Language of document : ECLI:EU:T:2017:604

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

14 septembre 2017 (*)

« Clause compromissoire – Programme général “Droits fondamentaux et justice” – Programme spécifique “Justice pénale” – Recouvrement des sommes versées par la Commission en exécution d’une convention de subvention – Compensation des créances – Requalification partielle du recours – Demande visant à faire constater l’inexistence d’une créance contractuelle »

Dans l’affaire T‑393/15,

Università del Salento, établie à Lecce (Italie), représentée par Me F. Vetrò, avocat,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée initialement par Mmes L. Di Paolo, F. Moro, MM. L. Cappelletti et O. Verheecke, puis par Mmes Di Paolo, Moro et M. Verheecke, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet, d’une part, une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant, premièrement, à l’annulation de la décision D/C4 – B.2 – 005817 de la Commission, du 4 mai 2015, par laquelle il a été procédé à une compensation entre une créance de la requérante relative à l’exécution d’un contrat dans le cadre d’un premier projet, Entice (Explaining the Nature of Technological Innovation in Chinese Enterprises), et une dette de la requérante relative à l’exécution d’un contrat dans le cadre d’un second projet, intitulé « Judicial Training and Research on EU crimes against environment and maritime pollution », deuxièmement, à l’annulation de tout autre acte préalable, consécutif ou, en tout état de cause, connexe à cette décision et, troisièmement, à faire condamner la Commission à verser à la requérante les montants qui lui sont dus en exécution du projet Entice et, d’autre part, une demande fondée sur l’article 272 TFUE et tendant à faire constater l’inexistence de la créance revendiquée par la Commission au titre de l’exécution du second projet,

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de MM. G. Berardis, président, D. Spielmann et Z. Csehi (rapporteur), juges,

greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 3 avril 2017,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        La requérante, Università del Salento, est une université italienne.

2        Le 7 novembre 2011, le département de sciences juridiques de la requérante (ci-après le « département de sciences juridiques ») a conclu, avec la direction générale (DG) « Justice » de la Commission européenne, le contrat de subvention JUST/2010/JPEN/AG/1540 (ci-après le « contrat JUST »), ayant pour objet l’exécution du projet intitulé « Judicial Training and Research on EU crimes against environment and maritime pollution » (Formation juridique et recherche sur les crimes contre l’environnement et la pollution maritime dans l’Union européenne, ci-après le « projet JUST »), en application de la décision 2007/126/JAI du Conseil, du 12 février 2007, établissant, pour la période 2007-2013, dans le cadre du programme général « Droits fondamentaux et justice », le programme spécifique « Justice pénale » (JO 2007, L 58, p. 13).

3        Le contrat JUST, rédigé suivant le modèle d’un contrat type, contient trois parties, à savoir, respectivement, les conditions particulières, les conditions générales et les annexes. L’article I.9, premier alinéa, de ce contrat précise qu’il est régi par ses propres dispositions, par les dispositions pertinentes du droit de l’Union européenne ainsi que, à titre subsidiaire, par le droit belge. L’article I.9, second alinéa, stipule que les bénéficiaires peuvent introduire des recours contre les décisions de la Commission concernant l’application des conditions contractuelles devant le Tribunal ou, en cas de pourvoi, devant la Cour. En outre, les conditions générales applicables au contrat et figurant à l’annexe II de celui-ci, qui en fait partie intégrante, incluent une première partie concernant notamment l’exécution du projet JUST, la fin du contrat et les sanctions (articles II.1 à II.13) et une deuxième partie concernant les dispositions financières et les contrôles, les audits, les remboursements et la responsabilité (articles II.14 à II.20).

4        Il ressort du paragraphe 2.3 de l’annexe I du contrat JUST, ayant trait à la description du projet JUST, que l’objectif général de celui-ci consistait à organiser un cours de formation sur la nouvelle législation de l’Union en matière d’infractions contre l’environnement et de pollution maritime, en accordant une attention particulière aux problèmes auxquels les zones géographiques de la mer Adriatique et de la mer Noire sont confrontées.

5        Aux termes des articles I.4.2 et I.4.3 du contrat JUST, les coûts totaux éligibles du projet JUST étaient estimés à 209 532 euros et la contribution maximale de la Commission était de 167 627 euros, correspondant à 80 % desdits coûts. Au sens de l’article II.17.2 de ce contrat, le montant total de la contribution de la Commission ne pouvait pas dépasser ladite contribution maximale, même dans l’hypothèse où les coûts totaux éligibles dépassaient les coûts éligibles estimés.

6        L’article II.17.5 du contrat JUST prévoyait notamment que, en cas de non-exécution, de mauvaise exécution et d’exécution partielle ou tardive du projet JUST, la Commission pouvait réduire la subvention initialement octroyée dans une mesure correspondant à l’exécution effective du projet JUST selon les conditions fixées dans le contrat.

7        Le 3 septembre 2013, la requérante a transmis à la Commission le rapport final du projet JUST.

8        Par lettre du 18 décembre 2013, la Commission a informé la requérante que le projet JUST n’avait pas été mis à exécution conformément à l’annexe I du contrat JUST et que, partant, les coûts déclarés ne pouvaient pas être admis. Elle l’a donc invitée à fournir des explications, à défaut desquelles elle a précisé qu’elle procéderait au recouvrement de l’intégralité du préfinancement versé.

9        Plusieurs échanges de correspondance ont eu lieu entre la requérante et la Commission au cours des années 2014 et 2015. Lors de ces échanges, conformément à l’article II.17.5 du contrat, la Commission a revu à plusieurs reprises la contribution maximale de l’Union au projet JUST, notamment par lettres du 4 mars, du 24 août et du 6 octobre 2014. Par lettre du 3 novembre 2014, la Commission a émis un ordre de recouvrement pour la somme de 50 288,50 euros, à payer pour le 18 décembre 2014 (ci-après la « note de débit »). Des échanges ultérieurs ont eu lieu entre la requérante et la Commission, qui n’est pas pour autant revenue sur sa décision.

10      Par décision du comptable de la Commission du 28 avril 2015 (ci-après la « décision de compensation du 28 avril 2015 »), il a été procédé à une compensation entre, d’une part, une créance de la requérante, d’un montant de 17 500 euros, découlant d’un contrat de subvention concernant la gestion d’un centre d’information Europe Direct dans ses locaux et, d’autre part, une dette de la requérante, d’un montant de 50 288,50 euros, relative à l’exécution du contrat JUST.

11      Par décision D/C4 – B.2 – 005817 de la Commission, du 4 mai 2015 (ci-après la « décision de compensation du 4 mai 2015 »), il a été procédé à une compensation entre, d’une part, la créance de la requérante, d’un montant de 73 080 euros, relative à l’exécution du contrat de subvention n° 610350, conclu le 30 juillet 2013 entre la requérante, représentée par son département d’ingénierie de l’innovation (ci-après le « département d’ingénierie de l’innovation »), et l’Agence exécutive pour la recherche (AER), intitulé « Soutien pour la formation et le développement de carrière des chercheurs, expliquer la nature de l’innovation technologique dans les entreprises chinoises », relevant des actions Marie Curie et relatif au projet Entice (Explaining the Nature of Technological Innovation in Chinese Enterprises) (Expliquer la nature de l’innovation technologique dans les entreprises chinoises, ci-après le « contrat Entice »), et, d’autre part, la dette restante de la requérante, d’un montant de 33 430,84 euros, relative à l’exécution du contrat JUST, pour un solde net en faveur de la requérante de 39 649,16 euros.

12      Au cours de cette période, le projet JUST a fait l’objet d’une procédure d’audit menée par le service d’audit externe de la Commission à partir du mois d’avril 2015. Le rapport final d’audit a été transmis à la requérante le 11 novembre 2015.

 Procédure et conclusions des parties

13      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 13 juillet 2015, la requérante a introduit le présent recours.

14      La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, en application de l’article 27, paragraphe 5, du règlement de procédure du Tribunal, le juge rapporteur a été affecté à la sixième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée.

15      Sur proposition du juge rapporteur, le Tribunal (sixième chambre) a décidé d’ouvrir la phase orale de la procédure et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89, paragraphe 3, sous a), du règlement de procédure, a posé une question pour réponse écrite à la requérante, à laquelle celle-ci a répondu dans le délai imparti.

16      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision de compensation du 4 mai 2015 et la note de débit ainsi que « tout autre acte préalable, subséquent ou connexe, même inconnu, en tant qu’acte faisant grief » ;

–        déclarer l’inexistence de la créance revendiquée par la Commission au titre du contrat JUST ;

–        ordonner le versement des sommes encore dues au titre du contrat Entice ;

–        condamner la Commission aux dépens.

17      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur l’objet du litige

18      Tout d’abord, le recours a pour objet une demande au titre de l’article 263 TFUE tendant à l’annulation de la décision de compensation du 4 mai 2015, de la note de débit et de « tout autre acte préalable, subséquent ou connexe, même inconnu, en tant qu’acte faisant grief ». Lors de l’audience, la requérante a précisé que le dernier volet de la demande devait s’entendre comme tendant notamment à l’annulation de la décision de compensation du 28 avril 2015.

19      Au soutien de cette demande, la requérante invoque trois moyens :

–        le premier est tiré de la violation des articles 3 et 24 de la Constitution italienne, d’un abus de pouvoir, d’un « détournement de pouvoir reposant sur une hypothèse erronée », d’un défaut d’instruction, d’une erreur de fait et de la violation et de la mauvaise application de l’article 81 du règlement (UE, Euratom) n° 966/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2012, relatif aux règles financières applicables au budget général de l’Union et abrogeant le règlement (CE, Euratom) n° 1605/2002 du Conseil (JO 2012, L 298, p. 1, ci-après le « règlement financier ») ;

–        le deuxième est tiré de la violation et de la mauvaise application du principe d’efficacité du droit de l’Union et du principe de bonne gestion financière ainsi que d’un « abus de pouvoir par défaut d’information » ;

–        le troisième est tiré de la violation de l’obligation de motivation.

20      Ensuite, la requérante demande, « par conséquent », le versement des « sommes encore dues au département d’ingénierie de l’innovation » en vertu du contrat Entice, sans préciser le fondement juridique de cette demande.

21      Enfin, en réponse à la question pour réponse écrite posée par le Tribunal, concernant certains arguments développés dans le cadre du premier moyen et visant à faire constater l’inexistence de la dette résultant de l’exécution du projet JUST, la requérante a demandé que la requête soit partiellement requalifiée afin de contenir également une demande, fondée sur la clause compromissoire figurant dans l’article I.9, second alinéa, du contrat JUST et sur l’article 272 TFUE, tendant à ce que le Tribunal constate qu’elle n’était pas redevable, à l’égard de la Commission, de la dette relative à l’exécution du contrat JUST.

22      Dès lors, le recours repose sur un double fondement, en ce qu’il vise, d’une part, à obtenir l’annulation de la décision de compensation du 4 mai 2015 et de « tout autre acte préalable, subséquent ou connexe », ainsi que, par conséquent, le versement des « sommes encore dues au département d’ingénierie de l’innovation » et, d’autre part, à faire constater, notamment par le biais de l’annulation de la note de débit, l’inexistence de la dette résultant de l’exécution du projet JUST.

23      La Commission soulève des fins de non-recevoir à l’égard, d’une part, de la demande de versement des sommes encore dues au département d’ingénierie de l’innovation en vertu du contrat Entice et, d’autre part, de la demande tendant à l’annulation de « tout autre acte préalable, subséquent ou connexe » à la décision de compensation du 4 mai 2015 et à la note de débit.

24      Compte tenu des moyens et des arguments invoqués par les parties, le Tribunal estime opportun de traiter les divers chefs de conclusions dans l’ordre suivant :

–        en premier lieu, il convient d’examiner la demande de constatation de l’inexistence de la dette résultant de l’exécution du projet JUST. À cet égard, d’une part, il convient d’examiner l’existence des conditions pour une requalification de la demande d’annulation de la note de débit au titre de l’article 272 TFUE, pour autant que, par certains des arguments développés dans le cadre du premier moyen, la requérante invoque la bonne exécution du contrat JUST et donc l’inexistence de la dette résultant de l’exécution de ce contrat, et, d’autre part, il convient d’apprécier le bien-fondé des arguments en question, dans le cadre d’une demande au titre de l’article 272 TFUE ;

–        en second lieu, il convient d’examiner les demandes en annulation au titre de l’article 263 TFUE. À cet égard, il convient d’examiner, premièrement, la recevabilité de la demande visant au versement des sommes encore dues au département d’ingénierie de l’innovation en vertu du contrat Entice, deuxièmement, la recevabilité de la demande tendant à l’annulation de « tout autre acte préalable, subséquent ou connexe, même inconnu, en tant qu’acte faisant grief », en elle-même et en ce que cette demande vise à obtenir l’annulation de la décision de compensation du 28 avril 2015, et, troisièmement, la demande tendant à l’annulation de la décision de compensation du 4 mai 2015.

 Sur la demande de constatation de l’inexistence de la dette résultant de l’exécution du projet JUST

 Sur la requalification partielle du recours, au titre de l’article 272 TFUE, en recours visant à faire constater l’inexistence de la dette résultant du contrat JUST

25      Par son premier chef de conclusions, la requérante demande l’annulation non seulement de la décision de compensation du 4 mai 2015, mais également de la note de débit jointe à cette décision.

26      Tout d’abord, il convient de rappeler que la note de débit s’inscrit dans le contexte du contrat JUST, en ce qu’elle a pour objet le recouvrement d’une créance qui trouve son fondement dans les stipulations dudit contrat. En effet, la note de débit doit être comprise comme une mise en demeure comportant l’indication de la date d’échéance ainsi que les conditions de paiement, qui ne saurait être assimilée à un titre exécutoire, bien qu’elle mentionne la voie exécutoire de l’article 299 TFUE comme étant une option possible parmi d’autres s’offrant à la Commission dans l’hypothèse où le débiteur ne s’exécuterait pas à la date d’échéance fixée. Partant, ainsi qu’il ressort d’une jurisprudence constante, la note de débit ne produit pas d’effets juridiques qui trouveraient leur origine dans l’exercice de prérogatives de puissance publique, mais elle doit, au contraire, être regardée comme étant indissociable des rapports contractuels sous-jacents (voir, en ce sens, arrêt du 9 septembre 2015, Lito Maieftiko Gynaikologiko kai Cheirourgiko Kentro/Commission, C‑506/13 P, EU:C:2015:562, points 23 et 24, et ordonnance du 15 février 2016, InAccess Networks Integrated Systems/Commission, T‑82/15, non publiée, EU:T:2016:90, point 48).

27      Ensuite, il convient de relever que, dans le cadre de son premier moyen, la requérante conteste, par certains de ses arguments, l’existence de la créance que la Commission prétend détenir à son égard.

28      Enfin, il convient de relever que, conformément à son article I.9, premier alinéa, le contrat JUST est régi par le droit de l’Union et, à titre subsidiaire, par le droit belge. L’article I.9, second alinéa, de ce contrat contient une clause compromissoire au sens de l’article 272 TFUE, donnant compétence exclusive au juge de l’Union pour connaître de tout litige entre les parties relatif à l’application et à la mise en œuvre dudit contrat (voir point 3 ci‑dessus).

29      Compte tenu de ces circonstances, il y a lieu de vérifier s’il est possible de requalifier le présent recours en recours introduit tant sur le fondement de l’article 263 TFUE, en ce qu’il tend à l’annulation de la décision de compensation du 4 mai 2015, que sur le fondement de l’article 272 TFUE, en ce qu’il vise à faire constater que la créance de la Commission relative au projet JUST était infondée, car les activités contractuelles avaient été réalisées de manière satisfaisante.

30      À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence bien établie, il appartient à la partie requérante de faire le choix du fondement juridique de son recours et non au juge de l’Union de choisir lui-même le fondement légal le plus approprié (arrêts du 15 mars 2005, Espagne/Eurojust, C‑160/03, EU:C:2005:168, point 35, et du 9 novembre 2016, Trivisio Prototyping/Commission, T‑184/15, non publié, EU:T:2016:652, point 40).

31      Néanmoins, lorsqu’il est saisi d’un recours en annulation ou d’un recours en indemnité, alors que le litige est, en réalité, de nature contractuelle, le Tribunal requalifie le recours, si les conditions d’une telle requalification sont réunies. Plus particulièrement, le Tribunal s’estime dans l’impossibilité de requalifier un recours en annulation soit lorsque la volonté expresse de la partie requérante de ne pas fonder sa demande sur l’article 272 TFUE s’oppose à une telle requalification, soit lorsque le recours ne s’appuie sur aucun moyen tiré de la violation des règles régissant la relation contractuelle en cause, qu’il s’agisse de clauses contractuelles ou de dispositions de la loi nationale désignée dans le contrat. Il en découle que la requalification du recours est possible, sans que les droits de la défense de l’institution défenderesse en soient affectés, dans le cas où, d’une part, la volonté expresse de la partie requérante ne s’y oppose pas et, d’autre part, au moins un moyen tiré de la violation des règles régissant la relation contractuelle en cause est invoqué dans la requête, conformément aux dispositions de l’article 76, paragraphe 1, sous d), du règlement de procédure, ces deux conditions étant cumulatives (voir arrêt du 6 octobre 2015, Technion et Technion Research & Development Foundation/Commission, T‑216/12, EU:T:2015:746, points 58 à 60 et jurisprudence citée).

32      En l’espèce, en premier lieu, il y a lieu de constater que, en réponse à la question pour réponse écrite posée par le Tribunal, la requérante a demandé que la requête soit partiellement requalifiée afin de contenir, outre la demande tendant à l’annulation de la décision de compensation du 4 mai 2015, une demande, au titre de la clause compromissoire figurant à l’article I.9, second alinéa, du contrat JUST et de l’article 272 TFUE, visant à faire constater que la Commission ne détient pas, à son égard, la créance contractuelle réclamée par la note de débit.

33      En second lieu, il convient de relever que, bien qu’elle n’invoque explicitement aucune règle régissant la relation contractuelle en cause, dans le cadre du premier moyen, la requérante développe des arguments visant à faire constater l’inexistence de la créance réclamée par la Commission et résultant de l’exécution du projet JUST. Ces arguments concernent, plus particulièrement, la bonne exécution de certaines activités contractuelles, à savoir, tout d’abord, la production d’un DVD illustrant les activités du projet JUST, ensuite, la détermination du groupe des individus bénéficiaires des activités de ce projet et, enfin, l’exécution d’un atelier préparatoire préalable à la réalisation dudit projet. Dans le cadre de ces arguments, qui sont fondés notamment sur des principes généraux en matière de responsabilité contractuelle, elle évoque, notamment, l’annexe I du contrat JUST.

34      Dans ces circonstances, le Tribunal estime qu’il convient de requalifier le présent recours en recours introduit tant sur le fondement de l’article 263 TFUE, en ce qu’il tend à l’annulation de la décision de compensation du 4 mai 2015, que sur le fondement de l’article 272 TFUE, en ce qu’il vise à faire constater que la créance de la Commission relative au projet JUST était infondée.

35      Il y a donc lieu d’examiner, ci-après, le bien-fondé des arguments de la requérante qui se prêtent à une requalification au titre de l’article 272 TFUE.

 Sur la demande, requalifiée au titre de l’article 272 TFUE, de constatation de l’inexistence d’une créance de la Commission résultant de l’exécution du contrat JUST

36      La requérante conteste l’appréciation de la Commission relative à trois des activités prévues par le contrat JUST, à savoir, d’abord, la production d’un DVD illustrant les activités du projet JUST, ensuite, la détermination du groupe des individus bénéficiaires des activités de ce projet, en particulier l’exclusion des praticiens du droit parmi les bénéficiaires de ces activités, et, enfin, la mise en place d’un atelier préparatoire, préalable à la réalisation dudit projet.

37      En outre, face au reproche de la Commission de n’avoir contesté que ces trois aspects parmi de nombreuses contestations concernant l’exécution du contrat JUST, ce qui ne permettrait pas d’invalider l’appréciation de la Commission dans son ensemble, la requérante rétorque, d’une part, que, dans sa lettre du 30 mars 2015, la Commission avait affirmé que les griefs concernant la détermination des bénéficiaires du projet JUST supplantaient toute autre considération et, d’autre part, qu’elle s’est référée à ces trois aspects à titre d’exemples.

38      La Commission conteste les arguments de la requérante.

39      En premier lieu, s’agissant de la production d’un DVD illustrant les activités du projet JUST, la requérante fait valoir, tout d’abord, que, contrairement à ce que lui avait reproché la Commission, le DVD n’avait pas été réalisé en interne, mais par une société spécialisée liée à une chaîne de télévision régionale, et qu’il ne contenait pas que des photographies prises pendant la formation, mais également des images relatives aux activités de formation et des entretiens avec des participants, des auditeurs et des enseignants. Ensuite, la coïncidence entre certaines activités du cours et l’inauguration de l’année universitaire de l’école de spécialisation pour les professions juridiques aurait stimulé les activités liées au projet JUST, accroissant ainsi la diffusion de l’initiative. Enfin, quant au reproche selon lequel le département de sciences juridiques aurait produit 500 DVD au lieu des 1000 prévus par le contrat, la requérante fait valoir que cet aspect a été évoqué pour la première fois dans le mémoire en défense et que la fonction du DVD a été amplement remplie par un site Internet dédié aux activités liées au projet JUST.

40      À titre liminaire, il convient de rappeler que les paragraphes 2.3 et 3.4 de l’annexe I du contrat JUST indiquent, parmi les résultats attendus du projet, la réalisation d’un DVD comportant les photos des séances du cours de formation et les entretiens avec les participants. Ainsi qu’il ressort de cette annexe, le DVD devait être diffusé à 1 000 exemplaires. En outre, l’article II.5.1 du contrat JUST ainsi que le paragraphe 4.3 de son annexe I établissent que toutes les activités prévues dans le cadre du projet devaient assurer la visibilité de la Commission et que chacune des communications et des publications devait indiquer que les fonds provenaient de l’Union. Cette indication, assortie du logo de l’Union, devait apparaître sur toutes les publications, sur les documents relatifs aux divers événements, sur la correspondance officielle ainsi que sur le site Internet devant être créé concernant le projet JUST lui-même.

41      Il convient également de rappeler que, au sens de l’article II.13.1 du contrat JUST, toute modification des conditions de celui-ci devait faire l’objet d’un avenant écrit.

42      En l’espèce, la requérante se limite à réitérer les observations qu’elle avait formulées dans sa lettre du 7 février 2014, selon lesquelles, contrairement aux observations critiques avancées par la Commission dans sa lettre du 18 décembre 2013, le DVD n’avait pas été réalisé en interne mais par une société spécialisée et contenait des images relatives aux activités de formation et aux entretiens avec des participants, des auditeurs et des enseignants.

43      Or, force est de constater que la Commission avait expliqué ultérieurement, par sa lettre du 4 mars 2014, que le DVD se présentait comme un produit réalisé à l’initiative de la requérante et non comme un produit d’un projet financé par l’Union, compte tenu du fait qu’il ne comportait pas de couverture imprimée de façon professionnelle, qu’aucune référence au financement de l’Union n’était imprimée sur le DVD et que les rares informations figurant dans la vidéo concernant le financement de l’Union étaient confuses. En outre, par sa lettre du 30 mars 2015, la Commission avait ajouté que le DVD ne contenait que des photos de trois cours et la vidéo d’un cours et qu’il n’avait été produit qu’à 500 exemplaires au lieu des 1 000 prévus à l’annexe I du contrat JUST.

44      La requérante ne nie pas qu’elle ne s’est pas conformée auxdites conditions ni qu’elle n’était pas convenue avec la Commission d’une modalité différente d’exécution de celles-ci. Elle ne saurait donc réfuter les constatations de la Commission en faisant valoir que la fonction du DVD a été amplement remplie par un site Internet portant sur les activités liées au projet, ce qui constitue une modalité d’exécution qui n’est pas conforme aux prescriptions du contrat JUST et n’a pas été préalablement définie avec la Commission conformément aux termes de l’article II.13.1 du contrat JUST.

45      C’est donc à juste titre que la Commission a conclu que la condition relative à la production du DVD n’était pas remplie.

46      En deuxième lieu, en ce qui concerne la détermination du groupe des individus bénéficiaires des activités du projet JUST, la requérante fait valoir que la Commission a, à tort, reproché au département de sciences juridiques d’avoir exclu les praticiens du droit de ce groupe. Elle ajoute, d’une part, que, compte tenu de leur difficulté à être présents chaque jour, les participants avaient bénéficié de leçons enregistrées, disponibles sur le site Internet du projet, et, d’autre part, que les élèves de son école de spécialisation pour les professions juridiques, qui ont participé à certaines activités du projet, avaient pu être inclus dans la catégorie des praticiens du droit et, en conséquence, dans le groupe des individus bénéficiaires des activités prévues par le contrat JUST.

47      À titre liminaire, il convient de rappeler que le paragraphe 2.2 de l’annexe I du contrat JUST prévoit que le groupe cible visé par le projet est composé de juges, de procureurs, d’experts juridiques et de praticiens du droit.

48      Le paragraphe 2.3 de l’annexe I du contrat JUST ajoute que le groupe des bénéficiaires est composé de 30 juristes sélectionnés parmi des juges, des experts légaux et d’autres praticiens du droit provenant d’Italie, de Bulgarie, de Croatie, d’Albanie, du Monténégro et d’autres États appartenant aux deux zones géographiques concernées. Le même paragraphe indique, parmi les activités principales du projet, la réalisation d’un cours de formation à destination de 30 praticiens du droit provenant de six ou de sept États membres différents, s’articulant en trois modules de quatre jours à Lecce (Italie) et un module de deux jours à Sofia (Bulgarie).

49      Le paragraphe 3.1 de l’annexe I du contrat JUST précise que le cours de formation doit bénéficier directement à 30 juristes, procureurs et experts légaux qui s’occupent du droit de l’environnement devant les tribunaux nationaux, que ceux-ci doivent parler anglais et que le groupe visé sera constitué de quinze participants italiens, de dix participants provenant de la zone des Balkans (Albanie, Croatie et Monténégro) et de cinq participants bulgares. Le même paragraphe précise également que la sélection des participants aura lieu par voie de procédure ouverte, publiée sur les sites Internet des partenaires du projet JUST, dans les journaux nationaux ainsi que dans les journaux officiels des ordres des avocats et des associations de magistrats et que les participants seront sélectionnés en fonction de leur curriculum vitae et de leur motivation.

50      Enfin, le paragraphe 3.4 de l’annexe I du contrat JUST désigne, comme indicateurs de la bonne exécution du projet, le nombre total de destinataires participant au cours de formation, le nombre escompté étant de 30 participants, et le nombre d’États membres d’origine desdits participants, le nombre escompté étant de cinq ou de six États. Le même paragraphe indique également que le nombre d’universités et d’associations de juges disposées à adopter le modèle du cours de formation, le nombre escompté étant de cinq ou de six entités européennes signataires d’un protocole d’entente, serait considéré comme un indicateur de l’impact du projet.

51      En l’espèce, il convient de relever que la Commission, dans ses lettres du 18 décembre 2013 et du 30 mars 2015, faisait remarquer que, ainsi qu’il ressortait du rapport final et des annexes du projet JUST, sur l’ensemble des participants, un seul avait suivi les quatre modules prévus, deux avaient suivi trois modules seulement et six n’avaient suivi que deux modules, tandis que les autres n’avaient même pas assisté physiquement aux cours, mais avaient suivi les enregistrements diffusés en ligne, et que le troisième module avait été suivi presque exclusivement par les étudiants de l’école de spécialisation pour les professions juridiques de la requérante. La Commission a considéré, dès lors, que le groupe de destinataires n’était pas conforme à celui prévu par le paragraphe 2.3 de l’annexe I du contrat JUST, qui prévoyait la participation d’un groupe cible composé de 30 juristes, sélectionnés parmi des juges, des procureurs, des experts légaux et d’autres praticiens du droit provenant de six ou de sept États membres de l’Union.

52      Or, ces circonstances ne sont pas démenties par la requérante, qui se limite à affirmer que, dans le rapport final, le département de sciences juridiques a indiqué que, pendant les activités liées au projet, il était apparu qu’il avait été difficile d’obtenir que tous les participants soient présents chaque jour à cause de leur charge de travail importante et que, par conséquent, des enregistrements audiovisuels, qui n’étaient pas prévus initialement, avaient été mis à disposition des participants.

53      Partant, ainsi que le fait valoir la Commission, sans que cela soit remis en cause par la requérante, indépendamment de l’inclusion des étudiants de l’école de spécialisation pour les professions juridiques parmi les bénéficiaires du projet, les membres du groupe des bénéficiaires n’ont pas suivi le cours de formation dans son intégralité et ce groupe n’a pas respecté les critères numériques et géographiques fixés par le contrat JUST. À cet égard, la circonstance que les élèves auraient bénéficié des leçons enregistrées est inopérante, s’agissant d’une modification importante d’une modalité d’exécution du projet JUST qui n’a pas été définie avec la Commission.

54      Par ailleurs, le projet indiquait clairement que la catégorie des « praticiens du droit » faisait référence à des juges, à des procureurs et à des experts légaux ou à des professionnels hautement expérimentés exerçant leurs activités dans le domaine du droit de l’environnement devant les tribunaux nationaux dotés d’une expérience en la matière. Il est à tout le moins douteux que les étudiants de l’école de spécialisation pour les professions juridiques puissent être assimilés à ces catégories. En outre, le projet indiquait que les participants seraient sélectionnés sur le fondement de leur curriculum vitae, ce qui n’a pas été démontré en ce qui concerne les étudiants en question.

55      Il découle de ce qui précède que la condition ayant trait au groupe des bénéficiaires n’a pas été remplie et que, d’ailleurs, la requérante n’a informé la Commission des difficultés alléguées que dans le rapport final, lorsque le projet était arrivé à son terme.

56      À titre superfétatoire, il convient d’observer que l’argument de la requérante selon lequel la Commission avait affirmé que les griefs concernant le groupe cible supplantaient toute autre considération, et donc constituaient, en substance, l’élément décisif de l’appréciation de la Commission, outre qu’il est inopérant, la condition n’ayant pas été remplie, est également infondé. En effet, ainsi que cela a été précisé par la Commission, il ressort du passage en cause de la lettre du 30 mars 2015 qu’elle a seulement précisé que, à la lumière des problèmes de composition du groupe des destinataires du cours de formation, les différents arguments relatifs au contenu et à la qualité du cours ne permettraient pas de le rendre conforme à ce qui était prévu dans le contrat.

57      À la lumière des circonstances susvisées, la Commission a conclu à juste titre que la condition concernant les bénéficiaires du projet n’était pas remplie.

58      En troisième lieu, la requérante reproche à la Commission d’avoir refusé de considérer que la réunion tenue entre le représentant du département de sciences juridiques et les fonctionnaires de l’Agence européenne pour la sécurité maritime (AESM), au siège de cette dernière, constituait un atelier préparatoire, préalable à la réalisation du projet JUST. Par ailleurs, elle fait valoir que, si la réunion prévue en Bulgarie n’a pas eu lieu, en revanche, la réunion programmée à Lecce s’est déroulée comme prévu.

59      À titre liminaire, il convient de rappeler que le paragraphe 3.1 de l’annexe I du contrat JUST prévoyait que les partenaires du projet se réuniraient à Lecce pour organiser le contenu du module des cours et que deux ateliers de travail auraient lieu durant la première phase préparatoire, l’un en Italie et l’autre en Bulgarie, afin de pouvoir consulter les personnes intéressées.

60      Or, il convient de relever que la requérante, d’une part, dans la requête, reproche à la Commission d’avoir refusé de considérer qu’une réunion tenue entre le représentant du département de sciences juridiques et les fonctionnaires de l’AESM constituait un atelier préparatoire et, d’autre part, dans la réplique, admet que, tandis que la réunion programmée à Lecce s’est déroulée comme prévu, la réunion prévue en Bulgarie n’a pas eu lieu.

61      Il s’ensuit que, selon les propres dires de la requérante, la condition relative à la mise en place d’un atelier préparatoire n’a pas été remplie. D’ailleurs, aucune modification du projet n’avait été demandée par la requérante en ce sens, contrevenant de ce fait aux dispositions de l’article I.13.1 du contrat JUST.

62      Il s’ensuit que la Commission a conclu à juste titre que la condition susvisée n’était pas remplie.

63      Il y a donc lieu de conclure que la requérante n’a pas démontré que les constatations de la Commission concernant les trois aspects susvisés étaient infondées.

64      En tout état de cause, les arguments invoqués par la requérante ne concernent que trois des irrégularités décelées par la Commission dans l’exécution du projet et ne sauraient donc remettre en question les conclusions de cette dernière. Par ailleurs, interrogée sur cette circonstance lors de l’audience, la requérante n’a pas été en mesure de quantifier l’impact de l’éventuelle suppression des trois irrégularités contestées sur le montant de la créance revendiquée par la Commission.

65      Il y a donc lieu de rejeter la demande, requalifiée, au titre de l’article 272 TFUE, de constatation de l’inexistence d’une créance de la Commission résultant de l’exécution du contrat JUST.

 Sur les demandes en annulation au titre de l’article 263 TFUE

 Sur la recevabilité de la demande de versement des sommes encore dues en vertu du contrat Entice

66      La Commission soulève une fin de non-recevoir à l’égard de la demande de la requérante tendant à ce qu’il lui soit enjoint de lui payer les sommes qu’elle aurait dû recevoir au titre du contrat Entice, au motif que le Tribunal n’aurait pas compétence pour connaître d’une action déclaratoire dans le cadre d’un recours en annulation.

67      La requérante rétorque que la déclaration d’annulation de la décision de compensation du 4 mai 2015 emporte l’obligation pour la Commission de verser les sommes indûment déduites.

68      À cet égard, il suffit de rappeler que, dans le cadre d’un recours en annulation fondé sur l’article 263 TFUE, le juge de l’Union n’a pas compétence pour connaître des actions déclaratoires (voir, en ce sens, arrêt du 6 octobre 2015, Technion et Technion Research & Development Foundation/Commission, T‑216/12, EU:T:2015:746, point 57 et jurisprudence citée).

69      En outre, en application de l’article 266, premier alinéa, TFUE, l’institution dont émane l’acte annulé est tenue de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt de la Cour. Il appartiendra donc à la Commission de prendre toute mesure nécessaire en cas d’annulation de la décision de compensation du 4 mai 2015, la requérante pouvant, le cas échéant, former ultérieurement un recours à l’encontre des mesures adoptées par la Commission à cet égard ou de l’abstention de cette dernière à statuer.

70      Il s’ensuit que la demande de versement des sommes encore dues en vertu du contrat Entice doit être rejetée comme étant irrecevable.

 Sur la recevabilité des conclusions visant l’annulation de « tout autre acte préalable, subséquent ou connexe, même inconnu, en tant qu’acte faisant grief »

71      La Commission soulève une fin de non-recevoir à l’égard de la demande de la requérante tendant à l’annulation de « tout autre acte préalable, subséquent ou connexe, même inconnu, en tant qu’acte faisant grief », en ce que cette demande revêtirait un caractère vague et imprécis, qui ne satisfait pas aux exigences énoncées par l’article 76, paragraphe 1, sous d) et e), du règlement de procédure.

72      Elle fait également valoir que, contrairement à ce que prétend la requérante (voir point 18 ci-dessus), la demande susvisée n’a pas pour effet d’étendre l’objet du litige à la décision de compensation du 28 avril 2015, qui est antérieure à celle qui fait l’objet du présent recours et qui n’a pas été contestée par la requérante dans le délai de recours.

73      La requérante rétorque, dans la réplique, que le département de sciences juridiques n’a eu la connaissance intégrale de la première compensation qu’à la suite de la production des pièces dans le mémoire en défense et que, de ce fait, il lui aurait été impossible d’attaquer un acte dont elle ignorait l’existence.

74      À titre liminaire, il convient de rappeler que l’objet du litige et les conclusions de la partie requérante constituent deux indications essentielles devant, conformément à l’article 21 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et à l’article 76, paragraphe 1, sous d) et e), du règlement de procédure, figurer dans la requête introductive d’instance (ordonnances du 7 mai 2013, TME/Commission, C‑418/12 P, non publiée, EU:C:2013:285, point 32, et du 13 janvier 2015, Istituto di vigilanza dell’urbe/Commission, T‑579/13, non publiée, EU:T:2015:27, point 26).

75      Il convient également de rappeler que toute requête introductive d’instance doit indiquer l’objet du litige ainsi que l’exposé sommaire des moyens et que cette indication doit être suffisamment claire et précise pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au juge de l’Union d’exercer son contrôle. De même, les conclusions de la requête introductive d’instance doivent être formulées de manière non équivoque afin d’éviter que le juge de l’Union ne statue ultra petita ou bien n’omette de statuer sur un grief (voir ordonnance du 7 mai 2013, TME/Commission, C‑418/12 P, non publiée, EU:C:2013:285, point 33 et jurisprudence citée ; ordonnance du 13 janvier 2015, Istituto di vigilanza dell’urbe/Commission, T‑579/13, non publiée, EU:T:2015:27, point 27).

76      Il en découle que des conclusions qui tendent à l’annulation d’actes préalables, connexes ou ultérieurs à la décision de compensation du 4 mai 2015, sans que ces actes aient été identifiés, doivent être considérées comme non conformes à ces exigences, en ce qu’elles manquent de précision quant à leur objet (voir, en ce sens, ordonnance du 13 janvier 2015, Istituto di vigilanza dell’urbe/Commission, T‑579/13, non publiée, EU:T:2015:27, point 28 et jurisprudence citée).

77      Il s’ensuit que la demande d’annulation de tout acte préalable, subséquent ou connexe à ladite décision de compensation, sans que celui-ci ait été identifié, doit être rejetée comme étant manifestement irrecevable.

78      En outre, il convient de relever que cette demande ne saurait être interprétée comme visant l’annulation de la décision de compensation du 28 avril 2015.

79      Tout d’abord, la requérante a affirmé qu’elle ignorait l’existence de cette décision lors de l’introduction de son recours, ce qui démontre qu’elle n’avait pas l’intention d’attaquer celle-ci par son recours. Par ailleurs, elle ne saurait prétendre que la demande d’annulation d’une telle décision puisse ressortir d’une formulation, qu’elle a qualifiée, lors de l’audience, de « clause de style », qui ne satisfait pas aux conditions énoncées par l’article 76, paragraphe 1, sous d) et e), du règlement de procédure.

80      Ensuite, force est de constater que la requérante a dépassé le délai d’introduction d’un recours à l’égard de cette décision.

81      À cet égard, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 263, sixième alinéa, TFUE, le recours en annulation doit être formé dans un délai de deux mois à compter, suivant le cas, de la publication de l’acte attaqué, de sa notification à la partie requérante ou, à défaut, du jour où celle-ci en a eu connaissance. Selon une jurisprudence constante, il ne peut être dérogé à l’application des réglementations de l’Union concernant les délais de procédure que dans des circonstances tout à fait exceptionnelles, étant donné que l’application stricte de ces règles répond à l’exigence de sécurité juridique et à la nécessité d’éviter toute discrimination ou tout traitement arbitraire dans l’administration de la justice (voir arrêt du 26 novembre 1985, Cockerill-Sambre/Commission, 42/85, EU:C:1985:471, point 10 et jurisprudence citée, et ordonnance du 14 avril 2015, Tecnica 2000/Parlement e.a., T‑92/15, non publiée, EU:T:2015:216, point 9 et jurisprudence citée).

82      En l’espèce, le fait que la décision de compensation du 28 avril 2015 ait été notifiée « seulement » à la requérante et non au département de sciences juridiques ne constitue manifestement pas une circonstance tout à fait exceptionnelle au sens de la jurisprudence citée au point 81 ci-dessus, une telle circonstance n’étant d’ailleurs pas même invoquée, d’autant plus que cette décision a été adressée à la requérante et que c’est elle qui a introduit le présent recours, et non le département de sciences juridiques, lequel, au demeurant, ainsi qu’il est expliqué aux points 100 et 101 ci-après, ne dispose pas d’une personnalité juridique propre.

83      En outre, il ressort du dossier que, ainsi que le souligne la Commission, la requérante a été dûment informée de la première compensation. En effet, la lettre du 28 avril 2015 contenait, en annexe, la note de débit, dont il ressortait clairement que la créance revendiquée par la Commission était liée au projet JUST. Même à supposer que la requérante ne l’ait pas compris, cela ne serait imputable qu’à elle-même.

84      Au vu de toutes les considérations qui précèdent, la demande de la requérante visant l’annulation de « tout autre acte préalable, subséquent ou connexe, même inconnu, en tant qu’acte faisant grief » doit être rejetée comme irrecevable.

 Sur la demande, présentée au titre de l’article 263 TFUE, tendant à l’annulation de la décision de compensation du 4 mai 2015

–       Sur le premier moyen, tiré de la violation des articles 3 et 24 de la Constitution italienne, d’un abus de pouvoir, d’un « détournement de pouvoir reposant sur une hypothèse erronée », d’un défaut d’instruction, d’une erreur de fait et de la violation ainsi que de la mauvaise application de l’article 81 du règlement financier

85      Par son premier moyen, la requérante fait valoir, pour l’essentiel, en premier lieu, que la Commission a appliqué la compensation prévue par la décision de compensation du 4 mai 2015 sur le fondement d’une créance qui n’était pas certaine et, en deuxième lieu, que celle-ci a appliqué ladite compensation à une créance et à une dette qui n’étaient pas réciproques, car elles découlaient de deux relations juridiques distinctes. Dans la réplique, elle ajoute, en troisième lieu, que l’appréciation du projet JUST par la Commission a été influencée négativement par de fausses déclarations de l’ancienne coordinatrice de ce projet.

86      La Commission conteste les arguments de la requérante.

87      À titre liminaire, il convient de rappeler que, s’agissant de la constatation des créances de la Commission donnant lieu à un ordre de recouvrement, l’article 78, paragraphes 1 à 3, du règlement financier dispose ce qui suit :

« 1.      La constatation d’une créance est l’acte par lequel l’ordonnateur compétent :

a)      vérifie l’existence de la dette du débiteur ;

b)      détermine ou vérifie la réalité et le montant de la dette ;

c)      vérifie les conditions d’exigibilité de la dette.

2.      Les ressources propres mises à la disposition de la Commission ainsi que toute créance identifiée comme certaine, liquide et exigible sont constatées par un ordre de recouvrement donné au comptable, suivi d’une note de débit adressée au débiteur, tous deux établis par l’ordonnateur compétent.

3.      Les montants indûment payés sont recouvrés. »

88      L’article 81 du règlement délégué (UE) n° 1268/2012 de la Commission, du 29 octobre 2012, relatif aux règles d’application du règlement financier (JO 2012, L 362, p. 1, ci-après le « règlement délégué »), précise ce qui suit :

« Pour constater une créance, l’ordonnateur compétent s’assure :

a)      du caractère certain de la créance, en ce sens que celle-ci ne doit pas être affectée d’une condition ;

b)      du caractère liquide de la créance, dont le montant doit être déterminé en argent et avec exactitude ;

c)      du caractère exigible de la créance, qui ne doit pas être soumise à un terme ;

[…] »

89      S’agissant du recouvrement par compensation, l’article 80, paragraphe 1, du règlement financier dispose :

« Le comptable prend en charge les ordres de recouvrement des créances dûment établis par l’ordonnateur compétent. Le comptable est tenu de faire diligence en vue d’assurer la rentrée des recettes de l’Union et doit veiller à la conservation des droits de l’Union.

Le comptable procède au recouvrement par compensation et à due concurrence des créances de l’Union à l’égard de tout débiteur lui-même titulaire d’une créance à l’égard de l’Union. Ces créances à compenser sont certaines, liquides et exigibles. »

90      L’article 87 du règlement délégué précise :

« 1.      Lorsque le débiteur est titulaire vis-à-vis de l’Union d’une créance certaine, au sens de l’article 81, [sous] a), liquide et exigible ayant pour objet une somme d’argent constatée par un ordre de paiement, le comptable, suivant la date limite visée à l’article 80, paragraphe 3, [sous] b), procède au recouvrement par compensation de la créance constatée.

[…]

3.      La compensation visée au paragraphe 1 a le même effet qu’un paiement et libère l’Union du montant de la dette et, le cas échéant, des intérêts dus. »

91      En l’espèce, ainsi que le fait valoir la Commission, les conditions énoncées par le règlement financier et par le règlement délégué ont été respectées. D’une part, l’ordonnateur responsable a communiqué l’ordre de recouvrement à la requérante, en lui transmettant une note de débit et en lui indiquant que, en cas d’absence de paiement, la Commission était habilitée à procéder au recouvrement par compensation. D’autre part, la requérante n’ayant pas payé la somme indiquée dans la note de débit à la date limite, le comptable de la Commission, constatant l’existence d’une créance en faveur de la requérante, a informé celle-ci que la Commission allait procéder au recouvrement par compensation.

92      Cette conclusion ne saurait être remise en cause par les arguments de la requérante.

93      En premier lieu, s’agissant des arguments tirés de ce que la créance qui faisait l’objet de la compensation n’était pas certaine, dans la mesure où elle n’avait pas été constatée par une autorité tierce, ne relevait pas de l’appréciation finale de la Commission, étant donné qu’une procédure d’audit était en cours, et était contestée par le département de sciences juridiques, premièrement, il suffit de constater qu’une compensation en vertu de l’article 80, paragraphe 1, du règlement financier n’est pas exclue lorsque l’une des dettes est contestée par l’autre partie au contrat (arrêt du 17 janvier 2007, Grèce/Commission, T‑231/04, EU:T:2007:9, point 118).

94      En outre, il convient d’écarter l’argument selon lequel la décision de compensation du 4 mai 2015 se fonderait sur une demande de remboursement non fondée, la demande, requalifiée au titre de l’article 272 TFUE, de constatation de l’inexistence d’une créance de la Commission résultant de l’exécution du contrat JUST ayant été écartée.

95      Il convient également d’écarter l’argument selon lequel la créance n’est pas certaine au motif que la Commission aurait changé de position à la suite des contre-arguments fournis par le département de sciences juridiques. En effet, le fait que la Commission ait affiné progressivement les résultats de son évaluation du projet JUST sur le fondement des renseignements et des documents fournis par la requérante au cours de la procédure n’implique pas que la créance n’était pas certaine quant à son montant lors de l’adoption de la décision de compensation du 4 mai 2015.

96      Deuxièmement, force est de constater que, contrairement à ce que soutient la requérante, une telle compensation ne saurait être exclue en l’absence de confirmation de la créance par un organe indépendant, le caractère certain d’une compensation au sens de l’article 91 du règlement délégué n’étant affecté que par l’existence d’une condition (voir, en ce sens, arrêt du 15 avril 2011, République tchèque/Commission, T‑465/08, EU:T:2011:186, points 146 et 147), ce qui n’est pas le cas en l’espèce.

97      Troisièmement, il convient de relever que, contrairement à ce que soutient la requérante, l’existence d’une procédure d’audit concernant l’exécution du contrat JUST ne saurait davantage exclure la compensation.

98      En effet, conformément aux dispositions pertinentes du règlement financier et du règlement délégué (voir points 87 à 90 ci-dessus), le comptable de la Commission procède au recouvrement par compensation et à due concurrence des créances de l’Union à l’égard de tout débiteur lui-même titulaire d’une créance à l’égard de l’Union, ces créances étant certaines, liquides et exigibles, indépendamment de l’ouverture d’une procédure d’audit, laquelle d’ailleurs ne concerne pas l’évaluation du projet JUST, mais la vérification des coûts admissibles.

99      De surcroît, la requérante n’a pas démontré que les résultats de cette procédure d’audit, en ce qui concerne les coûts admissibles, avaient eu un impact sur le montant de la créance réclamée par la Commission.

100    En deuxième lieu, il y a lieu d’écarter l’argument tiré de ce que la Commission aurait appliqué la compensation à une créance et à une dette qui n’étaient pas réciproques, car elles découlaient de deux relations juridiques distinctes concernant deux entités juridiques différentes, à savoir, d’une part, celle entre la DG « Justice » et le département de sciences juridiques et, d’autre part, celle entre l’AER et le département d’ingénierie de l’innovation.

101    À cet égard, il suffit de rappeler que, ainsi qu’il ressort de l’article 49, paragraphe 1, de son règlement relatif à l’administration, aux finances et à la comptabilité, la requérante, en tant qu’institution dotée de la personnalité juridique, est l’unique entité à laquelle peuvent être imputés les effets juridiques des pouvoirs de négociation exercés en tant que pouvoir public et sujet privé dans le respect de ses objectifs institutionnels. D’ailleurs, le présent recours est formé par la requérante et non par les départements concernés.

102    En troisième lieu, il y a lieu d’écarter l’argument selon lequel l’appréciation du projet JUST par la Commission aurait été influencée négativement par de fausses déclarations fournies aux services de la Commission par une ancienne coordinatrice de ce projet, licenciée depuis lors par la requérante.

103    S’il est vrai que le rapport d’évaluation du projet JUST du 19 novembre 2013 de la DG « Justice » mentionne, en son point 4, certaines observations critiques sur l’exécution de ce projet fournies par téléphone par cette personne, la requérante n’a pas démontré que ces déclarations avaient eu une incidence sur l’appréciation dudit projet, et en particulier sur l’appréciation de la Commission relative aux trois activités du contrat contestée par la requérante. En outre, ainsi que cela a été constaté dans le contexte de la demande, requalifiée au titre de l’article 272 TFUE, de constatation de l’inexistence d’une créance de la Commission résultant de l’exécution du contrat JUST (voir points 36 à 65 ci-dessus), indépendamment de toute déclaration examinée par la Commission, les trois activités susvisées n’ont pas été exécutées conformément aux dispositions de ce contrat.

104    À la lumière de tout ce qui précède, il y a lieu de rejeter le premier moyen.

–       Sur le deuxième moyen, tiré de la violation et de la mauvaise application du principe d’efficacité du droit de l’Union, de la violation et de la mauvaise application du principe de bonne gestion financière et d’un « abus de pouvoir par défaut d’information »

105    Par son deuxième moyen, la requérante fait valoir, en substance, que les fonds affectés à l’exécution du contrat Entice ne pourraient pas être utilisés pour apurer la dette relative à un projet différent, en l’occurrence le projet JUST, au motif que cette utilisation porterait atteinte à l’exécution du premier projet.

106    La Commission conteste les arguments de la requérante.

107    À cet égard, ainsi que le souligne la Commission, d’une part, force est de constater que le règlement financier et le règlement délégué ne subordonnent pas la compensation à la condition que la créance et la dette soient liées au même projet.

108    D’autre part, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence de la Cour, la compensation ne saurait être subordonnée à une obligation préalable de s’assurer que l’utilisation des fonds concernés pour les fins prévues et la réalisation des actions ayant justifié l’attribution desdits fonds resteront assurées malgré la compensation envisagée (arrêt du 10 juillet 2003, Commission/CCRE, C‑87/01 P, EU:C:2003:400, point 29).

109    Il y a donc lieu de rejeter le deuxième moyen.

–       Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation

110    Par son troisième moyen, la requérante fait valoir, en substance, que la décision de compensation du 4 mai 2015 a été rendue en violation de l’obligation de motivation, puisqu’elle ne précise ni ses sources, ni ses motifs, ni ses fondements juridiques, et ne précise pas davantage quelle créance et quelle dette sont compensées.

111    La Commission conteste les arguments de la requérante.

112    Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la motivation ne doit pas nécessairement spécifier tous les éléments de fait et de droit pertinents, la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE devant être appréciée non seulement au regard de son libellé, mais aussi au regard de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée. En particulier, un acte faisant grief est suffisamment motivé dès lors qu’il intervient dans un contexte connu par l’intéressé, qui lui permet de comprendre la portée de la mesure prise à son égard. Dans le cas d’une décision de compensation, la motivation doit permettre d’identifier avec précision les créances qui sont compensées, sans qu’il puisse être exigé que la motivation retenue initialement à l’appui de la constatation de chacune des créances soit répétée dans l’acte de compensation (voir arrêt du 6 octobre 2015, Technion et Technion Research & Development Foundation/Commission, T‑216/12, EU:T:2015:746, points 97 et 98 et jurisprudence citée).

113    En l’espèce, ainsi que le fait valoir la Commission, la décision de compensation du 4 mai 2015 indique clairement le fondement juridique de la compensation, à savoir l’article 80 du règlement financier, et mentionne le nom du débiteur, le contrat à l’origine de la créance, la référence de la note de débit relative à la dette soumise à compensation ainsi que les sommes faisant l’objet de la compensation. En outre, la note de débit jointe à cette décision fait expressément référence au contrat duquel la dette découle ainsi qu’à la correspondance échangée entre les parties.

114    Il s’ensuit que cette décision est motivée à suffisance de droit.

115    Il y a donc lieu de rejeter le troisième moyen et, par conséquent, de rejeter le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

116    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Università del Salento est condamnée aux dépens.

Berardis

Spielmann

Csehi

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 14 septembre 2017.

Signatures


*      Langue de procédure : l’italien.