Language of document : ECLI:EU:T:2008:452

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (chambre des pourvois)

20 octobre 2008 (*)

« Pourvoi – Fonction publique – Fonctionnaires – Sécurité sociale – Accident du travail – Décision de clôture de la procédure d’application de l’article 73 du statut – Absence d’acte faisant grief – Pourvoi non fondé »

Dans l’affaire T‑278/07 P,

ayant pour objet un pourvoi formé contre l’ordonnance du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (première chambre) du 11 mai 2007, Marcuccio/Commission (F‑2/06, non encore publiée au Recueil), et tendant à l’annulation de cette ordonnance,

Luigi Marcuccio, ancien fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Tricase (Italie), représenté par Me G. Cipressa, avocat,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant

Commission des Communautés européennes, représentée par M. J. Currall et Mme C. Berardis‑Kayser, en qualité d’agents, assistés de Me A. Dal Ferro, avocat,

partie défenderesse en première instance,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (chambre des pourvois),

composé de MM. M. Jaeger, président, M. Vilaras, N. J. Forwood (rapporteur), Mme M. E. Martins Ribeiro et M. O. Czúcz, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend le présent

Arrêt

1        Par son pourvoi introduit au titre de l’article 9 de l’annexe I du statut de la Cour de justice, le requérant, M. Luigi Marcuccio, demande l’annulation de l’ordonnance du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (première chambre) du 11 mai 2007, Marcuccio/Commission (F‑2/06, non encore publiée au Recueil, ci‑après l’« ordonnance attaquée »), par laquelle celui-ci a rejeté comme manifestement irrecevable son recours tendant à l’annulation de la décision de la Commission de clôturer la procédure relative à l’octroi des prestations prévues à l’article 73 du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le « statut ») à la suite d’un accident dont le requérant a été victime.

 Faits à l’origine du litige et procédure en première instance

2        Les faits qui sont à l’origine du litige sont énoncés dans l’ordonnance attaquée dans les termes suivants :

« 2      Le requérant a été fonctionnaire de grade A 7 à la direction générale ‘Développement’ de la Commission, du 16 juin 2000 au 30 mai 2005. Mis en congé de maladie à partir du 4 janvier 2002, il n’a jamais repris son activité au service de la Commission. En date du 30 mai 2005, il a obtenu le bénéfice d’une allocation d’invalidité et, en application de l’article 53 du statut, a été mis à la retraite avec effet immédiat.

3      Pendant son congé de maladie, le requérant a été victime d’une chute, survenue le 10 septembre 2003, qui l’a blessé au genou gauche.

4      À la suite de la déclaration d’accident présentée par le requérant, la Commission lui a fait savoir, par note du 30 janvier 2004, que ce qui lui était arrivé pouvait être considéré comme un accident au sens des dispositions statutaires en vigueur et l’a invité à produire les documents justificatifs.

5      En réponse à cette note, le requérant a adressé à la Commission, le 22 juillet 2004, un rapport de résonance magnétique, daté du 4 mars 2004, et un certificat médical, rédigé le 21 juillet suivant, lequel attestait que son état de santé s’était stabilisé mais qu’il avait des séquelles.

6      Le 18 août 2004, le régime commun d’assurance maladie de la Commission a adressé au requérant une note indiquant que le médecin désigné par l’institution pour rédiger les expertises médicales souhaitait pouvoir l’examiner et lui demandait de bien vouloir contacter le secrétariat médical par téléphone ou par courriel afin de fixer un rendez-vous.

7      En l’absence de réponse de la part du requérant à la note en question, la Commission lui a adressé, le 7 février 2005, une nouvelle note, dans laquelle elle lui demandait à nouveau de prendre téléphoniquement contact avec le médecin désigné par l’institution. Cette note lui signifiait également que, en l’absence de réponse de sa part avant le 8 mai 2005, la Commission considérerait qu’il ne souhaitait plus poursuivre la procédure de reconnaissance d’accident professionnel et la classerait.

8      Par courrier daté du 10 mars 2005 et expédié le 7 avril suivant, le requérant a répondu à la note du 7 février 2005 et fait savoir qu’il n’avait jamais reçu celle du 18 août 2004, qu’il se tenait à l’entière disposition du médecin désigné par l’institution et que son présent courrier devait être considéré comme remplaçant l’appel téléphonique audit médecin, demandé par la Commission.

9      Le 9 juin 2005, le requérant a introduit une réclamation contre la décision de clôture de la procédure de reconnaissance d’accident professionnel, envisagée à la fin de la note de la Commission du 7 février 2005.

10      Par lettre du 29 juillet 2005, les services de la Commission ont informé le requérant qu’ils n’avaient pas reçu son courrier daté du 10 mars 2005, lui ont indiqué que rien ne s’opposait à la poursuite de la procédure de reconnaissance d’accident professionnel et ont réitéré leur invitation à prendre contact avec le médecin désigné par l’institution.

11      Par lettre du 15 septembre 2005, le requérant a déclaré maintenir sa réclamation, en relevant que l’article 18 de la réglementation relative à la couverture des risques d’accident et de maladie professionnelle des fonctionnaires des Communautés européennes ne faisait aucune référence à l’obligation pour la personne ayant subi un accident de téléphoner au médecin désigné par l’institution pour fixer un rendez-vous, contrairement à ce qui lui était imposé en l’espèce.

12      Enfin, dans un courrier du 15 novembre 2005, le requérant a exprimé le souhait de régler le différend qui l’opposait à la Commission.

13      La Commission n’a pas répondu aux deux derniers courriers susmentionnés du requérant. Celui-ci n’a pas pris contact avec le médecin désigné par l’institution. »

3        Par requête déposée au greffe du Tribunal de la fonction publique le 5 janvier 2006, le requérant a introduit un recours, qui a été enregistré sous le numéro d’affaire F‑2/06.

4        Le requérant a conclu, en première instance, à ce que le Tribunal de la fonction publique annule la décision de la Commission de clôturer la procédure ayant pour objet l’octroi des prestations prévues à l’article 73 du statut et condamne la Commission aux dépens.

5        La Commission a conclu, en première instance, à ce que le Tribunal de la fonction publique rejette le recours et statue comme de droit sur les dépens.

 Sur l’ordonnance attaquée

6        Dans l’ordonnance attaquée, le Tribunal de la fonction publique a rejeté le recours du requérant comme manifestement irrecevable, en application de l’article 111 du règlement de procédure du Tribunal, applicable à l’époque, mutatis mutandis, au Tribunal de la fonction publique en vertu de l’article 3, paragraphe 4, de la décision 2004/752/CE, Euratom du Conseil, du 2 novembre 2004, instituant le Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (JO L 333, p. 7), pour les motifs suivants :

« 19      Il convient de rappeler que l’existence d’un acte faisant grief au sens de l’article 90, paragraphe 2, et de l’article 91, paragraphe 1, du statut est une condition indispensable de recevabilité de tout recours formé par les fonctionnaires contre les institutions dont ils relèvent (arrêt du Tribunal de première instance du 13 juillet 1993, Moat/Commission, T‑20/92, Rec. p. II‑799, point 39, et ordonnance du président du Tribunal de première instance du 4 février 1999, Peña Abizanda e.a./Commission, T‑196/98 R, RecFP p. I‑A‑5 et II‑15, point 19).

20      Les actes faisant grief à un fonctionnaire sont les actes qui sont susceptibles d’affecter directement la situation juridique de celui-ci (voir arrêt de la Cour du 10 décembre 1969, Grasselli/Commission, 32/68, Rec. p. 505, point 4). Seuls constituent des actes ou des décisions susceptibles de faire l’objet d’un recours en annulation les mesures produisant des effets juridiques obligatoires, de nature à affecter les intérêts du requérant, en modifiant de façon caractérisée sa situation juridique (voir arrêt de la Cour du 14 février 1989, Bossi/Commission, 346/87, Rec. p. 303, point 23 ; ordonnance du Tribunal du 16 mai 2006, Voigt/Commission, F‑55/05, non encore publiée au Recueil, point 27).

21      En l’espèce, le requérant demande l’annulation de la décision de clôturer (« decisione di archiviazione ») la procédure qu’il a introduite pour obtenir les prestations prévues à l’article 73 du statut, qui lui seraient dues à la suite de l’accident dont il a été victime le 10 septembre 2003.

22      Le requérant n’ayant pas répondu à la note du 18 août 2004 qui l’invitait à prendre contact avec un médecin désigné par l’institution, la Commission a réitéré cette demande dans sa note du 7 février 2005 et a indiqué au requérant que, en l’absence de réponse de sa part avant le 8 mai 2005, elle présumerait qu’il ne souhaitait plus poursuivre la procédure de reconnaissance d’accident professionnel et la clôturerait.

23      Le requérant conteste la décision de classement de son dossier figurant, selon lui, dans la note du 7 février 2005.

24      En premier lieu, ainsi qu’il ressort de ses termes mêmes, ladite note du 7 février 2005 invitait le requérant à prendre contact avec le médecin désigné par l’institution et l’informait que son dossier serait classé en l’absence de réaction de sa part avant le 8 mai 2005. L’annonce de cette éventualité ne saurait être regardée en elle-même comme une décision.

25      En deuxième lieu, la décision de classement critiquée ne figure dans aucune autre pièce versée à l’instance.

26      Certes, dès lors que le requérant n’a pas pris contact avec le médecin désigné par l’institution, les termes mêmes de la note du 7 février 2005 laissaient supposer qu’une décision de classement de son dossier serait prise.

27      Cependant, il n’est pas établi qu’une telle décision de classement a été adoptée. D’une part, la note du 7 février 2005 ne suffit pas à démontrer que ladite décision a bien été prise, a fortiori dès le 8 mai 2005. D’autre part, dans sa réponse du 29 juillet 2005 à la réclamation du requérant, la Commission ne lui a ni opposé une décision de classement ni n’en a fait état, mais a, au contraire, assuré celui-ci qu’elle était disposée à poursuivre la procédure de reconnaissance d’accident professionnel et lui a renouvelé son invitation à prendre l’attache du médecin désigné par l’institution. Elle lui indiquait ainsi clairement qu’aucune décision de clôture de ladite procédure n’avait été arrêtée.

28      En troisième lieu, la clôture d’une procédure ne donne lieu à une décision faisant grief que s’il s’analyse en un rejet de la demande par l’institution et non s’il résulte de l’abandon de la procédure par le demandeur. Or, c’est cette seconde hypothèse qui est expressément visée par la note de la Commission du 7 février 2005. En effet, celle-ci y précisait que la procédure serait clôturée au plus tard le 8 mai 2005, le silence du requérant laissant présumer qu’il ne souhaitait plus la poursuivre. Par conséquent, cette note n’annonçait aucune décision susceptible de faire grief à l’intéressé.

29      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que, comme le fait valoir la Commission, la requête n’est pas dirigée contre un acte faisant grief au sens de l’article 90, paragraphe 2, et de l’article 91, paragraphe 1, du statut et qu’elle doit donc être rejetée comme manifestement irrecevable. »

 Sur le pourvoi

1.     Procédure et conclusions des parties

7        Par acte déposé au greffe du Tribunal le 18 juillet 2007, le requérant a formé le présent pourvoi.

8        Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler dans sa totalité l’ordonnance attaquée ;

–        à titre principal, faire droit à ses conclusions formulées en première instance et condamner la Commission aux dépens, y compris ceux relatifs au présent pourvoi ;

–        à titre subsidiaire, renvoyer la présente affaire devant le Tribunal de la fonction publique afin que celui-ci statue une nouvelle fois sur la présente affaire.

9        La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer le pourvoi irrecevable ou dénué de fondement ;

–        condamner le requérant aux dépens, y compris ceux relatifs à la procédure qui s’est déroulée devant le Tribunal de la fonction publique.

2.     En droit

10      Le requérant avance six moyens de pourvoi contre l’ordonnance attaquée, tirés, premièrement, d’une dénaturation et d’une déformation des faits, deuxièmement, d’un défaut absolu de motivation, troisièmement, d’une mauvaise application de la notion d’acte faisant grief, quatrièmement, d’une omission de s’être prononcé sur un point essentiel du litige et d’une violation de l’obligation de clare loqui, cinquièmement, d’une violation de l’adage ei incumbit probatio qui dicit et non qui negat et, sixièmement, de vices de procédure affectant la procédure devant le Tribunal de la fonction publique.

11      Il y a lieu de constater que, par chacun des moyens susmentionnés, à l’exception du sixième moyen, tiré de vices de procédure, le requérant cherche en substance à remettre en cause la conclusion du Tribunal de la fonction publique dans l’ordonnance attaquée quant à l’absence d’acte faisant grief. Il convient donc d’examiner ces cinq moyens ensemble.

 Sur les cinq moyens tirés de l’absence d’acte faisant grief

 Arguments des parties

12      Par le premier moyen, tiré d’une dénaturation et d’une déformation des faits, le requérant reproche au Tribunal de la fonction publique d’avoir procédé à une série de constatations d’ordre factuel qui ne seraient pas établies par les éléments présentés devant lui et qui seraient même contredites, pour certaines d’entre elles, par lesdits éléments. En particulier, le requérant conteste les constatations selon lesquelles, premièrement, le requérant n’a pas répondu à la note du 18 août 2004 (point 22 de l’ordonnance attaquée), deuxièmement, la note du 7 février 2005 ne contenait pas une décision de classement (point 24 de l’ordonnance attaquée), troisièmement, la décision de classement ne figurait dans aucune autre pièce versée à l’instance (point 25 de l’ordonnance attaquée), quatrièmement, les termes mêmes de la note du 7 février 2005 laissaient supposer qu’une décision de classement de son dossier serait prise dès lors que le requérant n’avait pas pris contact avec le médecin désigné par l’institution (point 26 de l’ordonnance attaquée), cinquièmement, il n’est pas établi qu’une telle décision de classement a été adoptée (point 27 de l’ordonnance attaquée) et, sixièmement, il résulte des termes de la réponse à la réclamation du 29 juillet 2005 qu’aucune décision de clôture de ladite procédure n’avait été arrêtée (point 27 de l’ordonnance attaquée).

13      Par le deuxième moyen, tiré d’un défaut absolu de motivation, le requérant reproche, en substance, au Tribunal de la fonction publique de ne pas avoir expliqué de manière adéquate, dans l’ordonnance attaquée, les raisons pour lesquelles il a conclu qu’aucune décision de classement n’avait été adoptée. De plus, le Tribunal de la fonction publique n’aurait pas motivé de manière adéquate sa conclusion, au point 28 de l’ordonnance attaquée, selon laquelle une décision qui résulterait de l’abandon d’une procédure par le demandeur n’est pas un acte faisant grief, ni constaté dans ladite ordonnance, en particulier au point 10 de celle-ci, que le requérant avait été victime d’un accident professionnel.

14      Par le troisième moyen, tiré d’une mauvaise application de la notion d’acte faisant grief, le requérant fait valoir que la note du 7 février 2005 est constitutive d’un acte faisant grief. Selon le requérant, il ressort sans ambiguïté de ladite note que la Commission a décidé de classer sa demande, et cet acte a manifestement affecté sa situation juridique en ce qu’il n’a pas bénéficié des garanties légales prévues.

15      Par le quatrième moyen, le requérant invoque une omission de se prononcer sur un point essentiel du litige et une violation de l’obligation de clare loqui. Il estime qu’il incombait au Tribunal de la fonction publique de se prononcer sur la question de savoir si le requérant avait manifesté son intention de renoncer à la procédure de reconnaissance de l’origine professionnelle de sa maladie.

16      Enfin, dans le cadre de son cinquième moyen, le requérant allègue une violation de l’adage ei incumbit probatio qui dicit et non qui negat. Selon le requérant, le Tribunal de la fonction publique a enfreint ce principe en retenant la thèse avancée par la Commission quant à certaines questions de fait, alors que la position de cette dernière n’est étayée par aucun élément de preuve. En particulier, le Tribunal de la fonction publique aurait conclu à l’absence d’une décision de classement adoptée par la Commission, alors que cette circonstance ne serait pas étayée par les faits de l’espèce. Il aurait également supposé que le requérant avait reçu la note de la Commission du 18 août 2004, alors que cette circonstance ne serait pas établie. De plus, il serait parti de la prémisse erronée selon laquelle la Commission était en droit d’obliger le requérant à prendre contact avec le médecin désigné par celle-ci, sous peine de classement de sa demande.

17      Selon la Commission, les quatre premiers moyens susmentionnés sont irrecevables, car le requérant vise, en substance, à remettre en question les différentes constatations de fait effectuées par le Tribunal de la fonction publique dans l’ordonnance attaquée. Quant au cinquième moyen, il serait entaché d’un manque de clarté, de sorte qu’il est irrecevable. En ce qui concerne la question de savoir si le requérant a reçu la note du 18 août 2004, ce moyen serait également irrecevable pour une raison tenant au fait que le requérant conteste à nouveau les faits retenus par le Tribunal de la fonction publique.

18      La Commission fait valoir, en outre, que les cinq moyens précités doivent être rejetés comme non fondés.

 Appréciation du Tribunal

–       Sur la recevabilité

19      Il convient d’examiner d’abord l’argumentation de la Commission selon laquelle les présents moyens sont irrecevables dans le cadre du pourvoi, dès lors que le requérant remet en cause les faits retenus par le Tribunal de la fonction publique dans l’ordonnance attaquée.

20      Selon une jurisprudence bien établie, le pourvoi ne peut s’appuyer que sur des moyens portant sur la violation de règles de droit, à l’exclusion de toute appréciation des faits. Le Tribunal de la fonction publique est seul compétent, d’une part, pour constater les faits, sauf dans le cas où l’inexactitude matérielle de ses constatations résulterait des pièces du dossier qui lui ont été soumises, et, d’autre part, pour apprécier ces faits. Toutefois, lorsque le Tribunal de la fonction publique a constaté ou apprécié les faits, le Tribunal est compétent pour exercer, en vertu de l’article 225 A CE, un contrôle sur la qualification juridique de ces faits et les conséquences de droit qui en ont été tirées par le Tribunal de la fonction publique (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 27 novembre 2001, Z/Parlement, C‑270/99 P, Rec. p. I‑9197, point 37, et la jurisprudence citée).

21      Dans l’ordonnance attaquée, le Tribunal de la fonction publique a considéré qu’aucune décision de classement n’avait été adoptée dans le cas du requérant, d’une part, parce que la note du 7 février 2005 invitant le requérant à prendre contact avec le médecin désigné par l’institution et l’informant que son dossier serait classé en l’absence de réaction de sa part avant le 8 mai 2005 ne saurait être regardée en elle-même comme une décision (point 24 de l’ordonnance attaquée) et, d’autre part, parce que la décision de classement critiquée ne figurait dans aucune autre pièce versée à l’instance (point 25 de l’ordonnance attaquée), de sorte qu’il n’était pas établi qu’une telle décision de classement avait été adoptée (point 27 de l’ordonnance attaquée). Par ailleurs, le Tribunal de la fonction publique a jugé que, en toute hypothèse, la note du 7 février 2005 n’annonçait pas l’adoption future par la Commission d’une décision faisant grief (point 28 de l’ordonnance attaquée). En effet, ladite note viserait l’hypothèse de l’abandon de la procédure par le requérant et non celle du rejet de sa demande par l’institution (point 28 de l’ordonnance attaquée).

22      Il convient de relever que le raisonnement du Tribunal de la fonction publique, résumé au point précédent, contient non seulement des constatations de fait, mais aussi des qualifications juridiques de ces faits. Or, par les présents moyens, ce sont essentiellement ces qualifications juridiques que le requérant conteste.

23      En effet, le libellé de la note du 7 février 2005 et les termes de la réponse à la réclamation du requérant, en date du 29 juillet 2005, sont des faits que le requérant ne conteste pas en tant que tels dans le cadre de son pourvoi. En revanche, il fait valoir, en substance, par les cinq moyens en cause, que le Tribunal de la fonction publique a mal qualifié ladite note et la réponse à la réclamation et qu’il en a tiré des conséquences injustifiées en concluant que la requête n’était pas dirigée contre un acte faisant grief.

24      Dans ces conditions, il y a lieu de rejeter l’argumentation de la Commission selon laquelle le requérant cherche, par les présents moyens, à remettre en cause les constatations factuelles effectuées par le Tribunal de la fonction publique dans l’ordonnance attaquée.

25      Quant à la prétendue absence de clarté du cinquième moyen, il convient de considérer que le requérant invoque, en substance, une prétendue erreur de droit quant à la question de savoir à quelle partie incombait la charge de la preuve dans le cadre de la procédure devant le Tribunal de la fonction publique. Ce moyen est donc recevable.

26      Il y a donc lieu de rejeter l’argumentation de la Commission relative à la recevabilité des cinq moyens en cause et de les examiner au fond.

–       Sur le fond

27      Il convient de rappeler, tout d’abord, que le rejet du recours du requérant dans l’ordonnance attaquée est fondé, à titre principal, sur la conclusion retenue par le Tribunal de la fonction publique selon laquelle aucune décision de classement n’avait été adoptée par la Commission à l’égard du requérant.

28      En parvenant à cette conclusion quant aux effets juridiques de la note du 7 février 2005, le Tribunal de la fonction publique a jugé, sans commettre une erreur de droit, que le fait pour la Commission d’informer le requérant que, en l’absence de réponse de sa part avant le 8 mai 2005, elle considérerait qu’il ne souhaitait plus poursuivre la procédure de reconnaissance d’accident professionnel et la classerait n’avait pas donné lieu à une décision de classement, que ce soit dans l’immédiat ou après l’écoulement du délai indiqué. Ainsi, le Tribunal de la fonction publique a constaté que la Commission s’était bornée à informer le requérant des conséquences qui pourraient résulter de l’absence de réponse de sa part, et ce non pas automatiquement, mais du fait de l’adoption par la Commission, à une date ultérieure, d’une décision de classement.

29      Le Tribunal de la fonction publique a ensuite constaté, au point 25 de l’ordonnance attaquée, que la décision de classement critiquée ne figurait dans aucune autre pièce versée à l’instance. Au point 27 de ladite ordonnance, il a déduit de cette circonstance, ainsi que des termes de la réponse du 29 juillet 2005 à la réclamation du requérant, qu’il n’était pas établi qu’une telle décision de classement avait été adoptée.

30      Le Tribunal de la fonction publique était en droit de tirer cette conclusion des éléments factuels du dossier qu’il a retenus dans l’ordonnance attaquée. En effet, en l’absence d’un quelconque élément de preuve lui permettant de conclure à l’existence d’une décision de classement et compte tenu de la position exprimée par la Commission dans sa note du 7 février 2005 et dans sa réponse à la réclamation, le Tribunal de la fonction publique a pu conclure à juste titre à l’absence d’une telle décision.

31      Il résulte de ce qui précède que le Tribunal de la fonction publique n’a commis aucune erreur de droit en ce qui concerne la qualification juridique des faits tels qu’il les a établis sur la base des éléments présentés devant lui.

32      Il en résulte également que le Tribunal de la fonction publique a motivé à suffisance de droit sa conclusion quant à l’absence d’une décision de classement. Dès lors, le moyen tiré d’un prétendu défaut de motivation doit être rejeté comme non fondé.

33      Quant au moyen tiré d’une prétendue dénaturation des faits, il appartient au Tribunal d’examiner si le Tribunal de la fonction publique a dénaturé des éléments de preuve, étant entendu qu’une telle dénaturation existe lorsque, sans avoir recours à de nouveaux éléments de preuve, l’appréciation des éléments de preuve existants apparaît manifestement erronée (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 18 janvier 2007, PKK et KNK/Conseil, C‑229/05 P, Rec. p. I‑439, point 37, et la jurisprudence citée).

34      Certes, le requérant propose au Tribunal d’adopter une lecture des éléments de fait en cause, et notamment de la note du 7 février 2005, différente de celle retenue dans l’ordonnance attaquée. Toutefois, il n’a pas établi que le Tribunal de la fonction publique avait dénaturé ou déformé ces éléments par la lecture qu’il en a faite, cette lecture étant parfaitement conciliable avec lesdits éléments. Il y a donc lieu de rejeter le moyen tiré d’une telle dénaturation ou déformation des faits comme non fondé.

35      Par le moyen tiré d’une mauvaise application de la notion d’acte faisant grief, le requérant fait valoir que la note du 7 février 2005 est constitutive d’un acte faisant grief. Or, il résulte de l’analyse qui précède que, dans la mesure où le Tribunal de la fonction publique a jugé que ladite note n’était pas un acte faisant grief, il n’a commis ni une dénaturation des faits ni une erreur de droit dans la qualification juridique de ces faits. Dès lors, le moyen en question doit être rejeté.

36      Quant au moyen tiré d’une prétendue omission de se prononcer sur un point essentiel du litige et d’une violation de l’obligation de clare loqui, il suffit de relever que le Tribunal de la fonction publique, ayant constaté l’absence d’une décision de classement, n’avait pas besoin de prendre position sur la question de savoir si le requérant avait manifesté son intention de renoncer à la procédure de reconnaissance de l’origine professionnelle de sa maladie. En effet, que le requérant ait manifesté une telle volonté ou non, son recours en annulation était irrecevable parce qu’il n’était pas dirigé contre un acte lui faisant grief. Par conséquent, ce moyen doit être rejeté.

37      Il convient de rejeter également le moyen tiré d’une prétendue violation du principe consacré par l’adage ei incumbit probatio qui dicit et non qui negat. En effet, au stade de la procédure devant le Tribunal de la fonction publique, c’était le requérant qui soutenait que la Commission avait adopté une décision de classement alors que cette dernière niait l’existence d’une telle décision. Ainsi, en jugeant qu’il n’était pas établi qu’une telle décision de classement avait été adoptée et que le recours était irrecevable en conséquence, le Tribunal de la fonction publique n’a pas imposé la charge de la preuve à la partie qui niait un fait, mais à la personne qui l’alléguait et il n’a pas commis une erreur de droit à cet égard.

38      Enfin, dans la mesure où le requérant remet en cause la constatation du Tribunal de la fonction publique selon laquelle le requérant n’a pas reçu la note du 18 août 2004, il suffit de constater que cet argument est inopérant dès lors que le raisonnement du Tribunal de la fonction publique dans l’ordonnance attaquée n’est aucunement fondé sur cette constatation. Quant à la prétendue erreur du Tribunal de la fonction publique concernant la possibilité pour la Commission d’obliger le requérant à prendre contact avec le médecin désigné par celle-ci, sous peine de classement de sa demande, cette allégation est également inopérante dès lors que le Tribunal de la fonction publique a conclu, sans commettre une erreur de droit, qu’aucune décision de classement n’avait été adoptée.

 Sur le moyen tiré de vices de procédure affectant la procédure devant le Tribunal de la fonction publique

 Arguments des parties

39      Le requérant reproche au Tribunal de la fonction publique, en substance, d’avoir adopté l’ordonnance attaquée alors qu’une tentative de règlement du litige à l’amiable était en cours. Cette clôture intempestive de la procédure devant le Tribunal de la fonction publique, alors que le litige était en suspens, aurait privé le requérant de la possibilité de se défendre utilement devant cette juridiction. Ainsi, cette procédure serait viciée par une erreur de procédure à ce point grave qu’elle affecterait de manière irrémédiable les droits du requérant et aurait donc pour conséquence une violation des règles substantielles. Enfin, le requérant fait valoir que la tentative de règlement à l’amiable susmentionnée présuppose nécessairement que le Tribunal de la fonction publique ne considérait pas le recours comme dépourvu de tout fondement en droit ou comme irrecevable.

40      Selon la Commission, le présent moyen n’est pas fondé parce que la contestation par le requérant de l’intervention du Tribunal de la fonction publique dans le cadre de la tentative de règlement à l’amiable n’est pas étayée par le moindre raisonnement juridique. En particulier, le requérant n’aurait pas précisé les règles prétendument violées par cette juridiction, laquelle aurait correctement appliqué l’article 111 du règlement de procédure en l’espèce.

 Appréciation du Tribunal

41      Il convient de rappeler, à cet égard, que, conformément à l’article 111 du règlement de procédure, applicable au Tribunal de la fonction publique au moment de l’adoption de l’ordonnance attaquée, lorsqu’un recours est manifestement irrecevable, le Tribunal peut le rejeter sans poursuivre la procédure, par voie d’ordonnance motivée. Une telle ordonnance peut être prise pour autant que les conditions de l’article 111 du règlement de procédure soient réunies. C’est ainsi que la Cour a jugé que le recours à des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 du règlement de procédure n’était pas, en soi, susceptible de faire obstacle à l’adoption d’une ordonnance sur le fondement de l’article 111 du même règlement (arrêt de la Cour du 19 janvier 2006, AIT/Commission, C‑547/03 P, Rec. p. I‑845, point 30).

42      Or, il a été jugé ci-dessus que le Tribunal de la fonction publique a conclu à bon droit qu’aucun acte faisant grief n’avait été adopté en l’espèce, et que le recours en annulation introduit par le requérant était donc manifestement irrecevable. La tentative de règlement à l’amiable n’ayant pu avoir aucune incidence sur l’irrecevabilité du recours constatée par le Tribunal de la fonction publique, elle ne saurait donc remettre en cause la légalité de l’ordonnance attaquée.

43      Il s’ensuit que le Tribunal de la fonction publique était en droit d’adopter l’ordonnance attaquée rejetant le recours comme manifestement irrecevable, sans poursuivre la procédure, nonobstant l’état de la procédure devant lui en ce qui concerne la tentative de règlement à l’amiable du litige. Dès lors, le présent moyen de pourvoi doit être rejeté comme non fondé.

 Sur les dépens

44      Conformément à l’article 148, premier alinéa, du règlement de procédure, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, le Tribunal statue sur les dépens.

45      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 144 de celui‑ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. En l’espèce, la Commission conclut à ce que le requérant soit condamné aux dépens de l’instance, y compris ceux qu’elle a exposés lors de la procédure devant le Tribunal de la fonction publique.

46      Aux termes de l’article 88 dudit règlement, les frais exposés par les institutions dans les litiges entre les Communautés et leurs agents restent à la charge de celles‑ci. Cependant, en vertu de l’article 148, deuxième alinéa, du même règlement, l’article 88 n’est pas applicable au pourvoi formé par un fonctionnaire ou tout autre agent d’une institution contre celle-ci. Le requérant ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de le condamner aux dépens de la présente instance.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (chambre des pourvois)

déclare et arrête :

1)      Le pourvoi est rejeté.

2)      M. Luigi Marcuccio supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission dans le cadre de la présente instance.

Jaeger

Vilaras

Forwood

Martins Ribeiro

 

       Czúcz

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 20 octobre 2008.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       M. Jaeger


* Langue de procédure : l’italien.