Language of document : ECLI:EU:F:2007:88

ORDONNANCE DU PRÉSIDENT DE LA DEUXIÈME CHAMBRE DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE DE L’UNION EUROPÉENNE

24 mai 2007 (*)

« Aide judiciaire »

Dans l’affaire F‑95/05 AJ,

ayant pour objet une demande d’aide judiciaire au titre de l’article 94 du règlement de procédure du Tribunal de première instance des Communautés européennes,

N, agent contractuel de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Bruxelles (Belgique), initialement représenté par Me K. H. Hagenaar, avocat, puis par Mes J. van Drooghenbroeck et T. Demaseure, avocats, et désormais par Me I. Kletzlen, avocat,

partie demanderesse,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. J. Currall et Mme K. Herrmann, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE PRÉSIDENT DE LA DEUXIÈME CHAMBRE DU TRIBUNAL

rend la présente

Ordonnance

1        Par requête parvenue au greffe du Tribunal de première instance des Communautés européennes le 5 octobre 2005 par télécopie (le dépôt de l’original étant intervenu le 11 octobre suivant), la partie demanderesse demande, en substance, d’une part, l’annulation de la décision du directeur de la direction générale (DG) « Relations extérieures » de la Commission des Communautés européennes, du 15 avril 2005, l’informant qu’elle ne sera pas recrutée en tant que chef d’administration à la délégation de la Commission en Guinée et, d’autre part, une indemnité en réparation de son préjudice matériel et moral.

2        Ce recours a initialement été enregistré au greffe du Tribunal de première instance sous le numéro T‑377/05.

3        Par ordonnance du 15 décembre 2005, le Tribunal de première instance, en application de l’article 3, paragraphe 3, de la décision 2004/752/CE, Euratom du Conseil, du 2 novembre 2004, instituant le Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (JO L 333, p. 7), a renvoyé la présente affaire devant le Tribunal. Le recours a été enregistré au greffe de ce dernier sous le numéro F‑95/05.

4        Par acte parvenu au greffe du Tribunal le 12 janvier 2007 par télécopie (le dépôt de l’original étant intervenu le 17 janvier suivant), la partie demanderesse sollicite son admission au bénéfice de l’aide judiciaire, au titre de l’article 94 du règlement de procédure du Tribunal de première instance, applicable mutatis mutandis au Tribunal, en vertu de l’article 3, paragraphe 4, de la décision 2004/752, jusqu’à l’entrée en vigueur du règlement de procédure de ce dernier.

5        À l’appui de cette demande, la partie demanderesse fait valoir que, le 30 avril 2006, elle a perdu sa position d’agent contractuel auprès de la Commission et que, étant toujours sans emploi, elle ne peut subvenir à ses besoins avec sa seule allocation de chômage. Elle ne disposerait par ailleurs d’aucun autre revenu ou capital, se faisant parfois aider par sa famille et ses amis. Sa demande est accompagnée de l’attestation de son inscription comme demandeur d’emploi ainsi que du décompte récapitulatif des versements mensuels de l’allocation de chômage pour la période de juin à décembre 2006.

6        En outre, il ressort de la demande d’assistance judiciaire de la partie demanderesse que cette dernière sollicite du Tribunal la désignation d’un nouvel avocat « spécialiste et compétent ». À la suite d’échanges avec le greffe du Tribunal, N a, par courrier parvenu au greffe le 4 mai 2007, communiqué le nom de son nouvel avocat, Me I. Kletzlen.

7        Par lettre du greffe datée du 29 janvier 2007, le Tribunal a invité la partie défenderesse à déposer ses observations sur la demande d’assistance judiciaire déposée par la partie demanderesse.

8        Dans ses observations, déposées au greffe du Tribunal le 9 février 2007, la Commission, qui ne s’oppose pas formellement à la demande d’aide judiciaire, informe néanmoins le Tribunal de ce que la partie demanderesse a, le 31 janvier 2007, signé un contrat d’agent contractuel pour exercer un emploi auprès de ses services, ce pour une période d’un an. La Commission indique, de plus, que, en conséquence, le traitement brut mensuel de la partie demanderesse est de 2 564,27 euros et son traitement net de l’ordre de 1 975 euros. La Commission souligne également que la partie demanderesse ne fait état d’aucune obligation familiale ou d’une autre nature et que les frais qu’elle devra supporter dans le cadre du recours principal seront limités, dans la mesure où la procédure écrite est clôturée depuis juillet 2006.

9        Par courrier du 15 février 2007, le Tribunal a invité la partie demanderesse à déposer ses observations sur les observations de la partie défenderesse.

10      Par courrier parvenu au greffe du Tribunal le 25 février 2007 par courrier électronique (le dépôt de l’original étant intervenu le 28 février suivant), la partie demanderesse a certes admis qu’elle occupait un nouvel emploi depuis le 31 janvier 2007, ce qui a mis fin au versement de l’allocation de chômage à compter du 1er février 2007, mais expose toutefois les raisons qui l’ont conduite à ne pas retirer sa demande d’aide judiciaire. Premièrement, elle soutient que son nouvel emploi est précaire en ce que, d’une part, elle a été recrutée par la Commission qui est la partie défenderesse dans le recours principal et, d’autre part, elle a signé un contrat d’un an, éventuellement renouvelable, mais dans la limite de deux ans maximum. Deuxièmement, elle fait valoir que son traitement de base, bien que comparable au revenu moyen des ressortissants belges, est plus faible que le traitement qu’elle percevait en tant qu’agent temporaire. Troisièmement, son loyer étant de 900 euros par mois, charges comprises, il ne lui resterait plus que 1 000 euros pour subvenir à ses autres dépenses. Quatrièmement, elle prétend ne pas pouvoir payer les factures importantes des avocats qualifiés dont elle aurait besoin pour la défendre. Cinquièmement, elle relève qu’elle doit encore rembourser les personnes qui lui ont prêté de l’argent durant les neuf mois pendant lesquels elle s’est trouvée au chômage.

11      En vertu de l’article 94, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal de première instance, pour assurer un accès effectif à la justice, l’aide judiciaire accordée pour les procédures devant le Tribunal couvre, totalement ou en partie, les frais liés à l’assistance et à la représentation en justice devant le Tribunal. Ces frais sont pris en charge par la caisse de ce dernier.

12      Selon l’article 94, paragraphes 2 et 3, du règlement de procédure du Tribunal de première instance, l’octroi de l’aide judiciaire est subordonné à la double condition que, d’une part, le demandeur soit, en raison de sa situation économique, dans l’incapacité totale ou partielle de faire face aux frais liés à l’assistance et à la représentation en justice devant le Tribunal et, d’autre part, que son action n’apparaisse pas manifestement irrecevable ou manifestement non fondée.

13      Aux termes de l’article 95, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement de procédure du Tribunal de première instance, la demande d’aide judiciaire doit être accompagnée de tous renseignements et pièces justificatives permettant d’évaluer la situation économique du demandeur, tel qu’un certificat d’une autorité nationale compétente justifiant cette situation économique.

14      En vertu de l’article 96, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal de première instance, la décision sur la demande d’aide judiciaire est prise par le président par voie d’ordonnance, celle-ci devant être motivée en cas de refus.

15      L’article 96, paragraphe 3, troisième alinéa, du règlement de procédure du Tribunal de première instance dispose que l’ordonnance accordant l’aide judiciaire peut déterminer un montant qui sera versé à l’avocat chargé de représenter l’intéressé ou fixer un plafond que les débours et honoraires de l’avocat ne pourront, en principe, pas dépasser. Elle peut prévoir une contribution de l’intéressé aux frais visés à l’article 94, paragraphe 1, du même règlement en tenant compte de sa situation économique.

16      Il découle tant de l’économie que du libellé des articles 94 et 95 du règlement de procédure du Tribunal de première instance que le bénéfice de l’aide judiciaire doit en principe être réservé à la prise en charge des frais d’instance exposés soit concomitamment, soit postérieurement à l’introduction de la demande d’aide. Sauf circonstances particulières, il ne serait, en effet, ni conforme à la lettre et à l’esprit de ces dispositions, ni dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, que des frais exposés avant cette date puissent être rétroactivement pris en charge par l’aide judiciaire. S’agissant de tels frais, il doit être présumé, jusqu’à preuve du contraire, que le demandeur ne s’est pas trouvé dans l’impossibilité d’y faire face et qu’il ne satisfait pas, dès lors, à l’une des conditions d’octroi de l’aide judiciaire (ordonnances du Tribunal de première instance du 3 avril 2006, Hassan/Conseil et Commission, T‑49/04 AJ, non publiée au Recueil, point 21, et du 27 octobre 2006, Othman/Conseil et Commission, T‑318/01 AJ, non publiée au Recueil, point 31).

17      En l’espèce, il y a lieu de constater que la partie demanderesse a introduit sa demande d’aide judiciaire après que la procédure écrite eut été clôturée au mois de juillet 2006 et qu’elle-même eut perdu son emploi d’agent contractuel au sein de la Commission, le 30 avril 2006.

18      La partie demanderesse ne justifie pas avoir été dans l’impossibilité de faire face aux frais de la présente instance pendant la période antérieure à l’introduction de sa demande d’aide judiciaire.

19      Au vu des considérations qui précèdent et compte tenu, d’une part, des revenus que perçoit la partie demanderesse depuis le 31 janvier 2007 et, d’autre part, de l’état de précarité qui reste le sien en dépit de son recrutement par la Commission, il y a lieu de l’admettre au bénéfice de l’aide judiciaire mais dans la limite des frais exposés par elle à compter de la date d’introduction de sa demande d’aide judiciaire, sur la base de pièces justificatives et dans la limite de 2 000 euros.

Par ces motifs,

LE PRÉSIDENT DE LA DEUXIÈME CHAMBRE DU TRIBUNAL

ordonne :

1)      N est admis au bénéfice de l’aide judiciaire.

2)      Un montant correspondant aux frais exposés par N à compter de la date d’introduction de la demande d’aide judiciaire sera versé à l’avocat chargé d’assister l’intéressé, sur pièces justificatives et dans la limite de 2 000 euros.

3)      Me I. Kletzlen est désigné comme avocat pour représenter N.

Fait à Luxembourg, le 24 mai 2007.

Le greffier

 

       Le président

W. Hakenberg

 

       S. Van Raepenbusch


* Langue de procédure : le français.