Language of document : ECLI:EU:T:1998:86

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

12 mai 1998 (1)

«Fonctionnaires — Recrutement — Emploi de chef de délégation de la Commission — Avis de vacance d'emploi — Légalité — Décision de rejet de candidature — Obligation de motivation — Examen comparatif des mérites des candidats — Pouvoir d'appréciation de l'AIPN — Protection de la confiance légitime — Devoir de sollicitude»

Dans l'affaire T-159/96,

Rüdiger Wenk, fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Caracas, représenté par Me Nicolas Lhoëst, avocat au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de la fiduciaire Myson SARL, 30, rue de Cessange,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. Julian Currall et Mme Christine Berardis-Kayser, membres du service juridique, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d'annulation de la décision de la Commission du 2 février 1996 portant rejet de la candidature du requérant au poste de chef de la délégation de la Commission à San José.

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (cinquième chambre),

composé de MM. J. Azizi, président, R. García-Valdecasas et M. Jaeger, juges,

greffier: M. J. Palacio González, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 11 décembre 1997,

rend le présent

Arrêt

Faits à l'origine du litige

1.
    La Commission des Communautés européennes a publié le 16 novembre 1995 l'avis de vacance d'emploi COM/121/95 (ci-après «avis de vacance») en vue de pourvoir un emploi de grade A 5/A 4 de chef de la délégation de la Commission au Costa Rica, à San José.

2.
    L'avis de vacance exigeait des candidats à l'emploi à pourvoir les qualifications suivantes:

—    des connaissances approfondies des politiques communautaires et du fonctionnement de l'Union européenne dans ses aspects économiques et politiques, ainsi qu'en ce qui concerne ses relations extérieures;

—    une aptitude à diriger une équipe dans un environnement socio-culturel différent;

—    une expérience appropriée à la fonction.

3.
    Le requérant, qui est fonctionnaire de la Commission de grade A 4 affecté à la délégation de la Commission au Venezuela, a déposé sa candidature pour l'emploi en question.

4.
    Le comité consultatif des nominations a retenu trois candidatures, dont celle du requérant.

5.
    Par décision du 30 janvier 1996, la Commission a nommé M. K. à l'emploi en question.

6.
    Par courrier daté du 2 février 1996, le requérant a été informé, au moyen d'un formulaire type, de la décision de la Commission de ne pas retenir sa candidature.

7.
    Par courrier daté du 19 avril 1996, le requérant a invité la Commission, par l'intermédiaire de son conseil, à lui communiquer les critères retenus pour l'emploi vacant et à porter à sa connaissance l'examen comparatif des mérites auquel l'autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après «AIPN») a procédé en vue d'attribuer l'emploi en question.

8.
    Le requérant, qui n'avait pas reçu de réponse à son courrier, a déposé le 13 mai 1996, une réclamation au titre de l'article 90, paragraphe 2, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après «statut»).

9.
    N'ayant reçu aucune réponse dans un délai de quatre mois, le requérant a considéré que cette réclamation avait fait l'objet d'une décision implicite de rejet en date du 13 septembre 1996.

Procédure et conclusions des parties

10.
    C'est dans ces conditions que, par requête déposée au greffe du Tribunal le 15 octobre 1996, le requérant a introduit le présent recours.

11.
    Le 20 novembre 1996, le requérant s'est vu notifier par la Commission une décision de rejet de sa réclamation datée du 11 septembre 1996.

12.
    Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (cinquième chambre) a décidé, d'une part, d'adopter une mesure d'organisation de la procédure en invitant la Commission à répondre par écrit à une question et à produire certains documents et, d'autre part, d'ouvrir la procédure orale.

13.
    Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales du Tribunal lors de l'audience publique qui s'est déroulée le 11 décembre 1997.

14.
    Le requérant conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

—    annuler la décision portant rejet de la candidature du requérant à l'emploi visé par l'avis de vacance COM/121/95, en ce compris la décision notifiée au requérant moyennant l'envoi d'un formulaire type daté du 2 février 1996;

—    annuler, pour autant que de besoin, la décision implicite de rejet que la Commission a adoptée en s'abstenant de répondre à la réclamation du requérant;

—    annuler toutes décisions connexes adoptées par la Commission, notamment celle portant nomination de M. K. à l'emploi litigieux;

—    condamner la Commission à procéder une nouvelle fois au pourvoi de l'emploi litigieux, conformément aux dispositions du statut;

—    condamner la Commission aux dépens.

15.
    La Commission conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

—    condamner la Commission à payer au requérant une somme à évaluer ex aequo et bono à titre de dommages et intérêts pour faute de service;

—    rejeter le recours comme non fondé sur les autres points;

—    condamner le requérant aux dépens pour tout acte ultérieur à la requête introductive d'instance.

Sur le fond

16.
    Le requérant soulève trois moyens à l'appui de son recours. Le premier est tiré de l'illégalité de l'avis de vacance, le deuxième est tiré d'une violation des articles 7, paragraphe 1, 27 et 45, paragraphe 1, du statut, du principe de protection de la confiance légitime et du devoir de sollicitude et, enfin, le troisième est tiré d'une violation de l'article 25 du statut.

1. Sur le moyen tiré de l'illégalité de l'avis de vacance

Arguments des parties

17.
    Le requérant rappelle que tout avis de vacance d'emploi doit informer les intéressés, d'une façon aussi exacte que possible, de la nature des conditions requises pour occuper le poste à pourvoir, afin de les mettre en mesure d'apprécier s'il y a lieu pour eux de faire acte de candidature (arrêts de la Cour du 30 octobre 1974, Grassi/Conseil, 188/73, Rec. p. 1099, point 40, du 28 juin 1979, Anselme et Constant/Commission, 255/78, Rec. p. 2323, et du 19 mai 1983, Mavridis/Parlement, 289/81, Rec. p. 1731; arrêt du Tribunal du 3 mars 1993, Booss et Fischer/Commission, T-58/91, Rec. p. II-147, point 67).

18.
    Le requérant considère que, en l'espèce, l'avis de vacance ne répondait pas à cette condition et qu'il est, partant, illégal. En effet, il aurait été formulé en des termes extrêmement vagues qui n'auraient pas permis à l'éventuel candidat de mesurer avec précision les qualifications qui étaient requises pour l'emploi à pourvoir et il se serait limité à indiquer quelques considérations générales qui seraient identiques pour tous les emplois vacants de chef de délégation de la Commission.

19.
    Le requérant en conclut que la Commission a donc opté pour une politique consistant à publier des avis de vacance extrêmement peu précis afin de pouvoir recueillir un maximum de candidatures et adapter ensuite les exigences requises de l'emploi à pourvoir aux qualifications du candidat choisi.

20.
    Le requérant estime que cette pratique est totalement illégale, d'une part, parce qu'elle permet à l'AIPN de prendre connaissance des candidatures avant de fixer les exigences réelles de l'emploi à pourvoir, le requérant renvoyant dans ce contexte à l'arrêt du Tribunal du 17 mai 1995, Kratz/Commission (T-10/94, RecFP p. II-315, points 57 à 59), et d'autre part, parce qu'elle ne permet pas aux intéressés de mentionner leurs qualifications les plus adaptées à l'emploi qu'ils convoitent.

21.
    Le requérant expose, enfin, que cette illégalité lui fait grief. En effet, en raison de l'absence de précision de l'avis de vacance, il n'aurait pas pu faire valoir ses qualités les plus appropriées pour le poste à pourvoir et sa candidature n'aurait donc pas été retenue. Pour procéder à la nomination de M. K., l'AIPN, pour autant qu'elle ait procédé à un examen comparatif des mérites, ce que le requérant conteste, aurait retenu, comme critères déterminants, des qualifications non précisées dans l'avis de vacance.

22.
    Le requérant en conclut que l'illégalité de l'avis de vacance justifie l'annulation de toutes les décisions que la Commission a adoptées à la suite de la publication de cet avis, notamment sa décision de rejeter la candidature du requérant ainsi que sa décision de nommer M. K. à l'emploi litigieux.

23.
    La Commission considère que ce moyen n'est pas fondé.

Appréciation du Tribunal

24.
    La fonction de l'avis de vacance est, d'une part, d'informer les intéressés d'une façon aussi exacte que possible sur la nature des conditions requises pour occuper l'emploi à pourvoir afin de les mettre en mesure d'apprécier s'il y a lieu pour eux de faire acte de candidature (arrêt Grassi/Conseil, cité au point 17 ci-dessus, point 40) et, d'autre part, de fixer le cadre de légalité dans lequel l'institution entend procéder à l'examen comparatif des mérites des candidats (arrêt de la Cour du 7 février 1990, Culin/Commission, C-343/87, Rec. p. I-225, point 19).

25.
    L'AIPN ne respecte pas ce cadre de légalité si elle ne s'avise des conditions particulières requises pour occuper l'emploi à pourvoir qu'après la publication de l'avis de vacance, au vu des candidats qui se sont présentés, et si elle prend en considération, lors de l'examen des candidatures, d'autres conditions que celles qui figurent dans l'avis de vacance. Une telle démarche priverait, en effet, l'avis de vacance du rôle essentiel qu'il doit assumer dans la procédure de recrutement (voir, par exemple, les arrêts du Tribunal Booss et Fischer/Commission, cité au point 17 ci-dessus, point 67, et du 29 mai 1997, Contargyris/Conseil, T-6/96, RecFP p. II-357, point 98).

26.
    Il y a lieu d'examiner, en premier lieu, si l'avis de vacance était, comme le prétend le requérant, rédigé en des termes tellement généraux et imprécis qu'il ne pouvait permettre à l'AIPN de procéder à un examen comparatif des mérites des différents candidats et de justifier, le cas échéant, le rejet de sa candidature.

27.
    L'emploi à pourvoir, consistant à diriger la délégation de la Commission dans un pays tiers et donc à assumer et à organiser la représentation de celle-ci dans tousles aspects de ses activités, fait appel, plutôt qu'à une expérience technique spécifique et limitée, à des connaissances et à des expériences à la fois étendues, diversifiées et générales.

28.
    Eu égard à cette nature particulière de l'emploi, l'avis de vacance énonce des exigences suffisamment précises, à savoir, premièrement, celle de disposer de connaissances approfondies des politiques communautaires et du fonctionnement de l'Union européenne (aspects économiques et politiques, relations extérieures), deuxièmement, celle de posséder une aptitude à diriger une équipe dans un environnement socio-culturel différent de celui de la Communauté et, troisièmement, celle de bénéficier d'une expérience appropriée à la fonction. Les deux premières exigences se réfèrent à des qualités manifestement indispensables à tout titulaire d'une fonction de chef de délégation de la Commission, indépendamment du pays d'affectation. La troisième exigence oblige le candidat à mettre en valeur son expérience et, partant, son aptitude à exercer cette fonction en général et dans le pays d'affectation visé par l'avis de vacance en particulier. Le candidat est donc nécessairement tenu de démontrer son expérience et, partant, sa connaissance des exigences spécifiques que comporte l'exercice de la fonction dans le pays d'affectation en cause. L'avis de vacance a ainsi pu servir, dans l'intérêt du service, de critère utile de sélection du meilleur candidat parmi les postulants.

29.
    Eu égard aux considérations qui précèdent, l'avis de vacance en cause ne saurait être critiqué en ce qu'il était identique à celui qui est généralement utilisé en vue de pourvoir à des emplois de chef de délégation de la Commission dans tous les pays tiers.

30.
    Le premier argument, tiré du caractère général et imprécis de l'avis de vacance, n'est donc pas fondé.

31.
    Il y a lieu d'analyser, en deuxième lieu, l'argument du requérant selon lequel l'AIPN, en adoptant l'avis de vacance, aurait poursuivi le but de ne définir les exigences véritables de l'emploi à pourvoir qu'après le dépôt des candidatures.

32.
    Il résulte de la décision de rejet de la réclamation du requérant ainsi que de l'argumentation développée par la Commission dans ses mémoires en défense et en duplique que la candidature de M. K. a été finalement préférée à celle du requérant parce que l'AIPN estimait que, compte tenu de son expérience plus vaste acquise dans plusieurs domaines d'activités de la Commission et de ses connaissances plus générales des diverses politiques communautaires, M. K. était le candidat le plus adéquat pour occuper l'emploi à pourvoir. Les critères sur la base desquels la candidature du requérant a été finalement rejetée au profit de celle de M. K. sont donc exclusivement ceux posé par l'avis de vacance, qui exigeait notamment des candidats des connaissances approfondies des politiques communautaires et du fonctionnement de l'Union ainsi qu'une expérience appropriée à la fonction.

33.
    Le requérant, sur qui pèse la charge de la preuve, demeure en défaut d'établir, ou à tout le moins de présenter des indices de nature à considérer comme vraisemblable que l'AIPN, après le dépôt des candidatures et au vu de celles-ci, a défini des qualifications autres que celles figurant dans l'avis de vacance et choisi le candidat sur cette base.

34.
    Le requérant ne peut pas se prévaloir de l'arrêt Kratz/Commission, cité au point 20 ci-dessus. En effet, d'une part, la détermination du niveau de l'emploi à pourvoir, qui constitue l'objet dudit arrêt, ne fait pas l'objet de contestations dans la présente affaire et, d'autre part, il n'existe pas d'indices concluants de nature à établir que des éléments déterminants pour l'attribution de l'emploi à pourvoir, en particulier la nature des qualifications exigées, n'auraient été définis qu'après le dépôt des candidatures.

35.
    Le deuxième argument, selon lequel l'AIPN n'aurait défini les exigences véritables de l'emploi à pourvoir qu'après le dépôt des candidatures, n'est donc pas fondé.

36.
    Le troisième argument du requérant, selon lequel l'absence de précision de l'avis de vacance ne lui aurait pas permis de faire valoir ses qualités les plus appropriées pour l'emploi à pourvoir, doit également être rejeté.

37.
    En effet, d'une part, il a été constaté ci-dessus que l'avis de vacance présentait un caractère de précision suffisant, eu égard à la nature de l'emploi à pourvoir. D'autre part, le requérant semble bien avoir été en mesure de présenter ses qualités les plus appropriées, dès lors que, premièrement, sa candidature a été retenue, au même titre que deux autres seulement parmi les douze candidatures présentées, par le comité consultatif des nominations et que, deuxièmement, il résulte de la décision de rejet par la Commission de la réclamation ainsi que de

l'argumentation développée par celle-ci dans ses mémoires en défense et en duplique que l'AIPN a tenu compte des qualités réelles et de l'expérience professionnelle certaine du requérant et l'a considéré comme candidat valable. Il n'existe donc pas d'indices pertinents de nature à établir que le rejet de la candidature du requérant serait dû à une présentation insuffisante de celle-ci.

38.
    Il s'ensuit que le premier moyen doit être rejeté.

2. Sur le deuxième moyen, tiré de la violation des articles 7, paragraphe 1, 27 et 45, paragraphe 1, du statut, du principe de protection de la confiance légitime et du devoir de sollicitude

39.
    Le deuxième moyen du requérant se subdivise en deux branches tirées, respectivement, d'irrégularités dans l'examen comparatif des mérites et d'une violation du principe de protection de la confiance légitime et du devoir de sollicitude.

Sur la première branche du deuxième moyen, tirée d'irrégularités dans l'examen comparatif des mérites

Arguments des parties

40.
    Le requérant rappelle que, dans le cadre d'une mutation ou d'une promotion opérée conformément à l'article 29, paragraphe 1, sous a), du statut, les articles 7, paragraphe 1, 27 et 45, paragraphe 1, du statut, imposent un examen comparatif des mérites de tous les fonctionnaires qui sont promouvables et font acte de candidature. Il ne conteste pas que chaque institution est maître de son organigramme et dispose d'un large pouvoir d'appréciation pour organiser ses services et affecter le personnel qui se trouve à sa disposition. Il estime toutefois que, selon une jurisprudence constante, ce large pouvoir d'appréciation devrait être exercé dans le cadre de légalité que l'institution s'est elle-même fixée, dans le strict respect de la procédure instituée par l'article 45 du statut et dans l'intérêt du service.

41.
    Le requérant soutient que la Commission n'a pas procédé, en l'espèce, à un examen comparatif des mérites des candidats et a, de ce fait, violé les dispositions susvisées du statut. Il déduit cette conclusion de l'absence de réponse de la Commission à son courrier du 19 avril 1996 et à sa réclamation du 13 mai 1996. L'existence d'un tel examen ne résulterait d'ailleurs d'aucun document produit par la Commission. Il invoque également le contenu d'une remarque manuscrite qui lui a été adressée le 5 mai 1996 par le directeur général de la direction générale Relations extérieures: Europe et nouveaux États indépendants, politique étrangère et de sécurité commune, service extérieur (DG IA) — remarque apposée sur un courrier que le requérant avait adressé, le 25 avril 1996, à ce même directeur

général —, dans lequel ce dernier explique que les décisions concernant les nominations aux emplois de chef de délégation doivent être adoptées à l'unanimité par les directeurs généraux représentés dans le comité de direction, sous réserve d'une approbation ultérieure par les cabinets des membres de la Commission. Il en déduit qu'il est légitime de se poser de sérieuses questions sur l'utilité de la procédure officielle de pourvoi des emplois vacants, alors que la décision finale dépend des cabinets dont les critères de sélection ne sont pas connus et ne tiennent certainement pas aux qualités et à l'expérience des candidats, ni aux exigences des emplois à pourvoir.

42.
    Le requérant expose, à titre subsidiaire, que, à supposer que la Commission ait procédé à un examen comparatif des mérites, elle aurait alors commis une erreur manifeste d'appréciation, dans la mesure où, eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle, il possèderait des qualifications et des compétences particulièrement appropriées pour l'emploi en question, alors que celles du candidat retenu, M. K., ne seraient pas comparables aux siennes.

43.
    En ce qui concerne ses propres qualifications et compétences, le requérant relève qu'il était en charge, entre 1985 et 1988, de l'établissement, de l'ouverture et de la direction permanente d'une délégation dans un environnement socio-culturel totalement différent de celui de la Communauté, à savoir l'Indonésie. Dans le cadre de cette activité, il aurait abordé tous les domaines touchant aux relations bilatérales, mais également multilatérales [ANASE (Association des nations de l'Asie du Sud-Est)-CEE] et principalement la coopération au développement, la coopération économique et la coopération commerciale. La délégation aurait aussi eu une vocation régionale puisqu'elle se serait également occupée de Singapour et de Brunei. Il aurait dirigé une équipe de dix personnes. Son travail accompli lui aurait valu de nombreux éloges, notamment ceux de M. Claude Cheysson, membre de la Commission.

44.
    Il ajoute que son expérience en Indonésie est venue compléter celle antérieure de dix années dans le domaine de la coopération acquise au Niger, au Mali et au Kenya.

45.
    Il fait, par ailleurs, état de ses fonctions actuelles de conseiller à la délégation de la Commission au Venezuela, exercées depuis novembre 1992, ainsi que de son expérience non négligeable au siège de la Commission, acquise pendant ses sept années d'activité à la direction générale Développement (relations extérieures et de coopération au développement avec l'Afrique, les Caraïbes et le Pacifique; convention de Lomé) (DG VIII) et ses quatre années d'activité à la direction générale Transports (DG VII), dont deux ans comme chef de division faisant fonction.

46.
    Il fait observer que ses capacités et mérites à occuper une fonction de chef de délégation ont été soulignés à plusieurs reprises, notamment dans son rapport de

notation pour l'exercice 1993/1995 et dans un courrier du directeur général de la direction générale Relations économiques extérieures (DG I) de la Commission du 16 juillet 1993, dans lequel celui-ci déclare avoir soutenu la candidature du requérant à un emploi de chef de délégation.

47.
    Il en conclut qu'il dispose de connaissances approfondies sur les aspects économiques et politiques de l'Union européenne et sur ses relations extérieures, acquises aussi bien au siège de la Commission que dans quatre délégations réparties sur trois continents différents, qu'il a démontré son aptitude à diriger une équipe dans un environnement socio-culturel différent et qu'il bénéficie d'une expérience tout à fait appropriée à l'emploi à pourvoir. En effet, il serait spécialisé dans le domaine de la coopération au développement, ce qui constituerait justement la tâche principale de la délégation de la Commission au Costa Rica. Ce serait pour cette raison que le directeur de la direction I (Amérique latine) à la DG I aurait proposé sa candidature à l'emploi litigieux.

48.
    En ce qui concerne les qualifications et compétences du candidat retenu, le requérant estime que ce dernier ne peut faire état d'aucune expérience en délégation, exception faite de celle acquise pendant trois ans à New York (États-Unis d'Amérique) comme conseiller auprès de l'Organisation des Nations unies (ci-après «ONU»), sa mission consistant seulement, cependant, à suivre les débats au Conseil de sécurité et à l'Assemblée générale des Nations unies et à préparer des projets de rapport. Dans le cadre de cette tâche, M. K. se serait occupé de la coopération politique et des affaires sociales et juridiques, mais non pas d'aspects économiques ou commerciaux, ni de la coopération au développement, qui seraient pourtant les tâches principales de la délégation au Costa Rica. L'expérience de M. K. se serait d'ailleurs exclusivement inscrite dans les relations multilatérales, alors que la délégation au Costa Rica ne serait concernée que par les relations bilatérales.

49.
    Il est d'avis que M. K. n'a donc jamais été en délégation dans le cadre de relations bilatérales, qu'il n'a aucune expérience particulière hors Union européenne en ce qui concerne notamment les aspects économiques et commerciaux, les relations extérieures bilatérales et la coopération au développement et qu'il n'a jamais dirigé une équipe, ni a fortiori, une délégation. Il ajoute que l'environnement socio-culturel de New York ne pourrait pas être considéré comme fondamentalement différent de celui de Bruxelles.

50.
    Il en déduit que la Commission, en nommant M. K. à l'emploi à pourvoir, est sortie du cadre de légalité qu'elle s'était elle-même fixée et a violé l'avis de vacance. L'AIPN aurait dû écarter sa candidature dans la mesure où il ne répondait pas aux exigences qui auraient été formellement requises par l'avis de vacance (arrêt du Tribunal du 2 octobre 1996, Vecchi/Commission, T-356/94, RecFP p. II-1251, points 50 à 58).

51.
    Il conclut qu'il dispose de toutes les capacités et de toute l'expérience nécessaires pour l'emploi litigieux, qu'il répondait parfaitement aux conditions de l'avis de vacance et que M. K. ne disposait pas de la même expérience que lui et ne répondait pas à toutes les conditions de l'avis de vacance. Il s'ensuivrait que, dans le cadre de l'examen comparatif des mérites, le choix aurait dû se porter sur sa candidature. En nommant M. K. à l'emploi en question, la Commission aurait commis une erreur manifeste d'appréciation.

52.
    La Commission considère que les griefs ainsi formulés par le requérant ne sont pas fondés.

Appréciation du Tribunal

53.
    Il convient d'examiner d'abord les arguments par lesquels le requérant conteste l'existence d'un examen comparatif des mérites et ensuite ceux, subsidiaires, par lesquels il reproche à la Commission d'avoir commis, dans le cadre de cet examen, une erreur manifeste d'appréciation.

— Sur le grief tiré de l'absence d'un examen comparatif des mérites

54.
    Le Tribunal rappelle, à titre liminaire, que l'examen des candidatures à la mutation ou à la promotion au titre de l'article 29, paragraphe 1, sous a), du statut, doit s'effectuer, conformément aux dispositions de l'article 45 du statut, qui prévoit expressément un examen comparatif des mérites des fonctionnaires ayant vocation à la promotion (arrêt du Tribunal du 26 octobre 1993, Weißenfels/Parlement, T-22/92, Rec. p. II-1095, point 66). L'obligation de procéder à cet examen comparatif est l'expression à la fois du principe d'égalité de traitement des fonctionnaires et du principe de leur vocation à la carrière (voir arrêt du Tribunal du 12 février 1992, Volger/Parlement, T-52/90, Rec. p. II-121, point 24).

55.
    En présence d'un faisceau d'indices suffisamment concordants venant étayer l'argumentation du requérant relative à l'absence d'un véritable examen comparatif des candidatures, c'est à l'institution défenderesse qu'il incombe de rapporter la preuve, par des éléments objectifs susceptibles de faire l'objet d'un contrôle juridictionnel, qu'elle a respecté les garanties accordées par l'article 45 du statut au fonctionnaire ayant vocation à la promotion et procédé à un tel examen comparatif (arrêts du Tribunal du 30 janvier 1992, Schönherr/CES, T-25/90, Rec. p. II-63, point 25, et du 19 septembre 1996, Allo/Commission, T-386/94, RecFP p. II-1161, point 39).

56.
    Le requérant invoque, en substance, trois indices qui rendraient vraisemblable l'absence, en l'espèce, d'un examen comparatif des mérites.

57.
    Le premier indice est l'absence de réponse de la Commission au courrier du requérant du 19 avril 1996 et à sa réclamation. Cet indice est, toutefois, dénué de

pertinence depuis la notification au requérant, le 20 novembre 1996, de la décision de rejet de sa réclamation. Bien qu'intervenue tardivement, puisque postérieurement à l'introduction du présent recours, la Commission y prend amplement position sur l'application des critères qui l'ont amenée à retenir la candidature de M. K. et à rejeter celle du requérant. L'exposé détaillé de l'examen et de la comparaison des mérites des deux candidats qu'elle contient, et de la conclusion qui en a été déduite, n'est pas de nature à rendre vraisemblable le fait que l'AIPN n'aurait pas procédé, en l'espèce, à un examen comparatif des mérites.

58.
    Le second indice est que la Commission aurait omis de produire un quelconque document établissant la réalité de l'examen comparatif des mérites. Cet indice n'est pas non plus pertinent en l'espèce. D'une part, et à défaut d'être accompagné d'autres indications, il n'est pas en soi de nature à rendre vraisemblable l'absence d'un examen comparatif des mérites. D'autre part, la Commission a, dans le cadre de la mesure d'organisation de la procédure ordonnée par le Tribunal, en premier lieu, décrit le déroulement de la procédure de nomination à un emploi de chef de délégation en général, en second lieu, apporté des précisions sur la mise en oeuvre de cette procédure dans le cas d'espèce et, finalement, en troisième lieu, produit des documents confirmant ces précisions. Il en ressort que le comité consultatif des nominations a rendu, le 7 décembre 1995, son avis n° 138/95 proposant, après examen des douze candidatures à l'emploi à pourvoir et du dossier personnel de chacun des candidats, et après audition du directeur général de la DG IA, que trois candidatures, dont celles du requérant et de M. K., soient prises en considération. Le 12 décembre 1995, dans une note à l'attention des membres du comité de direction du service extérieur, ledit directeur général a proposé, parmi ces trois candidatures, celle de M. K. Le 20 décembre 1995, le comité de direction du service extérieur a proposé la nomination de M. K. Le 21 décembre 1995, l'AIPN a été saisie de cette proposition de nomination. Il s'ensuit que la Commission a bien été en mesure de produire des documents établissant l'existence d'un examen comparatif des mérites, qui a été effectué, d'une part, par le comité consultatif des nominations et, d'autre part, par le comité de direction du service extérieur, sur proposition du directeur général de la DG IA. Le Tribunal rappelle à ce sujet que, conformément à une jurisprudence bien établie, les institutions disposent du pouvoir statutaire de procéder à l'examen comparatif des mérites des candidats selon la procédure ou la méthode qu'elles estiment la plus appropriée (arrêt Allo/Commission, cité au point 55 ci-dessus, point 29).

59.
    Le troisième indice est le courrier adressé le 26 avril 1996 par le requérant au directeur général de la DG IA, sur lequel le second a apposé, le 5 mai 1996, des remarques manuscrites à l'attention du premier. L'objet du courrier était de confronter le directeur général aux multiples promesses d'emplois non tenues, dont celles relatives à la fonction de chef de délégation de la Commission au Costa Rica, qui aurait été faites au requérant par des représentants de la Commission. Le directeur général y explique que «les décisions concernant les postes de chef de délégation doivent en effet être prises à l'unanimité (par les directeurs généraux représentés dans le comité de direction, avec la 'bénédiction‘ ultérieure des

cabinets). Ceci entraîne malheureusement un degré élevé d'incertitude. Il n'existe pas de droit à une nomination». Le requérant en déduit qu'il serait, partant, légitime de se poser de sérieuses questions sur l'utilité de la procédure officielle de pourvoi des emplois, alors que la décision finale dépendrait des cabinets dont les critères ne tiendraient certainement pas aux qualités et à l'expérience des candidats, ni aux exigences des emplois à pourvoir.

60.
    Ces interrogations sont toutefois dépourvues de pertinence en l'espèce, dès lors qu'il résulte des documents susvisés produits par la Commission que non seulement la procédure officielle de pourvoi des emplois a été respectée, mais que, de surcroît, la décision finale prise par l'AIPN s'est bornée à entériner la proposition de nomination issue de cette procédure et que, par conséquent, la décision n'a pas été modifiée par les cabinets des membres de la Commission.

61.
    Il résulte de ce qui précède que le requérant n'a pas été en mesure d'établir l'existence d'indices suffisamment concordants venant étayer son argumentation relative à l'absence d'un véritable examen comparatif des candidatures. En revanche, le Tribunal considère que la Commission a démontré qu'elle avait effectivement examiné les mérites des différents candidats et que c'est à la suite de cet examen, d'abord par le comité consultatif des nominations et ensuite par le comité de direction du service extérieur sur proposition du directeur général de la DG IA, que la candidature du requérant n'a pas été retenue.

62.
    Le premier grief tiré de l'absence d'examen comparatif des mérites des candidats n'est donc pas fondé et doit, par conséquent, être rejeté.

— Sur le grief tiré de l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation

63.
    Le Tribunal rappelle que l'exercice du large pouvoir d'appréciation dont dispose l'AIPN en matière de nomination suppose un «examen scrupuleux» des dossiers de candidature et une «observation consciencieuse» des exigences énoncées dans l'avis de vacance, de sorte que celle-ci est tenue d'écarter tout candidat qui ne répond pas à ces exigences. L'avis de vacance constitue, en effet, un cadre légal que l'AIPN s'impose à elle-même et qu'elle doit «respecter scrupuleusement» (arrêt de la Cour du 18 mars 1993, Parlement/Frederiksen, C-35/92 P, Rec. p. I-991, points 15 et 16, et arrêt du Tribunal du 19 mars 1997, Giannini/Commission, T-21/96, RecFP p. II-211, point 19).

64.
    En vue de contrôler si l'AIPN n'a pas dépassé les limites de ce cadre légal et a agi dans le seul intérêt du service au sens de l'article 7 du statut, il appartient au Tribunal d'examiner tout d'abord, quelles étaient, en l'occurrence, les conditions requises par l'avis de vacance et de vérifier ensuite si le candidat choisi par l'AIPN pour occuper le poste vacant satisfaisait effectivement à ces conditions (arrêt Parlement/Frederiksen, cité au point 63 ci-dessus, point 17, et Giannini/Commission, cité au point 63 ci-dessus, point 20). Un tel examen doit se

limiter à la question de savoir si, eu égard aux considérations qui ont pu conduire l'administration à son appréciation, celle-ci s'est tenue dans des limites raisonnables et n'a pas usé de son pouvoir de manière manifestement erronée (arrêt du Tribunal du 11 décembre 1991, Frederiksen/Parlement, T-169/89, Rec. p. II-1403, point 69; voir également les arrêts de la Cour du 12 février 1987, Bonino/Commission, 233/85, Rec. p. 739, point 5, et du Tribunal du 9 février 1994, Latham/Commission, T-82/91, RecFP p. II-61, point 62, et Giannini/Commission, cité au point 63 ci-dessus, point 20). Le Tribunal ne saurait donc substituer son appréciation des qualifications des candidats à celle de l'AIPN (arrêt de la Cour du 21 avril 1983, Ragusa/Commission, 282/81, Rec. p. 1245, point 9, et arrêts du Tribunal Schönherr/CES, cité au point 55 ci-dessus, point 20, du 25 février 1992, Schloh/Conseil, T-11/91, Rec. p. II-203, point 51, du 6 juin 1996,Baiwir/Commission, T-262/94, RecFP p. II-739, point 66, et du 18 décembre 1997, Delvaux/Commission, T-142/95, non encore publié au Recueil, point 38).

65.
    Conformément à ces principes, il y a donc lieu de vérifier si le candidat choisi par l'AIPN pour occuper l'emploi à pourvoir satisfaisait effectivement aux conditions requises par l'avis de vacance.

66.
    La première condition exigeait des candidats des connaissances approfondies des politiques communautaires et du fonctionnement de l'Union européenne dans ses aspects économiques et politiques, ainsi qu'en ce qui concerne ses relations extérieures. Le Tribunal constate que le candidat retenu, M. K., a exercé, depuis 1968, des fonctions dans cinq services différents, qui couvraient des domaines diversifiés des compétences de l'Union, touchaient aux mécanismes de son fonctionnement et étaient partiellement en rapport avec ses relations extérieures, en particulier avec l'Amérique latine. En effet, le candidat retenu a successivement exercé ses fonctions dans le cabinet d'un membre de la Commission, à la direction générale Energie (direction «énergie nucléaire, autres sources primaires, électricité», dans l'unité «électricité»), au secrétariat général (où il était en charge des liaisons avec le Parlement et le Comité économique et social), à la DG VIII («relations avec les institutions») et à la DG I (où il faisait partie de la direction «Amérique latine», unité «Amérique du Sud», et de la délégation de la Commission à New York, auprès de l'ONU).

67.
    En considérant, dans ces circonstances, que le candidat retenu remplissait cette première condition, l'AIPN n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation.

68.
    La seconde condition exigeait des candidats une aptitude à diriger une équipe dans un environnement socio-culturel différent de celui de la Communauté économique européenne. Il suffit de constater à cet égard que M. K. a, depuis 1991, exercé des fonctions dirigeantes au sein de la délégation de la Commission auprès de l'ONU.

69.
    Le requérant estime que cette fonction n'a pas été exercée dans un environnement socio-culturel fondamentalement différent de celui de Bruxelles. Cette critique méconnaît toutefois le fait que l'avis de vacance n'a pas exigé, à titre de

qualification, l'exercice effectif de fonctions analogues dans un tel environnement différent, mais l'aptitude à exercer de telles fonctions. Or, eu égard à la carrière très diversifiée de M. K., et à son expérience acquise auprès de l'ONU à New York, l'AIPN n'a pas commis une erreur manifeste d'appréciation en considérant que ce candidat remplissait cette condition.

70.
    Quant au troisième critère tenant à l'expérience appropriée à la fonction, il suffit de constater, ainsi qu'il résulte de son curriculum vitae, que le candidat retenu a exercé, depuis 1983, des tâches en rapport avec la politique du développement, depuis 1987, des fonctions en rapport avec l'Amérique latine et, depuis 1991, une activité au sein d'une délégation de la Commission, à savoir celle auprès de l'ONU à New York. Il s'ensuit que l'AIPN n'a pas commis une erreur manifeste d'appréciation en considérant que ce candidat remplissait cette condition.

71.
    Le Tribunal constate donc que l'AIPN n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en considérant que les qualifications du candidat retenu correspondaient aux trois exigences imposées par l'avis de vacance, qui ont été consciencieusement observées, et qu'elle a donc respecté scrupuleusement le cadre légal qu'elle s'était elle-même imposé.

72.
    Le Tribunal doit finalement examiner si, eu égard aux aptitudes du requérant, l'AIPN n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en lui préférant M. K.

73.
    L'AIPN a justifié son choix en faveur de M. K. en considérant qu'il avait, par rapport au requérant, une expérience plus vaste acquise dans plusieurs domaines d'activités de la Commission et des connaissances plus généralisées des diverses politiques communautaires.

74.
    Le Tribunal constate, d'abord, que, en procédant sur la base de ces critères à la comparaison des candidatures du requérant et de M. K., l'AIPN a fondé son appréciation exclusivement sur les exigences résultant de l'avis de vacance. Le requérant n'a ni allégué ni à plus forte raison établi l'existence d'indices conduisant à conclure que l'AIPN avait fondé son appréciation sur des critères différents de ceux résultant de l'avis de vacance.

75.
    Le Tribunal relève ensuite que, s'il résulte du dossier que le requérant était, comme le reconnaît d'ailleurs la Commission, un candidat valable pour l'emploi à pourvoir, il en découle aussi, comme il a été exposé ci-dessus, que le candidat retenu, M. K., remplissait aussi parfaitement les conditions définies par l'avis de vacance.

76.
    Au vu de l'ensemble de ces appréciations, le Tribunal considère que la Commission a pu, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, considérer que M. K. avait, par rapport au requérant, une expérience plus vaste acquise dans plusieurs

domaines d'activités de la Commission et des connaissances plus générales des diverses politiques communautaires.

77.
    Il s'ensuit que le requérant n'a pas établi que la Commission avait usé de son pouvoir de manière manifestement erronée ou abusive dans l'examen comparatif des mérites. Le deuxième grief tiré d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'examen comparatif des mérites des candidats doit, par conséquent, être rejeté.

78.
    Il s'ensuit également que la première branche du deuxième moyen doit être rejetée dans son intégralité.

Sur la seconde branche du deuxième moyen, tirée de la violation du principe de protection de la confiance légitime et du devoir de sollicitude

Arguments des parties

79.
    Le requérant soutient que la Commission a violé le principe de protection de la confiance légitime.

80.
    Il reconnaît qu'il ne peut pas fonder des attentes légitimes sur la base de promesses ou de déclarations illicites.

81.
    Il tient, toutefois, à faire remarquer qu'il n'a jamais suscité la moindre promesse de la part de l'administration.

82.
    Il affirme, néanmoins, que la Commission n'a pas tenu les promesses qu'elle lui avait faites et qu'elle a fait naître dans son chef de faux espoirs.

83.
    Il relève ainsi que, dans un courrier du 11 novembre 1988, M. Claude Cheysson, membre de la Commission, a signalé, en rapport avec l'activité du requérant au titre de chargé d'affaires de la Commission en Indonésie que, «le requérant [...] a su surmonter les obstacles et créer les fondements de la relation normale qui pourra maintenant se développer», qu'il tenait «à noter [s]on appréciation par écrit afin qu'elle soit portée au crédit de M. Wenk» et qu'il adresse «la présente note également à la direction générale du personnel, afin qu'elle soit portée au dossier» du requérant. Il aurait, par la suite, fait l'objet de multiples promesses d'emplois, qui ne se seraient toutefois jamais concrétisées. Chaque fois qu'il nourrissait l'espoir d'être nommé à un emploi pour lequel il avait postulé, l'administration l'aurait contacté pour lui conseiller d'accepter un autre emploi dont la publication allait paraître.

84.
    Il expose également que, en 1992, alors qu'il avait été choisi pour l'emploi de chef d'antenne à Grenade (Espagne), il aurait été convaincu d'accepter un emploi de conseiller au Venezuela afin d'être mieux placé pour l'emploi de chef de délégation en Colombie qui devait s'ouvrir prochainement. En 1993, il aurait été informé qu'il

avait été soutenu par le directeur général de la DG I pour trois emplois de chef de délégation en Asie, mais que son affectation trop récente au Venezuela avait finalement constitué un motif de refus. En 1994, il avait fait acte de candidature pour les emplois de chef de délégation à Haïti et en Bolivie. Sa candidature avait été prise en considération par le comité consultatif des nominations. Elle a cependant été rejetée alors que son expérience et son grade semblaient pourtant nettement plus élevés que ceux des candidats retenus. S'étant apprêté à engager une procédure précontentieuse, il aurait été, sans motif évident, informé le 24 février 1995, par le directeur de la gestion du service extérieur à la DG IA de la Commission, que toute la hiérarchie, y compris les cabinets compétents, était d'accord pour le désigner comme chef de délégation au Mali, cet emploi n'ayant pas encore été publié à ce moment-là. Une semaine plus tard, il aurait été informé par la même personne que l'emploi retenu était en réalité celui de chef de délégation en Mauritanie. Le 31 mars 1995, le directeur de la direction «Amérique latine» à la direction générale Relations extérieures: Méditerranée du Sud, Moyen- et Proche-Orient, Amérique latine, Asie du Sud et du Sud-Est et coopération Nord-Sud (DG IB) de la Commission aurait, sans motif évident, pris contact avec lui pour lui communiquer la même information concernant le Costa Rica, alors que l'emploi en question n'était pas encore publié.

85.
    Il ne peut s'expliquer ces initiatives que par la volonté de le détourner, par ces promesses, des emplois vacants de chef de délégation à Haïti et en Bolivie, pour lesquels sa candidature, très valable, aurait été rejetée injustement.

86.
    Il explique avoir confronté le directeur de la direction «Amérique latine» de la DG IB, par courrier daté du 5 février 1996, avec l'ensemble de ces faits, qui ne les aurait pas contestés. Il ajoute avoir communiqué ces mêmes faits, par un courrier du 25 avril 1996, au directeur général de la DG IA. Ce dernier lui a répondu, le 5 mai 1996, en inscrivant des remarques manuscrites en marge de ce courrier. Le requérant relève, en particulier, que le directeur général a confirmé que l'annonce de l'attribution de l'emploi au Costa Rica, qui lui avait été faite le 31 mars 1995 par le directeur de la direction «Amérique latine», reflétait le déroulement des délibérations faites à l'époque au sein de la Commission, tout en ajoutant que les décisions concernant les emplois de chef de délégation devaient être prises à l'unanimité et seraient soumises à l'approbation des cabinets, ce qui entraînerait un degré élevé d'incertitude.

87.
    Il en conclut qu'il se serait vu promettre, à plusieurs reprises, et par différents supérieurs hiérarchiques, des emplois de chef de délégation. Il n'aurait donc pas reçu qu'une seule promesse isolée et illicite. Il aurait, dans ces circonstances, pu légitimement espérer être nommé à l'emploi à pourvoir. Ses espérances auraient, en outre, été confortées par les multiples éloges dont il avait fait l'objet, en rapport avec ses qualités et mérites dans la direction d'une délégation de la Commission.

88.
    Il en déduit que la Commission, en ne donnant pas suite à ses attentes légitimes, a méconnu le principe de protection de la confiance légitime. Par ailleurs, en promettant à de nombreuses reprises au requérant des emplois de chef de délégation sans pouvoir respecter ses promesses, l'administration aurait manqué à son devoir de sollicitude.

89.
    La Commission considère que cette branche du deuxième moyen n'est pas fondée.

Appréciation du Tribunal

90.
    Il y a lieu de distinguer l'argument principal tiré de la violation du principe deprotection de la confiance légitime de celui, invoqué pour la première fois dans la réplique, de la violation du devoir de sollicitude.

— Sur la prétendue violation du principe de protection de la confiance légitime

91.
    Selon une jurisprudence constante, si tout fonctionnaire est en droit de se prévaloir du principe de protection de la confiance légitime, il ne peut, toutefois, invoquer ce principe que s'il a obtenu de l'administration des assurances précises (arrêt Mavridis/Parlement, cité au point 17 ci-dessus, point 21; arrêts du Tribunal du 27 mars 1990, Chomel/Commission, T-123/89, Rec. p. II-131, points 25 et 26, et du 9 juillet 1997, Monaco/Parlement, T-92/96, RecFP p. II-573, point 30) tenant compte des dispositions statutaires (arrêt de la Cour du 6 février 1986, Vlachou/Cour des comptes, 162/84, Rec. p. 481, point 6; arrêts du Tribunal du 7 mai 1991, Jongen/Commission, T-18/90, Rec. p. II-187, point 36, du 14 mai 1991, Zoder/Parlement, T-30/90, Rec. p. II-207, point 25, du 17 décembre 1992, Holtbecker/Commission, T-20/91, Rec. p. II-2599, point 54, du 30 juin 1993, Devillez e.a./Parlement, T-46/90, Rec. p. II-699, point 38, Weißenfels/Parlement, cité au point 54 ci-dessus, point 92, du 14 juillet 1994, Grynberg et Hall/Commission, T-534/93, RecFP p. II-595, point 53, et du 11 juillet 1996, Ortega Urretavizcaya/Commission, T-587/93, RecFP p. II-1027, point 57).

92.
    A cet égard, le Tribunal observe que, dans le cadre d'une décision de pourvoi à un emploi vacant, sur la base de l'article 29, paragraphe 1, sous a), du statut, l'AIPN doit respecter les critères posés par les articles 7 et 27 du statut et doit procéder à un examen comparatif des mérites en application de l'article 45 du statut. Il s'ensuit qu'une promesse de promotion, à la supposer établie, n'a pas pu créer une confiance légitime dans le chef du requérant, étant donné qu'elle aurait été donnée sans tenir compte des dispositions statutaires applicables (voir, par exemple, l'arrêt Weißenfels/Parlement, cité au point 54 ci-dessus, point 92).

93.
    L'argument tiré d'une prétendue violation du principe de protection de la confiance légitime doit donc être rejeté.

— Sur la prétendue violation de l'obligation de sollicitude

94.
    Le requérant soulève, pour la première fois dans la réplique, l'argument selon lequel l'administration, en promettant à de nombreuses reprises au requérant des postes de chef de délégation sans pouvoir respecter ses promesses, aurait manqué à son devoir de sollicitude.

95.
    Cet argument, auquel la Commission ne répond pas formellement dans sa duplique, soulève une question de recevabilité, dès lors qu'il n'a été présenté ni dans le cadre de la procédure précontentieuse ni dans la requête.

96.
    En ce qui concerne l'absence de présentation de cet argument dans le cadre de la procédure précontentieuse, il suffit de rappeler que, si les conclusions présentées devant le juge communautaire ne peuvent contenir que des «chefs de contestation» reposant sur la même cause que ceux invoqués dans la réclamation, ces chefs de contestation peuvent cependant, devant le juge communautaire, être développés par la présentation de moyens et arguments ne figurant pas nécessairement dans la réclamation, mais s'y rattachant étroitement (voir, notamment, l'arrêt de la Cour du 14 mars 1989, Del Amo Martinez/Parlement, 133/88, Rec. p. 689, points 9 et 10, et, par exemple, l'arrêt du Tribunal du 9 juillet 1997, S/Cour de justice, T-4/96, Rec. p. II-1125, point 98). En l'espèce, l'argument en question se rattache au grief du requérant tiré de la méconnaissance par la Commission des promesses de nomination à un emploi de chef de délégation qu'elle lui aurait faites. Ce grief a déjà été formulé dans la réclamation. L'argument est donc, de ce point de vue, recevable.

97.
    En ce qui concerne l'absence de présentation de cet argument dans la requête, il suffit de rappeler qu'un moyen présenté en cours d'instance qui constitue l'ampliation d'un moyen énoncé antérieurement, directement ou implicitement, dans la requête introductive d'instance, et qui présente un lien étroit avec celui-ci ne constitue pas un moyen nouveau au sens de l'article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure et doit donc être déclaré recevable (voir, par exemple, l'arrêt du Tribunal du 5 février 1997, Ibarra Gil/Commission, T-207/95, RecFP p. II-31, point 51). En l'espèce, l'argument en cause constitue bien une ampliation du moyen tiré de la violation du principe de protection de la confiance légitime, donc d'un moyen énoncé dans la requête, et présente un lien étroit avec celui-ci. L'argument apparaît donc comme étant également recevable de ce point de vue.

98.
    L'argument n'est toutefois pas fondé.

99.
    En effet, en vertu d'une jurisprudence constante, le devoir de sollicitude de l'administration à l'égard de ses agents reflète l'équilibre des droits et des obligations réciproques que le statut a créés dans les relations entre l'autorité publique et les agents du service public. Cependant, la protection des droits et des intérêts des fonctionnaires doit toujours trouver sa limite dans le respect des normes en vigueur (arrêts du Tribunal du 16 mars 1993, Blackman/Parlement, T-33/89 et T-74/89, Rec. p. II-249, point 96, et du 10 juillet 1997, Apostolidis e.a./Commission, T-81/96, RecFP p. II-607, point 90).

100.
    Or, une promesse qui, comme en l'espèce, viole les dispositions du statut, ne saurait fonder un devoir de sollicitude permettant au fonctionnaire de prétendre obtenir des avantages que le statut ne permet pas de lui octroyer.

101.
    L'argument doit donc également être rejeté.

102.
    Il s'ensuit que le deuxième moyen doit être rejeté dans son intégralité.

3. Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l'article 25, paragraphe 2, du statut

Arguments des parties

103.
    Le requérant rappelle que l'article 25, paragraphe 2, du statut, dispose que toute décision faisant grief doit être motivée. Selon une jurisprudence constante, en cas de décision rejetant une candidature, l'AIPN est tenue à une obligation de motivation, à tout le moins au stade du rejet de la réclamation contre une telle décision, et l'introduction du recours lui interdit de régulariser sa décision par une réponse motivée portant rejet de la réclamation (arrêt Volger/Parlement, cité au point 54 ci-dessus, points 36 à 40).

104.
    Le requérant expose, que, en l'espèce, la décision de rejet de sa candidature est entachée d'une absence totale de motivation. En effet, d'une part, cette décision n'aurait été portée à sa connaissance que par l'envoi, le 2 février 1996, d'un formulaire type de caractère impersonnel n'indiquant aucun motif. D'autre part, la Commission n'aurait, jusqu'au jour de l'introduction du recours, fourni aucune réponse à ses demandes de renseignements formulées respectivement dans sa lettre du 19 avril 1996 et dans sa réclamation du 13 mai 1996.

105.
    Le requérant en conclut que la défenderesse a méconnu l'article 25, paragraphe 2, du statut.

106.
    Le requérant considère que, dans la détermination de la sanction de cette absence de motivation, le Tribunal ne devrait pas perdre de vue les deux autres moyens soulevés par lui portant contestation de la régularité au fond de la nomination de M. K. à l'emploi litigieux, à savoir, d'une part, celui tiré de l'illégalité de l'avis de vacance et, d'autre part, celui tiré de la violation des articles 7, paragraphe 1, 27 et 45, paragraphe 1, du statut, ainsi que du principe de protection de la confiance légitime et du devoir de sollicitude.

107.
    Le requérant relève que la Commission lui a proposé, à la fin du mois de février 1996, de lui verser une somme de 500 écus à titre d'indemnisation du préjudice moral causé par le retard de la communication de la décision de rejet de sa

réclamation. Il aurait répondu, le 26 février 1996, qu'il n'avait jamais été dans ses intentions de réclamer une indemnisation financière, mais que le seul but de son action visait à obtenir sa nomination à un emploi que ses qualités et son expérience pouvaient lui laisser espérer. Cette indemnisation totalement insuffisante ne saurait, dès lors, couvrir le préjudice né du rejet injustifié de sa candidature à l'emploi litigieux. La seule réparation possible consisterait en l'annulation de la nomination de M. K. et en la nomination du requérant comme chef de la délégation de la Commission au Costa Rica.

108.
    La Commission reconnaît que, si elle n'est pas obligée de motiver une décision de promotion à l'égard du candidat non promu, elle est tenue, en revanche, de le faire au moment du rejet de la réclamation (arrêt de la Cour du 9 décembre 1993, Parlement/Volger, C-115/92 P, Rec. p. I-6549, point 22).

109.
    La Commission expose qu'une décision motivée de rejet de la réclamation du requérant est parvenue à ce dernier le 20 novembre 1996, donc après la date de l'introduction du recours. Cette réponse aurait été établie dans les délais. Le retard de communication serait dû à un égarement interne tout à fait fortuit. Elle reconnaît que le requérant n'était pas en mesure d'apprécier le bien-fondé du rejet de sa candidature et qu'il pouvait, dans ces circonstances, légitimement introduire un recours.

110.
    La Commission informe le Tribunal que, ayant pris conscience de la négligence commise par elle, elle aurait entamé des négociations avec le requérant afin d'aboutir à un règlement à l'amiable, étant prête à le dédommager du préjudice moral subi dans le cadre d'une solution transactionnelle du litige. Le requérant n'aurait, toutefois, en définitive, pas accepté les propositions de la Commission.

111.
    La Commission propose de faire application du principe de proportionnalité et d'essayer de concilier les intérêts du requérant et la confiance légitime du candidat qui aurait été nommé valablement à l'emploi vacant (arrêt du Tribunal du 23 février 1994, Coussios/Commission, T-18/92 et T-68/92, RecFP p. II-171). L'annulation de la nomination de M. K. pour cause de motivation tardive du rejet de la candidature du requérant constituerait, aux yeux de la Commission, une sanction excessive de l'illégalité commise. Une solution équitable consisterait à verser au requérant une indemnité pour le dommage moral causé par la faute de service de la Commission.

112.
    La Commission ajoute que, dans la mesure où le requérant exige à titre d'indemnisation sa nomination comme chef de la délégation de la Commission au Costa Rica, cette demande reviendrait à inviter le Tribunal à adresser une injonction à la Commission, ce qui, d'après une jurisprudence constante, excéderait la compétence de cette juridiction. Cette demande serait, partant, irrecevable.

Appréciation du Tribunal

113.
    L'obligation de motiver toute décision faisant grief, édictée par l'article 25, deuxième alinéa, du statut, constitue un principe essentiel du droit communautaire auquel il ne saurait être dérogé qu'en raison de considérations impérieuses (voir, par exemple, arrêt du Tribunal du 18 mars 1997, Picciolo et Caló/Comité des régions, T-178/95 et T-179/95, RecFP p. II-155, point 33). Elle a pour but, d'une part, de fournir à l'intéressé une indication suffisante pour apprécier le bien-fondé de l'acte lui faisant grief et l'opportunité d'introduire un recours devant le Tribunal et, d'autre part, de permettre à celui-ci d'exercer son contrôle (voir, par exemple, arrêt du Tribunal du 12 juin 1997, Carbajo Ferrero/Parlement, T-237/95, RecFP p. II-429, point 82).

114.
    Selon une jurisprudence constante, l'AIPN n'est cependant pas tenue de motiver les décisions de promotion à l'égard de candidats non promus. Elle est, en revanche, tenue de motiver sa décision portant rejet d'une réclamation déposée en vertu de l'article 90, paragraphe 2, du statut, par un candidat non promu (arrêt Grassi/Conseil, cité au point 17 ci-dessus, point 13), la motivation de cette décisionétant censée coïncider avec la motivation de la décision contre laquelle la réclamation était dirigée (arrêt de la Cour du 27 octobre 1977, Moli/Commission, 121/76, Rec. p. 1971, point 12; arrêt Picciolo et Caló/Comité des régions, cité au point 113 ci-dessus, point 34).

115.
    S'il est vrai que l'AIPN n'est pas, en général, tenue de répondre à une réclamation, il en va différemment lorsque la décision qui en fait l'objet n'est pas motivée. En effet, une réponse motivée intervenant après l'introduction d'un recours ne remplirait sa fonction ni à l'égard de l'intéressé ni à l'égard du juge (arrêt du 12 février 1992, Volger/Parlement, cité au point 54 ci-dessus, point 40, et, par exemple, arrêt du Tribunal du 18 avril 1996, Kyrpitsis/CES, T-13/95, RecFP p. II-503, point 74).

116.
    En l'espèce, l'avis de vacance a été émis, conformément à l'article 29, paragraphe 1, sous a), du statut, en vue d'une promotion ou d'une mutation interne à l'institution. Le requérant s'est vu notifier le rejet de sa candidature par formulaire type daté du 2 février 1996. Ce formulaire était dépourvu de toute motivation.

117.
    Le requérant a ensuite introduit une réclamation au sens de l'article 90, paragraphe 2, du statut, en date du 13 mai 1996. L'AIPN ayant omis de lui notifier sa décision motivée dans un délai de quatre mois à partir de cette date, son défaut de réponse devait s'interpréter, à partir du 13 septembre 1996, en application de l'article 90, paragraphe 2, troisième alinéa, du statut, comme une décision implicite de rejet susceptible de faire l'objet d'un recours au sens de l'article 91 du statut. Le requérant a introduit son recours en date du 15 octobre 1996, sans avoir entre-temps reçu notification de la décision de la Commission sur sa réclamation.

118.
    Ce n'est que le 20 novembre 1996, donc postérieurement à l'introduction du recours, que le requérant a reçu notification de la décision de la Commission, datée du 11 septembre 1996, rejetant sa réclamation.

119.
    Il s'ensuit que la Commission, en omettant de transmettre au requérant les motifs du rejet de la candidature de ce dernier sinon dans un délai de quatre mois à partir de l'introduction de la réclamation, à tout le moins avant l'introduction du recours, a violé l'article 25, deuxième alinéa, du statut.

120.
    Le moyen tiré de l'absence de motivation du rejet de la candidature du requérant est, dès lors, fondé.

121.
    Toutefois, il y a lieu d'examiner la question de savoir quelles sont les conséquences à tirer, en l'espèce, de la violation de l'obligation de motiver le rejet de la candidature du requérant. En application du principe de proportionnalité, il y a lieu de prendre en considération, à cet égard, non seulement les intérêts du requérant victime de l'illégalité, mais également les intérêts des tiers dont la confiance légitime pourrait être lésée si des conclusions en annulation étaient accueillies (arrêt du Tribunal du 22 mars 1995, Kotzonis/CES, T-586/93, RecFP p. II-203, point 107, du 19 octobre 1995, Obst/Commission, T-562/93, RecFP p. II-737, point 81, et Coussios/Commission, cité au point 111 ci-dessus, point 105).

122.
    Le Tribunal rappelle que, eu égard à sa compétence de pleine juridiction dans les litiges de caractère pécuniaire, il peut, même en l'absence de conclusions régulières à cet effet, condamner l'institution défenderesse au paiement d'une indemnité pour le dommage moral causé par sa faute de service (voir, notamment, l'arrêt de la Cour du 5 juin 1980, Oberthür/Commission, 24/79, Rec. p. 1743, point 14). En l'espèce, le Tribunal considère que le versement d'une indemnité constitue la forme de réparation qui correspond le mieux à la fois aux intérêts du requérant et aux exigences du service.

123.
    Dans l'évaluation du dommage subi, il y a lieu de prendre en considération le fait que le requérant a été contraint d'introduire une procédure judiciaire pour connaître la motivation de la décision portant rejet de sa candidature. Dans ces circonstances, le Tribunal, évaluant le préjudice ex aequo et bono, estime que l'allocation d'un montant de 400 écus constitue une indemnisation adéquate du requérant.

Sur les dépens

Arguments des parties

124.
    La Commission qui reconnaît que c'est à la suite d'une négligence de ses services que le requérant a été amené à intenter son recours, est disposée à supporter les dépens en rapport avec l'introduction du recours.

125.
    La Commission n'est, en revanche, pas d'accord pour supporter les dépens du requérant exposés postérieurement à la réception de la décision de rejet de sa

réclamation et demande, en se fondant sur l'article 87, paragraphe 3, troisième alinéa, du règlement de procédure du Tribunal, que le requérant, même gagnant, soit condamné à lui rembourser les frais qu'elle a exposés postérieurement à l'introduction du recours et qui devraient être qualifiés de frustratoires ou vexatoires (arrêts de la Cour du 5 décembre 1963, Leroy/Haute Autorité, 35/62 et 16/63, Rec. p. 399, 401, 421, et du 30 octobre 1969, Rittweger/Commission, 33/68, Rec. p. 393). En effet, une fois intervenue la décision de rejet de sa candidature, le requérant aurait, d'après la Commission, dû comprendre qu'il n'avait plus intérêt à poursuivre le recours, et cela d'autant moins que la Commission était disposée à prendre à sa charge toute indemnisation pour préjudice moral.

126.
    Le requérant conteste que la poursuite de la procédure, postérieurement à la réception de la décision de rejet de la réclamation, serait frustratoire ou vexatoire. Il rappelle que l'objet de son recours ne se limiterait pas à faire reconnaître le non-respect par la Commission d'un aspect formel de la procédure précontentieuse, à savoir la réponse tardive de celle-ci à sa réclamation. L'objet principal de son recours consisterait à faire annuler la nomination de M. K. comme chef de la délégation de la Commission au Costa Rica, dans la mesure où cette nomination constitue une violation des articles 7, paragraphe 1, 27 et 45, paragraphe 1, du statut, du principe de protection de la confiance légitime et du devoir de sollicitude et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Appréciation du Tribunal

127.
    Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, la partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Aux termes de l'article 87, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement de procédure, le Tribunal peut répartir les dépens ou décider que chaque partie supporte ses propres dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs, ou pour des motifs exceptionnels. En vertu de l'article 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci, sans préjudice des dispositions de l'article 87, paragraphe 3, deuxième alinéa, aux termes desquelles le Tribunal peut condamner une partie, même gagnante, à rembourser à l'autre partie les frais qu'elle lui a fait exposer et qui sont jugés frustratoires ou vexatoires.

128.
    En ce qui concerne, en premier lieu, les dépens de la Commission, le Tribunal considère qu'il n'y a pas lieu, en l'espèce, de se départir du principe posé par l'article 88 du règlement de procédure, suivant lequel, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les dépens exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci. En effet, selon le Tribunal, la poursuite de la procédure par le requérant après la réception de la décision de rejet de sa réclamation ne revêt aucun caractère abusif, dès lors que son recours ne portait pas uniquement sur la réponse tardive de la Commission à sa réclamation, mais aussi et surtout sur les prétendues violations des articles 7, paragraphe 1, 27 et 45, paragraphe 1, du statut, du principe de protection de la confiance légitime et du devoir de sollicitude.

129.
    En ce qui concerne, en second lieu, les dépens du requérant, le Tribunal relève que celui-ci a été obligé d'introduire le présent recours afin d'obtenir une motivation de la décision portant rejet de sa candidature. Le Tribunal estime, en conséquence, qu'il y a lieu, au vu des conclusions du requérant et de la Commission, de condamner la Commission à rembourser les dépens exposés par le requérant jusqu'à la date de réception de la décision de rejet de la réclamation. Les dépens exposés par le requérant postérieurement à cette date seront supportés par lui.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête:

1)    La Commission est condamnée à payer au requérant une somme de 400 écus à titre de dommages et intérêts pour faute de service.

2)    Le recours est rejeté pour le surplus.

3)    La Commission supportera ses propres dépens et les dépens exposés par le requérant jusqu'à la date de réception par celui-ci de la décision de rejet de sa réclamation. Le requérant supportera les dépens qu'il a dû exposer à partir de la date de réception de la décision de rejet de sa réclamation.

Azizi
García-Valdecasas
Jaeger

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 12 mai 1998.

Le greffier

Le président

H. Jung

J. Azizi


1: Langue de procédure: le français.