Language of document : ECLI:EU:T:2012:119

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

9 mars 2012 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire figurative BASE-SEAL – Marques nationales figuratives antérieures représentant un losange – Marques nationales et internationales figuratives antérieures COLAS – Motif relatif de refus – Similitude des signes – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑172/10,

Colas, établie à Boulogne-Billancourt (France), représentée par ME. Logeais, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. A. Folliard-Monguiral, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

les autres parties à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI ayant été

Rosario García-Teresa Gárate et Carmen Bouffard Vicente, demeurant à Barcelone (Espagne),

ayant pour objet un recours en annulation formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’OHMI du 4 février 2010 (affaire R 450/2009-4), relative à une procédure d’opposition entre, d’une part, Colas et, d’autre part, Mmes Rosario García-Teresa Gárate et Carmen Bouffard Vicente,

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de MM. J. Azizi (rapporteur), président, Mme E. Cremona et M. S. Frimodt Nielsen, juges,

greffier : Mme C. Heeren, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 8 avril 2010,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 3 septembre 2010,

vu la décision du 27 octobre 2010 refusant d’autoriser le dépôt d’un mémoire en réplique,

à la suite de l’audience du 11 janvier 2012,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 22 juillet 2004, Mmes Rosario García-Teresa Gárate et Carmen Bouffard Vicente ont présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 1, 17 et 19 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 1 : « Produits chimiques destinés à l’industrie, aux sciences, à la photographie ainsi qu’à l’agriculture, l’horticulture et la sylviculture ; résines artificielles à l’état brut, matières plastiques à l’état brut ; engrais pour les terres ; compositions extinctrices ; préparations pour la trempe et la soudure des métaux ; produits chimiques destinés à conserver les aliments ; matières tannantes ; adhésifs (matières collantes) destinés à l’industrie » ;

–        classe 17 : « Caoutchouc, gutta-percha, gomme, amiante, mica et produits en ces matières non compris dans d’autres classes ; produits en matières plastiques mi-ouvrées ; matières à calfeutrer, à étouper et à isoler ; tuyaux flexibles non métalliques » ;

–        classe 19 : « Matériaux de construction non métalliques ; tuyaux rigides non métalliques pour la construction; asphalte, poix et bitume ; constructions transportables non métalliques ; monuments non métalliques. »

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 36/2005, du 5 septembre 2005.

5        Le 5 décembre 2005, la requérante, Colas, a formé opposition, au titre de l’article 42 du règlement n° 40/94 (devenu article 41 du règlement n° 207/2009), à l’enregistrement de la marque demandée pour l’ensemble des produits visés au point 3 ci-dessus. Cette opposition était fondée sur les marques antérieures suivantes reproduites ci-après.

6        Premièrement, la marque espagnole purement figurative suivante :

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7        Cette marque, revendiquant les couleurs jaune et noir comme l’indiquent les flèches sur la représentation, était enregistrée séparément pour des produits relevant de la classe 19 et pour des services relevant de la classe 37.

8        Deuxièmement, la marque hongroise purement figurative suivante :

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9        Cette marque était enregistrée pour des produits et services relevant des classes 19 et 37.

10      Troisièmement, la marque figurative complexe suivante :

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11      Cette marque était enregistrée en France pour des produits et des services relevant des classes 1, 19, 37 et 42, en Pologne pour des produits et des services relevant des classes 1, 19, 37 et 42, en Suède pour des produits et des services relevant des classes 1, 19 et 37, en Allemagne pour des produits et des services relevant des classes 1, 19, 37 et 42, en République tchèque pour des produits et des services relevant des classes 19 et 37. Cette marque était également enregistrée comme marque internationale pour le territoire espagnol pour des produits et des services relevant des classes 1, 19 et 37.

12      Pris ensemble, les marques antérieures reprises aux points 6 à 10 ci-dessus couvrent des produits et des services relevant des classes 1, 19 et 37 qui correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 1 : « Produits chimiques destinés à l’industrie, additifs minéraux, adjuvants chimiques pour le béton et le ciment, produits chimiques destinés aux matériaux de construction, produits pour la conservation et l’imperméabilisation du béton et du ciment, réactifs chimiques, colles (apprêts), produits hydrocarbonés » ;

–        classe 19 : « Matériaux de construction non métalliques ; matériaux, produits et enrobés pour la construction, l’entretien, la stabilisation, la réfection et la rénovation de bâtiments, d’ouvrages d’art, de routes et autres voies et surfaces de roulement et de circulation analogues et de tous travaux publics, asphalte, poix, bitume, produits à base de bitume, bâtiments transportables non métalliques et monuments non métalliques » ;

–        classe 37 : « Services de construction, de réparation, d’entretien, de réfection et de rénovation de bâtiments, d’ouvrages d’art, de routes et autres voies et surfaces de roulement et de circulation, de terrassement, de canalisations et de tous travaux publics ».

13      Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous a) et b), et à l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94 [devenus article 8, paragraphe 1, sous a) et b), et article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009].

14      Le 20 février 2009, la division d’opposition a rejeté l’opposition au motif que les signes comparés étaient dissimilaires.

15      Le 17 avril 2009, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’opposition.

16      Par décision du 4 février 2010 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours de la requérante. Elle a considéré que les signes en cause étaient clairement dissimilaires de sorte que l’opposition devait être rejetée indépendamment de la similarité ou de l’identité des produits en cause et du degré de notoriété des marques antérieures.

 Conclusions des parties

17      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        à titre principal, annuler la décision attaquée dans son entièreté ;

–        à titre subsidiaire, annuler la décision attaquée uniquement pour les produits autres que les produits chimiques utilisés pour la science, pour la photographie, pour l’agriculture, pour l’horticulture et pour le forestier, le fumier et les substances chimiques préservant les produits alimentaires ;

–        condamner le défendeur aux dépens.

18      Le défendeur conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

19      À l’appui de son recours, la requérante soulève deux moyens tirés de la violation, respectivement, de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 et de l’article 75, première phrase, du règlement n° 207/2009.

 Sur la recevabilité de certaines annexes

20      Le défendeur conteste la recevabilité des annexes A10 et A16 de la requête contenant des preuves de l’usage des éléments « seal » et « base » par les professionnels du domaine de la construction routière et des pièces sur le caractère enregistrable du signe BASE-SEAL aux États-Unis au motif qu’elles n’ont pas été produites devant l’OHMI au cours de la procédure administrative.

21      En vertu de l’article 76, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009, « dans une procédure concernant des motifs relatifs de refus d’enregistrement, l’examen [de l’OHMI] est limité aux moyens invoqués et aux demandes présentées par les parties ».

22      En outre, ainsi que le prévoit l’article 65, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, le Tribunal ne peut annuler ou réformer la décision d’une chambre de recours de l’OHMI que pour « incompétence, violation des formes substantielles, violation du traité, [dudit] règlement ou de toute règle de droit relative à leur application, ou détournement de pouvoir ».

23      Il découle de ces dispositions que le Tribunal est appelé à apprécier la légalité des décisions des chambres de recours de l’OHMI en contrôlant l’application du droit de l’Union effectuée par celles-ci eu égard, notamment, aux éléments de fait qui ont été soumis auxdites chambres (voir, notamment, arrêts de la Cour du 13 mars 2007, OHMI/Kaul, C‑29/05 P, Rec. p. I-2213, point 54, et du 18 décembre 2008, Les Éditions Albert René/OHMI, C-16/06 P, Rec. p. I-10053, point 38).

24      La Cour en a déduit que des faits non invoqués par les parties devant les instances de l’OHMI ne peuvent plus l’être au stade du recours introduit devant le Tribunal et que ce dernier ne saurait réexaminer les circonstances de fait à la lumière des preuves présentées pour la première fois devant lui (voir arrêt de la Cour du 10 novembre 2011, LG Electronics/OHMI, C‑88/11 P, non encore publié au Recueil, point 25, et la jurisprudence y citée).

25      Or, ainsi que cela a été reconnu par la requérante à l’audience, les annexes A10 et A16 contiennent des éléments de fait qui n’ont pas été soumis à la chambre de recours. Partant, il y a lieu de les écarter comme irrecevables.

26      Par ailleurs, le défendeur met en doute la recevabilité des extraits de dictionnaires techniques produits pour la première fois à l’annexe A9, sous b) et c), de la requête dès lors qu’ils ne constituent pas des faits notoires.

27      Pour les motifs invoqués aux points 21 à 24 ci-dessus, la chambre de recours, en statuant sur un recours contre une décision mettant fin à une procédure d’opposition, ne saurait fonder sa décision que sur les faits et les preuves présentés par les parties. Toutefois, la limitation de la base factuelle de l’examen opéré par la chambre de recours n’exclut pas que celle-ci prenne en considération, outre les faits avancés explicitement par les parties à la procédure d’opposition, des faits notoires, c’est-à-dire des faits qui sont susceptibles d’être connus par toute personne ou qui peuvent être connus par le biais de sources généralement accessibles [voir arrêts du Tribunal du 22 juin 2004, Ruiz-Picasso e.a./OHMI – DaimlerChrysler (PICARO), T-185/02, Rec. p. II‑1739, points 28 et 29, et la jurisprudence y citée, et du 9 février 2011, Ineos Healthcare/OHMI – Teva Pharmaceutical Industries (ALPHAREN), T‑222/09, non encore publié au Recueil, point 29].

28      Dans la mesure où les extraits de dictionnaires invoqués par la requérante sont des extraits de dictionnaires techniques, ces extraits ne peuvent, en tant que tels, démontrer qu’il s’agit de faits notoires. En effet, la vocation de ces dictionnaires et la nature restreinte et spécialisée de leurs destinataires s’opposent à ce qu’ils puissent être considérés comme source du caractère notoire d’un terme.

29      Par conséquent, ce n’est que pour autant que lesdits extraits de dictionnaires attestent de faits avancés explicitement par les parties à la procédure d’opposition qu’ils peuvent être pris en considération. Ainsi, seules les significations dont il a déjà été fait état au cours de la procédure administrative pourront être prises en considération. Il s’ensuit que les significations techniques des termes « base asphalt », « base course », « bituminous seal » et « sealing coat » reprises dans des dictionnaires techniques et produites pour la première fois devant le Tribunal sont irrecevables.

 Sur la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009

 Introduction

30      La requérante estime que la décision attaquée viole l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 en ce que la chambre de recours a conclu à l’absence de similitude des signes en cause.

31      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

32      En outre, ainsi qu’il a été reconnu par une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Conformément à cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 à 33, et la jurisprudence y citée].

 Sur le public pertinent

33      La requérante fait grief à la chambre de recours de ne pas avoir donné de définition précise du public pertinent et de ne pas avoir justifié et motivé cette définition. D’après la requérante, ce dernier est composé de professionnels de la construction, des travaux publics et des infrastructures routières maîtrisant l’anglais technique.

34      À cet égard, il convient de rappeler que, dans le cadre de l’appréciation du risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits ou services concernée, qui est en principe normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Toutefois, il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T-256/04, Rec. p. II-449, point 42, et la jurisprudence y citée].

35      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a fait référence, en ce qui concerne la comparaison entre la marque demandée et les marques purement figuratives antérieures, aux consommateurs pertinents espagnols et hongrois, en ce compris le public professionnel pertinent d’Espagne et de Hongrie. En effet, elle a indiqué que la signification des mots repris dans la marque demandée ne sera pas comprise par les consommateurs pertinents espagnols et hongrois, même pas par les consommateurs professionnels pertinents d’Espagne et de Hongrie (voir point 12 de la décision attaquée). Par ailleurs, en ce qui concerne la comparaison entre la marque demandée et les marques complexes antérieures, la chambre de recours a considéré que les consommateurs des territoires pertinents, à savoir la France, la Pologne, la Suède, l’Allemagne, la République tchèque et l’Espagne, ne considéreront pas que l’expression « base-seal » est descriptive et a renvoyé à son exposé au point 12 de la décision attaquée (voir point 20 de la décision attaquée).

36      Ainsi, la chambre de recours a considéré que le public pertinent pour la comparaison entre les marques en cause était composé tant de consommateurs non professionnels que de consommateurs professionnels des produits et des services visés par les marques en cause. En particulier, s’agissant du public pertinent pour la comparaison entre la marque demandée et les marques complexes antérieures, il y a lieu d’observer que, en se référant au point 12 de la décision attaquée, le terme « consommateurs » du point 20 de la décision attaquée devait être compris comme comprenant les consommateurs tant professionnels que non professionnels. Partant, la chambre de recours a précisé de manière fort succincte mais compréhensible de quels groupes non négligeables de consommateurs était constitué le public pertinent pour les besoins de la comparaison des marques en cause.

37      En outre, en ce que la requérante estime que le public pertinent est le public professionnel et, en particulier, le public professionnel de la construction, des travaux publics et des infrastructures routières, il y a lieu de confirmer l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle le public pertinent se compose, en l’espèce, tant d’un groupe non négligeable de professionnels que d’un groupe non négligeable de non-professionnels. En effet, s’il n’est pas contesté que certains produits et services visés par les marques en cause s’adressent exclusivement à des consommateurs professionnels, d’autres s’adressent également au grand public. Tel est notamment le cas pour les matériaux de construction non métalliques de la classe 19 et pour les engrais de la classe 1. À cet égard, est sans pertinence l’allégation selon laquelle les propriétaires de la marque demandée auraient eu la volonté de cibler un public de professionnels étant donné leur choix de l’expression « base-seal ». En effet, la définition du public pertinent s’apprécie au regard des produits et des services visés par les marques en cause.

38      Enfin, en ce que la requérante reproche à la chambre de recours d’avoir commis un défaut de motivation en s’abstenant de définir le public pertinent, il convient d’observer que, au point 10 de la décision attaquée, celle-ci précise que la comparaison des marques en cause doit se faire par référence au public destinataire des produits et des services dans le territoire de l’Union dans lequel les marques peuvent coexister. Cette précision, certes succincte, est suffisante pour permettre à la requérante et au Tribunal de comprendre que la décision attaquée est fondée sur une définition du public pertinent comprenant tant des professionnels que des non-professionnels dès lors que celui-ci était considéré comme le destinataire des produits et des services visés par les marques en cause.

39      Partant, il y a lieu de confirmer l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle le public pertinent est composé de deux groupes non négligeables de consommateurs qui sont composés respectivement des professionnels et du grand public.

40      Au vu de cette définition du public pertinent, il convient de limiter le recours en annulation de la requérante, conformément à sa demande, dans le cas où le Tribunal considérerait que le public pertinent comprend le consommateur moyen appartenant au grand public, aux seuls produits autres que les produits chimiques utilisés pour la science, pour la photographie, pour l’agriculture, pour l’horticulture et pour le forestier, le fumier et les substances chimiques préservant les produits alimentaires. Ainsi, la requérante ne s’oppose pas à l’enregistrement de la marque demandée pour lesdits produits [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 8 juillet 2004, Telepharmacy Solutions/OHMI (TELEPHARMACY SOLUTIONS), T‑289/02, Rec. p. II‑2851, points 13 et 14].

41      S’agissant du degré d’attention du public pertinent, il doit être considéré que le public professionnel fera preuve d’une attention élevée à l’égard des marques en cause étant donné la nature des produits et des services en cause. Le grand public aura, en l’espèce, une attention soutenue dès lors que les produits désignés par les marques en cause ne sont pas des produits de consommation quotidienne, sans toutefois que cette attention soit aussi élevée que celle du public professionnel.

42      Par ailleurs, au vu des territoires couverts par l’enregistrement des marques antérieures, le public pertinent dans sa composition définie ci-dessus comprend le français, le polonais, le suédois, l’allemand, l’espagnol, le hongrois et a une certaine compréhension de l’anglais.

 Sur la dissemblance

–       Introduction

43      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt de la Cour du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, Rec. p. I‑4529, point 35, et la jurisprudence y citée).

44      L’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt OHMI/Shaker, point 43 supra, point 41, et la jurisprudence y citée). Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (arrêts de la Cour OHMI/Shaker, point 43 supra, point 42, et du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié au Recueil, point 42). Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (arrêt Nestlé/OHMI, précité, point 43).

45      En l’espèce, la chambre de recours a indiqué que, s’agissant de la comparaison entre la marque demandée et les marques purement figuratives antérieures, le terme anglais « seal » de la marque demandée ne peut être considéré comme faisant partie du vocabulaire anglais de base ou même du vocabulaire anglais quotidien, de sorte que sa signification ne sera pas perçue par le public pertinent espagnol ou hongrois, même professionnel, qui pourrait avoir une meilleure compréhension de la langue anglaise que le grand public. La chambre de recours en a déduit que, en l’absence de caractère descriptif des produits en cause dans le territoire, le terme « base-seal » était distinctif et aurait un impact nettement plus important sur le public pertinent que celui de la figure deltoïde dans laquelle il était inscrit. En outre, la chambre de recours a considéré que les formes géométriques étaient souvent utilisées comme fond dans les marques, en ce compris dans l’industrie de la construction. Elles ne seraient presque pas retenues à moins d’être reprises en combinaison avec d’autres éléments plus distinctifs. La chambre de recours a dès lors considéré que l’élément verbal de la marque demandée en lettres capitales était clairement visible et était l’élément dominant et distinctif qui attirerait l’attention du public pertinent et qu’il n’avait rien en commun avec les marques antérieures (voir points 12 à 14 de la décision attaquée).

46      Par ailleurs, la chambre de recours a estimé ne pas pouvoir négliger que même les éléments géométriques des marques en cause étaient différents. Les marques antérieures étaient des rhombes, c’est-à-dire des quadrilatères dont les quatre côtés ont la même longueur, et la couleur utilisée (jaune) était claire. La marque demandée, en revanche, était une figure deltoïde ou avait la forme d’un cerf-volant et était noire avec un cadre blanc. La chambre de recours a considéré que même sans éléments verbaux les marques en cause étaient suffisamment distinctes (voir point 15 de la décision attaquée).

47      En ce qui concerne la comparaison entre la marque demandée et la marque antérieure complexe, la chambre de recours a considéré que celle-ci était dominée par l’élément verbal « Colas », autour duquel la forme de rhombe ou de diamant ne constituait qu’un fond ornemental. Le terme « Colas » n’avait pas de signification, sauf en espagnol où il signifie « queues ». Ce terme était toutefois sans aucun rapport avec les produits en question et était dès lors clairement distinctif. La chambre de recours en a déduit que les marques en cause étaient clairement distinctes (voir points 19 à 22 de la décision attaquée).

48      La requérante conteste cette appréciation au motif, en substance, que la chambre de recours ne pouvait considérer l’élément verbal « base-seal » comme dominant dès lors qu’il était descriptif des produits en cause, qu’elle a dénaturé le signe demandé qui était un losange et non une figure deltoïde comme représenté dans la décision attaquée et qu’il y avait une similitude visuelle et conceptuelle entre les signes en cause en raison de la forme géométrique prépondérante desdits signes.

49      À cet égard, il convient d’abord d’observer que le défendeur admet que la représentation du signe demandé dans la décision attaquée a été déformée en faisant apparaître ce signe plus compact que celui de la demande de marque.

50      Une telle erreur ne peut toutefois entraîner l’annulation de la décision attaquée que si elle est déterminante quant à l’appréciation de la chambre de recours. En effet, si, dans les circonstances particulières du cas d’espèce, une erreur n’a pu avoir une influence déterminante quant au résultat, l’argumentation fondée sur une telle erreur est inopérante et ne saurait donc suffire à justifier l’annulation de la décision attaquée [voir arrêts du Tribunal du 14 mai 2002, Graphischer Maschinenbau/Commission, T‑126/99, Rec. p. II‑2427, point 49, et la jurisprudence y citée, ainsi que du 12 septembre 2007, Philip Morris Products/OHMI (forme d’un paquet de cigarettes), T‑140/06, non publié au Recueil, points 71 et 72].

51      Il importe dès lors d’apprécier si, nonobstant ladite erreur, la chambre de recours pouvait considérer que les marques en cause étaient dissimilaires.

–       Sur la perception de la marque demandée

52      S’agissant de la perception de la marque demandée par le public pertinent, il y a lieu d’observer que le signe demandé se compose d’une figure deltoïde noire avec un liseré blanc dont les deux côtés inférieurs ne sont que légèrement plus courts que les deux côtés supérieurs et qui, de ce fait, ressemble fort à un losange. Dans cette forme géométrique est inscrit en lettres capitales blanches le terme « base-seal ».

53      La chambre de recours a considéré que l’élément verbal de la marque demandée serait perçu comme l’élément distinctif et dominant de ladite marque. Cette appréciation doit être confirmée.

54      En effet, cet élément occupe une place prépondérante dans la marque demandée par rapport à la forme géométrique très proche d’un losange avec un liseré et un fond noir dans laquelle il est inscrit. En outre, c’est normalement l’élément verbal que les consommateurs utilisent pour identifier et acquérir un produit [arrêt du Tribunal du 25 mars 2010, Nestlé/OHMI – Master Beverage Industries (Golden Eagle et Golden Eagle Deluxe), T‑5/08 à T‑7/08, Rec. p. II‑1177, point 43]. D’autant que, en l’espèce, cette expression a un caractère distinctif par rapport aux produits et services en cause. En effet, même si le terme « base » a une signification pour une partie du public pertinent dès lors que ce terme est un terme français et espagnol et qu’il fait partie du vocabulaire anglais de base et même s’il ne peut être exclu que le terme « seal » soit compris par le public pertinent composé de professionnels, l’expression « base-seal » n’est pas une expression consacrée, comme le démontre l’absence de définition pour cette expression dans les extraits de dictionnaires produits par la requérante. En outre, la juxtaposition des termes « base » et « seal » dans ladite expression ne lui confère pas un sens précis en anglais. Elle se réfère tout au plus à un sceau ou à un scellement de base ou situé à la base. Cette absence de sens précis fait obstacle à l’appréhension de ce terme comme un terme descriptif même pour le public professionnel ayant une certaine compréhension de l’anglais. De plus, ainsi que l’indique le défendeur en substance, même si cette expression devait avoir un sens en anglais qui serait descriptif desdits produits en question, le public pertinent, et, en particulier, les professionnels qui en font partie, ne peut être considéré comme ayant une connaissance de l’anglais technique telle qu’il comprendra la signification de ladite expression. En tout état de cause, la circonstance que l’expression « base-seal » soit pour le public pertinent une indication d’un type de produit en cause ne saurait affecter le caractère distinctif et dominant de cette expression étant donné sa taille et sa position dans la marque demandée.

55      La chambre de recours n’indique cependant pas, à juste titre, que le caractère dominant et distinctif de l’élément « base-seal » de la marque demandée est tel qu’il rend les autres éléments de la marque demandée négligeables. En effet, le consommateur pertinent ne considérera toutefois pas la forme géométrique très proche du losange avec un liseré blanc et un fond noir comme étant tout à fait négligeable dans l’impression d’ensemble produite par la marque demandée. Ladite forme géométrique constitue l’encadrement de ladite marque et confère un contraste important à l’expression « base-seal ». C’est dès lors à tort que le défendeur considère que la simplicité des figures géométriques en cause fait obstacle à ce que l’élément figuratif des signes soit mémorisé de manière durable par le public pertinent.

56      Il s’ensuit que la comparaison entre les marques en cause ne saurait se limiter à une comparaison entre les éléments prépondérants de la marque demandée et les marques antérieures.

57      S’agissant des marques antérieures, il n’existe pas non plus d’élément qui domine ces marques à un point tel que les autres éléments soient totalement négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celles-ci. S’agissant des marques antérieures purement figuratives, aucun élément ne peut être considéré comme dominant. S’agissant des marques antérieures complexes, le terme « Colas » ne saurait pourtant être considéré comme dominant au point de rendre le losange jaune avec un liseré dans lequel il est inscrit négligeable.

58      Partant, la comparaison des marques en cause doit se fonder sur l’impression d’ensemble produite par celles-ci et ne peut se limiter à certains de leurs éléments.

–       Sur la comparaison des marques en cause

59      S’agissant de la comparaison de la marque demandée avec les marques antérieures purement figuratives, il y a lieu de considérer qu’elle révèle d’importantes différences visuelles. En effet, la marque demandée comporte l’expression « base-seal » inscrite en blanc sur un fond noir dans une forme géométrique proche du losange avec un liseré alors que les marques antérieures purement figuratives se composent d’un losange jaune avec un liseré. Les différences entre lesdites marques sont particulièrement marquées eu égard au caractère dominant de l’élément verbal « base-seal » dans la marque demandée et aux différentes couleurs desdites marques.

60      Néanmoins, lesdites marques en cause ont un élément de similitude, à savoir leur forme géométrique. En effet, même si la marque demandée ne constitue pas un losange à proprement parler, le public pertinent, qu’il soit composé du grand public ou de professionnels faisant preuve d’une attention élevée, associera la forme géométrique de la marque demandée à un losange.

61      Ainsi, pour le public pertinent la comparaison entre l’impression d’ensemble produite par la marque demandée et celle produite par les marques purement figuratives antérieures révélera une similarité, certes faible, entre lesdites marques eu égard à leur forme géométrique.

62      Cette appréciation est également valable pour la comparaison entre la marque demandée et les marques complexes antérieures dès lors que celles-ci comprennent également un losange.

63      Au vu de l’existence d’un certain degré de similitude sur le plan visuel et sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la comparaison conceptuelle et phonétique des marques en cause, il doit être conclu que c’est à tort que la chambre de recours a estimé, aux points 8 et 21 de la décision attaquée, que les marques en cause ne présentaient aucune similitude. En effet, selon la jurisprudence rappelée aux points 32, 43 et 44 ci-dessus, dès lors qu’il existait une similitude, fût-elle faible, sur l’un des plans entre les marques en conflit, la chambre de recours était tenue de procéder à l’appréciation globale du risque de confusion entre celles-ci (voir, en ce sens, arrêt Golden Eagle et Golden Eagle Deluxe, point 54 supra, point 74).

64      Il résulte de ce qui précède qu’il convient d’accueillir le premier moyen et d’annuler la décision attaquée sur ce fondement, sans qu’il soit besoin d’examiner le second moyen.

 Sur les dépens

65      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

66      L’OHMI ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens conformément aux conclusions de la requérante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) du 4 février 2010 (affaire R 450/2009-4) est annulée pour les produits autres que les produits chimiques utilisés pour la science, pour la photographie, pour l’agriculture, pour l’horticulture et pour le forestier, le fumier et les substances chimiques préservant les produits alimentaires visés dans ladite décision.

2)      L’OHMI est condamné aux dépens.

Azizi

Cremona

Frimodt Nielsen

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 9 mars 2012.

Signatures


* Langue de procédure : le français.