Language of document : ECLI:EU:T:2015:57

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

30 janvier 2015 (*)

« Marque communautaire – Procédure de déchéance – Marque communautaire figurative now – Usage sérieux de la marque – Article 51, paragraphe 1, sous a), et article 51, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑278/13,

Now Wireless Ltd, établie à Guildford (Royaume-Uni), représentée par M. T. Alkin, barrister,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par Mme D. Walicka, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal étant

Starbucks (HK) Ltd, établie à Hong Kong (Chine), représentée par M. P. Kavanagh, solicitor,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’OHMI du 7 mars 2013 (affaire R 234/2012-2), relative à une procédure de déchéance entre Now Wireless Ltd et Starbucks (HK) Ltd,

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de MM. S. Frimodt Nielsen, président, F. Dehousse et A. M. Collins (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 15 mai 2013,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 4 septembre 2013,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 5 septembre 2013,

vu la modification de la composition des chambres du Tribunal,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Le 26 mars 2004, l’intervenante, Starbucks (HK) Ltd, a obtenu auprès de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) l’enregistrement du signe figuratif suivant (ci-après la « marque contestée ») :

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2        Les services visés par l’enregistrement relèvent des classes 35, 41 et 42 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié.

3        Le 1er avril 2010, la requérante, Now Wireless Ltd, a présenté une demande de déchéance de la marque contestée en vertu de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1). Dans cette demande, la requérante soutenait que cette marque n’avait pas fait l’objet d’un usage sérieux dans l’Union européenne pendant une période ininterrompue de cinq ans pour tous les services pour lesquels elle avait été enregistrée.

4        Par décision du 28 novembre 2011, la division d’annulation a déclaré la déchéance de la marque contestée en ce qui concerne les services relevant des classes 35 et 41. En revanche, après limitation intervenue au cours de la procédure devant l’OHMI, elle a maintenu la validité de l’enregistrement de la marque contestée pour les services suivants relevant de la classe 42 (ci-après les « services concernés ») : « Informations en ligne en provenance de bases de données informatiques ou d’internet ; installation et entretien de logiciels ; fourniture d’accès à l’internet ; fourniture de services Internet ; fourniture d’accès à des sites sur un réseau électronique d’informations ; fourniture d’accès à diverses bases de données ; location et crédit-bail de programmes informatiques, terminaux d’ordinateur, modems, périphériques d’ordinateur, tous les autres dispositifs Internet ».

5        Le 30 janvier 2012, la requérante a introduit un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’annulation pour autant que celle-ci avait maintenu l’enregistrement de la marque contestée pour les services concernés.

6        Par décision du 7 mars 2013 (ci-après la « décision attaquée »), la deuxième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours. La marque contestée ayant été enregistrée le 26 mars 2004, la chambre de recours a fait sienne la conclusion de la division d’annulation selon laquelle le « délai de grâce » de cinq ans avait expiré lors de la présentation de la demande en déchéance le 1er avril 2010. En conséquence, la chambre de recours a examiné, dans la décision attaquée, les preuves de l’usage de la marque contestée pour la période allant du 1er avril 2005 au 31 mars 2010 (ci-après la « période pertinente »), ce qui n’a pas été contesté par les parties. En substance, la chambre de recours a considéré que les éléments de preuve fournis par l’intervenante démontraient que la marque contestée avait fait l’objet d’un usage sérieux pendant la période pertinente s’agissant des services concernés.

 Conclusions des parties

7        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        prononcer la déchéance pour non-usage de la marque contestée ;

–        condamner l’intervenante à supporter les dépens encourus par la requérante.

8        L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante à supporter les dépens qu’il a encourus.

9        L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        confirmer la décision attaquée ;

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

10      Comme l’indique la règle n° 2, paragraphe 4, du règlement (CE) n° 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement (CE) n° 40/94 (JO L 303, p. 1), la classification des produits et des services visée par l’arrangement de Nice est effectuée à des fins exclusivement administratives. À cet égard, il convient de relever que, comme il est exposé au point 22 de la décision attaquée, même si certains des services pour lesquels la marque contestée a été enregistrée relèvent de la classe 38 au sens de l’arrangement de Nice dans sa version actuelle, la spécification des services relevant de la classe 42 (à l’exception de ceux dénommés « location et crédit-bail de programmes informatiques, terminaux d’ordinateur, modems ») pour lesquels cette marque a été enregistrée était correcte à la date du dépôt de la demande d’enregistrement. Il y a lieu d’entériner la conclusion figurant au point 23 de la décision attaquée selon laquelle l’impact de ces anomalies de classification est négligeable et cette classification ne constitue pas un facteur essentiel dans le cas d’espèce. En effet, le présent recours porte sur l’usage sérieux de la marque contestée, qui doit être examiné à l’aune de nombreux facteurs énumérés par la jurisprudence (voir point 14 ci-après).

11      Le moyen unique, tiré de la violation de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009 et/ou de l’article 51, paragraphe 2, du même règlement concernant l’usage sérieux de la marque, soulevé par la requérante, se décompose, en substance, en quatre branches. Premièrement, la requérante soutient que l’usage de la marque contestée n’a pas été prouvé pour les services concernés. Deuxièmement et à titre subsidiaire, la requérante invoque une appréciation erronée, par la chambre de recours, de l’utilisation de tels services en ce que cette dernière ne les aurait pas subdivisés de façon précise et circonscrite. Troisièmement et à titre plus subsidiaire, la requérante fait valoir que la chambre de recours a déduit, à tort, un consentement pour un usage de la marque contestée allant au-delà de ce qui avait été accordé par la licence en l’espèce. Quatrièmement et à titre plus subsidiaire encore, la requérante soutient que la chambre de recours a commis des erreurs dans l’appréciation de l’importance de l’usage sérieux, qui devrait être étendu au-delà d’une zone géographique limitée afin d’être suffisant pour constituer un usage dans un État membre ou dans l’Union.

12      Le Tribunal examinera ces quatre branches à la lumière des règles et des principes exposés ci-après.

13      L’article 51 du règlement n° 207/2009 prévoit :

« 1.               Le titulaire de la marque communautaire est déclaré déchu de ses droits, sur demande présentée auprès de [l’OHMI] ou sur demande reconventionnelle dans une action en contrefaçon :

a)      si, pendant une période ininterrompue de cinq ans, la marque n’a pas fait l’objet d’un usage sérieux dans [l’Union] pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée, et qu’il n’existe pas de justes motifs pour le non-usage […]

2.                Si la cause de déchéance n’existe que pour une partie des produits ou des services pour lesquels la marque communautaire est enregistrée, le titulaire n’est déclaré déchu de ses droits que pour les produits ou les services concernés. »

14      Selon la règle 22, paragraphe 3, du règlement n° 2868/95, qui s’applique mutatis mutandis aux procédures de déchéance conformément à la règle 40, paragraphe 5, du même règlement, la preuve de l’usage d’une marque doit porter sur le lieu, la durée, l’importance et la nature de l’usage qui a été fait de la marque [arrêts du 8 juillet 2004, Sunrider/OHMI – Espadafor Caba (VITAFRUIT), T‑203/02, Rec, EU:T:2004:225, point 37, et du 10 septembre 2008, Boston Scientific/OHMI – Terumo (CAPIO), T‑325/06, EU:T:2008:338, point 27].

15      Afin d’examiner le caractère sérieux de l’usage d’une marque antérieure, il convient de procéder à une appréciation globale en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce. Cette appréciation implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte. Ainsi, un faible volume de produits commercialisés sous ladite marque peut être compensé par une forte intensité ou une grande constance dans le temps de l’usage de cette marque et inversement [arrêts VITAFRUIT, point 14 supra, EU:T:2004:225, point 42, et du 8 juillet 2004, MFE Marienfelde/OHMI – Vétoquinol (HIPOVITON), T‑334/01, Rec, EU:T:2004:223, point 36].

16      L’usage sérieux d’une marque ne peut pas être démontré par des probabilités ou des présomptions, mais doit reposer sur des éléments concrets et objectifs qui prouvent une utilisation effective et suffisante de la marque sur le marché concerné [arrêts du 12 décembre 2002, Kabushiki Kaisha Fernandes/OHMI – Harrison (HIWATT), T‑39/01, Rec, EU:T:2002:316, point 47, et du 6 octobre 2004, Vitakraft-Werke Wührmann/OHMI – Krafft (VITAKRAFT), T‑356/02, Rec, EU:T:2004:292, point 28].

 Sur l’usage de la marque contestée pour les services concernés

17      Par les première et deuxième branches du moyen unique qui portent sur l’usage de la marque contestée revendiqué pour les services concernés, et que le Tribunal estime opportun d’examiner ensemble, la requérante soutient, en substance, qu’il n’existe pas de preuve que la marque contestée a effectivement été utilisée en tant que marque pour chacun des services pour lesquels elle a été maintenue. Selon elle, il est raisonnable d’opérer des subdivisons reflétant effectivement les preuves de l’usage invoqué. La chambre de recours se serait livrée, à tort, à des considérations relatives aux « services sans fil à haut débit ». En considérant que tous les services concernés relevaient des services sans fil à haut débit, la chambre de recours aurait appliqué un critère erroné pour l’appréciation de l’usage sérieux de la marque contestée.

18      L’OHMI et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

19      À cet égard, pour répondre à la question de savoir si une marque a fait l’objet d’un usage sérieux, il est de jurisprudence constante qu’il ne peut être exclu qu’un faisceau d’éléments de preuve permette d’établir les faits à démontrer, alors même que chacun de ces éléments, pris isolément, serait impuissant à rapporter la preuve de l’exactitude de ces faits [voir, en ce sens, arrêts du 17 avril 2008, Ferrero Deutschland/OHMI, C‑108/07 P, EU:C:2008:234, points 36 et 37, du 19 avril 2013, Luna/OHMI – Asteris (Al bustan) T‑454/11, EU:T:2013:206, point 36, et du 30 septembre 2014, Scooters India/OHMI – Brandconcern (LAMBRETTA), T‑132/12, EU:T:2014:843, point 25]. Par ailleurs, il convient de rappeler que, selon l’article 42, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, l’analyse de l’usage sérieux d’une marque antérieure communautaire doit être effectuée pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée.

20      S’agissant, en premier lieu, de l’usage de la marque contestée pour les services concernés, l’intervenante a soumis, au cours de la procédure devant l’OHMI, de nombreuses preuves. Ces preuves comprennent notamment des images des modems et des clés 3G sur lesquels la marque contestée a été apposée, des listes de ces équipements fournis aux clients, des extraits de bases de données détaillant les visites des techniciens de l’entreprise auprès des clients, y compris pour la fourniture ou le retrait des modems, des extraits de pages Internet détaillant les services d’accès aux réseaux électroniques fournis sous la marque contestée, des articles de presse et des campagnes publicitaires. Il ressort, en particulier, de l’accord de service et des conditions pour le client, ainsi que des pages Internet, que UK Broadband Ltd, société qui appartient au même groupe que l’intervenante, a fourni des services d’accès aux réseaux électroniques (non limité à l’internet), des services de location d’équipement et de logiciels « passerelles » et des informations pour ses clients sous la marque contestée pendant la période pertinente. Ces pièces concluantes, prises dans leur ensemble, démontrent l’usage de la marque contestée, au moins dans une partie de l’Union.

21      Certes, il convient de relever que l’appréciation de l’usage sérieux doit être fondée sur les services tels que spécifiés dans la demande d’enregistrement et non sur un éventuel concept de commercialisation. C’est donc à tort que la chambre de recours a conclu, au point 33 de la décision attaquée, que « tous ces services feraient partie du bouquet de services connus sous le nom de ‘haut débit sans fil’ ». En effet, il apparaît que la marque contestée a été enregistrée pour les services concernés et ne vise pas en tant que tels les « services sans fil à haut débit ». Néanmoins, les éléments du faisceau de preuves analysés par la chambre de recours et énumérés au point 20 ci-dessus établissent l’utilisation de la marque contestée pour l’ensemble des services concernés.

22      La première branche du moyen soulevé par la requérante doit donc être rejetée comme non fondé.

23      S’agissant, en second lieu, des arguments de la requérante selon lesquels la protection accordée à la marque contestée pour les services concernés devrait s’appliquer à une catégorie de services plus étroite, à savoir les services à haut débit du titulaire de la marque contestée ou les services Internet spécifiques, il convient de rappeler la jurisprudence suivante.

24      Si une marque a été enregistrée pour une catégorie de produits ou de services suffisamment large pour que puissent être distinguées, en son sein, plusieurs sous-catégories susceptibles d’être envisagées de manière autonome, la preuve de l’usage sérieux de la marque pour une partie de ces produits ou services n’emporte protection que pour la ou les sous-catégories dont relèvent les produits ou services pour lesquels la marque a été effectivement utilisée [voir, en ce sens, arrêts du 14 juillet 2005, Reckitt Benckiser (España)/OHMI – Aladin (ALADIN), T‑126/03, Rec, EU:T:2005:288, point 45, et du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, Rec, EU:T:2007:46, point 23].

25      Cependant, si la notion d’usage partiel a pour fonction de ne pas rendre indisponibles des marques dont il n’a pas été fait usage pour une catégorie de produits donnée, elle ne doit pas avoir pour effet de priver le titulaire de ladite marque de toute protection pour des produits qui, sans être rigoureusement identiques à ceux pour lesquels il a pu prouver un usage sérieux, ne sont pas essentiellement différents de ceux-ci et relèvent d’un même groupe qui ne peut être divisé autrement que de façon arbitraire. Il convient à cet égard d’observer qu’il est en pratique impossible au titulaire d’une marque d’apporter la preuve de l’usage de celle-ci pour toutes les variantes imaginables des produits concernés par l’enregistrement. Par conséquent, la notion de « partie des produits ou services » ne peut s’entendre de toutes les déclinaisons commerciales de produits ou de services analogues, mais seulement de produits ou de services suffisamment différenciés pour pouvoir constituer des catégories ou des sous-catégories cohérentes (arrêt ALADIN, point 24 supra, EU:T:2005:288, point 46).

26      Ces principes impliquent qu’il n’y a pas lieu, en l’espèce, de définir une sous-catégorie de services telle qu’avancée par la requérante. Il ressort, en effet, des descriptions des services figurant notamment sur les pages tirées du site Internet et de l’accord de service qui y est afférant, contenus dans les éléments de preuve présentés devant l’OHMI, qu’il s’agit de services d’accès aux réseaux électroniques et de location d’équipement et de logiciels requis à ces fins. Dans la mesure où la requérante reproche à la chambre de recours de ne pas avoir analysé l’usage sérieux de la marque contestée pour chaque sous-catégorie pour laquelle cette marque est enregistrée, il convient de constater qu’il ressort des points 33 et 34 de la décision attaquée que la chambre de recours a pris en considération la finalité et la destination de chacun de ces services avant de conclure qu’il ne serait pas raisonnable d’opérer une division significative en leur sein.

27      Or, il convient d’observer que, dans la mesure où le consommateur recherche avant tout un produit ou un service qui pourra répondre à ses besoins spécifiques, la finalité ou la destination du produit ou du service en cause revêt un caractère essentiel dans l’orientation de son choix. Dès lors, dans la mesure où il est appliqué par les consommateurs préalablement à tout achat, le critère de finalité ou de destination est un critère primordial dans la définition d’une sous-catégorie de produits ou de services (arrêt RESPICUR, point 24 supra, EU:T:2007:46, point 29). C’est à tort que la requérante se fonde sur toutes les variantes possibles pour les services en cause, telles que la fourniture des informations en ligne par matière, pour justifier leur scission en sous-catégories alors qu’un tel critère n’est pas au nombre des critères jurisprudentiels permettant de constituer des sous-catégories cohérentes.

28      En l’espèce, les consommateurs recherchent les services d’accès aux réseaux électroniques en tant que « paquet » et non en tant que services individuels. À l’instar de ce qui a été relevé par la chambre de recours au point 31 de la décision attaquée, il convient de noter que les fournisseurs d’accès aux réseaux informatiques installent des équipements tels que des routeurs, des modems et des logiciels pilotes, afin de permettre un tel accès et proposent également des services d’assistance, de renseignements ou de conseils pour aider les clients à installer les équipements ou pour résoudre des problèmes techniques. En l’espèce, l’attestation sous serment de M. T., directeur d’opérations de UK Broadband, produite devant l’OHMI, indique que les services fournis par cette société sous la marque contestée pendant la période pertinente incluaient, d’une part, l’installation de modems, de clés 3G et de logiciels connexes par des techniciens afin de permettre l’accès de leurs clients aux réseaux électroniques sécurisés, à l’internet et aux réseaux privés virtuels et, d’autre part, les visites de rappel afin de résoudre les problèmes rencontrés par les clients avec ces modems et ces logiciels. En effet, les services concernés répondent tous au même besoin. Par exemple, l’accès à l’internet et les services Internet ne peuvent pas être fournis sans un modem ou un dispositif similaire. Force est de constater que le destinataire de chacun des services concernés est le seul et même consommateur qui souhaite accéder aux réseaux électroniques et qui dépend de l’ensemble desdits services à ces fins. Il serait donc arbitraire de diviser les services concernés \/ en sous-catégories.

29      S’agissant de l’argument de la requérante tiré du « principe de la description correcte », tel qu’appliqué par l’Office de propriété intellectuelle du Royaume-Uni, il y a lieu de relever qu’il ne saurait, en tant que tel, être pertinent aux fins de l’appréciation de la présente affaire. En effet, le régime communautaire des marques est un système autonome, constitué d’un ensemble de règles et poursuivant des objectifs qui lui sont spécifiques, son application étant indépendante de tout système national. Dès lors, l’OHMI et, le cas échéant, le juge de l’Union ne sont pas liés par les décisions intervenues au niveau des États membres, qui ne constituent qu’un élément qui, sans être déterminant, peut seulement être pris en considération aux fins de l’enregistrement d’une marque communautaire [voir arrêt du 27 février 2002, Streamserve/OHMI (STREAMSERVE), T‑106/00, Rec, EU:T:2002:43, point 47 et jurisprudence citée]. Au demeurant, il ressort de l’extrait de la décision O/262/06 dans l’affaire NIRVANA rendue par l’Office de propriété intellectuelle du Royaume-Uni et figurant à l’annexe A 4 de la requête que le conseiller-auditeur a considéré que « l’approche adoptée par les tribunaux britanniques […] [était] globalement cohérente avec celle adoptée par le Tribunal dans l’affaire [ALADIN, point 24 supra, EU:T:2005:288] ».

30      En conséquence, la deuxième branche du moyen soulevé par la requérante doit être rejetée.

 Sur l’usage avec le consentement du titulaire

31      La requérante soutient, en substance, que la chambre de recours a erronément présumé le consentement de l’usage de la marque contestée pour l’ensemble des services concernés, contrairement au consentement exprès indiqué dans le contrat entre l’intervenante et son licencié qui limite l’usage de cette marque à des services sans fil à haut débit.

32      L’OHMI et l’intervenante contestent l’argumentation de la requérante.

33      Aux termes de l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, l’usage de la marque communautaire avec le consentement du titulaire est considéré comme fait par le titulaire.

34      Il s’ensuit que c’est au titulaire de la marque qu’il incombe d’apporter la preuve qu’il a consenti à l’usage de cette marque par un tiers (arrêt du 11 mai 2006, Sunrider/OHMI, C‑416/04 P, Rec, EU:C:2006:310, point 44).

35      Il convient de relever que, compte tenu de l’importance de son effet d’extinction du droit exclusif du titulaire d’une marque communautaire d’utiliser cette marque, le consentement doit être exprimé d’une manière qui traduise de façon certaine une volonté de renoncer à ce droit. Une telle volonté résulte normalement d’une formulation expresse du consentement. Toutefois, il ne saurait être exclu que, dans certains cas, elle puisse résulter d’une manière implicite de circonstances et d’éléments antérieurs, concomitants ou postérieurs à l’usage de la marque en cause par un tiers, qui traduisent également, de façon certaine, une renonciation du titulaire à son droit [voir arrêt du 13 janvier 2011, Park/OHMI – Bae (PINE TREE), T‑28/09, EU:T:2011:7, point 61 et jurisprudence citée].

36      En outre, il y a lieu de rappeler que, lorsque le titulaire d’une marque communautaire fait valoir des actes d’usage de cette marque par un tiers en tant qu’usage sérieux, au sens de l’article 15 du règlement n° 207/2009, il prétend, implicitement, que cet usage a été effectué avec son consentement (voir, par analogie, arrêt VITAFRUIT, point 14 supra, EU:T:2004:225, point 24).

37      En l’espèce, il n’est pas contesté que l’intervenante est le titulaire de la marque contestée, qui est utilisée en liaison avec les services proposés par UK Broadband. À cet égard, il convient de relever qu’il incombe à l’intervenante, titulaire de la marque contestée, d’apporter la preuve de son consentement à l’usage de cette marque pour l’ensemble des services concernés par UK Broadband.

38      S’agissant de l’allégation de l’intervenante selon laquelle elle a consenti à l’ensemble des utilisations de la marque contestée par UK Broadband, il convient de noter que l’usage de la marque par une société économiquement liée au titulaire de la marque est présumé être un usage de ladite marque fait avec le consentement du titulaire et est donc à considérer comme fait par le titulaire, conformément à l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009 [arrêt du 17 février 2011, J & F Participações/OHMI – Plusfood Wrexham (Friboi), T‑324/09, EU:T:2011:47, point 32]. Or, dans son attestation sous serment, M. S., conseiller juridique principal du groupe PCCW Ltd, la société mère de ultime d’UK Broadband, confirme que l’intervenante et UK Broadband sont des filiales de la même société mère et que UK Broadband utilise la marque contestée avec le consentement de l’intervenante. En outre, ainsi que l’a constaté à juste titre la chambre de recours au point 38 de la décision attaquée, la preuve de l’usage de la marque contestée en l’espèce provient d’UK Broadband.

39      Certes, ainsi que le prétend la requérante, il ressort de l’accord de licence conclu par l’intervenante et conférant à UK Broadband le droit d’utiliser la marque contestée, que l’usage est permis dans le cadre de son « activité », à savoir la fourniture de services sans fil à haut débit. Néanmoins, le point 3.A prévoit également que le licencié peut utiliser cette marque « pour la prestation de tous les services appropriés et activités connexes à l’exercice de son activité ». C’est donc à tort que la requérante prétend que le consentement expressément accordé concernait les services sans fil à haut débit et que ce consentement exprès excluait expressément tout autre consentement.

40      Il découle des considérations qui précèdent que l’accord de licence ne limitait pas l’usage par le licencié de la marque contestée uniquement à des services sans fil à haut débit. Ainsi qu’il ressort des points 20 et 21 ci-dessus, l’usage de la marque contestée par le licencié de la requérante a été démontré pour l’ensemble des services concernés. Devant les instances de l’OHMI, ainsi que devant le Tribunal, l’intervenante s’est appuyée sur les actes d’usage de la marque contestée par son licencié au soutien de la preuve de son usage sérieux. Ces éléments constituaient une base suffisamment solide pour permettre d’en déduire que l’usage de la marque contestée avait été effectué avec le consentement de son titulaire.

41      Il s’ensuit que la troisième branche du moyen unique doit être rejetée comme non fondée.

 Sur l’importance de l’usage

42      La requérante affirme que les éléments de preuve présentés par le titulaire de la marque contestée ne démontrent pas l’importance de cet usage. Selon la requérante, les preuves produites par le titulaire de la marque ne prouvent que l’usage pour des services de haut débit sans fil dans des zones pilotes situées à Londres et au sud de Londres. Il n’existerait pas d’autres preuves d’usage dans ces zones géographiques en ce qui concerne les informations, les services Internet, les réseaux électroniques d’information ou les bases de données relevant de la classe 42.

43      L’OHMI et l’intervenante contestent l’argumentation de la requérante.

44      Selon la jurisprudence, une marque fait l’objet d’un usage sérieux lorsqu’elle est utilisée, conformément à sa fonction essentielle qui est de garantir l’identité d’origine des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée, aux fins de créer ou de conserver un débouché pour ces produits et services, à l’exclusion d’usages de caractère symbolique ayant pour seul objet le maintien des droits conférés par la marque. De plus, la condition relative à l’usage sérieux de la marque exige que celle-ci, telle qu’elle est protégée dans le territoire pertinent, soit utilisée publiquement et vers l’extérieur [voir arrêt du 15 septembre 2011, centrotherm Clean Solutions/OHMI – Centrotherm Systemtechnik (CENTROTHERM), T‑427/09, Rec, EU:T:2011:480, point 25 et jurisprudence citée].

45      Bien que la notion d’usage sérieux s’oppose donc à tout usage minimal et insuffisant pour considérer qu’une marque est réellement et effectivement utilisée sur un marché déterminé, il n’en reste pas moins que l’exigence d’un usage sérieux ne vise ni à évaluer la réussite commerciale ni à contrôler la stratégie économique d’une entreprise ou encore à réserver la protection des marques à leurs seules exploitations commerciales quantitativement importantes (voir arrêt CENTROTHERM, point 44 supra, EU:T:2011:480, point 26 et jurisprudence citée).

46      Par ailleurs, il résulte de la jurisprudence que, pour apprécier l’existence d’un « usage sérieux dans [l’Union] », au sens de l’article 15, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009, il convient de faire abstraction des frontières du territoire des États membres (arrêt du 19 décembre 2012, Leno Merken, C‑149/11, Rec, EU:C:2012:816, point 44).

47      Dès lors que l’appréciation du caractère sérieux de l’usage de la marque repose sur l’ensemble des faits et des circonstances propres à démontrer que l’exploitation commerciale de cette marque permet de créer ou de conserver les parts de marché pour les produits ou les services pour lesquels elle a été enregistrée, il est impossible de déterminer, de façon abstraite, quelle étendue territoriale devrait être retenue pour déterminer si l’usage de ladite marque a ou non un caractère sérieux. Une règle de minimis, qui ne permettrait pas au juge de l’Union d’apprécier l’ensemble des circonstances du litige qui lui est soumis, ne peut donc être fixée (voir arrêt Leno Merken, point 46 supra, EU:C:2012:816, point 55 et jurisprudence citée).

48      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’apprécier si c’est à juste titre que la chambre de recours a estimé que les éléments de preuve apportés par l’intervenante démontraient un usage sérieux de la marque antérieure pour les services concernés.

49      Au point 46 de la décision attaquée, la chambre de recours a estimé que, au regard des preuves apportées, dont les coupures de presse et la liste des destinations des techniciens de maintenance, l’intervenante avait prouvé l’usage sérieux de la marque contestée dans la vallée de la Tamise pendant la période pertinente. Au point 47 de la décision attaquée, elle a considéré qu’il y avait lieu d’attribuer une importance suffisante à l’usage de cette marque à Londres, la première ville du Royaume-Uni et la plus grande zone urbaine de l’Union. Eu égard, en particulier, aux preuves relatives à une campagne publicitaire réalisée sur une station nationale de radio en 2005, elle a conclu, aux points 48 et 49 de la décision attaquée, que l’usage de la marque contestée dans la zone géographique comprenant Londres et la vallée de la Tamise était suffisant pour constituer un usage sérieux dans l’Union.

50      En premier lieu, il convient de constater que la requérante ne conteste pas la durée de l’usage de la marque contestée. En ce qu’elle prétend que cet usage ne s’étend pas à tous les services concernés, elle répète, en substance, les arguments déjà écartés dans le cadre de l’examen des première et deuxième branches du moyen unique.

51      En deuxième lieu, il convient de constater que la chambre de recours a réalisé une appréciation globale des éléments versés au dossier, en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce et en se fondant sur l’ensemble des faits et des circonstances propres à établir la réalité de l’exploitation commerciale.

52      En effet, la chambre de recours a examiné la liste, fournie par l’intervenante, de milliers de clients ayant reçu des équipements dans le cadre de leur accord de service. L’extrait de la base de données de l’entreprise détaillant les visites de techniciens de celle-ci, mentionné au point 43 de la décision attaquée, indique, à titre d’exemple, qu’en 2007 un technicien d’UK Broadband a rendu une visite technique à un utilisateur établi à Reading dans le comté de Berkshire (Royaume-Uni). Le résumé des visites de techniciens et le retrait ou la livraison de modems pour une semaine en mars 2009, également mentionné au point 43 de la décision attaquée, montre que ces visites ont eu lieu à l’ouest de Londres et dans la vallée de la Tamise. Par ailleurs, la chambre de recours a examiné des centaines de programmes de techniciens datés d’août 2006 à janvier 2010, qui, selon l’attestation sous serment de M. T., concernaient l’équipe de support sur le terrain. La chambre de recours a également tenu compte des extraits de pages Internet montrant la nature des services fournis sous la marque contestée, ainsi que des coupures de presse relatives à cette marque publiées sur le territoire pertinent. En effet, ces extraits sont tirés des publications diffusées à Londres (dont Ealing et Islington), à Maidenhead (Royaume-Uni), à Reading et à Slough (Royaume-Uni). Enfin, la chambre de recours a tenu compte des campagnes publicitaires présentées par l’intervenante, dont une diffusée sur une radio nationale, ainsi que des promotions intervenues à Reading. Dans ces circonstances, ces éléments permettaient à la chambre de recours de conclure à une certaine importance de l’usage de la marque contestée, l’exigence d’un tel usage ne visant pas, par ailleurs, à évaluer la réussite commerciale de l’entreprise en cause (voir la jurisprudence citée au point 45 ci-dessus).

53      Dès lors, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré, conformément à la jurisprudence citée au point 47 ci-dessus, au vu de l’ensemble des faits et des circonstances propres à établir la réalité de l’exploitation commerciale de la marque contestée, que celle-ci avait fait l’objet d’un usage sérieux dans la ville de Londres et la vallée de la Tamise.

54      Les arguments présentés par la requérante ne sauraient remettre en cause cette conclusion.

55      Premièrement, l’argument de la requérante selon lequel les preuves ne démontrent aucun usage en dehors de la zone de Middlesex dans la vallée de la Tamise manque en fait. Ainsi qu’il ressort des preuves énumérées au point 52 ci-dessus, l’usage sérieux de la marque contestée a également été démontré dans le comté de Berkshire.

56      Deuxièmement, l’argument de la requérante selon lequel l’usage effectif invoqué ne couvrait même pas Londres dans son intégralité ne saurait prospérer. Ainsi qu’il ressort des preuves relatives aux campagnes publicitaires, elles comportaient, d’une part, une campagne sur une radio nationale et, d’autre part, une campagne de presse dans la publication Metro, laquelle est distribuée sur tout le territoire de Londres.

57      Troisièmement, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel revendiquer des services tels que des informations en ligne en provenance de base de données informatiques ou d’internet supposerait l’existence d’un large éventail d’utilisateurs dispersés dans une large zone géographique, il n’est étayé par aucun élément de preuve. En tout état de cause, il convient de rappeler que l’exigence d’un usage sérieux ne vise pas à évaluer la réussite commerciale de l’entreprise en cause (voir la jurisprudence citée au point 45 ci-dessus) et que, au vu des considérations qui précèdent, c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu à un tel usage en l’espèce.

58      Il s’ensuit que la quatrième branche du moyen unique doit être rejetée comme étant non fondée.

59      Partant, aucun des griefs soulevés par la requérante au soutien de ses conclusions en annulation et en réformation n’étant fondé, il y a lieu de rejeter le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

60      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens s’il est conclu en ce sens.

61      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Now Wireless Ltd est condamnée aux dépens.

Frimodt Nielsen

Dehousse

Collins

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 30 janvier 2015.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.