Tribunal du 15 juillet 1993, Camara Alloisio e.a./Commission, T-17/90, T-28/91 et T-17/92, Rec. p. II-841, point 46, et du 6 juillet 1995, Ojha/Commission, T-36/93, RecFP p. I-A-161 et II-497, point 115).

149.
    En l'espèce, contrairement à ce que soutient la Commission, la demande en réparation ne repose pas sur une faute de service indépendante, mais présente un lien direct avec la demande d'annulation de la décision de rejet de la candidature du requérant et de la décision de nomination de M. Van Ginderachter. En effet, le requérant demande réparation du préjudice résultant des manquements commis par la Commission dans le cadre de la procédure de nomination à l'encontre de laquelle sont dirigées les conclusions en annulation. Dans cette mesure, la demande en réparation est étroitement liée au recours en annulation, de sorte qu'elle est recevable.

150.
    Selon une jurisprudence constante, l'engagement de la responsabilité non contractuelle de la Communauté suppose la réunion d'un ensemble de conditionstenant à l'illégalité du comportement reproché à l'institution concernée, à la réalité du dommage et à l'existence d'un lien de causalité entre le comportement allégué et le préjudice invoqué (arrêts du Tribunal du 21 février 1995, Moat/Commission, T-506/93, RecFP p. II-147, points 46 à 49, et du 28 novembre 2002, Scan Office Design/Commission, T-40/01, non encore publié au Recueil, point 18).

151.
    La demande en annulation étant non fondée, la demande du requérant en réparation du préjudice matériel prétendument subi du fait qu'il a été écarté de l'emploi en cause doit également être rejetée.

152.
    S'agissant de la demande d'indemnisation du préjudice moral subi, si l'absence de rapport de notation est susceptible de provoquer chez l'intéressé un état d'incertitude et d'inquiétude quant à son avenir professionnel, générateur de préjudice moral pouvant donner lieu à indemnisation (arrêts Geist/Commission, Bevan/Commission et Barbi/Commission, précités), il ressort cependant de l'examen du deuxième moyen que le rapport de notation pertinent portait sur la période 1995-1997 et que celui-ci avait été établi et joint au dossier personnel du requérant en temps utile pour être pris en considération par le CCN et l'AIPN. La demande d'indemnisation du préjudice moral prétendument subi résultant du dossier personnel incomplet doit dès lors être rejetée.

153.
    En revanche, l'absence de réponse à la réclamation a causé, en l'espèce, un préjudice moral particulier au requérant et l'a contraint à introduire une procédure judiciaire pour connaître la motivation complète de la décision portant rejet de sa candidature.

154.
    Dans ces circonstances, le Tribunal, évaluant le préjudice subi ex aequo et bono, estime que l'allocation d'un montant de 2 500 euros constitue une indemnisation adéquate du requérant.

155.
    Par ailleurs, la Commission ayant produit l'ensemble des documents relatifs à la procédure administrative, dont le requérant avait demandé la production, il n'y a pas lieu de statuer sur cette demande devenue sans objet.

Sur les dépens

156.
    Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens, étant entendu que, en vertu de l'article 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci. Selon l'article 87, paragraphe 3, dudit règlement, le Tribunal peut répartir les dépens ou décider que chaque partie supporte ses propres dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs, ou pour des motifs exceptionnels. Le Tribunal peut condamner une partie, mêmegagnante, à rembourser à l'autre partie les frais qu'elle lui a fait exposer et qui sont jugés frustratoires ou vexatoires.

157.
    Dans l'affaire T-376/00, le recours étant irrecevable, il y a lieu de décider que chacune des parties supportera ses propres dépens.

158.
    En revanche, dans l'affaire T-338/00, la Commission ayant succombé en ses conclusions en indemnité et eu égard au fait que la décision était entachée d'une insuffisance de motivation et que la Commission s'est, à tort, abstenue de répondre à la réclamation du requérant, le forçant ainsi à introduire le présent recours pour obtenir un complément de motivation, il y a lieu de condamner la Commission à supporter l'ensemble des dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête:

1)    Les affaires T-338/00 et T-376/00 sont jointes.

2)    Le recours dans l'affaire T-376/00 est rejeté comme irrecevable.

3)    Dans l'affaire T-338/00, la Commission est condamnée à verser au requérant la somme de 2 500 euros.

4)    Le recours dans l'affaire T-338/00 est rejeté pour le surplus.

5)    Dans l'affaire T-376/00, chacune des parties supportera ses propres dépens.

6)    Dans l'affaire T-338/00, la Commission est condamnée aux dépens.

Jaeger
Lenaerts
Azizi

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 12 décembre 2002.

Le greffier

Le président

H. Jung

K. Lenaerts


1: Langue de procédure: le français.