Language of document : ECLI:EU:C:2023:596

ORDONNANCE DE LA COUR (chambre d’admission des pourvois)

17 juillet 2023 (*)

« Pourvoi – Marque de l’Union européenne – Admission des pourvois – Article 170 ter du règlement de procédure de la Cour – Demande ne démontrant pas l’importance d’une question pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union – Non‑admission du pourvoi »

Dans l’affaire C‑280/23 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 1er mai 2023,

Canai Technology Co. Ltd, établie à Guangzhou (Chine), représentée par Mes J. F. Gallego Jiménez, Y. Hernández Viñes, E. Sanz Valls et P. Bauzá Martínez, avocats,

partie requérante,

les autres parties à la procédure étant :

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO),

partie défenderesse en première instance,

Trend Fin BV, établie à Utrecht (Pays-Bas),

partie intervenante en première instance,

LA COUR (chambre d’admission des pourvois)

composée de M. L. Bay Larsen, vice‑président de la Cour, M. G. Xuereb et Mme I. Ziemele (rapporteure), juges,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la proposition de la juge rapporteure et l’avocat général, M. G. Pitruzzella, entendu,

rend la présente

Ordonnance

1        Par son pourvoi, Canai Technology Co. Ltd demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 1er mars 2023, Canai Technology/EUIPO – Trend Fin (HE&ME) (T‑25/22, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2023:99), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision de la première chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 16 novembre 2021 (affaire R 1390/2020-1), relative à une procédure d’opposition entre Trend Fin BV et Canai Technology.

2        En vertu de l’article 58 bis, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, l’examen des pourvois formés contre les décisions du Tribunal portant sur une décision d’une chambre de recours indépendante de l’EUIPO est subordonné à leur admission préalable par la Cour.

3        Conformément à l’article 58 bis, troisième alinéa, de ce statut, le pourvoi est admis, en tout ou en partie, selon les modalités précisées dans le règlement de procédure de la Cour, lorsqu’il soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

4        Aux termes de l’article 170 bis, paragraphe 1, du règlement de procédure, dans les situations visées à l’article 58 bis, premier alinéa, dudit statut, la partie requérante annexe à sa requête une demande d’admission du pourvoi dans laquelle elle expose la question importante que soulève le pourvoi pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union et qui contient tous les éléments nécessaires pour permettre à la Cour de statuer sur cette demande.

5        Conformément à l’article 170 ter, paragraphes 1 et 3, du règlement de procédure, la Cour statue sur la demande d’admission du pourvoi dans les meilleurs délais par voie d’ordonnance motivée.

6        À l’appui de sa demande d’admission du pourvoi, la requérante soulève, en substance, un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1), en raison d’une appréciation erronée de la comparaison des marques en conflit.

7        La requérante relève que le Tribunal a méconnu les principes issus de la jurisprudence pertinente du juge de l’Union. Tout d’abord, il y aurait lieu de prendre en considération les éléments distinctifs et dominants. Ensuite, s’agissant des marques verbales, le début du signe jouerait en général un rôle important pour l’impression d’ensemble produite par la marque. À cet égard, une coïncidence dans un élément ayant un faible caractère distinctif n’entraînerait normalement pas à elle seule un risque de confusion. Par ailleurs, le Tribunal aurait ignoré le principe selon lequel la longueur des signes doit également être prise en compte. Enfin, le Tribunal aurait méconnu le principe de « neutralisation ». Or, la méconnaissance des principes susmentionnés porterait atteinte à l’unité et à la cohérence du droit de l’Union.

8        En outre, selon la requérante, l’arrêt attaqué comporterait une contradiction de motifs s’agissant du rôle du caractère distinctif des éléments verbaux composant les marques en conflit. En effet, cet arrêt ne permettrait pas de déterminer si le Tribunal a tenu compte ou non du caractère distinctif des éléments verbaux composant ces marques. Une telle contradiction porterait atteinte à la cohérence du droit de l’Union.

9        À titre liminaire, il convient de relever que c’est au requérant qu’il incombe de démontrer que les questions soulevées par son pourvoi sont importantes pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union (ordonnances du 10 décembre 2021, EUIPO/The KaiKai Company Jaeger Wichmann, C‑382/21 P, EU:C:2021:1050, point 20, et du 13 juin 2023, Grupa « LEW »/EUIPO, C‑38/23 P, EU:C:2023:494, point 13).

10      En outre, ainsi qu’il ressort de l’article 58 bis, troisième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, lu en combinaison avec l’article 170 bis, paragraphe 1, et l’article 170 ter, paragraphe 4, du règlement de procédure, la demande d’admission du pourvoi doit contenir tous les éléments nécessaires pour permettre à la Cour de statuer sur l’admission du pourvoi et de déterminer, en cas d’admission partielle de ce dernier, les moyens ou les branches du pourvoi sur lesquels le mémoire en réponse doit porter. En effet, étant donné que le mécanisme d’admission préalable des pourvois visé à l’article 58 bis de ce statut tend à limiter le contrôle de la Cour aux questions revêtant une importance pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union, seuls les moyens soulevant de telles questions et établis par le requérant doivent être examinés par la Cour dans le cadre du pourvoi (ordonnances du 10 décembre 2021, EUIPO/The KaiKai Company Jaeger Wichmann, C‑382/21 P, EU:C:2021:1050, point 21, et du 8 mai 2023, Studio Legale Ughi e Nunziante/EUIPO, C‑776/22 P, EU:C:2023:441, point 17).

11      Ainsi, une demande d’admission du pourvoi doit, en tout état de cause, énoncer de façon claire et précise les moyens sur lesquels le pourvoi est fondé, identifier avec la même précision et la même clarté la question de droit soulevée par chaque moyen, préciser si cette question est importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union et exposer de manière spécifique les raisons pour lesquelles ladite question est importante au regard du critère invoqué. En ce qui concerne, en particulier, les moyens du pourvoi, la demande d’admission du pourvoi doit préciser la disposition du droit de l’Union ou la jurisprudence qui aurait été méconnue par l’arrêt ou l’ordonnance sous pourvoi, exposer de manière succincte en quoi consiste l’erreur de droit prétendument commise par le Tribunal et indiquer dans quelle mesure cette erreur a exercé une influence sur le résultat de l’arrêt ou l’ordonnance sous pourvoi. Lorsque l’erreur de droit invoquée résulte de la méconnaissance de la jurisprudence, la demande d’admission du pourvoi doit exposer, de façon succincte mais claire et précise, premièrement, où se situe la contradiction alléguée, en identifiant tant les points de l’arrêt ou de l’ordonnance sous pourvoi que le requérant met en cause que ceux de la décision de la Cour ou du Tribunal qui auraient été méconnus, et, deuxièmement, les raisons concrètes pour lesquelles une telle contradiction soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union (ordonnances du 10 décembre 2021, EUIPO/The KaiKai Company Jaeger Wichmann, C‑382/21 P, EU:C:2021:1050, point  22, et du 8 mai 2023, Studio Legale Ughi e Nunziante/EUIPO, C‑776/22 P, EU:C:2023:441, point 18).

12      En effet, une demande d’admission du pourvoi ne contenant pas les éléments énoncés au point précédent de la présente ordonnance ne saurait, d’emblée, être susceptible de démontrer que le pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union justifiant son admission (ordonnances du 24 octobre 2019, Porsche/EUIPO, C‑613/19 P, EU:C:2019:905, point 16, et du 13 juin 2023, Grupa « LEW »/EUIPO, C‑38/23 P, EU:C:2023:494, point 16).

13      En l’occurrence, s’agissant de l’argumentation résumée au point 7 de la présente ordonnance, tirée de la méconnaissance des principes issus de la jurisprudence pertinente du juge de l’Union, il convient de rappeler que l’allégation selon laquelle le Tribunal aurait méconnu la jurisprudence pertinente de la Cour et sa propre jurisprudence n’est pas, en soi, suffisante pour établir, conformément à la charge de la preuve qui pèse sur l’auteur d’une demande d’admission d’un pourvoi, que ce pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union, le demandeur devant respecter, à cette fin, l’ensemble des exigences énoncées au point 11 de la présente ordonnance (voir, par analogie, ordonnance du 5 décembre 2022, Tigercat International/EUIPO, C‑612/22 P, EU:C:2022:959, point 14 et jurisprudence citée).

14      Or, force est de constater que, en l’espèce, la requérante n’explique pas avec précision et clarté les raisons pour lesquelles la prétendue contradiction entre les appréciations du Tribunal et la jurisprudence invoquée soulèverait une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

15      En outre, en ce qui concerne l’argumentation résumée au point 8 de la présente ordonnance, il résulte de la jurisprudence constante de la Cour que la question de savoir si un arrêt du Tribunal est entaché d’un défaut, d’une insuffisance ou d’une contradiction de motivation constitue une question de droit pouvant être invoquée dans le cadre d’un pourvoi (ordonnance du 30 novembre 2021, Lee/EUIPO, C‑381/21 P, non publiée, EU:C:2021:970, point 16 et jurisprudence citée).

16      En revanche, le fait qu’un pourvoi soulève une telle question de droit ne permet pas, en soi, de considérer que ce pourvoi doit être admis par la Cour au sens de l’article 58 bis du statut. En effet, une telle admission est subordonnée, ainsi qu’il découle des points 2 à 4 de la présente ordonnance, au respect de conditions spécifiques consistant, pour le requérant au pourvoi, à démontrer, notamment, que, indépendamment des questions de droit invoquées dans son pourvoi, ce dernier soulève une ou plusieurs questions importantes pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union. Cette démonstration implique elle-même d’établir tant l’existence que l’importance de telles questions, au moyen d’éléments concrets et propres au cas d’espèce, et non pas simplement d’arguments d’ordre général (voir, en ce sens, ordonnance du 30 novembre 2021, Lee/EUIPO, C‑381/21 P, EU:C:2021:970, point 17 et jurisprudence citée).

17      Or, si la requérante soutient que l’arrêt attaqué est entaché d’une contradiction s’agissant du rôle du caractère distinctif des éléments verbaux composant les marques en conflit, elle ne précise nullement les raisons pour lesquelles cette prétendue contradiction de motivation de l’arrêt attaqué soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union, en méconnaissance des exigences énoncées au point 11 de la présente ordonnance.

18      Dans ces conditions, il convient de constater que la demande présentée par la requérante n’est pas de nature à établir que le pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

19      Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de ne pas admettre le pourvoi.

 Sur les dépens

20      Aux termes de l’article 137 du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de ce règlement, il est statué sur les dépens dans l’ordonnance qui met fin à l’instance.

21      La présente ordonnance étant adoptée avant que le pourvoi n’ait été signifié aux autres parties à la procédure et, par conséquent, avant que celles-ci n’aient pu exposer des dépens, il convient de décider que la requérante supportera ses propres dépens.

Par ces motifs, la Cour (chambre d’admission des pourvois) ordonne :

1)      Le pourvoi n’est pas admis.

2)      Canai Technology Co. Ltd supporte ses propres dépens.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.