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ORDONNANCE DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

11 janvier 2024 (*)

« Fonction publique – Agents contractuels – Rémunération – Indemnité d’installation – Exécution d’un arrêt du Tribunal – Décision non contestée dans les délais – Engagement conditionnel pris dans le contexte d’un règlement amiable – Demande de paiement de l’indemnité d’installation sur le fondement de l’article 90, paragraphe 1, du statut – Irrecevabilité – Demande d’injonction – Incompétence manifeste »

Dans l’affaire T‑417/23,

TO, représentée par Me É. Boigelot, avocat,

partie requérante,

contre

Agence européenne pour l’environnement (AEE), représentée par M. O. Cornu, en qualité d’agent, assisté de Me B. Wägenbaur, avocat,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. J. Svenningsen (rapporteur), président, J. Laitenberger et J. Martín y Pérez de Nanclares, juges,

greffier : M. V. Di Bucci,

rend la présente

Ordonnance

1        Par son recours fondé sur l’article 270 TFUE, la requérante, TO, demande en substance, en premier lieu, que l’Agence européenne pour l’environnement (AEE) soit condamnée au paiement, d’une part, d’un montant de 2 950 euros, correspondant à l’avance sur l’indemnité d’installation déduite des sommes qui lui ont été versées en exécution de l’arrêt du 11 juin 2019, TO/AEE (T‑462/17, non publié, EU:T:2019:397), majoré d’intérêts au taux de 5 % par année depuis le 1er août 2019 et, d’autre part, d’un montant de 22 000 euros à titre de réparation des préjudices matériel et moral qu’elle aurait subis et, en second lieu, qu’elle fournisse une explication lui permettant de comprendre à quoi correspond la retenue supplémentaire de 500 euros qui apparaît sur son bulletin de rémunération du mois d’août 2019 et, le cas échéant, qu’elle rembourse ce montant si cette récupération n’est pas fondée.

 Antécédents du litige

2        La requérante est un ancien agent contractuel de l’AEE.

 Sur les faits ayant donné lieu à l’ordonnance du 13 janvier 2021, TO/AEE (T652/20, non publiée)

3        Le Tribunal, par arrêt du 11 juin 2019, TO/AEE (T‑462/17, non publié, EU:T:2019:397), a annulé la décision de résilier le contrat de la requérante et condamné l’AEE à lui verser, en premier lieu, une somme correspondant à un mois de rémunération due au titre du préavis applicable et à un tiers de son traitement de base par mois de stage accompli, déduction faite de l’indemnité de licenciement qu’elle avait déjà perçue et, en second lieu, un montant de 6 000 euros en réparation des préjudices subis.

4        En exécution de l’arrêt du 11 juin 2019, TO/AEE (T‑462/17, non publié, EU:T:2019:397), la requérante a notamment reçu un paiement de 7 261,27 euros, déduction faite d’un montant de 2 950 euros correspondant à l’avance sur l’indemnité d’installation qui lui avait été versée lors de sa prise de fonctions. Elle a pris connaissance de cette décision en consultant son bulletin de rémunération du mois d’août 2019 établi par un autre organe de l’Union européenne auprès duquel elle était employée à ce moment-là.

5        Le Tribunal, par ordonnance du 13 janvier 2021, TO/AEE (T‑652/20, non publiée, EU:T:2021:8), a rejeté le recours de la requérante, ayant en substance pour objet, d’une part, l’annulation des mesures d’exécution de l’arrêt du 11 juin 2019, TO/AEE (T‑462/17, non publié, EU:T:2019:397), et, d’autre part, la réparation des préjudices prétendument subis, notamment celui qui résulterait de la divulgation de ses données personnelles à son nouvel employeur, comme étant manifestement irrecevable.

 Sur les faits ayant donné lieu à l’ordonnance du 10 février 2022, TO/AEE (T434/21, non publiée)

6        Par courriels des 14, 16 et 21 septembre 2020 ainsi que du 2 octobre 2020, les conseils de l’AEE et de la requérante ont discuté des termes d’un règlement amiable éventuel consistant à reconnaître à la requérante le bénéfice de l’indemnité d’installation en lui versant un montant de 2 950 euros, augmenté des intérêts, sans toutefois parvenir à un accord.

7        Le Tribunal, par ordonnance du 10 février 2022, TO/AEE (T‑434/21, non publiée, EU:T:2022:72), a rejeté le recours de la requérante, ayant pour objet, d’une part, l’annulation de la prétendue décision contenue dans le courriel du conseil de l’AEE du 21 septembre 2020 par laquelle cette agence aurait refusé d’exécuter l’arrêt du 11 juin 2019, TO/AEE (T‑462/17, non publié, EU:T:2019:397), et, d’autre part, la réparation des préjudices prétendument subis, notamment celui qui résulterait de la divulgation de ses données personnelles à son nouvel employeur, comme étant irrecevable.

 Sur les faits à l’origine du présent recours

8        Par courriel du 17 août 2020, le conseil de l’AEE a indiqué au conseil de la requérante que cette agence « marqu[ait] son accord pour rembourser à [la requérante] le montant de l’indemnité d’installation qui avait été déduit dans un premier temps dans le cadre de l’exécution de [l’arrêt du 11 juin 2019, TO/AEE (T‑462/17, non publié, EU:T:2019:397)] » et qu’elle « s’engage[ait] à signer dans les meilleurs délais un règlement amiable qui confirme cet accord et le fait que les parties renoncent à toutes revendications l’une envers l’autre et renoncent à toute forme de procédure, fut-elle contentieuse ou non » (ci-après le « courriel du 17 août 2020 »).

9        Le 11 juin 2022, la requérante, sur le fondement de l’article 90, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut »), a saisi l’AEE d’une demande tendant à obtenir le paiement, d’une part, d’un montant de 2 950 euros, correspondant à l’avance sur l’indemnité d’installation déduite des sommes qui lui ont été versées en exécution de l’arrêt du 11 juin 2019, TO/AEE (T‑462/17, non publié, EU:T:2019:397), majoré d’intérêts au taux de 5 % par année depuis le 1er août 2019 et, d’autre part, d’un montant de 22 000 euros à titre de réparation des préjudices matériel et moral prétendument subis (ci-après la « demande du 11 juin 2022 »). La requérante indiquait notamment que cette demande avait seulement pour objet d’exiger de l’administration qu’elle agisse en conformité avec l’engagement qui aurait été pris dans le courriel du 17 août 2020 de lui rembourser un montant de 2 950 euros.

10      Par décision du 3 octobre 2022, notifiée à la requérante le 6 octobre, l’AEE a rejeté la demande du 11 juin 2022 (ci-après la « décision du 3 octobre 2022 »). Elle a estimé qu’il n’était ni nécessaire ni justifié de prendre une décision en réponse à cette demande car elle avait le même objet que le recours ayant donné lieu à l’ordonnance du 10 février 2022, TO/AEE (T‑434/21, non publiée, EU:T:2022:72).

11      Le 29 décembre 2022, la requérante, sur le fondement de l’article 90, paragraphe 2, du statut, a introduit une réclamation contre la décision du 3 octobre 2022. En l’absence de réponse de l’AEE à cette réclamation dans le délai de quatre mois prévu à l’article 90, paragraphe 2, du statut, celle-ci a fait l’objet d’une décision implicite de rejet (ci-après la « décision implicite de rejet de la réclamation »).

 Conclusions des parties

12      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision du 3 octobre 2022 et la décision implicite de rejet de la réclamation ;

–        condamner l’AEE au paiement, d’une part, d’un montant de 2 950 euros correspondant au montant de l’indemnité d’installation « retenue irrégulièrement dans le cadre de l’exécution fautive » de l’arrêt du 11 juin 2019, TO/AEE (T‑462/17, non publié, EU:T:2019:397), majoré d’intérêts au taux de 5 % par année depuis le 1er août 2019 et, d’autre part, d’un montant de 22 000 euros en réparation des préjudices matériel et moral prétendument subis ;

–        ordonner à l’AEE de fournir une explication permettant de comprendre à quoi correspond la retenue supplémentaire de 500 euros qui apparaît sur son bulletin de rémunération du mois d’août 2019 et, le cas échéant, condamner l’AEE à rembourser ce montant s’il s’avère que cette récupération n’est pas fondée ;

–        condamner l’AEE aux dépens.

13      Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 27 septembre 2023, l’AEE, au titre de l’article 130, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, a soulevé une exception d’irrecevabilité dans laquelle elle conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme étant « manifestement » irrecevable ;

–        condamner la requérante aux dépens.

14      Le 5 novembre 2023, la requérante a déposé ses observations sur l’exception d’irrecevabilité, dans lesquelles elle conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        à titre principal, joindre l’examen de l’exception d’irrecevabilité au fond ;

–        à titre subsidiaire, rejeter l’exception d’irrecevabilité comme étant non fondée ;

–        en tout cas, condamner l’AEE aux dépens.

 En droit

15      Aux termes de l’article 130, paragraphes 1 et 7, du règlement de procédure, si la partie défenderesse le demande, le Tribunal peut statuer sur l’irrecevabilité ou l’incompétence sans engager le débat au fond. En outre, en vertu de l’article 126 du règlement de procédure, lorsque le Tribunal est manifestement incompétent pour connaître d’un recours ou lorsque celui-ci est manifestement dépourvu de tout fondement en droit, le Tribunal peut, sur proposition du juge rapporteur, à tout moment décider de statuer par voie d’ordonnance motivée, sans poursuivre la procédure.

16      En l’espèce, le Tribunal, s’estimant suffisamment éclairé par les pièces du dossier, décide de statuer par voie d’ordonnance sans poursuivre la procédure.

17      À l’appui de son exception d’irrecevabilité, l’AEE fait notamment valoir que, d’une part, la requérante n’a pas contesté en temps utile la décision de déduire un montant de 2 950 euros des sommes versées en exécution de l’arrêt du 11 juin 2019, TO/AEE (T‑462/17, non publié, EU:T:2019:397), et que, d’autre part, le courriel du 17 août 2020 ne comporte aucune décision par laquelle il aurait été reconnu que la requérante avait droit au paiement de ce montant.

18      Dans la requête et dans ses observations sur l’exception d’irrecevabilité, la requérante soutient, en substance, que, dans le courriel du 17 août 2020, l’AEE aurait reconnu avoir déduit, à tort, un montant de 2 950 euros des sommes versées en exécution de l’arrêt du 11 juin 2019, TO/AEE (T‑462/17, non publié, EU:T:2019:397), et que la demande du 11 juin 2022 aurait été introduite dans un délai raisonnable à compter de cette déduction. En se référant à l’arrêt du 27 février 2018, Zink/Commission (T‑338/16 P, non publié, EU:T:2018:98), la requérante soutient que la demande du 11 juin 2022 avait seulement pour objet d’inviter l’AEE à agir en conformité avec l’engagement pris dans le courriel du 17 août 2020 de lui rembourser la somme de 2 950 euros.

 Sur le premier chef de conclusions

19      Par son premier chef de conclusions, la requérante demande l’annulation de la décision du 3 octobre 2022 et de la décision implicite de rejet de la réclamation.

20      À cet égard, il suffit de constater que la décision du 3 octobre 2022 et la décision implicite de rejet de la réclamation se bornent à rejeter la demande en indemnité présentée par la requérante. Ces décisions ont ainsi uniquement pour effet de permettre à la requérante qui allègue avoir subi un préjudice de saisir le Tribunal d’une demande en indemnité (voir, en ce sens, ordonnance du 18 février 2009, Marcuccio/Commission, F‑70/07, EU:F:2009:15, point 14 et jurisprudence citée).

21      Dès lors, il n’y a pas lieu de statuer de façon autonome sur les conclusions en annulation par rapport aux conclusions en indemnité, le présent recours ayant uniquement pour objet d’obtenir le paiement, premièrement, d’un montant de 2 950 euros, correspondant à l’avance sur l’indemnité d’installation déduite des sommes versées en exécution de l’arrêt du 11 juin 2019, TO/AEE (T‑462/17, non publié, EU:T:2019:397), majoré d’intérêts au taux de 5 % par année depuis le 1er août 2019, deuxièmement, d’un montant de 22 000 euros en réparation des préjudices matériel et moral prétendument subis et, troisièmement, le cas échéant, d’un montant de 500 euros.

 Sur le deuxième chef de conclusions

22      Par son deuxième chef de conclusions, la requérante demande, en premier lieu, le remboursement d’un montant de 2 950 euros « correspondant au montant de l’indemnité [d’installation] retenue irrégulièrement dans le cadre de l’exécution fautive de l’[arrêt du 11 juin 2019, TO/AEE (T‑462/17, non publié, EU:T:2019:397)] », majoré d’intérêts au taux de 5 % par année depuis le 1er août 2019 et, en second lieu, le paiement d’une indemnité de 22 000 euros en réparation des préjudices matériel et moral prétendument subis.

23      S’agissant de la demande de remboursement du montant de 2 950 euros, il convient de rappeler que le recours en annulation et le recours en indemnité sont des voies autonomes de recours. Les articles 90 et 91 du statut ne faisant aucune distinction entre ces deux recours, en ce qui concerne la procédure tant administrative que contentieuse, le fonctionnaire peut choisir, en raison de l’autonomie de ces différentes voies de droit distinctes, soit l’une, soit l’autre, soit les deux conjointement, à condition de saisir le juge de l’Union dans le délai de trois mois après le rejet de sa réclamation (voir arrêt du 18 septembre 2018, Barroso Truta e.a./Cour de justice de l’Union européenne, T‑702/16 P, EU:T:2018:557, point 66 et jurisprudence citée).

24      Cependant, la jurisprudence a posé une exception à ce principe lorsque l’action en indemnité comporte un lien étroit avec l’action en annulation, par ailleurs déclarée irrecevable (voir arrêt du 6 février 2007, Wunenburger/Commission, T‑246/04 et T‑71/05, EU:T:2007:34, point 47 et jurisprudence citée).

25      Ainsi, selon une jurisprudence constante, les conclusions en indemnité sont irrecevables lorsque l’action en indemnité tend exclusivement à faire réparer les conséquences de l’acte qui était visé dans l’action en annulation, elle-même déclarée irrecevable, notamment lorsque l’action en indemnité a pour seul objet de compenser des pertes de rémunération qui n’auraient pas eu lieu si, par ailleurs, l’action en annulation avait prospéré (voir arrêt du 6 février 2007, Wunenburger/Commission, T‑246/04 et T‑71/05, EU:T:2007:34, point 47 et jurisprudence citée).

26      Il découle de cette jurisprudence que la faculté d’introduire une demande au sens de l’article 90, paragraphe 1, du statut ne saurait permettre au fonctionnaire ou à l’agent d’écarter les délais prévus par les articles 90 et 91 du statut pour l’introduction de la réclamation et du recours, en mettant indirectement en cause, par le biais d’une telle demande, une décision antérieure qui n’aurait pas été contestée dans les délais. Ces délais, institués en vue d’assurer la clarté et la sécurité des situations juridiques, sont d’ordre public et les parties ne peuvent s’y soustraire (voir arrêt du 3 mars 2022, WV/SEAE, C‑171/20 P, non publié, EU:C:2022:154, point 55 et jurisprudence citée).

27      En l’espèce, la requérante a pris connaissance des mesures adoptées par l’AEE en exécution de l’arrêt du 11 juin 2019, TO/AEE (T‑462/17, non publié, EU:T:2019:397), y compris la décision de l’AEE de déduire un montant de 2 950 euros des sommes qui lui ont été versées en exécution de cet arrêt, en consultant son bulletin de rémunération du mois d’août 2019.

28      Or, le recours de la requérante visant notamment l’annulation de cette décision a été rejeté par ordonnance du 13 janvier 2021, TO/AEE (T‑652/20, non publiée, EU:T:2021:8), comme étant manifestement irrecevable au motif qu’il n’avait pas été introduit dans les délais impartis.

29      Partant, en vertu de la jurisprudence mentionnée ci-dessus, la requérante ne saurait, par la présentation d’une demande indemnitaire au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut, remettre en cause la décision antérieure de l’AEE de déduire un montant de 2 950 euros des sommes versées en exécution de l’arrêt du 11 juin 2019, TO/AEE (T‑462/17, non publié, EU:T:2019:397), à l’encontre de laquelle elle n’a pas intenté de recours en temps utile.

30      Ce constat n’est pas infirmé par le contenu du courriel du 17 août 2020 dont la requérante allègue qu’il renferme une décision de l’AEE lui reconnaissant le droit au remboursement de l’indemnité d’installation.

31      À cet égard, la requérante ne saurait utilement se prévaloir de la jurisprudence selon laquelle une demande de paiement d’une indemnité à laquelle l’intéressé a droit et qui, à tort, n’a pas été versée n’est soumise au respect d’aucun délai étant donné que, dans un tel cas, il n’existe aucun risque de mettre en péril une situation juridique acquise, une telle demande s’inscrivant seulement dans l’ordre de la bonne exécution des engagements juridiques et budgétaires pris par l’administration (voir, en ce sens, arrêt du 27 février 2018, Zink/Commission, T‑338/16 P, non publié, EU:T:2018:98, point 38).

32      En effet, en l’occurrence, il ne ressort pas du courriel du 17 août 2020 que l’AEE ait adopté une décision par laquelle elle aurait reconnu que la requérante avait droit à l’indemnité d’installation et, par conséquent, au remboursement d’un montant de 2 950 euros.

33      Certes, le conseil de l’AEE a indiqué que cette agence avait « marqu[é] son accord pour rembourser [à la requérante] le montant de l’indemnité d’installation qui avait été déduit dans un premier temps dans le cadre de l’exécution de [l’arrêt du 11 juin 2019, TO/AEE (T‑462/17, non publié, EU:T:2019:397)] ».

34      Toutefois, ce même conseil a aussi précisé que cette agence s’engageait « à signer dans les meilleurs délais un règlement amiable qui confirme cet accord et le fait que les parties renoncent à toutes revendications l’une envers l’autre et renoncent à toute forme de procédure, fut-elle contentieuse ou non ».

35      Il en découle que l’« accord » sur le remboursement de l’indemnité d’installation s’inscrivait dans le contexte de négociations entre les parties visant à permettre le règlement amiable du litige qui les oppose sur la légalité des mesures d’exécution de l’arrêt du 11 juin 2019, TO/AEE (T‑462/17, non publié, EU:T:2019:397), adoptées au mois d’août 2019.

36      Or, il ne ressort pas du dossier que les parties soient parvenues à un accord amiable au terme duquel l’AEE se serait engagée de façon inconditionnelle à rembourser à la requérante un montant de 2 950 euros correspondant à l’indemnité d’installation déduite des sommes versées en exécution de l’arrêt du 11 juin 2019, TO/AEE (T‑462/17, non publié, EU:T:2019:397). En l’absence d’un tel accord amiable, le courriel du 17 août 2020 peut tout au plus être compris comme constituant la déclaration d’une intention de l’administration de résoudre le différend par la voie amiable (voir, en ce sens, ordonnance du 10 février 2022, TO/AEE, T‑434/21, non publiée, EU:T:2022:72, points 28 à 32).

37      Il s’ensuit que le courriel du 17 août 2020 ne comporte pas de décision de l’AEE reconnaissant à la requérante un droit inconditionnel au paiement d’un montant de 2 950 euros correspondant à l’indemnité d’installation déduite des sommes versées en exécution de l’arrêt du 11 juin 2019, TO/AEE (T‑462/17, non publié, EU:T:2019:397). Ce courriel n’établit pas non plus que l’AEE aurait reconnu avoir commis une quelconque faute lors de l’exécution de cet arrêt.

38      Compte tenu de ce qui précède, la demande du 11 juin 2022 par laquelle la requérante a demandé le paiement d’un montant de 2 950 euros correspondant au montant de l’indemnité d’installation « retenue irrégulièrement dans le cadre de l’exécution fautive de [l’arrêt du 11 juin 2019, TO/AEE (T‑462/17, non publié, EU:T:2019:397)] », majoré d’intérêts au taux de 5 % par année depuis le 1er août 2019 est irrecevable.

39      Quant à la demande de paiement d’un montant de 22 000 euros en réparation des préjudices matériel et moral prétendument subis, la requérante la justifie, dans la demande du 11 juin 2022, par le fait que « les refus répétés de lui verser ce qui, manifestement, a été déduit à tort des sommes lui étant dues, en violation des règles statutaires […], constituent une attitude téméraire et vexatoire ». Elle ajoute que la notification de la décision de déduire un montant de 2 950 euros des sommes qui lui ont été versées par le biais d’un bulletin de rémunération établi par un autre organe de l’Union lui a causé un préjudice en ce que l’AEE aurait ainsi divulgué ses données personnelles à son nouvel employeur. Par ailleurs, la requérante estime avoir subi un préjudice du fait d’avoir dû « faire appel aux services d’un avocat » pour faire valoir ses droits.

40      En premier lieu, il suffit de constater que les « refus répétés » de l’AEE de verser à la requérante un montant de 2 950 euros et le préjudice lié à la prétendue divulgation de ses données personnelles découlent uniquement de la décision dont elle a pris connaissance en consultant son bulletin de rémunération du mois d’août 2019 et à l’encontre de laquelle elle a omis d’intenter un recours en temps utile.

41      Par ailleurs, le Tribunal observe qu’il ressort des ordonnances du 13 janvier 2021, TO/AEE (T‑652/20, non publiée, EU:T:2021:8), et du 10 février 2022, TO/AEE (T‑434/21, non publiée, EU:T:2022:72), que l’AEE a déjà rejeté de précédentes demandes de réparation du même préjudice découlant de la prétendue divulgation de ses données personnelles à des tiers. Ces rejets ne sauraient être indirectement remis en cause par le biais d’une demande présentée sur le fondement de l’article 90, paragraphe 1, du statut.

42      En conséquence, cette partie de la demande de réparation des préjudices prétendument subis est irrecevable.

43      En second lieu, il y a lieu de rappeler que les frais exposés par les parties aux fins de la procédure juridictionnelle ne sauraient être considérés comme constituant un préjudice distinct de la charge des dépens de l’instance (arrêt du 10 juin 1999, Commission/Montorio, C‑334/97, EU:C:1999:290, point 54). Partant, la demande de la requérante visant à obtenir le dédommagement des frais d’avocat engagés dans le cadre de cette procédure juridictionnelle ne saurait être accueillie puisque ces frais constituent les dépens de l’instance.

44      Quant aux frais exposés aux fins de la procédure précontentieuse, il ressort d’une jurisprudence constante que, lorsqu’une représentation par un avocat ou un conseil dans le cadre d’une procédure précontentieuse n’est pas obligatoire, comme c’est le cas de la procédure instituée par les articles 90 et 91 du statut, l’existence d’un lien de causalité entre le prétendu dommage, à savoir les frais d’une telle représentation, et le comportement éventuellement reprochable de l’institution ou de l’organisme fait défaut. En effet, bien qu’il ne puisse pas être interdit à l’intéressé de s’assurer dès cette phase de conseils d’avocat, il s’agit de son propre choix qui ne peut, par conséquent, être imputé à l’institution ou à l’organisme concerné (voir, en ce sens, arrêts du 9 mars 1978, Herpels/Commission, 54/77, EU:C:1978:45, points 46 à 49 ; du 28 juin 2007, Internationaler Hilfsfonds/Commission, C‑331/05 P, EU:C:2007:390, points 24 à 29, et du 8 juillet 2008, Franchet et Byk/Commission, T‑48/05, EU:T:2008:257, points 415 et 416).

45      En conséquence, cette partie de la demande de réparation du préjudice prétendument subi doit être rejetée comme étant manifestement dépourvue de tout fondement en droit.

46      Il découle de ce qui précède que la demande du 11 juin 2022 par laquelle la requérante a demandé le paiement d’un montant de 22 000 euros en réparation des préjudices matériel et moral prétendument subis est en partie irrecevable et en partie manifestement dépourvue de tout fondement en droit.

47      Par conséquent, le deuxième chef de conclusions doit être rejeté comme étant en partie irrecevable et en partie manifestement dépourvu de tout fondement en droit.

 Sur le troisième chef de conclusions

48      Par son troisième chef de conclusions, la requérante demande au Tribunal, en substance, d’adresser une injonction à l’AEE et, le cas échéant, de condamner cette dernière au paiement d’un montant de 500 euros si la retenue sur salaire qui apparaît sur son bulletin de rémunération du mois d’août 2019 s’avère non fondée.

49      Cependant, dans le cadre du contrôle de légalité fondé sur l’article 91 du statut et sur l’article 270 TFUE, le Tribunal n’est pas compétent pour adresser des injonctions à l’administration (voir arrêt du 23 février 2022, OJ/Commission, T‑709/20, non publié, EU:T:2022:81, point 27 et jurisprudence citée). Concernant le champ d’application de cette règle, il s’étend également aux cas où, comme en l’espèce, l’injonction consiste à fournir une certaine information à la partie requérante (voir ordonnance du 25 mars 2020, Lucaccioni/Commission, T‑507/19, non publiée, EU:T:2020:118, point 60 et jurisprudence citée).

50      Par ailleurs, rien n’empêchait la requérante d’introduire une réclamation puis un recours contre la décision de récupérer un montant de 500 euros dont elle a pris connaissance en consultant son bulletin de rémunération du mois d’août 2019 en se prévalant, le cas échéant, de l’insuffisance, voire du défaut de motivation d’une telle décision. Dès lors qu’un tel recours n’a pas été introduit dans les délais impartis, la demande visant à ce que l’AEE soit, le cas échéant, condamnée à lui rembourser cette somme est irrecevable.

51      Par conséquent, le troisième chef de conclusions doit être rejeté en partie en raison de l’incompétence manifeste du Tribunal pour en connaître et en partie comme étant irrecevable.

52      Compte tenu de l’ensemble de ce qui précède, le recours doit être rejeté en partie en raison de l’incompétence manifeste du Tribunal pour en connaître, en partie comme étant irrecevable et en partie comme étant manifestement dépourvu de tout fondement en droit.

 Sur les dépens

53      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’AEE.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

ordonne :

1)      Le recours est rejeté en partie en raison de l’incompétence manifeste du Tribunal pour en connaître, en partie comme étant irrecevable et en partie comme étant manifestement dépourvu de tout fondement en droit.

2)      TO est condamnée aux dépens.

Fait à Luxembourg, le 11 janvier 2024.

Le greffier

 

Le président

V. Di Bucci

 

J. Svenningsen


*      Langue de procédure : le français.