Language of document : ECLI:EU:C:2008:167

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

Mme JULIANE Kokott

présentées le 13 mars 2008 (1)

Affaire C‑454/06

pressetext Nachrichtenagentur GmbH

contre

République d’Autriche

APA-OTS Originaltext-Service GmbH

APA AUSTRIA PRESSE AGENTUR registrierte

Genossenschaft mit beschränkter Haftung

[Demande de décision préjudicielle formée par le Bundesvergabeamt (Autriche)]

«Marchés publics de services – Agences de presse – Notion de ‘passation de marché’ – Modification du contrat – Procédure négociée sans publication préalable d’un avis de marché – Droit d’exclusivité – Preuve de l’aptitude du prestataire de services à fournir la prestation – ‘Essential facilities’ – Protection juridique effective – Directives 92/50/CEE et 89/665/CEE»





I –    Introduction

1.        Dans la présente affaire, le Bundesvergabeamt autrichien soumet à la Cour une série de questions extrêmement volumineuses sur l’interprétation de différentes dispositions du droit communautaire en matière de marchés publics. Il s’agit essentiellement de savoir comment il convient d’interpréter la notion de «passation de marché», au sens du droit des marchés publics. Il convient notamment de déterminer à quelles conditions la modification d’un contrat existant doit être considérée comme une nouvelle passation d’un marché public de services avec pour conséquence qu’il y a lieu, le cas échéant, au préalable de mettre en œuvre une procédure de passation de marché et que les entreprises non retenues bénéficient d’une protection juridictionnelle.

2.        Cette demande trouve son origine dans un litige acharné autour de la fourniture aux autorités fédérales autrichiennes de services d’agence de presse dans lequel la pressetext Nach richtenagentur, un fournisseur relativement nouveau sur le marché autrichien, conteste par la voie judiciaire les relations contractuelles qui existent traditionnellement entre la République d’Autriche et la Austria Presse Agentur, implantée de longue date, et qui ont fait l’objet de modifications en 2000, 2001 et 2005.

II – Le cadre juridique

A –    Le droit communautaire

3.        Le cadre juridique communautaire de cette affaire est défini par deux directives du domaine du droit des marchés publics, à savoir

–        la directive 92/50/CEE du Conseil, du 18 juin 1992, portant coordination des procédures de passation des marchés publics de services (2) (ci-après «la directive 92/50»), et

–        la directive 89/665/CEE du Conseil, du 21 décembre 1989, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives relatives à l’application des procédures de recours en matière de passation des marchés publics de fournitures et de travaux (3), telle que modifiée par la directive 92/50 (ci-après «la directive 89/665») (4).

1.      Les dispositions pertinentes de la directive 92/50

4.        Parmi les dispositions générales figurant au titre I de la directive 92/50, l’article 1er, sous f), contient la définition suivante:

«[Aux fins de la présente directive,] les ‘procédures négociées’ sont les procédures nationales dans lesquelles les pouvoirs adjudicateurs consultent les prestataires de services de leur choix et négocient les conditions du marché avec un ou plusieurs d’entre eux».

5.        L’article 3 de la directive 92/50, lequel figure également au titre I, est libellé comme suit:

«1. Pour passer leurs marchés publics de services ou pour organiser un concours, les pouvoirs adjudicateurs appliquent des procédures adaptées aux dispositions de la présente directive.

2. Les pouvoirs adjudicateurs veillent à ce qu’il n’y ait pas de discrimination entre les différents prestataires de services.

[…]».

6.        Au titre II de la directive 92/50, sous l’intitulé «Application à deux niveaux», figurent les articles 8 à 10 qui sont rédigés comme suit:

«Article 8

Les marchés qui ont pour objet des services figurant à l’annexe I A sont passés conformément aux dispositions des titres III à VI.

Article 9

Les marchés qui ont pour objet des services figurant à l’annexe I B sont passés conformément aux articles 14 et 16.

Article 10

Les marchés qui ont pour objet à la fois des services figurant à l’annexe I A et des services figurant à l’annexe I B sont passés conformément aux dispositions des titres III à VI lorsque la valeur des services figurant à l’annexe I A dépasse celle des services figurant à l’annexe I B. Dans les autres cas, le marché est passé conformément aux articles 14 et 16.»

7.        Le titre III de la directive 92/50 est intitulé «Choix des procédures de passation et règles applicables aux concours». Y figure l’article 11, paragraphe 3, qui prévoit la disposition suivante:

«Les pouvoirs adjudicateurs peuvent passer leurs marchés publics de services en recourant à une procédure négociée sans publication préalable d’un avis de marché dans les cas suivants:

[…]

b)       pour les services dont l’exécution, pour des raisons techniques, artistiques ou tenant à la protection de droits d’exclusivité, ne peut être confiée qu’à un prestataire déterminé;

[…]»

8.        L’article 31, paragraphe 3, de la directive 92/50 qui fait partie du titre VI dispose:

«Si, pour une raison justifiée, le prestataire de services n’est pas en mesure de produire les références demandées par le pouvoir adjudicateur, il est autorisé à prouver sa capacité économique et financière par tout autre document considéré comme approprié par le pouvoir adjudicateur».

2.      Dispositions pertinentes de la directive 89/665

9.        Il est prévu ce qui suit à l’article 1er de la directive 89/665:

«1. Les États membres prennent, en ce qui concerne les procédures de passation des marchés publics relevant du champ d’application des directives 71/305/CEE, 77/62/CEE, et 92/50/CE, les mesures nécessaires pour assurer que les décisions prises par les pouvoirs adjudicateurs peuvent faire l’objet de recours efficaces et, en particulier, aussi rapides que possible, dans les conditions énoncées aux articles suivants, et notamment à l’article 2 paragraphe 7, au motif que ces décisions ont violé le droit communautaire en matière de marchés publics ou les règles nationales transposant ce droit.

2. Les États membres veillent à ce qu’il n’y ait, entre les entreprises susceptibles de faire valoir un préjudice dans le cadre d’une procédure d’attribution de marché, aucune discrimination du fait de la distinction opérée par la présente directive entre les règles nationales transposant le droit communautaire et les autres règles nationales.

3. Les États membres assurent que les procédures de recours sont accessibles, selon des modalités que les États membres peuvent déterminer, au moins à toute personne ayant ou ayant eu un intérêt à obtenir un marché public de fournitures ou de travaux déterminé et ayant été ou risquant d’être lésée par une violation alléguée. En particulier, ils peuvent exiger que la personne qui souhaite utiliser une telle procédure ait préalablement informé le pouvoir adjudicateur de la violation alléguée et de son intention d’introduire un recours.»

10.      L’article 2 de la directive 89/665 dispose:

«1. Les États membres veillent à ce que les mesures prises aux fins des recours visés à l’article 1er prévoient les pouvoirs permettant:

[…]

b)       d’annuler ou de faire annuler les décisions illégales, y compris de supprimer les spécifications techniques, économiques ou financières discriminatoires figurant dans les documents de l’appel à la concurrence, dans les cahiers des charges ou dans tout autre document se rapportant à la procédure de passation du marché en cause;

c)       d’accorder des dommages-intérêts aux personnes lésées par une violation.

2. Les pouvoirs visés au paragraphe 1 peuvent être conférés à des instances distinctes responsables d’aspects différents des procédures de recours.

[…]

5. Les États membres peuvent prévoir que, lorsque des dommages et intérêts sont réclamés au motif que la décision a été prise illégalement, la décision contestée doit d’abord être annulée par une instance ayant la compétence nécessaire à cet effet.

[…]»

 B –   Le droit national

11.      Au sein du droit autrichien, il convient de mettre en exergue l’article 331 de la loi fédérale sur la passation des marchés publics [Bundesvergabegesetz] dans sa rédaction entrée en vigueur le 1er février 2006 (5) (ci-après le «BVergG 2006»), lequel constitue le fondement juridique de la procédure de constatation devant le Bundesvergabeamt et qui est libellé comme suit:

«(1) Un entrepreneur qui avait un intérêt à obtenir la conclusion d’un marché relevant du champ d’application de la présente loi fédérale peut, dans la mesure où la violation du droit invoquée lui a causé un préjudice, demander qu’il soit constaté que:

1.       le choix de l’attribution directe ou de la procédure d’attribution non précédée d’un avis préalable est illégal du fait d’une infraction à la présente loi fédérale ou à ses règlements d’application, ou

[…]

4.      une adjudication intervenue directement au profit d’un entrepreneur sans association d’autres entrepreneurs à la procédure est manifestement illégale au regard des dispositions de la présente loi fédérale.

[…] »

12.      En vertu de l’article 332, paragraphes 2 et 3, du BVergG 2006, le droit visé à l’article 331 d’obtenir une constatation s’éteint au plus tard six mois après l’attribution du marché.

13.      Il résulte de l’article 132, paragraphe 3, du BVergG 2006 que, une demande formée en vertu de l’article 331, paragraphe 1, point 4, du BVergG 2006 et ayant prospéré, aboutit, au moment où la constatation a force de chose jugée, à la nullité du contrat.

14.      Il convient d’opérer une distinction entre la procédure de constatation et l’action en dommages-intérêts, laquelle ne relève pas de la compétence du Bundesvergabeamt mais de celle des juridictions civiles autrichiennes. En vertu de l’article 341, paragraphe 2, du BVergG 2006, une action en dommages-intérêts n’est recevable que lorsqu’une procédure de constatation a été, au préalable, conduite avec succès.

III – Les faits et le litige au principal

15.      La présente affaire trouve son origine dans des circonstances de fait qui, en s’appuyant sur les indications figurant dans l’ordonnance de renvoi, peuvent être résumées comme suit.

A –    Les agences de presse parties à la procédure

16.      L’APA a été constituée en Autriche, sous la forme d’une coopérative (6), après la Seconde Guerre mondiale (7), la quasi-totalité des quotidiens autrichiens ainsi que la radio-télévision autrichienne, à savoir l’ORF, étant membres de cette coopérative. Ensemble avec les sociétés faisant partie du groupe, l’APA est le leader du marché autrichien des agences de presse et fournit traditionnellement à la République d’Autriche différentes prestations d’agence de presse.

17.      La pressetext Nachrichtenagentur GmbH (ci-après la «PN») est présente sur le marché autrichien des agences de presse depuis 1999, mais n’a, jusqu’ici, établi que dans une mesure très mineure des communiqués de presse pour les autorités fédérales. La PN a également moins de collaborateurs journalistes que l’APA et elle ne dispose pas d’archives aussi importantes que celles de l’APA. En 2004, la PN a proposé à la République d’Autriche des services d’agence de presse, mais cette offre n’a pas abouti à la conclusion d’un contrat.

B –    Les relations contractuelles litigieuses entre l’APA et la République d’Autriche

18.      En 2004, donc antérieurement à son adhésion à l’Union européenne, la République d’Autriche a conclu avec l’APA un «contrat de base» qui prévoyait la fourniture à titre onéreux de certains services (8). Ce contrat de base permettait en substance aux autorités fédérales autrichiennes de consulter des informations actuelles et de les utiliser (ci-après le «service de base»), de consulter à partir d’une base de données, dénommée «APADok» des informations et communiqués de presse historiques et d’utiliser, tant à titre informatif qu’en vue d’une diffusion de leurs propres communiqués de presse, le service de textes originaux «OTS» de l’APA. La base de données APADok contient les données du service de base depuis le 1er janvier 1988 et celles des communiqués OTS depuis le 1er juin 1989.

19.      Le contrat de base a été conclu pour une durée indéterminée tout en stipulant une renonciation à résiliation aux termes de laquelle il n’aurait été possible de mettre fin au contrat qu’au plus tôt le 31 décembre 1999. Le contrat de base contenait également des stipulations relatives à la date de la première augmentation des prix, au montant maximum de chaque augmentation et à l’indexation des prix sur la base de l’indice des prix à la consommation pour 1986, la valeur de référence étant l’indice calculé pour l’année 1994.

20.      En septembre 2000, l’APA a constitué l’APA-OTS Originaltext-Service GmbH (ci-après l’«APA-OTS»), une filiale qu’elle détient à 100 %. Il existe entre les deux sociétés un accord de transfert des pertes et bénéfices dont il résulte, selon l’APA et l’APA-OTS, que cette dernière est financièrement, administrativement et économiquement intégrée à l’APA et qu’elle doit conduire et gérer ses affaires selon les instructions données par l’APA. L’APA-OTS est en outre tenue de transférer ses bénéfices annuels à l’APA laquelle de son côté est, en contrepartie tenue d’apurer, le cas échéant, les pertes annuelles de l’APA-OTS.

21.      L’APA a transféré à l’APA-OTS ses activités de service de textes originaux OTS. La République d’Autriche a été informée de cette modification en octobre 2000, un collaborateur de l’APA habilité à représenter celle-ci ayant assuré, sur sa demande, la Chancellerie fédérale de ce que, à la suite de ce transfert d’activité, l’APA était responsable «solidairement» avec l’APA-OTS et que la «prestation globale existante» resterait inchangée. Selon ses propres dires, la Chancellerie fédérale a alors donné son accord pour que les services OTS soient à l’avenir fournis par l’APA-OTS et les rémunérations pour ces services ont dès lors été réglées directement entre les mains de l’APA-OTS.

22.      En 2001, les stipulations du contrat de base de 1994 relatives à la rémunération ont été modifiées par un premier avenant. Outre la conversion de la rémunération des schillings autrichiens en euros, cet avenant fixait, en ce qui concerne la saisie dans la base OTS des communiqués émanant des autorités fédérales en 2002, 2003 et 2004, un plafond des rémunérations (9) lesquelles ne pouvaient pas être augmentées. En outre, la clause d’indexation a été adaptée par référence à un nouvel indice qui constitue un indice subséquent à celui utilisé dans le contrat de base.

23.      En octobre 2005, un deuxième avenant prenant effet au 1er janvier 2006 a conduit à deux autres modifications du contrat de base dans sa rédaction résultant du premier avenant: le rabais consenti en cas d’interrogation en ligne des services d’information de l’APA est passé de 15 % à 25 % et les parties ont convenu de reconduire la clause de renonciation à résiliation jusqu’au 31 décembre 2008.

C –    La procédure devant le Bundesvergabeamt (procédure de constatation)

24.      La PN sollicite devant le Bundesvergabeamt une protection juridictionnelle contre les procédés, à ses yeux contraires au droit des marchés publics, liés à l’entrée en jeu de l’APA-OTS en tant que prestataire de services de la République d’Autriche et aux deux avenants au contrat de base conclu entre l’APA et la République d’Autriche.

25.      Par ces demandes présentées les 4 et 19 juillet 2006, la PN demande au Bundesvergabeamt de constater, conformément à l’article 331 du BVergG 2006, que la division du marché à la suite de la restructuration de l’APA en 2000 et les deux avenants de 2001 et 2005 au contrat de base qu’elle qualifie d’«adjudications de fait» sont illégaux. À titre subsidiaire, elle demande qu’il soit constaté que le choix des procédures de passation de marchés en cause a été illégal (10).

26.      Concernant les délais de recours, le Bundesvergabeamt précise que, si les opérations contestées datent des années 2000, 2001 et 2005, la voie de recours disponible en droit interne contre des attributions de marchés illégales, à savoir une demande de constatation avec effet résolutoire du contrat, n’a cependant été créée que plus tard avec effet à compter du 1er février 2006. Le délai prévu pour ce recours est de six mois à compter de l’adjudication illégale. Toutefois, le Bundesvergabeamt estime approprié d’appliquer l’article 1496 du code civil autrichien (Allgemeines Bürgerliches Gesetzbuch) en vertu duquel les délais de prescription ne peuvent pas courir tant que la justice ne fonctionne pas de manière effective, à condition qu’une telle application soit conforme au droit communautaire.

IV – La demande de décision préjudicielle et la procédure devant la Cour

27.      Par décision du 7 novembre 2006, rédigée le 10 novembre 2006 et déposée au greffe le 13 novembre 2006, le Bundesvergabeamt a sursis à statuer et saisi la Cour des questions préjudicielles suivantes:

«1)      Le terme ‘passer’ (passation de marché) employé à l’article 3, paragraphe 1, de la directive 92/50/CEE et aux articles 8 et 9 de la même directive doit-il se comprendre comme recouvrant aussi l’hypothèse dans laquelle un pouvoir adjudicateur consent pour l’avenir à accepter les services d’un prestataire constitué sous la forme d’une société de capitaux, alors que les services étaient auparavant fournis par un autre prestataire, qui représente l’actionnaire unique du prestataire qui lui succède et contrôle en même temps celui-ci en lui donnant des instructions? Dans un tel cas de figure, le fait que le pouvoir adjudicateur n’ait pas de garantie que les parts constituant le capital du prestataire successeur ne seront pas cédées à des tiers pendant la durée totale du marché d’origine a-t-il des conséquences juridiques? De même, quelles conséquences juridiques s’attachent à l’absence de garantie pour le pouvoir adjudicateur que la composition des actionnaires du prestataire initial, organisé sous forme de coopérative, ne changera pas pendant l’entière durée du contrat?

2)      Y a-t-il aussi passation au sens de l’article 3, paragraphe 1, de la directive 92/50/CEE et des articles 8 et 9 de la même directive dans le cas où un pouvoir adjudicateur convient avec les prestataires de services, pendant la durée de validité d’un marché conclu avec eux à durée indéterminée pour la fourniture d’une prestation commune, de la rémunération de certaines prestations et reformule une clause d’indexation, alors que ces modifications aboutissent à modifier les prix et interviennent à l’occasion de l’introduction de l’euro?

3)      Y a-t-il aussi passation au sens de l’article 3, paragraphe 1, de la directive 92/50/CEE et des articles 8 et 9 de la même directive dans le cas où un pouvoir adjudicateur convient avec les prestataires de services, pendant la durée de validité d’un marché conclu avec eux à durée indéterminée pour la fourniture d’une prestation commune, au moyen d’un avenant, de reconduire pour trois ans une clause de renonciation à résiliation devenue caduque à la date de l’avenant, alors que cette modification du contrat entraîne l’octroi de rabais plus importants qu’auparavant sur certains prix déterminés en fonction des quantités dans un domaine particulier?

4)      Pour le cas où il y aurait passation d’un marché, c’est-à-dire réponse affirmative à l’une des trois questions précédentes, l’article 11, paragraphe 3, sous b), de la directive 92/50/CEE ou d’autres dispositions du droit communautaire telles, par exemple, que le principe de transparence, doivent-ils se comprendre comme autorisant le pouvoir adjudicateur à attribuer des prestations dans le cadre d’un marché de services unique par la voie de la procédure négociée sans publication préalable d’un avis de marché lorsqu’une partie des prestations de service comprend des droits d’exclusivité du type mentionné à l’article 11, paragraphe 3, sous b), de la directive 92/50/CEE? Ou bien le principe de transparence ou d’autres dispositions du droit communautaire imposent-ils, en cas de passation d’un marché portant essentiellement sur des prestations non réservées, que l’on procède quand même à la publication d’un avis de marché avant d’attribuer le marché, pour permettre aux entreprises intéressées de vérifier si véritablement des prestations soumises à un droit d’exclusivité sont attribuées? Ou alors les dispositions du droit communautaire en matière d’attribution de marchés publics exigent-elles, dans un tel cas, que les prestations soient attribuées dans le cadre de procédures d’attribution distinctes, selon qu’elles font ou non l’objet d’un droit d’exclusivité, afin de permettre au moins une mise en concours partielle?

5)      S’il y a lieu de répondre à la quatrième question qu’un pouvoir adjudicateur est en droit d’attribuer les prestations n’impliquant pas de droits d’exclusivité conjointement avec celles qui impliquent de tels droits dans le cadre d’un marché unique, une entreprise peut-elle, si elle ne dispose pas d’habilitation propre à disposer des informations qui font l’objet d’un droit d’exclusivité appartenant à un opérateur principal sur le marché, justifier son aptitude à fournir la prestation complète au pouvoir adjudicateur au sens du droit des marchés publics, en invoquant l’obligation qui pèse sur l’opérateur principal dans un État membre, en vertu de l’article 82 CE, de lui transmettre les informations à des conditions équitables?

6)      S’il est répondu aux première, deuxième et troisième questions que la reprise partielle du contrat en 2000 et/ou l’un des deux avenants précités, ou les deux, ont donné lieu à la passation de nouveaux marchés; et pour le cas, en outre, où il serait répondu à la quatrième question que le pouvoir adjudicateur aurait dû attribuer les prestations n’impliquant pas de droit d’exclusivité dans le cadre d’une attribution séparée, ou ne pouvait pas attribuer le marché de services global (communiqués de presse, service de base et droits d’utilisation de APAdok) sans publier au préalable un avis de marché pour assurer la transparence et permettre la vérification des marchés envisagés:

Le terme ‘lésé’ figurant à l’article 1er, paragraphe 3, de la directive 89/665/CEE et à l’article 2, paragraphe 1, sous c), de la même directive doit-il se comprendre comme signifiant qu’un entrepreneur est lésé au sens de ces dispositions, dans un cas tel que celui-ci, lorsqu’il a été privé de la possibilité de prendre part à une procédure d’attribution de marché parce que le pouvoir adjudicateur n’a pas publié au préalable un avis sur la base duquel il aurait pu présenter sa candidature ou faire une offre, ou demander que les instances de contrôle compétentes vérifient l’exactitude de l’affirmation concernant les prétendus droits d’exclusivité?

7)       Le principe communautaire d’équivalence et le principe communautaire de la nécessité d’une protection juridique effective impliquent-ils, sans préjudice d’autres dispositions du droit communautaire, qu’un entrepreneur peut faire valoir un droit subjectif et inconditionnel à l’encontre d’un État membre, lui permettant d’introduire auprès des instances nationales compétentes ses recours en réparation en raison d’une violation du droit communautaire des marchés publics, après l’adjudication et pendant au moins six mois à compter de la date à laquelle il a pu avoir connaissance de la passation de marché irrégulière, avec l’octroi des délais supplémentaires dans lesquels une action correspondante n’a pas été possible faute de base juridique en droit national, si les actions en réparation fondées sur le non-respect du droit en droit interne se prescrivent en général par trois ans à compter de l’identification de l’auteur du dommage et du préjudice, et si, à défaut de remède juridique dans un domaine donné, les délais de prescription ne jouent pas?»

28.      Dans la procédure devant la Cour, la PN, l’APA et l’APA-OTS, la République d’Autriche et la Commission des Communautés européennes ont présenté des observations écrites et orales. Par ailleurs, le Présidium de la Chancellerie fédérale autrichienne, en sa qualité de pouvoir adjudicateur, et le gouvernement lituanien sont intervenus à la procédure par la voie écrite. Le gouvernement français a présenté des observations orales lors de l’audience.

V –    Sur la recevabilité de la demande de décision préjudicielle

29.      Avant de se pencher sur le fond sur les questions préjudicielles, il apparaît nécessaire de présenter quelques brèves remarques préliminaires sur la recevabilité de la demande de décision préjudicielle.

A –    Sur le droit du Bundesvergabeamt de poser une question à titre préjudiciel

30.      Le Bundesvergabeamt est un organisme permanent institué par la loi dont la compétence est obligatoire dans les affaires en matière de droit des marchés publics impliquant le Bund en tant que pouvoir adjudicateur (11). Il statue dans le cadre d’une procédure contentieuse en faisant application de règles de droit édictées par le droit fédéral autrichien. Il est à la fois juridiction de première et de dernière instance (12). Ses membres ne sont liés par aucune instruction dans l’exercice des fonctions qui leur sont confiées et sont nommés pour une durée minimale de cinq ans, et en partie même pour une durée indéterminée (13).

31.      Le Bundesvergabeamt est donc bien une juridiction, au sens de l’article 234 CE (14), et il est en droit d’adresser à la Cour des demandes de décision préjudicielle. La Cour a donc déjà, à plusieurs reprises (15), répondu à des demandes du Bundesvergabeamt (16).

B –    Sur la recevabilité en général de la demande de décision préjudicielle

32.      Les critiques formulées par l’APA et l’APA-OTS à l’encontre de la formulation complexe et difficile à comprendre de la demande de décision préjudicielle ne change rien au fait que, dans l’ensemble, les questions posées à titre préjudiciel restent compréhensibles. Il résulte de manière suffisamment précise des explications fournies par le Bundesvergabeamt dans l’ordonnance de renvoi dans quel contexte factuel et juridique s’inscrivent les questions et pour quels motifs le Bundesvergabeamt les considère comme déterminantes pour la solution du litige au principal.

33.      Il ressort notamment de l’ordonnance de renvoi que cette demande de décision préjudicielle vise à déterminer s’il est nécessaire, dans le cadre d’une procédure nationale, de procéder de manière extensive à des mesures d’instruction en ce qui concerne certains éléments de fait ou si le litige au principal est en état d’être jugé même en l’absence de telles mesures d’instruction.

34.      À cet égard, il convient d’observer qu’il appartient à la juridiction nationale de décider à quel stade de la procédure il y a lieu, pour cette juridiction, de poser une question préjudicielle à la Cour (17). Ce qui importe est que la juridiction de renvoi ait défini à suffisance de droit le cadre tant factuel que juridique dans lequel elle formule sa demande d’interprétation du droit communautaire et qu’elle ait fourni à la Cour toutes les informations nécessaires pour mettre celle-ci en mesure de répondre utilement à ladite demande (18). Contrairement à ce que considèrent l’APA et l’APA-OTS, tel est bien le cas dans la présente affaire. En conséquence, rien ne s’oppose à la recevabilité de la demande de décision préjudicielle en général.

C –    Sur la recevabilité de la sixième question en particulier

35.      Un problème particulier de recevabilité se pose toutefois au regard de la sixième question qui porte sur l’interprétation des notions de «dommage» ou d’«être lésé» figurant aux articles 1er, paragraphe 3, et 2, paragraphe 1, sous c), de la directive 89/665.

36.      Dans le litige au principal, une procédure sur le fondement de l’article 331 du BVergG 2006, le Bundesvergabeamt n’a compétence que pour constater une éventuelle violation du droit des marchés publics et non pas également pour accorder des dommages-intérêts, ce qui reste réservé à la compétence des juridictions civiles autrichiennes (19). Il ne saurait donc être recevable à poser à la Cour des questions préjudicielles ayant trait à l’octroi même ou aux conditions d’octroi de dommages-intérêts (20).

37.      Dans ces conditions, la sixième question préjudicielle n’est recevable que dans la mesure où elle porte sur les conditions de recevabilité de la procédure de recours visée à l’article 1er, paragraphe 3, de la directive 89/665. Par contre, dans la mesure où elle porte sur l’article 2, paragraphe 1, sous c), de la directive 89/665, la sixième question préjudicielle est irrecevable car cette dernière disposition a directement trait à l’octroi de dommages-intérêts.

D –    Conclusion intermédiaire

38.      En conséquence, dans l’ensemble, la présente demande de décision préjudicielle est recevable, à l’exception de la partie de la sixième question qui porte sur l’article 2, paragraphe 1, sous c), de la directive 89/665.

VI – Appréciation sur le fond des questions préjudicielles

39.      Sur le fond, la présente demande de décision préjudicielle particulièrement volumineuse vise en substance à déterminer à quelles conditions la modification d’un contrat existant peut être considérée comme une passation de marché public de services avec pour conséquence qu’il y a lieu, le cas échéant, au préalable de mettre en œuvre une procédure de passation de marché et que les entreprises non retenues bénéficient d’une protection juridictionnelle.

40.      La question supplémentaire, certes hautement intéressante, de savoir si le droit des marchés publics ou d’autres règles du droit communautaire posent de quelconques limites à la conclusion d’un contrat à durée indéterminée ne fait pas l’objet de la présente affaire. Dans la mesure où le contrat de base de 1994 a été conclu pour une durée indéterminée antérieurement à l’adhésion de la République d’Autriche à l’Union européenne (21), il n’y a pas lieu de se pencher sur ce problème, même en tant que question préalable (22).

A –    Sur les première, deuxième et troisième questions

41.      Par ses trois premières questions, le Bundesvergabeamt souhaite savoir dans quelles conditions des modifications apportées à des relations contractuelles existant entre un pouvoir adjudicateur et un prestataire de services peuvent être considérées comme une nouvelle passation d’un marché public de services, au sens de la directive 92/50.

42.      La jurisprudence des juridictions communautaires ne s’est jusqu’alors pas penchée de manière exhaustive sur ce problème (23).

1.      Remarque préliminaire: le critère de la modification substantielle d’un contrat

43.      En particulier en ce qui concerne les contrats à durée indéterminée ou les contrats de longue durée, il peut devenir, au cours de leur exécution, nécessaire d’adapter le contenu du contrat lorsque les stipulations contractuelles s’avèrent ne plus être appropriées – par exemple du fait d’un changement non prévu des circonstances extérieures. Une adaptation du contenu du contrat aux circonstances modifiées peut contribuer à une meilleure mise en œuvre de l’objectif du contrat.

44.      Toutefois, lorsque le contrat initial a pour objet un marché public, des modifications ultérieures de son contenu soulèvent toujours aussi la question de savoir s’il y a lieu (le cas échéant à nouveau) de mettre en œuvre une procédure de passation de marché. Dans un tel cas, cela donnera lieu en règle générale à un conflit entre, d’une part, la recherche de la continuation la plus efficace possible de l’exécution du contrat et, d’autre part, l’obligation de garantir l’égalité des chances pour tous les actuels et potentiels soumissionnaires.

45.      Il n’est en principe a priori pas exclu que des modifications ultérieures apportées au contenu de contrats existants puissent (le cas échéant à nouveau) remplir les conditions de la passation d’un marché avec pour conséquence qu’elles doivent faire l’objet d’une procédure de passation de marché. En effet, en vertu de la jurisprudence constante, les notions qui définissent le champ d’application des directives en matière de marchés publics doivent être largement interprétées (24).

46.      Toutefois, l’interprétation de la notion de passation de marché public doit en fin de compte s’appuyer sur les objectifs poursuivis par la directive concernée. La coordination des procédures de passation des marchés publics de services vise à supprimer les entraves à la libre prestation des services et à protéger les intérêts des opérateurs économiques établis dans les autres États membres (25). Il s’agit d’exclure le risque que le pouvoir adjudicateur donne la préférence aux soumissionnaires ou candidats nationaux et se laisse guider lors de la passation de marchés publics par des considérations autres qu’économiques (26).

47.      En conséquence, l’objectif principal poursuivi par la directive 92/50 est également la libre circulation des services et l’ouverture à la concurrence non faussée et la plus large possible des marchés (27). Cela nécessite de procéder, lors de la passation de marchés publics, de manière transparente et non discriminatoire afin de garantir l’égalité des chances de tous les prestataires de services potentiels.

48.      Au regard de cet objectif, toutes les modifications, même les plus insignifiantes, apportées à des contrats portant sur des marchés publics de services ne nécessitent pas une procédure préalable de passation de marché. Seules les modifications substantielles du contrat qui sont concrètement de nature à fausser la concurrence sur le marché en cause et à favoriser le cocontractant du pouvoir adjudicateur par rapport à d’autres prestataires de services potentiels justifient de mettre en œuvre une nouvelle procédure de passation de marché (28).

49.      Il convient en particulier de retenir l’existence d’une modification substantielle du contrat lorsqu’il ne peut être exclu que d’autres prestataires de services ont été empêchés de présenter une soumission au marché public du fait des conditions initiales moins intéressantes ou que, eu égard aux nouvelles conditions contractuelles, ils seraient désormais intéressés à soumissionner ou encore que la soumission d’un candidat en son temps écarté pourrait être couronnée de succès, eu égard aux nouvelles conditions contractuelles (29).

50.      Ces considérations préliminaires constituent le fondement sur lequel repose notre discussion qui suit sur les trois premières questions.

2.      Sur la première question

a)      Sur la première partie de la première question: entrée en jeu de l’APA-OTS

51.      Par la première partie de sa première question, le Bundesvergabeamt cherche en substance à savoir s’il convient de considérer comme une nouvelle passation d’un marché public de services existant, au sens de la directive 92/50, le fait qu’un pouvoir adjudicateur accepte que l’exécution d’une partie de ce marché soit transférée à une filiale de l’adjudicataire sur laquelle ce dernier a un pouvoir de direction et qu’il détient à 100 %, même s’il n’est pas garanti qu’il continuera à détenir à 100 % cette filiale pendant toute la durée du contrat.

52.      Cette question s’inscrit dans le contexte du transfert des activités des services OTS effectué par APA en 2000 au profit de sa filiale APA-OTS. Peu importe qu’à la suite de cette restructuration au sein du groupe APA cela ait abouti à un «éclatement du contrat», une reprise du contrat, une novation ou une délégation imparfaite (30). Toujours est-il que, à partir de ce moment, la prestation en cause a été fournie directement par APA-OTS, avec le consentement de la Chancellerie fédérale, et que la rémunération de cette prestation a été directement réglée entre les mains de l’APA-OTS.

53.      En tout état de cause, cela a abouti en 2000, dans le cadre de l’exécution concrète du contrat, à un changement partiel du prestataire de services.

54.      A priori, un changement du prestataire de services au cours de la durée d’un marché public laisse présumer une modification substantielle du contrat, dès lors qu’une entreprise qui n’a pas eu à se soumettre à une mise en concurrence avec d’autres soumissionnaires et dont le choix ne repose pas sur une comparaison avec d’autres éventuels soumissionnaires se voit confier totalement ou en partie l’exécution d’un marché public. Une telle opération comporte un risque de détournement du droit des marchés publics et est de nature à fausser la concurrence sur le marché en cause ainsi que celui de favoriser un nouveau prestataire de services par rapport à d’autres prestataires potentiels.

55.      Néanmoins, il peut résulter des circonstances particulières du cas d’espèce que, exceptionnellement, des modifications apportées à la personne du prestataire de services n’emportent pas modification substantielle du contrat. Tel peut notamment être le cas dans les deux hypothèses suivantes.

56.      La première hypothèse est celle dans laquelle le cocontractant du pouvoir adjudicateur fait entrer en jeu un sous-traitant. Afin de ne pas restreindre plus que de raison le cercle des prestataires de services potentiels, la directive 92/50 prévoit expressément la possibilité d’autoriser de confier à des tiers des marchés de sous-traitance (31). Ce qui caractérise ce type de cas est que l’adjudicataire principal reste, même après avoir confié le marché de sous-traitance, entièrement responsable de l’exécution du marché de services dans sa globalité ou tout au moins en est conjointement responsable.

57.      La deuxième hypothèse est celle des réorganisations administratives de nature purement interne du cocontractant du pouvoir adjudicateur. Cela peut également englober le fait de faire entrer en jeu une de ses filiales dans le cadre de l’exécution du marché. Il n’est pas nécessaire dans la présente affaire de déterminer définitivement à quel point le lien entre l’adjudicataire et sa filiale doit être étroit dans un tel cas. En effet, en tout état de cause, sont visées les filiales contrôlées par l’adjudicataire d’une manière similaire à celle dont il contrôle ses propres services. Le fait de faire entrer en jeu une filiale dans l’exécution du marché s’apparente alors à un marché «in-house» (32) du prestataire de services qui ne modifie pas en substance les conditions d’exécution du marché public, tout du moins d’un point de vue économique.

58.      Dans les deux hypothèses évoquées, il est garanti que le changement intervenu du côté du prestataire de services ne faussera pas la concurrence et n’emportera en conséquence pas modification substantielle du contrat.

59.      Dans une opération telle que le transfert litigieux en 2000 à l’APA-OTS des services OTS ressemble de prime abord à l’attribution par l’APA d’un marché de sous-traitance (première hypothèse). Plaide en ce sens le fait que les services en cause seront désormais fournis par une autre personne morale que l’APA, cette dernière restant toutefois solidairement responsable de l’exécution du marché public de services global, y compris en ce qui concerne les tâches reprises par l’APA-OTS.

60.      Toutefois, à y regarder de plus près, un organisme tel que l’APA-OTS ne ressemble pas tant à un sous-traitant indépendant de l’APA mais ressemble bien plus à un propre service de l’APA. Un événement tel que l’entrée en jeu en 2000 de l’APA-OTS dans l’exécution du marché constitue une réorganisation purement interne du prestataire de services APA (deuxième hypothèse).

61.      Certes, une partie des services dus par l’APA sont désormais fournis par une autre personne morale, à savoir l’APA-OTS. Or, d’un point de vue économique, l’APA-OTS n’est cependant pas un tiers du fait qu’elle est entièrement contrôlée par sa société mère, à savoir APA. Non seulement le fait que l’APA la détienne à 100 %, mais également le fait qu’elle ait un pouvoir de direction et l’existence d’un contrat de transfert des pertes et bénéfices, garantissent que l’APA-OTS est contrôlée par sa maison mère comme un service propre. Ainsi, d’un point de vue économique, aucune modification substantielle n’a été apportée aux conditions d’exécution du marché public.

62.      En conséquence, un événement tel que celui survenu en 2000 n’aboutit à aucune modification substantielle du contrat et n’avait donc pas à être traité comme une (nouvelle) passation de marché public de services.

63.      Le fait qu’il ne soit pas assuré que l’APA continuera pendant toute la durée d’exécution du marché public à détenir à 100 % l’APA-OTS ne s’y oppose pas (33). Certes, théoriquement, l’APA peut à tout moment céder à des tiers les parts qu’elle détient dans l’APA-OTS. Toutefois, pour répondre à la question à examiner ici de savoir s’il y a eu en 2000 modification substantielle du contrat et donc une nouvelle passation d’un marché public de service, seuls importent les faits qui étaient à l’époque concrètement prévisibles.

64.      Le principe de sécurité juridique impose de se prononcer sur l’obligation de mener une procédure d’attribution de marché toujours ex ante, donc à la date de la conclusion de l’opération (34). Il faut en effet, aussi bien du point de vue du pouvoir adjudicateur et de son cocontractant que du point de vue des concurrents non retenus, qu’ils puissent établir si une procédure d’appel d’offres devait ou non être suivie. La prise en considération de circonstances ultérieures peut à la rigueur être envisagée si leur survenance était déjà prévisible de manière certaine à l’époque de l’attribution du marché.

65.      Il ressort du dossier que, au moment où l’APA-OTS a été intégrée dans l’exécution du marché public, il n’existait aucun élément concret dans le sens d’une cession prochaine par l’APA de ses parts. Dans ces conditions, nous persistons à considérer qu’un événement tel que celui survenu en 2000 n’a pas entraîné une modification substantielle du contrat et ne nécessitait donc pas de mettre en œuvre une procédure de passation de marché.

b)      Sur la deuxième partie de la première question: composition de l’APA

66.      Le Bundesvergabeamt souhaite en outre savoir si, dans le contexte d’un événement tel que celui survenu en 2000, le fait que le cercle des membres de la coopérative APA est susceptible de se modifier pendant la durée du contrat a une incidence.

67.      Une telle modification ne peut avoir une importance du point de vue du droit des marchés publics que si elle entraîne un changement, au minimum partiel, de prestataire de services et doit par conséquent être considérée comme une modification substantielle du contrat.

68.      Si par exemple le prestataire de services n’est qu’un simple groupement d’entrepreneurs non doté de la personnalité morale, normalement chaque membre de ce groupement tire des droits et obligations du contrat conclu avec le pouvoir adjudicateur. Dans ce cas, une modification de la composition du groupement d’entrepreneurs peut aboutir à ce qu’une entreprise qui n’a pas eu à se soumettre à une mise en concurrence avec d’autres soumissionnaires et dont le choix ne repose pas sur une comparaison avec d’autres éventuels soumissionnaires se voit confier totalement ou en partie l’exécution d’un marché public. Cela constituerait, sous réserve de l’exception décrite ci-dessus (35), une modification substantielle du contrat (36).

69.      En revanche, si le prestataire de services est une personne morale, seule cette dernière devient le cocontractant du pouvoir adjudicateur et d’éventuels changements postérieurs dans le cercle de ses associés n’entraînent pas une modification substantielle du contrat (37).

70.      Dans la présente affaire, il ressort du dossier que l’APA est une coopérative enregistrée à responsabilité limitée. On peut donc supposer que l’APA est dotée de la personnalité morale. Sous réserve des constatations opérées sur ce point par le Bundesvergabeamt, ce ne sont donc pas les membres de la coopérative APA, mais l’APA elle-même qui doit être considérée comme le cocontractant de la République d’Autriche. Dans un tel cas, d’éventuels changements dans la composition du cercle des membres de la coopérative n’entraînent pas une modification substantielle du contrat.

3.      Sur la troisième question

71.      Par sa troisième question, le Bundesvergabeamt souhaite en substance savoir s’il faut considérer comme une nouvelle passation de marché public de services, au sens de la directive 92/50, le fait que le pouvoir adjudicateur et le prestataire de services modifie un contrat en cours de durée en ce sens que:

–        une clause de renonciation à résiliation, préalablement convenue et d’ores et déjà venue à expiration, est reconduite pour une durée de trois ans, et que

–        certaines rémunérations dérogent à celles convenues jusqu’alors du fait que, dorénavant, il leur est appliqué un rabais dont le taux a été augmenté de 10 points de pourcentage.

72.      Cette question trouve son origine dans le deuxième avenant au contrat de base convenu entre l’APA et la République d’Autriche en 2005.

a)      Sur la première partie de la troisième question: reconduction de la clause de renonciation à résiliation

73.      La première partie de la troisième question porte sur la reconduction en 2005 d’une clause de renonciation à résiliation déjà venue à expiration, convenue entre les cocontractants.

74.      Cela poserait problème du point de vue du droit des marchés publics de convenir, outre un contrat à durée indéterminée, pour une longue durée d’une clause de renonciation à résiliation, voire d’exclure totalement une résiliation par le pouvoir adjudicateur. Une telle stipulation aurait en effet, à terme, pour effet d’exclure toute concurrence entre les prestataires de services potentiels et irait ainsi fondamentalement à l’encontre des objectifs poursuivis par les directives en matière de marchés publics.

75.      Les choses se présentent toutefois de manière différente en ce qui concerne une clause de renonciation à résiliation telle que celle qui a été convenue en 2005 laquelle est limitée à une durée de trois ans. Une telle clause de renonciation à résiliation ne peut pas d’emblée être considérée comme illicite au regard du droit des marchés publics. Toutefois, il convient de vérifier si une telle clause aurait dû être soumise à une procédure de passation de marché. Cela dépend à son tour du point de savoir si cette renonciation à résiliation doit être considérée comme une modification substantielle du contrat de base (38).

76.      Pour pouvoir être qualifiée de modification substantielle du contrat, une clause de renonciation à résiliation limitée à peu d’années doit être de nature à fausser la concurrence sur le marché en cause et à favoriser le cocontractant du pouvoir adjudicateur par rapport à d’autres prestataires de services potentiels (39).

77.      Cela ne peut être qu’exceptionnellement le cas, et ce s’il existe, à la date à laquelle la clause de renonciation à résiliation est convenue, des éléments concrets qui permettent de penser que, en l’absence d’une telle clause, le pouvoir adjudicateur se serait, pendant la durée de celle-ci, dégagé du contrat existant. En effet, ce n’est que dans une telle hypothèse que d’autres prestataires de services potentiels auraient pu sérieusement espérer remplacer totalement ou partiellement l’actuel prestataire de services.

78.      À cet égard, il convient, en premier lieu, d’observer que le pouvoir adjudicateur n’était tenu d’aucune obligation légale de mettre, par anticipation, fin à un rapport contractuel existant et ayant été conclu sans qu’il y ait eu violation du droit en vigueur. L’adhésion de l’Autriche à l’Union européenne n’a pas donné naissance à une obligation pour le pouvoir adjudicateur de résilier le contrat de base existant ou de le soumettre à un nouvel appel d’offres (40). Dans ces conditions, il se peut certes qu’il eût été juridiquement possible pour la République d’Autriche, à partir du moment où la clause de renonciation à résiliation initialement convenue (en 1994) est venue à expiration, de résilier le contrat de services conclu avec l’APA, mais cela n’était en aucun cas une obligation.

79.      En second lieu, sous réserve d’éventuelles constatations restant à faire par le Bundesvergabeamt, il n’existait, en 2005, pas non plus d’incitation d’ordre économique à changer de prestataire de services au cours de la durée envisagée de la renonciation à résiliation, à savoir jusqu’à la fin d’ l’année 2008, durée qui était relativement saisissable dans son étendue. Pour autant qu’on puisse en juger, le pouvoir adjudicateur pouvait raisonnablement supposer qu’il n’aurait disposé, dans la période allant jusqu’à la fin de l’année 2008, d’aucune offre équivalente, à des conditions plus avantageuses, qui aurait justifié la lourdeur d’un changement de prestataire.

80.      D’après les informations dont on dispose dans la présente affaire, la clause de renonciation à résiliation reconduite en 2005 pour une durée de trois ans n’a pas entraîné avec elle un risque de fausser la concurrence et ne peut donc pas être qualifiée de modification substantielle du contrat de base.

b)      Sur la deuxième partie de la troisième question: stipulation de rabais plus élevés

81.      La deuxième partie de la troisième question porte sur les rabais plus élevés convenus en 2005 pour les interrogations en ligne des services d’information de l’APA. Alors que le contrat de base accordait encore, à ce titre, aux autorités fédérales autrichiennes un rabais de 15 %, depuis le deuxième avenant à ce contrat, le rabais accordé est de 25 %.

82.      Comme cela a déjà été évoqué (41), il ne peut être question d’une nouvelle passation d’un marché public de services existant que lorsqu’on procède à une modification substantielle du contrat. Cela vaut également en ce qui concerne les modifications apportées aux rémunérations contractuellement convenues. En effet, même si les modalités de paiement constituent en soi un élément essentiel du contrat (42), toute modification, même mineure, des stipulations contractuelles relatives à la rémunération ne doit pas nécessairement être considérée comme une modification substantielle du contrat.

83.      Il convient tout d’abord de vérifier si l’augmentation de 10 points de pourcentage du rabais initialement convenu constitue même une modification de fond des stipulations relatives à la rémunération s’appliquant à un marché public de services.

84.      L’APA et l’APA-OTS font valoir que le rabais de 25 % qui est désormais accordé ne serait que l’évolution logique de ce qui avait, en tout état de cause, déjà été prévu par le contrat de base. Selon elles, il aurait déjà, dans le contrat de base, été fait référence à un tarif échelonné de l’APA. Selon elles, le nouveau rabais plus élevé doit être considéré comme l’équivalent de l’introduction d’un nouvel échelon moins élevé dans la liste des prix de l’APA.

85.      À cet égard, il convient d’observer que c’est au Bundesvergabeamt qu’il incombe d’apprécier concrètement les faits pertinents du litige au principal. Dans l’ordonnance de renvoi laquelle définit seule le contexte factuel dans lequel s’inscrit la présente demande de décision préjudicielle (43), la modification du pourcentage de 15 % à 25 % est décrite comme l’«octroi de rabais plus importants». Cela laisse entendre qu’il s’agit d’une modification de fond des stipulations relatives à la rémunération.

86.      Cette conclusion est également corroborée par le fait que le rabais de 15 % accordé initialement correspondait au «prix échelonné le plus bas du tarif». En conséquence, le pouvoir adjudicateur s’était vu accorder, dès la conclusion du contrat de base en 1994, l’échelon tarifaire le plus avantageux possible. Dans ces conditions, il est fort peu vraisemblable que, à ce moment-là, les cocontractants aient prévu, voire même aient tenu pour possible, le passage à une classe de prix encore plus avantageuse. Dès lors qu’il est désormais accordé, à partir de 2005, une ristourne supérieure de 10 points de pourcentage, laquelle s’applique à nouveau à l’échelon le plus bas du tarif, cela indique qu’il s’agit d’une véritable modification de la rémunération et non pas de l’évolution logique de la fixation de la rémunération telle qu’elle était déjà prévue dans le contrat de base.

87.      Toutefois, une telle modification de la rémunération ne peut être considérée comme une modification substantielle du contrat que lorsqu’elle est concrètement de nature à fausser la concurrence sur le marché en cause et à favoriser le cocontractant du pouvoir adjudicateur par rapport à d’autres prestataires de services potentiels.

88.      Pour pouvoir le déterminer, d’une part, il faut examiner l’ampleur de la modification de la rémunération pour chacun des services, et, d’autre part, il faut aussi apprécier cette modification de prix par rapport à la signification du marché public pris dans sa globalité.

89.      En ce qui concerne tout d’abord la modification en soi de la rémunération, le risque de fausser la concurrence est plus faible en cas de baisse de prix qu’en cas d’augmentation. En effet, la baisse de la rémunération produit un effet bénéfique pour le pouvoir adjudicateur et améliore en outre normalement la rentabilité de l’exécution du marché.

90.      Il n’est néanmoins pas d’emblée exclu que convenir d’une rémunération moins élevée puisse à l’occasion avoir pour effet de fausser la concurrence. Le gouvernement lituanien a, à juste titre, attiré l’attention sur ce point.

91.      Ce qui est toujours déterminant est de savoir quelles sont les conditions que le pouvoir adjudicateur aurait pu obtenir sur le marché à la date de la modification du contrat. Ainsi, si les prix des services faisant l’objet du contrat ont, de manière générale, baissé sur le marché depuis l’attribution initiale du marché public, le simple fait de convenir d’une rémunération moins élevée qu’auparavant ne présente aucune garantie quant au respect du principe de concurrence et du principe coût-efficacité. Ce qu’il convient de vérifier est si, à la date de la modification du contrat, d’autres prestataires de services potentiels auraient été en mesure d’offrir un prix encore plus bas que celui offert par le cocontractant actuel.

92.      Toutefois, d’après les informations dont nous disposons ici, il n’existe aucun élément concret montrant que le pouvoir adjudicateur de la présente affaire aurait pu obtenir, en mettant en œuvre une procédure de passation de marché, des prix encore plus intéressants pour des services comparables que ceux qu’il est parvenu à obtenir de l’APA, en tant que prestataire de service actuel, par le biais du deuxième avenant du contrat de base.

93.      Enfin, en ce qui concerne la signification de la modification de prix intervenue par rapport au marché public pris dans sa globalité, il convient de garder présent à l’esprit que le rabais plus important n’a été convenu que pour une prestation partielle – l’interrogation en ligne des services d’information de l’APA – et non pas pour la globalité des prestations à fournir par l’APA. Même si une ristourne augmentée de 10 points de pourcentage n’est pas sans importance au regard de la prestation partielle en cause, elle a, par rapport au contrat dans sa globalité, nettement moins de poids.

94.      Néanmoins, c’est au final au Bundesvergabeamt qu’il incombe de faire les constatations nécessaires sur la signification de la modification de prix tant au regard de la prestation partielle en cause que par rapport au marché public pris dans sa globalité.

95.      Sur la base des informations dont dispose la Cour, nous estimons, en tout état de cause, qu’une modification de prix telle que celle résultant de l’augmentation du rabais accordée en 2005 dans le deuxième avenant ne doit pas être considérée comme une modification substantielle du contrat.

4.      Sur la deuxième question

96.      Par sa deuxième question, le Bundesvergabeamt souhaite en substance savoir s’il faut considérer comme une nouvelle passation de marché public de services, au sens de la directive 92/50, le fait que le pouvoir adjudicateur et le prestataire de services modifient un contrat en cours de durée en ce sens:

–        que, à la suite du passage à la nouvelle monnaie, la rémunération contractuellement convenue n’est plus exprimée dans la monnaie nationale mais en euros;

–        que la clause d’indexation figurant dans le contrat est reformulée par référence à un indice subséquent à celui utilisé jusqu’alors, et que

–        dorénavant, certaines rémunérations se distinguent de celles convenues jusqu’alors.

97.      Cette question trouve son origine dans un premier avenant au contrat de base convenu en 2001 ayant donné lieu aux modifications susmentionnées des stipulations relatives à la rémunération.

98.      Des adaptations purement techniques du contrat qui n’ont pas d’incidence déterminante sur le lien juridique entre prestataire et bénéficiaire de services existant entre le pouvoir adjudicateur et son cocontractant ne constituent pas même une modification de fond du contrat. Elles ne peuvent donc a fortiori être considérées comme une modification substantielle du contrat qui justifierait de mettre en œuvre une procédure de passation de marché.

99.      Si, à la suite du passage à l’euro, un contrat existant a été modifié en ce sens que les rémunérations convenues jusqu’alors sont exprimées dans la nouvelle monnaie, sans pour autant qu’elles soient matériellement diminuées ou augmentées, il ne s’agit alors pas d’une modification substantielle du contrat mais uniquement d’une adaptation technique du contrat aux circonstances extérieures qui ont changé (44). Fait partie de cette adaptation purement technique le fait de devoir arrondir les montants en euros conformément aux dispositions légales en vigueur.

100. De même, la référence à un autre indice que celui initialement convenu peut être une adaptation purement technique pour autant que les deux indices sont équivalents. Une telle équivalence semble résulter de la mention figurant dans l’ordonnance de renvoi selon laquelle le nouvel indice serait un indice subséquent à celui précédemment utilisé. Le Bundesvergabeamt devra toutefois s’assurer également de ce que la manière dont fonctionne ce nouvel indice est bien équivalente à celle dont fonctionnait l’indice utilisé jusqu’alors. Cela implique notamment que les paniers ou autres indicateurs de référence sur lesquels s’appuie chacun des indices doivent être en substance équivalents.

101. En revanche, lorsque les cocontractants profitent du passage à une nouvelle monnaie ou d’un changement d’indice pour modifier également matériellement la rémunération initialement convenue, alors cette mesure, de par son ampleur, va au-delà d’une adaptation purement technique. En effet, dans ce cas, il n’est plus d’emblée exclu qu’il existe une modification substantielle du contrat ayant des effets sur la concurrence entre les prestataires de services.

102. D’après l’ordonnance de renvoi, dans la présente affaire, les adaptations du contrat de base opérées par le premier avenant ont abouti à ce que, à partir de ce moment, en ce qui concerne la saisine en 2002, 2003 et 2004 dans la base OTS des communiqués émanant des autorités fédérales, il a été appliqué un plafond des rémunérations lesquelles ne pouvaient pas être augmentées.

103. Il appartiendra au Bundesvergabeamt de vérifier si, ce faisant, il a été procédé à une modification substantielle des rémunérations convenues dans le contrat de base. Ce qui est déterminant à cet égard est de savoir quelle aurait été, d’après un examen objectif sur la base des éléments disponibles en 2001, l’évolution des rémunérations indexées convenues dans le contrat de base à laquelle il aurait fallu s’attendre.

104. S’il s’avère que les plafonds de rémunérations entre-temps fixés pour 2002, 2003 et 2004 sont dans l’ensemble conformes aux prix qui, selon toute vraisemblance, auraient résulté de l’application de la clause d’indexation prévue par le contrat de base, il n’y a pas modification substantielle du contrat (45). En revanche, dès lors qu’ils se distinguent nettement de l’évolution des prix selon le contrat de base à laquelle on pouvait s’attendre, il convient de vérifier quels sont les effets sur la concurrence de cette modification, les critères exposés ci-dessus dans l’examen de la deuxième partie de la troisième question étant applicables (46).

105. Sur la base des informations dont dispose la Cour, nous estimons en tout état de cause que des modifications des prix telles que celles convenues dans le premier avenant ont évolué dans les limites des augmentations annuelles des prix telles qu’elles étaient prévisibles en 2001 et que, pour ce seul motif, elles ne constituent pas une modification substantielle du contrat.

B –    Sur les quatrième et cinquième questions

106. Les quatrième et cinquième questions que le Bundesvergabeamt consacre à la procédure de passation de marché public à appliquer et à la justification par un prestataire de services de son aptitude à fournir la prestation supposent que des événements tels que ceux survenus en 2000, 2001 et 2005 puissent même être considérés comme une passation de marché public de services.

107. Selon les informations dont dispose la Cour, nous considérons qu’aucun de ces événements ne constitue une passation de marché public (47). En conséquence, ce n’est qu’à titre subsidiaire que nous examinons les quatrième et cinquième questions.

1.      Sur la quatrième question

108. Par sa quatrième question, le Bundesvergabeamt cherche en substance à savoir si un marché public de services peut être attribué en tant que marché unique par la voie de la procédure négociée sans publication préalable d’un avis de marché lorsque le marché a principalement pour objet des services non prioritaires et qu’il n’existe pas pour toutes, mais seulement pour certaines des prestations à fournir, un droit d’exclusivité, au sens de l’article 11, paragraphe 3, sous b), de la directive 92/50.

a)      Services prioritaires et non prioritaires

109. Il ressort des articles 8 à 10 de la directive 92/50 que celle-ci opère une distinction entre les services prioritaires et les services non prioritaires. Les premiers sont définis à l’annexe I A de la directive, les seconds à annexe I B. Cette disposition trouve son origine dans le fait que les marchés portant sur des services non prioritaires ne présentent pas, a priori, eu égard à leur nature spécifique, un intérêt transfrontalier susceptible de justifier que leur attribution se fasse au terme d’une procédure d’appel d’offres (48).

110. S’appuyant sur l’argumentation développée par l’APA et l’APA-OTS, le Bundesvergabeamt part du principe que les services d’agence de presse tels que ceux qui ont été convenus dans la présente affaire constituent un mélange de services prioritaires et non prioritaires (49), les services non prioritaires étant, de par leur valeur, nettement dominants.

111. Étant présumé que cette appréciation est exacte (50), c’est globalement le régime des services non prioritaires qui s’applique au marché public de services attribué à l’APA (article 10 de la directive 92/50). Il s’agit en conséquence d’un marché public qui n’est soumis à aucune procédure de passation de marché spécifique, au sens du chapitre III de la directive 92/50 (51).

b)      Applicabilité du principe de transparence

112. Toutefois, en vertu de la jurisprudence constante, les règles fondamentales du traité CE, en général, et le principe de non-discrimination en raison de la nationalité, en particulier, doivent être respectés également dans le cadre des attributions de marché pour lesquelles les directives en matière de marchés publics ne prévoient pas de procédure spécifique de passation de marché (52). La Cour n’a que récemment précisé que cela s’appliquait également à l’attribution de marchés portant sur des services non prioritaires (53).

113. Il s’ensuit que, dès lors qu’un marché portant sur des services non prioritaires présente un intérêt transfrontalier certain, le principe de transparence découlant des libertés fondamentales lui est applicable et qu’il ne peut être attribué en l’absence de toute transparence (54).

114. Le Bundesvergabeamt aura à vérifier si la fourniture des services d’agence de presse, tels que ceux dont fait l’objet le contrat dans la présente affaire, présente un intérêt transfrontalier certain (55). À cet égard, il convient de prendre en compte notamment les aspects suivants:

–        plaide en faveur de l’existence d’un intérêt transfrontalier le fait qu’un grand nombre d’agences de presse sont présentes au niveau international. L’entrée sur le marché en 1999 de PN démontre également que le marché autrichien n’est pas totalement inintéressant pour de nouveaux fournisseurs.

–        Les accords de coopération existant actuellement entre diverses agences de presse présentes sur leurs marchés nationaux respectifs qui ont été évoqués lors de l’audience, n’excluent pas d’emblée que certaines de ces agences souhaitent à l’avenir renforcer leur engagement sur un marché tel que le marché autrichien par une présence propre sur place.

–        Le fait que la majeure partie des services dont ont besoin les autorités fédérales autrichiennes porte de manière spécifique sur l’Autriche et sur ce qui s’y passe dans les Länder pourrait plaider contre l’existence d’un intérêt transfrontalier.

c)      La teneur du principe de transparence

115. Sur le fond, le principe de transparence implique de garantir un degré de publicité adéquat (56). Jusqu’ici les exigences exactes qui en résultent pour les attributions de marché pour lesquelles les directives en matière de marchés publics ne prévoient pas de procédures de passation de marché spécifiques restent largement indéterminées. La seule chose qui est certaine est que le principe de transparence n’implique pas nécessairement l’obligation de procéder à un appel d’offres (57).

116. Au final, c’est au pouvoir adjudicateur qu’il incombe d’apprécier dans chaque cas particulier quel est le degré adéquat de publicité pour ouvrir à la concurrence l’attribution de marché concernée et permettre un contrôle a posteriori de l’impartialité avec laquelle la procédure d’attribution du marché a été menée (58).

117. De manière très générale, le principe de transparence ne devrait pas être interprété en ce sens qu’il faudrait toujours appliquer une procédure de passation de marché en tous points comparable à celle des directives en matière de marchés publics (59). En effet, sinon la distinction entre les attributions de marché qui se situent dans le champ d’application de l’une de ces directives et celles qui ne sont pas visées par ces dernières n’aurait plus d’utilité; de même que les seuils financiers prévus par le législateur communautaire seraient largement vidés de leur sens.

118. À plus forte raison, il ne saurait résulter du principe de transparence pour les attributions de marché pour lesquelles les directives en matière de marchés publics ne prévoient pas de procédures spécifiques des exigences plus strictes que pour celles pour lesquelles de telles procédures sont prévues par les directives (60). En effet, les directives en matière de marchés publics ne font que concrétiser le principe de transparence pour certaines attributions de marché d’une importance particulière (61) .

119. Le principe de transparence ne peut donc pas exiger en ce qui concerne les marchés publics qui ont entièrement ou principalement pour objet des services non prioritaires, un degré de publicité plus élevé que pour les marchés qui ont entièrement ou principalement pour objet des services prioritaires.

120. En ce qui concerne les contrats portant sur des services qui ne peuvent, du fait de la protection de droits d’exclusivité (62), être exécutés que par un prestataire de services déterminé, cela signifie que ces contrats peuvent toujours être attribués que par le biais d’une procédure négociée sans publication préalable d’un avis de marché, peu importe qu’il s’agisse de services prioritaires ou non prioritaires. En effet, dès lors que l’article 11, paragraphe 3, sous b), de la directive 92/50 permet déjà d’avoir recours à une telle procédure pour des services prioritaires, il doit a fortiori être permis d’attribuer des services non prioritaires par le biais de cette procédure. On peut donc dans cette mesure transposer les considérations exprimées à l’article 11, paragraphe 3, de la directive 92/50 également au domaine des services non prioritaires. Dès lors que ledit article 11, paragraphe 3, n’exige pas la publication préalable d’un avis de marché, il ne peut résulter autre chose du principe de transparence (63).

121. La transparence adéquate garantissant que l’attribution de marché soit ouverte à la concurrence et permettant un contrôle de l’impartialité de la procédure d’attribution du marché peut aussi résulter, en ce qui concerne les services visés à l’article 11, paragraphe 3, de la directive 92/50, d’une publicité a posteriori.

d)      Attribution en tant que marché unique d’un marché mixte de services

122. Il reste à examiner si un marché public de services peut être attribué en tant que marché unique par le biais d’une procédure négociée sans publication préalable d’un avis de marché lorsqu’il existe un droit d’exclusivité, au sens de l’article 11, paragraphe 3, sous b), de la directive 92/50, non pas pour toutes mais seulement pour certaines des prestations à fournir.

123. Par principe, en tant que dérogation aux règles visant à garantir l’effectivité des droits reconnus par le traité dans le secteur des marchés publics de services, l’article 11, paragraphe 3, de la directive 92/50 doit faire l’objet d’une interprétation stricte (64). Concernant les attributions de marché qui ont pour objet un ensemble de services, cela veut dire que le recours à la procédure négociée sans publication préalable d’un avis de marché n’est autorisé que pour les services concrètement visés à l’article 11, paragraphe 3, de la directive 92/50.

124. Toutefois, cette attribution séparée des services visés à l’article 11, paragraphe 3, sous b), de la directive 92/50 n’entre en ligne de compte que lorsque le marché public est divisible. Cela ne peut pas dépendre seulement du caractère, en théorie, divisible du marché, mais il faut également tenir compte de la destination et de l’utilité pratique des services selon qu’ils sont fournis séparément ou par un même prestataire.

125. Dans la présente affaire, l’APA et l’APA-OTS, la République d’Autriche et la Chancellerie fédérale ont exposé de manière convaincante à quel point les différents services d’agence de presse convenus dans le contrat de base sont étroitement liés les uns aux autres. Il n’est ainsi pas opportun de se procurer auprès d’un fournisseur des articles de presse et de faire diffuser par un autre prestataire les réactions à ces articles car, dans ce cas, il ne serait pas garanti que les deux prestataires servent le même client final. On ne peut concevoir de répondre à un article paru dans le journal A par une réaction dans le journal B. En outre, il serait, au regard de la facilité d’utilisation, d’une importance décisive de pouvoir avoir accès à des bases de données interconnectées par le biais d’une interface utilisateur unique.

126. Le fait que les services OTS ne sont entre-temps plus fournis par l’APA mais par l’APA-OTS ne plaide pas en faveur du caractère divisible des éléments du contrat. En effet, ainsi que cela a déjà été évoqué, il ne s’agit là que d’une réorganisation purement interne du prestataire de services; d’un point de vue économique, il n’y a pas eu changement du prestataire de services, bien au contraire l’APA-OTS est contrôlée par l’APA comme un de ses propres services (65). De plus, les différentes prestations restent en réseau et consultables ensemble.

127. Sous réserve de l’appréciation concrète des circonstances de fait par le Bundesvergabeamt, tout cela plaide à l’encontre du caractère divisible du contrat de services conclu entre la République d’Autriche et l’APA et donc contre l’existence d’une obligation d’attribuer séparément les différents éléments du contrat.

128. Le fait que le contrat de services porte tant sur des services prioritaires que sur des services non prioritaires n’y change rien. Ainsi que cela résulte de l’article 10 de la directive 92/50, il n’est absolument pas nécessaire d’attribuer séparément les services prioritaires et les services non prioritaires (66).

129. Il n’en irait autrement que si le pouvoir adjudicateur avait regroupé dans un même marché les différents services de manière artificielle ou dans le but de contourner les règles en matière de marchés publics (67). Or, il n’existe ici aucun élément allant en ce sens. Bien au contraire, d’après les informations dont dispose la Cour, des facteurs objectifs plaidaient en faveur d’une attribution en tant que marché unique des services litigieux (68).

e)      Conclusion intermédiaire

130. En résumé, voici ce qui vaut pour la quatrième question:

Un marché public de services peut être attribué en tant que marché unique par le biais d’une procédure négociée sans publication préalable d’un avis de marché lorsque ce marché a principalement pour objet des services non prioritaires et qu’il n’existe pas un droit d’exclusivité, au sens de l’article 11, paragraphe 3, sous b), de la directive 92/50, pour toutes les prestations à fournir mais seulement pour certaines d’entre elles, à moins que les différentes prestations aient été artificiellement regroupées dans un même marché de services ou dans le but de contourner les règles en matière de marchés publics.

2.      Sur la cinquième question

131. Par sa cinquième question, le Bundesvergabeamt souhaite savoir en substance si une entreprise peut justifier de son aptitude à fournir la prestation dans le cadre de l’exécution d’un marché public de services en se bornant à affirmer qu’une autre entreprise serait tenue en vertu de l’article 82 CE de mettre à sa disposition à des conditions équitables certaines informations.

132. Cette question trouve son origine dans le fait que la prestation de services d’agence de presse telle que celle qui est demandée dans la présente affaire par les autorités fédérales autrichiennes suppose d’avoir accès à des archives complètes dans lesquelles il est possible de consulter notamment les informations et les textes historiques. Selon les indications fournies dans l’ordonnance de renvoi, la PN ne dispose pas même d’archives de données historiques comparables à celles de l’APA. De plus, l’APA ne donne pas accès à ses archives à ses concurrents, tout au moins pas aux fins de revendre les données qui peuvent y être consultées. Il convient donc de déterminer si, afin de justifier qu’elle a néanmoins la capacité à fournir les prestations, au sens de l’article 31 de la directive 92/50, la PN peut invoquer qu’elle est en droit d’avoir accès aux archives de l’APA, notamment à la base de données APADok.

133. Ce faisant, il est fait allusion à la théorie des «facilités essentielles» discutée en droit de la concurrence. En vertu de jurisprudence applicable, au regard de l’article 82 CE, au demeurant uniquement dans des circonstances exceptionnelles, le fait pour une entreprise ayant une position dominante sur le marché de refuser de donner accès à une autre entreprise à des biens, services ou données indispensables («facilités essentielles») peut être considéré comme abusif (69). Dans de tels cas, il peut résulter de l’article 82 CE une obligation de contracter pour l’entreprise dominant le marché.

134. Toutefois, il importe peu de savoir dans la présente affaire si une base de données telle que les archives APADok exploitées par l’APA contient des données indispensables pour les concurrents de celle-ci et s’il existe des circonstances exceptionnelles qui obligeraient l’APA à accorder à ses concurrents un accès à des conditions équitables.

135. En effet, un prestataire de services qui, en vue d’être admis à participer à une procédure d’appel d’offres, entend faire état des moyens d’autres organismes ou entreprises doit établir qu’il peut effectivement disposer de ces moyens (70). Sinon, le pouvoir adjudicateur se trouve dans l’impossibilité de procéder utilement à une comparaison de la capacité de ce prestataire à fournir la prestation par rapport celle des autres prestataires potentiels. Si le pouvoir adjudicateur se fiait uniquement au fait que le prestataire peut potentiellement disposer des moyens en question, il y aurait alors un risque qu’il attribue le marché à une entreprise dont il s’avérerait par la suite (par exemple en cas de difficultés d’accès aux moyens nécessaires) que sa capacité à fournir la prestation est insuffisante. Dans le même temps, il écarterait peut-être du marché une autre entreprise effectivement plus apte à fournir la prestation. Une telle manière de procéder ne serait conforme ni au souci d’assurer une égalité des chances de tous les prestataires potentiels, ni au principe d’efficacité économique du droit des marchés publics.

136. Une agence de presse telle que la PN ne peut donc pas se borner à prétendre avoir un droit d’accès aux archives de l’APA, mais doit établir concrètement que cet accès lui est bien effectivement accordé sous la forme d’un accord ferme ou d’un contrat de licence déjà conclu. Sinon, elle ne peut pas justifier avec succès de ses capacités dans le cadre d’une procédure de passation de marché en invoquant les archives de l’APA.

137. Les délais en général très courts dans lesquels une décision doit être prise dans le cadre d’une procédure de passation de marché ne permettent pas un règlement qui est souvent très long de questions juridiques complexes liées à l’article 82 CE ou à la doctrine des «facilités essentielles». L’entreprise concernée doit faire trancher un litige éventuel sur ce point avant de présenter sa candidature à un marché public.

138. En conséquence, au regard de la cinquième question, il y a lieu de retenir qu’une entreprise ne peut pas justifier de son aptitude à fournir la prestation dans le cadre de l’exécution d’un marché public de services en se bornant à affirmer qu’une autre entreprise serait tenue, en vertu de l’article 82 CE, de mettre à sa disposition à des conditions équitables certaines informations.

C –    Sur les sixième et septième questions

139. Par ses sixième et septième questions, le Bundesvergabeamt souhaite obtenir des précisions sur la portée de la protection juridictionnelle qui doit être accordée à une entreprise qui n’a pas été retenue par le pouvoir adjudicateur. Ces questions impliquent elles aussi nécessairement que les événements tels que ceux survenus en 2000, 2001 et 2005 puissent même être considérés comme une passation de marché public de services, ce que le Bundesvergabeamt reconnaît lui-même dans son ordonnance de renvoi.

140. Sur la base des informations dont dispose la Cour, nous considérons, ainsi que cela a déjà été évoqué, qu’aucun de ces événements ne constitue une passation de marché public (71). En conséquence, ce n’est qu’à titre subsidiaire que nous examinons les sixième et septième questions.

1.      Sur la sixième question

141. La sixième question posée par le Bundesvergabeamt porte sur l’interprétation des notions de «dommage» ou d’«être lésé» figurant aux articles 1er, paragraphe 3, et 2, paragraphe 1, sous c), de la directive 89/665. Ainsi que cela a déjà été évoqué (72), cette question n’est recevable qu’au regard de l’article 1er, paragraphe 3, de la directive 89/665.

142. Par cette question, le Bundesvergabeamt souhaite savoir en substance s’il suffit pour mettre en œuvre une procédure de recours que le requérant fasse valoir qu’il a été privé de la possibilité de prendre part à une procédure de passation de marché du fait qu’il n’a à tort pas été préalablement publié d’avis de marché ou si ce requérant doit en outre justifier de sa propre capacité à exécuter le marché public en cause. Il convient donc de préciser les conditions d’accès aux procédures de recours.

143. L’article 1er, paragraphe 3, de la directive 89/665 permet aux États membres de limiter l’accès aux procédures de recours relatives aux passations de marchés publics (73) à deux égards, à savoir à travers, d’une part, l’exigence d’un intérêt du requérant à obtenir le marché public en cause et, d’autre part, l’exigence que le requérant ait été lésé ou risque d’être lésé. Cela permet d’exclure des actions populaires ou l’exercice d’une voie de recours par un candidat qui n’avait manifestement aucune chance d’être retenu.

144. Cela ne doit néanmoins pas porter atteinte à l’effet utile de la directive (74). Les limites apportées à l’accès aux procédures de recours doivent donc être interprétées à la lumière du double objectif poursuivi par la directive, à savoir, d’une part, garantir au particulier une protection juridictionnelle effective au regard de la passation des marchés publics, et, d’autre part, permettre un contrôle de la légalité des décisions des pouvoirs adjudicateurs.

145. En effet, ainsi que cela ressort de ses premier et deuxième considérants, la directive 89/665 vise à renforcer les mécanismes existant, tant sur le plan national que sur le plan communautaire, pour assurer l’application effective des directives communautaires en matière de passation de marchés publics; à cet effet, l’article 1er, paragraphe 1, de ladite directive impose aux États membres l’obligation de garantir que les décisions illégales des pouvoirs adjudicateurs peuvent faire l’objet de recours efficaces et aussi rapides que possible (75).

146. Dans ces conditions, l’accès aux procédures de recours en matière de droit des marchés publics ne doit pas être limité à l’excès. Il ne faut notamment pas soumettre la recevabilité d’une procédure de recours aux mêmes conditions que celles exigées pour son bien-fondé (76).

147. Il ne saurait donc être question d’exiger de la personne concernée qu’elle apporte déjà au stade du dépôt de la demande la preuve concrète de ce qu’elle a effectivement été lésée ou risque effectivement d’être lésée. Au contraire, il doit suffire pour avoir accès à une procédure de recours que, outre une violation du droit par le pouvoir adjudicateur, la personne concernée fasse valoir de manière concluante qu’elle a un intérêt à obtenir le marché public en cause et l’éventualité de la survenance d’un dommage.

148. L’éventualité d’un dommage doit être retenue lorsqu’il n’est manifestement pas exclu que, en l’absence de l’illégalité alléguée commise par le pouvoir adjudicateur, le requérant aurait obtenu l’attribution du marché. Lorsque, tel que c’est le cas dans la présente affaire, le marché public a été passé par le biais d’une adjudication directe (77) sans publication préalable d’un avis de marché, il résulte du seul fait de cet empêchement – prétendument illégal – à participer éventuellement à la procédure de marché que le requérant peut avoir été privé d’un marché et qu’il a en conséquence subi un préjudice (78).

149. On ne saurait exiger de la personne concernée qu’elle apporte, au stade du dépôt de son recours, la preuve concrète de sa capacité à fournir la prestation pas plus que celle que, en l’absence de l’illégalité alléguée, elle aurait obtenu le marché (79). Sinon, l’accès à la procédure de recours lui serait rendu en pratique impossible ou tout au moins excessivement difficile (80). Il serait quasi impossible, notamment dans des cas tels que celui de la présente affaire d’adjudication directe, pour la personne concernée d’apporter une preuve concrète de sa capacité à fournir la prestation car, en l’absence de publication préalable d’un avis de marché, elle manquera d’informations précises sur les conditions exigées par le pouvoir adjudicateur.

150. Ce n’est qu’à titre exceptionnel qu’un recours pourra être d’emblée rejeté comme étant irrecevable sur la base de l’absence de capacité de la personne concernée à fournir la prestation, et ce lorsque cette absence de capacité est tellement manifeste au moment du dépôt du recours qu’il n’est pas nécessaire de l’examiner plus avant. Tout le reste relève toutefois de la question du bien fondé du recours.

151. Il convient donc de retenir en ce qui concerne la sixième question qu’un recours, au sens de l’article 1er, paragraphe 3, de la directive 89/665, est recevable dès lors que le requérant fait valoir de manière concluante son intérêt à obtenir le marché, l’illégalité et le préjudice susceptible d’avoir été causé ou risquant d’être causé.

2.      Sur la septième question

152. Par sa septième question, le Bundesvergabeamt souhaite en substance savoir s’il est compatible avec les principes d’équivalence et d’effectivité que le droit national prévoit, en ce qui concerne une procédure de constatation relevant du droit des marchés publics qui est la condition préalable d’une action ultérieure en dommages-intérêts, un délai de forclusion de six mois maximum à compter de la date de l’attribution de marché dont il est allégué qu’elle est contraire au droit des marchés publics. Le Bundesvergabeamt s’interroge en outre sur le point de savoir si le principe d’effectivité exige d’ajouter, le cas échéant, audit délai de six mois des périodes au cours desquelles il n’existait pas encore en droit national de voie de recours efficace.

153. Cette question trouve son origine dans le fait que la PN n’a exercé ses recours devant le Bundesvergabeamt qu’en juillet 2006, soit bien dans les six mois suivant l’entrée en vigueur, le 1er février 2006, des nouvelles règles de procédure visées à l’article 331 du BVergG 2006, mais plus de six mois après les événements litigieux survenus en 2000, 2001 et 2005. Selon le Bundesvergabeamt, les adjudications directes («adjudications de fait») ne peuvent être «effectivement attaquées» en Autriche que depuis l’entrée en vigueur de l’article 331 du BVergG 2006.

154. La directive 89/665 ne prévoit aucune règle expresse en ce qui concerne les délais applicables au recours visés à son article 1er.

155. Par conséquent, il convient pour répondre à cette question de prendre comme point de départ le principe de l’autonomie procédurale des États membres (81): selon une jurisprudence constante, en l’absence d’une réglementation communautaire, c’est à l’ordre juridique interne de chaque État membre qu’il appartient de désigner les juridictions compétentes et de régler les modalités procédurales des recours destinés à assurer la pleine sauvegarde des droits que les justiciables tirent du droit communautaire pour autant, d’une part, que ces modalités ne soient pas moins favorables que celles concernant des recours similaires de nature interne (principe d’équivalence) et, d’autre part, qu’elles ne rendent pas en pratique impossible ou excessivement difficile l’exercice des droits conférés par l’ordre juridique communautaire (principe d’effectivité) (82). Ces deux principes trouvent également leur expression à l’article 1er de la directive 89/665: celui d’équivalence au paragraphe 2 et celui d’effectivité au paragraphe 1.

156. Le principe d’équivalence est une manifestation du principe général d’égalité de traitement et de non-discrimination (83) qui exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié (84).

157. La Commission ainsi que l’APA et l’APA-OTS ont à cet égard, à juste titre, souligné une particularité caractérisant la procédure de recours relevant du droit des marchés publics. En effet, l’article 1er, paragraphe 1, de la directive 89/665 exige des États membres qu’ils fassent en sorte de permettre un contrôle le plus rapide que possible des violations du droit des marchés publics. Cela vise par ce biais, d’une part, à garantir une protection juridictionnelle effective et, d’autre part, à parvenir le plus rapidement possible à une sécurité juridique. Ces objectifs justifient de prévoir, le cas échéant, en ce qui concerne les recours visés par la directive 89/665, des délais plus courts que ceux dans lesquels les actions en dommages-intérêts sont enfermées en vertu des règles générales du droit interne.

158. Par conséquent, le principe d’équivalence ne s’oppose pas au délai de forclusion des recours de six mois tel qu’il est prévu par l’article 332, paragraphes 2 et 3, du BVergG 2006 quand bien même, selon le droit interne, le délai général de prescription des actions en dommages-intérêts est plus long.

159. Il reste toutefois à examiner au regard du principe d’effectivité si un délai de forclusion tel que celui prévu en droit autrichien pour les procédures de constatation ne rend pas en pratique impossible ou excessivement difficile pour la personne concernée de faire valoir par la suite son droit d’obtenir des dommages-intérêts, au sens de l’article 2, paragraphe 1, sous c), de la directive 89/665.

160. En principe, la fixation de délais raisonnables de recours à peine de forclusion n’est pas contraire au principe d’effectivité car il s’agit d’un cas d’application du principe fondamental de sécurité juridique (85).

161. Le caractère raisonnable d’un délai de forclusion doit être apprécié en prenant en compte la nature et les conséquences juridiques du recours en cause ainsi que les droits et intérêts en cause de toutes les personnes concernées.

162. Ainsi, en ce qui concerne les recours visant à faire prononcer la nullité – que ce soit avec rétroactivité ou pour l’avenir – de contrats d’ores et déjà conclus, un délai de forclusion de six mois apparaît en principe tout à fait raisonnable (86). En effet, les conséquences juridiques particulièrement graves de la nullité d’un contrat d’ores et déjà conclu justifient de prévoir un délai qui court indépendamment du point de savoir si l’auteur du recours avait connaissance du caractère contraire au droit des marchés publics de l’attribution du marché ou s’il aurait dû tout au moins en avoir connaissance. Il existe, tant pour le pouvoir adjudicateur que pour son cocontractant, un besoin de sécurité juridique, clair et digne de protection, quant à la validité du contrat conclu.

163. Toutefois, en ce qui concerne un cas tel que celui de la présente affaire, il faut tenir compte de ce que le délai de forclusion de six mois, tel celui prévu par l’article 332, paragraphes 2 et 3, du BVergG 2006 pour les procédures de constatation visées à l’article 331 de ladite loi, ne touche pas seulement celui qui ne poursuit en réalité que le but d’obtenir qu’un contrat d’ores et déjà conclu soit annulé, mais également celui qui veut seulement entreprendre une démarche procédurale indispensable pour préparer une action ultérieure en dommages-intérêts devant les juridictions civiles autrichiennes.

164. Par conséquent, si la personne concernée a connaissance du préjudice qui lui a été causé par une attribution de marché sans publication préalable d’un avis de marché (adjudication directe ou adjudication de fait) contraire au droit des marchés publics seulement après plus de six mois, elle ne pourra même plus demander des dommages-intérêts devant les juridictions civiles car pour cela, en vertu de l’article 341, paragraphe 2, du BVergG 2006, il aurait fallu obligatoirement au préalable introduire une procédure de contestation laquelle est toutefois à ce stade déjà prescrite.

165. Il s’ensuit que le délai de forclusion prévu à l’article 332, paragraphes 2 et 3, du BVergG 2006 a, au-delà de son champ d’application intrinsèque, également des effets sur les procédures subséquentes pour lesquelles il n’est cependant, de par sa rigueur, pas raisonnable. En effet, au regard de simples demandes en dommages-intérêts, il n’existe pas pour le pouvoir adjudicateur le même besoin de sécurité juridique que celui existant au regard de la validité d’un contrat d’ores et déjà conclu.

166. Dès lors qu’un État membre fait usage de l’option ouverte par l’article 2, paragraphes 2 et 5, de la directive 89/665 et qu’il fait dépendre l’exercice d’une action en dommages-intérêts de ce qu’il ait été préalablement mené avec succès une procédure de constatation, les délais en vigueur dans cet État membre doivent être conçus et appliqués de manière à ce qu’il ne soit pas pratiquement impossible ou excessivement difficile de réellement faire aboutir une demande en dommages-intérêts (87).

167. Globalement, le principe d’effectivité exige que le délai, applicable à une procédure de constatation à travers laquelle le requérant ne cherche qu’à préparer l’exercice d’une action en dommages-intérêts, ne commence pas à courir avant que le requérant ait eu connaissance de la survenance du dommage ou aurait dû en avoir connaissance. En revanche, dans la mesure où le requérant vise également à travers une telle procédure de constatation à obtenir que la nullité du contrat conclu par le pouvoir adjudicateur soit prononcée, il peut être prévu des délais plus stricts qui commencent à courir indépendamment de la connaissance ou de la possibilité d’avoir connaissance d’un éventuel préjudice.

168. Le juge national doit interpréter dans toute la mesure possible le droit procédural interne de manière à assurer le respect de l’exigence d’effectivité résultant de la directive 89/665 et doit au besoin laisser inappliquée toute disposition nationale dans la mesure où son application, dans les circonstances de l’espèce, aboutirait à un résultat contraire au droit communautaire (88).

169. Dans un cas, tel celui de la présente affaire, où il s’agit d’une adjudication directe sans publication préalable d’un avis de marché, cela signifie que le délai applicable à la demande de constatation ne doit pas commencer à courir avant que la personne concernée ait eu connaissance de la violation alléguée du droit des marchés publics ou aurait dû en avoir connaissance, dès lors qu’il est fait de cette demande la condition nécessaire d’un procès en dommages-intérêts ultérieur.

170. Dans son ordonnance de renvoi, le Bundesvergabeamt laisse entendre que, selon lui, il serait possible de parvenir en fait dans la présente affaire à un résultat conforme au droit communautaire, d’une part, en appliquant la nouvelle voie de recours ouverte par l’article 331, paragraphe 1, point 4, du BVergG 2006 à des événements qui se sont produits avant son entrée en vigueur et, d’autre part, par une computation des délais applicables en ayant recours à certaines dispositions du droit civil commun de manière à ce que ces délais ne commencent pas à courir avant que le requérant ait eu connaissance du préjudice et en y ajoutant les périodes au cours desquelles il n’existait pas encore de voie de recours efficace.

171. En résumé, voici ce qui vaut en ce qui concerne la septième question:

Le principe d’effectivité exige que l’article 1er, paragraphe 1, de la directive 89/665 soit interprété en ce sens que, en ce qui concerne une demande de constatation qui, selon le droit national, est la condition impérative d’un procès en dommages-intérêts ultérieur, on dispose d’un délai raisonnable qui ne commence pas à courir avant que la personne concernée n’ait eu connaissance ou aurait dû avoir connaissance de la violation alléguée du droit des marchés publics et auquel s’ajoutent les périodes au cours desquelles il n’existait pas une voie de recours efficace. Le juge national doit interpréter dans toute la mesure possible le droit procédural interne de manière à parvenir à ce résultat et doit au besoin laisser inappliquée toute disposition nationale dans la mesure où son application, dans les circonstances de l’espèce, aboutirait à un résultat contraire au droit communautaire.

VII – Conclusion

172. Au vu des explications qui précèdent, nous proposons à la Cour de ne répondre qu’aux trois premières questions préjudicielles posées par le Bundesvergabeamt autrichien, et ce dans le sens suivant:

«1)      D’un point de vue général sur les première, deuxième et troisième questions:

Lorsqu’un contrat entrant dans le champ d’application de la directive 92/50/CEE du Conseil, du 18 juin 1992, portant coordination des procédures de passation des marchés publics de services, est modifié sur le fond au cours de sa durée, il n’est pas nécessaire de mettre en œuvre une procédure de passation de marché, à moins qu’il ne s’agisse d’une modification substantielle du contrat.

2)      En ce qui concerne plus spécifiquement la première question:

a)      Il n’y a pas lieu de retenir une modification substantielle du contrat lorsque le pouvoir adjudicateur accepte que l’exécution d’une partie du marché public soit transférée à une filiale que l’adjudicataire détient à 100 % et qu’il contrôle d’une manière similaire à celle dont il contrôle ses propres services. Le fait que l’adjudicataire puisse théoriquement ultérieurement céder à des tiers les parts qu’il détient dans sa filiale ne s’oppose pas à cette conclusion.

b)      Lorsque l’adjudicataire est une personne morale, d’éventuelles modifications intervenant au cours de la durée du contrat dans le cercle de ses associés ne constituent pas une modification substantielle du contrat.

3)      En ce qui concerne plus spécifiquement les deuxième et troisième questions:

a)      Il n’y a pas lieu de retenir l’existence d’une modification substantielle du contrat lorsqu’il est procédé à une adaptation purement technique du contrat à des circonstances extérieures modifiées; celles-ci englobent la conversion en euros des rémunérations initialement exprimées en monnaie nationale et la référence à un nouvel indice qui constitue un indice subséquent à celui utilisé jusqu’alors.

b)      Il n’y a pas non plus lieu de retenir l’existence d’une modification substantielle du contrat lorsqu’ il est convenu dans le cadre d’un marché public de services dont la durée est indéterminée d’une clause de renonciation à résiliation limitée à une durée de trois ans, à moins que des éléments concrets plaident dans le sens que le pouvoir adjudicateur aurait sinon au cours de la durée prévue de la renonciation à résiliation mis fin au contrat existant pour des motifs juridiques ou économiques.

c)      Le point de savoir si une modification de fond des rémunérations relatives à une partie des prestations à fournir constitue une modification substantielle du contrat dépend de la signification de la modification de la rémunération en cause tant au regard de la prestation partielle concernée que par rapport au marché public pris dans sa globalité.»


1 – Langue originale: l’allemand.


2 – JO L 209, p. 1. Cette directive a été abrogée et remplacée par la directive 2004/18/CE du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004, relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services (JO L 134, p. 114). Cette dernière modification n’était toutefois à mettre en œuvre en droit national qu’avec effet au 31 janvier 2006. En outre, comme cette directive n’a pas été transposée en droit autrichien avant l’expiration du délai, elle n’a aucune incidence sur les circonstances du litige au principal qui porte sur les années 2000, 2001 et 2005.


3 – JO L 395, p. 33.


4 – D’autres modifications ont été apportées à cette directive par la directive 2007/66/CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 décembre 2007, modifiant les directives 89/665 et 92/13/CEE du Conseil en ce qui concerne l’amélioration de l’efficacité des procédures de recours en matière de passation des marchés publics (JO L 335, p. 31, ci-après «la directive 2007/66»). Toutefois ces modifications ne sont entrées en vigueur que le 9 janvier 2008 et devront être transposées avant le 20 décembre 2009. Elles n’ont donc aucune incidence sur les faits du litige au principal.


5 BGBl. I, n° 17/2006.


6 – Il ressort du dossier qu’il s’agit d’une coopérative enregistrée à responsabilité limitée.


7 – L’Österreichische Correspondenz, une organisation ancêtre de l’APA, avait déjà été constituée en 1849 à Vienne.


8 – Selon les indications données par le Présidium de la Chancellerie fédérale qui est partie à la procédure, il s’agissait d’une adaptation d’un rapport contractuel déjà existant depuis 1946.


9 – Ce plafond des rémunérations ne s’applique que dans la mesure où les communiqués sont transmis en ligne.


10 – Selon l’ordonnance de renvoi, la demande principale de la PN est fondée sur l’article 331, paragraphe 1, point 4, du BVergG 2006 et la demande subsidiaire, sur l’article 331, paragraphe 1, point 1, de ladite loi.


11 – Voir article 291 du BVergG 2006.


12 – Voir article 291, paragraphe 2, deuxième phrase, du BVergG 2006.


13 – Voir articles 292 et 295 du BVergG 2006.


14 – Sur la jurisprudence constante concernant la notion de juridiction, voir arrêts du 17 septembre 1997, Dorsch Consult (C-54/96, Rec. p. I-4961, point 23); du 31 mai 2005, Syfait e.a. (C-53/03, Rec. p. I-4609, point 29), et du 18 octobre 2007, Österreichischer Rundfunk (C-195/06, non encore publié au Recueil, point 19).


15 – Voir arrêts du 14 novembre 2002, Felix Swoboda (C-411/00, Rec. p. I-10567, points 25 à 28); du 18 mars 2004, Siemens et ARGE Telekom (C‑314/01, Rec. p. I-2549), du 2 juin 2005, Koppensteiner (C-15/04, Rec. p. I‑4855). La forme sous laquelle est organisé aujourd’hui le Bundesvergabeamt sur le fondement du BVergG 2006 est, selon l’ordonnance de renvoi, comparable en substance avec celle qui existait dans l’affaire Koppensteiner.


16 – De manière similaire, la Cour a considéré une commission fédérale de surveillance, telle qu’elle existait à l’époque en Allemagne, comme une juridiction en droit de poser des questions à titre préjudiciel (voir arrêt Dorsch Consult, précité, point 38).


17 – Voir arrêts du 10 juillet 1984, Campus Oil e.a. (72/83, Rec. p. 2727, point 10); du 12 juin 2003, Schmidberger (C-112/00, Rec. p. I-5659, point 39), et du 17 avril 2007, AGM-COS.MET (C-470/03 Rec. p. I-2749, point 45).


18 – Voir arrêt Schmidberger, précité, points 40 et 41).


19 – La République d’Autriche a fait usage de l’option, prévue par l’article 2, paragraphe 2, de la directive 89/665, de conférer les pouvoirs à des instances distinctes responsables d’aspects différents des procédures de recours.


20 – Voir arrêt du 19 juin 2003, GAT (C-315/01, Rec. p. I-6351, point 38).


21 – Voir arrêt du 24 septembre 1998, Tögel (C-76/97, Rec. p. I-5357, points 53 et 54). Contrairement à ce qui était le cas en ce qui concerne les événements désormais litigieux survenus en 2000, 2001 et 2005 qui se sont produits à l’intérieur du champ d’application dans le temps du droit communautaire, les directives sur les marchés publics n’étaient pas encore applicables au contrat de base du fait qu’en 1994 l’Autriche n’était pas encore membre de l’Union européenne.


22 – Sur le problème particulier naissant du fait de combiner une renonciation à résiliation avec un contrat à durée indéterminée, voir, notamment, point 74 des présentes conclusions.


23 – Une demande de décision préjudicielle formée par une juridiction allemande, l’Oberlandesgericht Rostock, n’a pas abouti à une décision de la Cour (affaire C‑50/03, radiée du rôle le 9 novembre 2004).


24 – Sur l’interprétation large des différentes notions définissant le champ d’application des directives en matière de marchés publics, voir arrêts du 27 février 2003, Adolf Truley (C-373/00, Rec. p. I-1931, point 43); du 8 septembre 2005, Espace Trianon et Sofibail (C-129/04, Rec. p. I-7805, point 73), et du 29 novembre 2007, Commission/Italie (C-119/06, non encore publié au Recueil, point 43).


25 – Voir arrêts du 10 novembre 1998, BFI Holding (C-360/96, Rec. p. I-6821, point 41); du 3 octobre 2000, University of Cambridge (C-380/98, Rec. p. I-8035, point 16); du 13 novembre 2007, Commission/Irlande (C-507/03, non encore publié au Recueil, point 27), et du 13 décembre 2007, Bayerischer Rundfunk e.a. (C-337/06, non encore publié au Recueil, point 38). Voir également, deuxième et sixième considérants de la directive 92/50.


26 – Voir arrêts University of Cambridge (précité à la note 25, point 17); Felix Swoboda (précité à la note 15, point 45) et Bayerischer Rundfunk e.a. (précité à la note 25, point 36).


27 – Voir arrêts du 11 janvier 2005, Stadt Halle et RPL Lochau (C-26/03, Rec. p. I-1, points 44 et 47) et Bayerischer Rundfunk e.a. (précité à la note 25, point 39).


28 – Voir en ce sens, arrêts du 5 octobre 2000, Commission/France (C-337/98, Rec. p. I‑8377, points 46, 50 et 51) et du 29 avril 2004, Commission/CAS Succhi di Frutta (C-496/99 P, Rec. p. I-3801, point 117), dans lesquels il est fait référence à des stipulations contractuelles ou à des conditions de l’adjudication substantielles.


29 – Il faut admettre que, en pratique, il ne sera pas toujours aisé de distinguer des modifications contractuelles substantielles et non substantielles car cela nécessite de porter une appréciation sur les circonstances particulières de chaque cas d’espèce. On ne peut toutefois, dans aucun domaine juridique, véritablement éviter de faire usage de notions juridiques incertaines et sujettes à interprétation. Cela est également vrai en matière de droit des marchés publics.


30 – Il ne semble à cet égard pas exister d’unanimité entre les parties au litige principal. L’ordonnance de renvoi n’emploie pas non plus une terminologie uniforme. Toutefois, c’est au Bundesvergabeamt qu’il appartient de déterminer comment il convient de qualifier cette opération du point de vue du droit civil.


31 – Voir articles 25 et 32, paragraphe 2, sous c) et h), de la directive 92/50 ainsi qu’arrêt du 2 décembre 1999, Holst Italia (C-176/98, Rec. p. I-8607, points 26 et 27). Néanmoins, le recours à la sous-traitance pour l’exécution de parties essentielles du marché peut être limité en vertu du droit national (voir arrêt Siemens et ARGE Telekom, précité à la note 15, point 45).


32 – Sur les conditions de reconnaissance d’un marché «in-house», voir notamment arrêts du 18 novembre 1999, Teckal (C-107/98, Rec. p. I-8121, point 50) ; Stadt Halle et RPL Lochau, précité à la note 27, (point 49); du 13 octobre 2005, Parking Brixen (C-458/03, Rec. p. I-8585, point 62), et du 19 avril 2007, Asemfo (C‑295/05, Rec. p. I-2999, point 55). Sur la notion de marché in-house, voir nos conclusions du 1er mars 2005 dans l’affaire Parking Brixen (arrêt précité).


33 – La même chose vaut pour ce qui est du caractère résiliable de l’accord de transfert des bénéfices et des pertes.


34 – Voir nos conclusions dans l’affaire Parking Brixen, précitées (point 56). La question du caractère concrètement prévisible d’une cession de parts à des tiers joue aussi un rôle déterminant dans les arrêts du 10 novembre 2005, Commission/Autriche (C-29/04, Rec. p. I-9705, points 38 à 41), du 6 avril 2006, ANAV (C-410/04, Rec. p. I-3303, points 30 à 32), et Parking Brixen, précité (point 67).


35 – Voir points 55 à 58 des présentes conclusions.


36 – L’arrêt du 23 janvier 2003, Makedoniko Metro et Michaniki (C-57/01, Rec. p. I‑1091, point 61), précise seulement que les règles relatives à la composition d’un groupement d’entrepreneurs autorisé à soumissionner relèvent de la compétence des États membres. C’est donc aux États membres qu’il incombe de prévoir si des modifications dans la composition d’un tel groupement d’entrepreneurs sont autorisées. Il faut cependant distinguer cela de la question qui nous intéresse ici de savoir si de telles modifications intervenant après l’attribution d’un marché public doivent être considérées comme des modifications substantielles du contrat et remplissent en conséquence les conditions d’une passation de marché public. Cette dernière question est une question de droit communautaire.


37 – Si on voulait que chaque changement dans les structures de propriété d’une personne morale soit un motif de mettre en œuvre une nouvelle procédure de passation de marché, il serait pratiquement impossible d’attribuer des marchés publics à des sociétés par actions cotées en Bourse dont les actionnaires changent dans certains cas quotidiennement.


38 – Voir point 48 des présentes conclusions.


39 – Voir points 48 et 49 des présentes conclusions.


40 – Voir, en ce sens, arrêt Tögel, (points 53 et 54).


41 – Voir ci-dessus, points 48 et 49.


42 – Voir en ce sens, arrêt Commission/CAS Succhi di Frutta (précité à la note 28, point 117).


43 – Voir arrêts du 29 avril 2004, Orfanopoulos et Oliveri (C-482/01 et C-493/01, Rec. p. I-5257, point 42), et du 12 janvier 2006, Turn- und Sportunion Waldburg (C‑246/04, Rec. p. I-589, point 21).


44 – Certes, une adaptation du contrat à la suite du passage à l’euro n’aurait pas été obligatoirement nécessaire du fait que le cadre juridique existant garantit que tous les montants préalablement exprimés en monnaie nationale doivent être à l’avenir compris comme des montants en euros sans que cela entraîne une modification des obligations contractuelles existantes [voir articles 3 et 5 du règlement (CE) nº 1103/97 du Conseil, du 17 juin 1997, fixant certaines dispositions relatives à l'introduction de l’euro (JO L 162, p. 1)]. Mais, ainsi que l’APA et l’APA-OTS l’ont à juste titre exposé, il peut toutefois être opportun d’adapter expressément un contrat, en particulier un contrat à durée indéterminée tel que celui en cause dans la présente affaire, afin d’éviter la charge administrative accrue découlant d’une conversion constamment réitérée.


45 – Il n’y a qu’une différence très minime par rapport aux prix à la ligne maximum convenus pour 2002, 2003 et 2004 dans le premier avenant. Sous réserve d’une vérification plus précise par le Bundesvergabeamt, des différences de prix aussi minimes d’une année sur l’autre semblent évoluer dans les limites de l’évolution générale des prix de l’année suivante à laquelle on pouvait s’attendre en 2001.


46 – Voir points 81 à 94 des présentes conclusions.


47 – Voir nos appréciations portées sur les première, deuxième et troisième questions, points 41 à 105 des présentes conclusions.


48 – Voir arrêt Commission/Irlande, précité (point 25).


49 – L’APA et l’APA-OTS considèrent que leurs services de documentation relèvent de la catégorie «Services des bibliothèques» («Library services», référence CPC n° 96311) et leurs services OTS, de la catégorie «Services de messagerie électronique» («Electronic message and information services», référence CPC n° 75232).


50 – L’ordonnance de renvoi définit le cadre factuel dans lequel il doit être répondu aux questions préjudicielles (voir jurisprudence citée à la note 43).


51 En vertu des dispositions combinées des articles 9 et 10 de la directive 92/50, (seuls) les articles 14 et 16 de ladite directive s’appliquent à de tels marchés, articles qui n’ont aucune signification au regard des questions qui nous intéressent ici. Les autres règles de procédure prévues par la directive 92/50, notamment celles relatives à la mise en concurrence avec publicité préalable, ne s’appliquent pas à ces marchés (voir arrêt Commission/Irlande, précité, points 23 et 24). Néanmoins, le principe d’interdiction des discriminations visé à l’article 3, paragraphe 2, de la directive 92/50 s’applique (voir arrêt du 27 octobre 2005, Contse e.a., C-234/03, Rec. p. I-9315, point 47).


52 – Voir arrêt Parking Brixen, précité (point 46). Voir également arrêts du 7 décembre 2000, Telaustria et Telefonadress (C-324/98, Rec. p. I-10745, point 60); du 21 juillet 2005, Coname (C-231/03, Rec. p. I-7287, point 16); du 20 octobre 2005, Commission/France (C-264/03, Rec. p. I-8831, point 33); ANAV, précité (point 18); du 14 juin 2007, Medipac-Kazantzidis (C-6/05, Rec. I-4557, point 33), ainsi que ordonnance du 3 décembre 2001, Vestergaard (C‑59/00, Rec. p. I-9505, point 20).


53 – Voir arrêt Commission/Irlande, précité (point 29); voir, dans le même sens, arrêt du 31 janvier 2008, Centro Europa 7 (C-380/05, non encore publié au Recueil, point 67).


54 – Voir arrêt Commission/Irlande, précité (point 30). Voir en outre sur le principe de transparence, arrêts précités Telaustria et Telefonadress (point 62); Coname (points 16 et 17); Parking Brixen (points 46 à 49), ainsi que ANAV (points 18 à 21).


55 – Voir arrêt Commission/Irlande, précité (points 29 et 30).


56 – Voir arrêts précités Telaustria et Telefonadress (point 62); Coname (points 16 et 17); Parking Brixen (point 49), ainsi que ANAV (point 21).


57 – Voir arrêt Coname, précité (point 21). [Ndt: le reste de cette note ne présente pas d’intérêt pour la version française des présentes conclusions].


58 – Voir arrêts précités Telaustria et Telefonadress (point 62); Parking Brixen (points 49 et 50), ainsi que ANAV (point 21). Sur ce point, la communication interprétative de la Commission relative au droit communautaire applicable aux passations de marchés non soumises ou partiellement soumises aux directives marchés publics (JO 2006, C 179, p. 2) fournit également des indications utiles.


59 – Voir nos conclusions dans l’affaire Parking Brixen, (point 37).


60 – Voir, en ce sens, conclusions de l’avocat général Jacobs du 2 juin 2005 dans l’affaire Commission/Italie (arrêt du 27 octobre 2005, C-525/03, Rec. p. I-9405, point 47); de l’avocat général Sharpston du 18 janvier 2007 dans l’affaire Commission/Finlande (arrêt du 26 avril 2007, C-195/04, Rec. p. I-3351, points 76 et 77), et de l’avocat général Stix-Hackl du 14 septembre 2006 dans l’affaire Commission/Irlande (arrêt du 18 décembre 2007, C-532/03, non encore publié au Recueil, point 111). Voir également nos conclusions dans l’affaire Parking Brixen, précitées (point 46).


61 – Voir, en ce sens, arrêt du 13 novembre 2007, Commission/Irlande, précité points 27 à 29). Voir également mes conclusions dans l’affaire Parking Brixen, précitées point 47).


62 – C’est au Bundesvergabeamt qu’il incombe de vérifier s’il existe dans la présente affaire un tel droit d’exclusivité.


63 Voir, en ce sens, également la communication de la Commission précitée à la note en bas de page 58 (point 2.1.4.).


64 – Voir arrêts du 10 avril 2003, Commission/Allemagne (C-20/01 et C‑28/01, Rec. p. I-3609, point 58), et du 18 novembre 2004, Commission/Allemagne (C-126/03, Rec. p. I‑11197, point 23). Voir également article 11, paragraphe 4, de la directive 92/50, en vertu duquel, «dans tous les autres cas» une procédure ouverte ou une procédure restreinte s’applique.


65 – Voir points 61 et 62 des présentes conclusions.


66 – Voir arrêt Felix Swoboda, précité (points 56 et 60).


67 – Ibidem (points 57 et 60).


68 Voir point 125 des présentes conclusions.


69 – Voir arrêts du 6 avril 1995, RTE et ITP/Commission, dit «Magill» (C-241/91 P et C-242/91 P, Rec. p. I-743, points 49 à 57); du 26 novembre 1998, Bronner (C-7/97, Rec. p. I-7791, points 38 à 47), et du 29 avril 2004, IMS Health (C-418/01, Rec. p. I-5039).


70 – Voir arrêts précités Holst Italia (point 29); Siemens et ARGE Telekom (point 44), ainsi que du 18 novembre 2004, Commission/Allemagne (point 22). Voir également, en ce qui concerne les affaires futures, article 48, paragraphe 3, de la directive 2004/18 par lequel cette jurisprudence est désormais codifiée.


71 – Voir nos appréciations sur les première, deuxième et troisième questions, points 41 à 105 des présentes conclusions.


72 – Voir points 35 à 37 des présentes conclusions.


73 – Depuis que le champ d’application de la directive 89/665 a été étendu par la directive 92/50, la référence faite aux marchés publics de fournitures ou de travaux doit être comprise comme englobant tous les marchés publics, y compris les marchés de fourniture de services. Il semble que ce soit une erreur rédactionnelle de la part du législateur communautaire (qui pour les cas futurs a été rectifiée par la directive 2007/66) qui est à l’origine de ce que seul l’article 1er, paragraphe 1, de la directive 89/665 ait été adapté en ce sens.


74 – Voir arrêts du 19 juin 2003, Fritsch, Chiari & Partner e.a. (C-410/01, Rec. p. I‑6413, points 31 à 34); du 12 décembre 2002, Universale-Bau e.a. (C-470/99, Rec. p. I-11617, point 72), et du 12 février 2004, Grossmann Air Service (C‑230/02, Rec. p. I-1829, point 42).


75 – Voir arrêt du 28 octobre 1999, Alcatel Austria e.a. (C-81/98 Rec. p. I-7671, points 33 et 34), ainsi que arrêts Fritsch, Chiari & Partner e.a. précités (point 30); Universale-Bau e.a. (point 74), et Grossmann Air Service (point 36).


76 – Le simple fait qu’il ne puisse éventuellement pas être établi, à l’issue de la procédure de recours, que le requérant a été ou risque d’être lésé ne suffit pas en soi à exclure la recevabilité du recours. Voir, en ce sens, arrêt du 19 juin 2003, Hackermüller (C-249/01, Rec. p. I-6319, point 27).


77 – Également dénommée «procédure de gré à gré».


78 – Voir, dans le même sens, ordonnance du Bundesverfassungsgericht allemand du 29 juillet 2004 (2 BvR 2248/03, paragraphe 36 in fine).


79 – Ibidem (paragraphes 26 et 29).


80 – Voir, dans le même sens, bien que visant l’octroi de dommages-intérêts, point 66 des conclusions de l’avocat général Geelhoed du 10 octobre 2002 dans l’affaire GAT (arrêt précité).


81 – Voir arrêt Universale-Bau e.a., précité (point 71). Sur la notion d’autonomie procédurale, voir arrêts du 7 janvier 2004, Wells (C-201/02, Rec. p. I‑723, point 67); du 4 juillet 2006, Adeneler e.a. (C-212/04, Rec. p. I-6057, point 95), ainsi que du 28 juin 2007, Bonn Fleisch (C-1/06, Rec. p. I-5609, point 41).


82 – Voir arrêts du 19 décembre 1968, Salgoil (13/68, Rec. p. 680); du 16 décembre 1976, Rewe-Zentralfinanz et Rewe-Zentral (33/76, Rec. p. 1989, point 5); du 14 décembre 1995, Peterbroeck (C-312/93, Rec. p. I-4599, point 12); du 13 mars 2007, Unibet (C‑432/05, Rec. p. I-2271, points 39 et 43), ainsi que du 7 juin 2007, van der Weerd e.a. (C- 222/05 à C-225/05, Rec. p. I-4233, point 28).


83 – Voir point 67 de nos conclusions du 9 janvier 2008 dans l’affaire Impact (arrêt du 15 avril 2008, C‑268/06, non encore publié au Recueil. Sur le principe d’égalité de traitement, voir la jurisprudence constante dont, notamment, arrêts du 12 septembre 2006, Eman et Sevinger (C-300/04, Rec. p. I-8055, point 57); du 3 mai 2007, Advocaten voor de Wereld (C-303/05, Rec. p. I-3633, point 56), et du 11 septembre 2007, Lindorfer/Conseil (C-227/04 P, non encore publié au Recueil, point 63).


84 – Voir, en ce sens, même si se rapportant à la restitution de taxes, arrêt du 15 septembre 1998, Edis (C-231/96, Rec. p. I-4951, point 37).


85 – Jurisprudence constante, voir, notamment, arrêts Rewe-Zentralfinanz et Rewe-Zentral, précité (point 5); Edis (points 20 et 35), ainsi que du 17 juin 2004, Recheio – Cash & Carry (C-30/02, Rec. p. I-6051, point 18); plus spécialement au regard de la directive 89/665, voir également arrêts Universale-Bau e.a., précité (point 76); du 27 février 2003, Santex (C-327/00, Rec. p. I-1877, point 50) et du 11 octobre 2007, Lämmerzahl (C-241/06, non encore publié au Recueil, point 50).


86 – Voir également sur ce point l’article 2 septies, paragraphe 1, sous b), lu en combinaison avec l’article 2 quater, paragraphe 1, de la directive 89/665, telle que modifiée par la directive 2007/66.


87 – L’importance de la manière dont une règle de forclusion est concrètement conçue et appliquée en pratique a également été soulignée dans l’arrêt Lämmerzahl, précité (points 52, 56 et 61).


88 – Voir arrêts précités Santex (points 62 et 64) ainsi que Lämmerzahl (points 62 et 63).