Language of document : ECLI:EU:C:2009:21

ORDONNANCE DE LA COUR (sixième chambre)

20 janvier 2009 (*)

«Pourvoi – Fonction publique – Rémunération – Non-application de la prime de fonctions prévue pour les chefs d’unité à un conseiller juridique de grade A*14 – Principe d’égalité de traitement»

Dans l’affaire C‑38/08 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice, introduit le 1er février 2008,

Jörn Sack, ancien fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Berlin (Allemagne), représenté par Me D. Mahlo, Rechtsanwalt,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant:

Commission des Communautés européennes, représentée par M. J. Currall, en qualité d’agent, assisté de Me B. Wägenbaur, avocat, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (sixième chambre),

composée de M. J.‑C. Bonichot (rapporteur), président de chambre, MM. J. Makarczyk et P. Kūris, juges,

avocat général: Mme V. Trstenjak,

rend la présente


Ordonnance

1        Par son pourvoi, M. Sack demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 11 décembre 2007, Sack/Commission (T‑66/05, non encore publié au Recueil, ci‑après l’«arrêt attaqué»), par lequel celui‑ci a rejeté son recours tendant, principalement, à l’annulation de la décision de la Commission des Communautés européennes relative à la fixation de son traitement mensuel pour les mois de mai 2004 à février 2005, décision par laquelle M. Sack s’est vu refuser la prime de fonctions prévue pour les chefs d’unité.

 Le cadre juridique

2        L’article 44, deuxième alinéa, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes, dans sa rédaction applicable dans la présente espèce (ci‑après le «statut»), dispose:

«Le fonctionnaire nommé chef d’unité, directeur ou directeur général dans le même grade, bénéficie, pour autant qu’il se soit acquitté de ses nouvelles fonctions d’une manière satisfaisante durant les neuf premiers mois, d’un avancement d’échelon dans ce grade avec effet à la date de sa nomination. Cet avancement entraîne une augmentation du traitement mensuel de base égale au pourcentage de progression du premier au deuxième échelon de chaque grade. Si le montant de l’augmentation est inférieur à ce pourcentage de progression ou si le fonctionnaire a déjà atteint le dernier échelon de son grade, il reçoit une majoration du traitement de base lui permettant de bénéficier de l’augmentation du premier au deuxième échelon jusqu’à ce que sa prochaine promotion prenne effet.»

3        L’article 46 du statut dispose:

«Le fonctionnaire nommé à un grade supérieur conformément à l’article 45 est classé au premier échelon de ce grade. Toutefois, le fonctionnaire des grades AD 9 à AD 13 exerçant les fonctions de chef d’unité qui est nommé à un grade supérieur conformément à l’article 45 est classé au deuxième échelon de son nouveau grade. La même dérogation s’applique au fonctionnaire:

a)      promu sur un emploi de directeur ou de directeur général ou

b)      occupant un emploi de directeur ou de directeur général et auquel s’applique la dernière phrase de l’article 44, deuxième alinéa.»

4        L’article 7, paragraphe 4, de l’annexe XIII du statut dispose:

«Les fonctionnaires des grades A* 10 à A* 16 et AD 10 à AD 16 qui, en date du 30 avril 2004, occupent un poste de chef d’unité, directeur ou directeur général ou sont nommés par la suite chef d’unité, directeur ou directeur général, et qui se sont acquittés de leurs nouvelles fonctions de manière satisfaisante durant les neuf premiers mois, bénéficient d’une augmentation du traitement mensuel de base correspondant à la différence en pourcentage entre le premier et le deuxième échelon de chacun des grades indiqués dans le tableau de l’article 2, paragraphe 1, [de la présente annexe] et dans le tableau de l’article 8, paragraphe 1[, de la même annexe].»

5        La décision de la Commission du 28 avril 2004 relative au personnel d’encadrement intermédiaire, publiée aux Informations administratives n° 73‑2004, du 23 juin 2004 (ci‑après la «décision du 28 avril 2004»), dispose:

«[…]

Article 2: Définitions

1.      Fonctions et personnel d’encadrement intermédiaire

Une fonction d’encadrement intermédiaire se définit suivant deux critères cumulatifs:

–        elle consiste en la direction permanente et continue d’une unité administrative;

–        elle figure dans l’organigramme officiel de la Commission.

Appartient au personnel d’encadrement intermédiaire une personne qui remplit en même temps ces deux critères.

Par conséquent, les fonctions de chef d’unité, chef de délégation [note en bas de page n° 7: les chefs de délégation relevant du poste de directeur ou de directeur général ne sont pas visés par la présente décision], chef de bureau ou de représentation dans les États membres ainsi que celles de chef adjoint de délégation de niveau AD 13 [à] AD 14 [note en bas de page n° 8: lorsqu’il est fait référence dans la présente décision à un grade du groupe de fonctions AD, cette référence vaut également pour le grade correspondant de la catégorie A* durant la période du 1er mai 2004 au 30 avril 2006] sont des fonctions d’encadrement intermédiaire [note en bas de page n° 9: pour la clarté du reste de la présente décision, le terme ‘chef d’unité’ comprend toutes les fonctions mentionnées dans cet article; les conseillers n’exercent pas de fonctions d’encadrement et ne font pas partie du personnel d’encadrement intermédiaire; ils figurent dans l’organigramme officiel de la Commission] et sont couvertes par la présente décision.

Ces fonctions sont pourvues soit aux grades AD 9 [à] AD 12, soit aux grades AD 13 [à] AD 14.

2.      Tâches de gestion hors organigramme

Les chefs d’unité adjoints et les chefs de secteur assurent dans certains cas des tâches de gestion (‘management tasks’) déléguées par le chef d’unité. Ils n’apparaissent pas dans l’organigramme officiel de la Commission. Ils ne font pas partie du personnel d’encadrement intermédiaire.

[…]

Article 4: Rôle des chefs d’unités

Le rôle dévolu aux chefs d’unité revêt une importance particulière. Ils doivent posséder des compétences spécifiques de gestion (gestion des ressources humaines et, le cas échéant, des ressources financières) ainsi qu’un degré approprié de connaissances spécialisées et d’expertise technique.

Sans que cette liste soit exhaustive et limitative, le rôle et la responsabilité du chef d’unité couvrent essentiellement trois aspects:

–        Le chef d’unité donne à l’unité les orientations en matière de politiques et d’actions sur la base de la lettre de mission et du programme de travail annuel de la direction générale/direction. Il définit le programme de travail de l’unité, coordonne les activités au sein de l’unité ainsi qu’avec les autres unités et la représente dans les réunions importantes.

–        Il est l’intermédiaire principal dans les échanges d’informations entre les cadres supérieurs et les membres de l’unité.

–        Il est directement responsable de la gestion des ressources humaines et, souvent, des ressources financières relevant de son unité.

[…]»

6        La décision de la Commission du 26 mai 2004 relative à l’application des articles 44, paragraphe 2, et 46 du statut ainsi que de l’article 7, paragraphe 4, de l’annexe XIII du statut (ci‑après la «décision du 26 mai 2004») dispose:

«1.      [L’article] 44, paragraphe 2, et [l’article] 46 du statut ainsi que l’article 7, paragraphe 4, de l’annexe XIII du statut prévoient des augmentations spécifiques des salaires de base des chefs d’unité, des directeurs et des directeurs généraux.

2.      Cet avantage vise à récompenser les obligations et responsabilités particulières liées aux fonctions d’encadrement. Ainsi, la communication de la Commission du 11 décembre 2001 [note en bas de page: SEC (2001) 1990/6 du 11 décembre 2001] prévoit que tout le personnel d’encadrement intermédiaire en bénéficie. Cependant, la notion d’encadrement intermédiaire étant spécifique à la Commission, les articles du statut mentionnés ci-dessus font référence à cette catégorie de personnel sous la dénomination de chefs d’unité. L’application de ces dispositions au sein de la Commission doit tenir compte de l’objectif de ces articles afin de garantir que l’idée se trouvant derrière ces dispositions devienne effective, cette idée ayant pour origine le livre blanc de la Commission.

3.      Les différences organisationnelles entre les institutions, et même au sein de la Commission, entre ses différents services doivent donc être prises en compte dans le cadre de l’interprétation de la terminologie utilisée dans [l’article] 44, paragraphe 2, [dans l’article] 46 du statut et dans l’article 7, paragraphe 4, de l’annexe XIII du statut.

4.      Dans la décision [du] 28 avril 2004, la Commission a énuméré un certain nombre de fonctions qu’elle consid[érait] comme appartenant à la catégorie des fonctions d’encadrement intermédiaire. Ces fonctions sont celles de chef d’unité, chef de délégation (exception faite des personnes occupant un emploi type de directeur ou de directeur général), chef de bureau ou de représentation dans les États membres ainsi que celles de chef adjoint de délégation de niveau AD 13/AD 14 [note en bas de page: la référence à un grade dans le groupe de fonctions ‘AD’ renvoie également au grade correspondant dans la catégorie A* durant la période allant du 1er mai 2004 [jusqu’]au 30 avril 2006].

Le fait que ces fonctions aient une dénomination différente de celle de chef d’unité est dû aux structures organisationnelles spécifiques dans le cadre desquelles elles sont exercées (par exemple, dans le cadre de services spécifiques tels que la [direction générale de la traduction], les délégations, les représentations, etc.). Par conséquent, cette différence est purement terminologique et non pas substantielle. Les personnes occupant ces fonctions au sein de la Commission sont donc considérées comme étant des chefs d’unité au sens des dispositions du statut susmentionnées.

En outre, dans [l]a décision du 28 avril 2004, la Commission a défini les deux critères constituant les éléments essentiels des fonctions d’encadrement intermédiaire. En application de ces deux critères (direction permanente et continue d’une unité administrative et présence dans l’organigramme officiel de la Commission) et compte tenu de l’objectif des articles pertinents du statut, la Commission considère également les superviseurs d’audit du service d’audit interne, les chefs de service de la direction générale de la traduction et du service commun interprétation‑conférences et les présidents du comité central du personnel et du ‘groupe ad hoc’ comme étant des chefs d’unité au sens de ces dispositions.

5.      L’objectif de récompense pour les obligations et responsabilités particulières liées aux fonctions d’encadrement a également été pris en compte dans le cadre de l’interprétation des termes ‘directeur’ et ‘directeur général’.

C’est pourquoi, aux fins de l’application [de l’article] 44, paragraphe 2, [de l’article 46] du statut et de l’article 7, paragraphe 4, de l’annexe XIII du statut, la Commission considère que, au sein de la Commission, ces termes couvrent également les fonctions exercées par:

–        le secrétaire général;

–        les chefs de délégation occupant des emplois types de directeur ou de directeur général;

–        les conseillers juridiques principaux.

[…]»

 Les faits à l’origine du litige

7        Les antécédents du litige ont été décrits de la manière suivante aux points 7 à 12 de l’arrêt attaqué:

«7      Le requérant est devenu fonctionnaire de la Commission en 1977 et a été affecté au service juridique. Au moment de son départ à la retraite, le 1er mars 2005, il se trouvait classé au grade A* 14, échelon 7.

8      En janvier 1996, le requérant a été promu au grade A 3. En février 2002, il a pris en charge la fonction de coordinateur pour toutes les questions juridiques relatives à l’élargissement de l’Union européenne dans l’équipe du service juridique compétente pour les relations extérieures de l’Union européenne, dirigée par un conseiller juridique principal de grade A* 15 (anciennement grade A 2).

9      Le 21 juin 2004, en vertu de l’article 90, paragraphe 2, du statut, le requérant a remis à l’assistant du directeur général du service juridique une réclamation (ci‑après la ‘réclamation personnelle’), transmise le 13 août 2004 à l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci‑après l’‘AIPN’) par voie interne. Dans cette réclamation, le requérant a, en substance, décrit sa fonction spécifique au sein du service juridique et en a déduit un droit à une prime de fonctions au sens de l’article 44, deuxième alinéa, du statut (ci‑après la ‘prime de fonctions’).

10      Le 9 août 2004, le requérant et seize autres conseillers juridiques du service juridique ont introduit une réclamation au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut, concernant, également, le droit à la prime de fonctions (ci‑après la ‘réclamation collective’).

11      Le 27 août 2004, le requérant a adressé une note à l’AIPN, dans laquelle il a fourni des informations complémentaires au sujet des responsabilités qu’il exerçait.

12      Le 26 novembre 2004, le requérant s’est vu notifier la décision du 24 novembre 2004 […] [dans laquelle] l’AIPN informe le requérant, en substance, de ce que la décision implicite l’excluant du bénéfice de la prime de fonctions prévue à l’article 7, paragraphe 4, de l’annexe XIII du statut, qui découle de ses fiches de rémunération des mois de mai et de juin 2004, résulte d’une application correcte des dispositions pertinentes. Le requérant ne serait pas éligible en ce qui concerne la prime de fonctions, n’étant pas chef d’unité. L’AIPN met en exergue que la fonction du requérant n’est pas mentionnée parmi celles définies comme étant des fonctions d’encadrement intermédiaire dans la décision du 28 avril 2004 ni parmi celles assimilées à la fonction de chef d’unité dans la décision du 26 mai 2004. Les conseillers juridiques de grade A 3 ne rempliraient pas les deux critères qui définissent, à l’article 2 de la décision du 28 avril 2004, les fonctions d’encadrement intermédiaire. Le requérant n’aurait pas affirmé qu’un conseiller juridique A 3 du service juridique assumait l’une des trois responsabilités essentielles qui caractérisent le travail d’un chef d’unité, auxquelles renvoie l’article 4 de la décision du 28 avril 2004. Selon l’AIPN, bien qu’il puisse y avoir une certaine subdélégation de facto des tâches de coordination vers les conseillers juridiques de grade A 3, il s’agit d’une subdélégation informelle et ad hoc. Les conseillers juridiques de grade A 3 n’exerceraient donc pas de fonctions d’encadrement, mais des fonctions de coordination horizontale et n’auraient pas de responsabilités dans l’établissement des rapports de notation, dans le déroulement de l’exercice de promotion annuel ni de responsabilités budgétaires. Ils n’exerceraient pas non plus de responsabilités dans le contrôle et l’autorisation des congés, des missions, de l’horaire flexible, du travail à temps partiel et de la formation. Enfin, ils ne participeraient pas aux procédures administratives relatives aux réclamations et aux mesures disciplinaires.»

 La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

8        Le 17 février 2005, M. Sack a introduit un recours devant le Tribunal tendant à l’annulation de la décision de rejet et des décisions relatives à la fixation de son traitement pour la période allant du mois de mai 2004 au mois de février 2005 et à ce que le traitement correspondant à ces mois soit recalculé.

9        Au soutien de son recours, il a soulevé trois moyens, écartés par le Tribunal. Le premier était tiré de ce que l’AIPN aurait commis une erreur de droit en répondant conjointement, dans une même décision, à la réclamation personnelle et à la réclamation collective. Le deuxième était tiré de ce que l’AIPN aurait méconnu le principe d’égalité de traitement, lors de l’évaluation et de la classification du travail de M. Sack. Le troisième moyen était tiré de la méconnaissance du principe d’égalité du fait que le successeur de M. Sack aurait bénéficié de la prime de fonctions.

10      Le Tribunal a écarté le deuxième moyen en trois temps.

11      Il a relevé, en premier lieu, que l’octroi de la prime de fonctions aux fonctionnaires nommés chef d’unité, directeur ou directeur général est prévu aux articles 44 du statut et 7, paragraphe 4, de son annexe XIII, et que le requérant n’a pas soulevé d’exception d’illégalité à l’encontre de ces dispositions.

12      Le Tribunal a rappelé, en deuxième lieu, que le principe d’égalité de traitement n’ouvre pas, au fonctionnaire, le droit de demander un avantage financier illégalement accordé à un autre fonctionnaire. Par conséquent, et à supposer même que les diverses catégories de fonctionnaires invoquées par le requérant n’entrent pas dans la notion de chef d’unité et que le fait de leur octroyer la prime de fonctions constituerait, de la part de la Commission, une violation du statut, cela n’ouvrirait pas au requérant le droit de réclamer le bénéfice d’une telle prime. Le Tribunal en a déduit qu’il n’est, dès lors, pas nécessaire d’examiner si les fonctions exercées par ces fonctionnaires sont comparables à celles du requérant.

13      Le Tribunal a examiné, en dernier lieu, la question de savoir si M. Sack exerçait, lui aussi, des fonctions assimilables à celles d’un chef d’unité au sens du statut. Le Tribunal rappelle, dans l’arrêt attaqué, que la Commission, par une décision du 26 mai 2004, a indiqué les fonctions qui, selon elle, devaient être comprises comme étant visées par les dispositions du statut qui prévoient l’octroi de la prime de fonctions. Cette décision fait, à son tour, référence à une décision du 28 avril 2004, dans la mesure où, selon la décision du 26 mai 2004, les personnes occupant des fonctions d’encadrement intermédiaire au sein de la Commission sont considérées comme étant des chefs d’unité au sens des dispositions du statut. L’article 2 de la décision du 28 avril 2004 définit la fonction d’encadrement intermédiaire par deux critères cumulatifs. Le premier critère se réfère à la nature des fonctions exercées et prévoit qu’une fonction d’encadrement intermédiaire «consiste en la direction permanente et continue d’une unité administrative». Le second critère est de nature formelle et exige que la fonction en question «figure dans l’organigramme officiel de la Commission».

14      Le Tribunal a jugé que la notion d’unité, dirigée par un chef d’unité, doit être définie comme une structure administrative distincte, intégrée dans l’organisation administrative d’une institution et dotée de ressources humaines, et souvent financières, qui lui sont propres. Il a examiné ensuite si le groupe de travail dont M. Sack assumait la coordination pouvait être qualifié d’«unité administrative» dont le requérant aurait été le chef. L’arrêt attaqué répond par la négative après avoir considéré, en substance, que ce groupe de travail ne disposait pas de ses propres ressources humaines, que les personnes y travaillant ne pouvaient être regardées comme affectées à une unité administrative, que M. Sack n’avait aucune relation de nature hiérarchique avec elles et, enfin, qu’il n’exerçait pas les responsabilité administratives d’un chef d’unité.

 Les conclusions des parties

15      Par son pourvoi, M. Sack demande à ce qu’il plaise à la Cour:

–        annuler l’arrêt attaqué et statuer définitivement sur l’affaire, et

–        subsidiairement, annuler l’arrêt attaqué et renvoyer l’affaire devant le Tribunal.

16      La Commission conclut à ce qu’il plaise à la Cour:

–        rejeter le pourvoi, et

–        condamner le requérant aux dépens de l’instance.

 Sur le pourvoi

17      En vertu de l’article 119 de son règlement de procédure, lorsque le pourvoi est manifestement irrecevable ou manifestement non fondé, la Cour peut, à tout moment, le rejeter par voie d’ordonnance motivée.

18      M. Sack ne conteste l’arrêt attaqué qu’en tant que le Tribunal a écarté son deuxième moyen, tiré d’une violation par l’AIPN du principe d’égalité dans l’appréciation qu’elle a portée sur les fonctions du requérant et leur éligibilité à la prime de fonctions qu’il réclame. M. Sack soulève à cet égard, en substance, quatre moyens.

 Sur le premier moyen

 Argumentation des parties

19      Le requérant soutient que le Tribunal aurait dénaturé les pièces du dossier en jugeant qu’il n’avait pas soulevé d’exception tirée de l’illégalité du statut, alors qu’il aurait soutenu que seule une interprétation extensive de celui‑ci permettait de considérer qu’il ne violait pas le principe d’égalité. Le Tribunal aurait, en outre, entaché son arrêt d’une erreur de droit en jugeant qu’il était nécessaire pour le requérant de soulever formellement un tel moyen d’exception d’illégalité, alors que le règlement de procédure du Tribunal et celui de la Cour obligent seulement le requérant à indiquer l’objet du litige et les moyens soulevés. Le Tribunal n’aurait pu, sans erreur de droit, juger qu’un requérant qui ne soulève pas d’exception d’illégalité à l’encontre du statut ne peut invoquer le principe d’égalité à l’encontre de ce même statut, alors qu’il suffisait d’interpréter le statut conformément au principe d’égalité.

20      La Commission soutient que le Tribunal aurait relevé à juste titre, au point 120 de l’arrêt attaqué, que le requérant n’a pas soulevé d’exception d’illégalité à l’encontre de l’article 44 du statut et de l’article 7, paragraphe 4, de son annexe XIII. Si le requérant entendait toutefois, devant la Cour, soulever un tel moyen, il modifierait l’objet du litige de première instance, ce qui rendrait sa demande manifestement irrecevable en vertu de l’article 113, paragraphe 2, du règlement de procédure.

 Appréciation de la Cour

21      Il y a, tout d’abord, lieu de relever que c’est sans dénaturer le recours qui lui était soumis que le Tribunal a constaté que M. Sack n’avait pas soulevé, devant lui, de moyen tiré de l’illégalité des dispositions du statut qui prévoient l’octroi de la prime de fonctions aux seuls fonctionnaires nommés chef d’unité, directeur ou directeur général. Un tel moyen ne peut être considéré comme soulevé par le fait que le requérant a évoqué la méconnaissance du principe d’égalité.

22      C’est, en outre, sans entacher son arrêt d’erreur de droit que le Tribunal s’est abstenu d’examiner un tel moyen au motif que celui-ci n’avait pas été expressément soulevé par le requérant. Il appartient en effet à celui qui forme un recours d’indiquer expressément les moyens de droit qu’il soulève à l’appui de ses conclusions.

23      Enfin, et à supposer que M. Sack entende, devant la Cour, soulever un tel moyen, il y aurait lieu de l’écarter comme manifestement irrecevable. En effet, permettre à une partie de soulever pour la première fois devant la Cour un moyen qu’elle n’a pas soulevé devant le Tribunal reviendrait à lui permettre de saisir la Cour, dont la compétence en matière de pourvoi est limitée, d’un litige plus étendu que celui dont a eu à connaître le Tribunal. Dans le cadre d’un pourvoi, la compétence de la Cour est limitée à l’appréciation de la solution légale qui a été donnée aux moyens débattus devant les premiers juges (voir arrêt du 1er juin 1994, Commission/Brazzelli Lualdi e.a., C‑136/92 P, Rec. p. I‑1981, points 58 et 59).

24      Le premier moyen du pourvoi doit, par suite, être écarté comme manifestement non fondé et, à supposer que M. Sack entende exciper devant la Cour de l’illégalité des dispositions pertinentes du statut, comme manifestement irrecevable.

 Sur le deuxième moyen

 Argumentation des parties

25      M. Sack soutient que le Tribunal aurait violé les «règles de la logique juridique» en laissant sans réponse deux questions de droit. D’une part, le Tribunal n’aurait pas statué, au point 122 de son arrêt, sur la question de savoir si la Commission a ou non adopté une position erronée en accordant la prime de fonctions à certaines catégories de fonctionnaires qu’il a énumérées et qu’elle aurait à tort assimilées aux chefs d’unité. D’autre part, il découlerait du point 123 de l’arrêt attaqué que le Tribunal n’aurait pas examiné si les fonctions exercées par les catégories de fonctionnaires en cause sont équivalentes à celles de M. Sack.

26      M. Sack fait également valoir que le Tribunal aurait «refusé» de procéder à un examen comparatif de sa situation et de celle d’autres catégories de fonctionnaires bénéficiaires de la prime. Ce faisant, le Tribunal aurait méconnu le principe d’égalité et aurait privé le requérant du droit à une protection juridictionnelle effective.

27      La Commission conteste la recevabilité de ce moyen, soutenant que les «règles de la logique juridique» ne constituent pas en tant que telles un principe général du droit et que le requérant ne précise en aucune manière quelles «règles de la logique juridique» le Tribunal aurait violées.

28      À titre subsidiaire, la Commission soutient que ce serait à juste titre que le Tribunal a omis d’examiner si les catégories de fonctionnaires mentionnées par le requérant bénéficient à tort de la prime de fonctions, car le requérant n’a aucun intérêt à agir à cet égard. Ce serait à bon droit que le Tribunal a constaté que le requérant ne pouvait pas se prévaloir de ce que d’autres catégories de fonctionnaires auraient bénéficié à tort de la prime de fonctions. Ce serait également à bon droit que le Tribunal a, au point 123 de son arrêt, renoncé à examiner si les fonctions exercées par les catégories de fonctionnaires susmentionnées sont comparables à celles du requérant. En effet, en première instance, le requérant n’aurait pas affirmé que sa fonction devait être assimilée à celle d’un chef adjoint de délégation ou à d’autres catégories de fonctionnaires mentionnées dans les décisions de la Commission.

29      Pour la Commission, le requérant ne reviendrait pas sur son argumentation résumée au point 84 de l’arrêt attaqué, selon laquelle les chefs adjoints de délégation ne sont pas chargés de la «direction permanente et continue d’une unité administrative», contrairement aux chefs d’unité. Il ne saurait donc reprocher au Tribunal de ne pas l’avoir comparé à une catégorie de fonctionnaires, en l’occurrence les chefs adjoints de délégation, qui, selon les propres termes du requérant, n’aurait pas droit à une prime de fonctions. Le requérant n’aurait en outre, à aucun moment, allégué que son travail était comparable à celui des autres fonctionnaires bénéficiaires de la prime.

 Appréciation de la Cour

30      La fin de non‑recevoir opposée par la Commission au deuxième moyen doit être rejetée. D’une part, et ainsi que la Cour l’a déjà jugé, la présentation d’un moyen par sa substance plutôt que par sa qualification légale peut suffire (voir, en ce sens, arrêt du 15 décembre 1961, Fives Lille Cail e.a./Haute Autorité, 19/60, 21/60, 2/61 et 3/61, Rec. p. 559). Tel est le cas en l’espèce, le moyen soulevé étant tiré de ce que, selon le requérant, l’arrêt attaqué est entaché d’une erreur de droit. Le moyen est, d’autre part, assorti des précisions suffisantes permettant d’en apprécier le bien-fondé. Par suite, il est recevable.

31      Ce moyen doit toutefois être écarté comme manifestement non fondé.

32      C’est, tout d’abord, à bon droit que le Tribunal a jugé que le principe d’égalité de traitement n’ouvre pas au fonctionnaire le droit de réclamer un avantage financier illégalement accordé à un autre fonctionnaire. Nul ne peut en effet invoquer à son profit une illégalité commise en faveur d’autrui (voir, en ce sens, arrêt du 9 octobre 1984, Witte/Parlement, 188/83, Rec. p. 3465, point 15).

33      Après avoir ainsi constaté à bon droit, au point 122 de l’arrêt attaqué, le caractère inopérant du moyen tiré de la méconnaissance du principe d’égalité entre le requérant et les catégories de fonctionnaires qu’il invoquait, le Tribunal a pu légalement s’abstenir d’examiner le point de savoir si ces fonctionnaires exerçaient des fonctions comparables à celles exercées par M. Sack. L’arrêt attaqué n’est, dès lors, entaché d’erreur de droit ni sur le premier point ni sur le second.

34      Le deuxième moyen doit, par suite, être écarté comme manifestement non fondé.

 Sur le troisième moyen

 Argumentation des parties

35      Le requérant soutient que le Tribunal aurait, à tort, refusé d’examiner si le principe d’égalité conduisait à assimiler les fonctions qu’il exerçait à celles de chef d’unité. La notion de chef d’unité aurait été interprétée à tort de manière restrictive par l’arrêt attaqué, alors que le respect du principe d’égalité imposait de lui donner un sens large. Le raisonnement du Tribunal dénaturerait, en outre, l’argumentation soulevée devant lui par le requérant, dès lors qu’il aurait considéré que celui-ci soutenait avoir occupé des fonctions de chef d’unité, alors qu’il soutenait en réalité que le principe d’égalité devait conduire à assimiler ses fonctions à celles d’un chef d’unité.

36      La Commission soutient qu’il ressortirait du point 124 de l’arrêt attaqué que le Tribunal a compris l’argumentation avancée par le requérant en ce sens que, ce dernier exerçant lui aussi les fonctions d’un chef d’unité au sens du statut, il avait droit à la prime de fonctions. Le Tribunal n’aurait donc en aucune manière examiné si le requérant était chef d’unité, mais uniquement si, à la lumière de son argumentation, il pouvait être assimilé à un chef d’unité. La Commission rappelle que le Tribunal a examiné cette question à partir du point 125 de son arrêt et, à la suite de cet examen approfondi, a jugé au point 140 dudit arrêt que les responsabilités exercées par le requérant ne sont pas comparables à celles d’un chef d’unité. Aux points 141 à 149 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a constaté que la fonction du requérant ne devait, dès lors, en aucune manière, être assimilée à celle d’un chef d’unité. Le requérant ne saurait, dans ces conditions, soutenir que le Tribunal n’a pas examiné sa thèse selon laquelle il aurait exercé des fonctions assimilables à celles d’un chef d’unité.

 Appréciation de la Cour

37      Le Tribunal, après avoir écarté, au point 122 de l’arrêt attaqué, comme inopérant le moyen tiré de la méconnaissance du principe d’égalité entre le requérant et certains fonctionnaires qui, selon M. Sack, toucheraient indûment la prime de fonctions, s’est attaché à examiner si les fonctions exercées par le requérant pouvaient être assimilées à celles d’un chef d’unité au sens du statut et si, de ce fait, M. Sack pouvait valablement prétendre, à l’instar des chefs d’unité, au bénéfice de cette prime. Le Tribunal, contrairement à ce qui est soutenu, ne s’est pas refusé à examiner l’argumentation du requérant mais, bien au contraire, a procédé à un examen minutieux des fonctions qu’il occupait afin de savoir si elles pouvaient être assimilées à celles d’un chef d’unité et, par suite, si le requérant devait, conformément au principe d’égalité, bénéficier de la prime de fonctions.

38      Dans cet examen, le Tribunal n’était pas tenu, contrairement à ce que soutient le requérant, d’adopter une interprétation large de la notion de chef d’unité. C’est à bon droit que l’arrêt attaqué rappelle que les dispositions ouvrant droit à des prestations financières doivent être interprétées strictement (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 6 mai 1982, BayWa e.a., 146/81, 192/81 et 193/81, Rec. p. 1503, point 10).

39      M. Sack n’est, par conséquent, pas fondé à soutenir que l’arrêt attaqué devrait être annulé faute pour le Tribunal d’avoir répondu au moyen qui tendait à assimiler les fonctions qu’il exerçait à celles de chef d’unité.

40      Le Tribunal n’a pas non plus, dans son interprétation du moyen, dénaturé sa portée. M. Sack faisait en substance valoir, devant le Tribunal, qu’il exerçait des fonctions de coordination spécifiques et que son activité était comparable à celle d’un chef d’unité. Le Tribunal, qui n’a pas, contrairement à ce qu’affirme M. Sack, examiné si le requérant occupait formellement des fonctions de chef d’unité, n’a nullement dénaturé la portée de cette argumentation en considérant qu’il devait, pour y répondre, examiner si M. Sack pouvait être considéré comme ayant exercé des fonctions assimilables à celles de chef d’unité au sens du statut.

41      Il résulte de ce qui précède que le troisième moyen doit être écarté comme manifestement non fondé.

 Sur le quatrième moyen

 Argumentation des parties

42      Le requérant soutient qu’il remplit, en tant que chef de «task force», les critères pour être considéré comme un chef d’unité prévus par les deux premiers tirets de l’article 4, deuxième alinéa, de la décision du 28 avril 2004. S’il reconnaît ne pas remplir formellement le critère tiré de la qualité de supérieur hiérarchique, M. Sack soutient qu’il a toutefois démontré qu’il était, au moins partiellement, responsable de la gestion des ressources humaines de la «task force», à l’exception de la notation, ce qui ne saurait être une circonstance décisive pour l’octroi de la prime. La seule circonstance qu’il n’était pas formellement le supérieur hiérarchique de la plupart des fonctionnaires qui collaboraient avec lui ne suffirait pas à le différencier, compte tenu du principe d’égalité, d’un chef d’unité.

43      Le Tribunal aurait commis une erreur en se contentant de chercher, d’un point de vue formel, si M. Sack dirigeait une «unité». Il ne pouvait, à cet égard, se fonder sur la circonstance que deux fonctionnaires aient été affectés à d’autres services. Si la «task force» chargée de l’élargissement était en effet dépourvue de ressources humaines propres, elle apparaissait sur l’organigramme du service et avait sa place dans l’organisation administrative de la Commission. L’absence de ressources humaines propres ne saurait constituer un critère décisif du point de vue de l’exécution des tâches de direction.

44      La Commission relève que cette argumentation démontrerait que le requérant aurait compris que le Tribunal, aux points 124 à 150 de son arrêt, a examiné, à la lumière du principe d’égalité de traitement, si ses fonctions étaient comparables à celles d’un chef d’unité. Elle soutient en outre que la Cour, dans le cadre d’un pourvoi, ne serait compétente ni pour réexaminer des faits constatés en première instance ni pour porter sur eux une appréciation qui ne relèverait que du Tribunal.

 Appréciation de la Cour

45      Le contrôle exercé par la Cour dans le cadre d’un pourvoi est, conformément aux articles 225, paragraphe 1, CE et 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice, limité aux questions de droit, sous réserve de la dénaturation des faits de l’espèce. Il convient par suite de distinguer, dans le présent moyen, les éléments qui soulèvent une question de droit de ceux qui tendent seulement à remettre en cause l’appréciation des faits à laquelle s’est livré le Tribunal.

46      Au titre des questions qui relèvent du contrôle exercé par la Cour dans le cadre d’un pourvoi, il y a tout d’abord lieu de relever que le Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant que la notion d’«unité» doit être définie comme une structure administrative distincte, intégrée dans l’organisation administrative d’une institution et dotée de ressources humaines, et souvent financières, qui lui sont propres.

47      C’est donc à bon droit que le Tribunal a, partant de cette notion, examiné si le groupe «task force» que M. Sack animait répondait à ces critères et si ce groupe aurait dû, par conséquent, être assimilé à une «unité».

48      C’est également sans entacher son arrêt d’erreur de droit que le Tribunal a jugé que la direction d’une unité suppose d’avoir la qualité de supérieur hiérarchique et que cette dernière qualité implique l’exercice de responsabilités administratives, au nombre desquelles figure l’évaluation des agents placés sous l’autorité du supérieur hiérarchique. C’est donc à bon droit que le Tribunal a recherché si M. Sack était chargé de telles responsabilités administratives, comparables à celles d’un chef d’unité.

49      Par suite, le quatrième moyen doit, dans cette mesure, être écarté comme manifestement non fondé.

50      Pour le surplus, l’argumentation du requérant tend à démontrer devant la Cour que, d’une part, le groupe qu’il animait était bien une unité et que, d’autre part, il en était réellement le chef. Cette argumentation remet en cause l’appréciation des faits qui relevait du seul Tribunal et à laquelle il s’est livré sans dénaturation. Cette question échappe, par conséquent, au contrôle exercé par la Cour dans le cadre d’un pourvoi qui est, ainsi qu’il est rappelé au point 45 du présent arrêt, limité aux questions de droit.

51      Cette partie du quatrième moyen doit, de ce fait, être écarté comme manifestement irrecevable.

52      Aucun des moyens du pourvoi n’étant fondé, il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi doit être rejeté.

 Sur les dépens

53      Aux termes de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 118 du même règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. En vertu de l’article 70 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés européennes et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci. Toutefois, en application de l’article 122, deuxième alinéa, premier tiret, dudit règlement, ledit article 70 n’est pas applicable au pourvoi formé par un fonctionnaire ou tout autre agent d’une institution contre celle-ci. La Commission ayant conclu à la condamnation de M. Sack et ce dernier ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de le condamner à supporter, outre ses propres dépens, les dépens de la Commission.

Par ces motifs, la Cour (sixième chambre) ordonne:

1)      Le pourvoi est rejeté.

2)      M. Sack supporte, outre ses propres dépens, les dépens de la Commission des Communautés européennes.

Signatures


* Langue de procédure: l’allemand.