Language of document : ECLI:EU:T:2022:271

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

4 mai 2022 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure de nullité – Marque de l’Union européenne figurative représentant une croix sur le côté d’une chaussure de sport – Article 7, paragraphe 1, sous b), et article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement (CE) no 40/94 [devenus article 7, paragraphe 1, sous b), et article 59, paragraphe 1, sous a), du règlement (UE) 2017/1001] – Article 94, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑117/21,

Deichmann SE, établie à Essen (Allemagne), représentée par Me C. Onken, avocate,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par MM. D. Gája et V. Ruzek, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Munich, SL, établie à La Torre de Claramunt (Espagne), représentée par Mes J. Güell Serra et M. Guix Vilanova, avocats,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’EUIPO du 7 décembre 2020 (affaire R 2882/2019-4), relative à une procédure de nullité entre Deichmann et Munich,

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de Mme A. Marcoulli, présidente, MM. J. Schwarcz (rapporteur) et C. Iliopoulos, juges,

greffier : Mme A. Juhász-Tóth, administratrice,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 18 février 2021,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 27 avril 2021,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 24 mai 2021,

à la suite de l’audience du 23 février 2022,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 6 novembre 2002, l’intervenante, Munich, SL, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié, remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        La marque figurative dont l’enregistrement a été demandé était représentée comme suit :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 25 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Chaussures de sport ».

4        La marque a été enregistrée le 24 mars 2004 sous le numéro 2923852.

5        Le 26 janvier 2011, la requérante, Deichmann SE, a déposé, auprès de l’EUIPO, une demande en nullité de la marque en cause sur le fondement de l’article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 [devenu article 59, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001].

6        Par décision du 17 octobre 2019, la division d’annulation a rejeté le recours et a condamné la requérante aux dépens.

7        Le 17 décembre 2019, la requérante a formé un recours contre la décision de la division d’annulation.

8        Par décision du 7 décembre 2020 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’EUIPO a entériné la décision de la division d’annulation et a rejeté le recours. Elle a estimé, en substance, que l’intervenante avait démontré de manière convaincante, dans ses observations et éléments de preuve, que de nombreuses entreprises utilisaient des motifs relativement simples sur le côté de la chaussure pour indiquer l’origine commerciale de leurs chaussures et que les éléments de preuve produits par la requérante, loin de les remettre en cause, servaient à les confirmer. Elle en a conclu que la marque contestée possédait un caractère distinctif.

 Conclusions des parties

9        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO et l’intervenante aux dépens.

10      L’EUIPO et l’intervenante concluent, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

11      À titre liminaire, il convient de souligner que, compte tenu de la date d’introduction de la demande d’enregistrement en cause, à savoir le 6 novembre 2002, qui est déterminante aux fins de l’identification du droit matériel applicable, les faits de l’espèce sont régis  par les dispositions matérielles du règlement no 40/94 (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 23 avril 2020, Gugler France/Gugler et EUIPO, C‑736/18 P, non publié, EU:C:2020:308, point 3 et jurisprudence citée).

12      Par ailleurs, dans la mesure où, selon une jurisprudence constante, les règles de procédure sont généralement censées s’appliquer à la date à laquelle elles entrent en vigueur (voir arrêt du 11 décembre 2012, Commission/Espagne, C‑610/10, EU:C:2012:781, point 45 et jurisprudence citée), le litige est régi par les dispositions procédurales du règlement 2017/1001.

13      Partant, en l’espèce, en ce qui concerne les règles de fond, il convient d’entendre les références faites  par la chambre de recours dans la décision attaquée et par la requérante et l’intervenante dans l’argumentation soulevée, à l’article 59, paragraphe 1, sous a), et à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, comme visant l’article 51, paragraphe 1, sous a), et l’article 7, paragraphe 1, sous b), d’une teneur identique du règlement  no 40/94.

14      À l’appui de son recours, la requérante soulève trois moyens, tirés, le premier, d’une violation de l’article 94, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001, le deuxième, d’une violation de l’article 94, paragraphe 1, deuxième phrase, du règlement 2017/1001 et, le troisième, d’une violation de l’article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, lu conjointement avec l’article 7, paragraphe 1, sous b), du même règlement.

 Sur le premier moyen, tiré dune violation de larticle 94, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001

15      Dans le cadre du premier moyen, la requérante soutient que la chambre de recours a violé l’article 94, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001 en ce qu’elle n’a pas suffisamment motivé la décision attaquée. En se fondant sur les points 19 et 20 de la décision attaquée, la requérante fait valoir que la chambre de recours n’aurait pas mentionné les éléments de preuve contenus dans la pièce A3, qu’elle avait produite devant la division d’annulation. En outre, elle fait, en substance, grief à la chambre de recours de s’être fondée sur la prémisse selon laquelle les pièces A1 à A3 produites par la requérante contiendraient des « enregistrements de marques passés et présents montr[ant] que les fabricants de chaussures de sport placent effectivement des marques relativement simples sur les côtés de leurs chaussures de sport, et que la protection de la marque a été demandée et accordée à ces signes ». Selon elle, de telles preuves n’ayant jamais été présentées par la requérante, la prémisse de la chambre de recours serait incorrecte ou dépourvue de motivation.

16      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

17      Il convient de rappeler que, en vertu de l’article 94, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001, les décisions de l’EUIPO doivent être motivées. Cette obligation de motivation a la même portée que celle découlant de l’article 296 TFUE, selon laquelle le raisonnement de l’auteur de l’acte doit apparaître de façon claire et non équivoque. Elle a pour double objectif de permettre, d’une part, aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de défendre leurs droits et, d’autre part, au juge de l’Union européenne d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée. En outre, l’obligation de motivation n’impose pas aux chambres de recours qu’elles fournissent un exposé qui suivrait exhaustivement et un par un tous les raisonnements que les parties ont articulés devant elles. Il suffit d’exposer les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision. Par ailleurs, la motivation peut être implicite à condition qu’elle permette aux intéressés de connaître les raisons pour lesquelles la décision de la chambre de recours a été adoptée et à la juridiction compétente de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle [voir arrêt du 12 mars 2020, Maternus/EUIPO – adp Gauselmann (Jokers WILD Casino), T‑321/19, non publié, EU:T:2020:101, points 15 à 17 et jurisprudence citée].

18      Il y a lieu de rappeler également que le défaut ou l’insuffisance de motivation constitue un moyen tiré de la violation des formes substantielles, distinct, en tant que tel, du moyen pris de l’inexactitude des motifs de la décision, dont le contrôle relève de l’examen du bien-fondé de cette décision [voir, en ce sens, arrêts du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France, C‑367/95 P, EU:C:1998:154, point 67, et du 23 septembre 2015, Mechadyne International/OHMI (FlexValve), T‑588/14, non publié, EU:T:2015:676, point 59]. En effet, le caractère éventuellement erroné des motifs n’en fait pas une motivation inexistante [voir arrêt du 30 septembre 2016, Alpex Pharma/EUIPO – Astex Pharmaceuticals (ASTEX), T‑355/15, non publié, EU:T:2016:591, point 45 et jurisprudence citée].

19      Enfin, lorsque la chambre de recours entérine la décision de la division d’annulation sur certains points, et compte tenu de la continuité fonctionnelle entre divisions d’annulation et chambres de recours, dont atteste l’article 64, paragraphe 1, du règlement no 207/2009, cette décision ainsi que sa motivation sur ces points font partie du contexte dans lequel la décision de la chambre de recours a été adoptée, contexte qui est connu des parties et qui permet au juge d’exercer pleinement son contrôle de légalité quant au bien-fondé de l’appréciation de la chambre de recours [voir arrêt du 18 mars 2015, Naazneen Investments/OHMI – Energy Brands (SMART WATER), T‑250/13, non publié, EU:T:2015:160, point 16 et jurisprudence citée].

20      En l’espèce, il convient de constater que, au point 19 de la décision attaquée, la chambre de recours a, premièrement, entériné les conclusions de la division d’annulation selon lesquelles l’intervenante « avait démontré de manière convaincante, dans ses observations et éléments de preuve, que de nombreuses entreprises utilis[ai]ent des motifs relativement simples sur le côté de la chaussure pour indiquer l’origine commerciale de leurs chaussures ». Deuxièmement, elle a souligné que, les « éléments de preuve produits par la requérante, loin de […] remettre en cause [de telles conclusions], servaient à les confirmer ». Enfin, troisièmement, elle a conclu qu’il était correct de considérer que le « consommateur moyen per[ceva]it ces motifs comme des signes intrinsèquement distinctifs et que le public pertinent pour les produits en cause accordera[it] une attention particulière aux formes placées sur les côtés des chaussures de sport » et que, « appliqué à une chaussure, un tel signe servira[it] de marque et [étai]t susceptible de remplir la fonction principale d’une marque, à savoir distinguer les chaussures d’une entreprise de celles d’une autre ».

21      Par ailleurs, au point 20 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré qu’il n’était pas « convaincant de soutenir que la [marque] contestée sera[it] perçue uniquement comme un élément décoratif ou comme un renforcement pour les produits […] ». Elle a ajouté que :

« [a]ucun argument convaincant n’a été avancé à cet égard ; au contraire, les éléments de preuve produits par la requérante au moyen de ses [pièces A1 à A3] montrent bien l’inverse, dans la mesure où les preuves sous serment et les détails des enregistrements de marques passés et présents montrent que les fabricants de chaussures de sport placent effectivement des marques relativement simples sur les côtés de leurs chaussures de sport, et que la protection de la marque a été demandée et accordée à ces signes. »

22      Au surplus, la division d’annulation a précisé les raisons ainsi que les éléments sur le fondement desquels elle était parvenue à la conclusion selon laquelle la marque contestée avait un caractère distinctif. Il convient d’ajouter qu’une description d’une partie au moins de ces éléments figure également aux points 2 à 4 de la décision attaquée.

23      Partant, eu égard à la jurisprudence mentionnée aux points 17 à 19 ci-dessus, le grief de la requérante ne saurait prospérer, celle-ci étant en mesure de comprendre sur la base des explications fournies aux points 2 à 4 et 19 à 20 de la décision attaquée ainsi que de celles figurant dans la décision de la division d’annulation, les motifs soutenant la conclusion de la chambre de recours sur le caractère distinctif de la marque contestée. Il ressort, d’ailleurs, des arguments présentés par la requérante dans le cadre du présent moyen, mais également dans le recours dans son ensemble par lequel elle conteste le bien-fondé de la décision attaquée, qu’elle a été en mesure de comprendre les raisons pour lesquelles la chambre de recours a estimé que la marque contestée était pourvue de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement  no 207/2009.

24      Il est certes vrai, ainsi que l’a reconnu l’EUIPO dans son mémoire en réponse et lors de l’audience, que la chambre de recours a fait référence, aux points 2 et 20 de la décision attaquée, à des « enregistrements de marques passés et présents » alors que la pièce A3 porte sur des enregistrements de dessins et modèles comme le soutient la requérante. Cependant, indépendamment du fait que la division d’annulation n’a pas commis une telle erreur, il y a lieu de considérer que cette circonstance ne suffit pas pour conclure que la requérante n’a pas pu comprendre le raisonnement de la chambre de recours en ce qui concerne le refus des arguments qu’elle avait invoqués lors de la procédure devant les instances de l’EUIPO.

25      En effet, eu égard au libellé du point 20 de la décision attaquée (voir point 21 ci-dessus), il n’y a aucune ambiguïté quant au fait que la chambre de recours se réfère notamment aux pièces A1 à A3 fournies par la requérante, lorsqu’elle souligne que les « preuves sous serment et les détails des enregistrements de marques passés et présents montrent que les fabricants de chaussures de sport placent effectivement des marques relativement simples sur les côtés de leurs chaussures de sport, et que la protection de la marque a été demandée et accordée à ces signes ». La requérante ne saurait donc faire valoir que la chambre de recours aurait manqué à son obligation de motivation en ne fournissant aucune preuve de sa prémisse factuelle selon laquelle il existait « des enregistrements de marques passés et présents ».

26      Enfin, il convient de noter que, conformément à la jurisprudence rappelée au point 17 ci-dessus, la question de savoir si ladite prémisse est erronée ou encore celle de savoir si la chambre de recours a apprécié de façon erronée les éléments de preuves produits par la requérante, comme le soutient, en substance, cette dernière, sont des questions qui ne relèvent pas de la motivation de la décision attaquée, mais du bien-fondé de celle-ci, lequel est apprécié, dans le cadre du troisième moyen.

27      S’agissant, enfin, de l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours n’aurait pas mentionné dans la décision attaquée les éléments de preuve produits par la requérante dans la pièce A3, il suffit de relever qu’il n’est pas exigé que la motivation de la décision attaquée spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, ainsi que cela est indiqué au point 17 ci-dessus. De même, la chambre de recours n’était pas tenue, dans le cadre de son devoir de motivation, d’expliquer la valeur probante de chaque élément du faisceau d’indices sur lequel elle a fondé sa décision, pour autant que son raisonnement permette à la requérante de connaître les justifications de la décision prise et, dès lors, de se défendre et au Tribunal d’exercer son contrôle.

28      Il résulte de tout ce qui précède que la chambre de recours a, conformément à l’article 94, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001, fait apparaître de façon claire et non équivoque les motifs essentiels pour lesquels elle a considéré que la marque demandée était pourvue de caractère distinctif.

29      Dès lors, il y a lieu d’écarter le premier moyen.

 Sur le deuxième moyen, tiré dune violation de larticle 94, paragraphe 1, deuxième phrase, du règlement 2017/1001

30      À l’appui du deuxième moyen, la requérante fait valoir que la chambre de recours a fondé sa décision sur des considérations factuelles sur lesquelles elle n’a pas pu présenter d’observations, en violation de l’article 94, paragraphe 1, du règlement 2017/1001. Elle soutient donc que la chambre de recours a violé son droit d’être entendue.

31      La requérante fait en particulier grief à la chambre de recours d’avoir fondé sa décision sur des « enregistrements de marques passés et présents » sans avoir présenté à la requérante le moindre détail de ces enregistrements et en la privant ainsi de la possibilité de présenter ses observations. La requérante ajoute que, si elle avait été en mesure de faire connaître son point de vue sur l’existence alléguée d’enregistrements de marques passés et présents constitués de deux lignes croisées sur le côté de chaussures de sport, elle aurait été en mesure de préciser qu’il n’existait pas d’enregistrements de telles marques. La requérante aurait également pu expliquer que ce que la chambre de recours a apparemment considéré être des enregistrements de marques étaient en fait des enregistrements de dessins et modèles.

32      L’EUIPO et l’intervenante contestent le bien-fondé de ce moyen.

33      En vertu de l’article 94, paragraphe 1, deuxième phrase, du règlement 2017/1001, les décisions de l’EUIPO ne peuvent être fondées que sur des motifs ou des preuves au sujet desquels les parties ont pu prendre position.

34      Cette disposition constitue une application spécifique du principe général du respect des droits de la défense, consacré, par ailleurs, à l’article 41, paragraphe 2, sous a), de la charte des droits fondamentaux, selon lequel les personnes dont les intérêts sont affectés par des décisions des autorités publiques doivent être mises en mesure de faire connaître utilement leur point de vue. Le droit d’être entendu s’étend à tous les éléments de fait ou de droit qui constituent le fondement de l’acte décisionnel [voir, en ce sens, arrêts du 16 juillet 2015, Roland/OHMI – Louboutin (Nuance de rouge sur la semelle d’une chaussure), T‑631/14, non publié, EU:T:2015:521, point 20, et du 29 mars 2019, All Star/EUIPO – Carrefour Hypermarchés (Forme d’une semelle de chaussure), T‑611/17, non publié, EU:T:2019:210, point 72].

35      D’emblée, il convient de relever que les « détails des enregistrements de marques passés et présents » sur lesquels la requérante prétend ne pas avoir été entendue correspondent aux enregistrements mentionnés par la chambre de recours au point 20 de la décision attaquée.

36      Or, ainsi qu’il a été relevé au point 25 ci-dessus, il n’y a aucune ambiguïté quant au fait que la chambre de recours se réfère notamment aux pièces A1 à A3 fournies par la requérante dans la procédure devant l’EUIPO, lorsqu’elle souligne que les « preuves sous serment et les détails des enregistrements de marques passés et présents montrent que les fabricants de chaussures de sport placent effectivement des marques relativement simples sur les côtés de leurs chaussures de sport, et que la protection de la marque a été demandée et accordée à ces signes ». La requérante ne saurait donc faire valoir qu’elle a été privée de son droit d’être entendue, alors qu’il s’agit de ses propres documents.

37      Cela vaut d’autant plus que, ainsi qu’il ressort des points 10 et 11 de la décision attaquée, la requérante a fait valoir que les « documents qu’elle a[vait] déposés avec la demande en nullité (pièces A1, A2 et A3) montr[ai]ent que les lignes croisées [étaie]nt un élément figuratif courant utilisé par divers fabricants de chaussures », ce que l’intervenante a contesté en « soutenant la décision attaquée et faisant valoir, entre autres, que les éléments de preuve produits par la requérante […] [étaie]nt en fait soit dénués de pertinence, soit démontr[ai]ent tout au plus le contraire de ses allégations, à savoir que les documents montr[ai]ent que le signe des lignes croisées [étai]t distinctif pour les “chaussures de sport” ».

38      Il y a lieu d’ajouter que la question de savoir si la chambre de recours a apprécié de façon erronée les éléments de preuves produits par la requérante, comme le soutient, en substance, cette dernière, en considérant des enregistrements de marques qui sont en fait des enregistrements de dessins et modèles, est une question qui relève non pas du droit d’être entendu, ni de la motivation de la décision attaquée, mais du bien-fondé de celle-ci, lequel est apprécié, dans le cadre du troisième moyen.

39      En tout état de cause, quand bien même les enregistrements auxquels la chambre de recours fait référence au point 20 de la décision attaquée concerneraient d’autres enregistrements que ceux contenus dans les pièces A1 à A3 fournis par la requérante, il y aurait lieu de rejeter l’allégation selon laquelle si elle avait été en mesure de faire connaître son point de vue sur l’existence alléguée d’enregistrements de marques passés et présents constitués de deux lignes croisées sur le côté de chaussures de sport, la requérante aurait été en mesure de préciser qu’il n’existait pas d’enregistrements de telles marques.

40      En effet, force est de constater qu’il ressort clairement du dossier relatif à la procédure devant l’EUIPO que les parties ont débattu, lors de la procédure administrative devant la chambre de recours, de l’existence alléguée d’enregistrements de marques passés et présents constitués de deux lignes croisées sur le côté de chaussures de sport ou de l’existence de marques enregistrées présentant des caractéristiques similaires.

41      Plus particulièrement, ainsi qu’il ressort du point 3 de la décision attaquée et de la page 2 de la décision de la division d’annulation, l’intervenante a réfuté les arguments soulevés par la requérante à cet égard et elle a soumis à la division d’annulation plusieurs exemples de tels enregistrement de marques similaires parmi lesquels figurait notamment l’enregistrement de la marque de l’Union européenne no 006041081, dont la requérante est titulaire, représenté comme suit :

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42      Or, l’intervenante a souligné la contradiction de la requérante, qui tentait de faire annuler la marque contestée pour défaut de caractère distinctif et, en même temps, demandait l’enregistrement de marques similaires consistant en deux lignes sur le côté d’une chaussure de sport.

43      Eu égard aux considérations qui précèdent, une violation du droit d’être entendu de la requérante ne saurait être constatée en l’espèce.

44      Il s’ensuit que le deuxième moyen doit être rejeté.

 Sur le troisième moyen, tiré dune violation de larticle 52, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, lu conjointement avec larticle 7, paragraphe 1, sous b), du même règlement

45      À l’appui du troisième moyen, la requérante fait valoir, en substance, que la chambre de recours n’aurait pas évalué correctement le caractère distinctif de la marque contestée, au motif notamment qu’il serait inexact de supposer que le consommateur moyen perçoit de simples motifs sur le côté des chaussures de sport comme des signes distinctifs intrinsèques. Par ailleurs, la chambre de recours n’aurait pas tenu compte des conditions particulières qui s’appliquent aux marques qui se confondent avec l’apparence du produit. Enfin, elle prétend qu’aucune conclusion ne peut être tirée de l’arrêt du 17 janvier 2018, Deichmann/EUIPO – Munich (Représentation d’une croix sur le côté d’une chaussure de sport) (T‑68/16, EU:T:2018:7), étant donné que cette affaire ne portait pas sur l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009.

46      L’EUIPO et l’intervenante contestent le bien-fondé de ce moyen.

47      À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 40/94 dispose que la nullité de la marque de l’Union européenne est déclarée lorsqu’elle a été enregistrée contrairement aux dispositions de l’article 7 de ce règlement.

48      Il y a lieu d’ajouter que la seule date pertinente aux fins de l’examen d’une demande en nullité fondée sur l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 40/94 est celle du dépôt de la demande de marque contestée. La circonstance que la jurisprudence admette la prise en compte d’éléments postérieurs à cette date, loin d’infirmer cette interprétation de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 40/94, la conforte, dès lors que cette prise en compte n’est possible qu’à la condition que ces éléments concernent la situation à la date du dépôt de la demande de marque [voir, en ce sens, arrêt du 3 juin 2009, Frosch Touristik/OHMI – DSR touristik (FLUGBÖRSE), T‑189/07, EU:T:2009:172, point 19].

49      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 40/94, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif.

50      Selon la jurisprudence, il y a lieu d’interpréter un motif absolu de refus à la lumière de l’intérêt général qui le sous-tend. S’agissant de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 40/94, la notion d’intérêt général se confond, à l’évidence, avec la fonction essentielle de la marque, qui est de garantir au consommateur l’identité d’origine du produit ou du service désigné par la marque, en lui permettant de distinguer sans confusion possible ce produit ou ce service de ceux qui ont une autre provenance [voir arrêt du 3 mai 2018, Raise Conseil/EUIPO – Raizers (RAISE), T‑463/17, non publié, EU:T:2018:249, point 35 et jurisprudence citée].

51      Une marque est distinctive lorsqu’elle permet d’identifier les produits ou les services pour lesquels l’enregistrement est demandé comme provenant d’une entreprise déterminée et, donc, de distinguer ces produits ou ces services de ceux d’autres entreprises [voir arrêt du 5 juin 2019, EBM Technologies/EUIPO (MobiPACS), T‑272/18, non publié, EU:T:2019:373, point 18 et jurisprudence citée].

52      Il n’est pas nécessaire que la marque transmette une information précise quant à l’identité du fabricant du produit ou du prestataire de services. Il suffit qu’elle permette au public concerné de distinguer le produit ou le service qu’elle désigne de ceux qui ont une autre origine commerciale et de conclure que tous les produits ou les services qu’elle désigne ont été fabriqués, commercialisés ou fournis sous le contrôle du titulaire de cette marque, auquel peut être attribuée la responsabilité de leur qualité (voir arrêt du 5 juin 2019, MobiPACS, T‑272/18, non publié, EU:T:2019:373, point 19 et jurisprudence citée).

53      Un minimum de caractère distinctif suffit à faire obstacle à l’application du motif absolu de refus prévu à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 40/94 (voir arrêt du 5 juin 2019, MobiPACS, T‑272/18, non publié, EU:T:2019:373, point 20 et jurisprudence citée).

54      Le caractère distinctif d’une marque doit être apprécié, d’une part, par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement a été demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent, qui est constitué par le consommateur moyen desdits produits ou services, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Le niveau d’attention du consommateur moyen, censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services visés (voir arrêt du 3 mai 2018, RAISE, T‑463/17, non publié, EU:T:2018:249, point 37 et jurisprudence citée).

55      C’est à la lumière de ces considérations qu’il y a lieu d’examiner si, comme le soutient la requérante, la chambre de recours a violé l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 40/94 en concluant que la marque demandée était pourvue de caractère distinctif.

56      En premier lieu, il y a lieu de relever que la requérante ne conteste pas les appréciations de la chambre de recours figurant au point 18 de la décision attaquée, selon lesquelles le public pertinent est, en l’espèce, composé du grand public faisant preuve d’un niveau d’attention moyen. Au demeurant, aucun élément du dossier ne permet de remettre en cause cette appréciation.

57      En deuxième lieu, ainsi qu’il ressort du dossier de l’EUIPO, il importe de souligner que la marque contestée est décrite dans la demande d’enregistrement en espagnol comme suit : « La marca consiste en un diseño constituido por la representación de un aspa situada en un lateral de un calzado deportiva », à savoir comme un « dessin consistant en la représentation d’une croix située sur un côté d’une chaussure de sport ». Il y a donc lieu de considérer que la marque contestée se présente sous la forme d’un motif, destiné à être apposé sur une partie des produits désignés et non sous la forme de la représentation bidimensionnelle d’une chaussure. Au demeurant, ainsi que cela ressort du dossier, la marque contestée peut être vue comme consistant en une croix, constituée de deux lignes noires interposées, représentées en traits continus ou encore comme des lignes croisées inclinées vers la droite. Contrairement à ce qu’a soutenu la requérante lors de l’audience, bien que les lignes se croisent dans leur partie supérieure, cela ne saurait exclure que le public pertinent, lorsqu’il sera confronté à la marque contestée, puisse percevoir lesdites lignes comme ressemblant à la lettre majuscule « X ».

58      En troisième lieu, s’agissant de la signification de la marque contestée, la requérante estime que la chambre de recours a commis une erreur en supposant que le public pertinent percevait de simples motifs sur le côté des chaussures de sport comme des signes distinctifs intrinsèques. Selon elle, la chambre de recours aurait méconnu les réalités du marché et aurait ignoré le fait que les lignes croisées sur les chaussures de sport étaient si communes qu’elles n’étaient pas en mesure de remplir la fonction principale d’une marque, à savoir celle de distinguer les chaussures d’une entreprise de celles d’une autre.

59      À cet égard, s’il est vrai, ainsi que le souligne l’EUIPO dans son mémoire en réponse et lors de l’audience, qu’il a déjà été jugé que rien n’empêchait un signe distinctif de remplir également d’autres fonctions, et en particulier une fonction décorative [voir, en ce sens, arrêt du 9 octobre 2002, Glaverbel/OHMI (Surface d’une plaque de verre), T‑36/01, EU:T:2002:245, point 24] et que les signes simples consistant en une lettre unique n’étaient, a priori, pas dépourvus de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 40/94 (voir, en ce sens, arrêt du 9 septembre 2010, OHMI/Borco-Marken-Import Matthiesen, C‑265/09 P, EU:C:2010:508, point 39), il n’en demeure pas moins qu’une forme qui est simple et banale, n’est pas susceptible d’acquérir un caractère distinctif au seul motif qu’elle est apposée sur la partie latérale de la chaussure dès lors que de nombreux fabricants de chaussures de sport ou de loisirs utilisent des motifs relativement simples à cet endroit [voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 4 décembre 2015, K-Swiss/OHMI (Représentation de bandes parallèles sur une chaussure), T‑3/15, non publié, EU:T:2015:937, points 20 et 21].

60      Il y a lieu d’ajouter que, si les éléments produits par l’intervenante permettent certes de démontrer, ainsi que le soutiennent tant la division d’annulation que la chambre de recours, que de nombreux fabricants de chaussures de sport ont développé une pratique consistant à placer leur marque sur la partie latérale de la chaussure ou que les vendeurs exposent en magasin la partie latérale de ces produits, sur laquelle apparaît la marque, ces éléments ne permettent pas pour autant d’établir que le consommateur moyen a appris à établir un lien automatique entre le signe figurant sur la partie latérale d’une chaussure de sport et un fabriquant déterminé et qu’il percevra donc nécessairement toute forme géométrique positionnée latéralement sur une chaussure de sport comme étant une marque (voir, en ce sens, arrêt du 4 décembre 2015, Représentation de bandes parallèles sur une chaussure, T‑3/15, non publié, EU:T:2015:937, point 26).

61      Admettre que toute forme géométrique, y compris la plus simple, soit dotée d’un caractère distinctif parce qu’elle se trouve sur la partie latérale d’une chaussure de sport conduirait à permettre à certains fabricants de s’approprier des formes simples, avant tout décoratives, qui doivent rester accessibles à tous, à l’exception des hypothèses dans lesquelles le caractère distinctif du signe a été acquis par l’usage (arrêt du 4 décembre 2015, Représentation de bandes parallèles sur une chaussure, T‑3/15, non publié, EU:T:2015:937, point 34).

62      Toutefois, en l’espèce, indépendamment de la question de savoir si le consommateur moyen accorde une attention particulièrement soutenue aux formes positionnées sur la partie latérale de la chaussure, au point qu’il considère que ces formes constituent en général des marques, il convient de rappeler que, dans le cadre d’une procédure de nullité, la marque de l’Union européenne enregistrée étant présumée valide, il appartient à la personne ayant présenté la demande en nullité d’invoquer devant l’EUIPO les éléments concrets qui mettraient en cause sa validité [arrêts du 13 septembre 2013, Fürstlich Castell’sches Domänenamt/OHMI – Castel Frères (CASTEL), T‑320/10, EU:T:2013:424, point 28, et du 21 avril 2015, Louis Vuitton Malletier/OHMI – Nanu-Nana (Représentation d’un motif à damier gris), T‑360/12, non publié, EU:T:2015:214, point 61].

63      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, ainsi qu’il ressort du dossier de l’EUIPO, aux fins de démontrer que le signe était dépourvu de caractère distinctif pour les produits en cause, la requérante a présenté, premièrement, des impressions de 93 modèles de chaussures d’un certain fabricant, dont certains arboraient différents types de rayures sur leurs côtés, provenant d’une page en ligne allemande (pièce A1), deuxièmement, une déclaration sous serment datée du 7 septembre 2009 d’un gérant d’une société allemande, attestant que sa société avait commercialisé des chaussures de sport avec des logos similaires à celui de la marque contestée (pièce A2), troisièmement, des impressions de détails d’enregistrement de dessins et modèles allemands et internationaux antérieurs et actuels consistant en différents types de lignes croisées sur des chaussures de sport (pièce A3).

64      S’agissant en particulier de la pièce A3, il convient de relever que, ainsi que l’a reconnu l’EUIPO dans son mémoire en réponse et lors de l’audience, elle contient des « enregistrements de dessins et modèles allemands et internationaux » et non des « enregistrements de marques » comme l’a indiqué par erreur la chambre de recours aux points 2 et 20 de la décision attaquée. Toutefois, cette erreur dans l’identification du contenu de la pièce A3 est sans incidence sur la solution du litige, contrairement à ce qu’a soutenu la requérante dans sa requête et lors de l’audience. En effet, indépendamment de la question de savoir s’il s’agit d’une erreur de plume comme l’a fait valoir l’intervenante lors de l’audience et du fait que la division d’annulation n’a nullement commis une telle erreur dans son analyse, il convient de relever que la chambre de recours s’est appuyée sur de nombreux éléments de preuve autres que ceux figurant dans la pièce A3 pour considérer que la marque contestée était pourvue de caractère distinctif. Dès lors, quand bien même la chambre de recours n’aurait pas commis cette erreur, rien ne permet de considérer que cette dernière aurait abouti à une conclusion différente en l’espèce.

65      En tout état de cause, force est de constater que, ainsi que l’a souligné l’intervenante tant devant les instances de l’EUIPO que devant le Tribunal, les éléments contenus dans les pièces A1 à A3 ne sont pas de nature à établir que la marque contestée, mentionnée au point 2 ci-dessus, laquelle représente une croix ou des lignes croisées inclinées vers la droite, est dépourvue de caractère distinctif.

66      En effet, contrairement à ce que soutient, en substance, la requérante dans sa requête et ainsi que le fait valoir à juste titre l’intervenante, la circonstance qu’un certain fabricant ou qu’une autre société allemande aient commercialisé des chaussures avec différents types de lignes et d’éléments graphiques sur le côté de la chaussure (telles que celles figurant dans les pièces A1 et A2) ou encore que des dessins et modèles contenant des lignes similaires sur le côté de chaussures de sport (tels que ceux figurant dans la pièce A3) aient été enregistrés ne saurait suffire, à elle seule, pour démontrer que la marque contestée manque de caractère distinctif en ce qui concerne les chaussures de sport.

67      D’une part, ainsi que l’a relevé l’intervenante devant les instances de l’EUIPO et dans son mémoire en réponse, certains des modèles vendus par la société allemande présentés dans la pièce A2 font apparaître un signe sur le côté des chaussures qui coïncide avec la marque internationale no 822829 que cette société allemande a déposée et qui a été enregistrée en 2004. Partant, le fait que cet élément graphique ait été enregistré tend plutôt à confirmer qu’un tel élément peut être doté d’un caractère distinctif. D’autre part, ainsi que l’a souligné à juste titre l’EUIPO lors de l’audience, le fait que plusieurs dessins ou modèles contenant des lignes similaires sur le côté de chaussures de sport aient été enregistrés ne permet de tirer aucune conclusion quant à leur utilisation effective sur le marché et n’est donc pas, en tant que tel, un élément susceptible de prouver que le public pertinent percevrait la marque contestée comme étant dépourvue de caractère distinctif.

68      Par ailleurs, indépendamment de la présomption de validité attachée à la marque contestée (voir point 62 ci-dessus), il convient de souligner qu’il ressort du dossier de l’EUIPO que l’intervenante a démontré l’existence de nombreux enregistrements de marques passés et présents constitués de deux lignes sur le côté de chaussures de sport similaires à la marque contestée. Plus particulièrement, ainsi qu’il ressort du point 3 de la décision attaquée, de la page 2 de la décision de la division d’annulation ainsi que du point 2 du mémoire du 3 juillet 2014, l’intervenante a réfuté les arguments soulevés par la requérante et elle a soumis à la division d’annulation plusieurs exemples de tels enregistrements parmi lesquels figurait notamment l’enregistrement de la marque de l’Union européenne no 006041081, dont la requérante est titulaire, représenté comme suit :

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69      Il y a lieu d’ajouter que la requérante ne saurait valablement soutenir qu’aucune conclusion ne peut être tirée de l’arrêt du 17 janvier 2018, Représentation d’une croix sur le côté d’une chaussure de sport (T‑68/16, EU:T:2018:7), qui mettait en cause les mêmes parties et la même marque. Certes, même si la portée d’une action en déchéance qui était en cause dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt précité est différente de la procédure en nullité en cause dans la présente affaire, il n’en demeure pas moins que le Tribunal s’est indirectement prononcé et a indirectement confirmé, aux points 73 à 75 de l’arrêt du 17 janvier 2018, Représentation d’une croix sur le côté d’une chaussure de sport (T‑68/16, EU:T:2018:7), que la marque contestée était pourvue d’un minimum de caractère distinctif par rapport aux produits en cause, car ce dernier devait préciser quel était le caractère distinctif de la marque telle qu’enregistrée et apprécier si la manière dont elle était utilisée altérait son caractère distinctif.

70      Enfin, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours n’aurait pas tenu compte des conditions particulières qui s’appliquent aux marques qui se confondent avec l’apparence du produit, il suffit de constater qu’il est inopérant dès lors que, ainsi que cela a été relevé au point 57 ci-dessus, la marque contestée se présente sous la forme d’un motif, destiné à être apposé sur une partie des produits désignés et non sous la forme de la représentation bidimensionnelle d’une chaussure.

71      Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de considérer que la requérante est restée en défaut de démontrer que la chambre de recours avait violé l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 40/94 en concluant que la marque contestée, consistant en une croix ou en des lignes croisées inclinées vers la droite, était pourvue de caractère distinctif.

72      Partant, il convient de rejeter le troisième moyen et, dès lors, le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

73      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

74      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Deichmann SE est condamnée aux dépens de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) et de Munich, SL.

Marcoulli

Schwarcz

Iliopoulos

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 4 mai 2022.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.