Language of document : ECLI:EU:T:2013:201

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

19 avril 2013 (*)

« Marque communautaire – Demande de marque communautaire tridimensionnelle – Forme d’une bouteille avec un motif en relief – Motif absolu de refus – Absence de caractère distinctif – Article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 – Absence de déclaration sur l’étendue de la protection – Article 37, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009 – Violation des droits de la défense – Article 75, seconde phrase, du règlement n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑347/10,

Adelholzener Alpenquellen GmbH, établie à Siegsdorf (Allemagne), représentée par Mes O. Rauscher et C. Onken, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté initialement M. S. Schäffner, puis par M. A. Schifko, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 9 juin 2010 (affaire R 1516/2009-1), concernant une demande d’enregistrement d’un signe tridimensionnel constitué par la forme d’une bouteille avec un motif en relief comme marque communautaire,

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de MM. J. Azizi, président, S. Frimodt Nielsen et E. Buttigieg (rapporteur), juges,

greffier : Mme C. Heeren, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 27 août 2010,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 11 novembre 2010,

à la suite de l’audience du 11 janvier 2013,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 18 juin 2009, la requérante, Adelholzener Alpenquellen GmbH, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe tridimensionnel reproduit ci-après :


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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 32 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Bières ; eaux minérales et gazeuses et autres boissons non alcooliques ; boissons de fruits et jus de fruits ; sirops et autres préparations pour faire des boissons ».

4        Par décision du 5 novembre 2009, l’examinateur a rejeté la demande d’enregistrement de la marque pour tous les produits au motif que la marque demandée était dépourvue de caractère distinctif, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 (ci‑après la « décision de l’examinateur »).

5        Le 10 décembre 2009, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI contre cette décision, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009.

6        Par décision du 9 juin 2010 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours de la requérante. En substance, elle a considéré que tant les exemples cités dans la décision de l’examinateur que l’expérience généralement acquise de la commercialisation des bouteilles de boissons prouvaient que la marque demandée, dans son ensemble, n’était pas suffisamment éloignée des configurations usuelles dans le secteur en cause, ni par la forme de base de la bouteille, ni par sa surface, sur laquelle étaient tracées des lignes en zigzag, en relief, représentant une chaîne de montagnes, de sorte que le public pertinent n’y verrait pas une référence à l’origine commerciale. Par conséquent, elle a conclu que la marque demandée était dépourvue de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [devenu article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009].

 Conclusions des parties

7        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

8        L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

9        À l’appui de son recours, la requérante invoque trois moyens. Le premier moyen est tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. Les deuxième et troisième moyens sont tirés d’une violation, respectivement, de l’article 37, paragraphe 2, et de l’article 75 du règlement n° 207/2009.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009

10      La requérante conteste, en substance, l’absence de caractère distinctif de la marque dont elle demande l’enregistrement.

11      L’OHMI conteste l’argumentation de la requérante.

12      Conformément à l’article 4 du règlement n° 207/2009, la forme d’un produit ou de son conditionnement est susceptible de constituer une marque communautaire, à condition que celle-ci soit propre à distinguer les produits d’une entreprise de ceux d’autres entreprises.

13      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif sont refusées à l’enregistrement.

14      Ainsi, les signes visés par l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 207/2009 sont réputés incapables d’exercer la fonction essentielle de la marque, à savoir celle d’identifier l’origine du produit, afin de permettre ainsi au consommateur qui acquiert le produit que la marque désigne de faire, lors d’une acquisition ultérieure, le même choix si l’expérience s’avère positive ou de faire un autre choix si elle s’avère négative [arrêts du Tribunal du 27 février 2002, Rewe Zentral/OHMI (LITE), T-79/00, Rec. p. II-705, point 26, et du 20 novembre 2002, Bosch/OHMI (Kit Pro et Kit Super Pro), T-79/01 et T-86/01, Rec. p. II‑4881, point 19].

15      Il ressort d’une jurisprudence bien établie que le caractère distinctif d’une marque, au sens de cette disposition, permet d’identifier le produit pour lequel l’enregistrement est demandé comme provenant d’une entreprise déterminée et donc de distinguer ce produit de ceux d’autres entreprises (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 20 octobre 2011, Freixenet/OHMI, C‑344/10 P et C-345/10 P, non encore publié au Recueil, point 42, et la jurisprudence citée).

16      Ce caractère distinctif doit être apprécié, d’une part, par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement est demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent, qui est constitué par le consommateur de ces produits ou services (voir arrêt Freixenet/OHMI, point 15 supra, point 43, et la jurisprudence citée).

17      En l’espèce, il n’est pas contesté que les produits désignés par la marque demandée, à savoir les bières, les eaux minérales et gazeuses, les jus de fruits et les sirops, sont des produits de consommation courante qui s’adressent aux consommateurs finaux. Il est par ailleurs constant entre les parties que le public pertinent est le consommateur moyen de l’Union européenne dont le niveau d’attention est faible.

18      Selon une jurisprudence également bien établie, les critères d’appréciation du caractère distinctif d’une marque tridimensionnelle constituée par l’apparence du produit lui-même ne sont pas différents de ceux applicables aux autres catégories de marques (voir arrêt Freixenet/OHMI, point 15 supra, point 45, et la jurisprudence citée).

19      Cependant, il convient de tenir compte, dans le cadre de l’application de ces critères, du fait que la perception du consommateur moyen n’est pas nécessairement la même dans le cas d’une marque tridimensionnelle, constituée par l’apparence du produit lui-même, que dans le cas d’une marque verbale ou figurative, qui consiste en un signe indépendant de l’apparence des produits qu’elle désigne. En effet, les consommateurs moyens n’ont pas pour habitude de présumer l’origine des produits en se fondant sur leur forme ou sur celle de leur emballage, en l’absence de tout élément graphique ou textuel, et il pourrait donc s’avérer plus difficile d’établir le caractère distinctif d’une telle marque tridimensionnelle par rapport à celui d’une marque verbale ou figurative (voir arrêt Freixenet/OHMI, point 15 supra, point 46, et la jurisprudence citée).

20      Plus particulièrement, le conditionnement d’un produit liquide étant un impératif de commercialisation, le consommateur moyen lui attribue avant tout une simple fonction de conditionnement. Une marque tridimensionnelle constituée d’un tel conditionnement n’est distinctive que si elle permet au consommateur moyen d’un tel produit, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, sans procéder à une analyse ou à une comparaison et sans faire preuve d’une attention particulière, de distinguer le produit concerné de ceux des autres entreprises [ arrêt de la Cour du 12 février 2004, Henkel, C‑218/01, Rec. p. I‑1725, point 53, et arrêt du Tribunal du 29 avril 2004, Eurocermex/OHMI (Forme d’une bouteille de bière), T-399/02, Rec. p. II-1391, point 24, confirmé sur pourvoi par arrêt de la Cour du 30 juin 2005, Eurocermex/OHMI, C‑286/04 P, Rec. p. I‑5797].

21      Dans ces conditions, seule une marque qui, de manière significative, diverge de la norme ou des habitudes du secteur et, de ce fait, est susceptible de remplir sa fonction essentielle d’origine n’est pas dépourvue de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 (voir arrêt Freixenet/OHMI, point 15 supra, point 47, et la jurisprudence citée).

22      Partant, il convient de vérifier si la marque demandée diverge de manière significative de la norme ou des habitudes du secteur concerné.

23      Il ressort du point 16 de la décision attaquée que la marque demandée est un signe tridimensionnel, qui consiste en un récipient allongé, au cul arrondi et au goulot cerclé d’un motif (en relief). Le corps du récipient est entouré de plusieurs cannelures.

24      À titre liminaire, il convient de constater que, lors du dépôt de la demande d’enregistrement, la requérante n’a pas remis une description de la marque demandée, comme cela est rappelé au point 2 de la décision attaquée. Il convient également de relever qu’aucune déclaration visant à obtenir, au sens de l’article 37, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, la protection privée et exclusive de l’aspect spécifique de la surface de la bouteille n’a été annexée à la demande (voir point 19 de la décision attaquée). La requérante n’ayant pas précisé la portée exacte de la protection demandée, elle ne saurait faire grief à la chambre de recours d’avoir étendu l’examen du caractère distinctif de la marque demandée à l’ensemble de la bouteille, dès lors que cette marque ne consiste pas exclusivement en la représentation d’une chaîne de montagnes. C’est donc à juste titre que la chambre de recours a considéré que le signe tridimensionnel pour lequel la demande d’enregistrement avait été déposée était un signe complexe consistant en un conditionnement de boissons composé de trois éléments, à savoir une forme de base, une surface cannelée et un goulot cerclé d’un motif en relief.

25      Partant, il convient, aux fins de l’appréciation du caractère distinctif du signe tridimensionnel en cause, de le considérer dans son ensemble. Toutefois, cela n’est pas incompatible avec l’examen successif des différents éléments qui le composent [arrêt Eurocermex/OHMI, point 20 supra, points 22 et 23, et arrêt du Tribunal du 5 mars 2003, Unilever/OHMI (Tablette ovoïde), T‑194/01, Rec. p. II‑383, point 54].

26      Tout d’abord, en ce qui concerne la forme tridimensionnelle de la marque demandée, la chambre de recours a exposé à bon droit, aux points 27 et 28 de la décision attaquée, que la forme de la bouteille constituait la « forme géométrique de base qui est habituellement utilisée pour les bouteilles de ce type » et que l’encoche présente dans la base de la bouteille était également une caractéristique usuelle des bouteilles de boissons, qui tient à la fabrication de ces produits. À cet égard, la chambre de recours a produit plusieurs images de bouteilles confirmant cette constatation.

27      Ensuite, s’agissant de la surface de la bouteille, la chambre de recours a relevé à juste titre, au point 32 de la décision attaquée, qu’il était un fait notoire que « de nombreux fabricants de boissons apposent différents types de reproductions, lignes ou cannelures (en relief) sur leurs bouteilles ». Les illustrations, qui n’apparaissaient pas dans la décision de l’examinateur, mais qui figurent toutefois dans la décision attaquée, corroborent cette constatation (voir point 31 de la décision attaquée). Par ailleurs, le seul fait que d’autres entreprises du secteur des boissons optent fréquemment pour des bouteilles à la surface cannelée suffit à démontrer que cet élément est communément utilisé, dans le commerce, indépendamment de la question de savoir si les cannelures entourant le corps de la bouteille remplissent ou non une fonction technique [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 17 décembre 2008, Somm/OHMI (Abri ombrageant), T-351/07, non publié au Recueil, point 27, et du 16 septembre 2009, Alber/OHMI (Poignée), T‑391/07, non publié au Recueil, point 60].

28      Enfin, s’agissant du motif figurant en surface sur la partie supérieure de la bouteille, la requérante fait valoir que celui‑ci représente non seulement le relief d’une chaîne de montagnes, mais également le logo de la requérante. Lors de l’audience, celle-ci a réitéré son argument selon lequel la seule présence dudit motif conférait un caractère distinctif à la marque demandée.

29      À cet égard, il convient de rappeler que, lorsqu’une marque tridimensionnelle incorpore un élément figuratif qui ne consiste pas en un signe indépendant de l’aspect des produits, mais ne constitue, dans l’esprit du consommateur, qu’une configuration décorative, la seule présence de cet élément ne saurait suffire, à elle seule, à établir que la marque possède un caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. Il convient toujours de vérifier si une telle marque permet au consommateur moyen du produit concerné, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, de distinguer, sans procéder à une analyse et sans faire preuve d’une attention particulière, ce produit de ceux d’autres entreprises (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 7 octobre 2004, Mag Instrument/OHMI, C‑136/02 P, Rec. p. I-9165, point 32, et du 6 septembre 2012, Storck/OHMI, C-96/11 P, non encore publié au Recueil, point 39).

30      Or, même à supposer qu’il représente, comme le prétend la requérante, une chaîne de montagnes ou un sommet de montagne dans l’esprit du public pertinent, ledit motif en relief ne saurait constituer, à l’instar des cannelures encerclant le corps de la bouteille, une différence significative par rapport à la norme du secteur, au sens de la jurisprudence citée au point 27 ci‑dessus.

31      Ainsi, la marque demandée est constituée par une combinaison d’éléments dont chacun, étant susceptible d’être communément utilisé dans le commerce pour le conditionnement des produits visés dans la demande d’enregistrement, est dépourvu de caractère distinctif par rapport à ces produits (voir, en ce sens et par analogie, arrêt Forme d’une bouteille de bière, point 20 supra, point 30).

32      Il ressort de la jurisprudence que le fait qu’une marque complexe n’est composée que d’éléments dépourvus de caractère distinctif par rapport aux produits concernés permet de conclure que cette marque, considérée dans son ensemble, est également susceptible d’être communément utilisée dans le commerce pour le conditionnement de ces produits. Une telle conclusion ne saurait être infirmée que dans l’hypothèse où des indices concrets, tels que, notamment, la manière dont les différents éléments sont combinés, indiqueraient que la marque complexe, considérée dans son ensemble, représente davantage que la somme des éléments dont elle est composée [arrêts du Tribunal du 3 décembre 2003, Nestlé Waters France/OHMI (Forme d’une bouteille), T‑305/02, Rec. p. II‑5207, point 40, et Forme d’une bouteille de bière, point 20 supra, point 31].

33      En l’espèce, il n’apparaît pas qu’il existe de tels indices. En effet, la marque demandée se caractérise, pour l’essentiel, par la combinaison d’une forme basique de bouteille avec, dans sa partie supérieure, une surface cannelée et un motif en relief composé de lignes en zigzag censées représenter une chaîne de montagnes ou un sommet de montagne. Une telle combinaison d’éléments, qui n’est pas particulièrement originale ou voyante, ne saurait être susceptible de représenter davantage que la somme des éléments dont elle est composée (voir, en ce sens, arrêt Forme d’une bouteille de bière, point 20 supra, point 31). Dès lors, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en estimant que le consommateur moyen de l’Union percevrait la marque demandée, dans son ensemble, uniquement comme la combinaison d’une forme de bouteille normale avec différents éléments décoratifs.

34      Il résulte de tout ce qui précède que la marque demandée, telle qu’elle est perçue par le public pertinent, n’est pas apte à individualiser les produits visés dans la demande de marque et à les distinguer de ceux ayant une autre origine commerciale. C’est donc à juste titre que la chambre de recours a constaté que la marque demandée est dépourvue de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

35      Cette conclusion ne saurait être remise en cause par les arguments avancés par la requérante.

36      S’agissant, d’abord, de l’argument, réitéré lors de l’audience, selon lequel le motif en relief représentant une chaîne de montagnes ou un sommet de montagne serait pleinement visible en situation réelle de marché et permettrait au consommateur de reconnaître, en l’absence de tout élément graphique ou textuel, une origine commerciale dans la forme de la bouteille, il convient de rappeler, comme l’a déduit, à juste titre, la chambre de recours au point 13 de la décision attaquée, que, s’il est vrai que les consommateurs moyens attribuent avant tout une simple fonction de conditionnement aux bouteilles de boissons (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 12 janvier 2006, Deutsche SiSi-Werke/OHMI, C‑173/04 P, Rec. p. I‑551, point 28, et la jurisprudence citée), il ne saurait être exclu qu’ils puissent reconnaître une fonction d’origine dans l’apparence du conditionnement d’un produit lui-même ne comportant ni inscription ni élément verbal (arrêt Freixenet/OHMI, point 15 supra, points 50 et 51).

37      En l’espèce, force est toutefois de constater que la requérante, qui se borne à évoquer des situations particulières dans lesquelles un consommateur serait amené à choisir un produit dont l’étiquette n’est pas visible, n’a pas présenté d’éléments de preuve tangibles tendant à démontrer que le consommateur moyen des produits concernés par la demande d’enregistrement est, en dépit de son faible niveau d’attention (voir point 17 ci-dessus), pleinement apte à percevoir dans le signe tridimensionnel en cause, qui est dépourvu de tout élément textuel, une indication de l’origine du produit.

38      Dès lors, c’est à bon droit que la chambre de recours a conclu, aux points 33 et 34 de la décision attaquée, que, en l’absence d’étiquette ou de nom, « la marque demandée et la surface avec un motif en relief reproduisant une chaîne de montagnes ou un sommet de montagne à elle seule, pour les produits faisant l’objet de la demande compris dans la classe 32, constitu[aient] seulement une bouteille pour différents types de boissons, mais pas une indication de l’origine commerciale ».

39      S’agissant, ensuite, de l’argument, évoqué incidemment dans la requête, selon lequel le logo de la requérante constitue l’objet, voire un élément constitutif, de nombreux enregistrements de marques allemandes, européennes et internationales, qu’il aurait fallu prendre en considération au moment d’apprécier le caractère distinctif de la marque demandée, il suffit de rappeler que le régime communautaire des marques est un système autonome, constitué d’un ensemble de règles et poursuivant des objectifs qui lui sont spécifiques, son application étant indépendante de tout autre système [arrêt du Tribunal du 5 décembre 2000, Messe München/OHMI (electronica), T‑32/00, Rec. p. II‑3829, point 47 ; voir également, en ce sens, arrêt du Tribunal du 21 janvier 2009, giropay/OHMI (GIROPAY), T‑399/06, non publié au Recueil, point 46]. Or, la requérante n’a pas démontré dans quelle mesure la chambre de recours aurait commis une erreur de droit en ne tenant pas compte desdits enregistrements ni de leur impact sur la légalité de l’appréciation contenue dans la décision attaquée.

40      Enfin, l’argument, réitéré par la requérante lors de l’audience, selon lequel le motif en relief et les sillons de la bouteille n’ont pas de fonction technique, telle que celle de faciliter la compression de la bouteille, étant donné le matériau utilisé pour sa fabrication, est inopérant. En effet, lors de l’examen de la demande d’enregistrement du signe tridimensionnel en cause, l’OHMI ne pouvait se fonder que sur cette demande pour analyser le caractère distinctif dudit signe, les aspects relatifs au matériau utilisé pour sa fabrication, qui ne ressortaient pas de la demande, ne pouvant être pris en considération en l’espèce.

41      Partant, c’est à bon droit que la chambre de recours a conclu que les éléments constituant la marque demandée sont dépourvus de caractère distinctif et que, examinée dans son ensemble, la marque demandée ne se distingue pas réellement des formes d’emballage fréquemment utilisées dans le secteur des boissons, mais constitue plutôt une variante de ces formes (voir, en ce sens, arrêt Forme d’une bouteille de bière, point 20 supra, point 33).

42      Il ressort de tout ce qui précède que le premier moyen doit être rejeté.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 37, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009

43      La requérante fait grief à la chambre de recours d’avoir fondé sa décision sur l’absence de déclaration par laquelle elle renoncerait, conformément à l’article 37, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, à la protection de certains éléments de la marque, alors qu’il appartenait à l’OHMI de l’inviter à procéder à une telle déclaration.

44      L’OHMI conteste l’argumentation de la requérante.

45      Aux termes de l’article 37, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, lorsqu’une marque comporte un élément dépourvu de caractère distinctif et que l’inclusion de cet élément peut créer des doutes sur l’étendue de la protection accordée, l’OHMI peut demander comme condition à l’enregistrement de la marque que le demandeur déclare qu’il n’invoquera pas de droit exclusif sur cet élément.

46      En l’espèce, force est de constater que, contrairement à ce que prétend la requérante, la chambre de recours n’a aucunement fondé sa décision sur l’absence de déclaration de renonciation au sens de l’article 37, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009 (voir point 24 ci-dessus). En effet, elle s’est bornée à constater, à titre liminaire et en réponse à un argument soulevé par la requérante dans le cadre de son recours contre la décision de l’examinateur, que « la demande [d’enregistrement de la marque] ne cont[enait] aucune déclaration [conformément à l’article 37, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009], précisant que la [requérante] ne sollicit[ait] pas la protection d’éléments déterminés tels que la forme de la bouteille » (voir point 19 de la décision attaquée).

47      La requérante ne saurait dès lors faire grief à la chambre de recours d’avoir fondé la décision attaquée sur l’absence de déclaration de renonciation, au sens de l’article 37, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009.

48      En tout état de cause, il convient d’observer que l’article 37, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009 reconnaît à l’OHMI une simple faculté de demander une déclaration sur l’étendue de la protection, comme condition à l’enregistrement d’une marque dont au moins un des éléments la composant est distinctif [voir arrêt du Tribunal du 19 novembre 2009, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI (100 et 300), T‑425/07 et T‑426/07, Rec. p. II-4275, point 18]. Or, l’on ne saurait reprocher à l’OHMI de ne pas avoir sollicité une telle déclaration de la part de la requérante dans la mesure où, au vu de la demande d’enregistrement déposée par cette dernière, il n’avait aucune raison de s’interroger sur l’étendue de la protection de la marque demandée (voir point 24 ci‑dessus).

49      Par ailleurs, ainsi que le souligne l’OHMI, dans la mesure où, en l’espèce, c’est l’ensemble de la marque demandée qui est dépourvu de caractère distinctif, et non uniquement une partie de celle-ci, l’article 37, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, dont l’application requiert qu’au moins un des éléments composant la marque demandée soit distinctif, n’aurait pas permis à la requérante d’enregistrer la surface de la bouteille comme « marque de position » [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 20 septembre 2007, Imagination Technologies/OHMI (PURE DIGITAL), T-461/04, non publié au Recueil, point 64, et Poignée, point 27 supra, point 67]. C’est donc à bon droit que la chambre de recours a précisé, au point 35 de la décision attaquée, que, « même si la [requérante] avait fait une déclaration d’exonération pour les [éléments de la bouteille autres que sa surface], le caractère distinctif ferait défaut […] étant donné que, du point de vue du public visé, et pour les motifs [mentionnés dans la décision attaquée], la […] surface ne constitue pas d’indication de l’origine commerciale ».

50      Il ressort de tout ce qui précède que le deuxième moyen doit être rejeté.

 Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’article 75, seconde phrase, du règlement n° 207/2009

51      La requérante fait grief, en substance, à la chambre de recours de l’avoir empêché de prendre position sur la preuve du caractère usuel de la forme de la marque demandée.

52      L’OHMI conteste l’argumentation de la requérante.

53      En vertu de l’article 75, seconde phrase, du règlement n° 207/2009, les décisions de l’OHMI ne peuvent être fondées que sur des motifs sur lesquels les parties ont pu prendre position. Cette disposition porte tant sur les motifs de fait que sur ceux de droit, ainsi que sur les éléments de preuve [arrêt du Tribunal du 4 octobre 2006, Freixenet/OHMI (Forme d’une bouteille émerisée noire mate), T‑188/04, non publié au Recueil, point 28].

54      Par ailleurs, le respect des droits de la défense constitue un principe général du droit de l’Union, en vertu duquel les destinataires des décisions des autorités publiques qui affectent de manière sensible leurs intérêts doivent être mis en mesure de faire connaître utilement leur point de vue (voir arrêt Forme d’une bouteille émerisée noire mate, point 53 supra, point 29, et la jurisprudence citée).

55      Conformément à ce principe, une chambre de recours de l’OHMI ne peut fonder sa décision que sur des éléments de fait ou de droit sur lesquels les parties ont pu présenter leurs observations. Par conséquent, dans le cas où la chambre de recours recueille d’office des éléments de fait destinés à servir de fondement à sa décision, elle doit obligatoirement les communiquer aux parties afin que celles-ci puissent faire connaître leurs observations (arrêt de la Cour du 21 octobre 2004, KWS Saat/OHMI, C-447/02 P, Rec. p. I-10107, points 42 et 43).

56      Si le droit d’être entendu, tel que consacré par l’article 75, seconde phrase, du règlement n° 207/2009, s’étend à tous les éléments de fait ou de droit ainsi qu’aux éléments de preuve qui constituent le fondement de l’acte décisionnel, il ne s’applique pas à la position finale que l’administration entend adopter [voir arrêt du Tribunal du 20 avril 2005, Krüger/OHMI – Calpis (CALPICO), T‑273/02, Rec. p. II‑1271, points 64 et 65, et la jurisprudence citée].

57      En l’espèce, la requérante fait grief à la chambre de recours d’avoir méconnu son droit d’être entendue en ce qu’elle se serait fondée sur des images, ayant trait à des exemples de bouteilles commercialisées sur le marché, qui n’auraient pas été reproduites dans la décision de l’examinateur pour conclure au caractère usuel de la forme de la bouteille.

58      À cet égard, il convient de constater, à l’instar de la requérante, que lesdites images, qui n’apparaissaient pas dans la décision de l’examinateur, mais qui figurent toutefois dans la décision attaquée, ne permettaient pas à la requérante, en raison de leur mauvaise qualité, de distinguer le détail des caractéristiques des bouteilles. En outre, il ressort du dossier que les adresses des sites Internet d’où ces images ont été tirées, qui étaient également jointes à la décision attaquée, ont été communiquées à la requérante de manière incomplète, de sorte qu’elle n’a pas pu accéder aux pages contenant les différents exemples de bouteilles.

59      Or, s’il ne fait pas de doutes que la requérante n’a pu présenter ses observations sur les images mentionnées par l’examinateur, dès lors qu’elles ne figuraient que dans la décision attaquée (voir point 31 de celle‑ci), il convient toutefois de constater que, contrairement aux allégations de la requérante, les motifs retenus dans la décision attaquée pour conclure à l’absence de caractère distinctif de la marque demandée reposent principalement sur les déductions tirées de l’expérience pratique et non sur lesdites images.

60      En effet, la chambre de recours a considéré, aux points 31 et 32 de la décision attaquée, que les exemples de bouteilles mentionnés par l’examinateur n’étaient pas déterminants, puisque, d’une part, « il est connu que les cannelures ont en premier lieu une fonction technique » et que, d’autre part, « le fait que de nombreux fabricants de boissons apposent différents types de reproductions, lignes ou cannelures (en relief) sur leurs bouteilles est connu de manière générale ».

61      Ainsi, ces exemples, corroborant la conclusion selon laquelle la marque demandée est un conditionnement habituel ou largement utilisé dans la commercialisation des produits en cause, ne constituaient pas des éléments factuels déterminants pour l’appréciation de la chambre de recours et ne servaient pas non plus de fondement pour sa conclusion dans la décision attaquée selon laquelle la marque demandée était dépourvue de caractère distinctif.

62      Par ailleurs, ces déductions tirées de l’expérience pratique peuvent être présumées connues de toute personne et notamment de la requérante. Elles appartiennent en effet à la catégorie des faits notoires, dont l’exactitude n’a pas à être établie par l’OHMI [arrêt de la Cour du 22 juin 2006, Storck/OHMI, C-25/05 P, Rec. p. I‑5719, points 50 et 51, et arrêt du Tribunal du 15 mars 2006, Develey/OHMI (Forme d’une bouteille en plastique), T‑129/04, Rec. p. II‑811, point 19].

63      Par conséquent, la requérante était parfaitement en mesure de réfuter la thèse retenue par l’examinateur et entérinée par la chambre de recours, pour établir l’absence de caractère distinctif de la marque demandée.

64      C’est donc à tort que la requérante soutient que la chambre de recours a méconnu l’article 75, seconde phrase, du règlement n° 207/2009 en ne l’invitant pas à présenter ses observations sur des faits notoires qu’elle ne pouvait pas ignorer et qui n’étaient pas déterminants pour la conclusion à laquelle la chambre de recours est parvenue dans la décision attaquée.

65      Il ressort de tout ce qui précède que le troisième moyen doit être rejeté.

66      Partant, le recours doit être rejeté dans son intégralité.

 Sur les dépens

67      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Adelholzener Alpenquellen GmbH est condamnée aux dépens.

Azizi

Frimodt Nielsen

Buttigieg

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 19 avril 2013.

Signatures


* Langue de procédure : l’allemand.