ORDONNANCE DU PRÉSIDENT DE LA COUR
13 novembre 2019 (*)
« Pourvoi – Intervention – Intérêt à la solution du litige »
Dans les affaires jointes C‑818/18 P et C‑6/19 P,
ayant pour objet deux pourvois au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduits, respectivement, le 21 décembre 2018 et le 4 janvier 2019,
The Yokohama Rubber Co. Ltd, établie à Tokyo (Japon), représentée par Mes D. Martucci et F. Boscariol de Roberto, avvocati (C‑818/18 P),
Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. J. Ivanauskas, en qualité d’agent (C‑6/19 P),
parties requérantes,
les autres parties à la procédure étant :
Pirelli Tyre SpA, établie à Milan (Italie), représentée par Mes T. Müller et F. Togo, Rechtsanwälte,
partie demanderesse en première instance,
Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. J. Ivanauskas, en qualité d’agent,
partie défenderesse en première instance (C‑818/18 P),
The Yokohama Rubber Co. Ltd, établie à Tokyo, représentée par Mes D. Martucci et F. Boscariol de Roberto, avvocati,
partie intervenante en première instance (C‑6/19 P),
LE PRÉSIDENT DE LA COUR
vu la proposition de M. N. Piçarra, juge rapporteur,
l’avocat général, M. M. Campos Sánchez-Bordona, entendu,
rend la présente
Ordonnance
1 Par leurs pourvois, The Yokohama Rubber Co. Ltd (ci-après « Yokohama ») et l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) demandent l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 24 octobre 2018, Pirelli Tyre/EUIPO – Yokohama Rubber (Représentation d’une rainure en forme de « L ») (T‑447/16, EU:T:2018:709), par lequel celui-ci a annulé la décision de la cinquième chambre de recours de l’EUIPO du 28 avril 2016 (affaire R 2583/2014-5), relative à une procédure de nullité entre Yokohama et Pirelli Tyre SpA (ci-après « Pirelli »).
2 Par acte déposé au greffe de la Cour le 24 juin 2019, l’European Association of Trade Mark Owners (Marques) [Association européenne des propriétaires de marques (Marques)], établie à Leicester (Royaume-Uni), a, sur le fondement de l’article 40, deuxième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, demandé à être admise à intervenir au litige dans les présentes affaires, au soutien des conclusions de Pirelli.
3 Par actes déposés au greffe de la Cour, respectivement, le 2 et le 11 juillet 2019, l’EUIPO et Yokohama ont présenté leurs observations écrites sur la demande d’intervention de Marques. Alors que Yokohama s’oppose à cette demande, l’EUIPO n’a pas formulé d’objections à cet égard.
4 Par décision du 25 octobre 2019, le président de la Cour a décidé de joindre les affaires C‑818/18 P et C‑6/19 P.
Sur la demande en intervention
5 Aux termes de l’article 40, deuxième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, toute personne justifiant d’un intérêt à la solution d’un litige soumis à la Cour, autre qu’un litige entre États membres, entre institutions de l’Union européenne ou entre ces États, d’une part, et lesdites institutions, d’autre part, est en droit d’intervenir à ce litige.
6 En particulier, la Cour admet l’intervention d’associations représentatives ayant pour objet la protection des intérêts de leurs membres dans des affaires soulevant des questions de principe de nature à affecter ces intérêts (ordonnance du président de la Cour du 12 janvier 2018, Société des produits Nestlé e.a./Mondelez UK Holdings & Services, C‑84/17 P, C‑85/17 P et C‑95/17 P, non publiée, EU:C:2018:16, point 6).
7 À cet égard, en premier lieu, il ressort de la demande en intervention présentée par Marques et des annexes de celle-ci que Marques est une association à but non lucratif accréditée auprès de l’EUIPO. Elle bénéficie du statut d’observateur auprès du conseil d’administration et du comité budgétaire de l’EUIPO et jouit également du statut d’observateur auprès de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI). Par ailleurs, Marques représente actuellement 827 entreprises et sociétés provenant de plus de 80 pays à travers le monde, dont les États membres de l’Union. Un grand nombre de ces entreprises et sociétés sont titulaires de marques connues dans des secteurs d’activités divers. Dès lors, Marques peut être considérée comme une association représentative, au sens de la jurisprudence citée au point 6 de la présente ordonnance.
8 En deuxième lieu, ces éléments du dossier soumis à la Cour attestent que Marques a notamment pour objet de promouvoir les intérêts de ses membres dans l’usage qui est fait de leurs marques.
9 En troisième lieu, la question de droit soulevée dans les affaires C‑818/18 P et C‑6/19 P concerne la portée du motif absolu de refus à l’enregistrement d’une marque prévu à l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement (CE) no 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1). Ces affaires devraient permettre à la Cour de clarifier la question de savoir si un signe figuratif ne représentant qu’une partie très limitée du produit en cause peut être qualifié de signe constitué exclusivement par la « forme du produit nécessaire à l’obtention d’un résultat technique », au sens de cette disposition du règlement no 40/94.
10 Il s’agit, par conséquent, d’une question de principe qui est susceptible d’affecter les intérêts des membres de Marques, en leur qualité de titulaires de marques de l’Union européenne.
11 Dans ces conditions, il convient de considérer que Marques remplit les critères posés par la jurisprudence citée au point 6 de la présente ordonnance et justifie ainsi d’un intérêt à la solution du litige dans les affaires C‑818/18 P et C‑6/19 P.
12 Il convient de rappeler, en outre, que, en vertu de l’article 129, paragraphe 4, du règlement de procédure de la Cour, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 190, paragraphe 1, de celui-ci, le président de la Cour peut prendre en considération une demande en intervention présentée après l’expiration du délai visé à l’article 190, paragraphe 2, du règlement de procédure et avant l’adoption de la décision d’ouvrir la phase orale de la procédure. Dans cette hypothèse, si le président de la Cour admet l’intervention, l’intervenant peut uniquement présenter ses observations lors de l’audience de plaidoiries, si celle-ci a lieu (voir, en ce sens, ordonnance du président de la Cour du 12 janvier 2018, Société des produits Nestlé e.a./Mondelez UK Holdings & Services, C‑84/17 P, C‑85/17 P et C‑95/17 P, non publiée, EU:C:2018:16, point 11).
13 La demande d’intervention de Marques ayant été présentée après l’expiration du délai visé à l’article 190, paragraphe 2, du règlement de procédure, mais avant l’adoption de la décision d’ouvrir la phase orale de la procédure, il y a lieu d’appliquer l’article 129, paragraphe 4, du règlement de procédure.
14 Par ailleurs, conformément à l’article 129, paragraphe 3, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 190, paragraphe 1, de celui-ci, l’intervenant accepte le litige dans l’état où il se trouve lors de son intervention.
15 Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu d’admettre Marques à intervenir au litige dans les affaires jointes C‑818/18 P et C‑6/19 P, au soutien des conclusions de Pirelli, aux fins de présenter ses observations lors de l’audience de plaidoiries, si celle-ci a lieu.
Sur les dépens
16 Aux termes de l’article 137, paragraphe 1, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de celui-ci, il est statué sur les dépens dans l’arrêt ou l’ordonnance qui met fin à l’instance.
17 En l’espèce, la demande d’intervention de Marques étant accueillie, il y a lieu de réserver les dépens liés à son intervention.
Par ces motifs, le président de la Cour ordonne :
1) L’European Association of Trade Mark Owners (Marques) est admise à intervenir au litige dans les affaires jointes C-818/18 P et C-6/19 P, au soutien des conclusions de Pirelli Tyre SpA.
2) L’European Association of Trade Mark Owners (Marques) pourra présenter ses observations lors de l’audience de plaidoiries, si celle-ci a lieu.
3) Les dépens sont réservés.
Signatures