Language of document : ECLI:EU:T:2020:423

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

23 septembre 2020 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure de nullité – Marque de l’Union européenne figurative VERONESE – Marque de l’Union européenne verbale antérieure VERONESE – Motif relatif de refus – Absence de risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), et article 60, paragraphe 1, sous a), du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑608/19,

Veronese Design Company Ltd, établie à Kowloon (Hong Kong), représentée par Me B. Lafont, avocate,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. V. Ruzek, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Veronese SAS, établie à Paris (France), représentée par Me S. Herrburger, avocate,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la cinquième chambre de recours de l’EUIPO du 18 juin 2019 (affaire R 2434/2018-5), relative à une procédure de nullité entre Veronese et Veronese Design Company,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de Mmes V. Tomljenović, présidente, P. Škvařilová‑Pelzl et M. I. Nõmm (rapporteur), juges,

greffier : Mme R. Ukelyte, administratrice,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 6 septembre 2019,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 3 décembre 2019,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 14 novembre 2019,

à la suite de l’audience du 17 juin 2020,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 18 août 2010, la requérante, Veronese Design Company Ltd, a obtenu auprès de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)], l’enregistrement, sous le numéro 8 831 844, de la marque de l’Union européenne figurative suivante :

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2        Cet enregistrement avait été demandé le 25 janvier 2010. Les produits et services pour lesquels cette marque a été enregistrée relèvent des classes 6, 19, 20, 21 et 35 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 6 : « Figurines ornementales en métaux communs » ;

–        classe 19 : « Figurines à usage décoratif en pierre, en béton ou en marbre » ;

–        classe 20 : « Figurines ornementales en bois, cire, plâtre ou matières plastiques » ;

–        classe 21 : « Figurines décoratives en porcelaine, en terre cuite ou en verre » ;

–        classe 35 : « Services d’agences d’import-export ».

3        Le 14 novembre 2014, l’intervenante, Veronese SAS,  a présenté une demande de nullité de la marque contestée, pour les produits relevant des classes 6, 19, 20 et 21. Ladite demande de nullité ne concernait pas les services relevant de la classe 35. Cette demande était fondée sur le motif visé à l’article 53, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 [devenu article 60, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001], lu en combinaison avec l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001].

4        À l’appui de cette demande en nullité, l’intervenante a invoqué la marque de l’Union européenne verbale antérieure VERONESE, déposée le 15 septembre 2009 et enregistrée le 8 mars 2010 sous le numéro 8 549 875, pour des produits relevant des classes 11, 20 et 21 et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 11 : « Abat-jour, porte-abat-jour, ampoules d’éclairage, ampoules électriques, tubes à décharges électriques pour l’éclairage, diffuseurs (éclairage), appareils et installations d’éclairage, lampes d’éclairage, filaments de lampes électriques, lampadaires, lampes électriques, douilles de lampes électriques, lampes électriques pour arbres de Noël, globes de lampes, manchons de lampes, réflecteurs de lampes, tubes de lampes, verres de lampes, lampions, lanternes d’éclairage, lanternes vénitiennes, lustres, plafonniers, torches pour l’éclairage, tubes lumineux pour l’éclairage » ;

–        classe 20 : « Cadres ; miroirs (glaces) ; panneaux décoratifs ; appliques murales décoratives (non en matières textiles) » ;

–        classe 21 : « Bougeoirs ; candélabres (chandeliers) ; carafes ; chandeliers ; coupes à fruits ; cristaux (verrerie) ; verre émaillé ; enseignes en porcelaine ou en verre ; éteignoirs ; faïence ; fibres de silice vitrifiée non à usage textile ; fibres de verre autres que pour l’isolation ou à usage textile ; flacons ; brosses pour verres de lampes ; verres opales ; opalines ; vaporisateurs à parfum ; vases ; verre auquel sont incorporés de fins conducteurs électriques ; verre peint ; verres (récipients) ; verres à boire ».

5        Par décision du 16 octobre 2018, la division d’annulation a accueilli la demande en nullité dans son intégralité.

6        Le 12 décembre 2018, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, contre la décision de la division d’annulation.

7        Par décision du 18 juin 2019 (ci-après la « décision attaquée »), la cinquième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours de la requérante.

8        En premier lieu, la chambre de recours a considéré que le public pertinent était le grand public de l’Union dont le degré d’attention variait de moyen à élevé en fonction du prix et des conditions de vente des produits en cause.

9        En deuxième lieu, la chambre de recours a conclu que les signes en conflit disposaient d’un degré de similitude moyen sur le plan visuel et qu’ils étaient identiques sur le plan phonétique. En ce qui concerne la comparaison des signes sur le plan conceptuel, elle a retenu l’existence d’une similitude moyenne sur ce plan pour la partie du public pertinent qui verra dans le terme « veronese » une référence à la ville de Vérone en Italie ou au peintre Paolo Cariari, dit Veronese, et à l’absence de similitude pour le reste du public pertinent.

10      En troisième lieu, la chambre de recours a retenu l’existence d’une similitude au moins moyenne entre les produits visés par la marque contestée, compris dans les classes 6, 19, 20 et 21, et certains produits désignés par la marque antérieure, à savoir les « abat-jour, porte-abat-jour, lampes d’éclairage, lampadaires, lampes électriques, lustres et plafonniers » relevant de la classe 11 ainsi que les « cadres ; miroirs (glaces) ; panneaux décoratifs, appliques murales décoratives (non en matières textiles) », relevant de la classe 20, et les « bougeoirs, candélabres (chandeliers), carafes, chandeliers, coupes à fruits, cristaux (verrerie), verre émaillé, enseignes en porcelaine ou en verre, éteignoir, faïence, flacons, vaporisateurs à parfums, vases » relevant de la classe 21.

11      En quatrième lieu, la chambre de recours a relevé qu’aucun des éléments constituant la marque contestée ne pouvait être considéré comme dominant son impression d’ensemble, mais que l’élément représentant une licorne devait être considéré comme étant d’une importance moindre dans ladite impression d’ensemble. S’agissant du caractère distinctif du mot « veronese » constituant la marque antérieure ainsi que l’élément verbal de la marque contestée, elle a estimé que celui-ci n’était pas affaibli par une éventuelle association avec le verre de Murano ou avec un type de couleur verte appelée « veronese ».

12      En cinquième lieu, la chambre de recours a retenu que la marque antérieure disposait d’un caractère distinctif intrinsèque faible en raison de son association avec la ville de Vérone, qui la rendait moyennement descriptive de la possible origine géographique des produits.

13      En sixième lieu, la chambre de recours, dans le cadre de son appréciation globale du risque de confusion, a considéré qu’un tel risque devait être retenu, le public pertinent étant susceptible de percevoir la marque contestée comme une variante de la marque antérieure.

14      En septième lieu, la chambre de recours a estimé que les éléments de preuve avancés par la requérante ne permettaient pas de démontrer une coexistence pacifique des marques en conflit sur le territoire pertinent.

15      Enfin, en huitième lieu, en réponse à un argument de la requérante, elle a rappelé ne pas être liée par une décision intervenue au niveau d’un État membre.

 Conclusions des parties

16      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        constater que la requête, ainsi que ses annexes, sont recevables ;

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

17      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

18      L’intervenante conclut à ce que le Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        confirmer la décision attaquée ;

–        condamner la requérante aux entiers dépens.

 En droit

19      À titre liminaire, il convient de relever que, par son premier chef de conclusions, l’intervenante conclut au rejet du recours et, par son deuxième chef de conclusions, demande au Tribunal de confirmer la décision attaquée.

20      Étant donné que « confirmer » la décision attaquée équivaut à rejeter le recours, il y a lieu de regarder les deux premiers chefs de conclusions de l’intervenante comme tendant uniquement au rejet du recours [voir, en ce sens, arrêt du 13 décembre 2016, Apax Partners/EUIPO – Apax Partners Midmarket (APAX), T‑58/16, non publié, EU:T:2016:724, point 15 et jurisprudence citée].

21      À l’appui de son recours, la requérante avance un moyen unique, tiré de la violation de l’article 60, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 1, sous b), de ce même règlement.

22      L’EUIPO et l’intervenante concluent au rejet du moyen.

23      En vertu de l’article 60, paragraphe 1, sous a), lu en combinaison avec l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, la marque de l’Union européenne est déclarée nulle, sur demande du titulaire d’une marque antérieure, lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

24      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

25      Lorsque la protection de la marque antérieure s’étend à l’ensemble de l’Union, il y a lieu de prendre en compte la perception des marques en conflit par le consommateur des produits ou des services en cause sur ce territoire. Toutefois, il convient de rappeler que, pour refuser l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne, il suffit qu’un motif relatif de refus au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 existe dans une partie de l’Union [voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 76 et jurisprudence citée].

26      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’apprécier si la chambre de recours a, à juste titre, estimé qu’il existait, en l’espèce, un risque de confusion entre les marques en conflit.

 Sur la définition du public pertinent et de son niveau d’attention

27      Selon la jurisprudence, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, EU:T:2007:46, point 42 et jurisprudence citée].

28      En l’espèce, la protection de la marque antérieure s’étend à l’ensemble de l’Union. C’est donc la perception des marques en conflit par le consommateur des produits en cause sur l’ensemble de ce territoire qu’il convient de considérer.

29      La chambre de recours a, au point 22 de la décision attaquée, fait sienne l’appréciation de la division d’annulation selon laquelle les produits en cause s’adressaient au grand public dont le degré d’attention pouvait varier de moyen à élevé en fonction de leur prix et de leur condition d’achat. Une telle définition du public pertinent – qui n’est d’ailleurs pas contestée par la requérante – doit être avalisée.

30      Toutefois, dans la mesure où, en application d’une jurisprudence constante, lorsque le public pertinent est composé de deux catégories de consommateurs ayant chacune un niveau d’attention différent, le public ayant le niveau d’attention le moins élevé doit être pris en considération [voir arrêt du 20 mai 2014, Argo Group International Holdings/OHMI – Arisa Assurances (ARIS), T‑247/12, EU:T:2014:258, point 29 et jurisprudence citée], il convient d’apprécier l’existence éventuelle d’un risque de confusion entre les marques en conflit par référence à un public pertinent disposant d’un degré d’attention moyen à l’occasion de l’acquisition des produits en cause.

 Sur la comparaison des produits en cause

31      La chambre de recours a retenu, aux points 52 à 62 de la décision attaquée, qu’il existait une similitude au moins moyenne entre les produits visés par la marque contestée et certains produits désignés par la marque antérieure relevant des classes 11, 20 et 21.

32      D’une part, aux points 51 et 59 de la décision attaquée, la chambre de recours a rappelé que les produits visés par la marque contestée étaient tous constitués de figurines de décoration figurant dans des classes différentes selon le matériel qui les composait et que leur but principal était la décoration.

33      D’autre part, au point 54 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que les « abat-jour, porte-abat-jour, lampes d’éclairage, lampadaires, lampes électriques, lustres et plafonniers » relevant de la classe 11, désignés par la marque antérieure, pouvaient être constitués du même matériel et qu’ils partageaient le même objectif de décorer que les produits visés par la marque contestée. Aux points 55 à 57 de la décision attaquée, elle a retenu que les produits relevant de la classe 20 désignés par la marque antérieure présentaient la même finalité décorative que les produits visés par la marque contestée et pouvaient être disposés en harmonie avec ceux-ci. En substance, la même conclusion a été tirée, au point 61 de la décision attaquée, s’agissant des « bougeoirs, candélabres (chandeliers), carafes, chandeliers, coupes à fruits, cristaux (verrerie), verre émaillé, enseignes en porcelaine ou en verre, éteignoirs, faïence, flacons, vaporisateurs à parfum, vases », relevant de la classe 21, désignés par la marque antérieure.

34      En revanche, elle a retenu, au point 52 de la décision attaquée, une absence de similitude entre les produits visés par la marque contestée et les « ampoules d’éclairage, ampoules électriques, tubes à décharges électriques pour l’éclairage, diffuseurs (éclairage), appareils et installations d’éclairage, filaments de lampes électriques, douilles de lampes électriques, lampes électriques pour arbres de Noël, globes de lampes, manchons de lampes, réflecteurs de lampes, tubes de lampes, verres de lampes, lampions, lanternes d’éclairage, lanternes vénitiennes, torches pour l’éclairage, tubes lumineux pour l’éclairage », désignés par la marque antérieure et relevant de la classe 11, au motif que ceux-ci ne disposaient pas d’une finalité décorative.

35      Pour le même motif, la chambre de recours a, au point 53 de la décision attaquée, également conclu à l’absence de similitude entre les produits visés par la marque contestée et les « fibres de silice vitrifiée non à usage textile, fibres de verre autres que pour l’isolation ou à usage textile, brosses pour verres de lampes, verres opales, opalines, verre auquel sont incorporés de fins conducteurs électriques, verres (récipients), verres à boire » désignés par la marque antérieure, relevant de la classe 21.

36      La requérante reproche, notamment, à la chambre de recours d’avoir conclu à la similitude entre les produits visés par la marque contestée et les « abat-jour, porte-abat-jour, lampes d’éclairage, lampadaires, lampes électriques, lustres et plafonniers » relevant de la classe 11 ainsi que les « cadres ; miroirs (glaces) ; panneaux décoratifs, appliques murales décoratives (non en matières textiles) », relevant de la classe 20 et les « bougeoirs, candélabres (chandeliers), carafes, chandeliers, coupes à fruits, cristaux (verrerie), verre émaillé, enseignes en porcelaine ou en verre, éteignoir, faïence, flacons, vaporisateurs à parfums, vases », relevant de la classe 21, désignés par la marque antérieure.

37      L’EUIPO soutient que c’est à juste titre que la chambre de recours a retenu l’existence d’une similitude au moins moyenne entre les produits visés par la marque contestée et certains produits désignés par la marque antérieure relevant des classes 11, 20 et 21. Il souligne, à cet égard, que l’acte d’achat de ces produits désignés par la marque antérieure est guidé dans une large mesure, voire avant tout, par des considérations décoratives. Il ajoute que la chambre de recours n’a pas seulement pris en compte la destination et l’utilisation des produits en cause, mais également le fait qu’ils se destinent à la même clientèle et partagent les mêmes circuits de distribution et note que la décision attaquée s’inscrit dans un parfait prolongement de sa pratique décisionnelle.

38      L’intervenante souligne que les produits en cause coïncident en ce qu’ils sont utilisés pour la décoration, disposent d’un certain degré de valeur artistique, sont fabriqués à partir des mêmes matériaux, sont obtenus par les mêmes modes de fabrication, sont concurrents ou substituables, et sont commercialisés par de mêmes réseaux de distribution. Elle ajoute que la similitude entre les produits en cause vaut à l’égard d’un nombre plus important de produits désignés par la marque antérieure que ceux retenus par la chambre de recours.

39      Selon une jurisprudence constante, pour apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [voir arrêt du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, EU:T:2007:219, point 37 et jurisprudence citée].

40      En l’espèce, dans un premier temps, il convient de vérifier si c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré, dans la décision attaquée, qu’il existait une similitude de degré au moins moyen entre, d’une part, les figurines décoratives ou ornementales relevant des classes 6, 19, 20 et 21 visées par la marque contestée et, d’autre part, les « abat-jour, porte-abat-jour, lampes d’éclairage, lampadaires, lampes électriques, lustres et plafonniers » relevant de la classe 11, les « cadres ; miroirs (glaces) ; panneaux décoratifs ; appliques murales décoratives (non en matières textiles) » relevant de la classe 20, et les « bougeoirs, candélabres (chandeliers), carafes, chandeliers, coupes à fruits, cristaux (verrerie), verre émaillé, enseignes en porcelaine ou en verre, éteignoirs, faïence, flacons, vaporisateurs à parfum, vases », relevant de la classe 21, tous désignés par la marque antérieure.

41      En premier lieu, s’agissant de la prise en compte par la chambre de recours de ce que les produits en cause étaient souvent fabriqués à partir du même matériau, sa pertinence dans l’appréciation de la similitude des produits en cause doit être grandement relativisée, dès lors que cette circonstance est commune à un très grand nombre de produits. Il en va de même de la circonstance que les produits en cause puissent, éventuellement, emprunter les mêmes canaux de distribution.

42      En deuxième lieu, s’agissant de la destination et de l’utilisation de ces produits, la chambre de recours a retenu, aux points 51, 54 à 56, 59 et 61 de la décision attaquée, que ces produits avaient en commun une dimension essentiellement décorative.

43      À ce titre, il convient de relever que, s’agissant des produits visés par la marque contestée, leur destination exclusive est la décoration, ainsi que l’a retenu la chambre de recours aux points 51 et 59 de la décision attaquée.

44      S’agissant des produits désignés par la marque antérieure visés au point 40 ci-dessus, il convient de relever que leur destination première est d’ordre utilitaire. Dans ces conditions, il ne saurait être considéré, contrairement à ce qu’a retenu la chambre de recours au point 62 de la décision attaquée, que les produits en cause sont substituables et concurrents.

45      Néanmoins, c’est à juste titre que la chambre de recours a relevé, aux points 55, 56 et 61 de la décision attaquée, que ces produits étaient susceptibles de développer également une fonction décorative qui pourrait conduire les consommateurs à les assortir les uns aux autres. Il s’ensuit que, même si d’un point de vue utilitaire, il est possible d’utiliser indépendamment ces produits, lorsqu’ils sont utilisés à des fins décoratives, leur utilisation n’est pas nécessairement indépendante [voir, par analogie, arrêt du 20 octobre 2011, COR Sitzmöbel Helmut Lübke/OHMI – El Corte Inglés (COR), T‑214/09, non publié, EU:T:2011:612, point 33].

46      En troisième lieu, ainsi qu’il ressort des points 55, 56 et 61 susmentionnés de la décision attaquée, la chambre de recours a retenu que ces produits désignés par la marque antérieure pouvaient être disposés en harmonie avec les produits visés par la marque contestée et pouvaient être assortis dans les motifs, les formes et être placés dans la même pièce d’habitation.

47      Dans la mesure où la chambre de recours a estimé, en substance, que le consommateur serait susceptible d’établir un lien entre les produits en cause pour des motifs d’ordre esthétique, il convient de rappeler qu’une complémentarité esthétique entre des produits peut faire naître un degré de similitude au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001. Celle-ci doit, néanmoins, consister en un véritable besoin esthétique, en ce sens qu’un produit est indispensable ou important pour l’utilisation de l’autre et que les consommateurs jugent habituel et normal d’utiliser lesdits produits ensemble [voir arrêt du 6 avril 2017, Nanu-Nana Joachim Hoepp/EUIPO – Fink (NANA FINK), T‑39/16, EU:T:2017:263, point 74 et jurisprudence citée]. Cette complémentarité esthétique est subjective et définie par les habitudes ou les préférences des consommateurs, telles qu’elles peuvent résulter des efforts de marketing des producteurs, voire de simples phénomènes de mode [arrêts du 27 septembre 2012, Pucci International/OHMI – El Corte Inglés (Emidio Tucci), T‑357/09, non publié, EU:T:2012:499, point 51 ; du 12 février 2015, Compagnie des montres Longines, Francillon/OHMI – Cheng (B), T‑505/12, EU:T:2015:95, point 59, et du 15 mars 2016, Nezi/OHMI – Etam (E), T‑645/13, non publié, EU:T:2016:145, point 84].

48      En outre, l’existence d’une complémentarité esthétique entre les produits en cause, telle qu’envisagée dans la jurisprudence citée au point 47 ci-dessus, ne suffit pas pour conclure à une similitude entre ceux-ci. Il faut encore, pour cela, que les consommateurs considèrent comme courant que ces produits soient commercialisés sous la même marque, ce qui implique, normalement, qu’une grande partie des fabricants ou des distributeurs respectifs de ces produits soient les mêmes (voir arrêt du 20 octobre 2011, COR, T‑214/09, non publié, EU:T:2011:612, point 34 et jurisprudence citée).

49      En l’espèce, si la chambre de recours a pu relever, en substance, aux points 51, 54, 55, 56 et 61 de la décision attaquée que ces produits avaient en commun d’être utilisés dans le but de décorer une habitation, il ne saurait cependant être conclu que l’association que fait le consommateur entre ces produits est telle qu’elle correspond à un véritable besoin esthétique et que les produits sont indispensables ou importants pour leurs utilisations respectives au sens de la jurisprudence citée au point 47 ci-dessus.

50      Au vu de tout ce qui précède, il convient de conclure que la chambre de recours a surévalué le degré de similitude existant entre, d’une part, les figurines décoratives ou ornementales relevant des classes 6, 19, 20 et 21 visées par la marque contestée et, d’autre part, les « abat-jour, porte-abat-jour, lampes d’éclairage, lampadaires, lampes électriques, lustres et plafonniers » relevant de la classe 11, les « cadres ; miroirs (glaces) ; panneaux décoratifs ; appliques murales décoratives (non en matières textiles) » relevant de la classe 20, et les « bougeoirs, candélabres (chandeliers), carafes, chandeliers, coupes à fruits, cristaux (verrerie), verre émaillé, enseignes en porcelaine ou en verre, éteignoirs, faïence, flacons, vaporisateurs à parfum, vases », relevant de la classe 21, désignés par la marque antérieure.

51      En effet, dans la mesure où, d’une part, les facteurs de similitude qui peuvent exister entre les produits en cause – tels leur fabrication à partir du même matériau ou la possible utilisation des mêmes canaux de distribution – sont communs à un très grand nombre de produits et, d’autre part, les produits en cause ne sont ni concurrents, ni substituables, ni indispensables ou importants pour leurs utilisations respectives, la chambre de recours aurait plutôt dû relever l’existence d’une similitude de faible degré entre eux.

52      Dans un second temps, il convient d’examiner l’argumentation de l’intervenante tirée de ce que la chambre de recours aurait dû retenir l’existence d’une similitude entre les produits visés par la marque contestée et d’autres produits désignés par la marque antérieure.

53      Il suffit, à cet égard, de souligner que c’est à juste titre que la chambre de recours a retenu, aux points 52 et 53 de la décision attaquée, que les produits visés par la marque contestée différaient des « ampoules d’éclairage, ampoules électriques, tubes à décharges électriques pour l’éclairage, diffuseurs (éclairage), appareils et installations d’éclairage, filaments de lampes électriques, douilles de lampes électriques, lampes électriques pour arbres de Noël, globes de lampes, manchons de lampes, réflecteurs de lampes, tubes de lampes, verres de lampes, lampions, lanternes d’éclairage, lanternes vénitiennes, torches pour l’éclairage, tubes lumineux pour l’éclairage », relevant de la classe 11, et des « fibres de silice vitrifiée non à usage textile ; fibres de verre autres que pour l’isolation ou à usage textile ; brosses pour verres de lampes ; verres opales ; opalines ; verre auquel sont incorporés de fins conducteurs électriques ; verres (récipients) ; verres à boire », relevant de la classe 21, tous désignés par la marque antérieure.

54      En effet, les rapports entre ces produits ne permettent d’identifier la présence d’aucun des facteurs pertinents, auxquels la jurisprudence citée au point 39 ci-dessus se réfère, qui permettraient de conclure à l’existence d’une similitude – fût-elle d’un niveau faible.

55      S’agissant du « verre peint », relevant de la classe 21, désigné par la marque antérieure, il découle nécessairement des points 51 à 62 de la décision attaquée que la chambre de recours a estimé qu’il n’existait pas de similitude avec les produits visés par la marque demandée, dès lors qu’elle n’a pas énuméré le « verre peint » parmi les produits pour lesquels elle a retenu l’existence d’une telle similitude. À son égard, il suffit de souligner que les circonstances que le « verre peint » puisse être produit à partir du même matériau que certains des produits visés par la marque contestée, emprunter les mêmes canaux de distribution et disposer d’une fonction décorative ne permettent, tout au plus, que de constater un faible degré de similitude, le raisonnement développé aux points 41 et 45 à 50 ci-dessus lui étant transposable. 

56      Au regard de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu considérer qu’il n’existe qu’une similitude de faible degré entre les produits visés par la marque contestée et certains produits désignés par la marque antérieure.

 Sur la comparaison des signes

57      Selon la jurisprudence, deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents [arrêt du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, EU:T:2002:261, point 30]. L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

58      En ce qui concerne, en premier lieu, la détermination des éléments distinctifs et dominants des marques en conflit, il convient de rappeler que, aux fins d’apprécier le caractère distinctif d’un élément composant une marque, il y a lieu d’examiner l’aptitude plus ou moins grande de cet élément à contribuer à identifier les produits ou les services pour lesquels la marque a été enregistrée comme provenant d’une entreprise déterminée et donc à distinguer ces produits ou ces services de ceux d’autres entreprises. Lors de cette appréciation, il convient de prendre en considération notamment les qualités intrinsèques de l’élément en cause au regard de la question de savoir si celui-ci est ou non dénué de tout caractère descriptif des produits ou des services pour lesquels la marque a été enregistrée [arrêts du 13 juin 2006, Inex/OHMI – Wiseman (Représentation d’une peau de vache), T‑153/03, EU:T:2006:157, point 35, et du 13 décembre 2007, Cabrera Sánchez/OHMI – Industrias Cárnicas Valle (el charcutero artesano), T‑242/06, non publié, EU:T:2007:391, point 51].

59      En outre, s’il est de jurisprudence constante que, en règle générale, le public pertinent ne considérera pas un élément descriptif faisant partie d’une marque complexe comme l’élément distinctif et dominant dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci, le caractère distinctif faible d’un élément d’une telle marque n’implique pas nécessairement que celui-ci ne puisse constituer un élément dominant, dès lors que, en raison, notamment, de sa position dans le signe, de sa dimension, il est susceptible de s’imposer à la perception du consommateur et d’être gardé en mémoire par celui-ci (voir arrêt du 13 juin 2006, Représentation d’une peau de vache, T‑153/03, EU:T:2006:157, point 32 et jurisprudence citée).

60      L’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 41 et jurisprudence citée). Ce n’est que si tous les autres éléments composant la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude des signes en conflit pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (voir, en ce sens, arrêts du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 42, et du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 43). Tel pourrait notamment être le cas lorsque cet élément est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres éléments de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (arrêt du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 43).

61      En l’espèce, il ressort des points 66 à 68 de la décision attaquée que la chambre de recours a estimé que le mot « veronese », constituant la marque antérieure et l’élément verbal de la marque contestée, ne disposait pas d’un caractère distinctif faible en raison de son association avec le verre de Murano ou avec une variété de couleur verte appelée « veronese ». La chambre de recours, au point 74 de la décision attaquée, à l’occasion cette fois de l’appréciation du caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure, a retenu que celle-ci, constituée du seul élément verbal « veronese », disposait d’un caractère distinctif intrinsèque faible, en raison de l’association que le public pertinent fera avec la ville italienne de Vérone.

62      S’agissant de la marque contestée, la chambre de recours a considéré, au point 70 de la décision attaquée, que, si son impression d’ensemble n’était dominée par aucun des deux éléments la constituant, il convenait de considérer que l’élément figuratif représentant une licorne était d’une importance moindre, au motif que le public pertinent fait plus facilement référence aux signes en se référant à leur élément verbal.

63      La requérante conteste cette analyse de la chambre de recours. Elle souligne, notamment, que l’appréciation de la chambre de recours portant sur le caractère distinctif du terme « veronese » est en contradiction avec sa propre conclusion tirée de ce que la marque antérieure ne disposait que d’un caractère distinctif intrinsèque faible.

64      L’EUIPO fait, notamment, valoir que la décision attaquée ne comprend aucune contradiction de motifs, la chambre de recours ayant attribué un caractère distinctif intrinsèque faible à la marque antérieure lors de l’appréciation du risque de confusion. Il estime, en outre, que c’est à tort que la requérante soutient que c’est la représentation d’une licorne qui constitue l’élément distinctif et dominant de la marque contestée. Il ajoute que la chambre de recours n’a pas fait abstraction de l’élément figuratif de la marque contestée, mais, au contraire, l’a pris en compte à l’occasion de la comparaison des signes en conflit.

65      L’intervenante soutient que c’est à tort que la chambre de recours a déduit de l’association de la marque antérieure avec la ville de Vérone qu’elle ne disposait que d’un caractère distinctif faible. Elle estime que, pour la partie du public pertinent qui ne parle pas italien, aucune association ne se fera avec cette ville. Selon l’intervenante, c’est plutôt avec un célèbre peintre que le public pertinent associera la marque antérieure. Elle ajoute que c’est à juste titre que la chambre de recours a retenu que la représentation d’une licorne ne dominait pas l’impression d’ensemble de la marque contestée.

66      À titre liminaire, il convient de rappeler que la marque antérieure est une marque verbale composée du seul mot « veronese ». S’agissant de la marque de la requérante, il s’agit d’une marque comportant des éléments figuratifs et verbaux. Elle est constituée d’un élément verbal « veronese », dont les lettres « v » et « r » sont stylisées, et d’un dessin fantaisiste représentant une licorne.

67      Si c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré, en substance, qu’aucun des éléments composant les marques en conflit n’était négligeable, c’est, en revanche, à tort, qu’elle a retenu qu’il convenait d’accorder une plus grande importance à l’élément verbal de la marque contestée.

68      D’une part, il convient de relever que le rôle réputé moindre joué par les éléments figuratifs par rapport aux éléments verbaux dans l’impression d’ensemble d’une marque complexe ne dispose pas d’un caractère aussi marqué que celui retenu par la chambre de recours au point 70 de la décision attaquée. En effet, s’il ressort d’une jurisprudence constante que, lorsqu’une marque est composée d’éléments verbaux et figuratifs, les premiers sont, en principe, plus distinctifs que les seconds, car le consommateur moyen fera plus facilement référence aux produits en cause en citant le nom de la marque qu’en décrivant l’élément figuratif de celle-ci, la même jurisprudence précise néanmoins qu’il ne s’ensuit pas que les éléments verbaux d’une marque doivent toujours être considérés comme plus distinctifs que les éléments figuratifs. En effet, dans le cas d’une marque complexe, l’élément figuratif peut, notamment en raison de sa forme, de sa taille, de sa couleur ou de sa position dans le signe, détenir une place équivalente à celle de l’élément verbal [voir, en ce sens, arrêt du 23 novembre 2010, Codorniu Napa/OHMI – Bodegas Ontañon (ARTESA NAPA VALLEY), T‑35/08, EU:T:2010:476, points 37 et 39 et jurisprudence citée].

69      Or, la représentation d’une licorne occupe une place importante dans l’impression d’ensemble de la marque contestée, en raison tant de sa taille que de sa position centrale.

70      D’autre part, s’agissant de l’élément verbal de la marque contestée, la chambre de recours n’a pas tiré les conséquences du caractère faiblement distinctif de l’élément « veronese » s’agissant des produits en cause, en raison de l’association avec la ville du même nom.

71      Ainsi que la chambre de recours l’a pourtant elle-même rappelé, en substance, au point 65 de la décision attaquée et en application de la jurisprudence citée au point 58 ci-dessus, l’appréciation du caractère distinctif d’un élément d’une marque dépend, notamment, de la question de savoir si celui-ci est ou non dénué de tout caractère descriptif des produits ou des services pour lesquels la marque a été enregistrée.

72      À cet égard, c’est à juste titre que, dans le cadre de son appréciation du caractère distinctif de la marque antérieure, la chambre de recours a retenu au point 74 de la décision attaquée que la marque antérieure – constituée du seul mot « veronese » – pouvait être associée à la ville italienne de Vérone et était, de ce fait, descriptive de la possible origine géographique des produits. Contrairement à ce que soutient l’intervenante, elle a pu à bon droit en déduire que la marque antérieure disposait d’un caractère distinctif intrinsèque faible, tout au moins pour une partie substantielle du public pertinent.

73      Toutefois, la chambre de recours n’a tiré aucune conséquence de cette conclusion à l’occasion de la détermination des éléments distinctifs et dominants de la marque contestée, alors même qu’il s’agissait là d’une considération pertinente en application de la jurisprudence citée au point 58 ci-dessus.

74      Partant, dans les circonstances de l’espèce – caractérisées par un élément figuratif disposant d’une place significative dans la marque contestée et d’un élément verbal faiblement distinctif à l’égard des produits en cause – une importance équivalente doit être accordée à l’élément verbal et à l’élément figuratif de la marque contestée à l’occasion de la comparaison des signes en conflit.

75      En ce qui concerne, en second lieu, la comparaison des signes sur les plan visuel, phonétique et conceptuel, la chambre de recours a conclu à l’existence d’une similitude moyenne sur le plan visuel en raison, d’une part, de la présence commune du mot « veronese » et, d’autre part, de l’impact plus important des éléments verbaux par rapport aux éléments figuratifs dans les marques complexes. Au point 39 de la décision attaquée, elle a estimé que les signes étaient identiques sur le plan phonétique, dès lors que l’élément figuratif de la marque contestée n’était pas prononcé par le public pertinent. Enfin, aux points 40 à 44 de la décision attaquée, elle a considéré qu’il existait une similitude moyenne sur le plan conceptuel pour la partie du public pertinent qui associera le mot « veronese » à la ville italienne de Vérone ou au peintre italien Veronese. Elle a considéré que l’effet de cette association était, dans une certaine mesure, contrebalancé par la présence d’une licorne dans la seule marque contestée.

76      La requérante estime que la chambre de recours a omis de prendre en compte l’élément figuratif de la marque contestée à l’occasion de la comparaison des signes en conflit. Sur le plan visuel, le consommateur attacherait plus d’importance à l’élément figuratif de la marque contestée, en raison tant de son positionnement et de sa taille que de son caractère fantaisiste, de sorte que les signes en conflit devraient être considérés comme étant différents sur ce plan ou, à tout le moins, similaires seulement à un très faible degré. Sur le plan phonétique, la conclusion de la chambre de recours d’une identité des signes aboutirait à négliger l’élément figuratif de la marque contestée, en dépit de son caractère prépondérant. Sur le plan conceptuel, le rôle prépondérant joué par l’élément figuratif dans la marque contestée empêcherait toute association des produits commercialisés sous cette marque avec la ville de Vérone ou le peintre Veronese. Les signes devraient être considérés comme différents ou, à tout le moins, similaires seulement à un faible degré.

77      L’EUIPO fait observer que la jurisprudence sur laquelle s’appuie la requérante ne portait pas sur des situations comparables à celle de l’espèce, dans laquelle une marque verbale antérieure est intégralement reprise dans la marque contestée. Il ajoute que l’argumentation de la requérante repose sur le postulat selon lequel l’élément figuratif de la marque contestée devrait être considéré comme dominant son impression d’ensemble. Il fait valoir que ce postulat est erroné en fait, dans la mesure où la représentation de la licorne ne constitue pas l’élément dominant de la marque contestée et que la conclusion qu’en tire la requérante est erronée en droit, le caractère non négligeable de l’élément verbal de ladite marque impliquant qu’il doit être pris en compte à l’occasion de la comparaison des signes. Il ajoute que les motifs de la décision attaquée démontrent à suffisance de droit l’existence d’une similitude de niveau moyen entre les signes en conflit.

78      L’intervenante soutient également, en substance, que la jurisprudence citée par la requérante n’est pas transposable au cas d’espèce. Elle considère que, dans la mesure où le même mot de huit lettres apparaît dans les signes en conflit et qu’il est immédiatement perçu dans la marque contestée, c’est à tort que la requérante fait valoir qu’ils sont différents sur le plan visuel. De même, cela serait à tort que la requérante soutiendrait qu’ils ne sont pas identiques sur le plan phonétique. Sur le plan conceptuel, elle estime que la présence de la licorne dans la marque contestée n’empêchera pas le consommateur d’opérer une association avec le peintre Veronese.

79      Si, pour les raisons exposées aux points 67 à 73 ci-dessus, c’est à tort que la chambre de recours a estimé que l’élément figuratif de la marque contestée jouait un rôle moindre que l’élément verbal de celle-ci, il n’en demeure pas moins que sa conclusion quant à l’existence d’une similitude moyenne entre les signes sur le plan visuel, d’une identité sur le plan phonétique et d’une similitude moyenne sur le plan conceptuel, est exempte d’erreurs.

80      En effet, en ce qui concerne la comparaison des signes sur le plan visuel, la présence dans la marque contestée de l’élément « veronese », lequel constitue la marque antérieure, implique qu’il existe sur ce plan une égalité partielle au sens de la jurisprudence citée au point 57 ci-dessus. La présence dans la marque contestée de l’élément figuratif constitué par une licorne implique que seule une similitude moyenne peut être retenue.

81      En ce qui concerne la comparaison des signes sur le plan phonétique, c’est à juste titre que la chambre de recours a retenu au point 39 de la décision attaquée que l’élément figuratif représentant une licorne ne serait pas prononcé par le public pertinent. C’est, dès lors, sans commettre d’erreur qu’elle a retenu l’existence d’une identité entre les signes sur ce point.

82      Enfin, en ce qui concerne la comparaison des signes sur le plan conceptuel, il convient de relever que c’est à juste titre que la chambre de recours a retenu que l’association du mot « veronese » avec la ville de Vérone aboutissait à les rendre similaires, mais que, dans la mesure où l’élément figuratif de la marque contestée véhicule également un contenu conceptuel, seule une similitude moyenne pouvait être retenue.

 Sur le risque de confusion

83      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement (arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, VENADO avec cadre e.a., T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74).

84      Parmi les facteurs pertinents dont il doit être tenu compte dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, figure également le caractère distinctif de la marque antérieure. Toutefois, le caractère distinctif de la marque antérieure n’est qu’un élément parmi d’autres intervenant lors de l’appréciation du risque de confusion. Ainsi, même en présence d’une marque antérieure à caractère distinctif faible, il peut exister un risque de confusion, notamment, en raison d’une similitude des signes et des produits ou des services visés [voir, en ce sens, arrêt du 13 décembre 2007, Xentral/OHMI – Pages jaunes (PAGESJAUNES.COM), T‑134/06, EU:T:2007:387, point 70 et jurisprudence citée].

85      Il ressort également de la jurisprudence que, dans des circonstances où il n’existe qu’un faible degré de similitude entre les produits en conflit et où, conformément à la jurisprudence citée au point 83 ci-dessus, il y a lieu de vérifier si ce faible degré peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les signes en conflit, l’existence d’un caractère distinctif de la marque antérieure est particulièrement pertinente [voir, en ce sens, arrêts du 22 septembre 2011, ara/OHMI – Allrounder (A avec deux motifs triangulaires), T‑174/10, non publié, EU:T:2011:519, point 34, et du 24 janvier 2017, Rath/EUIPO – Portela & Ca. (Diacor), T‑258/08, non publié, EU:T:2017:22, point 71 et jurisprudence citée].

86      En outre, selon une jurisprudence constante, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, l’aspect visuel, phonétique ou conceptuel des signes en conflit n’a pas toujours le même poids et il importe alors d’analyser les conditions objectives dans lesquelles les marques peuvent se présenter sur le marché. Ainsi, si un produit désigné par une marque donnée est uniquement vendu sur commande orale, les aspects phonétiques du signe en question revêtiront nécessairement une plus grande importance dans l’esprit du public pertinent que les aspects visuels. Au contraire, le degré de similitude phonétique entre deux marques est d’une importance réduite dans le cas de produits qui sont commercialisés de telle manière que, habituellement, le public pertinent, lors de l’achat, perçoit la marque les désignant de façon visuelle [voir, en ce sens, arrêt du 29 janvier 2014, Goldsteig Käsereien Bayerwald/OHMI – Vieweg (goldstück), T‑47/13, non publié, EU:T:2014:37, point 41 et jurisprudence citée].

87      Aux points 72 à 76 de la décision attaquée, la chambre de recours a retenu que la marque antérieure disposait d’un caractère distinctif intrinsèque faible. Aux points 79 à 84 de la décision attaquée, nonobstant ce caractère distinctif intrinsèque faible, elle a conclu à l’existence d’un risque de confusion, en raison de l’existence d’une similitude tant des produits en cause que des signes en conflit. À cet égard, elle a estimé que les éléments phonétiques et conceptuels étaient plus importants à l’occasion de l’acquisition des produits désignés par la marque contestée. Elle a conclu que le public pertinent pourrait percevoir la marque contestée comme une sous-marque, une variante de la marque antérieure.

88      La requérante estime qu’aucun risque de confusion n’existe entre les marques en conflit. Dans ce cadre, elle reproche, notamment, à la chambre de recours d’avoir retenu que la comparaison visuelle des signes jouait un rôle moindre à l’occasion de l’acquisition des produits désignés par la marque contestée, celle-ci étant, au contraire, prépondérante. Elle ajoute que, si c’est à juste titre que la chambre de recours a retenu que la marque antérieure disposait d’un caractère distinctif faible, elle n’en a tiré aucune conséquence à l’occasion de l’appréciation globale du risque de confusion.

89      L’EUIPO admet que c’est à juste titre que la requérante reproche à la chambre de recours d’avoir retenu que la comparaison des signes sur le plan visuel jouait un rôle moindre dans l’appréciation du risque de confusion. Il estime, néanmoins, que ce motif est sans incidence sur le dispositif de la décision attaquée et rappelle que la division d’annulation avait retenu l’existence d’un risque de confusion en prenant en compte la comparaison des signes sur le plan visuel. Il estime que, compte tenu de l’ensemble des éléments pertinents, c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu que la marque contestée pourrait être perçue par le public pertinent comme une déclinaison de la marque antérieure.

90      L’intervenante fait valoir que, dans l’éventualité même où le motif pris du caractère moins pertinent de la comparaison des signes sur le plan visuel serait erroné, cela demeurerait à juste titre que la chambre de recours a conclu que la marque contestée sera perçue comme une variante de la marque antérieure. Elle réfute, en outre, la pertinence de la jurisprudence citée par la requérante.

91      En premier lieu, il convient de relever que l’appréciation de la chambre de recours, figurant au point 81 de la décision attaquée, selon laquelle l’aspect visuel sera moins important à l’occasion de l’acquisition des produits désignés par la marque contestée, en raison de la petite taille de ceux-ci, revêt un caractère erroné, ainsi que l’admet l’EUIPO lui-même.

92      En effet, l’analyse prospective du risque de confusion entre deux marques, qui poursuit un but d’intérêt général, à savoir celui que le public pertinent ne puisse courir le risque d’être induit en erreur à propos de l’origine commerciale des produits concernés, ne saurait dépendre des intentions commerciales, réalisées ou non, et par nature subjectives, des titulaires des marques. Partant, la comparaison des marques en conflit, qui est l’un des facteurs pertinents à prendre en considération dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, ne saurait être réalisée en fonction d’un élément qui dépend des intentions du titulaire d’une des marques concernées. Or, tel est le cas de la taille dans laquelle une marque peut être concrètement utilisée, qui ne saurait être objectivement déterminée par rapport à la taille des produits qu’elle désigne. En effet, l’utilisation d’une marque n’est pas limitée à son apposition sur les produits eux-mêmes, cette marque pouvant également être apposée, notamment, sur des étiquettes attachées à ceux-ci, des emballages dans lesquels ils sont présentés, voire indépendamment des produits, sur des enseignes ou des documents publicitaires [arrêt du 8 novembre 2017, Oakley/EUIPO – Xuebo Ye (Représentation d’une ellipse discontinue), T‑754/16, non publié, EU:T:2017:786, point 53].

93      Au contraire, en application de la jurisprudence citée au point 86 ci-dessus, il y a lieu de relever que les produits en cause n’ont pas tendance à être vendus sur commande orale, mais plutôt à être commercialisés d’une manière qui implique que les éléments de ressemblance et de différence visuelles entre les signes en conflit s’avèrent d’une plus grande importance que les éléments de ressemblance et de différence phonétiques et conceptuelles entre lesdits signes.

94      En second lieu, et pour les raisons exposées au point 72 ci-dessus, il doit être retenu que la marque antérieure dispose d’un caractère distinctif intrinsèque faible. En outre, et pour des raisons analogues, il convient de relever que la similitude des signes sur plan conceptuel ne peut jouer qu’un rôle mineur à l’occasion de l’appréciation du risque de confusion, dès lors qu’elle porte sur un élément revêtant un caractère distinctif faible, en raison de sa compréhension comme visant la ville italienne de Vérone [voir, en ce sens, ordonnance du 7 février 2020, Fleximed/EUIPO – docPrice (Fleximed), T‑214/19, non publiée, EU:T:2020:40, point 57 et jurisprudence citée].

95      Au vu de tout ce qui précède, il y a lieu de conclure que, compte tenu du caractère distinctif intrinsèque faible de la marque antérieure, le faible degré de similitude des produits ne peut être compensé par le niveau moyen de similitude des signes sur les plans visuel et conceptuel ainsi que par leur identité sur le plan phonétique.

96      C’est, dès lors, à tort que la chambre de recours a retenu l’existence d’un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 entre les marques en conflit.

97      Il convient, partant, de faire droit au moyen unique, tiré de la violation de l’article 60, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 1, sous b), de ce même règlement, et d’annuler la décision attaquée.

 Sur les dépens

98      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. En l’espèce, l’EUIPO et l’intervenante ont succombé et la requérante a conclu uniquement à la condamnation aux dépens de l’EUIPO dans la présente procédure. Par suite, il y a lieu de condamner l’EUIPO à supporter, outre ses propres dépens, l’intégralité des dépens exposés par la requérante au titre de la présente procédure. L’intervenante supportera, quant à elle, ses propres dépens exposés dans le cadre de la présente procédure.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la cinquième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 18 juin 2019 (affaire R 2434/2018-5), relative à une procédure de nullité entre Veronese SAS etVeronese Design Company Ltd est annulée.


2)      L’EUIPO supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés parVeronese Design Company.

3)      Veronese supportera ses propres dépens.

Tomljenović

Škvařilová-Pelzl

Nõmm

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 23 septembre 2020.

Le greffier

 

Le président

E. Coulon

 

      S. Papasavvas


*      Langue de procédure : le français.