Language of document : ECLI:EU:T:2010:185

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

11 mai 2010 (*)

« Marque communautaire – Demande de marque communautaire verbale CUVÉE PALOMAR – Motif absolu de refus – Marques de vin comportant des indications géographiques – Accord ADPIC – Article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement (CE) n° 40/94 [devenu article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement (CE) n° 207/2009] »

Dans l’affaire T‑237/08,

Abadía Retuerta, SA, établie à Sardón de Duero (Espagne), représentée par Mes X. Fàbrega Sabaté et M-l. Curell Aguilà, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. J. Crespo Carrillo, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 2 avril 2008 (affaire R 1185/2007‑1), concernant l’enregistrement du signe verbal CUVÉE PALOMAR comme marque communautaire,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de M. J. Azizi, président, Mme E. Cremona et M. S. Frimodt Nielsen (rapporteur), juges,

greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 19 juin 2008,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 18 septembre 2008,

à la suite de l’audience du 24 novembre 2009,

rend le présent

Arrêt

 Cadre juridique

 Réglementation internationale

1        L’accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ci-après l’« accord ADPIC »), qui constitue l’annexe 1 C de l’accord instituant l’Organisation mondiale du commerce (OMC), a été signé à Marrakech le 15 avril 1994 et approuvé par la décision 94/800/CE du Conseil, du 22 décembre 1994, relative à la conclusion au nom de la Communauté européenne, pour ce qui concerne les matières relevant de ses compétences, des accords des négociations multilatérales du cycle de l’Uruguay (1986-1994) (JO L 336, p. 1).

2        L’article 23 dudit accord, intitulé « Protection additionnelle des indications géographiques pour les vins et les spiritueux », prévoit ce qui suit :

« 1. Chaque membre prévoira les moyens juridiques qui permettent aux parties intéressées d’empêcher l’utilisation d’une indication géographique identifiant des vins pour des vins qui ne sont pas originaires du lieu indiqué par l’indication géographique en question, ou identifiant des spiritueux pour des spiritueux qui ne sont pas originaires du lieu indiqué par l’indication géographique en question, même dans les cas où la véritable origine du produit est indiquée ou dans ceux où l’indication géographique est employée en traduction ou accompagnée d’expressions telles que ‘genre’, ‘type’, ‘style’, ‘imitation’ ou autres.

2. L’enregistrement d’une marque de fabrique ou de commerce pour des vins qui contient une indication géographique identifiant des vins ou qui est constituée par une telle indication, ou l’enregistrement d’une marque de fabrique ou de commerce pour des spiritueux qui contient une indication géographique identifiant des spiritueux ou qui est constituée par une telle indication, sera refusé ou invalidé, soit d’office si la législation d’un membre le permet, soit à la requête d’une partie intéressée, en ce qui concerne les vins ou les spiritueux qui n’ont pas cette origine.

3. En cas d’homonymie d’indications géographiques pour les vins, la protection sera accordée à chaque indication, sous réserve des dispositions du paragraphe 4 de l’article 22. Chaque membre fixera les conditions pratiques dans lesquelles les indications homonymes en question seront différenciées les unes des autres, compte tenu de la nécessité d’assurer un traitement équitable des producteurs concernés et de faire en sorte que les consommateurs ne soient pas induits en erreur.

4. Afin de faciliter la protection des indications géographiques pour les vins, des négociations seront menées au Conseil des ADPIC concernant l’établissement d’un système multilatéral de notification et d’enregistrement des indications géographiques pour les vins susceptibles de bénéficier d’une protection dans les membres participant au système. »

3        L’article 24, paragraphe 5, de l’accord ADPIC prévoit ce qui suit :

« Dans les cas où une marque de fabrique ou de commerce a été déposée ou enregistrée de bonne foi ou dans les cas où les droits à une marque de fabrique ou de commerce ont été acquis par un usage de bonne foi : […]

b)      avant que l’indication géographique ne soit protégée dans son pays d’origine,

les mesures adoptées pour mettre en œuvre la présente section ne préjugeront pas la recevabilité ou la validité de l’enregistrement d’une marque de fabrique ou de commerce, ou le droit de faire usage d’une marque de fabrique ou de commerce, au motif que cette marque est identique ou similaire à une indication géographique. »

 Réglementation communautaire

4        L’article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement (CE) n° 40/94, du Conseil, du 20 décembre 1993 sur la marque communautaire (JO L 11, p. 1), a été introduit par le règlement (CE) n° 3288/94 du Conseil, du 22 décembre 1994, modifiant le règlement n° 40/94, en vue de mettre en œuvre les accords conclus dans le cadre du cycle d’Uruguay (JO L 349, p. 83). Cet article, devenu l’article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1), dispose :

« Sont refusés à l’enregistrement : […] j) les marques de vins qui comportent ou qui sont composées d’indications géographiques destinées à identifier les vins […] lorsque ces vins […] n’ont pas ces origines. »

5        Le quatrième considérant du règlement n° 3288/94 précise :

« [L]’article 23, paragraphe 2, de l’accord [ADPIC] prévoit le refus ou l’invalidation des marques qui comportent ou consistent en de fausses indications géographiques pour le vin et les spiritueux, indépendamment de la condition selon laquelle [elles] sont de nature à tromper le public ; […] il convient donc d’ajouter un nouveau point j) à l’article 7, paragraphe 1, du règlement n° 40/94. »

6        L’article 50, paragraphes 1 et 2, du règlement (CE) n° 1493/1999 du Conseil, du 17 mai 1999, portant organisation commune du marché vitivinicole (JO L 179, p. 1), dans sa version applicable au litige, énonce ce qui suit :

« 1. Les États membres prennent toutes les mesures nécessaires permettant aux intéressés d’empêcher, dans les conditions prévues aux articles 23 et 24 de l’accord [ADPIC], l’utilisation dans la Communauté d’une indication géographique identifiant des produits visés à l’article 1er, paragraphe 2, [sous b), du règlement n° 1493/1999], pour des produits qui ne sont pas originaires du lieu désigné par l’indication géographique en question, même lorsque la véritable origine des produits est indiquée ou que l’indication géographique est employée en traduction ou accompagnée de mentions telles que ‘genre’, ‘style’, ‘imitation’, ou d’autres mentions analogues.

2. Aux fins du présent article, on entend par ‘indications géographiques’ des indications qui servent à identifier un produit comme étant originaire du territoire d’un pays tiers qui est membre de l’[OMC] ou d’une région ou localité de ce territoire, dans les cas où une qualité, une réputation ou une autre caractéristique déterminée du produit peut être attribuée essentiellement à cette origine géographique. »

7        L’article 52, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement n° 1493/1999 dispose :

« Si un État membre attribue le nom d’une région déterminée à un vin de qualité produit dans des régions déterminées (ci-après ‘v.q.p.r.d.’) ainsi que, le cas échéant, à un vin destiné à être transformé en un tel v.q.p.r.d., ce nom ne peut être utilisé pour la désignation de produits du secteur vitivinicole ne provenant pas de cette région et/ou auxquels ce nom n’a pas été attribué conformément aux réglementations communautaire et nationale applicables. Il en est de même si un État membre a attribué le nom d’une commune, d’une partie de commune ou d’un lieu-dit uniquement à un v.q.p.r.d. ainsi que, le cas échéant, à un vin destiné à être transformé en un tel v.q.p.r.d. »

8        L’article 54 du règlement n° 1493/1999 dispose :

« 1. Par vins de qualité produits dans des régions déterminées, on entend les vins répondant aux dispositions du présent titre et aux dispositions communautaires et nationales adoptées à cet égard.

4. Les États membres communiquent à la Commission la liste des v.q.p.r.d. qu’ils ont reconnus, en indiquant, pour chacun de ces v.q.p.r.d., la référence aux dispositions nationales qui régissent leur production et leur élaboration.

5. La Commission publie ladite liste au [Journal officiel], série C. »

9        Une liste des vins de qualité produits dans des régions déterminées (v.q.p.r.d.) a été publiée par la Commission, conformément à l’article 54, paragraphe 4, du règlement n° 1493/1999, pour la première fois au Journal officiel des Communautés européennes du 19 février 1999 (C 46, p. 113). Cette liste – qui annulait et remplaçait la liste publiée antérieurement au Journal officiel du 15 novembre 1996 (C 344, p. 110), conformément à l’article 1er, paragraphe 3, du règlement (CEE) n° 823/87 du Conseil, du 16 mars 1987, établissant des dispositions particulières relatives aux v.q.p.r.d. (JO L 84, p. 59) – mentionne, en ce qui concerne l’Espagne, l’appellation d’origine contrôlée « valencia » ainsi que la référence aux arrêtés ministériels du 13 juin 1987 publiés au Boletín Oficial del Estado (Journal officiel espagnol) (BOE du 3 juillet 1987), du 11 mars 1991 (BOE du 14 mars 1991) et du 29 novembre 1995 (BOE du 8 décembre 1995).

10      Une nouvelle liste des v.q.p.r.d. a été publiée par la Commission au Journal officiel, du 14 avril 2004 (C 90, p. 1). Il y est fait mention, en ce qui concerne l’Espagne et la région Valencia (Valence), de la sous-région Clariano, ainsi que de l’arrêté règlement ministériel du 19 octobre 2000 (BOE du 3 novembre 2000) et de l’arrêté ministériel APA/1815/2002 (BOE du 16 juillet 2002).

11      De nouvelles listes ont ensuite été publiées par la Commission au Journal officiel en 2006 (C 41, p. 1) et en 2007 (C 106, p. 1). Ces listes comportent les mêmes mentions, en ce qui concerne la région Valencia et la sous-région Clariano, ainsi que les mêmes références aux arrêtés ministériels que celles qui figurent au Journal officiel C 90, du 14 avril 2004.

 Réglementation nationale

12      L’article 2, paragraphes 1 et 2, du nouveau règlement de l’appellation d’origine contrôlée « valencia » et de son conseil régulateur, ratifié par l’arrêté ministériel du 19 octobre 2000 et publié au Boletín Oficial del Estado du 3 novembre 2000, dispose :

« 1. La protection conférée par la présente appellation d’origine contrôlée est celle visée à l’article 81 de la loi n° 25/1970, du 2 décembre 1970, et dans le reste de la législation applicable et s’étend à l’expression ‘Valencia’ et à toutes les dénominations des sous-régions, circonscriptions, communes, localités et domaines qui composent les zones de production et de vieillissement énoncées dans l’article 4.

2. Il est interdit d’utiliser pour d’autres vins les noms, marques, mots, expressions et signes qui pourraient, par leur similitude phonétique ou graphique avec ceux protégés par l’appellation d’origine contrôlée, les confondre avec ceux objet de la présente réglementation, quand bien même ils seraient précédés des mots ‘type’, ‘style’, ‘mis en bouteille à’, ‘conservé en cave à’, et autres analogues. »

13      L’article 4, paragraphe 1, du nouveau règlement de l’appellation d’origine contrôlée « valencia » et de son conseil régulateur prévoit ce qui suit :

« L’aire de production protégée par l’appellation d’origine contrôlée ‘valencia’ est constituée des terres situées dans la province de Valence que le conseil régulateur juge aptes à la production de raisins des cépages indiqués dans l’article cinq ; elle est formée des sous-régions et communes énumérées ci-après : [...] sous-région Clariano : [...] Palomar [...] »

14      L’article 4, paragraphe 1, du nouveau règlement de l’appellation d’origine contrôlée « valencia » et de son conseil régulateur a été modifié par l’arrêté ministériel APA/1815/2002, du 4 juillet 2002 (BOE n° 169, du 16 juillet 2002, p. 25958). Les mots « el palomar » s’y substituent au mot « palomar ».

 Antécédents du litige

15      Le 27 novembre 2006, la requérante, Abadía Retuerta, SA, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement nº 40/94.

16      La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal CUVÉE PALOMAR.

17      Les produits pour lesquels l’enregistrement de la marque a été demandé relèvent de la classe 33 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « vins ».

18      L’examinateur, estimant que la marque demandée se heurtait au motif absolu de refus visé à l’article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement n° 40/94, a rejeté la demande d’enregistrement par décision du 5 juin 2007.

19      La requérante a formé un recours contre la décision de l’examinateur.

20      La première chambre de recours a rejeté le recours et condamné la requérante à supporter les frais exposés aux fins de la procédure par décision du 2 avril 2008 (ci-après la « décision attaquée »).

21      La chambre de recours rappelle que, conformément à la jurisprudence (voir arrêt de la Cour du 16 novembre 2004, Anheuser-Busch, C‑245/02, Rec. p. I‑10989, point 42, et la jurisprudence citée), dès lors que la Communauté est partie à l’accord ADPIC, elle est tenue d’interpréter sa législation sur les marques, dans la mesure du possible, à la lumière du texte et de la finalité de cet accord (point 13 de la décision attaquée).

22      La chambre de recours précise qu’il ressort de la comparaison des dispositions de l’article 22, paragraphe 3, et de l’article 23, paragraphe 2, de l’ADPIC que cette dernière disposition, dont la teneur a été incorporée à l’article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement n° 40/94, constitue une lex specialis, qui prévoit une interdiction d’enregistrement particulière des indications géographiques destinées à identifier les vins et spiritueux. Il s’agit, fait-elle valoir, d’une interdiction absolue et inconditionnelle, puisqu’elle n’est pas subordonnée à la condition que l’usage de l’indication géographique dans la marque pour lesdits produits soit de nature à induire le public en erreur sur le véritable lieu d’origine, condition à laquelle est en revanche explicitement soumise l’application de l’interdiction d’enregistrement générale des indications géographiques visée à l’article 22, paragraphe 3, de l’ADPIC (points 16 et 17).

23      La chambre de recours constate, en substance, que el Palomar est le nom d’une commune de la sous-région Clariano et constitue, en vertu de la réglementation communautaire et nationale applicable, une aire de production protégée par l’appellation d’origine contrôlée « valencia » (points 19 et 20 de la décision attaquée).

24      La chambre de recours estime qu’il existe une grande similitude entre le nom de la commune d’el Palomar, protégé par l’appellation d’origine contrôlée « valencia », et le mot « palomar » inclus dans la marque demandée (point 26 de la décision attaquée).

25      La chambre de recours considère que son utilisation est dès lors interdite en vertu de l’article 2, paragraphe 2, de l’arrêté ministériel du 19 octobre 2000, puisque la marque communautaire n’a pas été demandée pour désigner des vins de ladite zone d’origine (point 26 de la décision attaquée).

26      La chambre de recours relève, en outre, que, s’il est vrai que le nom officiel de la commune est el Palomar, l’élément « palomar » est celui qui identifie cette zone déterminée et constitue l’élément essentiel sur lequel repose l’indication géographique, cette reconnaissance ne pouvant dépendre de la présence ou non de l’article « el ». De plus, la commune en question a été identifiée sous le nom Palomar, sans l’article, dans l’arrêté ministériel du 19 octobre 2000 (point 29 de la décision attaquée).

27      Étant donné que la protection de l’appellation d’origine contrôlée s’étend aux noms des communes, en l’espèce, el Palomar, et aux mots qui pourraient, par leur similitude, créer une confusion, comme c’est le cas avec le mot « palomar » inclus dans la marque demandée, la chambre de recours indique que la présence de ce mot dans la marque communautaire demandée s’entend, selon la réglementation applicable, comme une indication géographique destinée à identifier un vin. Étant donné que les produits en question n’ont pas cette origine, la chambre de recours estime qu’il n’y a pas lieu d’admettre à l’enregistrement la marque communautaire demandée pour désigner des vins, en vertu de l’article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement n° 40/94, puisque celle-ci comporte une indication géographique fausse (point 30 de la décision attaquée).

28      La chambre de recours précise enfin que cette appréciation est également applicable au regard de l’énoncé modifié des produits de la demande, à savoir « vins provenant d’un domaine vinicole connu sous le nom de ‘Pago Palomar’, situé sur la commune de Sardón de Duero (Valladolid, Espagne) ». La chambre de recours considère que cette limitation ne permet pas de répondre à l’objection qui est formulée, puisque cette limitation ne fait que renforcer le fait que la marque demandée contient une indication géographique qui ne correspond pas à l’origine des produits qu’elle désigne, ce qui est contraire aux dispositions visées à l’article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement n° 40/94 (point 31 de la décision attaquée).

 Procédure et conclusions des parties

29      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

30      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Arguments des parties

31      La requérante avance un moyen unique à l’appui de son recours, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement n° 40/94.

32      Premièrement, la requérante fait valoir, en substance, que l’article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement n° 40/94 doit être interprété de façon restrictive, parce qu’il contient une interdiction d’enregistrement. Par conséquent, elle estime que cette disposition n’est pas applicable en l’espèce, car la marque demandée CUVÉE PALOMAR ne comporte pas le nom de l’appellation d’origine contrôlée « el Palomar ».

33      Le nom de la commune est, en effet, el Palomar, et non pas Palomar, aux termes de l’article 4, paragraphe 1, du nouveau règlement de l’appellation d’origine contrôlée « valencia » et de son conseil régulateur, tel que modifié par l’arrêté ministériel APA/1815/2002.

34      Deuxièmement, la requérante allègue que l’absence d’opposition à la demande de marque de la part des organismes compétents pour la défense de l’appellation d’origine contrôlée « valencia » démontre l’absence de conflit entre ladite marque et le nom de la commune.

35      Troisièmement, la requérante fait valoir que la commune d’el Palomar a une population d’un peu plus de 500 habitants. Il s’agirait par conséquent d’une très petite commune, tout à fait inconnue du consommateur moyen espagnol et européen, qui ignore que des vins d’appellation d’origine contrôlée « valencia » sont produits à el Palomar. Le nom el Palomar serait, dès lors, un nom géographique complètement inconnu des milieux intéressés.

36      La requérante avance, en substance, que la jurisprudence relative à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94 [devenu article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009] suivant laquelle il n’y aurait pas lieu d’appliquer le motif absolu de refus de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94 dans le cas de marques composées d’un nom désignant des zones géographiques non connues (arrêt de la Cour du 4 mai 1999, Windsurfing Chiemsee, C‑108/97 et C‑109/97, Rec. p. I‑2779, points 31 à 33), devrait également s’appliquer, mutatis mutandis, au motif absolu de refus visé à l’article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement n° 40/94.

37      Quatrièmement, la requérante soutient que l’article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement n° 40/94 doit être interprété comme impliquant, afin que l’interdiction absolue d’enregistrement soit applicable, que la marque demandée comporte ou soit composée d’une indication géographique erronée.

38      Or, la demande de marque CUVÉE PALOMAR ne comporte pas et n’est pas composée d’une indication géographique erronée, selon la requérante. Au contraire, elle identifie l’origine géographique des vins de la requérante. En effet, le terme « palomar » identifie, dans la marque CUVÉE PALOMAR, un vignoble Palomar, existant depuis le XIXe siècle, qui est situé dans le domaine Retuerta, propriété d’Abadía Retuerta, dans la commune espagnole de Sardón de Duero (Valladolid).

39      Or, selon la requérante, il est évident que, en sa qualité de propriétaire du vignoble Palomar, elle est pleinement en droit d’identifier les vins élaborés dans ce vignoble avec la marque CUVÉE PALOMAR. C’est la raison pour laquelle, afin de remédier aux objections soulevées par l’OHMI et afin d’éviter toute erreur au sujet de l’origine géographique de ses produits, elle a accepté de limiter, le 16 février 2007, la demande de marque aux « vins provenant d’un vignoble connu comme étant le ‘vignoble Palomar’, situé sur le territoire de la commune de Sardón de Duero (Valladolid, Espagne) ».

40      La requérante estime, en substance, que, par conséquent, la demande de marque CUVÉE PALOMAR ne comprend aucune fausse indication géographique, étant donné que le vignoble Palomar existe et qu’il lui appartient, et que la marque demandée ne devrait, dès lors, pas faire l’objet de l’interdiction absolue d’enregistrement prévue à l’article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement n° 40/94.

41      Cinquièmement, la requérante fait valoir que le nom du vignoble Palomar, qui lui appartient, dont la mention est, comme il a été indiqué au point 38 ci-dessus, attestée depuis le XIXe siècle, est très antérieur à la reconnaissance, en 2000, de la commune d’el Palomar comme zone de production protégée par l’appellation d’origine contrôlée « valencia ». Dès lors, le refus d’enregistrement de la marque CUVÉE PALOMAR constitue une violation du principe général du droit contenu dans la maxime latine prior tempore, potior iure. La requérante fait observer que l’arrêté ministériel du 19 octobre 2000 ayant conduit à la reconnaissance de la commune d’el Palomar comme production protégée par l’appellation d’origine contrôlée « valencia » est même postérieur à la marque espagnole n° 2.085.129 CUVÉE EL PALOMAR, qui date, quant à elle, de 1997.

42      Sixièmement, la requérante soutient, en substance, que le mot « palomar » est un mot polysémique, qui signifie, selon le dictionnaire de la Real Academia Española : « 1. nom. Lieu où sont élevées des colombes. 2. Adj. Est dit d’une espèce de ficelle : plus fine et tordue que la ficelle classique ».

43      Elle estime que ce fait atténue le supposé caractère d’indication géographique de la commune d’el Palomar.

44      Elle considère que, lorsque le signe que comprend la marque, outre son sens géographique, possède également un autre sens prévalant sur le sens géographique, il faut faire attention à son sens principal. Une fois cette évaluation réalisée, le régime juridique correspondant doit être appliqué. Or, selon la requérante, le terme « palomar » possède un sens principal, connu de tous les consommateurs, qui est le « lieu où sont élevées des colombes ».

45      La requérante avance l’argument selon lequel le prétendu caractère géographique du mot « palomar » étant dilué par les autres significations de ce nom, ce mot « palomar » peut remplir les fonctions propres d’une marque. Elle considère que, par conséquent, la décision attaquée constitue une interprétation erronée de l’article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement n° 40/94. En effet, la protection d’un supposé intérêt collectif, qui justifierait le refus de marques coïncidant avec des indications géographiques, ne peut aller, selon la requérante, jusqu’à la situation absurde consistant à rejeter des marques qui possèdent d’autres sens ou qui désignent, comme c’est le cas en l’espèce, la zone d’origine des produits en cause.

46      Septièmement, la requérante allègue, en substance, qu’elle est titulaire de diverses marques communautaires – PAGO PALOMAR, ABADIA RETUERTA CUVÉE PALOMAR – désignant des vins compris dans la classe 33, ainsi que d’une marque espagnole CUVÉE EL PALOMAR – qui contient le nom de la commune el Palomar dans son intégralité.

47      La requérante se prévaut, à cet égard, du libellé de l’article 24, paragraphe 5, de l’accord ADPIC (voir point 3 ci-dessus).

48      Or, selon elle, la marque espagnole n° 2.085.129 CUVÉE EL PALOMAR date de 1997, et elle est par conséquent antérieure à la protection du nom de la commune el Palomar dans le cadre de l’appellation d’origine contrôlée « valencia », qui a été réglementée en 2000.

49      La requérante considère que, par conséquent, la validité des marques CUVÉE EL PALOMAR (enregistrée en 1997) et CUVÉE PALOMAR (demandée de bonne foi par elle) ne saurait être contestée au seul motif que ces marques sont semblables à une indication géographique reconnue postérieurement.

50      La requérante souligne, en outre, que la marque CUVÉE EL PALOMAR est également protégée dans plusieurs pays de l’Union européenne par la marque internationale n° 699.977, enregistrée le 23 septembre 1998.

51      Concernant l’appréciation de la chambre de recours suivant laquelle les enregistrements précédents ne sont pas pertinents, car il est de jurisprudence constante que les décisions nationales ne sont pas contraignantes pour l’OHMI et ne le dispensent pas d’appliquer la réglementation communautaire au cas précisément étudié, la requérante objecte que la chambre de recours omet que deux des enregistrements précédents (à savoir les marques communautaires n° 4.827.978 PAGO PALOMAR et n° 5.501.978 ABADÍA RETUERTA CUVÉE PALOMAR) ont été examinés par l’OHMI lui-même et ne sont donc pas des décisions nationales.

52      La requérante estime que le fait que les offices des marques allemand, espagnol, français, italien, autrichien ou du Royaume-Uni aient accepté l’enregistrement de la marque CUVÉE EL PALOMAR aurait dû être pris en compte par l’OHMI comme étant un exemple clair de ce que la marque communautaire CUVÉE PALOMAR ne tombait sous le coup d’aucun motif absolu de refus d’enregistrement, et ce d’autant que l’OHMI lui-même avait admis l’enregistrement des marques communautaires PAGO PALOMAR et ABADÍA RETUERTA CUVÉE PALOMAR.

53      Huitièmement, la requérante fait valoir, en substance, que l’OHMI a enregistré des marques comme CUVÉE MEDITERRANEO, CUVÉE DU GOLFE DE SAINT-TROPEZ et CUVÉE OCCITANE.

54      Or, selon la requérante, ces marques ont un lien direct et évident avec une zone géographique connue dans le milieu viticole, étant donné que le public européen en général est capable d’identifier géographiquement la Méditerranée, le golfe de Saint-Tropez et l’Occitanie.

55      Il en résulte, selon la requérante, que le refus d’enregistrer la marque CUVÉE PALOMAR constitue une atteinte au principe d’égalité et une décision arbitraire de la part de l’OHMI.

56      Enfin, lors de l’audience, la requérante a avancé, en substance, le fait que la liste des v.q.p.r.d. publiée par la Commission au Journal officiel en 2007 ne comporte pas le nom el Palomar, mais se borne à indiquer la référence des dispositions réglementaires nationales où figure cette mention. Or, selon elle, la publication de la liste au Journal officiel constitue une condition de l’opposabilité des appellations géographiques protégées par les législations nationales. L’indication géographique el palomar n’ayant pas été publiée au Journal officiel, elle ne serait, dès lors, pas opposable à la requérante.

57      En outre, la requérante a fait valoir lors de l’audience que la publication de la liste au Journal officiel n’est intervenue qu’en 2007, soit postérieurement à la demande de marque qui a été présentée le 27 novembre 2006. Or, le fait générateur de l’opposabilité des appellations géographiques protégées par les législations nationales est, selon elle, la publication de la liste au Journal officiel par la Commission. Par conséquent, si le Tribunal venait à considérer que la publication au Journal officiel d’une liste ne mentionnant que les références des dispositions réglementaires nationales où figure el Palomar suffit à assurer la publicité de cette mention, force serait de constater que la publication est intervenue après le dépôt de la demande de marque et, partant, cette appellation géographique protégée ne serait pas opposable à la requérante.

58      L’OHMI conteste cette argumentation et estime, en substance, que la chambre de recours a fait une correcte appréciation des faits et du droit dans la décision attaquée.

 Appréciation du Tribunal

59      L’article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement n° 40/94 prévoit que sont refusées à l’enregistrement les marques de vins qui comportent ou qui sont composées d’indications géographiques destinées à identifier les vins lorsque ces vins n’ont pas ces origines.

60      Aux fins de l’application de cette disposition, il y a lieu de déterminer la portée de la notion d’« indication géographique destinée à identifier les vins ».

61      Le règlement n° 40/94 ne définit pas la notion d’indication géographique destinée à identifier les vins.

62      Il convient toutefois de relever que l’article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement n° 40/94 a été introduit par le règlement n° 3288/94.

63      Le quatrième considérant du règlement n° 3288/94 précise en effet que « l’article 23, paragraphe 2, de l’accord [ADPIC] prévoit le refus ou l’invalidation des marques qui comportent ou consistent en de fausses indications géographiques pour le vin et les spiritueux, indépendamment de la condition selon laquelle ils sont de nature à tromper le public » et qu’« il convient donc d’ajouter un nouveau [sous] j) à l’article 7, paragraphe 1, du règlement n° 40/94 ».

64      Or, il convient de rappeler que, dès lors que la Communauté est partie à l’accord ADPIC, elle est tenue d’interpréter sa législation sur les marques, dans la mesure du possible, à la lumière du texte et de la finalité de cet accord (voir arrêt Anheuser-Busch, point 21 supra, point 42, et la jurisprudence citée).

65      Selon une jurisprudence constante, une disposition d’un accord conclu par la Communauté avec des pays tiers doit être considérée comme étant d’application directe lorsque, eu égard aux termes, à l’objet et à la nature de l’accord, on peut conclure que la disposition comporte une obligation claire, précise et inconditionnelle qui n’est subordonnée, dans son exécution ou dans ses effets, à l’intervention d’aucun acte ultérieur (arrêt de la Cour du 14 décembre 2000, Dior e.a., C‑300/98 et C‑392/98, Rec. p. I‑11307, point 42).

66      La Cour a cependant jugé, d’une part, que, compte tenu de leur nature et de leur économie, l’accord OMC et ses annexes ne figuraient pas en principe parmi les normes au regard desquelles la Cour contrôle les actes des institutions communautaires dans le cadre du recours en annulation (arrêt Dior e.a., point 65 supra, point 42) et, d’autre part, que les dispositions de l’accord ADPIC, qui figure en annexe à l’accord OMC, ne sont pas de nature à créer pour les particuliers des droits dont ceux-ci peuvent se prévaloir directement devant le juge en vertu du droit communautaire (arrêt Dior e.a., point 65 supra, point 43).

67      Il ressort de cette jurisprudence que, si les dispositions de l’accord ADPIC n’ont pas d’effet direct, il n’en demeure pas moins qu’il convient d’interpréter la législation sur les marques, c’est-à-dire, en l’espèce, l’article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement n° 40/94, dans la mesure du possible, à la lumière du texte et de la finalité de cet accord.

68      Il convient d’observer que la notion d’« indication géographique destinée à identifier les vins », qui figure à l’article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement n° 40/94, diffère, dans la version française, de celle qui figure à l’article 23 de l’ADPIC, cité au point 2 ci-dessus.

69      Deux autres langues font cependant également foi, aux termes de l’acte final reprenant les résultats des négociations commerciales multilatérales du cycle d’Uruguay, signé à Marrakech le 15 avril 1994 (JO L 336, p. 253), dont le texte a été rédigé en français, en anglais et en espagnol.

70      Il y a lieu de relever, ainsi, que les mots « geographical indication identifying wines » sont utilisés tant à l’article 23 de l’accord ADPIC, qu’à l’article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement n° 40/94 dans la version anglaise de ces dispositions.

71      Par ailleurs, les mots « indicación geográfica que identifique vinos » sont utilisés dans la version espagnole de l’article 23 de l’ADPIC, et les mots « indicación geográfica que identifique el vino » dans la version espagnole de l’article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement n° 40/94.

72      Il convient par conséquent de considérer que sont visées par l’article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement n° 40/94 les indications géographiques identifiant des vins et non les indications géographiques « destinées à identifier les vins ».

73      La détermination et la protection des indications géographiques en ce qui concerne les vins sont établies par le règlement n° 1493/1999, applicable ratione temporis au cas d’espèce.

74      En outre, la notion d’indication géographique identifiant des vins, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement n° 40/94, doit être lue au regard des dispositions pertinentes du droit communautaire en matière de détermination et de protection des indications géographiques en ce qui concerne les vins. Par conséquent, il y a lieu de se référer au règlement n° 1493/1999, qui a également vocation à assurer la conformité de la législation communautaire avec les dispositions de l’accord ADPIC, ainsi qu’il ressort des considérants 56 et 80 de ce règlement.

75      L’article 50, paragraphe 1, du règlement n° 1493/1999 concerne la protection des indications géographiques pour les produits originaires des pays tiers dans le cadre de l’application des articles 23 et 24 de l’accord ADPIC.

76      Toutefois, l’article 50, paragraphe 2, dudit règlement ne définit la notion d’indication géographique qu’aux fins de l’application du paragraphe 1 de cette disposition.

77      Par conséquent, il convient de se référer aux autres dispositions du règlement n° 1493/1999 afin de déterminer le contenu de la notion d’indication géographique au sens de ce règlement.

78      L’article 47, paragraphe 1, du règlement n° 1493/1999 dispose :

« Les règles relatives à la désignation, à la dénomination et à la présentation de certains produits relevant du présent règlement, ainsi qu’à la protection de certaines indications et mentions et de certains termes, figurent au présent chapitre et aux annexes VII et VIII. »

79      Aux termes de l’article 47, paragraphe 2, sous e), du règlement n° 1493/1999, les règles visées au paragraphe 1 de cet article comportent notamment des dispositions régissant l’utilisation d’indications géographiques.

80      Le point A de l’annexe VI du règlement n° 1493/1999 prévoit ce qui suit :

« 1. Par ‘région déterminée’, on entend une aire ou un ensemble d’aires viticoles qui produisent des vins possédant des caractéristiques qualitatives particulières et dont le nom est utilisé pour désigner les v.q.p.r.d.

2. Chaque région déterminée fait l’objet d’une délimitation précise, autant que possible sur la base de la parcelle ou de la pièce de vigne. Cette délimitation, qui est effectuée par chacun des États membres concernés, tient compte des éléments qui concourent à la qualité des vins produits dans la région en cause et, notamment, de la nature du sol et du sous-sol, du climat ainsi que de la situation des parcelles ou des pièces de vigne.

3. La région déterminée est désignée sous son nom géographique […]

4. Le nom géographique désignant une région déterminée doit être suffisamment précis et notoirement lié à l’aire de production afin que, compte tenu des situations existantes, les confusions soient évitées. »

81      Le point B, 1, sous c), premier tiret, de l’annexe VII du règlement n° 1493/1999 prévoit ce qui suit :

« L’étiquetage des produits élaborés dans la Communauté peut être complété par les indications suivantes dans des conditions à déterminer : […] pour les v.q.p.r.d. : […] l’indication d’une unité géographique plus petite que la région déterminée, selon les modalités prévues par l’État membre producteur. »

82      L’article 52, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement n° 1493/1999 précise que, si un État membre attribue le nom d’une région déterminée à un v.q.p.r.d., ce nom ne peut être utilisé pour la désignation de produits du secteur vitivinicole ne provenant pas de cette région et/ou auxquels ce nom n’a pas été attribué conformément aux réglementations communautaire et nationale applicables. Il en est de même si un État membre a attribué le nom d’une commune, d’une partie de commune ou d’un lieu-dit uniquement à un v.q.p.r.d.

83      En d’autres termes, les États membres sont compétents, en vertu du règlement n° 1493/1999, pour attribuer le nom d’une commune, d’une partie de commune ou d’un lieu-dit à un v.q.p.r.d. Dans un tel cas, ce nom ne pourra être utilisé pour la désignation de produits du secteur vitivinicole ne provenant pas de cette commune, de cette partie de commune ou de ce lieu-dit et/ou auxquels ce nom n’a pas été attribué conformément aux réglementations communautaire et nationale applicables.

84      Il convient donc de constater que, dans le cadre de l’application du règlement n° 1493/1999, il incombe aux États membres de déterminer, sur leurs territoires respectifs, les indications géographiques qu’ils entendent voir protéger.

85      L’article 2, paragraphe 1, du nouveau règlement de l’appellation d’origine contrôlée « valencia » et de son conseil régulateur, adopté par le législateur espagnol, prévoit que la protection conférée par cette appellation d’origine contrôlée s’étend à l’expression « valencia » et à toutes les dénominations des sous-régions, circonscriptions, communes, localités et domaines qui composent les zones de production et de vieillissement énoncées à l’article 4.

86      L’article 4, paragraphe 1, du nouveau règlement de l’appellation d’origine contrôlée « valencia » et de son conseil régulateur, tel que modifié par l’arrêté ministériel APA/1815/2002, du 4 juillet 2002, prévoit que l’aire de production protégée par l’appellation d’origine contrôlée « valencia » est formée, notamment, de la sous-région Clariano, qui comprend, entre autres, une commune portant le nom d’el Palomar.

87      Le nom el Palomar constitue donc une indication géographique pour un v.q.p.r.d. aux termes de la législation espagnole et, par conséquent, de l’article 52 du règlement n° 1493/1999, ce qui n’est pas contesté par la requérante, qui a par ailleurs confirmé, lors de l’audience, qu’elle n’avait pas contesté la validité de cette législation devant les juridictions espagnoles.

88      Le nom el Palomar étant une indication géographique pour un v.q.p.r.d., il constitue, par conséquent, une indication géographique identifiant les vins au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement n° 40/94.

89      Il y a lieu de constater que la requérante ne soutient par ailleurs pas que l’indication géographique el Palomar ne serait pas utilisée pour identifier un vin produit dans la commune portant ce nom. Elle se borne en effet à soutenir, en substance, qu’elle est en droit d’utiliser le nom Palomar en dépit de l’existence de l’indication géographique el Palomar.

90      La requérante conteste en revanche l’opposabilité de l’indication géographique el Palomar en raison du fait que la liste publiée par la Commission au Journal officiel en application de l’article 54, paragraphe 5, du règlement n° 1493/1999, ne mentionne pas el Palomar ou encore Palomar.

91      À cet égard, l’article 54, paragraphes 4 et 5, du règlement n° 1493/1999 dispose, d’une part, que les États membres communiquent à la Commission la liste des v.q.p.r.d. qu’ils ont reconnus, en indiquant, pour chacun de ces v.q.p.r.d., la référence aux dispositions nationales qui régissent leur production et leur élaboration et, d’autre part, que cette liste est publiée au Journal officiel (série C) par la Commission.

92      D’une part, il y a lieu de rappeler que le nouveau règlement de l’appellation d’origine contrôlée « valencia » et de son conseil régulateur a été publié au BOE du 3 novembre 2000. L’arrêté ministériel APA/1815/2002 a été publié au BOE le 16 juillet 2002.

93      D’autre part, une liste des v.q.p.r.d. a été publiée conformément à l’article 54, paragraphe 5, du règlement n° 1493/1999 pour la première fois au Journal officiel du 19 février 1999 (C 46, p. 113).

94      Comme il a été rappelé au point 10 ci-dessus, une nouvelle liste des v.q.p.r.d. a été publiée par la Commission au Journal officiel, le 14 avril 2004. Il y est fait mention, en ce qui concerne l’Espagne et la région Valencia, de la sous-région Clariano, du règlement ministériel du 19 octobre 2000 et du règlement ministériel APA/1815/2002 ainsi que des références de publication de ces deux arrêtés au BOE.

95      Ainsi que cela a été indiqué, en outre, au point 11 ci-dessus, de nouvelles listes ont ensuite été publiées par la Commission au Journal officiel en 2006, puis en 2007. Ces listes comportent des mentions identiques à celles figurant dans la liste publiée par la Commission en 2004 en ce qui concerne la région Valencia et la sous-région Clariano.

96      La requérante ne saurait donc soutenir que la liste des v.q.p.r.d., comportant la mention de l’indication géographique Clariano et la référence aux dispositions pertinentes du droit espagnol, n’a été publiée pour la première fois au Journal officiel qu’en 2007.

97      Par ailleurs, il y a lieu de considérer que la protection communautaire des indications géographiques qui est établie par le règlement n° 1493/1999, repose sur les indications géographiques telles qu’elles sont déterminées par la législation des États membres dans le respect des dispositions pertinentes dudit règlement. Cette protection ne résulte en effet pas d’une procédure communautaire autonome ni même d’un mécanisme au terme duquel les indications géographiques reconnues par les États membres auraient été agrégées dans un acte communautaire à caractère contraignant.

98      Les seules obligations qui résultent de l’article 54, paragraphes 4 et 5, du règlement n° 1493/1999 sont, pour les États membres, de communiquer la liste des v.q.p.r.d. qu’ils ont reconnus à la Commission, en indiquant, pour chacun de ceux-ci, la référence aux dispositions nationales qui régissent leur production et leur élaboration et, pour la Commission, de publier cette liste à la série C – et non à la série L – du Journal officiel.

99      La protection des indications géographiques trouvant sa source dans la législation des États membres, il s’ensuit que l’opposabilité aux tiers des mesures nationales par lesquelles un État membre attribue le nom d’une région déterminée à un v.q.p.r.d., ou le nom d’une commune, d’une partie de commune ou d’un lieu-dit, conformément à l’article 52, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement n° 1493/1999, résulte de la publication de ces dispositions au journal officiel de l’État membre qui les adopte.

100    Or, il est constant que le nouveau règlement de l’appellation d’origine contrôlée « valencia » et de son conseil régulateur ainsi que l’arrêté ministériel APA/1815/2002 ont été publiés au BOE respectivement en 2000 et en 2002, à une date antérieure à la demande de marque présentée le 27 novembre 2006.

101    Il résulte également du fait que la protection des indications géographiques trouve sa source dans la législation des États membres que la publication de la liste des v.q.p.r.d. et des références aux dispositions nationales à la série C du Journal officiel de l’Union européenne constitue uniquement une mesure d’information du public sur la protection des indications géographiques mise en place par chacun des États membres dans le cadre de leur législation nationale.

102    Il est vrai que la manière retenue par la Commission pour publier les informations communiquées par le Royaume d’Espagne ne semble guère efficace pour assurer une information pleine et entière du public, dans la mesure où le nom des communes bénéficiant d’une indication d’origine en ce qui concerne, notamment, la région Valencia et la sous-région Clariano – y compris le nom de la commune d’el Palomar – n’apparaît pas dans la liste publiée par la Commission.

103    Il y a néanmoins lieu, d’une part, de constater que cette manière de publier les informations nationales respecte les dispositions de l’article 54, paragraphe 5, du règlement n° 1493/1999 et, d’autre part, de considérer qu’elle ne remet pas en cause la protection qu’accorde le règlement n° 1493/1999 aux indications géographiques qui bénéficient d’une protection en vertu de la législation espagnole, y compris l’indication géographique el Palomar.

104    À titre surabondant, il y a en outre lieu de relever, que, aux termes de l’article 8 de l’accord entre la Communauté européenne et la République d’Afrique du Sud relatif au commerce des vins (JO 2002, L 28, p. 4), sont protégées, en ce qui concerne les vins originaires de la Communauté, les indications géographiques mentionnées à l’annexe II.

105    L’annexe II (« Liste des indications géographiques ») de l’accord, point A (« Indications géographiques des vins originaires de la Communauté »), III (« Vins originaires du Royaume d’Espagne »), 1. (« [v.q.p.r.d.] »), 1.2.48. (« Région déterminée Valencia »), sous d) (« Sous-région Clariano »), mentionne le nom Palomar.

106    Le nom Palomar apparaît également dans les annexes de l’accord entre la Communauté européenne et la Confédération suisse relatif aux échanges de produits agricoles (JO 2002, L 114, p. 132).

107    Il convient d’observer que ces accords sont antérieurs à la modification de l’article 4, paragraphe 1, du nouveau règlement de l’appellation d’origine contrôlée « valencia » et de son conseil régulateur par l’arrêté ministériel APA/1815/2002, du 4 juillet 2002 qui a introduit le nom el Palomar en lieu et place du nom Palomar.

108    Le nom Palomar apparaît également dans les annexes de l’accord entre la Communauté européenne et l’Australie relatif au commerce du vin conclu en 1994 (JO 1994, L 86, p. 3), ce qui conduit à considérer que la protection conférée par le Royaume d’Espagne à l’indication géographique el Palomar est antérieure aux dispositions du nouveau règlement de l’appellation d’origine contrôlée « valencia » et de son conseil régulateur, tel que modifié par l’arrêté ministériel APA/1815/2002, du 4 juillet 2002.

109    Au terme de cet examen, il convient de rappeler que, conformément à l’article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement n° 40/94, sont refusées à l’enregistrement les marques de vins qui comportent ou qui sont composées d’indications géographiques identifiant les vins lorsque ces vins n’ont pas ces origines.

110    Il est constant que le vin pour lequel la requérante a déposé une demande d’enregistrement, en tant que marque communautaire, du signe verbal CUVÉE PALOMAR n’est pas originaire de la commune d’el Palomar mentionnée dans le nouveau règlement de l’appellation d’origine contrôlée « valencia » et de son conseil régulateur, publié au BOE antérieurement à la demande d’enregistrement.

111    La marque demandée à l’enregistrement est par conséquent composée d’une indication géographique qui identifie un v.q.p.r.d. alors que le vin pour lequel la marque est demandée n’a pas cette origine.

112    Partant, il y a lieu de considérer que c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré que la marque demandée se heurtait au motif absolu de refus d’enregistrement prévu par l’article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement n° 40/94.

113    Cette conclusion ne saurait être remise en cause par les arguments avancés par la requérante à l’appui de son moyen unique.

114    Premièrement, la requérante allègue, en substance, que, dès lors qu’une partie de son domaine porte le nom de Palomar, ce nom, dans la marque demandée, ne constitue pas une fausse indication ou une indication erronée.

115    Il est toutefois indifférent que cette mention ne soit pas erronée, dès lors que la seule condition que requiert l’application du motif absolu de refus prévu par l’article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement n° 40/94 est que le vin comporte ou soit composé d’une indication géographique identifiant un vin alors que ce vin n’a pas cette origine.

116    Or, la requérante reconnaît que la partie de son domaine qui s’appelle Palomar n’est pas située dans la commune d’el Palomar, mentionnée dans le nouveau règlement de l’appellation d’origine contrôlée « valencia » et de son conseil régulateur.

117    Cet argument avancé par la requérante doit, par conséquent, être rejeté.

118    Deuxièmement, la requérante soutient, en substance, que, pour que le motif de refus prévu par l’article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement n° 40/94, s’applique, il faut que la marque demandée comporte, ou soit composée de, une indication géographique erronée désignant des vins ayant une origine différente de celle que les consommateurs associent à cette indication géographique.

119    Or, le quatrième considérant du règlement n° 3288/94 précise que l’article 23, paragraphe 2, de l’accord ADPIC prévoit le refus d’enregistrement ou l’invalidation des marques qui comportent ou consistent en de fausses indications géographiques pour le vin et les spiritueux, indépendamment de la condition selon laquelle elles sont de nature à tromper le public.

120    Partant, le motif de refus prévu par l’article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement n° 40/94 s’applique sans qu’il y ait lieu d’avoir égard à la question de savoir si les marques dont l’enregistrement est demandé sont ou non de nature à tromper le public ou si elles entraînent un risque de confusion pour celui-ci en ce qui concerne l’origine du produit.

121    L’argumentation de la requérante sur ce point doit, dès lors, être écartée.

122    Troisièmement, la requérante soutient, en substance, que la marque demandée ne comporte pas le nom el Palomar, qui bénéficie de la protection accordée par le droit espagnol, mais uniquement le mot « palomar ». Or, l’homonymie devrait, selon elle, être parfaite pour que le motif absolu de refus prévu par l’article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement n° 40/94 s’applique. Par conséquent, en l’absence de l’article « el » dans la marque dont l’enregistrement a été demandé, celle-ci n’aurait pu être refusée à l’enregistrement par l’OHMI.

123    Il y a lieu d’observer, à titre illustratif, que, si l’argumentation de la requérante était retenue, elle conduirait à permettre l’enregistrement d’une marque telle que Baux de Provence ou Clos Vougeot, alors qu’existent des indications géographiques pour des v.q.p.r.d. Les Baux de Provence et Clos de Vougeot.

124    Or, une telle interprétation de l’article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement n°40/94 se heurterait manifestement à l’objectif de protection des indications géographiques pour des v.q.p.r.d. poursuivi par la réglementation nationale et par la réglementation communautaire.

125    Il convient de considérer que, pour que s’applique le motif de refus visé à l’article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement n° 40/94, il suffit que lesdites marques comportent ou soient composées des éléments permettant d’identifier avec certitude l’indication géographique en cause, sans qu’il y ait lieu d’avoir égard aux articles définis ou indéfinis qui peuvent éventuellement en faire partie.

126    Il n’en irait autrement que si l’indication géographique était composée d’un nom de lieu comportant un article qui serait indissociable de ce nom et qui lui donnerait une signification propre et autonome.

127    Or, en l’espèce, il y a lieu de constater que le nom el Palomar n’a pas de signification propre et autonome qui se distinguerait du nom Palomar.

128    Il convient dès lors de considérer que la marque dont l’enregistrement est demandé, c’est-à-dire CUVÉE PALOMAR, comporte ou est composée des éléments permettant d’identifier avec certitude l’indication géographique el Palomar, à savoir le mot « palomar» .

129    Partant, l’argument de la requérante selon lequel l’article « el » aurait une influence déterminante sur l’application, en l’espèce, du motif de refus prévu par l’article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement n° 40/94 doit être écarté.

130    Quatrièmement, la requérante fait valoir, en substance, qu’il y aurait lieu d’avoir égard au fait que le nom el Palomar, qui bénéficie de l’appellation d’origine contrôlée protégée par le droit espagnol, est inconnu du grand public ou des milieux intéressés et qu’il a un caractère polysémique qui atténuerait le caractère d’indication géographique de celui-ci.

131    Toutefois, dans la mesure où l’enregistrement de la marque demandée doit être refusé pour le seul motif que cette marque comporte ou est composée d’une indication géographique identifiant des vins lorsque les vins n’ont pas cette origine, il s’ensuit que le fait que le nom qui bénéficie d’une appellation d’origine contrôlée soit inconnu du grand public ou des milieux intéressés, ou qu’il ait un caractère polysémique qui en atténuerait le caractère d’indication géographique, est indifférent pour l’application du motif absolu de refus prévu par l’article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement n° 40/94.

132    Il s’ensuit également que ne saurait prospérer l’argumentation de la requérante selon laquelle il y a lieu d’appliquer par analogie la jurisprudence relative à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, aux termes de laquelle la Cour a considéré qu’il n’y avait pas lieu d’appliquer le motif absolu de refus de cette disposition dans le cas de marques composées d’un nom désignant des zones géographiques non connues.

133    Cette jurisprudence n’est en effet pas applicable en ce qui concerne le motif absolu de refus prévu par l’article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement n° 40/94, puisque cette disposition n’appelle aucune analyse d’un éventuel risque de confusion.

134    Il suffit en effet qu’une marque destinée à identifier un vin comporte, ou soit composée de, une indication géographique identifiant les vins, alors que le vin pour lequel l’enregistrement de la marque est demandé n’a pas cette origine, pour que l’enregistrement soit refusé.

135    Cinquièmement, s’agissant de l’argument de la requérante tiré de l’absence d’opposition des organismes compétents pour la défense de l’appellation « valencia », il y a lieu de considérer que, la demande de marque n’ayant pas été publiée, puisque l’enregistrement de la marque a été refusé, les tiers, dont le conseil régulateur de l’appellation d’origine contrôlée et les administrations centrale et autonomes, n’ont pas été amenés à présenter leurs observations sur la marque demandée.

136    En tout état de cause, à supposer même que ces organismes aient eu la possibilité de s’opposer à la marque demandée et ne l’aient pas fait, il ne saurait être utilement déduit de cette absence d’opposition que la marque peut valablement être enregistrée nonobstant les dispositions de l’article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement n° 40/94.

137    Sixièmement, s’agissant de l’argument de la requérante suivant lequel l’enregistrement de la marque demandée ne serait que le prolongement communautaire d’enregistrements nationaux et internationaux dont elle dispose, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le caractère enregistrable d’un signe en tant que marque communautaire ne doit être apprécié que sur le fondement de la réglementation communautaire pertinente. L’OHMI et, le cas échéant, le juge communautaire ne sont pas liés par une décision intervenue au niveau d’un État membre ou d’un pays tiers admettant le caractère enregistrable de ce même signe en tant que marque nationale [arrêts du Tribunal du 27 février 2002, Streamserve/OHMI (STREAMSERVE), T‑106/00, Rec. p. II‑723, point 47, et du 22 juin 2005, Metso Paper Automation/OHMI (PAPERLAB), T‑19/04, Rec. p. II‑2383, point 37].

138    Les enregistrements existant dans les États membres ne constituent qu’un fait qui peut être pris en considération dans le contexte de l’enregistrement d’une marque communautaire, la marque demandée devant, quant à elle, être appréciée uniquement sur le fondement de la réglementation communautaire pertinente. Il s’ensuit que l’OHMI n’est ni tenu de faire siennes les exigences et l’appréciation de l’autorité compétente en matière de marques du pays d’origine, ni obligé d’enregistrer la marque demandée du fait de l’existence d’une décision d’enregistrement de l’Office espagnol des marques (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 25 octobre 2007, Develey/OHMI, C‑238/06 P, Rec. p. I‑9375, points 66 à 73).

139    Par conséquent, le fait de disposer d’enregistrements nationaux et internationaux n’est pas de nature à faire obstacle au refus d’enregistrement d’une marque en application de la réglementation communautaire.

140    Il s’ensuit que l’argumentation de la requérante sur ce point doit également être écartée.

141    Septièmement, concernant le grief de la requérante suivant lequel, en substance, il ne saurait y avoir d’obstacle à l’enregistrement de la marque CUVÉE PALOMAR dès lors que l’OHMI a admis d’enregistrer ses marques PAGO PALOMAR et ABADÍA RETUERTA CUVÉE PALOMAR, il y a lieu de rappeler que, suivant une jurisprudence constante, les décisions que les chambres de recours sont conduites à prendre en vertu du règlement n° 40/94 concernant l’enregistrement d’un signe en tant que marque communautaire relèvent de l’exercice d’une compétence liée et non pas d’un pouvoir discrétionnaire. Dès lors, la légalité des décisions des chambres de recours doit être appréciée uniquement sur la base de ce règlement, tel qu’interprété par le juge communautaire, et non sur la base d’une pratique décisionnelle antérieure à celles-ci (voir arrêt de la Cour du 26 avril 2007, Alcon/OHMI, C‑412/05 P, Rec. p. I‑3569, point 65, et la jurisprudence citée).

142    Il s’ensuit que le grief de la requérante ne peut qu’être écarté.

143    Huitièmement, la requérante soutient, en substance, qu’il convient d’interpréter l’article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement n° 40/94 à la lumière des dispositions pertinentes de l’accord ADPIC et, en particulier, de l’article 24, paragraphe 5, de celui-ci. Or, dès lors qu’elle est titulaire de la marque espagnole CUVÉE EL PALOMAR depuis 1997, il conviendrait de tenir compte de l’antériorité de cette marque par rapport à la protection du nom de la commune d’el Palomar dans le cadre de l’appellation d’origine contrôlée « valencia », qui a été réglementée en 2000.

144    La requérante estime, en substance, que, dès lors, en application des dispositions de l’article 24, paragraphe 5, de l’accord ADPIC, la reconnaissance de l’appellation d’origine contrôlée en 2000 n’invalide pas la marque nationale CUVÉE EL PALOMAR enregistrée antérieurement et l’existence de cette marque nationale antérieure permet l’enregistrement, demandé de bonne foi, de la marque CUVÉE PALOMAR, cet enregistrement ne pouvant être refusé au seul motif que cette marque comporte une indication géographique reconnue postérieurement à l’enregistrement de la marque nationale.

145    Aux termes de la jurisprudence rappelée aux points 64 à 67 ci-dessus, quoique les dispositions de l’accord ADPIC ne soient pas de nature à créer pour les particuliers des droits dont ceux-ci peuvent se prévaloir directement devant le juge en vertu du droit communautaire, il n’en demeure pas moins qu’il convient d’interpréter le règlement n° 40/94, dans la mesure du possible, à la lumière du texte et de la finalité de cet accord.

146    Selon l’article 24, paragraphe 5, de l’accord ADPIC, dans les cas où une marque de fabrique ou de commerce a été déposée ou enregistrée de bonne foi, ou dans les cas où les droits à une marque de fabrique ou de commerce ont été acquis par un usage de bonne foi, avant que l’indication géographique ne soit protégée dans son pays d’origine, les mesures adoptées pour mettre en œuvre les dispositions de la section 1 de l’accord ADPIC – dans laquelle figure l’article 24 – ne préjugeront pas la recevabilité ou la validité de l’enregistrement d’une marque de fabrique ou de commerce, ou le droit de faire usage d’une marque de fabrique ou de commerce, au motif que cette marque est similaire ou identique à une indication géographique.

147    Cette disposition suppose donc que la marque ait été déposée ou enregistrée de bonne foi avant que l’indication géographique ne soit protégée dans son pays d’origine, ou qu’il ait été fait un usage de bonne foi de la marque dont l’enregistrement est demandé, avant que l’indication géographique ne soit protégée dans son pays d’origine.

148    En l’espèce, il convient de relever que la demande d’enregistrement de la marque CUVÉE PALOMAR a été déposée en 2006, c’est-à-dire après que l’indication géographique el Palomar a été protégée dans son pays d’origine par le nouveau règlement de l’appellation d’origine contrôlée « valencia » et de son conseil régulateur, tel que modifié par l’arrêté ministériel APA/1815/2002, du 4 juillet 2002.

149    Par ailleurs, la requérante n’établit pas qu’elle ait, de bonne foi, fait usage du nom CUVÉE PALOMAR avant que l’indication géographique el Palomar ne soit protégée dans le pays d’origine.

150    Enfin, à supposer que la requérante puisse revendiquer le bénéfice d’une antériorité en ce qui concerne sa marque CUVÉE EL PALOMAR enregistrée en 1997 en Espagne, elle ne peut toutefois en revendiquer le bénéfice, le cas échéant, que pour cette marque existante et non pour enregistrer de nouvelles marques, inexistantes au moment où a été décidée la protection de l’indication géographique, qui seraient également composées de cette indication géographique.

151    Partant, la requérante ne saurait revendiquer le bénéfice de l’article 24, paragraphe 5, de l’accord ADPIC afin d’obtenir que la marque dont l’enregistrement a été demandé soit enregistrée.

152    À titre surabondant, le Tribunal observe que la Commission a publié une liste des v.q.p.r.d. au Journal officiel du 19 février 1999, en application des dispositions de l’article 1er, paragraphe 3, du règlement n° 823/87. Cette liste mentionne le règlement ministériel relatif à l’appellation d’origine contrôlée « valencia » et de son conseil régulateur du 13 juin 1987, tel que modifié par l’arrêté ministériel règlement du 29 novembre 1995, publié au BOE du 8 décembre 1995. Or, ce règlement, tel que modifié, mentionne la commune de Palomar comme faisant partie de la sous-région Clariano, qui fait elle-même partie de l’aire géographique bénéficiant de l’appellation d’origine contrôlée « valencia ». Il s’ensuit que, en 1995, c’est-à-dire avant l’enregistrement de la marque nationale CUVÉE EL PALOMAR, la commune de Palomar constituait une indication géographique protégée par le droit national et par le droit communautaire.

153    Neuvièmement, s’agissant de l’argumentation de la requérante suivant laquelle, en substance, l’OHMI a enregistré des marques telles que CUVÉE MEDITERRANEO, CUVÉE DU GOLFE DE SAINT-TROPEZ et CUVÉE OCCITANE et rien ne s’oppose, par conséquent, à ce que la marque CUVÉE PALOMAR soit enregistrée, il y a lieu de relever que la requérante n’a ni démontré, ni même soutenu, que Mediterraneo, Golfe de Saint-Tropez et Occitane étaient des indications géographiques protégées destinées à identifier un vin.

154    Partant, l’argumentation de la requérante est, ici encore, dépourvue de pertinence et doit être écartée.

155    Au vu de tout ce qui précède, le recours doit être rejeté dans son ensemble.

 Sur les dépens

156    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

157    La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens exposés par l’OHMI, conformément aux conclusions de celui-ci.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Abadía Retuerta, SA est condamnée aux dépens.

Azizi

Cremona

Frimodt Nielsen

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 11 mai 2010.

Signatures


** Langue de procédure: l’espagnol.