Language of document : ECLI:EU:T:2014:119

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

12 mars 2014 (*)

« Marque communautaire – Procédure de déchéance – Marque communautaire verbale PALMA MULATA – Usage sérieux – Article 15, paragraphe 1, sous a), et article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement (CE) n° 207/2009 – Forme qui diffère par des éléments n’altérant pas le caractère distinctif »

Dans l’affaire T‑381/12,

Ana Borrajo Canelo, demeurant à Madrid (Espagne),

Carlos Borrajo Canelo, demeurant à Madrid,

Luis Borrajo Canelo, demeurant à Madrid,

représentés par Me A. Gómez López, avocat,

parties requérantes,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. A. Schifko, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Tecnoazúcar, établie à La Havane (Cuba), représentée par Me J. Carbonell Callicó, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’OHMI du 21 mai 2012 (affaire R 2265/2010‑2), relative à une procédure de déchéance entre Ana Borrajo Canelo, Carlos Borrajo Canelo et Luis Borrajo Canelo, d’une part, et Tecnoazúcar, d’autre part,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de MM. S. Papasavvas, président, N. J. Forwood et E. Bieliūnas (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 28 août 2012,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 3 décembre 2012,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 21 novembre 2012,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 30 avril 2002, Comercial Masoliver, SA, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal PALMA MULATA.

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 32, 33 et 39 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié.

4        La marque en cause a été enregistrée le 19 avril 2004 sous le numéro 2680098.

5        Le 25 août 2005, l’OHMI a procédé à l’enregistrement de la cession partielle de la marque en cause en faveur de l’intervenante, Tecnoazúcar.

6        La marque en cause a, dès lors, fait l’objet d’un nouvel enregistrement sous le numéro 4602454, et ce pour le produit relevant de la classe 33 et correspondant à la description suivante : « Rhum ».

7        L’enregistrement de la marque communautaire n° 4602454 a été publié au Bulletin des marques communautaires n° 2007/35, du 23 juillet 2007.

8        Le 20 avril 2009, les requérants, Mme Ana Borrajo Canelo, MM. Carlos Borrajo Canelo et Luis Borrajo Canelo, ont introduit une demande en déchéance de ladite marque sur le fondement de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009 pour le produit visé au point 6 ci-dessus.

9        Le 24 septembre 2010, la division d’annulation a rejeté la demande en déchéance.

10      Le 17 novembre 2010, les requérants ont formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’annulation.

11      Par décision du 21 mai 2012 (ci-après la « décision attaquée »), la deuxième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours. En particulier, elle a, tout d’abord, considéré que les documents apportés par l’intervenante afin de démontrer l’usage sérieux de la marque PALMA MULATA étaient suffisants pour prouver le lieu, la durée et la portée de l’usage de la marque, pour le produit pour lequel la marque en cause avait été enregistrée, à savoir le « rhum », et que cet usage constituait un usage sérieux pour la période et le territoire pertinents. La chambre de recours a, ensuite, observé que cette appréciation n’avait pas été contestée par les requérants, lesquels soulevaient uniquement la question controversée de la nature de l’usage fait du signe. Par ailleurs, la chambre de recours a signalé que les requérants ne niaient pas que les documents produits par l’intervenante prouvaient l’usage des signes figuratifs suivants (le premier étant dénommé ci-après le « signe figuratif n° 1 » et le second étant dénommé ci-après le « signe figuratif n° 2 ») :

Image not found

Image not found

12      En revanche, la chambre de recours a relevé que les requérants considéraient que ces signes altéraient le caractère distinctif de la marque PALMA MULATA, telle qu’elle avait été enregistrée, à savoir comme une marque exclusivement verbale. À cet égard, la chambre de recours a estimé que ni les termes supplémentaires « ron » et « Cuba », ni les éléments graphiques tels que la légère stylisation des mots ou le buste de femme dans les signes figuratifs n’étaient suffisants pour altérer le caractère distinctif de la marque PALMA MULATA, de sorte que l’utilisation de ces signes constituait un usage, dans une variante acceptable, de la marque communautaire, conformément à l’article 15, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009.

 Conclusions des parties

13      Les requérants concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer la non-conformité de la décision attaquée au règlement n° 207/2009 ;

–        condamner l’OHMI et l’intervenante aux dépens.

14      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner les requérants aux dépens.

15      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        confirmer le rejet de la demande en déchéance de la marque PALMA MULATA, présentée par les requérants ;

–        condamner les requérants aux dépens.

 En droit

 Sur la recevabilité du premier chef de conclusions des requérants

16      Par leur premier chef de conclusions, les requérants demandent au Tribunal de déclarer que la décision attaquée est contraire au règlement n° 207/2009. Or, il résulte de l’article 65, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 207/2009 que le recours ouvert devant le Tribunal vise à examiner la légalité des décisions des chambres de recours et à obtenir, le cas échéant, l’annulation ou la réformation de celles-ci [voir arrêt du Tribunal du 17 mars 2011, Jiménez Sarmiento/OHMI – Oxygène sport international (Q), T‑455/09, non publié au Recueil, point 17, et la jurisprudence citée], de sorte qu’il ne saurait avoir pour objet d’obtenir, au regard de telles décisions, des jugements confirmatifs ou déclaratoires.

17      Il résulte cependant de la requête que les requérants tendent en substance à obtenir l’annulation de la décision attaquée, au motif que la chambre de recours aurait considéré à tort que l’utilisation des signes figuratifs nos 1 et 2 pouvait constituer un usage, dans une variante acceptable, de la marque PALMA MULATA, conformément à l’article 15, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009 [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 9 septembre 2010, adp Gauselmann/OHMI – Maclean (Archer Maclean’s Mercury), T‑106/09, non publié au Recueil, point 14]. Il s’ensuit qu’il y a lieu de comprendre le premier chef de conclusions en ce sens qu’il tend à l’annulation de la décision attaquée. Partant, ledit chef de conclusions est recevable.

 Sur la recevabilité du deuxième chef de conclusions de l’intervenante

18      Par son deuxième chef de conclusions, l’intervenante vise à obtenir du Tribunal un jugement confirmatif. Conformément à la jurisprudence citée au point 16 ci-dessus, un tel chef de conclusions est irrecevable.

19      Par conséquent, le deuxième chef de conclusions de l’intervenante doit être rejeté comme irrecevable.

 Sur le fond

20      À l’appui de leur recours, les requérants invoquent un moyen unique, tiré de la violation de l’article 15, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009.

21      Les requérants ne contestent pas la décision attaquée en ce que la chambre de recours a conclu que les documents produits par l’intervenante dans le cadre de la procédure administrative prouvaient suffisamment le lieu, le temps et la portée géographique de l’usage de la marque PALMA MULATA. En revanche, ils considèrent que ces documents n’établissent pas l’usage de la marque en ce qui concerne sa nature.

22      En effet, selon les requérants, il est manifeste que, du fait des différences contenues dans les signes figuratifs nos 1 et 2, la forme sous laquelle la marque en cause est utilisée implique une altération du caractère distinctif de la marque telle qu’enregistrée. Par conséquent, l’utilisation des signes figuratifs litigieux ne saurait constituer un usage, dans une variante acceptable, de la marque en cause, conformément à l’article 15, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009.

23      L’OHMI et l’intervenante contestent les arguments des requérants.

24      Aux termes de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009, le titulaire de la marque communautaire est déclaré déchu de ses droits, sur demande présentée auprès de l’OHMI ou sur demande reconventionnelle dans une action en contrefaçon, si, pendant une période ininterrompue de cinq ans, la marque n’a pas fait l’objet d’un usage sérieux dans l’Union européenne pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et qu’il n’existe pas de justes motifs pour le non-usage.

25      Par ailleurs, selon l’article 15, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009, la preuve de l’usage sérieux d’une marque comprend également la preuve de l’utilisation de celle-ci sous une forme qui diffère par des éléments n’altérant pas le caractère distinctif de la marque dans la forme sous laquelle celle-ci a été enregistrée.

26      L’objet de l’article 15, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009, qui évite d’imposer une conformité stricte entre la forme utilisée de la marque et celle sous laquelle la marque a été enregistrée, est de permettre au titulaire de cette dernière d’apporter au signe, à l’occasion de son exploitation commerciale, les modifications qui, sans en altérer le caractère distinctif, permettent de mieux l’adapter aux exigences de commercialisation et de promotion des produits ou des services concernés. Conformément à son objet, le champ d’application matériel de cette disposition doit être considéré comme limité aux situations dans lesquelles le signe concrètement utilisé par le titulaire d’une marque pour désigner les produits ou les services pour lesquels celle-ci a été enregistrée constitue la forme sous laquelle cette même marque est commercialement exploitée. Dans de pareilles situations, lorsque le signe utilisé dans le commerce diffère de la forme sous laquelle celui-ci a été enregistré uniquement par des éléments négligeables, de sorte que les deux signes peuvent être considérés comme globalement équivalents, la disposition susvisée prévoit que l’obligation d’usage de la marque enregistrée peut être remplie en rapportant la preuve de l’usage du signe qui en constitue la forme utilisée dans le commerce [arrêts du Tribunal du 10 juin 2010, Atlas Transport/OHMI – Hartmann (ATLAS TRANSPORT), T‑482/08, non publié au Recueil, point 30, et du 24 mai 2012, TMS Trademark-Schutzrechtsverwertungsgesellschaft/OHMI – Comercial Jacinto Parera (MAD), T‑152/11, non publié au Recueil, point 16].

27      En vertu de la règle 22, paragraphe 3, du règlement (CE) n° 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement n° 40/94 (JO L 303, p. 1), tel que modifié, applicable mutatis mutandis dans les procédures de nullité en vertu de la règle 40, paragraphe 5, dudit règlement, la preuve de l’usage doit porter sur le lieu, la durée, l’importance et la nature de l’usage qui a été fait de la marque antérieure.

28      Afin de prouver l’usage sérieux de la marque PALMA MULATA, l’intervenante a produit un certain nombre d’éléments de preuve, résumés, comme suit, au point 23 de la décision attaquée :

–        document n° II : mises en demeure du 13 juin et du 2 juillet 2007, adressées par les requérants à Comercial Masoliver, SA, lui demandant de cesser d’utiliser la marque PALMA MULATA, et réponse de cette entreprise ;

–        document n° III : factures datant des années 2006 à 2009 concernant la fourniture du rhum Mulata par l’intervenante à IBERGRUP Licores XXI, SL ;

–        document n° IV : factures datant des années 2006 à 2009 émises par Beveland SA à l’attention d’IBERGRUP Licores XXI, SL, pour la mise en bouteille et l’étiquetage du rhum de la marque PALMA MULATA ;

–        document n° V : factures datant des années 2006 à 2009, attestant la commercialisation du rhum de la marque PALMA MULATA dans le cadre de l’Union, émises par IBERGRUP Licores XXI, SL, à l’attention de différentes sociétés ;

–        document n° VI : extrait du site Internet www.tecnoazucar.cu ;

–        document n° VII : page d’un catalogue publicitaire contenant des photographies des produits de merchandising ;

–        pièce I : plan marketing relatif à la commercialisation du rhum de la marque PALMA MULATA ;

–        pièces II à VII : échantillons matériels de différents produits de merchandising du rhum de la marque PALMA MULATA et exemplaires d’affiches publicitaires relatives au rhum de la marque PALMA MULATA ;

–        pièce VIII : échantillons matériels de bouteilles de rhum de la marque PALMA MULATA.

29      Il convient de rappeler que la preuve de l’usage sérieux d’une marque comprend également la preuve de l’utilisation de celle-ci sous une forme qui diffère par des éléments n’altérant pas le caractère distinctif de la marque dans la forme sous laquelle celle-ci a été enregistrée (voir point 25 ci-dessus).

30      Le constat d’une altération du caractère distinctif de la marque telle qu’enregistrée requiert un examen du caractère distinctif et dominant des éléments ajoutés en se fondant sur les qualités intrinsèques de chacun de ces éléments ainsi que sur la position relative des différents éléments dans la configuration de la marque (voir arrêt ATLAS TRANSPORT, précité, point 31, et la jurisprudence citée).

31      En l’espèce, il convient d’examiner si c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que les éléments verbaux et graphiques additionnels des signes figuratifs nos 1 et 2 n’altéraient pas le caractère distinctif de la marque PALMA MULATA, de sorte que l’utilisation desdits signes pouvait être considérée comme un usage, dans une variante acceptable, de la marque en cause, conformément à l’article 15, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009.

32      S’agissant, premièrement, du signe figuratif n° 1, il y a lieu de remarquer, à l’instar de la chambre de recours et sans que ceci ait été contesté par les requérants, que les éléments verbaux additionnels « ron » (rhum) et « de Cuba » sont descriptifs du produit « rhum » couvert par la marque PALMA MULATA. En effet, le terme « ron » désigne immédiatement ce produit, puisqu’il renvoie au nom d’une boisson alcoolisée courante dont l’équivalent dans d’autres langues est connu, notamment lorsqu’il apparaît associé à la boisson en question, et l’élément « de Cuba » renvoie au nom d’un pays dont chacun connaît l’existence et qui pourra être perçu par le public pertinent comme étant une indication de l’origine géographique du produit. En revanche, les termes « palma » et « mulata » ne sont pas descriptifs du produit « rhum », couvert par la marque en cause.

33      Concernant la stylisation des éléments verbaux, il y a lieu de noter que les éléments « ron » et « de Cuba » se présentent en blanc sur un fond noir, combinant ainsi des couleurs basiques, et sont écrits dans la même police de caractères standard. Quant aux éléments « palma » et « mulata », ils ne sont pas dans la même police de caractères que les éléments « ron » et « de Cuba » et sont, en outre, légèrement stylisés. L’élément « palma » apparaît, en effet, en italique et dans une couleur blanche sur fond noir. L’élément « mulata » est écrit dans une couleur rouge et dans une police de caractères légèrement stylisée.

34      Il convient en outre de souligner que les éléments « ron » et « de Cuba », qui sont d’une taille équivalente, occupent une place accessoire dans les signes figuratifs par rapport à l’élément « mulata », écrit dans une taille beaucoup plus grande et qui occupe le centre des étiquettes apposées sur les échantillons de bouteilles fournis par l’intervenante. Quant à l’élément « palma », il y a lieu de remarquer qu’il figure dans une taille sensiblement plus petite que l’élément « mulata », mais que sa position, au-dessus de l’élément « mulata », et sa stylisation différente des autres éléments verbaux lui confèrent un certain caractère distinctif.

35      De surcroît, comme l’a constaté la chambre de recours, dans l’expression « ron palma mulata de Cuba », les éléments « palma » et « mulata » se retrouvent dans le même ordre que celui des éléments de la marque en cause.

36      Ainsi, il convient de conclure que les éléments « ron » et « de Cuba » sont non seulement descriptifs du produit couvert par la marque en cause, mais occupent en outre une place accessoire dans l’impression d’ensemble produite par ladite marque. Dès lors, l’expression « palma mulata » est l’élément distinctif et dominant du signe figuratif n° 1 et conserve sa fonction d’indication de l’origine commerciale du produit en cause.

37      S’agissant, deuxièmement, du signe figuratif n° 2, il y a lieu de retenir les mêmes conclusions que celles formulées à l’égard du signe figuratif n° 1 concernant l’expression « ron palma mulata de Cuba », dès lors que la signification, la disposition et la stylisation des termes qui y sont contenus sont identiques. La seule différence réside dans la couleur employée pour les éléments « ron », « palma » et « de Cuba » qui apparaissent en noir sur un fond blanc, combinant ainsi, comme dans le signe figuratif n° 1, des couleurs basiques. Par conséquent, dans l’expression « ron palma mulata de Cuba », l’expression « palma mulata » est l’élément distinctif et dominant.

38      Quant à l’élément figuratif représentant un buste de femme présent dans le signe figuratif n° 2, il y a lieu de souligner que, lorsqu’une marque est composée d’éléments verbaux et figuratifs, les premiers sont, en principe, plus distinctifs que les seconds, car le consommateur moyen fera plus facilement référence au produit en cause en citant le nom qu’en décrivant l’élément figuratif de la marque [voir arrêt du Tribunal du 2 février 2011, Oyster Cosmetics/OHMI – Kadabell (Oyster cosmetics), T‑437/09, non publié au Recueil, point 36, et la jurisprudence citée]. En outre, cette représentation d’un buste de femme n’est pas reproduite d’une manière particulièrement originale ou inhabituelle, ni n’occupe une place telle, dans le signe figuratif n° 2, qu’elle en constitue l’élément dominant. L’élément figuratif sera, dès lors, perçu par le consommateur comme un élément de décoration et ne sera pas considéré par celui-ci comme remplissant la fonction de distinguer le produit concerné de ceux d’autres entreprises. Cet élément figuratif a, par conséquent, un faible caractère distinctif.

39      Dès lors, l’expression « palma mulata » est l’élément distinctif et dominant du signe figuratif n° 2 et conserve sa fonction d’indication de l’origine commerciale du produit en cause.

40      Ainsi, la chambre de recours a pu considérer à juste titre que le caractère distinctif de la marque enregistrée n’avait pas été altéré au sens de l’article 15, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009 lors de l’usage qui en avait été fait sur les étiquettes versées au dossier.

41      Cette conclusion ne saurait être remise en cause par les autres arguments avancés par les requérants.

42      En premier lieu, les requérants invoquent à l’appui de leurs allégations différentes décisions de l’OHMI dans lesquelles les divisions d’annulation ou les chambres de recours auraient conclu que l’usage d’une marque complexe incluant des éléments graphiques et verbaux et l’utilisation de caractères calligraphiques et de couleurs précises, ces éléments se différenciant du signe tel qu’enregistré, entraînerait une altération du caractère distinctif de la marque enregistrée. Les requérants précisent que, contrairement à la décision attaquée, ces décisions suivent les directives relatives aux procédures devant l’OHMI, s’agissant des variantes concernant les lettres et les mots (partie C, partie 6, point II 6.4.2 desdites directives) et s’agissant des variantes concernant les marques ou éléments figuratifs (partie C, partie 6, point II 6.4.3 desdites directives).

43      Or, il suffit de constater à cet égard, d’une part, que l’OHMI est appelé à décider chaque cas d’espèce selon ses propres mérites et qu’il n’est pas lié par des décisions antérieures prises dans d’autres affaires. En effet, la légalité des décisions de la chambre de recours doit être appréciée uniquement sur le fondement du règlement n° 207/2009 et non sur celui d’une pratique décisionnelle antérieure à celles-ci (arrêts de la Cour du 12 janvier 2006, Deutsche SiSi-Werke/OHMI, C‑173/04 P, Rec. p. I‑551, point 48 ; du 28 juin 2012, XXXLutz Marken/OHMI, C‑306/11 P, non publié au Recueil, point 91, et ordonnance de la Cour du 3 octobre 2012, Cooperativa Vitivinícola Arousana/OHMI et Sotelo Ares, C‑649/11 P, non publiée au Recueil, point 59). En outre, dans le cadre de son contrôle de légalité, le Tribunal n’est pas lié par la pratique décisionnelle de l’OHMI [arrêt de la Cour du 26 avril 2007, Alcon/OHMI, C‑412/05 P, Rec. p. I‑3569, point 65, et arrêt du Tribunal du 22 avril 2008, Casa Editorial el Tiempo/OHMI – Instituto Nacional de Meteorología (EL TIEMPO), T‑233/06, non publié au Recueil, point 48].

44      D’autre part, s’agissant de l’argument des requérants relatif aux directives relatives aux procédures devant l’OHMI, il y a lieu de rappeler que ces directives, qui sont publiées sur le site Internet de ce dernier, ne constituent que la codification d’une ligne de conduite qu’il se propose lui-même d’adopter [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 12 mai 2009, Jurado Hermanos/OHMI (JURADO), T‑410/07, Rec. p. II‑1345, point 20, et du 7 juillet 2010, Valigeria Roncato/OHMI – Roncato (CARLO RONCATO), T‑124/09, non publié au Recueil, point 27].

45      Par conséquent, ce n’est pas au regard de ces directives, mais au regard de la jurisprudence citée au point 26 ci-dessus, qu’il y a lieu de vérifier si l’usage des signes figuratifs nos 1 et 2 constitue un usage, dans une variante acceptable, de la marque PALMA MULATA.

46      En second lieu, les requérants soutiennent que l’intervenante a fait valoir l’usage du signe figuratif n° 2 pour « éluder » l’usage de la marque en cause. En effet, l’intervenante aurait cherché à se soustraire à son obligation de faire usage de la marque PALMA MULATA en invoquant à son avantage l’utilisation d’une marque totalement distincte, à savoir le signe figuratif n° 2, et qui aurait fait l’objet d’une demande d’enregistrement, rejetée à la suite de l’accueil de l’opposition formée par les requérants. Or, conformément à l’arrêt du Tribunal du 23 février 2006, Il Ponte Finanziaria/OHMI – Marine Enterprise Projects (BAINBRIDGE) (T‑194/03, Rec. p. II‑445, points 50 et 51), l’article 15, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009 ne permettrait pas au titulaire d’une marque enregistrée de se soustraire à l’obligation qui lui incombe de faire usage de cette marque en invoquant à son bénéfice l’utilisation d’une marque similaire faisant l’objet d’un enregistrement distinct, de sorte qu’il y aurait lieu de considérer que les conditions pour l’application de la disposition de l’article 15, paragraphe 1, sous a), dudit règlement ne se trouveraient pas réunies en l’espèce.

47      À cet égard, il suffit de relever que les circonstances ayant conduit à la solution développée aux points 50 et 51 de l’arrêt BAINBRIDGE, précité, ne sont pas réunies en l’espèce. En effet, comme les requérants l’indiquent eux-mêmes, le signe figuratif n° 2 a fait l’objet d’une demande d’enregistrement, mais celle-ci a été rejetée à la suite d’une procédure d’opposition formée par ces derniers. Ainsi, l’intervenante ne pouvait pas invoquer à son bénéfice l’utilisation d’une marque similaire faisant l’objet d’un enregistrement distinct, puisque, en tout état de cause, le signe figuratif n° 2 ne faisait pas l’objet d’un tel enregistrement.

48      Par conséquent, les arguments des requérants, examinés aux points 41 à 47 ci-dessus, doivent être écartés.

49      Il convient, dès lors, de rejeter le moyen unique et, partant, le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

50      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Les requérants ayant succombé, il y a lieu de les condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Mme Ana Borrajo Canelo, MM. Carlos Borrajo Canelo et Luis Borrajo Canelo sont condamnés aux dépens.

Papasavvas

Forwood

Bieliūnas

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 12 mars 2014.

Signatures


* Langue de procédure : l’espagnol.