Language of document : ECLI:EU:T:2024:332

Affaire T360/21

(publication par extraits)

Portigon AG

contre

Conseil de résolution unique (CRU)
et
Parlement européen
et
Conseil de l’Union européenne
et
Commission européenne

  Arrêt du Tribunal (huitième chambre élargie) du 29 mai 2024

« Union économique et monétaire – Union bancaire – Mécanisme de résolution unique des établissements de crédit et de certaines entreprises d’investissement (MRU) – Fonds de résolution unique (FRU) – Décision du CRU sur le calcul des contributions ex ante pour 2021 – Exception d’illégalité – Base juridique du règlement no 806/2014 – Article 114 TFUE – Égalité de traitement – Marge d’appréciation de la Commission – Marge d’appréciation du CRU – Obligation de motivation »

1.      Rapprochement des législations – Mesures destinées à améliorer le fonctionnement du marché intérieur dans le domaine financier – Réglementation relative au rapprochement des dispositions des États membres en matière de résolution des établissements dans l’union bancaire – Règlement no 806/2014 – Directive no 2014/59 – Habilitation du Conseil de résolution unique (CRU) à la fixation des contributions ex ante et à la gestion des moyens financiers du Fonds de résolution unique (FRU) – Base juridique – Article 114 TFUE

(Règlement du Parlement européen et du Conseil no 806/2014, considérants 1 à 4, 9, 12, 19 et 107 et art. 67 et 76 ; directive du Parlement européen et du Conseil 2014/69, considérants 3 à 5, 9, 10, 103, 104 et 108 et art. 100 et 101)

(voir points 41, 42, 48, 53-57)

2.      Politique économique et monétaire – Politique économique – Mécanisme de résolution unique des établissements de crédit et de certaines entreprises d’investissement – Contributions ex ante au Fonds de résolution unique (FRU)- Nature – Absence de nature fiscale – Logique d’ordre assurantiel visant à garantir la stabilité du secteur financier dans son ensemble – Financement par le secteur financier dans son ensemble – Contributions directement affectées au seul financement des dépenses de ce secteur et nécessaires à son fonctionnement – Base juridique – Article 114, paragraphe 2, TFUE

(Art. 114, § 2, TFUE ; règlement du Parlement européen et du Conseil no 806/2014, art. 67, § 2 et 4, 69 et 70 ; directive du Parlement européen et du Conseil 2014/59, considérants 3, 5, 103, 105 à 107 et art. 32, 101 à 103)

(voir points 61-66, 68-76)

3.      Institutions de l’Union européenne – Exercice des compétences – Pouvoir conféré à la Commission pour l’adoption d’actes délégués – Portée – Appréciations et évaluations complexes – Large marge d’appréciation – Directive 2014/59 établissant un cadre pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d’investissement – Fixation des critères d’adaptation des contributions ex ante – Contrôle juridictionnel – Limites

(Art. 290 TFUE ; règlement du Parlement européen et du Conseil no 806/2014, considérant 41 ; directive du Parlement européen et du Conseil 2014/59)

(voir points 106, 108, 113, 114)

4.      Politique économique et monétaire – Politique économique – Mécanisme de résolution unique des établissements de crédit et de certaines entreprises d’investissement – Conseil de résolution unique (CRU) – Compétence – Détermination par le CRU d’indicateurs et de sous-indicateurs de risques supplémentaires pour l’adaptation du calcul des contributions ex ante au Fonds de résolution unique (FRU) selon le profil risque des établissements de crédit – Délégation prétendue de pouvoir de la Commission au CRU – Absence – Large pouvoir d’appréciation du CRU

[Article 290, § 1, TFUE ; règlement de la Commission 2015/63, art. 6, § 1, d)]

(voir points 141, 144, 148, 152, 156-160)

5.      Politique économique et monétaire – Politique économique – Mécanisme de résolution unique des établissements de crédit et de certaines entreprises d’investissement – Contributions ex ante au Fonds de résolution unique (FRU) – Exclusion de certains passifs prétendument dépourvus de risque du calcul desdites contributions – Exclusion des passifs fiduciaires d’un établissement de crédit dans ledit calcul – Inadmissibilité

[Règlement du Parlement européen et du Conseil no 806/2014, art. 70, § 2 ; règlement de la Commission 2015/63, art. 5, § 1, e) ; directive du Parlement européen et du Conseil 2014/59, art. 103, § 2 et 7]

(voir points 223, 224, 411, 412)

6.      Politique économique et monétaire – Politique économique – Mécanisme de résolution unique des établissements de crédit et de certaines entreprises d’investissement – Contributions ex ante au Fonds de résolution unique (FRU) – Prise en compte des passifs fiduciaires d’un établissement de crédit dans le calcul des dites contributions – Principe d’inscription de ces passifs dans le bilan comptable de l’établissement concerné – Possibilité de dérogation offerte aux États membres permettant aux établissements d’inscrire lesdits passifs hors bilan – Présence de distorsions de concurrence en raison de ces différences comptables entre les différentes législations nationales – Absence

[Art. 114 TFUE ; règlement du Parlement européen et du Conseil no 806/2014, art.70, § 2, 2d al., b) ; directive du Parlement européen et du Conseil 2014/59, art. 103, § 2 ; directive du Conseil 86/635, art. 10, § 1]

(voir points 229-232, 237-239)

7.      Actes des institutions – Motivation – Obligation – Portée – Fourniture par l’auteur d’explications concernant les motifs de l’acte au cours de la procédure devant le juge de l’Union – Conditions – Absence de contradictions et obligation de cohérence des explications avec lesdits motifs

(Art. 296, 2e al., TFUE)

(voir points 265, 266)

8.      Actes des institutions – Motivation – Obligation – Portée – Décision du Conseil de résolution unique (CRU) établissant les contributions ex ante au Fonds de résolution unique (FRU) – Obligation du CRU de communiquer aux établissements concernés la méthode de calcul de ces contributions et la méthode de détermination du montant du niveau cible annuel

(Art. 296, 2e al., TFUE ; règlement du Parlement européen et du Conseil no 806/2014 ; règlement du Conseil 2015/81, art. 4 ; règlement de la Commission 2015/63, art. 4 à 9 ; directive du Parlement européen et du Conseil 2014/59)

(voir points 268, 269)

9.      Politique économique et monétaire – Politique économique – Mécanisme de résolution unique des établissements de crédit et de certaines entreprises d’investissement – Contributions ex ante au Fonds de résolution unique (FRU) – Établissement de crédit en restructuration – Majoration du multiplicateur d’ajustement des dites contributions selon le profil risque de l’établissement concerné – Condition – Bénéfice par cet établissement d’un soutien financier public exceptionnel – Aide d’État accordée à l’établissement concerné avant l’entrée en vigueur de la réglementation de l’Union – Inclusion

[Art. 107, § 1, TFUE ; règlement de la Commission 2015/63, art. 3, 1er al., et 6, § 8, a) ; directive du Parlement européen et du Conseil, art. 2, § 1, point 28, et 103, § 7, e)]

(voir points 442, 443, 445, 446, 457)

Résumé

Saisi d’un recours en annulation, qu’il accueille, le Tribunal annule la décision du Conseil de résolution unique (CRU) portant sur la fixation des contributions ex ante pour l’année 2021 (1) au Fonds de résolution unique (FRU), en raison de la violation par celui-ci de son obligation de motivation relative à la détermination du niveau cible annuel. Par ailleurs, le Tribunal se prononce sur la conformité du règlement no 806/2014 (2) et, pour la première fois, celle de la directive 2014/59 (3), pris ensemble, avec l’article 114, paragraphes 1 et 2, en apportant des précisions quant à la notion de « dispositions fiscales », au regard des caractéristiques des contributions ex ante. En outre, le Tribunal apporte des éclaircissements sur la compétence du CRU dans la détermination d’indicateurs et sous-indicateurs de risque concernant le multiplicateur d’ajustement des contributions ex ante selon le profil risque des établissements de crédit, en opérant une distinction entre la délégation de pouvoir de la Commission européenne au sens de l’article 290 TFUE et l’octroi d’une marge d’appréciation au CRU ainsi que sur la prise en compte d’un soutien financier public, antérieur à la directive 2014/59, dans le calcul de ce multiplicateur.

Portigon est un établissement de crédit établi en Allemagne. Le 14 avril 2021, le CRU a adopté la décision attaquée dans laquelle il a fixé (4) les contributions ex ante pour 2021 au FRU des établissements de crédit et de certaines entreprises d’investissement, dont la requérante.

Appréciation du Tribunal

En premier lieu, s’agissant des moyens tirés d’exceptions d’illégalité de dispositions du règlement no 806/2014 et de la directive 2014/59 au regard des dispositions des traités, que le Tribunal rejette, la requérante contestait en particulier la base légale, à savoir l’article 114 TFUE, sur le fondement de laquelle ont été adoptées les dispositions litigieuses, d’une part, et le choix d’appliquer le paragraphe 1 de cet article, alors que les contributions ex ante auraient une nature fiscale et relèveraient donc du paragraphe 2.

Dans un premier temps, s’agissant de la contestation de la base légale retenue, le Tribunal rappelle que le choix de la base juridique d’un acte de l’Union doit se fonder sur des éléments objectifs susceptibles de faire l’objet d’un contrôle juridictionnel, parmi lesquels figurent la finalité et le contenu de l’acte. Les actes législatifs adoptés sur le fondement de l’article 114, paragraphe 1, TFUE doivent, d’une part, comporter des mesures relatives au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres et, d’autre part, avoir pour objet l’établissement et le fonctionnement du marché intérieur.

Tout d’abord, il précise que l’article 114 TFUE ne saurait être utilisé en tant que base juridique que lorsqu’il ressort objectivement et effectivement de l’acte juridique que ce dernier a pour objectif d’améliorer les conditions de l’établissement et du fonctionnement du marché intérieur. Or, il ressort des considérants du règlement no 806/2014 que ce dernier vise à desserrer le lien existant entre la situation budgétaire de chaque État membre, telle qu’elle est perçue, et les coûts de financement des banques et des entreprises qui y sont implantées ainsi qu’à faire peser la responsabilité du financement de la stabilisation du système financier sur le secteur financier dans son ensemble. Ainsi, le règlement no 806/2014 établit, notamment, des règles uniformes et une procédure uniforme pour la résolution des établissements, qui devraient être appliquées par le CRU, et ce afin de pallier les menaces encourues. De même, la directive 2014/59 établit, notamment, des règles harmonisées et une procédure harmonisée pour la résolution des établissements, afin de répondre aux préoccupations du législateur de l’Union décrites dans les considérants de ladite directive. Le FRU et les dispositifs de financement nationaux sont des éléments essentiels de ces règles et de cette procédure, qui permettent, comme il ressort du règlement no 806/2014 ainsi que de la directive 2014/59, d’assurer l’exercice efficient des pouvoirs de résolution et de contribuer au financement des instruments de résolution en assurant leur application efficiente. Afin de garantir des moyens financiers suffisants dans le FRU et les dispositifs de financement nationaux, ces derniers sont financés, notamment, par les contributions ex ante versées par les établissements.

Par conséquent, le versement de ces contributions assure l’application efficiente des règles uniformes ou harmonisées et de la procédure uniforme ou harmonisée pour la résolution des établissements de sorte que le règlement no 806/2014 et la directive 2014/59 ont pour objectif d’améliorer les conditions de l’établissement et du fonctionnement du marché intérieur.

Par ailleurs, en ce qui concerne la condition énoncée à l’article 114, paragraphe 1, TFUE, selon laquelle l’acte de l’Union concerné doit comporter des mesures relatives au rapprochement des dispositions des États membres, il ressort, d’une part, qu’il n’y avait pas de processus décisionnel unifié pour la résolution des établissements dans l’Union et, d’autre part, qu’il existait des différences de fond et de procédure considérables entres les dispositions législatives, réglementaires et administratives régissant l’insolvabilité des établissements dans les États membres. Dans ce contexte, le législateur de l’Union a créé des règles et une procédure uniformes, au niveau de l’union bancaire, et harmonisées, au niveau des États membres, pour la résolution des établissements, ainsi qu’une procédure uniforme pour la perception des contributions ex ante afin d’assurer l’application efficiente de ces règles et de ces procédures.

Le Tribunal conclut que le règlement no 806/2014 et la directive 2014/59 satisfont aux conditions énoncées à l’article 114, paragraphe 1, TFUE.

Dans un second temps, s’agissant du choix d’appliquer le paragraphe 1 de l’article 114 TFUE, alors que les contributions relèveraient des dispositions de son paragraphe 2 en raison de leur nature fiscale, le Tribunal juge que les dispositions du règlement no 806/2014 et de la directive 2014/59 qui obligent les établissements à verser des contributions ex ante et précisent les modalités de leur calcul ne constituent pas des « dispositions fiscales » au sens de l’article 114, paragraphe 2, TFUE.

En effet, un prélèvement versé par les opérateurs économiques d’un secteur particulier n’a pas de nature fiscale dans une situation où, en particulier, il est directement affecté au seul financement des dépenses de ce secteur et où ces dépenses sont nécessaires au fonctionnement de ce dernier afin, notamment, de le stabiliser. Or, ce raisonnement s’applique également dans le cas des contributions ex ante, qui suivent une logique d’ordre assurantiel et qui sont versées par les opérateurs économiques d’un secteur particulier en vue de financer exclusivement les dépenses de ce secteur.

Certes, le règlement no 806/2014 et la directive 2014/59 n’établissant aucun lien automatique entre le versement de la contribution ex ante et la résolution de l’établissement concerné, les contributions ex ante ne sauraient être considérées comme des primes d’assurance dont la mensualisation et le remboursement seraient possibles. Il n’en demeure pas moins que les établissements profitent à double titre du FRU et des dispositifs de financement nationaux, lesquels sont financés précisément par leurs contributions ex ante. D’une part, lorsque la défaillance des établissements est avérée ou prévisible, leur situation financière peut être régularisée dans le cadre d’une procédure de résolution qui peut être entamée en leur faveur. Une telle procédure permet ainsi d’utiliser des moyens financiers du FRU ou des dispositifs de financement nationaux au profit de tels établissements, étant entendu que ces moyens ont été alimentés par les contributions de ces derniers. D’autre part, tous les établissements bénéficient de leurs contributions ex ante au travers de la stabilité du système financier, laquelle est assurée par le FRU et les dispositifs de financement nationaux.

Il s’ensuit que le FRU et les dispositifs de financement nationaux visent, dans une optique d’ordre non pas fiscal, mais assurantiel, à garantir la stabilité du secteur financier dans son ensemble, en ayant pour objectif d’assurer une protection contre sa propre crise au bénéfice de tous les établissements. Cette finalité d’ordre assurantiel se reflète d’ailleurs également dans le calcul des contributions ex ante, étant donné que celles-ci ne résultent pas de l’application d’un taux déterminé à une assiette, mais de la définition d’un niveau cible final, puis d’un niveau cible annuel, lequel est ensuite réparti entre les établissements. Il découle de ce qui précède que les établissements versent les contributions ex ante dans une logique d’ordre assurantiel, étant entendu que ces contributions sont directement affectées au seul financement des dépenses du secteur financier dont ces établissements relèvent et que ces dépenses s’avèrent nécessaires pour le fonctionnement de ce secteur afin, notamment, de le stabiliser en cas de défaillance de certains établissements et de limiter des effets de contagion.

En deuxième lieu, s’agissant de l’exception d’illégalité tirée de la subdélégation de pouvoir de la Commission au CRU, le Tribunal, conformément à sa jurisprudence en la matière (5), rappelle que les dispositions figurant à l’article 6, paragraphes 5 à 7, et à l’article 7, paragraphe 4, du règlement délégué 2015/63 (6), relatives au pilier de risque IV, confèrent un pouvoir d’appréciation au CRU. Cependant, l’attribution d’une telle marge d’appréciation n’équivaut pas à une délégation de pouvoir de la Commission au CRU au sens de l’article 290, paragraphe 1, TFUE.

À cet égard, le Tribunal établit une distinction entre un tel pouvoir de délégation visé par l’article 290, paragraphe 1, TFUE (7), et le pouvoir d’appliquer les actes de portée générale - législatifs ou non législatifs - aux personnes ou aux situations qui entrent dans le champ d’application de tels actes. Or, d’une part, le règlement délégué 2015/63 ne contient aucune disposition par laquelle la Commission aurait conféré au CRU une délégation en vue d’adopter des actes de portée générale qui compléteraient ou modifieraient certains éléments de la directive 2014/59, du règlement no 806/2014 ou de ce règlement délégué. En revanche, plusieurs dispositions dudit règlement délégué (8) confirment le pouvoir octroyé au CRU par la directive 2014/59 et par le règlement no 806/2014 d’appliquer ces actes de portée générale en calculant les contributions ex ante des établissements qui entrent dans leur champ d’application. D’autre part, malgré la dénomination du pilier de risque IV figurant à l’article 6, paragraphe 1, sous d), du règlement délégué 2015/63, à savoir « indicateurs de risque supplémentaires à déterminer par l’autorité de résolution », les principes essentiels concernant l’application de ce pilier de risque ont été précisés par la Commission elle-même à l’article 6, paragraphes 5 à 8, de ce règlement délégué. De même, elle a fixé les règles de pondération relative des indicateurs de risque au sein de ce pilier de risque à l’article 7, paragraphe 4, dudit règlement délégué.

Dès lors, le Tribunal considère que le règlement délégué 2015/63 n’a pas conféré au CRU le pouvoir d’adopter des actes de portée générale, au sens de l’article 290, paragraphe 1, TFUE et il rejette cette exception d’illégalité.

En troisième et dernier lieu, s’agissant de l’attribution par la décision attaquée de la qualification d’« établissement en restructuration » à la requérante, en raison d’un soutien financier public accordé avant l’entrée en vigueur de la directive 2014/59, ce qui a entrainé la majoration de son multiplicateur d’ajustement en fonction du profil risque, le Tribunal rappelle que l’article 6, paragraphe 5, sous c), du règlement délégué 2015/63 dispose que le pilier de risque IV se compose, parmi d’autres indicateurs de risque, de l’indicateur de risque « mesure dans laquelle l’établissement a déjà bénéficié d’un soutien financier public exceptionnel ». En vertu de la directive 2014/59 (9), lu conjointement avec le règlement délégué 2015/63 (10), l’on entend par « soutien financier public exceptionnel » une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE ou tout autre soutien financier public au niveau supranational qui, s’il était accordé au niveau national, constituerait une aide d’État, accordés dans le but de préserver ou de rétablir la viabilité, la liquidité ou la solvabilité d’un établissement.

En l’espèce, le Tribunal constate, d’une part, que la requérante a été mise en restructuration après avoir reçu une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE. D’autre part, le fait que cette aide a été octroyée avant l’entrée en vigueur de la directive 2014/59 n’a pas d’impact sur la circonstance selon laquelle cette aide relève de l’article 6, paragraphe 5, sous c), du règlement délégué 2015/63, lu conjointement avec l’article 2, paragraphe 1, point 28, de cette directive. En effet, ni le libellé de l’article 2, paragraphe 1, point 28, de la directive 2014/59 ni celui de l’article 6, paragraphe 8, sous a), du règlement délégué 2015/63 ne comportent d’indication qui limiterait l’application dans le temps de cette dernière disposition.

Dès lors, le Tribunal estime que le CRU a considéré, à juste titre, que la requérante tombait dans le champ d’application de l’article 6, paragraphe 8, sous a), du règlement délégué 2015/63 et lui a appliqué, conformément à cette disposition, la valeur maximale pour l’indicateur de risque « mesure dans laquelle l’établissement a déjà bénéficié d’un soutien financier public exceptionnel ».


1      Décision SRB/ES/2021/22 du Conseil de résolution unique, du 14 avril 2021, sur le calcul des contributions ex ante pour 2021 au Fonds de résolution unique (ci-après la « décision attaquée »)


2      Règlement no 806/2014 du Parlement européen et du Conseil, du 15 juillet 2014, établissant des règles et une procédure uniformes pour la résolution des établissements de crédit et de certaines entreprises d’investissement dans le cadre d’un mécanisme de résolution unique et d’un Fonds de résolution bancaire unique, et modifiant le règlement (UE) no 1093/2010 (JO 2014, L 225, p. 1).


3      Directive 2014/59/UE du Parlement européen et du Conseil, du 15 mai 2014, établissant un cadre pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d’investissement et modifiant la directive 82/891/CEE du Conseil ainsi que les directives du Parlement européen et du Conseil 2001/24/CE, 2002/47/CE, 2004/25/CE, 2005/56/CE, 2007/36/CE, 2011/35/UE, 2012/30/UE et 2013/36/UE et les règlements du Parlement européen et du Conseil (UE) no 1093/2010 et (UE) no 648/2012 (JO 2014, L 173, p. 190).


4      Conformément à l’article 70, paragraphe 2, du règlement (UE) no 806/2014.


5      Arrêt du 20 décembre 2023, Landesbank Baden-Württemberg/CRU, (T-0389/21, EU:T:2023:827, points 73 à 85).


6      Règlement délégué (UE) 2015/63 de la Commission, du 21 octobre 2014, complétant la directive 2014/59/UE du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les contributions ex ante aux dispositifs de financement pour la résolution (JO 2015, L 11, p. 44).


7      À savoir celui d’adopter des actes non législatifs de portée générale qui complètent ou modifient certains éléments non essentiels d’un acte législatif.


8      Notamment les articles 4 et 6 à 9 du règlement délégué 2015/63.


9      Voir l’article 2, paragraphe 1, point 28 de la directive 2014/59.


10      Voir l’article 3, premier alinéa, du règlement délégué 2015/63.