Language of document : ECLI:EU:T:2023:435

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

26 juillet 2023 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne verbale Passo Lungo – Marque nationale verbale antérieure Doppio Passo – Motif relatif de refus – Absence de risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 – Article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑745/21,

Rotkäppchen-Mumm Sektkellereien GmbH, établie à Freyburg (Allemagne), représentée par Mes K. Schmidt-Hern et A. Lubberger, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. R. Raponi, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été

Cantina Sociale Cooperativa San Donaci, établie à San Donaci (Italie),

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de Mme K. Kowalik‑Bańczyk, présidente, M. E. Buttigieg et Mme B. Ricziová (rapporteure), juges,

greffier : Mme R. Ūkelytė, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 16 mars 2023,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Rotkäppchen-Mumm Sektkellereien GmbH, demande l’annulation de la décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 20 septembre 2021 (affaire R 130/2021-4) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 14 juin 2019, l’autre partie à la procédure devant l’EUIPO, Cantina Sociale Cooperativa San Donaci, a présenté à l’EUIPO une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe verbal Passo Lungo.

3        La marque demandée désignait les produits relevant de la classe 33 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondant, pour cette classe, à la description suivante : « Boissons alcoolisées à l’exception des bières ».

4        Le 4 septembre 2019, la requérante a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

5        L’opposition était fondée sur la marque allemande verbale antérieure Doppio Passo, enregistrée le 19 avril 2013 pour désigner les produits relevant de la classe 33 et correspondant à la description suivante : « Boissons alcoolisées à l’exception des bières ».

6        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

7        Le 20 novembre 2020, la division d’opposition a fait droit à l’opposition sur le fondement de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

8        Le 20 janvier 2021, l’autre partie à la procédure devant l’EUIPO a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’opposition.

9        Par la décision attaquée, la chambre de recours a annulé la décision de la division d’opposition et rejeté l’opposition dans son intégralité.

10      Elle a conclu que, au regard du faible degré de similitude visuelle et phonétique entre les signes, de l’absence de toute similitude conceptuelle et du caractère distinctif tout au plus normal de la marque antérieure, il n’existait pas de risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, et ce même en tenant compte de l’identité des produits en cause et d’un niveau d’attention moyen du public pertinent.

 Conclusions des parties

11      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

12      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours dans son intégralité ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

13      À l’appui du recours, la requérante invoque deux moyens, tirés, le premier, en substance, de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, et le second, de la violation de l’article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001.

14      Il convient d’examiner le second moyen avant le premier moyen.

 Sur le second moyen tiré de la violation de l’article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001

15      Selon la requérante, la chambre de recours a violé l’article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, car elle n’a pas pris en compte les éléments soumis pour établir le succès commercial des produits vendus sous la marque antérieure comme preuves du caractère distinctif renforcé de cette marque. À cet égard, la requérante se réfère, en premier lieu, aux deux graphiques soumis dans le cadre de la procédure devant l’EUIPO et désignés par elle-même comme les « graphiques de Nielsen », montrant les ventes et les parts de marché des vins produits en 2017 et 2018.

16      En deuxième lieu, dans le même contexte, la requérante se réfère à des éléments de preuve qu’elle affirme avoir produit dans le cadre de la procédure devant l’EUIPO, à savoir les photographies des étiquettes comportant la marque antérieure  Doppio Passo  que la requérante utiliserait pour commercialiser les vins, des photographies de bouteilles de vin portant cette étiquette, une liste des cas de reconnaissance par l’industrie et de prix décernés aux vins commercialisés sous la marque  Doppio Passo , et les factures de 2010 à 2018 montrant les ventes de vins sous la marque Doppio Passo.

17      En troisième lieu, la requérante joint, en annexe A.7, une déclaration sous serment signée par le gérant de la société distributrice exclusive des vins  Doppio Passo  en Allemagne, qui a pour vocation de confirmer les données figurant dans les graphiques décrits au point 15 ci-dessus. Elle joint également, en annexe A.8, des graphiques relatifs aux chiffres de vente et aux chiffres d’affaires de la marque antérieure pour 2019, 2020 et 2021 ainsi que, en annexe A.9, un graphique relatif au développement du chiffre d’affaires de 2013 à 2021.

18      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

19      Aux termes de l’article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, dans une procédure concernant les motifs relatifs de refus d’enregistrement, l’examen de l’EUIPO est limité aux moyens invoqués et aux demandes présentés par les parties, de sorte que la chambre de recours ne saurait fonder sa décision que sur les motifs relatifs de refus que la partie concernée a invoqués ainsi que sur les faits et les preuves s’y rapportant présentés par les parties (arrêt du 18 juin 2020, Primart/EUIPO, C‑702/18 P, EU:C:2020:489, point 41).

20      À cet égard, dans la mesure où la requérante soutient que la chambre de recours n’a pas pris en compte les éléments de preuve indiqués aux points 15 à 17 ci-dessus, il importe de relever, premièrement, que dans le cadre de l’examen du caractère distinctif de la marque antérieure, la chambre de recours a examiné les deux graphiques désignés par la requérante comme les « graphiques de Nielsen », décrits au point 15 ci-dessus, et a constaté qu’ils ne prouvaient pas un degré suffisant de notoriété de la marque antérieure parmi les consommateurs sur le territoire pertinent pour conclure à l’existence d’un caractère distinctif accru, et a renvoyé, dans ce contexte, aux conclusions de la division d’opposition. Ainsi, force est de constater que la chambre de recours a pris en compte ces éléments de preuve lors de l’appréciation du caractère distinctif de la marque antérieure.

21      Deuxièmement, s’agissant des éléments de preuve décrits au point 16 ci-dessus, il suffit de constater qu’ils n’ont pas été produits par la requérante ni dans le cadre de la procédure devant l’EUIPO précédant l’adoption de la décision attaquée ni devant le Tribunal. Cette constatation a d’ailleurs été confirmée par la requérante et par l’EUIPO lors de l’audience. Partant, la requérante ne saurait utilement se prévaloir de ces éléments de preuve pour remettre en cause la légalité de la décision attaquée. En effet, le contrôle de légalité doit être effectué au regard des seuls éléments qui ont été communiqués dans le cadre de la procédure administrative devant l’EUIPO et qui figurent dans le dossier de celui-ci [voir, en ce sens, arrêt du 13 mai 2020, Divaro/EUIPO – Grendene (IPANEMA), T‑288/19, non publié, EU:T:2020:201, point 70].

22      Troisièmement, concernant les éléments de preuve figurant aux annexes A.7, A.8, et A.9, l’EUIPO conteste leur recevabilité au motif qu’ils ont été produits pour la première fois devant le Tribunal.

23      Il y a lieu de constater que, à l’instar des éléments de preuve décrits au point 16 ci-dessus, les éléments de preuve figurant dans les annexes A.7, A.8 et A.9 n’ont pas été produits dans le cadre de la procédure devant l’EUIPO.

24      À cet égard, il convient de considérer que ces documents produits pour la première fois devant le Tribunal ne peuvent pas être pris en considération. En effet, le recours devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’EUIPO au sens de l’article 72 du règlement 2017/1001, de sorte que la fonction du Tribunal n’est pas de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des documents présentés pour la première fois devant lui [voir arrêt du 18 mars 2016, Karl-May-Verlag/OHMI – Constantin Film Produktion (WINNETOU), T‑501/13, EU:T:2016:161, point 17 et jurisprudence citée ; arrêt du 6 avril 2022, Dorit-DFT/EUIPO – Erwin Suter (DORIT), T‑208/21, non publié, EU:T:2022:228, points 15 à 17]. Partant, les documents figurant dans les annexes A.7, A.8 et A.9 doivent être déclarés irrecevables, sans qu’il soit nécessaire de les examiner.

25      Par conséquent, il convient de rejeter le second moyen comme non fondé.

 Sur le premier moyen, tiré, en substance, de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b) du règlement 2017/1001

26      La requérante soutient, en substance, que la chambre de recours a violé l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 en concluant, d’une part, aux points 23 et 24 de la décision attaquée, que les deux signes en cause possèdent un faible degré de similitude sur les plans visuel et phonétique, et d’autre part, au point 33 de la décision attaquée, qu’il n’y a pas de risque de confusion. Concernant le risque de confusion, la requérante soutient, notamment, que la chambre de recours n’a pas correctement traité l’aspect de la similitude conceptuelle dans la mesure où la comparaison conceptuelle demeure « neutre », et donc, ne peut servir d’argument contre le risque de confusion.

27      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

28      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

29      Constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, en tenant compte de tous les facteurs caractérisant le cas d’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

30      En l’espèce, aux points 17 et 29 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté que le public pertinent était le grand public, que son niveau d’attention était moyen et que le territoire pertinent était celui de l’Allemagne. Ces appréciations de la chambre de recours ne sont pas contestées par la requérante.

31      En outre, il est constant que les produits relevant de la classe 33 désignés par la marque demandée sont identiques aux produits relevant de la même classe visés par la marque antérieure.

 Sur le premier grief du premier moyen tiré de l’appréciation erronée du degré de similitude des signes sur les plans visuel et phonétique

32      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne les similitudes visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

33      En l’espèce, la chambre de recours a conclu que les signes étaient similaires sur le plan visuel et phonétique à un faible degré.

34      Les signes à comparer sont deux marques verbales composées chacune de deux mots italiens, à savoir « passo » et « lungo » dans le cas de la marque demandée ainsi que « doppio » et « passo » dans le cas de la marque antérieure.

35      Il y a lieu de relever que la constatation de la chambre de recours selon laquelle les éléments verbaux « passo », « lungo » et « doppio » possèdent un caractère distinctif identique dans les marques en cause n’est pas contestée par la requérante.

36      Sur le plan visuel, il convient d’observer que le seul élément commun des marques en conflit est le mot « passo » qui, néanmoins, occupe une position différente dans les deux marques, à savoir, la partie initiale de la marque demandée et la partie finale de la marque antérieure. Il est accompagné dans les marques demandée et antérieure par, respectivement, les mots « lungo » et « doppio », lesquels ne partagent que la voyelle « o » située notamment à la fin de ces mots et le même nombre de syllabes. De plus, ces mots sont aussi longs ou plus longs que le terme commun.

37      Il importe également de rappeler que le consommateur prête, en général, plus d’attention à la partie initiale d’une marque qu’à sa fin [voir arrêt du 6 avril 2022, Mandelay/EUIPO – Qx World (QUEST 9), T‑516/20, non publié, EU:T:2022:227, point 79 et jurisprudence citée]. En l’espèce, les éléments initiaux des signes en conflit, « passo » et « doppio », sont différents sur le plan visuel et ce même s’ils coïncident par la présence de la voyelle « o » notamment à la fin de ces mots et de la consonne « p » occupant toutefois une position différente dans chacun de ces mots. De plus, ils présentent une longueur légèrement différente.

38      En ce qui concerne l’impression visuelle d’ensemble produite par les marques en conflit, il convient de relever qu’elles coïncident partiellement, notamment en raison de la présence dans les deux marques de l’élément verbal « passo », lequel représente, toutefois, uniquement cinq des dix lettres de la marque demandée et cinq des onze lettres de la marque antérieure, et occupe une position différente. De plus, les différences entre les éléments n’étant pas communs des signes en conflit, combinées au fait que les mots placés dans leurs parties initiales, à laquelle le public pertinent accorde généralement plus d’attention, sont différents, compensent l’identité partielle entre ces signes due à la présence du mot « passo » qu’ils ont en commun.

39      Partant, c’est sans commettre d’erreur d’appréciation que la chambre de recours a considéré que les signes en conflit présentaient dans l’ensemble sur le plan visuel un faible degré de similitude.

40      Sur le plan phonétique, les marques en conflit ont le même nombre de syllabes, dont deux communes, « pas » et « so ». Toutefois, les parties initiales « passo » et « doppio » des signes en conflit, auxquelles les consommateurs accordent généralement plus d’attention, ne partagent aucune syllabe de sorte que leur prononciation présente de nettes différences, ce qui influence de manière importante la prononciation de chacune des marques prises dans leur ensemble. En effet, les deux premiers mots n’ont en commun qu’une seule consonne, « p », qui occupe toutefois une position différente dans les deux mots, et qu’une seule voyelle, « o », qui occupe, inter alia, une position identique à la fin des mots.

41      Partant, c’est sans commettre d’erreur d’appréciation que la chambre de recours a considéré que les signes en conflit présentaient dans l’ensemble sur le plan phonétique un faible degré de similitude. 

42      Les arguments de la requérante ne sont pas susceptibles de remettre en cause ces conclusions.

43      Premièrement, même en tenant compte du fait que les deux signes en conflit ont le même nombre de syllabes, se terminent aussi par la même voyelle « o », et, à supposer même que les voyelles « u » et « o », figurant au milieu des éléments « lungo » et « doppio », sont visuellement et phonétiquement similaires pour le public allemand, ces circonstances ne sauraient entraîner un degré plus élevé de similitude entre ces signes en raison des nettes différences qu’ils présentent sur les plans visuel et phonétique.

44      Deuxièmement, la requérante fait valoir que la chambre de recours s’est appuyée à tort sur le principe selon lequel le public est plus attentif au début du signe, et que, dans la mesure où le public n’est en général pas confronté aux marques en conflit en même temps, il est peu probable qu’il se souvienne si le terme « passo » était le premier ou le second élément de la marque antérieure. À cet égard, il convient de rappeler que, effectivement, si le consommateur moyen n’a que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différentes marques, il doit dès lors se fier à l’image imparfaite de celles-ci qu’il a gardée en mémoire (voir arrêt du 26 avril 2007, Alcon/OHMI, C‑412/05 P, EU:C:2007:252, point 60 et jurisprudence citée). Toutefois, cette constatation ne remet pas en cause le fait selon lequel les consommateurs ont tendance à prêter davantage d’attention au début des signes. En effet, l’argument de la requérante remettrait en cause ledit concept dans une hypothèse non étayée que les consommateurs garderaient en mémoire spécifiquement le mot commun « passo » malgré le fait qu’il n’est ni plus distinctif ni dominant par rapport aux autres éléments, et qu’il occupe une position différente dans les marques en conflit.

45      Troisièmement, concernant l’argumentation tirée de ce que le faible degré de similitude constaté par la chambre de recours ne reflète pas suffisamment le caractère distinctif de l’élément commun « passo » et est, à cet égard, contraire à la jurisprudence du Tribunal, il importe de relever que la jurisprudence citée par la requérante concerne des situations factuelles et juridiques différentes de celles de l’espèce.

46      En particulier, il convient d’observer, tout d’abord, que, à la différence de la présente affaire, dans l’arrêt du 14 mai 2013, Masottina/OHMI – Bodegas Cooperativas de Alicante (CA’ MARINA) (T‑393/11, non publié, EU:T:2013:241), l’élément commun « marina » était le plus long des termes composant les signes et celui produisant l’impression la plus forte sur les consommateurs. De même, dans les affaires à l’origine des arrêts du 22 septembre 2016, Sun Cali/EUIPO – Abercrombie & Fitch Europe (SUN CALI) (T‑512/15, EU:T:2016:527), et du 13 septembre 2018, Eduard Meier/EUIPO – Calzaturificio Elisabet (Safari Club) (T‑418/17, non publié, EU:T:2018:540), les signes en cause partageaient l’élément le plus long. Par ailleurs, dans mesure où la requérante déduit des arrêts du 4 février 2016, Meica/OHMI – Salumificio Fratelli Beretta (STICK MiniMINI Beretta) (T‑247/14, EU:T:2016:64), et du 15 octobre 2018, Apple and Pear Australia et Star Fruits Diffusion/EUIPO – Pink Lady America (WILD PINK) (T‑164/17, non publié, EU:T:2018:678), qu’il est arbitraire d’attribuer un degré de similitude faible aux signes dont l’élément commun est distinctif, il suffit de constater que le seul fait qu’un élément commun des signes en conflit est distinctif n’entraîne pas nécessairement un degré de similitude de ces signes supérieur à un faible degré, l’appréciation de la similitude des signes devant être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci.

47      Quatrièmement, dans la mesure où la requérante se réfère dans son argumentation aux décisions de l’EUIPO, il suffit de rappeler que les décisions que l’EUIPO est amené à prendre, en vertu du règlement 2017/1001, concernant l’enregistrement d’un signe en tant que marque de l’Union européenne, relèvent de l’exercice d’une compétence liée et non pas d’un pouvoir discrétionnaire. Dès lors, la légalité desdites décisions doit être appréciée uniquement sur le fondement de ce règlement, tel qu’interprété par le juge de l’Union, et non sur celui d’une pratique décisionnelle antérieure à celles-ci (voir, en ce sens, arrêt du 26 avril 2007, Alcon/OHMI, C‑412/05 P, EU:C:2007:252, point 65).

48      Au vu de ce qui précède, il convient de rejeter le premier grief du premier moyen comme non fondé.

 Sur le second grief du premier moyen tiré de l’appréciation erronée du risque de confusion

49      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74].

50      En l’espèce, la chambre de recours a conclu, au point 33 de la décision attaquée, que compte tenu du faible degré de similitude visuelle et phonétique entre les signes et de l’absence de toute similitude conceptuelle, ainsi que du caractère distinctif tout au plus normal de la marque antérieure, il n’existait pas de risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, et ce même en tenant compte de l’identité des produits en cause et d’un niveau d’attention moyen du public pertinent.

51      La requérante conteste cette appréciation du risque de confusion en faisant valoir, d’une part, que la chambre de recours n’a pas correctement apprécié les aspects relatifs à la similitude des signes, comme énoncé dans le premier grief du premier moyen, et, d’autre part, qu’elle n’a pas correctement pris en compte la conclusion afférente à la comparaison conceptuelle en invoquant l’absence de toute similitude conceptuelle comme l’une des raisons excluant le risque de confusion alors que la comparaison conceptuelle avait été qualifiée de neutre.

52      En premier lieu, en ce qui concerne le reproche relatif à l’appréciation erronée de la similitude des signes sur les plans visuel et phonétique, il y a lieu de renvoyer à l’examen du premier grief du premier moyen effectué aux points 35 à 47 ci-dessus.

53      En second lieu, la chambre de recours s’est certes fondée, au point 33 de la décision attaquée, sur l’absence de similitude conceptuelle aux fins de l’appréciation du risque de confusion alors qu’elle avait, en substance, relevé, au point 25 de cette décision, que la comparaison conceptuelle n’était pas possible en l’espèce. Toutefois, il convient de relever que cette seule circonstance ne suffit pas à remettre en cause ladite appréciation. En effet, compte tenu du faible degré de similitude visuelle et phonétique, du niveau d’attention moyen du public pertinent et du caractère distinctif normal de la marque antérieure, la chambre de recours a constaté, à juste titre, que le risque de confusion n’était pas établi, nonobstant l’identité des produits en cause.

54      Au vu de ce qui précède, il convient d’écarter également le second grief du premier moyen comme non fondé, et par voie de conséquence, de rejeter le premier moyen dans son ensemble.

55      Aucun des moyens invoqués par la requérante n’étant fondé, il convient de rejeter le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

56      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

57      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Rotkäppchen-Mumm Sektkellereien GmbH est condamnée aux dépens.

Kowalik-Bańczyk

Buttigieg

Ricziová

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 26 juillet 2023.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.