Language of document : ECLI:EU:T:2024:304

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre élargie)

8 mai 2024 (*)

« Dumping – Importations de certains produits plats laminés à chaud en fer, en aciers non alliés ou en autres aciers alliés, originaires de Turquie – Droits antidumping définitifs – Règlement d’exécution (UE) 2021/1100 – Ajustement – Article 2, paragraphe 10, sous b), i) et j), du règlement (UE) 2016/1036 – Fonctions assimilables à celles d’un agent travaillant sur la base de commissions – Entité économique unique – Droits à l’importation – Calcul de la marge de dumping – Couverture des gains et des pertes – Erreur manifeste d’appréciation – Droit d’être entendu »

Dans l’affaire T‑630/21,

Çolakoğlu Metalurji AŞ, établie à İstanbul (Turquie),

Çolakoğlu Dış Ticaret AŞ, établie à İstanbul,

représentées par Mes J. Cornelis et F. Graafsma, avocats,

parties requérantes,

contre

Commission européenne, représentée par MM. G. Luengo et J. Zieliński, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (huitième chambre élargie),

composé de MM. S. Papasavvas, président, A. Kornezov, D. Petrlík, K. Kecsmár (rapporteur) et Mme S. Kingston, juges,

greffier : Mme M. Zwozdziak-Carbonne, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure, notamment la mesure d’organisation de la procédure du 21 décembre 2022 et les réponses des parties déposées au greffe du Tribunal les 13 et 16 janvier 2023,

à la suite de l’audience du 28 mars 2023,

rend le présent

Arrêt

1        Par leur recours fondé sur l’article 263 TFUE, les requérantes, Çolakoğlu Metalurji AŞ et Çolakoğlu Dış Ticaret AŞ (ci-après, respectivement, « Çolakoğlu Metalurji » et « ÇOTAŞ »), demandent l’annulation du règlement d’exécution (UE) 2021/1100 de la Commission, du 5 juillet 2021, instituant un droit antidumping définitif et portant perception définitive du droit provisoire institué sur les importations de certains produits plats laminés à chaud en fer, en aciers non alliés ou en autres aciers alliés, originaires de Turquie (JO 2021, L 238, p. 32, ci-après le « règlement attaqué »).

 Antécédents du litige

2        Les requérantes sont des sociétés de droit turc. Çolakoğlu Metalurji est un producteur-exportateur de produits plats laminés à chaud. ÇOTAŞ est une société de négoce et d’exportation qui lui est liée.

3        Le 14 mai 2020, la Commission européenne a ouvert une enquête antidumping concernant les importations dans l’Union européenne de certains produits plats laminés à chaud en fer, en aciers non-alliés ou en autres aciers alliés (ci-après le « produit concerné ») originaires de Turquie (ci-après l’« enquête »).

4        L’enquête a porté sur la période comprise entre le 1er janvier et le 31 décembre 2019 (ci-après la « période d’enquête »). L’examen des tendances utiles pour l’évaluation du préjudice a porté sur la période comprise entre le 1er janvier 2016 et la fin de la période d’enquête. Les requérantes ont présenté leurs observations écrites au cours de l’enquête.

5        Les requérantes ont été sélectionnées parmi les trois exportateurs turcs retenus dans l’échantillon et ont soumis une réponse au questionnaire le 6 juillet 2020 ainsi qu’une réponse à une demande d’informations complémentaires le 26 août 2020.

6        Un recoupement à distance a été effectué du 21 septembre au 25 septembre 2020.

7        Le 6 janvier 2021, la Commission a adopté le règlement d’exécution (UE) 2021/9, instituant un droit antidumping provisoire sur les importations de certains produits plats laminés à chaud en fer, en aciers non alliés ou en autres aciers alliés, originaires de Turquie (JO 2021, L 3 p. 4, ci-après le « règlement provisoire »), soumettant les exportations des requérantes vers l’Union du produit concerné à un droit antidumping provisoire de 7,6 %.

8        Le 23 avril 2021, la Commission a communiqué aux requérantes les faits et considérations définitives sur la base desquels elle envisageait d’instituer des droits antidumping définitifs.

9        Le 28 avril 2021, les requérantes ont proposé un engagement, qui a été rejeté par la Commission. À la suite d’une audition avec la Commission le 30 avril 2021, les requérantes ont présenté, le 3 mai 2021, leurs observations sur les conclusions définitives du 23 avril 2021.

10      Le 5 juillet 2021, la Commission a adopté le règlement attaqué, instituant un droit antidumping de 7,3 % sur les importations dans l’Union du produit concerné fabriqué par les requérantes.

 Conclusions des parties

11      Les requérantes concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler le règlement attaqué ;

–        condamner la Commission aux dépens.

12      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme non fondé ;

–        condamner les requérantes aux dépens.

 En droit

13      À l’appui de leur recours, les requérantes soulèvent quatre moyens, tirés, le premier, de la violation de l’article 2, paragraphe 10, sous i), du règlement (UE) 2016/1036 du Parlement européen et du Conseil, du 8 juin 2016, relatif à la défense contre les importations qui font l’objet d’un dumping de la part de pays non membres de l’Union européenne (JO 2016, L 176, p. 21, ci-après le « règlement de base ») et d’une erreur manifeste d’appréciation, le deuxième, de la violation de l’article 2, paragraphe 10, sous b), du règlement de base, le troisième, d’une erreur manifeste d’appréciation et de la violation consécutive de l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base, et, le quatrième, de la violation de l’article 2, paragraphe 10, sous j), du règlement de base.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 2, paragraphe 10, sous i), du règlement de base

14      Le premier moyen se divise en trois branches. Premièrement, les requérantes soutiennent que le montant de l’ajustement excède la commission effectivement versée. Deuxièmement, les requérantes font valoir que, puisqu’aucune marge bénéficiaire n’a été perçue, aucun ajustement au titre de l’article 2, paragraphe 10, sous i), du règlement de base n’aurait dû être appliqué. Troisièmement, les requérantes considèrent que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation en concluant que ÇOTAŞ opérait en tant qu’agent travaillant sur la base de commissions plutôt que comme département de vente interne.

15      Il convient d’examiner d’abord la troisième branche, ensuite la deuxième branche et, enfin, la première branche.

 Sur la troisième branche du premier moyen, relative à une erreur manifeste d’appréciation

16      Les requérantes font valoir, en substance, qu’elles constituent une seule entité économique dans laquelle ÇOTAŞ remplit les fonctions d’un service interne du Groupe Çolakoğlu chargé des ventes à l’exportation. Par conséquent, en considérant ÇOTAŞ comme un agent travaillant sur la base de commissions et, partant, en déduisant du prix à l’exportation les frais de vente, les dépenses administratives et autres frais généraux ainsi que le bénéfice théorique de cette dernière, la Commission aurait violé l’article 2, paragraphe 10, sous i), du règlement de base.

17      La Commission conteste cette argumentation.

18      À titre liminaire, il ressort d’une jurisprudence constante que, dans le domaine de la politique commerciale commune, et tout particulièrement en matière de mesures de défense commerciale, les institutions de l’Union disposent d’un large pouvoir d’appréciation en raison de la complexité des situations économiques, politiques et juridiques qu’elles doivent examiner. Quant au contrôle juridictionnel d’une telle appréciation, il doit ainsi être limité à la vérification du respect des règles de procédure, de l’exactitude matérielle des faits retenus pour opérer le choix contesté, de l’absence d’erreur manifeste dans l’appréciation de ces faits ou de l’absence de détournement de pouvoir (voir arrêt du 12 mai 2022, Commission/Hansol Paper, C‑260/20 P, EU:C:2022:370, point 58 et jurisprudence citée).

19      S’agissant de l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base, il convient de préciser que la Commission dispose d’un large pouvoir d’appréciation en ce qui concerne l’appréciation de l’équité de la comparaison entre la valeur normale et le prix à l’exportation, la notion vague d’« équité » dont la Commission doit faire application dans le cadre de cette disposition devant être concrétisée au cas par cas, selon le contexte économique pertinent (voir, en ce sens, arrêt du 20 septembre 2019, Jinan Meide Casting/Commission, T‑650/17, EU:T:2019:644, point 50 et jurisprudence citée).

20      Il y a lieu de relever que l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base vise à ce que les institutions de l’Union opèrent une comparaison équitable entre le prix à l’exportation et la valeur normale. Dans ce but, cette disposition impose aux institutions de l’Union de prendre en considération tout facteur susceptible d’affecter la comparabilité des prix [arrêt du 6 septembre 2013, Godrej Industries et VVF/Conseil, T‑6/12, EU:T:2013:408, point 22 (non publié)].

21      Selon l’article 2, paragraphe 10, sous i), du règlement de base, « [u]n ajustement est opéré au titre des différences dans les commissions versées pour les ventes considérées[ ; l]e terme “commissions” couvre aussi la marge perçue par un opérateur commercial du produit ou du produit similaire si les fonctions de cet opérateur sont assimilables à celles d’un agent travaillant sur la base de commissions ».

22      Toutefois, à titre d’exception à la règle générale, un ajustement au titre de l’article 2, paragraphe 10, sous i), du règlement de base ne saurait être opéré lorsque le producteur établi dans un État tiers et son distributeur lié en charge des exportations vers l’Union forment une entité économique unique (arrêt du 26 octobre 2016, PT Musim Mas/Conseil, C‑468/15 P, EU:C:2016:803, point 39).

23      La reconnaissance de l’existence d’une entité économique unique permet d’éviter que des coûts, qui sont manifestement englobés dans le prix de vente d’un produit lorsque cette vente est effectuée par un département des ventes intégré dans l’organisation du producteur, ne le soient plus lorsque la même activité de vente est exercée par une société juridiquement distincte, bien qu’économiquement contrôlée par le producteur (voir arrêt du 26 octobre 2016, PT Musim Mas/Conseil, C‑468/15 P, EU:C:2016:803, point 41 et jurisprudence citée).

24      Ainsi, dans le cadre de l’analyse de l’existence d’une entité économique unique entre un producteur et son distributeur lié, il est déterminant, conformément à la jurisprudence de la Cour, de considérer la réalité économique des relations existant entre ce producteur et ce distributeur. Compte tenu de l’exigence d’un constat reflétant la réalité économique des relations entre ledit producteur et ledit distributeur, les institutions de l’Union sont tenues de prendre en compte l’ensemble des facteurs pertinents permettant de déterminer si ce distributeur exerce ou non les fonctions d’un département de vente intégré de ce producteur (voir arrêt du 26 octobre 2016, PT Musim Mas/Conseil, C‑468/15 P, EU:C:2016:803, point 43 et jurisprudence citée).

25      De surcroît, une entité économique unique existe lorsqu’un producteur confie des tâches relevant normalement d’un département de vente interne à une société de distribution de ses produits qu’il contrôle économiquement (arrêt du 10 mars 1992, Canon/Conseil, C‑171/87, EU:C:1992:106, points 9 et 10).

26      Quant à la charge de la preuve relative aux ajustements spécifiques énumérés à l’article 2, paragraphe 10, sous a) à k), du règlement de base, selon la jurisprudence, celle-ci doit être supportée par la partie qui souhaite s’en prévaloir (voir arrêt du 14 juillet 2021, Interpipe Niko Tube et Interpipe Nizhnedneprovsky Tube Rolling Plant/Commission, T‑716/19, EU:T:2021:457, point 135 et jurisprudence citée).

27      La jurisprudence a également établi que, dans l’hypothèse où les institutions de l’Union ont rapporté des indices convergents de nature à établir qu’un négociant lié à un producteur exerce des fonctions assimilables à celles d’un agent travaillant sur la base de commissions, il incombe à ce négociant ou à ce producteur de rapporter la preuve qu’un ajustement au titre de l’article 2, paragraphe 10, sous i), du règlement de base n’est pas justifié (voir arrêt du 14 juillet 2021, Interpipe Niko Tube et Interpipe Nizhnedneprovsky Tube Rolling Plant/Commission, T‑716/19, EU:T:2021:457, point 137 et jurisprudence citée).

28      Néanmoins, il appartient au Tribunal non seulement de vérifier l’exactitude matérielle des éléments de preuve invoqués, leur fiabilité et leur cohérence, mais également de contrôler si ces éléments constituent l’ensemble des données pertinentes devant être prises en considération pour apprécier une situation complexe et s’ils sont de nature à fonder les conclusions qui en sont tirées (voir arrêt du 10 juillet 2019, Caviro Distillerie e.a./Commission, C‑345/18 P, non publié, EU:C:2019:589, point 16 et jurisprudence citée).

29      En l’espèce, il est constant entre les parties que, pendant la période d’enquête, toutes les ventes à l’exportation vers l’Union du produit concerné ont été réalisées par l’intermédiaire de ÇOTAŞ, le négociant lié de Çolakoğlu Metalurji. Les produits fabriqués par Çolakoğlu Metalurji sont vendus à ÇOTAŞ, qui les revend ensuite à des clients indépendants dans l’Union. Les produits sont toutefois directement expédiés de Çolakoğlu Metalurji à ses clients. Par ailleurs, il n’est contesté que Çolakoğlu Metalurji a effectué des ventes directes du produit concerné vers le reste du monde et des ventes d’autres produits vers l’Union, ni que la totalité des ventes réalisées sur le marché intérieur ont été effectuées directement par Çolakoğlu Metalurji. Enfin, il n’est pas non plus contesté qu’il existe un accord-cadre conclu entre le producteur Çolakoğlu Metalurji et son négociant ÇOTAŞ, qui prévoit le versement d’une commission fixe égale à 1 dollar des États-Unis (USD) par tonne de produit concerné vendu à l’exportation par ÇOTAŞ ainsi qu’une répartition précise des fonctions dans le cadre des opérations d’exportation incombant à chacune des parties à l’accord précité.

30      À cet égard, premièrement, concernant l’accord-cadre, le règlement attaqué expose, à son considérant 79, que cet accord établit une commission à payer par Çolakoğlu Metalurji à ÇOTAŞ sur les marchandises vendues et que les droits normalement associés à un service de vente étaient conservés par le fabricant, tandis que les droits du négociant lié correspondaient à ceux d’un agent effectuant un service concernant les exportations du fabricant. Sachant qu’aucune autre information concernant la relation contractuelle entre le fournisseur et le négociant lié n’a été fournie, la Commission a donc conclu que l’accord contenait des clauses incompatibles avec l’argument selon lequel la réalité économique de la relation entre le négociant lié et le fabricant correspondait à une relation entre un fabricant et un service des ventes interne.

31      Deuxièmement, la Commission a également fait observer au considérant 83 du règlement attaqué que, si l’accord-cadre pouvait présenter un intérêt pour des raisons fiscales, cela n’enlevait rien au fait que ledit accord stipulait clairement que le négociant lié avait fourni des services d’exportation moyennant le paiement d’une commission sur la base des ventes réalisées. La Commission a également considéré que les fonctions de Çolakoğlu Metalurji démontraient que ce dernier disposait de son propre département des ventes à l’exportation pleinement opérationnel.

32      Troisièmement, au considérant 84 du règlement attaqué, la Commission a souligné, en substance, que la commission prévue ne reflétait pas « la rémunération adéquate du service rendu dans des conditions de pleine concurrence ». Elle a donc procédé à un ajustement pour refléter la rémunération adéquate du service rendu dans des conditions de pleine concurrence.

33      Quatrièmement, concernant les ventes à l’exportation, la Commission s’est d’abord fondée, au considérant 79 du règlement attaqué, sur le fait que le fabricant effectuait également des ventes directes à l’exportation. Ensuite, elle a exposé, au considérant 81 dudit règlement, que le régime juridique applicable aux ventes à l’exportation n’était pas déterminant pour apprécier si les ventes constituent des ventes à l’exportation et que le seul fait que ces ventes directes aient été effectuées, outre celles effectuées sur le marché intérieur, constituait une preuve en soi que le producteur conservait des fonctions de vente.

34      Cinquièmement, la Commission a estimé, au considérant 82 du règlement attaqué, que le fait que la totalité des ventes intérieures ait été effectuée directement par le producteur sans intervention du négociant lié démontrait que le producteur disposait d’un département interne des ventes à part entière.

35      Sixièmement, aux considérants 87 et 88 du règlement attaqué, la Commission a estimé que l’existence d’un contrôle par le producteur-exportateur sur le négociant lié n’était pas déterminante. En outre, elle a considéré que le fait que le négociant lié fournisse des services d’exportation en échange d’une commission exclusivement destinée au producteur-exportateur ainsi que sa localisation à la même adresse que ce dernier démontraient uniquement que le négociant lié ne fournissait pas les mêmes services à d’autres clients à ce stade. Selon la Commission, cela ne signifiait pas que le négociant lié était le département interne des ventes du producteur-exportateur.

36      Au considérant 89 dudit règlement, la Commission a donc conclu que « le négociant lié exerçait les fonctions d’un agent chargé des activités d’exportation du producteur-exportateur » et qu’il était approprié, compte tenu du fait que cette rémunération était affectée par la relation intragroupe, d’utiliser une marge bénéficiaire raisonnable afin d’éviter tout effet de distorsion pouvant résulter d’accords internes entre le producteur-exportateur et le négociant lié.

37      Il convient d’examiner les différents facteurs retenus par la Commission pour parvenir à la conclusion selon laquelle Çolakoğlu Metalurji et ÇOTAŞ ne formaient pas une entité économique unique.

–       Sur la prise en compte de l’accord entre les requérantes prévoyant le versement de commissions

38      Les requérantes font valoir que l’existence d’un accord entre elles ne signifie pas que ÇOTAŞ a exercé les activités d’un agent travaillant sur la base de commissions étant donné que cette dernière société n’exercerait pas de fonctions similaires à celles d’un agent travaillant sur la base de commissions.

39      Ainsi qu’il ressort du considérant 79 du règlement attaqué, dont le contenu est exposé au point 30 ci-dessus, la Commission a considéré que l’accord contenait des clauses incompatibles avec l’argument selon lequel la réalité économique de la relation entre le négociant lié et le fabricant correspondait à une relation entre un fabricant et un service des ventes interne.

40      En premier lieu, selon la jurisprudence, l’existence d’un contrat conclu entre le producteur et son distributeur lié, prévoyant le versement de commissions à ce dernier, constitue un élément important dans les relations entre ces deux sociétés et l’ignorer reviendrait à occulter une partie de la réalité économique de ces relations (arrêt du 26 octobre 2016, PT Musim Mas/Conseil, C‑468/15 P, EU:C:2016:803, point 56). Il s’ensuit que l’existence d’un accord entre les requérantes prévoyant le paiement de commissions constitue un élément important à prendre en considération par le Tribunal.

41      À cet égard, d’une part, il convient de relever que ledit accord prévoit le versement de commissions de 1 USD par tonne de produit vendue à l’exportation par ÇOTAŞ.

42      D’autre part, en réponse à une mesure d’organisation de la procédure, les requérantes ont expliqué que, en ce qui concerne les activités liées à l’exportation de produits de Çolakoğlu Metalurji, les bénéfices que ÇOTAȘ tire de la perception de la commission susmentionnée pour les services d’intermédiaire à l’exportation sont conservés par cette dernière. Or, la conservation de certains bénéfices tirés de la perception de la commission, même minimes, par le négociant lié est difficilement conciliable avec l’existence d’une entité économique unique.

43      En deuxième lieu, l’argument des requérantes selon lequel la question ne serait pas de savoir si ÇOTAŞ constitue un département de vente interne, mais si ÇOTAŞ est un département interne impliqué dans les ventes à l’exportation sur les plans logistique et financier ne peut pas non plus prospérer.

44      D’une part, quelles que soient les fonctions exactes de ÇOTAŞ, ainsi qu’il ressort du considérant 83 du règlement attaqué, l’article 2, paragraphe 10, sous i), du règlement de base vise des commissions versées pour les ventes considérées, à savoir, en l’espèce, les ventes à l’exportation. L’objectif d’un ajustement au titre de l’article 2, paragraphe 10, sous i), dudit règlement est de garantir que toute commission versée à un agent pour les ventes à l’exportation, pour rémunérer les services fournis par cet agent dans le cadre de ces activités de vente, quelle que soit la forme de ces services, soit dûment ajustée afin de garantir la comparaison équitable avec les ventes intérieures.

45      D’autre part, en ce qui concerne les fonctions respectives des requérantes, il découle de l’accord en cause que ÇOTAŞ a pour fonction de vérifier les lettres de crédit, d’organiser et d’assurer le suivi des documents relatifs au dédouanement et au chargement, de préparer les documents d’exportation nécessaires après le chargement et de mettre en œuvre des procédures liées à l’exportation, telles que la collecte du coût des marchandises. Ledit accord stipule également que Çolakoğlu Metalurji conserve les principales fonctions liées aux ventes, telles que l’acquisition de clients et l’établissement des conditions contractuelles et de vente nécessaires avec ces clients, y compris le type de produit, le prix ou le temps de chargement.

46      Partant, ainsi qu’il ressort du considérant 79 du règlement attaqué, les tâches exercées par ÇOTAŞ correspondaient bien à celles normalement exercées par un agent fournissant un service aux fins de l’exportation du produit manufacturé par le fabricant et ces fonctions n’avaient pas d’équivalent dans la détermination de la valeur normale.

47      En troisième lieu, les requérantes soulignent l’absence de stipulations dans l’accord traitant de questions telles que l’arbitrage ou les garanties du produit en se référant notamment à la jurisprudence concernant des situations où de telles clauses existaient (arrêts du 25 juin 2015, PT Musim Mas/Conseil, T‑26/12, non publié, EU:T:2015:437, points 62 et 63, et du 14 juillet 2021, Interpipe Niko Tube et Interpipe Nizhnedneprovsky Tube Rolling Plant/Commission, T‑716/19, EU:T:2021:457, point 163).

48      À cet égard, il convient de souligner que l’absence de clause d’arbitrage dans l’accord existant entre les requérantes n’est pas déterminante. Bien que l’insertion d’une telle clause puisse constituer un indice de ce qu’un producteur et son négociant lié ne forment pas une entité économique unique (voir, en ce sens, arrêt du 25 juin 2015, PT Musim Mas/Conseil, T‑26/12, non publié, EU:T:2015:437, point 63), chaque accord doit s’analyser au regard de l’intégralité de ses clauses, en ce compris les clauses prévoyant le versement d’une commission et précisant les fonctions distinctes des parties. En outre, conformément à la jurisprudence, la Commission, dans le règlement attaqué, s’est appuyée, à juste titre, sur un ensemble de facteurs pertinents pour conclure que Çolakoğlu Metalurji et ÇOTAŞ ne formaient pas une entité économique unique.

49      Dans ces circonstances, il y a lieu de considérer que l’existence d’un accord entre les requérantes, le fait que cet accord prévoit le paiement de commissions de Çolakoğlu Metalurji à ÇOTAŞ à l’occasion de l’exportation du produit concerné, et réserve à ÇOTAŞ certaines fonctions typiquement exercées par un agent et la circonstance que ÇOTAŞ conserve les bénéfices tirés de la perception de la commission constituent des indices importants aux fins de déterminer si ÇOTAŞ exerçait les activités d’un agent travaillant sur la base de commissions.

–       Sur la prise en compte des ventes directes à l’exportation de Çolakoğlu Metalurji

50      En premier lieu, les requérantes affirment que, conformément à la jurisprudence de l’Union, les ventes directes à l’exportation par la société productrice ne peuvent constituer un motif de rejet de l’existence d’une entité économique unique que si elles sont substantielles et étayent d’autres facteurs indiquant l’absence d’entité économique unique. Selon elles, aucun de ces cas de figure n’existe en l’espèce.

51      À cet égard, il ressort de la jurisprudence que l’existence de ventes directes par le fabricant constitue un critère pertinent afin de se prononcer sur l’existence d’un agent travaillant sur la base de commissions (voir, en ce sens, arrêt du 25 juin 2015, PT Musim Mas/Conseil, T‑26/12, non publié, EU:T:2015:437, points 68 à 70).

52      En l’espèce, malgré l’absence de ventes directes par le producteur du produit concerné vers l’Union, la Commission a tenu compte du fait que, sous l’angle de la valeur, 5,49 % des ventes du produit concerné réalisées par Çolakoğlu Metalurji vers le reste du monde étaient des ventes directes.

53      En outre, il y a lieu de relever que la Commission a tenu compte du fait que, sous l’angle de la valeur, 11 % des autres produits vendus au reste du monde et 5,48 % des autres produits vendus dans l’Union étaient des ventes directes effectuées par le producteur lui-même. En effet, l’analyse de l’existence d’une entité économique unique doit également tenir compte de produits autres que le produit concerné (arrêt du 25 juin 2015, PT Musim Mas/Conseil, T‑26/12, non publié, EU:T:2015:437, point 51).

54      Les requérantes font valoir que la comparaison appropriée aurait dû être faite entre le total des ventes directes à l’exportation et le total des ventes à l’exportation, à savoir englobant les ventes directes et indirectes. Selon cette méthode, le total des ventes directes à l’exportation effectuées par Çolakoğlu Metalurji ne représenterait que 2,3 % [77,3 millions de livres turques (TRY)] du total des ventes à l’exportation (3,31 milliards de TRY).

55      À cet égard, il suffit de relever que les requérantes ne contestent ni la réalité des ventes à l’exportation réalisées directement par Çolakoğlu Metalurji, ainsi qu’indiqué au considérant 79 du règlement attaqué, ni les données mentionnées aux points 52 et 53 ci-dessus en tant que telles. Ainsi, la question de savoir comment il convient de « comparer » ces données revêt une moindre importance dans l’appréciation globale de tous les facteurs dont la Commission devait tenir compte.

56      En second lieu, les requérantes font valoir que la plupart des ventes directes à l’exportation réalisées par le producteur ne constituent pas de véritables ventes à l’exportation, car, en raison d’exigences légales en droit turc, ces ventes sont notamment réalisées soit auprès de clients situés dans une zone franche en Turquie, soit auprès de clients situés en Turquie, mais qui exporteraient ensuite les produits vers des pays tiers.

57      La Commission ne conteste pas que ces ventes ont été effectuées dans un contexte particulier et que, pour la plupart de ces transactions, des exigences légales empêchaient l’implication de ÇOTAŞ. Elle a néanmoins considéré, au considérant 81 du règlement attaqué, que « le régime juridique applicable aux ventes à l’exportation n’[était] pas déterminant pour apprécier si les ventes constituent des ventes à l’exportation ».

58      À cet égard, le Tribunal a déjà admis qu’une société liée peut exercer les fonctions d’un département interne des ventes en organisant et en négociant les ventes du producteur sans pour autant émettre directement toutes les factures relatives à ces ventes. Diverses raisons peuvent justifier l’intervention sur papier pour la facturation de la part du producteur, parmi lesquelles peut figurer le seul but de garantir l’origine des produits (voir, en ce sens, arrêt du 25 juin 2015, PT Musim Mas/Conseil, T‑26/12, non publié, EU:T:2015:437, point 68).

59      Toutefois, en l’espèce, les requérantes n’ont pas cherché à démontrer que le rôle du producteur était limité à une telle intervention sur papier consistant uniquement en l’émission de la facture.

60      Au contraire, l’accord conclu entre Çolakoğlu Metalurji et ÇOTAŞ prévoit qu’il est de la responsabilité de Çolakoğlu Metalurji de trouver des clients et de conclure des contrats avec eux, ainsi qu’il ressort du considérant 83 du règlement attaqué. Çolakoğlu Metalurji a donc exercé, selon les termes mêmes dudit accord, la plupart, voire la totalité, des fonctions normalement assumées par un département de vente, ainsi qu’il est indiqué au considérant 85 du règlement attaqué.

61      Il y a donc lieu de conclure que, même pour les ventes réalisées par l’intermédiaire de ÇOTAŞ, l’intervention de Çolakoğlu Metalurji ne se limitait pas à une intervention sur papier pour la facturation et cette dernière conservait les fonctions de vente les plus importantes ainsi qu’il ressort de l’accord conclu entre les requérantes.

62      Partant, il y a lieu de considérer que les ventes à l’exportation de Çolakoğlu Metalurji constituent un indice parmi d’autres du fait qu’elle disposait elle-même d’un département de vente interne pleinement opérationnel et que, dès lors, ÇOTAŞ ne pouvait être considérée comme remplissant le rôle d’un tel département interne, mais comme remplissant plutôt le rôle d’un agent.

63      La Commission a donc pu, sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation, tenir compte de l’existence de ces ventes en tant que l’un des indices pertinents parmi d’autres, aux fins de l’application de l’article 2, paragraphe 10, sous i), du règlement de base.

–       Sur la prise en compte des ventes intérieures directes de Çolakoğlu Metalurji

64      Les requérantes soutiennent que l’existence de ventes directes réalisées par Çolakoğlu Metalurji sur le marché intérieur est sans pertinence pour déterminer s’il existe une entité économique unique sur le plan des exportations.

65      Au considérant 82 du règlement attaqué, la Commission a estimé que l’existence de ventes directes sur le marché intérieur effectuées par Çolakoğlu Metalurji elle-même montre que cette dernière « disposait d’un département interne des ventes à part entière, ce qui constitue un facteur pertinent et a été reconnu comme tel par le Tribunal ».

66      Ainsi, selon la jurisprudence, le fait que le producteur facture directement les ventes intérieures peut constituer un facteur parmi d’autres devant être pris en compte pour apprécier l’existence d’une entité économique unique (voir, en ce sens, arrêt du 25 juin 2015, PT Musim Mas/Conseil, T‑26/12, non publié, EU:T:2015:437, points 50 et 71).

67      En l’espèce, le fait que Çolakoğlu Metalurji ait réalisé la totalité des ventes intérieures sans l’intervention d’un quelconque négociant tend à démontrer, ainsi que la Commission l’a correctement fait observer, que cette dernière disposait d’un département de vente interne et que, par conséquent, ÇOTAŞ ne pouvait pas être considérée, elle non plus, comme un tel département. Il s’agit en conséquence d’un indice pertinent aux fins de l’application de l’article 2, paragraphe 10, sous i), du règlement de base dont la Commission pouvait, voire devait tenir compte.

–       Sur les autres facteurs pris en compte par la Commission

68      Les requérantes soutiennent qu’il n’existe aucun autre facteur de nature à démontrer que ÇOTAŞ effectuait des tâches d’un agent travaillant sur la base de commissions. Elles rappellent que ÇOTAŞ est entièrement sous le contrôle de Çolakoğlu Metalurji, qu’elles sont situées dans le même bâtiment et soulignent l’absence d’achats par ÇOTAŞ auprès de fabricants indépendants.

69      À cet égard, il n’est pas contesté que Çolakoğlu Metalurji détient 99,98 % des actions de ÇOTAŞ, ce fait pouvant être pris en compte parmi l’ensemble des facteurs pertinents.

70      Toutefois, il convient de mettre ce facteur en perspective avec les autres facteurs pertinents. En effet, si la seule circonstance du contrôle économique suffisait pour conclure à l’existence d’une entité économique unique, l’article 2, paragraphe 10, sous i), du règlement de base serait privé de tout effet utile.

71      Il n’est pas non plus contesté que ÇOTAŞ n’a réalisé aucun achat auprès de fournisseurs non liés et que les requérantes sont situées dans le même bâtiment.

72      Or, conformément à la jurisprudence rappelée au point 24 ci-dessus et conformément au considérant 88 du règlement attaqué, la Commission a pris en compte ces éléments dans le cadre de l’appréciation globale de tous les facteurs pertinents, à laquelle elle était tenue de procéder, afin de déterminer la réalité économique des relations existant entre les requérantes et a conclu, en substance et à juste titre que ces éléments n’étaient pas de nature à remettre en cause les considérations figurant aux considérants 79 à 86 du règlement attaqué, ainsi qu’il ressort des points 38 à 67 ci-dessus.

73      Il résulte de tout ce qui précède que la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation lorsqu’elle a apprécié globalement, dans le règlement attaqué, tous les facteurs pertinents pour écarter la qualification d’entité économique unique, compte tenu de la réalité économique des relations existant entre ÇOTAŞ et Çolakoğlu Metalurji.

74      La troisième branche du premier moyen doit ainsi être rejetée comme non fondée.

 Sur la deuxième branche du premier moyen, relative à l’absence de marge bénéficiaire

75      Les requérantes soutiennent que l’article 2, paragraphe 10, sous i), du règlement de base comprend deux scénarios d’ajustement, à savoir celui des commissions versées au titre des ventes et celui de la marge perçue par un opérateur commercial du produit ou du produit similaire si les fonctions de cet opérateur sont assimilables à celles d’un agent travaillant sur la base de commissions. Elles relèvent qu’aucun ajustement ne serait possible dans le cadre du second scénario, sauf si l’opérateur reçoit une marge lors de la revente. Or, en l’espèce, aucune marge n’aurait été perçue, car ÇOTAŞ vendrait au client européen indépendant au même prix que celui qui lui a été facturé par Çolakoğlu Metalurji.

76      La Commission conteste cette argumentation.

77      À cet égard, il convient de rappeler que l’article 2, paragraphe 10, sous i), du règlement de base prévoit qu’« [u]n ajustement est opéré au titre des différences dans les commissions versées pour les ventes considérées[ ; l]e terme “commissions” couvre aussi la marge perçue par un opérateur commercial du produit ou du produit similaire si les fonctions de cet opérateur sont assimilables à celles d’un agent travaillant sur la base de commissions ».

78      Selon les requérantes, pour appliquer un ajustement conformément à l’article 2, paragraphe 10, sous i), du règlement de base, il faut qu’une commission ait été effectivement payée. Un ajustement peut également être opéré pour la marge perçue par un opérateur économique, mais seulement si les fonctions de l’opérateur sont assimilables à celles d’un agent travaillant sur la base de commissions.

79      En premier lieu, selon la jurisprudence, l’article 2, paragraphe 10, sous i), du règlement de base permet d’opérer un ajustement non seulement au titre des différences dans les commissions versées pour les ventes considérées, mais aussi au titre de la marge perçue par des opérateurs commerciaux du produit s’ils remplissent des fonctions assimilables à celles d’un agent travaillant sur la base de commissions (voir arrêt du 25 juin 2015, PT Musim Mas/Conseil, T‑26/12, non publié, EU:T:2015:437, point 77 et jurisprudence citée).

80      Il y a donc lieu de considérer que le législateur de l’Union n’a pas entendu opérer une distinction entre « commissions » et « marge ». Il a uniquement entendu procéder à une clarification eu égard à la nature de la relation commerciale entre les parties en cause pour le cas où celles-ci n’entretiendraient pas une relation de commettant à commissionnaire, mais parviendraient au même résultat économique en agissant en tant que vendeur et acheteur. La seconde phrase de l’article 2, paragraphe 10, sous i), du règlement de base ne fait donc que définir le terme « commissions » figurant à la première phrase dudit article.

81      En deuxième lieu, il ressort du règlement attaqué, notamment de ses considérants 79 et 84, que l’ajustement en cause est fondé sur le fait qu’il existait un accord prévoyant une commission entre les requérantes et non sur le fait que ÇOTAŞ effectuait des reventes en percevant une marge.

82      En troisième lieu, la Commission soulève, sans que les requérantes ne le contestent, qu’il est à la fois déraisonnable et illogique d’affirmer qu’elle pourrait ajuster la commission versée pour autant qu’une certaine marge soit perçue, mais pas dans les cas où aucune marge n’est perçue.

83      Par conséquent, la deuxième branche du premier moyen semble reposer sur une compréhension erronée du droit et des faits de l’espèce.

84      La Commission n’a donc pas violé l’article 2, paragraphe 10, sous i), du règlement de base en se fondant sur une commission sous la forme d’un montant fixe et non sur une marge bénéficiaire. Partant, la deuxième branche du premier moyen doit être rejetée comme non fondée.

 Sur la première branche du premier moyen, relative à un ajustement prétendument supérieur à la commission effectivement payée

85      Les requérantes font valoir que, lorsqu’un ajustement intervient au titre du premier scénario visé à l’article 2, paragraphe 10, sous i), du règlement de base, c’est-à-dire en cas de commissions versées, celui-ci ne peut être opéré que pour le montant des commissions effectivement versées et non pour un montant hypothétique que la Commission considère plus approprié. En l’espèce, l’ajustement effectué par la Commission aurait excédé le montant de la commission effectivement versée. En procédant de la sorte, la Commission aurait violé l’article 2, paragraphe 10, sous i), du règlement de base. En outre, les requérantes soutiennent qu’elles n’ont pas pu être entendues sur un nouvel argument que la Commission aurait introduit dans le règlement attaqué.

86      La Commission conteste ces arguments.

87      Ainsi qu’il découle de la jurisprudence rappelée aux points 18, 19, 20 et 28 ci-dessus, si la Commission dispose d’un large pouvoir d’appréciation pour apprécier l’équité de la comparaison entre la valeur normale et le prix à l’exportation, il appartient au juge de l’Union de vérifier que la Commission n’a pas omis de prendre en considération des éléments essentiels.

88      De surcroît, il ressort du considérant 84 du règlement attaqué que la Commission a considéré que la commission prévue dans l’accord-cadre ne reflétait pas la rémunération adéquate du service rendu dans des conditions de pleine concurrence. Ainsi, un ajustement a été effectué en appliquant par analogie l’article 2, paragraphe 9, du règlement de base, comme il découle des considérants 84 et 89 du règlement attaqué, et le montant a donc été calculé sur la base de la marge bénéficiaire réalisée par un importateur exerçant des fonctions semblables à celles de ÇOTAŞ conformément au considérant 55 du règlement provisoire.

89      En premier lieu, les requérantes ne contestent pas le fait que Çolakoğlu Metalurji a versé à ÇOTAŞ une commission pour des services d’exportation à raison de1 USD par tonne vendue, conformément à l’accord conclu entre les requérantes. Dès lors que la fixation d’une commission était prévue dans l’accord entre les requérantes et que celles-ci n’ont pas rapporté la preuve que ladite commission n’avait pas réellement été payée, il y a lieu de considérer qu’une commission a été effectivement payée en contrepartie de la prestation des services prévus par ledit accord.

90      En revanche, une telle commission n’a pas été versée en ce qui concerne les ventes intérieures. Dès lors, il ne saurait être reproché à la Commission d’avoir opéré un ajustement au titre de l’article 2, paragraphe 10, sous i), du règlement de base afin d’assurer une comparaison équitable entre la valeur normale et le prix à l’exportation.

91      En deuxième lieu, il convient de préciser que, dans le cadre de la présente branche, les requérantes ne contestent pas la possibilité d’un ajustement, mais avancent que, dans la mesure où l’ajustement opéré au titre des commissions versées excèderait la commission effectivement versée à ÇOTAŞ, la Commission aurait violé l’article 2, paragraphe 10, sous i), du règlement de base.

92      En troisième lieu, les requérantes reprochent à la Commission d’avoir appliqué à tort par analogie l’article 2, paragraphe 9, du règlement de base afin de procéder à l’ajustement des commissions versées par Çolakoğlu Metalurji à ÇOTAŞ. En effet, l’article 2, paragraphe 9, dudit règlement concernerait la détermination du prix à l’exportation, tandis que l’article 2, paragraphe 10, dudit règlement concernerait les ajustements destinés à refléter les différences concernant les facteurs qui affectent la comparabilité des prix.

93      En particulier, les requérantes renvoient à la solution retenue par la Cour dans l’« affaire Musim Mas », selon laquelle aucune conclusion, applicable à l’analyse à effectuer par les institutions de l’Union dans le cadre de l’article 2, paragraphe 10, sous i), du règlement de base, ne saurait être tirée sur le fondement de l’article 2, paragraphe 9, dudit règlement (arrêt du 26 octobre 2016, PT Musim Mas/Conseil, C‑468/15 P, EU:C:2016:803, point 88).

94      À cet égard, comme le fait valoir la Commission, il y a lieu de tenir compte du fait que ces considérations formulées par la Cour concernaient la question de la charge de la preuve et les éléments de preuve qu’une partie invoquant l’article 2, paragraphe 10, sous i), du règlement de base doit produire. La Cour a d’ailleurs rejeté l’allégation selon laquelle il existait « dans le cadre de l’application de l’article 2, paragraphe 10, sous i), du règlement de base, [une] présomption que deux entreprises liées n’opèrent pas de manière indépendante » (arrêt du 26 octobre 2016, PT Musim Mas/Conseil, C‑468/15 P, EU:C:2016:803, point 86), à la différence de la présomption instituée par l’article 2, paragraphe 9, dudit règlement (arrêt du 26 octobre 2016, PT Musim Mas/Conseil, C‑468/15 P, EU:C:2016:803, point 88). En outre, la question de savoir si le négociant lié devait ou non être considéré comme un département de vente interne est distincte de la question relative à la quantification de l’ajustement proprement dit en cause en l’espèce dans le cadre de la présente branche. Or, la Cour s’est limitée à se prononcer sur la première question. En d’autres termes, la Cour n’a pas remis en cause le fait que la Commission puisse tenir compte de la relation entre le fabricant et le négociant lié lorsqu’elle détermine le montant approprié de l’ajustement à opérer, comme dans le cas de l’ajustement qu’elle effectue habituellement au titre de l’article 2, paragraphe 9, du règlement de base.

95      Partant, le principe énoncé à l’article 2, paragraphe 9, dudit règlement, selon lequel « lorsqu’il apparaît que le prix à l’exportation n’est pas fiable en raison de l’existence d’une association ou d’un arrangement de compensation entre l’exportateur et l’importateur ou un tiers, le prix à l’exportation peut être construit sur la base du prix auquel les produits importés sont revendus pour la première fois à un acheteur indépendant » doit pouvoir également s’appliquer lors de la quantification du montant des commissions à déduire du prix à l’exportation afin de ne pas priver l’article 2, paragraphe 10, sous i), du règlement de base de son effet utile.

96      Ainsi, ce qui importe aux fins de la quantification de l’ajustement, c’est l’incidence du rôle du négociant lié sur le prix à l’exportation et, en l’espèce, la question est de savoir quel serait le prix à l’exportation réel sur la base d’une relation de pleine concurrence entre l’exportateur et le négociant.

97      Il convient d’en conclure que, dans les circonstances de l’espèce, l’application par analogie, par la Commission, de l’article 2, paragraphe 9, du règlement de base lors de la quantification du montant des commissions à déduire au titre de l’article 2, paragraphe 10, sous i), dudit règlement était justifiée.

98      En quatrième lieu, les requérantes soutiennent qu’elles n’ont pas pu être entendues sur un nouvel argument que la Commission aurait introduit dans le règlement attaqué et selon lequel, en substance, « une commission a effectivement été versée par Çolakoğlu Metalurji à ÇOTAŞ, mais que, cette commission ayant été versée entre parties liées, ce montant a été adapté pour refléter une rémunération adéquate, en appliquant par analogie l’article 2, paragraphe 9, du règlement de base ».

99      Concernant le droit d’être entendu, les juridictions de l’Union ont établi que, dans le cadre de procédures antidumping, les parties concernées ont un droit d’être informées des faits et considérations essentiels sur la base desquels il est envisagé de recommander l’institution de droits antidumping définitifs. En outre, les parties concernées doivent être informées à une date leur permettant encore de faire connaître utilement leur point de vue avant l’adoption du règlement attaqué (voir arrêt du 10 mars 2009, Interpipe Niko Tube et Interpipe NTRP/Conseil, T‑249/06, EU:T:2009:62, point 200 et jurisprudence citée).

100    Cependant, le droit d’être entendu s’étend à tous les éléments de fait ou de droit qui constituent le fondement de l’acte décisionnel, mais non à la position finale que l’administration entend adopter. Ainsi ce droit ne commande pas que, avant d’adopter sa position finale sur l’appréciation des éléments présentés par une partie, l’administration soit tenue d’offrir à cette dernière une nouvelle possibilité de s’exprimer à propos desdits éléments (voir arrêt du 14 juillet 2021, Interpipe Niko Tube et Interpipe Nizhnedneprovsky Tube Rolling Plant/Commission, T‑716/19, EU:T:2021:457, point 211 et jurisprudence citée).

101    Or, en l’espèce, après avoir rappelé au considérant 54 du règlement provisoire que le négociant lié ne remplissait pas les critères permettant de considérer qu’il forme une entité économique unique avec son producteur, la Commission a indiqué, au considérant 55 dudit règlement, ce qui suit :

« En conséquence, afin d’établir un prix à l’exportation au niveau départ usine de ce producteur-exportateur, le prix à l’exportation a été ajusté conformément à l’article 2, paragraphe 10, sous i), du règlement de base. Dès lors, la Commission a déduit du prix à l’exportation les frais de vente, dépenses administratives et autres frais généraux du négociant lié qui n’a pas été considéré comme formant une entité économique unique avec le producteur-exportateur, ainsi qu’un bénéfice égal au bénéfice d’un importateur indépendant dans l’Union défini sur la base des informations contenues dans le dossier de cette enquête et des constatations d’une précédente enquête sur les importations de produits semblables au produit soumis à enquête. »

102    Dès lors, le règlement provisoire informait déjà les requérantes que l’ajustement du prix à l’exportation se justifiait notamment par l’existence de parties liées. Même s’il est exact que le règlement attaqué mentionne pour la première fois une application par analogie de l’article 2, paragraphe 9, du règlement de base afin de tenir compte des fonctions du négociant lié et de refléter la rémunération adéquate du service rendu dans des conditions de pleine concurrence, les motifs ayant mené la Commission à opérer ledit ajustement sont restés, en substance, inchangés. La Commission a simplement développé son raisonnement, sans modifier la nature ou le montant de l’ajustement opéré. Les requérantes ont donc été informées des faits et considérations juridiques revêtant une importance essentielle et ont pu prendre position à cet égard pendant la procédure administrative.

103    En cinquième lieu, les requérantes font valoir qu’aucune information ou explication n’a été fournie quant aux raisons pour lesquelles la Commission a considéré que la commission de 1 USD par tonne prévue dans l’accord conclu entre Çolakoğlu Metalurji et ÇOTAŞ ne constituait pas une rémunération adéquate et qu’un ajustement supplémentaire était nécessaire. La Commission n’aurait pas non plus recherché si les fonctions de l’importateur indépendant, pris comme référence, étaient identiques aux fonctions de ÇOTAŞ

104    Il convient de rappeler que la Commission n’est pas tenue de spécifier tous les différents éléments de fait et de droit, parfois très nombreux et complexes, qui font l’objet d’un règlement instituant des droits antidumping définitifs. Il lui suffit d’exposer les faits et considérations juridiques revêtant une importance essentielle (voir, en ce sens, arrêts du 13 septembre 2010, Whirlpool Europe/Conseil, T‑314/06, EU:T:2010:390, point 114, et du 30 juin 2016, Jinan Meide Casting/Conseil, T‑424/13, EU:T:2016:378, point 126). Par ailleurs, lorsqu’il s’agit d’un règlement, la motivation peut se borner à indiquer, d’une part, la situation d’ensemble qui a conduit à son adoption et, d’autre part, les objectifs généraux qu’il se propose d’atteindre (voir arrêt du 20 janvier 2022, Commission/Hubei Xinyegang Special Tube, C‑891/19 P, EU:C:2022:38, point 89 et jurisprudence citée).

105    Premièrement, concernant spécifiquement les explications fournies quant aux raisons pour lesquelles la Commission a considéré que la commission de 1 USD par tonne ne constituait pas une rémunération adéquate, il suffit d’observer que la Commission a exposé, d’une part, au considérant 84 du règlement attaqué, que l’ajustement avait été opéré pour « refléter la rémunération adéquate du service rendu dans des conditions de pleine concurrence » au moyen de l’ajout d’un bénéfice raisonnable, de sorte qu’elle a pu motiver l’ajustement supplémentaire, et, d’autre part, au considérant 89 du règlement attaqué que « [l]e négociant lié a[vait] été payé au moyen d’une commission sur la base des ventes réalisées[ ; é]tant donné que cette rémunération a été affectée par la relation intragroupe et en appliquant par analogie l’article 2, paragraphe 9, du règlement de base, il a été jugé approprié d’utiliser une marge bénéficiaire raisonnable afin d’éviter tout effet de distorsion pouvant résulter d’accords internes entre le producteur-exportateur et le négociant lié ».

106    Il s’ensuit que la Commission a exposé, à suffisance de droit, les faits et considérations juridiques revêtant une importance essentielle et expliquant en quoi la commission de 1 USD par tonne prévue dans l’accord conclu entre Çolakoğlu Metalurji et ÇOTAŞ ne constituait pas une rémunération adéquate.

107    Deuxièmement, les requérantes affirment que la Commission n’aurait pas satisfait à son obligation d’apporter la preuve du caractère nécessaire du recours à l’ajustement en cause.

108    D’une part, les requérantes s’appuient sur la jurisprudence selon laquelle, lorsque les institutions de l’Union considèrent qu’il y a lieu d’appliquer un ajustement à la baisse du prix à l’exportation au motif qu’une société de vente liée à un producteur exerce des fonctions assimilables à celles d’un agent travaillant sur la base de commissions, il appartient à ces institutions de rapporter à tout le moins des indices convergents démontrant que cette condition est remplie (arrêts du 26 octobre 2016, PT Musim Mas/Conseil, C‑468/15 P, EU:C:2016:803, point 84, et du 10 mars 2009, Interpipe Niko Tube et Interpipe NTRP/Conseil, T‑249/06, EU:T:2009:62, points 60 et 61). Or, il convient de relever que la Commission a, comme constaté aux points 30 à 74 ci-dessus, rapporté des indices convergents démontrant que ÇOTAŞ exerçait des fonctions assimilables à celles d’un agent travaillant sur la base de commissions.

109    D’autre part, comme exposé au point 105 ci-dessus, la Commission a apporté la preuve, au considérant 84 du règlement attaqué, que l’ajustement avait été opéré pour « refléter la rémunération adéquate du service rendu dans des conditions de pleine concurrence » au moyen de l’ajout d’un bénéfice raisonnable. Par ailleurs, il convient de rappeler que ÇOTAŞ fournissait des services spécifiquement liés aux ventes à l’exportation, mais qu’aucune commission équivalente n’était versée sur le marché intérieur. Or, ainsi qu’il est rappelé au considérant 83 du règlement attaqué, l’objectif d’un ajustement au titre de l’article 2, paragraphe 10, sous i), du règlement de base est de garantir que toute commission versée à un agent pour les ventes à l’exportation pour rémunérer les services fournis par cet agent dans le cadre de ces activités de vente, quelle que soit la forme de ces services, soit dûment ajustée afin de garantir la comparabilité avec les ventes intérieures.

110    La Commission a ainsi également satisfait à la charge de la preuve qui lui incombait s’agissant de la justification de l’ajustement supplémentaire sur la base de l’article 2, paragraphe 10, sous i), du règlement de base.

111    Troisièmement, concernant l’argument des requérantes selon lequel la Commission n’aurait pas recherché si les fonctions de l’importateur indépendant étaient identiques aux fonctions de ÇOTAŞ et, en général, selon lequel peu ou aucune information n’aurait été fournie sur l’autre enquête, il convient de constater que l’enquête précédente en question a été mentionnée au considérant 55 du règlement provisoire et que cette même enquête renvoie à une enquête relative à un produit très similaire.

112    Tout d’abord, ainsi qu’il ressort du considérant 55 du règlement provisoire, une marge bénéficiaire raisonnable a été calculée sur la base des informations contenues dans le dossier de cette enquête et des constatations d’une précédente enquête sur les importations de produits semblables au produit soumis à l’enquête. À cet effet, il convient de rappeler que cet importateur fournissait, comme ÇOTAŞ dans le cadre de l’enquête ayant mené au règlement attaqué, des services « relatifs au dédouanement et au chargement, [préparait] les documents d’exportation nécessaires après le chargement et [mettait] en œuvre des procédures liées à l’exportation » telles que décrites au considérant 89 du règlement attaqué.

113    Ensuite, il convient également de relever que les requérantes n’ont pas soulevé les interrogations mentionnées au point 111 ci-dessus dans le cadre de leurs observations sur les mesures provisoires ou dans leurs observations sur les mesures définitives, ce qui aurait permis à la Commission d’apporter des précisions supplémentaires.

114    Enfin, dans la duplique, la Commission a confirmé que l’enquête dont proviennent les données obtenues auprès de l’importateur indépendant et qu’elle a vérifiées était celle sur les importations de certains produits plats laminés à froid en acier originaires de la République populaire de Chine et de la Fédération de Russie. Cet importateur se spécialisait particulièrement dans les produits plats laminés à froid ou à chaud en acier. Pour cette raison, et sur la base d’une analyse détaillée du dossier d’enquête dans cette affaire et des fonctions que l’importateur indépendant exerçait, il ne saurait être reproché à la Commission d’avoir jugé approprié de se fonder également, dans le cadre de la présente enquête, sur les données vérifiées de cet importateur dans le cadre de la présente enquête.

115    Il s’ensuit que la Commission a suffisamment recherché à savoir si les fonctions de l’importateur indépendant étaient identiques aux fonctions de ÇOTAŞ et a fourni les éléments essentiels permettant aux requérantes de faire connaître utilement leur point de vue.

116    Il résulte de ce qui précède que la Commission n’a pas violé l’article 2, paragraphe 10, sous i), du règlement de base en ajustant les commissions existantes eu égard à la relation entre les requérantes.

117    En sixième lieu, il convient d’apprécier si la fixation par la Commission du montant de la commission en cause est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation. Bien que ce grief n’ait pas été expressément soulevé par les requérantes dans leur requête, il ressort néanmoins de leurs écritures qu’elles questionnent l’approche de la Commission à cet égard.

118    En l’espèce, au considérant 89 du règlement attaqué, la Commission a estimé que le négociant lié avait été effectivement payé au moyen d’une commission sur la base des ventes réalisées et qu’étant donné que cette rémunération a été affectée par la relation intragroupe, il était approprié d’utiliser une marge bénéficiaire raisonnable afin d’éviter tout effet de distorsion pouvant résulter d’accords internes entre le producteur-exportateur et le négociant lié.

119    Premièrement, la Commission a pu estimer que la commission en cause de 1 USD par tonne ne correspondait pas aux conditions du marché et devait donc être ajustée. Non seulement cette commission est convenue entre parties liées, mais il convient de constater, ainsi qu’il ressort du considérant 84 du règlement attaqué, de l’accord-cadre et des explications des requérantes, que seuls certains bénéfices générés par les opérations d’exportation revenaient à ÇOTAŞ. Or, il peut être raisonnablement considéré qu’un négociant indépendant aurait cherché à dégager un bénéfice raisonnable pour son travail (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 22 septembre 2021, Severstal/Commission, T‑753/16, non publié, EU:T:2021:612, point 162).

120    En outre, selon la jurisprudence, d’une part, une marge bénéficiaire raisonnable peut, en présence d’une association entre producteur et importateur dans l’Union, être calculée sur le fondement non des données émanant de l’importateur affilié, qui peuvent être influencées par cette association, mais de celles émanant d’un importateur indépendant et, d’autre part, des données émanant d’une relation entre entités liées doivent être tenues pour suspectes (voir arrêt du 10 avril 2019, Jindal Saw et Jindal Saw Italia/Commission, T‑301/16, EU:T:2019:234, points 157 et 163 et jurisprudence citée).

121    En conséquence, c’est sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation que la Commission a estimé que la commission en cause de 1 USD par tonne devait être ajustée.

122    Deuxièmement, ainsi qu’il ressort des explications des parties requérantes et de la Commission, cette dernière a déduit, au lieu de la commission prévue, les frais de vente, dépenses administratives et autres frais généraux de ÇOTAŞ (0,1754 %), majorés d’une marge bénéficiaire de 2 % sur le chiffre d’affaires du prix de vente final par ÇOTAŞ. Cette marge a été calculée sur la base de la marge bénéficiaire réalisée par un importateur exerçant des fonctions similaires à celles de ÇOTAŞ, ainsi qu’il est indiqué au considérant 55 du règlement provisoire.

123    D’une part, il convient de constater que la marge bénéficiaire de 2 % n’apparaît pas déraisonnable pour des services aux fins de l’exportation des produits en cause. D’autre part, ainsi qu’il ressort du considérant 55 du règlement provisoire, cette marge a été calculée sur la base des informations contenues dans le dossier de cette enquête et des constatations d’une précédente enquête sur les importations de produits semblables au produit soumis à enquête. À cet effet, cet importateur fournissait, comme ÇOTAŞ dans le cadre de la présente enquête, des services « relatifs au dédouanement et au chargement, [préparait] les documents d’exportation nécessaires après le chargement et [mettait] en œuvre des procédures liées à l’exportation ».

124    En conséquence, étant donné que ÇOTAŞ fournissait des services tels que le dédouanement et le chargement, la préparation des documents d’exportation nécessaires après le chargement et la mise en œuvre de procédures liées à l’exportation, ses frais de vente, dépenses administratives et autres frais généraux réels, majorés du niveau de bénéfice d’un importateur non lié, peuvent être considérés comme correspondant aux fonctions que cette société exerçait, et représentent un niveau de bénéfice raisonnable.

125    Troisièmement, sur la base du rapport d’audit fourni lors de l’enquête, les requérantes estiment, dans leur réplique, que les frais subis par ÇOTAŞ dans le cadre des ventes à l’exportation s’élevaient à 5 743 836 TRY, tandis que les revenus tirés du service d’agence à l’exportation s’élevaient à 6 256 504 TRY. Ainsi, ÇOTAŞ aurait réalisé un bénéfice – seulement issu des commissions – de 8,2 % (en tant que pourcentage du revenu) et de 8,9 % (en tant que pourcentage des frais) sur ses activités liées aux ventes à l’exportation de Çolakoğlu Metalurji.

126    Les requérantes soutiennent ainsi que la marge bénéficiaire de ÇOTAŞ devrait être ajustée sur la base des coûts exposés par cette dernière, et non sur la base des recettes des ventes que ses services ont facilitées. Elles reprochent à la Commission de ne pas avoir expliqué la raison pour laquelle une marge bénéficiaire de plus de 8 % n’était pas raisonnable.

127    Tout d’abord, il convient de relever que ces éléments n’ont été avancés par les requérantes ni pendant l’enquête ni dans leur requête.

128    Ensuite, à supposer que ces arguments soient recevables, la Commission, dans sa duplique, précise que, sur la base des observations des requérantes vérifiées au cours de l’enquête, les recettes tirées des reventes effectuées par ÇOTAŞ des exportations du produit concerné vers l’Union se chiffraient à plus de 2,37 milliards de TRY pendant la période d’enquête. Dès lors, la commission versée par Çolakoğlu Metalurji, si elle n’était imputée qu’aux exportations du produit concerné vers l’Union sur la base du chiffre d’affaires, représenterait 4,42 millions de TRY au cours de la période d’enquête. En soustrayant les coûts réels supportés par ÇOTAŞ pour les exportations du produit concerné vers l’Union, il en résulterait, si l’argumentation des requérantes devait être accueillie, une marge bénéficiaire de 0,0098 %, laquelle ne refléterait toutefois pas une rémunération de pleine concurrence.

129    À cet égard, le calcul du taux de marge bénéficiaire consiste, d’une manière générale, en la division du bénéfice net par les revenus ou les ventes, aussi désigné chiffre d’affaires. Dès lors, fonder la marge bénéficiaire sur le chiffre d’affaires des produits vendus, comme la Commission l’a fait en l’espèce, ne peut être considéré comme incorrect. De plus, l’estimation du taux de marge bénéficiaire effectuée par les requérantes est en tout état de cause imprécise, dès lors que le rapport d’audit, pris comme base pour le calcul effectué par les requérantes, ne précise pas s’il est tenu spécifiquement compte des exportations du produit concerné vers l’Union.

130    Enfin, dans le cadre de l’enquête en cause, la Commission a eu recours à des éléments de preuve concrets et vérifiés attestant du comportement d’une entité indépendante fournissant des services « similaires » à ceux du négociant lié. En conséquence, elle a choisi d’appliquer un taux de marge bénéficiaire de 2 % sur le chiffre d’affaires du prix de vente final, qui, ainsi qu’il ressort du point 124 ci-dessus, peut être considéré comme raisonnable.

131    Ainsi, il convient de conclure que la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation dans son calcul de la marge bénéficiaire.

132    Sur le fondement de tout ce qui précède et compte tenu du large pouvoir d’appréciation de la Commission rappelé au point 18 ci-dessus, il convient de considérer que la Commission n’a ni violé l’article 2, paragraphe 10, sous i), du règlement de base ni commis d’erreur manifeste d’appréciation en ajustant les commissions existantes eu égard à la relation entre les requérantes. La première branche du premier moyen doit donc être rejetée.

133    Il s’ensuit que l’ensemble du premier moyen doit être rejeté.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 2, paragraphe 10, sous b), du règlement de base

134    Dans le cadre du deuxième moyen, les requérantes font valoir, en substance, que le non‑paiement de droits à l’importation ne constitue pas le critère juridique pertinent pour rejeter un ajustement au titre de l’article 2, paragraphe 10, sous b), du règlement de base.

135    La Commission conteste ces arguments.

136    L’article 2, paragraphe 10, sous b), du règlement de base dispose que « [l]a valeur normale est ajustée d’un montant correspondant aux impositions à l’importation et aux impôts indirects supportés par le produit similaire et les matériaux qui y sont physiquement incorporés, lorsque le produit est destiné à être consommé dans le pays exportateur, et qui ne sont pas perçus ou qui sont remboursés lorsque le produit est exporté dans l’Union ».

137    En premier lieu, dans leur réponse au questionnaire soumis dans le cadre de l’enquête, les requérantes ont demandé un ajustement au titre des impositions à l’importation et des impôts indirects pour tenir compte du fait que, pour les produits finis exportés, elles n’auraient pas eu à payer de droits à l’importation pour les matières importées en amont, lesdits droits ne devant être acquittés que lorsque lesdites matières sont utilisées pour la fabrication de produits finis vendus sur le marché intérieur.

138    Cette demande d’ajustement a été rejetée aux considérants 62 et 63 du règlement provisoire aux motifs suivants :

« (62) [E]n vertu du régime du perfectionnement actif, les producteurs nationaux sont exonérés du paiement de ce droit si les plaques/la ferraille d’acier importées sont utilisées pour fabriquer des produits finis destinés à l’exportation. Les deux exportateurs retenus dans l’échantillon ont affirmé que le montant des droits qu’ils auraient dû payer si l’acier plat laminé à chaud fini était vendu sur le marché intérieur plutôt qu’exporté devrait être pris en considération afin d’assurer une comparaison équitable de la valeur normale et du prix à l’exportation.

(63) Cependant, l’enquête a montré qu’aucun des deux exportateurs retenus dans l’échantillon n’avait payé de droits à l’importation pendant la période d’enquête puisqu’ils remplissaient l’engagement à l’exportation lié à chaque permis de régime du perfectionnement actif. Dès lors, l’ajustement au titre de la ristourne de droits demandé ne représentait qu’un coût théorique. Pour cette raison, la demande a été considérée comme dénuée de fondement et rejetée. »

139    Dans le règlement attaqué, la Commission a indiqué, au considérant 105, que les requérantes n’avaient avancé aucun nouvel argument qui puisse modifier cette appréciation, et les conclusions provisoires ont donc été confirmées. À titre de considération supplémentaire, la Commission a également fait observer au considérant 110 dudit règlement qu’il était apparu que, contrairement aux allégations de la société, les prix de vente intérieurs pratiqués par le producteur-exportateur ne tenaient pas compte du montant de la ristourne de droits demandée, ce qui aurait pour effet de rendre les ventes déficitaires.

140    Premièrement, les requérantes affirment que l’expression « supportés par » figurant à l’article 2, paragraphe 10, sous b), du règlement de base, a un sens plus large que l’expression « payés par » figurant à l’article 2, paragraphe 9, du règlement de base. Toutefois, aucune conclusion ne peut être tirée de la seule rédaction de cette dernière disposition et, en particulier, il ne saurait en être déduit que ces deux expressions ont des significations différentes. En effet, lorsqu’elles appliquent l’article 2, paragraphe 9, du règlement de base, les institutions de l’Union sont censées s’appuyer sur les coûts réels engagés par les importateurs qui ont fait l’objet d’une enquête et dont les comptes ont été vérifiés.

141    En outre, l’article 2, paragraphe 10, sous b), du règlement de base ne fait pas référence aux effets indirects des impositions et impôts, mais uniquement « aux impositions à l’importation et aux impôts indirects supportés par le produit similaire et les matériaux qui y sont physiquement incorporés ».

142    Deuxièmement, les requérantes ont avancé dans leurs observations sur les conclusions provisoires que la simple existence d’un droit à l’importation sur un intrant a un effet sur le prix facturé par les fournisseurs nationaux de cet intrant, que ce droit à l’importation ait été effectivement payé ou non. Puis, dans leur réplique, elles ont précisé que les droits à l’importation sur les plaques ont une incidence sur le prix de vente des produits finis sur le marché intérieur.

143    Conformément à la jurisprudence citée au point 26 ci-dessus, il appartient à celui qui revendique un ajustement au titre de l’article 2, paragraphe 10, sous b), dudit règlement, de démontrer, notamment, premièrement, qu’une imposition à l’importation a été payée sur un intrant et, deuxièmement, que l’imposition à l’importation ou son équivalent affecte les prix et leur comparabilité.

144    Même à supposer qu’une interprétation large de la notion d’« impôts supportés » doive être retenue, les requérantes ne sont parvenues ni à prouver que, dû au droit à l’importation, les prix des plaques fabriquées sur le marché intérieur étaient nécessairement augmentés et portés au niveau de prix des plaques importées, ni qu’il aurait été tenu compte de cette augmentation du prix des plaques dans les prix des ventes d’acier plat laminé à chaud réalisées par elles sur le marché intérieur et que l’équivalent d’une imposition à l’importation avait ainsi affecté la comparabilité des prix.

145    Il convient d’observer à cet égard que ces prix dépendent également d’autres facteurs, comme les coûts de production, le niveau des impositions, le niveau des importations ou encore le niveau de la concurrence sur le marché en question. Or, les requérantes n’ont pas démontré que les droits à l’importation pourraient, en l’espèce, avoir un effet sur le prix et sur l’ajustement opéré au titre de l’article 2, paragraphe 10, sous b), du règlement de base, lequel fait référence aux différences affectant la comparabilité des prix.

146    À cet égard, il est constant entre les parties que les requérantes n’ont pas acheté de plaques sur le marché intérieur au cours de la période d’enquête et que les plaques qu’elles ont achetées au cours de cette période ont été importées (21 % de la quantité totale de plaques utilisées) sans qu’aient dû être payés des droits à l’importation. Les autres plaques ont été produites par Çolakoğlu Metalurji même, en sa qualité de productrice verticalement intégrée d’acier plat laminé à chaud. De surcroît, les requérantes n’ont pas démontré que le prix de vente final de l’acier plat laminé à chaud était affecté par les droits à l’importation sur les plaques.

147    Troisièmement, concernant la référence faite par les requérantes à la détermination d’un ajustement au titre de la ristourne de droits par le ministère du Commerce des États-Unis, il suffit de relever que les décisions prises par des autorités d’enquête d’États tiers en application de leurs propres législations antidumping sont dénuées de pertinence dans le cadre de l’analyse de l’application du droit de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 1er juillet 2010, AstraZeneca/Commission, T‑321/05, EU:T:2010:266, point 368 et jurisprudence citée) dans la mesure où le juge de l’Union, saisi d’un recours en annulation formé sur le fondement de l’article 263 TFUE, ne peut qu’apprécier des moyens contestant la légalité de l’acte attaqué au regard du droit de l’Union (arrêt du 16 juillet 2020, ADR Center/Commission, C‑584/17 P, EU:C:2020:576, point 81). Par ailleurs, comme souligné par la Commission, les faits sous-jacents et le droit applicable dans cette enquête américaine n’ont pas été clairement exposés que ce soit lors de la procédure administrative ou lors du présent recours.

148    Il convient donc de considérer que la Commission n’a pas violé l’article 2, paragraphe 10, sous b), du règlement de base.

149    En deuxième lieu, les requérantes reprochent à la Commission de ne pas avoir répondu à plusieurs de leurs arguments et d’avoir ainsi enfreint le principe de bonne administration. Les requérantes fondent leurs observations sur les conclusions provisoires dans lesquelles, à la suite du rejet de leur demande d’ajustement, elles fournissent des arguments tendant à démontrer que la simple existence d’un droit à l’importation sur un intrant a un effet sur le prix facturé par les fournisseurs nationaux de cet intrant, que ce droit à l’importation ait été effectivement payé ou non.

150    À cet égard, les requérantes relèvent que l’article 2.4 de l’accord sur la mise en œuvre de l’article VI de l’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994 (JO 1994, L 336, p. 103, ci-après l’« accord antidumping ») prévoit dans sa partie pertinente que les « autorités indiqueront aux parties en question quels renseignements sont nécessaires pour assurer une comparaison équitable, et la charge de la preuve qu’elles imposeront à ces parties ne sera pas déraisonnable ».

151    Tout d’abord, les dispositions du règlement de base, en ce qu’elles correspondent à des dispositions de l’accord antidumping de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), doivent être interprétées, dans la mesure du possible, à la lumière des dispositions correspondantes de cet accord, telles qu’interprétées par l’organe de règlement des différends de l’OMC (voir arrêt du 21 décembre 2022, Grünig/Commission, T‑746/20, EU:T:2022:836, point 163 et jurisprudence citée).

152    À cet égard, il y a lieu de rappeler que, à la différence de l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base, l’article 2.4 de l’accord antidumping précise que les « autorités indiqueront aux parties en question quels renseignements sont nécessaires pour assurer une comparaison équitable, et la charge de la preuve qu’elles imposeront à ces parties ne sera pas déraisonnable ». Ces exigences ne sont pas expressément reprises à l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base. Cependant, elles font partie des principes généraux de droit de l’Union et, notamment, du principe de bonne administration, inscrit également à l’article 41 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (JO 2010, C 83, p. 389). Ainsi, il appartient au Tribunal de vérifier si les institutions ont tenu compte de ces exigences dans leur application de l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base (voir, en ce sens, arrêt du 6 septembre 2013, Godrej Industries et VVF/Conseil, T-6/12, EU:T:2013:408, point 51 et jurisprudence citée).

153    Ensuite, il convient de rappeler que le droit à une bonne administration suppose un devoir de diligence qui impose à l’institution compétente d’examiner avec soin et impartialité tous les éléments pertinents du cas d’espèce (voir arrêt du 14 décembre 2022, PT Wilmar Bioenergi Indonesia e.a./Commission, T‑111/20, EU:T:2022:809, point 301 et jurisprudence citée).

154    Enfin, il ne résulte ni du libellé de l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base dans son ensemble ni de la jurisprudence que, lorsque la Commission constate qu’une demande d’ajustement présentée par une partie intéressée n’est pas suffisamment étayée, elle serait tenue de demander à celle-ci de lui fournir des éléments complémentaires [arrêt du 20 septembre 2019, Jinan Meide Casting/Commission, T 650/17, EU:T:2019:644, point 324 (non publié)].

155    Au demeurant, la Commission n’est pas tenue de répondre, dans un règlement fixant des droits antidumping définitifs, à l’ensemble des arguments avancés par les parties intéressées au cours de la procédure d’enquête, et cette absence de réponse ne saurait automatiquement établir un défaut d’examen de ces arguments. Il suffit, au contraire, que la Commission expose les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie du règlement contesté (voir, arrêt du 5 mai 2021, Acron e.a./Commission, T-45/19, non publié, EU:T:2021:238, point 95 et jurisprudence citée).

156    En l’espèce, le règlement provisoire expliquait déjà, à son considérant 63, que « l’enquête a montré qu’aucun des deux exportateurs retenus dans l’échantillon n’avait payé de droits à l’importation pendant la période d’enquête puisqu’ils remplissaient l’engagement à l’exportation lié à chaque permis de régime du perfectionnement actif[ ; d]ès lors, l’ajustement au titre de la ristourne de droits demandé ne représentait qu’un coût théorique[ ; p]our cette raison, la demande a été considérée comme dénuée de fondement et rejetée ».

157    Au considérant 105 du règlement attaqué, la Commission a, à nouveau, rejeté les demandes des parties au motif que « [l]es sociétés [n’avaient] fourni aucun nouvel élément de preuve à l’appui d’un ajustement au titre de la ristourne de droits qui puisse modifier [son] appréciation provisoire ».

158    Au considérant 110 du règlement attaqué, la Commission a également précisé que « les prix de vente […] pratiqués par le producteur-exportateur ne tenaient pas compte du montant de la ristourne de droits demandée ».

159    Par ailleurs, ainsi qu’il résulte de l’examen de la première partie de la présente branche aux points 137 à 148 ci-dessus, l’article 2, paragraphe 10, sous b), du règlement de base s’applique aux impositions à l’importation et aux impôts indirects effectivement payés et spécifiquement liés au produit exporté vers l’Union, et non aux effets indirects découlant généralement de la présence de tarifs douaniers sur les intrants dans le pays d’exportation.

160    Il résulte de ce qui précède, d’une part, que les requérantes ne sont pas fondées à faire valoir que la Commission n’aurait pas examiné avec diligence leur demande d’ajustement et, d’autre part, que celle-ci n’était pas tenue d’exposer tous les éléments de fait et de droit fondant sa décision, en particulier ceux ayant trait à des arguments que les requérantes n’avaient pas suffisamment étayés.

161    Il s’ensuit qu’il convient de rejeter l’argument tiré de la violation du principe de bonne administration.

162    Pour les raisons qui précèdent, il convient d’écarter le second moyen comme non fondé.

 Sur le troisième moyen, tiré d’une erreur manifeste d’appréciation tirée du refus de la Commission de procéder au calcul mensuel ou trimestriel de la marge de dumping et de la violation consécutive de l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base

163    Par ce moyen, les requérantes reprochent, en substance, à la Commission d’avoir violé l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base en refusant un calcul mensuel ou trimestriel de la marge de dumping.

164    La Commission conteste cette argumentation.

165    L’article 2, paragraphe 11, du règlement de base prévoit notamment :

« Sous réserve des dispositions pertinentes régissant la comparaison équitable, l’existence de marges de dumping au cours de la période d’enquête est normalement établie sur la base d’une comparaison d’une valeur normale moyenne pondérée avec la moyenne pondérée des prix de toutes les exportations vers l’Union ou sur la base d’une comparaison des valeurs normales individuelles et des prix à l’exportation individuels vers l’Union, transaction par transaction […] »

166    Concernant ledit article 2, paragraphe 11, du règlement de base, il y a lieu de rappeler qu’il est de jurisprudence constante que le choix entre différentes méthodes de calcul de la marge de dumping suppose l’appréciation de situations économiques complexes et que le contrôle juridictionnel d’une telle appréciation doit ainsi être limité à la vérification du respect des règles de procédure, de l’exactitude matérielle des faits retenus pour opérer le choix contesté, de l’absence d’erreur manifeste dans l’appréciation de ces faits ou de l’absence de détournement de pouvoir (voir arrêt du 13 avril 2011, Far Eastern New Century/Conseil, T‑167/07, non publié, EU:T:2011:165, point 64 et jurisprudence citée).

167    Il y a lieu d’observer que l’article 2.4 de l’accord antidumping, qui traite de la comparaison équitable, contient une disposition partiellement similaire à celle de l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base et est rédigé comme suit :

« Il sera procédé à une comparaison équitable entre le prix d’exportation et la valeur normale. Elle sera faite au même niveau commercial, qui sera normalement le stade sortie usine, et pour des ventes effectuées à des dates aussi voisines que possible. Il sera dûment tenu compte dans chaque cas, selon ses particularités, des différences affectant la comparabilité des prix, y compris des différences dans les conditions de vente, dans la taxation, dans les niveaux commerciaux, dans les quantités et les caractéristiques physiques, et de toutes les autres différences dont il est aussi démontré qu’elles affectent la comparabilité des prix […] Les autorités indiqueront aux parties en question quels renseignements sont nécessaires pour assurer une comparaison équitable, et la charge de la preuve qu’elles imposeront à ces parties ne sera pas déraisonnable. »

168    Dans le contexte de l’article 2.4 de l’accord antidumping, dans le rapport du groupe spécial de l’OMC dans l’affaire États-Unis – Mesures antidumping visant les tôles d’acier inoxydable en rouleaux et les feuilles et bandes d’acier inoxydable en provenance de Corée (WT/DS 179/R, points 6.122 et 6.123), il a été relevé :

« Les États-Unis font valoir, en fait, que la prescription de l’article 2.4 concernant les “dates aussi voisines que possibles” implique une préférence en faveur de périodes courtes pour le calcul des moyennes. À notre avis, toutefois, l’argument des États-Unis va trop loin […] Nous n’excluons pas qu’il puisse y avoir des circonstances factuelles dans lesquelles l’utilisation de plusieurs périodes pour le calcul des moyennes pourrait être appropriée pour garantir que la comparabilité ne soit pas affectée par des différences dans les dates des ventes à l’intérieur des périodes de calcul des moyennes sur les marchés intérieur et extérieur […] »

169    C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner les arguments des requérantes.

170    Les requérantes soutiennent, en substance, en invoquant la violation de l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base et en se référant à la comparaison équitable, que l’utilisation par la Commission des moyennes annuelles en l’espèce, afin de calculer la marge dumping, a remis en cause cette comparaison équitable entre le prix à l’exportation et la valeur normale.

171    Il convient donc de vérifier si, en se fondant sur les moyennes annuelles pour le calcul de la marge de dumping, la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation ayant entraîné une violation de l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base.

172    En premier lieu, les requérantes font valoir que, en raison des fluctuations des prix des deux principaux intrants en l’espèce, à savoir de la ferraille et des brames d’acier, un calcul mensuel ou trimestriel pour la détermination de la rentabilité des ventes intérieures est justifié afin d’atteindre une comparaison équitable entre la valeur normale et le prix à l’exportation.

173    En outre, selon les requérantes, l’impact inflationniste du calcul de la marge de dumping sur l’ensemble de la période d’enquête serait double. D’une part, lorsque la valeur normale est fondée sur les ventes intérieures, il en résulterait une valeur normale trop élevée, car seules les ventes rentables à prix élevé seraient prises en compte. D’autre part, lors de la construction de la valeur normale, seul le bénéfice des ventes intérieures rentables serait pris en considération.

174    À cet égard, il convient de préciser, s’agissant des changements dans le coût de production, que certaines fluctuations de coûts constituent un élément normal dans le fonctionnement des entreprises. En outre, il ne suffit pas de démontrer que le coût de la production a connu des changements, mais aussi dans quelle mesure de tels changements ont été traduits en prix, dès lors que c’est la comparabilité des prix qui est en cause.

175    Dans leurs écritures, les requérantes se sont appuyées sur trois exemples pour démontrer l’incidence des changements du coût de production sur la comparabilité des prix. Cependant, aucun de ces exemples ne permet d’illustrer l’impact des changements du coût de production sur la comparabilité des prix.

176    Dans le cadre du premier exemple, les requérantes font valoir que, pour un seul type de produit, une fluctuation du coût de production s’élèverait à 14,5 %. À cet égard, il suffit de relever que les fluctuations du coût de production d’un produit isolé ne permettent pas de démontrer l’incidence des changements du coût de production sur la comparabilité des prix, en particulier dans un cas comme celui de l’espèce où le règlement attaqué concerne vingt-trois produits différents. En outre, l’argument des requérantes selon lequel la Commission aurait dû prendre en compte les fluctuations du coût de la production sur deux semestres et non sur un n’est pas davantage convaincant dans la mesure où il s’agit également du coût de production d’un seul produit.

177    Au titre du deuxième exemple, les requérantes relèvent l’impact de la période du calcul sur la détermination de la rentabilité des ventes intérieures. À cet égard, il y a lieu de relever que les requérantes ont admis dans la réplique que les informations concernant la rentabilité des ventes intérieures étaient présentées uniquement à titre illustratif. Elles ont également confirmé qu’elles ne contestaient pas l’application par la Commission de l’article 2, paragraphe 4, du règlement de base.

178    En outre, à l’instar de la Commission, il convient de constater que la différence entre le calcul annuel et trimestriel de la rentabilité des ventes n’est pas importante, dans la mesure où les transactions rentables s’élèvent respectivement à 72 % et à 77 %.

179    Dans leur troisième exemple, les requérantes font référence aux illustrations hypothétiques de l’incidence de la période de calcul sur le niveau de la marge de dumping.

180    Toutefois, les calculs sur la base de valeurs hypothétiques n’ayant aucun rapport avec le cas d’espèce, ils ne sauraient démontrer l’incidence réelle des fluctuations du coût de la production sur la comparabilité des prix.

181    Dans ses écritures, la Commission a procédé à l’analyse des prix de vente et a établi que les prix moyens trimestriels s’écartent de 19 % des prix moyens annuels sur le marché intérieur et de 15 % sur le marché d’exportation. Étant donné un tel degré de fluctuations de prix, la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en refusant de dévier de la méthode de calcul de la marge de dumping annuelle.

182    En deuxième lieu, les requérantes rappellent que, lorsque, comme en l’espèce, les quantités vendues sur le marché intérieur et celles vers l’Union ne sont pas réparties de manière égale sur la période d’enquête, seul un calcul mensuel ou trimestriel permet une comparaison équitable entre la valeur normale et le prix à l’exportation. Il pourrait en résulter des marges de dumping artificielles, par exemple, si les exportations sont proportionnellement plus importantes lorsque les prix globaux sont bas et que les ventes intérieures sont proportionnellement plus importantes lorsque les prix globaux sont hauts, même si la valeur normale et le prix à l’exportation de l’Union se situent exactement au même niveau.

183    S’agissant de l’impact sur la comparabilité des prix des différences dans la répartition, pendant la période d’enquête, du volume des ventes dans l’Union et celles sur le marché intérieur, il convient de relever, à l’instar de la Commission, qu’une certaine variation du volume des ventes est inévitable.

184    Les requérantes allèguent que les ventes sur le marché de l’Union, par rapport à la totalité des exportations, diffèrent de 66 % d’un trimestre à l’autre. Elles ajoutent que, pour un trimestre, les différences entre, d’une part, les ventes sur le marché intérieur durant ce trimestre, par rapport au total des ventes sur le marché intérieur et, d’autre part, des ventes dans l’Union durant le même trimestre par rapport au total des ventes dans l’Union s’élevaient à 220 %. En outre, les requérantes reprochent à la Commission de ne pas avoir déterminé un seuil à partir duquel une répartition de volume des ventes pendant la période d’enquête deviendrait exceptionnellement inégale.

185    À cet égard, il convient de relever que, au considérant 95 du règlement attaqué, la Commission a constaté que les ventes ont eu lieu pendant toute la période d’enquête. Les différences mentionnées par les requérantes ne concernaient qu’un trimestre et étaient compensées par l’absence d’écart durant les autres trimestres. En outre, le chiffre de 220 % se référait aux ventes de 3 produits uniquement sur 23 produits différents concernés. Enfin, il ne convient pas, d’établir un seuil numérique absolu à partir duquel une répartition des ventes pendant la période d’enquête devient exceptionnellement inégale. En effet, chaque affaire doit être appréhendée en tenant compte des circonstances de l’espèce et dans les limites du pouvoir d’appréciation des institutions de l’Union en matière de mesures de défense commerciale, conformément à la jurisprudence énoncée au point 18 ci-dessus.

186    Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient de conclure que la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en refusant de dévier de la méthode de calcul de la marge de dumping annuelle à cause de la répartition inégale des ventes pendant la période d’enquête.

187    En troisième lieu, les requérantes font également valoir que, sachant que le niveau de marge de la sous-cotation de 1,2 % et 2 % avait été considéré comme important, les facteurs et les fluctuations qu’elles avaient démontrés auraient également dû avoir une ampleur suffisante pour justifier un calcul mensuel ou trimestriel de la marge de dumping.

188    À cet égard, il convient de constater que l’importance accordée à l’un des éléments d’analyse dans le cadre de mesures de défense commerciale, à savoir le niveau de sous-cotation, ne saurait être appliquée automatiquement aux autres données analysées dans ce cadre, à savoir les fluctuations du coût de la production ou le taux d’inflation. En d’autres termes, le fait que le niveau de sous-cotation de 1,2 % et 2 % ait été considéré comme important n’était pas de nature à influencer l’interprétation de l’incidence des fluctuations du coût de la production ou du taux d’inflation sur la comparabilité des prix.

189    En particulier, il convient de relever, à l’instar de la Commission, qu’il existe des différences substantielles entre le calcul de la sous-cotation et le calcul des prix aux fins de la détermination de la marge de dumping, y compris s’agissant de l’incidence des fluctuations de coût sur ce calcul. Premièrement, les règles et composantes de ces calculs sont différentes, la sous-cotation étant fondée sur les données recueillies au cours de l’enquête qui ne constituent pas un résultat d’une méthode établie par le règlement de base. Deuxièmement, leur base juridique est différente, à savoir l’article 3 du règlement de base pour la sous-cotation et l’article 2 du règlement de base pour la marge de dumping. Troisièmement, la nature d’une fluctuation, notamment de coût, est de mesurer l’ampleur maximale de la variation par rapport à une moyenne, alors que la sous-cotation constitue une différence de prix moyen. Dès lors, l’interprétation de ce qui est « significatif » diffère également dans le cadre de l’analyse de la sous-cotation et de celle des composantes de la marge de dumping.

190    Eu égard aux considérations qui précèdent, la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en refusant de dévier de la méthode de calcul de la marge de dumping annuelle, bien qu’elle ait considéré que la sous-cotation de 1,2 % et 2 % était significative.

191    Partant, la Commission n’a pas non plus violé l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base en déterminant la marge de dumping.

192    En conséquence, le troisième moyen doit être rejeté comme non fondé.

 Sur le quatrième moyen, tiré de la violation de l’article 2, paragraphe 10, sous j), du règlement de base en raison d’un refus d’ajustement au titre des gains et pertes de couverture

193    Les requérantes soutiennent que l’ajustement demandé en vertu de l’article 2, paragraphe 10, sous j), du règlement de base aurait dû être accepté au titre des gains et pertes de couverture. Elles expliquent que, au moment où le prix d’une commande est convenu en euros, elles concluent un contrat de couverture qui fixe le taux de change entre le dollar des États-Unis et l’euro à la date de la commande afin de se protéger contre les fluctuations défavorables du taux de change entre les deux devises à la date (ultérieure) de vente.

194    La Commission conteste cette argumentation.

195    À titre liminaire, il convient de relever que ce moyen porte spécifiquement sur la deuxième partie de la première phrase de l’article 2, paragraphe 10, sous j), du règlement de base, laquelle prévoit que, lorsque la comparaison des prix nécessite une conversion de monnaies, cette conversion est effectuée en utilisant le taux de change en vigueur à la date de la vente, « sauf lorsqu’une vente de monnaie étrangère sur les marchés à terme est directement liée à la vente à l’exportation considérée, auquel cas le taux de change pratiqué pour la vente à terme est utilisé ».

196    Il ressort du considérant 98 du règlement attaqué que les contrats de couverture conclus par les requérantes et invoqués par elles aux fins de demander un ajustement au titre de l’article 2, paragraphe 10, sous j), du règlement de base portaient sur les ventes à l’exportation libellées en euros et que le risque de conversion monétaire découlant de ces transactions était, dans tous ces contrats, couvert contre le dollar des États-Unis. Or, étant donné que la Commission a effectué la comparaison entre le prix à l’exportation et la valeur normale en livres turques et qu’elle a converti toutes les transactions libellées en euros en livres turques directement, sans aucune conversion intermédiaire en dollars des États-Unis, elle a considéré que lesdits contrats de couverture, en ce qu’ils concernaient le taux de conversion entre l’euro et le dollar des États-Unis, n’étaient pas pertinents pour les conversions directes de l’euro vers la livre turque en question et elle ne les a donc pas pris en considération.

197    Or, les requérantes soutiennent que la Commission a, à tort, considéré que le taux de conversion entre l’euro et le dollar des États-Unis convenu dans les contrats de couverture était dénué de pertinence aux fins de la comparaison entre la valeur normale et le prix à l’exportation. Elles relèvent également que l’article 2, paragraphe 10, sous j), du règlement de base n’exige pas que la couverture en monnaie étrangère soit effectuée avec la monnaie du pays exportateur.

198    En l’espèce, il est constant entre les parties qu’une « couverture » est un type d’instrument financier qui permet à une entreprise de réduire ou d’éliminer le risque financier. Un contrat de couverture permet de verrouiller, au moment de la conclusion du contrat, le taux de change devant être appliqué à la transaction monétaire qui aura lieu à une date future.

199    En premier lieu, il convient de souligner qu’il est également constant que les ventes à l’exportation des requérantes ont été effectuées en euros et ont donc dû être converties afin d’assurer une comparaison équitable entre celles-ci et les ventes intérieures. Il ressort du dossier que la Commission a directement converti la valeur de ces ventes en livres turques. Il n’y a donc pas eu de conversion intermédiaire en dollars des États-Unis, ainsi qu’il a été indiqué au considérant 98 du règlement attaqué, et contrairement à ce qu’affirment les requérantes. Or, les contrats de couverture invoqués par ces dernières au soutien de leur demande d’ajustement au titre de l’article 2, paragraphe 10, sous j), du règlement de base prévoyaient une couverture en dollars des États-Unis en convenant un taux de conversion entre l’euro et le dollar des États-Unis. Cette dernière conversion était donc étrangère à l’opération de conversion effectuée par la Commission, à savoir de l’euro vers la livre turque. Partant, lesdits contrats n’étaient pas pertinents aux fins de cette conversion, comme la Commission l’a correctement relevé au considérant 98 du règlement attaqué.

200    Étant donné que les autres arguments des requérantes sont fondés sur la prémisse erronée selon laquelle la Commission était tenue d’utiliser le taux de conversion prévu dans les contrats de couverture, ceux-ci doivent être également rejetés.

201    En second lieu, les requérantes reprochent à la Commission d’avoir formulé, pour la première fois dans le règlement attaqué, donc à un moment où elles n’étaient plus en mesure de présenter des observations, l’argument figurant au considérant 101 dudit règlement relatif à l’absence de preuve que les opérations de couverture n’ont pas été ajustées après la vente.

202    En outre, selon les requérantes, sachant que la légalité d’un acte de l’Union doit être appréciée en fonction des éléments de fait et de droit existant à la date où l’acte a été adopté, il ne devrait pas être tenu compte des arguments de la Commission, notamment fondés sur l’annexe S 1-18 et concluant à des actions prétendument spéculatives, car ces arguments auraient seulement été invoqués au cours de la présente procédure contentieuse.

203    La Commission conteste cette argumentation.

204    Il résulte du point 200 ci-dessus que les contrats de couverture invoqués par les requérantes au soutien de leur demande d’ajustement au titre de l’article 2, paragraphe 10, sous j), du règlement de base étaient dépourvus de pertinence, ainsi que l’a relevé à bon droit la Commission au considérant 98 du règlement attaqué.

205    Cette conclusion suffit, à elle seule, pour fonder le rejet de ladite demande.

206    Par conséquent, les griefs des requérantes dirigés à l’encontre du considérant 101 du règlement attaqué et des arguments de la Commission sur les actions spéculatives, lesquels contiennent des motifs surabondants visant à justifier ce rejet, sont, en tout état de cause, inopérants.

207    Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient de rejeter le quatrième moyen.

208    Pour l’ensemble de ces motifs, le recours doit être rejeté dans son intégralité.

 Sur les dépens

209    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Les requérantes ayant succombé, il y a lieu de les condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre élargie)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Çolakoğlu Metalurji AŞ et Çolakoğlu Dış Ticaret AŞ sont condamnées aux dépens.

Papasavvas

Kornezov

Petrlík

Kecsmár

 

      Kingston

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 8 mai 2024.

Signatures




Table des matières


Antécédents du litige

Conclusions des parties

En droit

Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 2, paragraphe 10, sous i), du règlement de base

Sur la troisième branche du premier moyen, relative à une erreur manifeste d’appréciation

– Sur la prise en compte de l’accord entre les requérantes prévoyant le versement de commissions

– Sur la prise en compte des ventes directes à l’exportation de Çolakoğlu Metalurji

– Sur la prise en compte des ventes intérieures directes de Çolakoğlu Metalurji

– Sur les autres facteurs pris en compte par la Commission

Sur la deuxième branche du premier moyen, relative à l’absence de marge bénéficiaire

Sur la première branche du premier moyen, relative à un ajustement prétendument supérieur à la commission effectivement payée

Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 2, paragraphe 10, sous b), du règlement de base

Sur le troisième moyen, tiré d’une erreur manifeste d’appréciation tirée du refus de la Commission de procéder au calcul mensuel ou trimestriel de la marge de dumping et de la violation consécutive de l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base

Sur le quatrième moyen, tiré de la violation de l’article 2, paragraphe 10, sous j), du règlement de base en raison d’un refus d’ajustement au titre des gains et pertes de couverture

Sur les dépens



*      Langue de procédure : l’anglais.