Language of document : ECLI:EU:T:2010:527

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

16 décembre 2010 (*)

« Réglementation concernant les frais et indemnités des membres du Parlement européen – Recouvrement des sommes indûment versées »

Dans l’affaire T‑276/07,

Hans-Peter Martin, demeurant à Vienne (Autriche), représenté par Mes É. Boigelot, T. Bontinck et S. Woog, avocats,

partie requérante,

contre

Parlement européen, représenté initialement par MM. H. Krück, D. Moore et C. Karamarcos, puis par MM. Krück, Moore et Mme M. Windisch, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision du secrétaire général du Parlement européen du 10 mai 2007 et, pour autant que de besoin, de la note de débit du directeur général des finances du Parlement du 13 juin 2007, prise en exécution de la décision du 10 mai 2007, ainsi que, le cas échéant, de toute décision d’exécution des actes susmentionnés qui interviendrait en cours de procédure,

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de Mme I. Wiszniewska-Białecka, président, MM. F. Dehousse (rapporteur) et H. Kanninen, juges,

greffier : Mme B. Pastor, greffier adjoint,

vu la procédure écrite et à la suite des audiences du 1er octobre 2008 et du 24 juin 2010,

rend le présent

Arrêt

 Cadre juridique

1        L’article 2 du règlement financier, du 21 décembre 1977, applicable au budget général des Communautés européennes (JO L 356, p. 1, ci-après le « règlement financier de 1977 »), en vigueur au début de la période litigieuse, disposait :

« Les crédits budgétaires doivent être utilisés conformément à des principes d’économie et de bonne gestion financière. »

2        Aux termes de l’article 5 du règlement financier de 1977 :

« L’exercice budgétaire commence le 1er janvier et s’achève le 31 décembre.

Les recettes d’un exercice sont prises en compte au titre de cet exercice sur la base des montants perçus au cours de l’exercice, exception faite des ressources propres du mois de janvier de l’exercice suivant, dont le versement anticipatif peut intervenir aux termes de l’article 10 paragraphe 2 du règlement (CEE, Euratom, CECA) nº 2891/77 du Conseil, du 19 décembre 1977, portant application de la décision, du 21 avril 1970, relative au remplacement des contributions financières des États membres par des ressources propres aux Communautés [(JO L 336, p. 1)].

Les crédits alloués ne peuvent être utilisés que pour couvrir les dépenses régulièrement engagées et payées au titre de l’exercice pour lequel ils ont été accordés, sauf dérogations prévues aux articles 6, 88 et 100, et pour couvrir les dettes qui remontent à des exercices antérieurs et pour lesquelles aucun crédit n’avait été reporté.

Les engagements sont comptabilisés sur la base des engagements contractés jusqu’au 31 décembre.

Les dépenses d’un exercice sont prises en compte au titre de cet exercice sur la base des dépenses dont l’ordonnancement est parvenu au contrôleur financier au plus tard le 31 décembre et dont le paiement a été exécuté par le comptable au plus tard le 15 janvier suivant. »

3        L’article 21, paragraphe 1, du règlement financier de 1977 prévoyait :

« Les crédits sont spécialisés par chapitre et par article. »

4        L’article 6 du règlement (CE, Euratom) n° 1605/2002 du Conseil, du 25 juin 2002, portant règlement financier applicable au budget général des Communautés européennes (JO L 248, p. 1, ci-après le « règlement financier de 2002 »), dispose :

« Les crédits inscrits au budget sont autorisés pour la durée d’un exercice budgétaire qui commence le 1er janvier et s’achève le 31 décembre. »

5        Aux termes de l’article 9, paragraphe 1, du règlement financier de 2002 :

« Les crédits non utilisés à la fin de l’exercice pour lequel ils ont été inscrits sont annulés. »

6        L’article 21 du règlement financier de 2002 prévoit :

« Les crédits sont spécialisés par titres et chapitres ; les chapitres sont subdivisés en articles et postes. »

7        L’article 27, paragraphe 1, du règlement financier de 2002 dispose :

« Les crédits budgétaires sont utilisés conformément au principe de bonne gestion financière, à savoir conformément aux principes d’économie, d’efficience et d’efficacité. »

8        Selon l’article 71 du règlement financier de 2002 :

« 1. La constatation d’une créance est l’acte par lequel l’ordonnateur délégué ou subdélégué :

a)      vérifie l’existence des dettes du débiteur ;

b)      détermine ou vérifie la réalité et le montant de la dette ;

c)      vérifie les conditions d’exigibilité de la dette.

2. Les ressources propres mises à la disposition de la Commission ainsi que toute créance identifiée comme certaine, liquide et exigible doivent être constatées par un ordre de recouvrement donné au comptable, suivi d’une note de débit adressée au débiteur, tous deux établis par l’ordonnateur compétent.

3. Les montants indûment payés sont recouvrés.

4. Les conditions dans lesquelles des intérêts de retard sont dus aux Communautés sont précisées dans les modalités d’exécution. »

9        L’article 73, paragraphe 1, du règlement financier de 2002 dispose :

« Le comptable prend en charge les ordres de recouvrement des créances dûment établis par l’ordonnateur compétent. Il est tenu de faire diligence en vue d’assurer la rentrée des recettes des Communautés et doit veiller à la conservation des droits de celles-ci.

Le comptable procède au recouvrement par compensation et à due concurrence des créances des Communautés à l’égard de tout débiteur lui-même titulaire d’une créance certaine, liquide et exigible à l’égard des Communautés. »

10      Selon l’article 78, paragraphe 3, du règlement (CE, Euratom) n° 2342/2002 de la Commission, du 23 décembre 2002, établissant les modalités d’exécution du [règlement financier de 2002] (JO L 357, p. 1) :

« La note de débit est l’information donnée au débiteur que :

a)       les Communautés ont constaté cette créance ;

b)       le paiement de sa dette envers les Communautés est dû pour une certaine date (ci-après ‘date d’échéance’) ;

c)       à défaut de paiement à la date d’échéance, sa dette porte intérêts au taux visé à l’article 86, sans préjudice des dispositions réglementaires spécifiques applicables ;

d)       dans tous les cas où cela est possible, l’institution procédera au recouvrement par compensation après information du débiteur ;

e)       à défaut de paiement à la date d’échéance, l’institution procède au recouvrement par l’exécution de toute garantie préalable ;

f)       si, à l’issue des étapes qui précèdent, le recouvrement intégral n’a pu être obtenu, l’institution procède au recouvrement par l’exécution forcée du titre obtenu, soit conformément à l’article 72, paragraphe 2, du règlement financier, soit par la voie contentieuse.

La note de débit est envoyée par l’ordonnateur au débiteur, avec copie au comptable. »

11      L’article 80 du règlement n° 2342/2002 dispose :

« 1. Toute constatation d’une créance s’appuie sur les pièces justificatives attestant les droits des Communautés.

2. Avant de constater toute créance, l’ordonnateur compétent procède personnellement à l’examen des pièces justificatives ou vérifie, sous sa responsabilité, que cet examen a été effectué.

[…] »

12       La réglementation concernant les frais et indemnités des députés au Parlement européen (ci-après la « réglementation FID ») a été adoptée, par le bureau du Parlement (ci-après le « bureau »), en vertu de l’article 22 du règlement intérieur du Parlement (JO 1997, L 49, p. 1) ainsi que de l’article 199 CE, de l’article 112 EA et de l’article 25 CA. La version applicable au début de la période litigieuse (ci-après la « réglementation FID 1999 ») a été modifiée à compter du 1er janvier 2001 par la décision du bureau du 6 juillet 2000 (ci-après la « réglementation FID 2001 »). En dépit de différentes modifications, cette réglementation FID 2001 est, pour ce qui concerne la présente espèce, ensuite restée en substance inchangée jusqu’à la fin de la période litigieuse, c’est-à-dire juillet 2004.

13      Selon l’article 13, paragraphe 1, premier alinéa, des réglementations FID 1999 et 2001, « [l]es députés ont droit à une indemnité forfaitaire au taux courant fixé par le bureau pour couvrir les frais résultant de leurs activités parlementaires et non couverts par d’autres indemnités en vertu de la présente réglementation […] ».

14      L’article 14 de la réglementation FID 1999 disposait :

«1. Sous réserve de conformité avec les dispositions des paragraphes 2 et 3, le député a droit à une indemnité (ci‑après dénommée [‘] indemnité de secrétariat [’]) destinée à couvrir les dépenses résultant de l’engagement ou de l’utilisation des services d’un ou de plusieurs assistants […]

2. Tous les paiements au titre de l’indemnité de secrétariat sont directement effectués, sur instruction personnelle du député et sous sa responsabilité, soit à l’assistant, soit à un tiers payant chargé par le député de la gestion de son indemnité de secrétariat. Seuls les paiements suivants effectués par le député pour le compte de son assistant et en sa qualité d’employeur peuvent lui être remboursés sur présentation de documents justificatifs dûment acquittés : sécurité sociale, impôts, contributions pour la pension, frais de voyage, honoraires de tiers payant.

Le Parlement, en payant l’indemnité de secrétariat, en totalité ou partiellement, à une autre personne que le député, ne peut en aucun cas être considéré lui-même comme tiers payant au sens technique donné à ce terme dans certaines législations nationales, sous réserve des dispositions de l’article 14, paragraphe 7.

3. Le député présente au service des indemnités parlementaires une demande d’attribution de l’indemnité de secrétariat signée, attestant qu’un contrat a été dûment conclu, conformément à la législation nationale applicable, entre lui-même et un assistant […] Le député est tenu de respecter les dispositions légales applicables, notamment les dispositions fiscales et, le cas échéant, sociales […]

4. La demande contient en tout cas les indications suivantes :

a)      le nom du député ainsi que le nom, l’adresse, la nationalité, le pays, le lieu et la date de naissance de l’assistant,

b)      la période de paiement de l’indemnité de secrétariat, le(s) montant(s) à payer ainsi que la périodicité de paiement,

c)      le nom et l’adresse de la (des) banque(s) […]

d)      la signature de l’assistant confirmant l’exactitude des informations quant au contrat conclu avec le député et acceptant toutes les modalités figurant dans cette demande.

5. Le député communique au service des indemnités parlementaires les modifications ou changements concernant la demande d’attribution et en informe l’assistant. La prolongation ou le renouvellement de l’indemnité de secrétariat doit cependant faire l’objet d’une nouvelle demande.

[…] »

15      L’article 14, paragraphe 1, de la réglementation FID 2001 est resté en substance inchangé par rapport à celui de la réglementation FID 1999. Seul le renvoi effectué aux paragraphes 2 et 3 du même article est étendu aux paragraphes 4 et 5. En revanche, l’article 14, paragraphe 2, de la réglementation FID 2001 dispose :

« La demande d’indemnisation signée est accompagnée de la copie d’un contrat dûment conclu, conformément à la législation nationale applicable, entre le député et un assistant et contenant obligatoirement les éléments figurant au paragraphe 5, ainsi que, le cas échéant, du contrat dûment conclu entre lui-même et un tiers payant. Elle est déposée auprès du [c]ollège des questeurs et traitée par la [d]irection générale des Finances et du Contrôle financier sous l’autorité des questeurs […] »

16      L’article 14, paragraphes 3 et 4, de la réglementation FID 2001 reprend en substance les termes de l’article 14, paragraphes 4 et 5, de la réglementation FID 1999.

17      L’article 14, paragraphe 5, de la réglementation FID 2001 prévoit :

« Le contrat d’emploi contient obligatoirement les éléments suivants :

–        données permettant d’identifier l’assistant

–        durée du contrat

–        description sommaire des fonctions

–        le(s) lieu(x) de travail

–        régime de travail (plein temps/temps partiel)

–        rémunération (brute)

–        une clause stipulant explicitement que le Parlement européen ne peut pas être considéré comme partie contractante.

La demande doit préciser le régime de sécurité sociale auprès duquel l’assistant est affilié […]

Par ailleurs, le député tient un carnet des fiches de paye récapitulant les salaires versés, les retenues fiscales et sociales (salariales et patronales).

[…] »

18      Aux termes de l’article 14, paragraphe 7, de la réglementation FID 2001 :

« Les paiements au titre de l’indemnité de secrétariat sont effectués directement à l’assistant, sur instruction personnelle du député et sous sa responsabilité.

Dans la limite du montant de l’indemnité de secrétariat, seuls les paiements suivants effectués par le député en sa qualité d’employeur peuvent lui être remboursés sur présentation de l’original de documents justificatifs dûment acquittés : sécurité sociale, impôts, contributions pour la pension, frais de voyage, honoraires de tiers payant.

Sur demande du député et sur présentation d’une copie du contrat conclu avec le tiers payant, les paiements au titre de l’indemnité de secrétariat peuvent être versés à un tiers payant, chargé contractuellement par le député de la gestion administrative totale ou partielle de son indemnité de secrétariat, conformément à la législation applicable.

[…]

Les factures ou notes d’honoraires concernant des travaux de recherche, de documentation ou de secrétariat liés au mandat du député sont remboursées, dans la limite du montant maximum payable au titre de l’article 15, paragraphe 1, à la demande du député et sur présentation de leur original, soit sur son compte bancaire lorsque les factures ou notes d’honoraires ont été acquittées, soit directement sur le compte du bénéficiaire au nom et pour le compte du député. »

19      L’article 14, paragraphe 9, de la réglementation FID 2001 prévoit que le Parlement établit une liste nominative de l’ensemble des assistants accessible au public. 

20      En application de l’article 16, paragraphe 2, des réglementations FID 1999 et 2001, si le secrétaire général acquiert la certitude que des sommes ont été indûment versées au titre de l’indemnité de secrétariat, il donne des instructions en vue du recouvrement de ces sommes auprès du député en cause.

21      Aux termes de l’article 27 des réglementations FID 1999 et 2001 :

« 1. Dès leur prise de fonctions, les députés reçoivent du [s]ecrétaire général une copie de la présente réglementation ; ils en accusent réception par écrit.

2. Un député estimant que cette réglementation a été incorrectement appliquée peut s’adresser par écrit au [s]ecrétaire général. Si aucun accord n’intervient entre le député et le [s]ecrétaire général, la question est renvoyée au [c]ollège des questeurs, qui prend une décision après consultation du [s]ecrétaire général. Le [c]ollège peut également consulter le [p]résident et/ou le [b]ureau.

3. Si le [s]ecrétaire général, en consultation avec le [c]ollège des questeurs, acquiert la certitude que des sommes ont été indûment versées au titre des indemnités prévues par la présente réglementation en faveur des députés du Parlement européen, il donne des instructions en vue du recouvrement de ces sommes auprès du député concerné. »

 Antécédents du litige

22      Le requérant, M. Hans-Peter Martin, est membre du Parlement depuis 1999.

23      Le requérant a fait l’objet d’une enquête ouverte le 9 juillet 2004 par l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) concernant l’indemnité de secrétariat qui lui a été octroyée au cours de la législature allant de juillet 1999 à juillet 2004. L’OLAF a établi son rapport final le 18 septembre 2006 et en a transmis une copie au président du Parlement. Le requérant a été informé à la même date de la conclusion de l’enquête de l’OLAF, à savoir la recommandation au secrétaire général du Parlement (ci-après le « secrétaire général ») de lui réclamer le remboursement de la somme de 192 150,64 euros.

24      Par lettre du 11 décembre 2006, le secrétaire général a fait savoir au requérant que, à la suite des vérifications effectuées par ses services, il avait acquis la conviction de l’existence de diverses irrégularités justifiant un remboursement d’un montant de 264 167,46 euros. Avant d’arrêter sa décision finale, le secrétaire général offrait toutefois au requérant la possibilité de lui communiquer, avant le 15 janvier 2007, toutes observations ou pièces pertinentes et d’organiser une réunion avec le directeur général des finances du Parlement (ci-après le « directeur général des finances »). Il lui indiquait par ailleurs un numéro de compte en banque dans l’hypothèse où le requérant entendait faire un paiement volontaire.

25      Le requérant a rencontré le directeur général des finances, le 13 décembre 2006, en présence d’un autre membre du Parlement, M. B., selon les vœux du requérant. À l’issue de cette réunion, une note a été établie par le directeur général des finances.

26      Une autre réunion s’est tenue le 25 janvier 2007 entre le requérant, le directeur général des finances et un de ses administrateurs. Lors de celle-ci, le requérant a remis à ses interlocuteurs un dossier de pièces destinées à démontrer que les paiements avaient été réellement effectués conformément aux règles applicables issues de la réglementation FID. De nombreuses autres réunions avec le requérant ont eu lieu, dans le cadre de l’enquête effectuée par la direction générale des finances du Parlement (ci-après la « direction générale des finances »).

27      Le 27 février 2007, le requérant a adressé une note au directeur général des finances dans laquelle il endossait la responsabilité de l’erreur commise par son tiers payant concernant deux paiements, l’un relatif à des frais de téléphone et l’autre à l’achat d’ordinateurs. Il demandait, afin de clore la question, de bien vouloir déduire un montant total de 7 168,09 euros de son indemnité de frais généraux.

28      Par lettre du 24 avril 2007, le secrétaire général, se référant à la lettre de son prédécesseur du 11 décembre 2006, a remercié le requérant pour les pièces fournies et lui a indiqué qu’elles avaient été portées à son dossier et également transmises à l’OLAF. Le secrétaire général soulignait que l’OLAF avait conclu que ces documents ne contenaient pas de preuves pouvant affecter l’analyse juridique des faits contenue dans le rapport final ni les conclusions de celui-ci. Le secrétaire général résumait la motivation de l’OLAF et joignait en annexe une copie de deux lettres envoyées par le directeur de l’OLAF. Il exposait ensuite que, après avoir examiné les pièces fournies par le requérant et les conclusions de l’OLAF, il avait acquis la certitude que la somme de 192 150,64 euros avait été indûment versée. Il informait le requérant de son intention d’appliquer la procédure prévue à l’article 27, paragraphe 3, de la réglementation FID, ce qui impliquait la consultation des questeurs. Avant cette consultation, le secrétaire général offrait au requérant de faire valoir ses observations sur les éléments à sa charge en le rencontrant le jour même à Strasbourg.

29      Une rencontre a eu lieu le 24 avril 2007 entre le requérant et le secrétaire général. Le lendemain, ce dernier a consulté les questeurs.

30      Une audition du requérant a eu lieu le 9 mai 2007. Un compte rendu a été établi par les soins du Parlement et transmis au requérant pour approbation. Par ailleurs, lors de cette audition, le requérant a remis au secrétaire général un document daté du 9 mai 2007 intitulé « Sanctions injustifiées envisagées à l’encontre du signataire de la présente lettre » ainsi qu’une lettre manuscrite, également datée du 9 mai 2007, faisant référence à l’article 27, paragraphe 2, de la réglementation FID. Le secrétaire général a accepté de prendre en compte ces deux documents.

31      Le 10 mai 2007, le secrétaire général a adopté une décision déclarant injustifié le versement au requérant d’une somme de 163 381,54 euros au titre de l’indemnité de secrétariat et informant celui-ci qu’il serait procédé à son recouvrement conformément aux dispositions applicables (ci-après la « décision attaquée »). Après l’exposé de la base juridique de la décision attaquée, le secrétaire général rappelle, dans les cinq premiers considérants de celle-ci, le déroulement des faits et de la procédure devant le Parlement depuis le rapport final de l’OLAF du 18 septembre 2006 jusqu’à la lettre qu’il a adressée au requérant le 24 avril 2007.

32      Au sixième considérant de la décision attaquée, le secrétaire général expose, sous a) à d), les motifs qui ont amené le Parlement à se rallier à l’appréciation juridique de l’OLAF.

33      En premier lieu, il ressort du sixième considérant, sous a), de la décision attaquée que les destinataires finals des paiements n’ont pas été indiqués au Parlement. Les pièces fournies par le requérant établiraient que les versements ont été effectués sur le compte en banque d’une personne qui n’était pas assistante, mais chargée de la gestion des contrats d’autres personnes auxquelles les paiements étaient finalement destinés. Selon la décision attaquée, ces personnes étaient soit employées directement par le requérant sur la base d’un contrat de travail soit fournissaient des services sur la base d’un contrat de prestations de services. Or la réglementation FID imposerait de communiquer au Parlement le nom de tous les assistants et, depuis 2001, de lui transmettre une copie du contrat de chaque assistant. Le montant à rembourser à cet égard s’élève à 86 241,71 euros.

34      En deuxième lieu, le sixième considérant, sous b), de la décision attaquée fait grief au requérant de ne pas avoir informé le Parlement de la cessation des contrats de travail de trois assistants en 2004, de sorte que ce dernier aurait continué les paiements de façon injustifiée. Les sommes à rembourser pour ce motif s’élèvent à 40 200 euros.

35      En troisième lieu, le sixième considérant, sous c), de la décision attaquée expose que les fonds inutilisés à la fin de l’année n’ont pas été remboursés au Parlement. Le montant concerné s’élève à 59 813,17 euros et non à 81 414,18 euros comme l’avait déclaré le rapport de l’OLAF. En effet, le tiers payant du requérant a entre-temps remboursé le montant de 21 601,01 euros.

36      En quatrième lieu, le sixième considérant, sous d), de la décision attaquée prévoit que le requérant doit rembourser un montant de 4 409,28 euros au motif que son tiers payant a utilisé une partie des fonds que le Parlement lui a versés pour deux assistants déclarés pour payer d’autres personnes.

37      Au sixième considérant, sous e), la décision attaquée expose qu’un montant de 20 114,53 euros ayant été comptabilisé deux fois, il y a lieu de déduire cette somme du montant total, lequel s’élève donc à 170 549,63 euros. Au sixième considérant, sous f), de la décision attaquée, il est précisé que le requérant ayant remboursé le montant de 7 168,09 euros, le montant total dû est de 163 381,54 euros.

38      Selon le dispositif de la décision attaquée, ce montant de 163 381,54 euros a été indûment versé au requérant et devra être récupéré conformément aux dispositions de l’article 27, paragraphe 3, de la réglementation FID et des articles 71 et 73 du règlement financier de 2002. Le requérant est par ailleurs informé de ce que la décision attaquée prend effet le jour qui suit sa notification et qu’il peut introduire un recours contre celle-ci devant le Tribunal.

39      Le 13 juin 2007, le requérant a également reçu la note de débit établie le même jour par le directeur général des finances le mettant en demeure de payer le montant réclamé.

40      Par lettre du 12 septembre 2007, parvenue au requérant le 24 septembre 2007, le secrétaire général a informé ce dernier qu’il avait donné instruction à ses services de retenir 50 % de son allocation générale et 50 % de son allocation journalière jusqu’à l’extinction de la dette litigieuse, y compris les intérêts.

41      Par lettre du 21 septembre 2007, parvenue au requérant le 25 septembre suivant, le service comptable du Parlement a notifié à ce dernier les modalités de la retenue et défini le montant des intérêts dus.

 Procédure et conclusions des parties

42      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 23 juillet 2007, le requérant a introduit le présent recours.

43      Par courrier du 13 juin 2008, le Parlement a, en réponse à la demande du Tribunal du 5 juin 2008, produit toutes les versions nécessaires de la réglementation FID et la communication aux questeurs n° 41/2000 du 20 novembre 2000.

44      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors d’une première audience qui s’est tenue le 1er octobre 2008.

45      Au cours de celle-ci, le requérant a déposé, avec l’autorisation du Tribunal et le Parlement entendu, un résumé du rapport n° 06/62, du 9 janvier 2008, « Audit interne du Parlement sur les indemnités de secrétariat », dont il avait pris connaissance dans les locaux du Parlement le 25 février 2008. Le requérant a demandé au Tribunal le report de l’audience afin de permettre la production par le Parlement dudit rapport. Le Tribunal a accédé à la demande du requérant et a invité le Parlement à produire une copie de ce rapport dans un délai de deux semaines, avec, le cas échéant, ses observations sur l’éventuelle confidentialité de ce document.

46      Le Parlement a déféré à cette demande par courrier du 15 octobre 2008. Dans ce cadre, le Parlement, invoquant l’article 67, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, a demandé au greffe de ne pas communiquer le rapport n° 06/62 au requérant à ce stade de la procédure. Le Parlement a souligné que ce document confidentiel, consulté sur place par le requérant le 25 février 2008, n’était pas pertinent pour la solution du litige en l’espèce.

47      Par courrier du 15 avril 2010, les parties ont été informées que, après vérification et à la suite de la demande du Parlement du 15 octobre 2008, le Tribunal avait considéré que le rapport n° 06/62 n’était pas pertinent pour la solution du présent litige. En conséquence, et compte tenu des circonstances de l’espèce, le Tribunal a décidé de ne pas verser ce document au dossier.

48      À la suite du renouvellement partiel du Tribunal, et eu égard à l’article 33, paragraphe 2, du règlement de procédure, une nouvelle audience a été convoquée et s’est tenue le 24 juin 2010.

49      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        pour autant que de besoin, annuler la note de débit du 13 juin 2007 ;

–        pour autant que de besoin et le cas échéant, annuler toute décision d’exécution des actes susmentionnés qui interviendrait en cours de procédure ;

–        condamner le Parlement aux dépens.

50      Le requérant demande également au Tribunal, en application de l’article 68, paragraphe 1, du règlement de procédure, de citer à comparaître comme témoins M. V., directeur général des finances du Parlement, et M. S., de la direction générale des finances du Parlement.

51      Dans sa réplique, le requérant conclut par ailleurs à l’annulation de la décision du secrétaire général du Parlement du 12 septembre 2007 et de la décision du comptable délégué du Parlement du 21 septembre 2007.

52      Le Parlement conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

 Sur la recevabilité des conclusions en annulation de la note de débit du 13 juin 2007 et de toute autre décision d’exécution

 Arguments des parties

53      Dans son mémoire en défense, le Parlement invite le Tribunal à rejeter comme irrecevables les conclusions en annulation, pour autant que de besoin, de la note de débit du 13 juin 2007 et de toute décision d’exécution de la décision attaquée et de ladite note.

54      S’agissant de la note de débit du 13 juin 2007, elle remplirait les conditions prescrites par le règlement financier et ne ferait qu’informer le requérant de la constatation de la créance. Cette note de débit fixerait le délai pour le paiement mais ne se prononcerait pas sur la possibilité de recouvrement par compensation. Le Parlement signale que la requête ne contient aucune argumentation juridique mettant en cause la légalité de ladite note de débit.

55      Quant aux décisions d’exécution à intervenir, leur caractère futur au jour du dépôt du recours empêcherait le requérant d’avoir un intérêt né et actuel à leur annulation. Elles ne pourraient pas être produites dans un délai raisonnable puisqu’elles n’existeraient pas.

56      Dans sa duplique, le Parlement invite à rejeter comme manifestement irrecevables les nouvelles demandes introduites dans la réplique et visant à l’annulation de la décision du secrétaire général du 12 septembre 2007 et de la décision du comptable délégué du 21 septembre 2007.

57      Le requérant fait valoir que, si la décision attaquée était annulée, toutes les autres décisions en rapport avec elle deviendraient caduques, dont la note de débit du 13 juin 2007. Il ne s’agirait pas de décisions inexistantes, puisqu’elles auraient été adoptées entre-temps, telles la lettre du 12 septembre 2007 du secrétaire général informant le requérant de la retenue de 50 % de son allocation générale et de 50 % de son allocation journalière jusqu’à l’extinction de la dette litigieuse et la lettre du service comptable notifiant au requérant les modalités de la retenue et définissant le montant des intérêts dus. À toutes fins utiles, le requérant en sollicite l’annulation dans sa réplique. Il estime que, dans le cadre d’une bonne administration de la justice, il convient de joindre la contestation de ces décisions au présent litige.

 Appréciation du Tribunal

58      En premier lieu, s’agissant des conclusions en annulation visant la note de débit du 13 juin 2007, il convient de rappeler que l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure prévoit que la requête doit contenir un exposé sommaire des moyens invoqués. Dès lors, elle doit expliciter les moyens sur lesquels le recours est fondé et elle ne peut se limiter à la seule énonciation abstraite de ceux-ci (arrêts du Tribunal du 18 novembre 1992, Rendo e.a./Commission, T‑16/91, Rec. p. II‑2417, point 130, et du 28 mars 2000, T. Port/Commission, T‑251/97, Rec. p. II‑1775, point 90). De plus, l’exposé des moyens, même sommaire, doit être suffisamment clair et précis pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant, sans autres informations à l’appui. La sécurité juridique et une bonne administration de la justice exigent, pour qu’un recours ou, plus spécifiquement, un moyen du recours soient recevables, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels ceux-ci se fondent ressortent de façon cohérente et compréhensible du texte même de la requête (voir arrêt du Tribunal du 12 décembre 2007, Italie/Commission, T‑308/05, Rec. p. II‑5089, points 71 et 72, et la jurisprudence citée).

59      Or, la requête ne contient aucun moyen ni argument relatif spécifiquement à la note de débit en cause. Elle n’énonce pas davantage que les moyens développés s’appliquent à cet acte, lequel est attaqué « pour autant que de besoin ».

60      Le recours n’est dès lors pas recevable en ce qu’il vise la note de débit du 13 juin 2007.

61      En second lieu, dans le cadre de l’examen de la recevabilité du présent recours contre toute décision d’exécution de la décision attaquée et de la note de débit du 13 juin 2007, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, ne constituent des actes ou des décisions susceptibles de faire l’objet d’un recours en annulation, au sens de l’article 230 CE, que les mesures produisant des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts des requérants en modifiant de façon caractérisée leur situation juridique. Par ailleurs, un recours en annulation intenté par une personne physique ou morale n’est recevable que dans la mesure où le requérant a un intérêt à voir annuler l’acte attaqué. Cet intérêt doit être né et actuel et s’apprécie au jour où le recours est formé (voir arrêt du Tribunal du 20 septembre 2007, Salvat père & fils e.a./Commission, T‑136/05, Rec. p. II‑4063, point 34, et la jurisprudence citée).

62      Il en résulte que, n’ayant pas d’intérêt né et actuel à agir contre les décisions d’exécution de la décision attaquée et de la note de débit du 13 juin 2007 qui n’étaient pas adoptées lors de l’introduction de son recours, le requérant n’était pas recevable à les attaquer.

63      Il y a donc lieu de rejeter comme irrecevables les conclusions dirigées contre toutes les décisions d’exécution de la décision attaquée et de la note de débit du 13 juin 2007 non adoptées lors de l’introduction du recours.

64      Par ailleurs, les conclusions du requérant dirigées pour la première fois au stade de la réplique contre la décision du secrétaire général du 12 septembre 2007 et la décision du comptable délégué du 21 septembre 2007 doivent également être déclarées irrecevables.

65      Il convient, en effet, de rappeler que, aux termes de l’article 44, paragraphe 1, du règlement de procédure, la partie requérante a l’obligation de définir l’objet du litige et de présenter ses conclusions dans l’acte introductif d’instance. Si l’article 48, paragraphe 2, du règlement susmentionné permet, dans certaines circonstances, la production de moyens nouveaux en cours d’instance, cette disposition ne peut, en aucun cas, être interprétée comme autorisant la partie requérante à saisir le Tribunal de conclusions nouvelles et à modifier ainsi l’objet du litige (voir arrêt du Tribunal du 12 juillet 2001, Banatrading/Conseil, T‑3/99, Rec. p. II‑2123, point 28, et la jurisprudence citée).

66      En tout état de cause, en ce qui concerne les effets d’une éventuelle annulation de la décision attaquée sur les décisions visées ci-dessus, il découle de l’article 266 TFUE qu’il appartient à l’institution concernée de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt.

67      Le recours n’est dès lors recevable qu’en ce qu’il vise à l’annulation de la décision attaquée.

 Sur le fond

68      Le requérant invoque quatre moyens au soutien de ses conclusions en annulation de la décision attaquée. Le premier est tiré d’une application erronée de la réglementation FID, le deuxième d’une erreur d’appréciation des pièces justificatives, le troisième d’une violation du règlement financier de 2002 ainsi que des principes de proportionnalité et de non-discrimination et le quatrième d’une violation des principes du contradictoire et du respect des droits de la défense.

 Sur le premier moyen, tiré d’une application erronée de la réglementation FID

–       Arguments des parties

69      À titre liminaire, le requérant indique que, pendant la période visée, à savoir celle allant de 1999 à 2004, la réglementation FID a été modifiée à plusieurs reprises, donnant lieu à d’importantes difficultés d’interprétation. Deux textes se seraient chevauchés sur la très courte période comprise entre 1999 et 2001. Or, le doute devrait profiter au requérant, qui doit être présumé de bonne foi.

70      Le requérant affirme que, n’ayant pas de formation particulière dans les questions administratives, il s’en est remis à des tiers payants connus pour leur professionnalisme. À supposer que des reproches puissent lui être faits, il aurait agi dans le cadre d’une pratique constante ou d’un accord verbal d’un responsable du bureau de paiement ou encore par ignorance, la gestion n’étant pas effectuée par lui-même. En toute hypothèse, dès lors que le bureau de paiement autorisait le versement de tel ou tel montant au profit du tiers payant, dans des conditions ne correspondant pas nécessairement à celles, particulièrement strictes et souvent inapplicables, de la réglementation FID, rien ne saurait être reproché au requérant.

71      Le requérant fait valoir qu’il a réagi très rapidement à la lettre du 11 décembre 2006 du secrétaire général l’informant des griefs retenus contre lui et qu’il a présenté l’ensemble des documents au directeur général des finances et au directeur du bureau de paiement du Parlement. De leurs investigations il serait ressorti que les indemnités de secrétariat avaient été dûment dépensées, à l’exception de deux postes visant pour l’un l’achat d’ordinateurs (d’un montant de 6 968,09 euros) et, pour l’autre, deux notes téléphoniques (d’un montant de 200 euros), sommes remboursées depuis par le requérant. Ces deux personnes auraient, du reste, établi un rapport, qui n’aurait jamais été finalisé sur instructions venues de leurs supérieurs. La procédure ouverte par la suite serait dès lors irrégulière.

72      L’article 27, paragraphe 3, de la réglementation FID prévoirait le recouvrement des sommes indûment versées, ce qui signifierait des sommes dont le versement n’est pas fondé. Ce qui importerait à cet égard serait l’utilisation des sommes en cause et non la manière dont elles ont été demandées. Le Tribunal aurait conforté cette thèse dans son arrêt du 22 décembre 2005, Gorostiaga Atxalandabaso/Parlement (T‑146/04, Rec. p. II‑5989, ci-après l’« arrêt Gorostiaga », point 157), en affirmant que tout montant dont l’utilisation conforme à la réglementation FID n’est pas démontrée par des pièces doit être considéré comme indûment versé. Le Tribunal aurait également posé comme règle que les pièces justificatives doivent fournir tous les éléments nécessaires à la réalisation d’un contrôle a posteriori et démontrer l’extinction des obligations du parlementaire au regard des personnes qui l’assistent. Dans le cas d’espèce, il ne serait pas contesté que tous les destinataires des sommes litigieuses ont effectivement reçu la totalité des sommes dont ils étaient créanciers, que le requérant n’a conservé pour lui aucun montant destiné au paiement de ses assistants et qu’il a fourni toutes les réponses aux questions qui lui ont été posées en produisant un ensemble de pièces justificatives.

73      En conséquence, le requérant allègue que, en le poursuivant au titre de l’article 27, paragraphe 3, de la réglementation FID, alors même qu’il a réglé spontanément les deux seuls points problématiques et qu’il ne subsiste rien d’autre que des critiques dans la manière d’introduire les demandes ou d’effectuer les paiements, le Parlement fait une application erronée des dispositions applicables.

74      À titre superfétatoire, le requérant insiste sur le fait qu’il existait, à l’époque, des pratiques communément admises, appliquées par l’administration elle-même et par la grande majorité des membres du Parlement. Il ressortirait du rapport final de l’OLAF que des indemnités étaient versées sans que soient nécessairement respectées les procédures prévues, notamment dans un but de simplification. Dans la pratique, il serait parfois difficile de se conformer à des exigences trop rigides et bureaucratiques, telles que l’arrêt total des paiements au jour où le contrat prend fin. En tout état de cause, la responsabilité de l’existence de telles pratiques « facilitatrices » n’incomberait pas au requérant mais au Parlement.

75      Le requérant s’appuie encore sur le rapport annuel de la Cour des comptes des Communautés européennes relatif à l’année 2006 pour corroborer sa thèse selon laquelle les montants versés aux membres du Parlement au titre de l’indemnité de secrétariat peuvent être ultérieurement étayés par des pièces justificatives afin d’attester que ces membres ont réellement utilisé les services d’un ou plusieurs assistants. Si le requérant admet qu’il a pu commettre des manquements sur le plan des conditions de forme, au final toutes les sommes auraient été justifiées. Or, la procédure de recouvrement ne devrait être engagée que pour les montants non justifiés.

76      Le Parlement conteste l’argumentation du requérant.

–       Appréciation du Tribunal

77      À titre liminaire, il convient de rappeler les origines de la réglementation FID. Dans les années 90, la Cour des comptes a mis en évidence certains abus en ce qui concerne les frais et indemnités du Parlement, notamment s’agissant des assistants parlementaires. Elle a recommandé d’établir « un niveau raisonnable de contrôle et de transparence, afin de s’assurer que les fonds versés sont utilisés conformément à leur objet réglementaire » [voir le rapport spécial 10/98 de la Cour des comptes relatif aux frais et indemnités du Parlement (JO C 243, p. 1), paragraphe 1.43]. En 1998, dans ses travaux sur le statut de ses membres, le Parlement a insisté sur « la nécessité de garantir une transparence maximale [souligné dans le texte], en sorte que toutes les nouvelles dispositions soient aussi claires que possible et de façon à réduire à un minimum tout avantage caché » [Rapport sur le projet de statut des députés au Parlement, du 18 novembre 1998, approuvé par la résolution A4-0426/98 du Parlement, du 3 décembre 1998 (JO C 398, p. 24)]. La résolution du Parlement du 3 décembre 1998 sur cette réforme la lie expressément à « la transparence préconisée par le nouveau traité d’Amsterdam […], notamment, dans le cas du Parlement […], lorsque les questions débattues se réfèrent aux droits et obligations de ses membres » (considérant E). Dans ce contexte, il a été décidé d’organiser un système de versement de l’indemnité de secrétariat aux membres du Parlement sur la base de déclarations préalables.

78      Certes, la réglementation FID a été modifiée à certains égards au cours de la période litigieuse, la réglementation FID 1999 applicable au début de cette période ayant été remplacée à compter du 1er janvier 2001 par la réglementation FID 2001. Cette dernière a ensuite été maintenue en substance pendant le reste de la période litigieuse.

79      Toutefois, il n’en reste pas moins que, en application de l’article 14 des réglementations FID 1999 et 2001, les membres du Parlement devaient présenter une demande d’attribution de l’indemnité de secrétariat, demande qui devait être signée par leurs soins et contenir, notamment, le nom, l’adresse, la nationalité, le pays, le lieu et la date de naissance de l’assistant ainsi que comporter la signature de ce dernier confirmant l’exactitude de ces informations (article 14, paragraphes 3 et 4, de la réglementation FID 1999 et article 14, paragraphes 2 et 3, de la réglementation FID 2001).

80       De surcroît, si le membre du Parlement devait à l’origine seulement attester qu’un contrat avait été dûment conclu entre lui-même et son assistant (article 14, paragraphe 3, de la réglementation FID 1999), la réglementation FID l’a ensuite obligé à accompagner sa demande d’une copie de ce contrat et a précisé les éléments que devait contenir ce dernier (article 14, paragraphes 2 et 5, de la réglementation FID 2001).

81      Enfin, dans les deux versions de la réglementation FID, le membre du Parlement doit communiquer tout changement intervenu concernant sa demande d’attribution de l’indemnité et il est mentionné que la prolongation ou le renouvellement de l’indemnité en cause doit faire l’objet d’une nouvelle demande (article 14, paragraphe 5, de la réglementation FID 1999 et article 14, paragraphe 4, de la réglementation FID 2001).

82      De toute évidence, le Parlement a attaché une grande importance à ces dispositions, qui s’inscrivent dans un souci de transparence et de lutte contre la fraude. En effet, dès son entrée en fonction, chaque membre du Parlement reçoit une copie de la réglementation FID. Il doit même formellement en accuser réception par écrit (article 27, paragraphe 1, des réglementations FID 1999 et 2001). Pour garantir une prise de connaissance effective de ces dispositions, le Parlement exige que cet accusé de réception soit signé par le parlementaire lui-même. Cette signature ne peut être déléguée. Cela indique sans la moindre équivoque la volonté du Parlement d’avoir la certitude que chaque membre prenne effectivement connaissance de la réglementation en cause.

83      Le caractère contraignant de ces obligations est encore renforcé par la demande d’attribution de l’indemnité de secrétariat que chaque membre du Parlement doit signer pour chaque assistant. La demande reprend l’obligation d’informer le Parlement de tout changement intervenu. Elle doit être contresignée par l’assistant concerné. Enfin et surtout, le membre du Parlement prend l’engagement formel de payer l’indemnité de secrétariat à cet assistant, nommément désigné, dès le début de ses activités (point 2, page 2, de la demande d’attribution).

84      L’importance de la désignation préalable des assistants parlementaires ressort encore du fait que le Parlement a rendu plus strictes ces conditions au fil des modifications intervenues dans la réglementation FID. Enfin, toujours dans un souci de transparence, en imposant l’accessibilité au public de la liste des assistants parlementaires déclarés auprès du Parlement, en application de l’article 14, paragraphe 9, de la réglementation FID 2001, le Parlement a renforcé le caractère substantiel des formalités de déclaration des assistants parlementaires auprès de son administration.

85      L’ensemble de ces éléments confère un caractère substantiel aux conditions posées par l’article 14 de la réglementation FID pour l’éligibilité à l’indemnité de secrétariat, notamment quant aux indications que doit contenir la demande d’attribution faite par le membre du Parlement sur le ou les assistants qu’il emploie.

86      Par ailleurs, le règlement financier, dans les différentes versions applicables, interdit clairement le report des crédits budgétaires d’une année sur l’autre. Il impose leur utilisation conformément au principe de bonne gestion financière. Enfin, l’article 71 du règlement financier de 2002, auquel renvoie la décision attaquée, dispose que les montants indûment payés doivent être recouvrés.

87      Or, il ressort, en premier lieu, du sixième considérant, sous a), de la décision attaquée que certains destinataires finals des paiements n’étaient pas déclarés au Parlement selon la procédure prévue. Cette affirmation est corroborée par le rapport final de l’OLAF, notamment aux points 1.4.1, 1.5.1, 1.6.1 à 1.6.3, 1.9 et 1.12. Elle n’est du reste pas contestée par le requérant, ainsi qu’il l’a expressément déclaré à l’audience.

88      En deuxième lieu, aux termes du sixième considérant, sous b), de la décision attaquée, le Parlement n’a pas reçu notification de la résiliation de certains contrats. Cette affirmation est corroborée par le rapport final de l’OLAF, notamment aux points 1.8.1 et 1.8.2. Elle n’est pas non plus contestée par le requérant, suivant ses déclarations expresses à l’audience.

89      En troisième lieu, au sixième considérant, sous c), de la décision attaquée, le Parlement reproche au requérant de ne pas avoir remboursé les fonds inutilisés en fin d’année. Cette affirmation est corroborée par le rapport final de l’OLAF, notamment aux points 1.3.1, 1.4.2 et 1.7. Elle n’est pas non plus contestée en tant que telle par le requérant.

90      En quatrième et dernier lieu, il résulte du sixième considérant, sous d), de la décision attaquée que des montants versés pour certains assistants ont été utilisés pour rémunérer d’autres personnes. Le requérant l’a également admis à l’audience. Les montants visés sont explicités aux points 1.10 et 1.11 du rapport final de l’OLAF.

91      Le requérant a donc clairement violé la réglementation FID, d’une part, en utilisant les montants perçus pour des assistants dûment déclarés auprès du Parlement pour rémunérer des personnes ne l’étant pas et, d’autre part, en n’informant pas le Parlement des modifications intervenues concernant certaines de ses demandes. Le requérant a, en outre, reporté à l’exercice suivant divers montants perçus et non dépensés, en violation du règlement financier et des différentes communications adressées tous les ans aux membres du Parlement par les questeurs en vue d’attirer leur attention sur l’interdiction de report à l’année suivante des crédits budgétaires afférents à ladite indemnité (communications n° 25/99 du 28 octobre 1999, n° 32/00 du 5 octobre 2000, n° 30/01 du 8 octobre 2001, n° 31/02 du 30 octobre 2002, n° 43/03 du 22 octobre 2003 et n° 42/04 du 27 octobre 2004). Le requérant a d’ailleurs reconnu à l’audience la violation de ces obligations.

92      Dès lors que, dans certains cas et pour certaines personnes, les conditions fixées par la réglementation FID pour l’attribution de l’indemnité de secrétariat n’étaient pas remplies, le requérant ne saurait faire valoir un droit inconditionnel à utiliser les fonds perçus dans ce cadre, au cours de chacun des exercices visés. L’article 14, paragraphe 1, des réglementations FID 1999 et 2001 dispose en effet que c’est sous réserve du respect des paragraphes suivants que le membre du Parlement a droit à l’indemnité de secrétariat. En conséquence, dès lors que le requérant a perçu des montants pour des dépenses non éligibles au titre de l’indemnité de secrétariat, ces montants ont été indûment versés.

93      Aucun des arguments avancés par le requérant ne saurait remettre en cause cette conclusion.

94      En premier lieu, quant à la prétendue complexité de la réglementation applicable, les questeurs ont adressé plusieurs communications aux membres du Parlement afin de leur rappeler leurs obligations, notamment après l’adoption de nouvelles dispositions. En particulier, le Parlement a produit, à la demande du Tribunal, la communication n° 41/2000 du 20 novembre 2000 et ses annexes. À l’audience, le requérant a expressément reconnu avoir reçu ces documents, même s’il a déclaré ne pas en avoir pris connaissance et les avoir transmis à son tiers payant. Sur la première page de la communication n° 41/2000, il est expressément « rappelé aux membres que le nouveau libellé de l’article 14 [de la réglementation FID] entrera en vigueur le 1er janvier 2001 » et que « ceci implique en premier lieu que les demandes de paiement introduites à partir de cette date devront être entièrement conformes à la nouvelle réglementation et être accompagnées, entre autres, d’une copie du(des) contrat(s) conclu(s) par le député, mentionnant les données minimales requises par la nouvelle réglementation ». Divers documents sont joints à ladite communication n° 41/2000, dont le nouveau libellé de l’article 14 de la réglementation FID et « un guide pratique visant à aider les membres à se conformer aux nouvelles dispositions et à introduire les demandes de paiement ». Ce guide pratique contient, notamment, une brève explication sur la manière dont les membres du Parlement doivent remplir leurs demandes et les indications que celles-ci doivent contenir ainsi que deux encadrés récapitulant en gras les documents à joindre aux demandes lorsque le membre assume personnellement la gestion administrative, pour l’un, ou lorsqu’il confie la gestion administrative à un tiers payant, pour l’autre. Le Parlement s’est donc attaché à expliquer clairement aux membres les changements intervenus dans la réglementation FID 2001 et à les aider dans leurs démarches pour demander à bénéficier de l’indemnité de secrétariat.

95      En tout état de cause, si la réglementation FID 2001 a certes renforcé les conditions d’obtention de l’indemnité de secrétariat, notamment en exigeant la production du contrat conclu entre le membre du Parlement et l’assistant, les irrégularités constatées en l’espèce se situent toutefois au niveau d’exigences plus élémentaires, dont la complexité reste à démontrer. Ces exigences, essentielles pour permettre au Parlement d’assurer un contrôle sur le versement de l’indemnité en cause, figuraient de surcroît déjà dans la réglementation FID 1999, telles que l’indication du nom et des coordonnées de l’assistant, la notification de toute modification intervenue dans les relations avec celui-ci et le respect du caractère annuel de l’indemnité de secrétariat (voir points 79, 82 et 87 ci-dessus).

96      En deuxième lieu, s’il est vrai que le requérant a pu de bonne foi faire appel aux services d’un tiers payant, cela ne saurait le dispenser du respect des obligations que lui impose la réglementation applicable. Il ressort clairement des réglementations FID 1999 et 2001, notamment de leur article 14, que l’intervention d’un tiers payant n’exonère pas le membre du Parlement, bénéficiaire de l’indemnité de secrétariat, de sa responsabilité vis-à-vis de cette institution. La demande d’attribution de l’indemnité de secrétariat est signée par le membre, qui doit conclure le contrat de travail avec l’assistant et communiquer les changements intervenus dans ce contrat.

97      En troisième lieu, contrairement à ce que fait valoir le requérant, aucune pratique ne saurait justifier une violation de la réglementation applicable. En effet, nul ne peut invoquer à son profit une illégalité commise en faveur d’autrui (arrêt du Tribunal du 18 juin 2008, Hoechst/Commission, T‑410/03, Rec. p. II‑881, point 118).

98      En tout état de cause, le requérant ne démontre pas l’existence de pratiques générales de non-respect des conditions prévues par la réglementation FID. Pour étayer ses affirmations, le requérant invoque plusieurs documents non pertinents, car concernant une période postérieure aux faits litigieux, tel le rapport de la Cour des comptes pour l’exercice de l’année 2006 ou la communication aux questeurs du 25 octobre 2007. Le requérant renvoie par ailleurs aux déclarations de M. H. figurant dans le rapport final de l’OLAF, qui établiraient la pratique d’instructions orales données par les membres du Parlement et d’accords verbaux entre ceux-ci et le Parlement. Toutefois, il convient de souligner que l’auteur de ces déclarations conteste formellement dans celles-ci l’existence d’un accord verbal avec le requérant sur la résiliation des contrats, en ajoutant que « cela ne peut se faire oralement ». En outre, le souci de simplification administrative dont fait état l’auteur desdites déclarations se rapporte à la manière d’effectuer certains paiements à une assistante du requérant, conformément à une demande d’octroi d’indemnité dûment enregistrée. D’une part, cette manière de procéder n’établit pas une pratique générale dans la mesure où elle concerne le requérant et, d’autre part, elle ne prouve pas l’existence de pratiques de non-respect des conditions de base de la réglementation FID, telles que la déclaration de l’identité et des coordonnées de l’assistant avec lequel le membre du Parlement a conclu un contrat ainsi que la notification de toute modification dans leurs rapports contractuels. Enfin, le rappel tous les ans aux membres du Parlement par les questeurs de l’interdiction de report des crédits va à l’encontre de l’existence d’une pratique courante admettant un tel report.

99      En quatrième lieu, contrairement à ce qu’allègue le requérant, l’arrêt Gorostiaga, point 72 supra, ne corrobore pas sa thèse visant à permettre la justification a posteriori de tout montant perçu au titre de l’indemnité de secrétariat en violation des dispositions de la réglementation régissant notamment la demande d’attribution de celle-ci, la notification de tout changement intervenu et le caractère annuel de l’indemnité en cause.

100    En effet, il ressort du point 157 de l’arrêt Gorostiaga, point 72 supra, que tout montant dont l’utilisation conforme à la réglementation FID n’est pas démontrée par des pièces doit être considéré comme indûment versé.

101    Or, en l’espèce, comme l’a admis le requérant, celui-ci a fait, dans sa demande, certaines déclarations sur la foi desquelles, comme la réglementation le prévoit, des crédits lui ont été accordés et des sommes ont été versées à son tiers payant par le Parlement pour payer les personnes déclarées. Toutefois, les montants versés ont ensuite été utilisés par le requérant, à l’insu du Parlement, pour rémunérer des personnes non déclarées ou dont les contrats avaient expiré et ne remplissant donc pas les conditions pour percevoir l’indemnité de secrétariat, ou conservés en violation du principe d’annualité. En conséquence, les montants versés n’étant pas utilisés conformément à la réglementation FID, ils doivent être considérés comme indûment versés.

102    Il en résulte que, dans le cas d’espèce, le Parlement n’a pas méconnu la réglementation FID en estimant que des sommes avaient été indûment versées au requérant au titre de l’indemnité de secrétariat dans la mesure où les conditions fixées pour en obtenir l’attribution n’étaient pas réunies dans certains cas et pour certaines personnes et qu’aucun droit à son versement n’était donc né en ce qui les concerne, de sorte que le versement n’était pas fondé. Le premier moyen doit donc être rejeté.

 Sur le deuxième moyen, tiré d’une erreur d’appréciation de la pertinence des pièces justificatives fournies par le requérant

–       Arguments des parties

103    Le requérant allègue qu’il a présenté un grand nombre de pièces justificatives au directeur général des finances visant à démontrer que les versements opérés par le Parlement n’étaient pas indus. Sauf à commettre une erreur d’appréciation, ces pièces ne sauraient donc être rejetées au motif qu’elles ne sont pas de nature à justifier le respect de certaines formes. Le refus du secrétaire général de les prendre en compte serait donc entaché d’erreurs et d’irrégularités justifiant en soi l’annulation de la décision attaquée. Le requérant invoque, à cet égard, à nouveau les principes dégagés dans l’arrêt Gorostiaga, point 72 supra, et en particulier aux points 157, 162 et 163 dudit arrêt.

104    Le requérant commente ensuite différents points du rapport final de l’OLAF. S’agissant des paragraphes 1.3 et 1.4.2 de ce rapport final, il avance que, si les formalités requises avaient été suivies, les sommes visées auraient été restituées au Parlement à la fin de l’année et que ce dernier les aurait ensuite incluses dans le budget de l’année suivante, ce qui, sur le plan financier, serait totalement sans effet et sans conséquence dommageable. De manière générale, si les formalités avaient été respectées, les paiements seraient intervenus de la même manière et pour les mêmes montants. Le caractère effectif des paiements serait justifié par les pièces fournies et le reproche adressé au requérant ne tiendrait pas compte de la réalité pratique. Le requérant aurait informé verbalement le bureau de paiement du Parlement de la fin des contrats litigieux, suivant la pratique en cours à l’époque. Lors de l’examen des différentes pièces, le directeur général des finances aurait admis les objections du requérant et reconnu le caractère effectif des paiements intervenus. Pour ce qui est du paragraphe 1.12 dudit rapport final, le requérant prétend que ces paiements collectifs ont été établis en pleine connaissance de cause par le bureau de paiement et même suggérés par lui. En toute hypothèse, il n’y aurait pas eu d’intention d’enrichissement personnel, toutes les indemnités ayant été utilisées aux fins prévues.

105    Le Parlement conteste les arguments du requérant.

–       Appréciation du Tribunal

106    Il convient de souligner, à titre liminaire, que le présent moyen est tiré d’une erreur d’appréciation de la pertinence des pièces justificatives fournies par le requérant. Ce dernier a, du reste, indiqué à l’audience qu’il n’incombait pas au Tribunal de réaliser le contrôle minutieux de ces pièces, qui revenait au secrétariat général du Parlement et à l’OLAF.

107    En l’espèce, le Parlement nie toute pertinence aux pièces justificatives fournies en raison de la violation de conditions de forme substantielles, alors que le requérant estime que lesdites pièces prouvent a posteriori que l’utilisation des sommes versées est conforme à la finalité des dispositions applicables.

108    Force est de constater que, en l’espèce, le requérant a, comme il l’admet et ainsi que l’a constaté le Tribunal aux points 79 à 93 ci-dessus, violé les dispositions de forme applicables et que les pièces justificatives produites ne visent pas à établir qu’il les a respectées, lui ouvrant ainsi le droit à l’indemnité en cause. Quand bien même ces pièces justificatives prouveraient, comme le prétend le requérant, que les sommes litigieuses ont été versées à leur bénéficiaire réel, elles ne tendent notamment pas à démontrer que les versements effectués par le requérant ou son tiers payant l’ont toujours été à des personnes déclarées au Parlement et dont le contrat n’avait pas été résilié. N’ayant pas été versés à des assistants au sens de la réglementation FID, les montants en cause n’ont, contrairement à ce qu’allègue le requérant, pas été utilisés conformément à la finalité de cette dernière. Admettre la possibilité d’une régularisation dans le cas d’espèce, plusieurs années après les faits litigieux et sur demande de l’administration et non à la suite d’une démarche volontaire du requérant, reviendrait à priver de tout effet utile les dispositions de forme régissant l’attribution de l’indemnité en cause, lesquelles visent à éviter les abus.

109    C’est, par conséquent, à bon droit que le Parlement a considéré que les pièces justificatives fournies par le requérant n’étaient pas pertinentes pour remédier aux vices constatés dans la décision attaquée.

110    Il y a donc lieu de rejeter le deuxième moyen.

 Sur le troisième moyen, tiré de la violation du règlement financier de 2002 et des principes de proportionnalité et de non-discrimination

–       Arguments des parties

111    Le requérant fait valoir que le règlement financier de 2002 impose au Parlement de supporter le coût du travail des assistants parlementaires, dont la charge est prévue dans le budget spécial relatif aux dépenses du Parlement. En faisant supporter au requérant une somme inscrite à son budget, le Parlement violerait ledit règlement financier.

112    De plus, en sanctionnant un membre du Parlement pour une erreur formelle alors même que la charge existerait réellement en raison du paiement effectif des assistants, le Parlement violerait aussi les principes de proportionnalité et de non-discrimination. Le requérant renvoie à cet égard au point 89 de l’arrêt Gorostiaga, point 72 supra. Il serait, par ailleurs, contraire au principe de non-discrimination de sanctionner de la même manière une personne qui aurait détourné des fonds et une personne, comme le requérant, qui aurait utilisé les fonds aux fins prévues et n’aurait commis que des erreurs dans la gestion formelle de ceux-ci. Les deux situations ne seraient en effet pas comparables. Exiger le remboursement de fonds utilisés conformément à leur finalité reviendrait à admettre un enrichissement sans cause au profit du Parlement.

113    Le Parlement conteste les arguments du requérant.

–       Appréciation du Tribunal

114    En premier lieu, le requérant n’ayant aucun droit au versement des montants visés par la décision attaquée (voir points 79 à 93 ci-dessus), il n’incombe pas au Parlement d’en supporter le coût, de sorte qu’aucune violation du règlement financier de 2002 ne saurait lui être imputée. Bien au contraire, le règlement financier de 2002, et plus spécialement son article 71, paragraphe 3, impose une obligation inconditionnelle de recouvrer les montants indûment payés. Cette obligation incombe également au secrétaire général en vertu de l’article 27, paragraphe 3, de la réglementation FID.

115    Certes, le règlement financier de 2002 prévoit que le Parlement dresse un état prévisionnel de ses dépenses et de ses recettes et que le budget fait apparaître, dans l’état synthétique des recettes et des dépenses, les crédits d’engagement et de paiement pour l’exercice concerné. Il en découle, comme le fait valoir le requérant, que le budget du Parlement doit faire apparaître les crédits destinés à son fonctionnement, dont font partie les dépenses courantes de nature administrative, telles que la charge que constitue le coût des assistants parlementaires. Toutefois, dans la mesure où, en l’espèce, les sommes réclamées n’ont précisément pas été versées à des assistants parlementaires au sens de la réglementation applicable dans les règles prévues par celle-ci ou conformément au principe d’annualité du budget, elles ne relèvent pas des crédits budgétaires prévus à cet effet. Il est de surcroît contraire au principe de spécialité, énoncé à l’article 21 des deux versions du règlement financier couvrant la période litigieuse, et au principe de bonne gestion financière, énoncé à l’article 2 du règlement financier de 1977 et repris dans l’article 27 du règlement financier de 2002, de rémunérer des personnes non considérées comme des assistants parlementaires sur des crédits visant ceux-ci.

116    En deuxième lieu, comme le rappelle le Tribunal au point 89 de l’arrêt Gorostiaga, point 72 supra, le principe de proportionnalité, qui fait partie des principes généraux du droit communautaire, exige que les actes des institutions communautaires ne dépassent pas les limites de ce qui est approprié et nécessaire à la réalisation des objectifs légitimes poursuivis par la réglementation en cause. Or en l’espèce, le Parlement demande au requérant le remboursement des sommes indûment versées, conformément à l’article 16, paragraphe 2, et à l’article 27, paragraphe 3, de la réglementation FID et à l’article 71, paragraphe 3, du règlement financier de 2002. En assurant ainsi le respect des conditions posées par la réglementation FID pour l’attribution de l’indemnité de secrétariat et du règlement financier de 2002, le Parlement ne va pas au-delà de ce qui est approprié et nécessaire à la réalisation des objectifs poursuivis par la réglementation visée.

117    Il convient du reste de noter que ce n’est pas le total réclamé par le Parlement sur la base des chiffres tirés du rapport de l’OLAF que le requérant conteste en tant que tel, mais le fait, qu’il estime disproportionné, de le sanctionner ainsi pour une erreur de forme.

118    Or, il ne saurait être considéré comme disproportionné ou comme constituant un enrichissement sans cause au profit du Parlement de réclamer au requérant le remboursement de fonds versés à ce dernier, conformément à sa demande initiale, au titre de l’indemnité de secrétariat, et reversés, à l’insu du Parlement, par le requérant ou par son tiers payant à des personnes n’étant pas ou plus des assistants parlementaires au sens de la réglementation FID.

119    De même, il ne saurait être considéré comme disproportionné ou comme constituant un enrichissement sans cause au profit du Parlement de réclamer au requérant le remboursement de montants versés à ce dernier au titre de l’indemnité de secrétariat pour chaque année visée et non utilisés à cette fin dans ce cadre. Les excédents dégagés en fin d’exercice par rapport aux versements effectués par le Parlement sur la base des demandes régulières effectuées à l’origine par le requérant constituent des fonds qui ne couvrent pas les dépenses résultant de l’engagement d’assistants déclarés au cours de l’exercice en cause et ne sont donc pas utilisés conformément à la finalité de la réglementation en cause. Par ailleurs, l’indemnité en cause n’étant pas forfaitaire mais liée à l’engagement d’assistants déclarés pour l’exercice en cause, rien ne permet de penser que, si le requérant avait, conformément à la réglementation FID et au principe d’annualité budgétaire, remboursé les excédents dégagés à la fin de chaque exercice, il aurait automatiquement pu bénéficier des mêmes montants au cours de l’exercice suivant.

120    En troisième lieu, s’agissant de la prétendue violation du principe de non-discrimination, le requérant ne saurait prétendre qu’il a commis de simples erreurs dans la gestion formelle des fonds versés et que ceux-ci ont été utilisés conformément à leur finalité. Contrairement à ce qu’affirme le requérant, les sommes versées par le Parlement n’ont notamment pas été attribuées à leur destinataire légitime, puisque, dans les cas visés par la décision attaquée, leurs bénéficiaires n’étaient pas ou plus des assistants parlementaires au sens de la réglementation FID. Même si, comme il l’avance, le requérant n’a pas détourné les montants litigieux à des fins personnelles, question qui ne relève du reste pas de l’objet du présent litige à caractère administratif et non pénal, il n’a, dans les cas visés par la décision attaquée, pas respecté les conditions d’attribution de l’indemnité en cause. Il n’est dès lors pas discriminatoire de lui réclamer le remboursement des sommes au versement desquelles, pour cette raison, il n’avait pas droit.

121    Il y a donc lieu de rejeter le troisième moyen.

 Sur le quatrième moyen, tiré de la violation des principes du contradictoire et du respect des droits de la défense

–       Arguments des parties

122    Le requérant fait valoir que l’article 27, paragraphe 3, des réglementations FID 1999 et 2001 prévoit que le secrétaire général prend une décision en concertation avec les questeurs. Le fait qu’il ne dispose ni du rapport établi par le secrétaire général à leur attention ni du compte rendu de l’audition constituerait donc une violation de ses droits de la défense et du principe du contradictoire. Ces pièces devraient en tout état de cause être versées au dossier.

123    Par ailleurs, un projet de rapport, qui aurait été rédigé par le directeur général des finances, contiendrait des éléments fondamentaux au regard des droits de la défense du requérant et devrait donc aussi être produit par le Parlement. Le requérant demande au Tribunal d’entendre ledit directeur général et M. S. en tant que témoins pour attester de l’existence de ce rapport, établir les raisons pour lesquelles il n’a pas pu être finalisé et, le cas échéant, pour en déterminer le contenu en cas de destruction de celui-ci.

124    Le Parlement conteste les arguments du requérant.

–       Appréciation du Tribunal

125    Selon le principe général du respect des droits de la défense, la personne contre laquelle est dirigé un grief de la part de l’administration communautaire doit avoir la possibilité de prendre position sur tout document que cette dernière entend utiliser contre elle. Dans la mesure où une telle possibilité ne lui a pas été accordée, les documents non divulgués ne doivent pas être pris en considération en tant que moyens de preuve. Toutefois, cette exclusion de certains documents utilisés par l’administration n’a d’importance que dans la mesure où le grief formulé ne peut être prouvé que par référence à ces documents (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 18 novembre 1999, Tzoanos/Commission, C‑191/98 P, Rec. p. I‑8223, point 34, et arrêt du Tribunal du 3 juillet 2001, E/Commission, T‑24/98 et T‑241/99, RecFP p. I‑A‑149 et II‑681, point 92). Il incombe au Tribunal d’examiner si le défaut de divulgation des documents mentionnés par le requérant a pu influer, à son détriment, sur le déroulement de la procédure et le contenu de la décision attaquée (voir, en ce sens, arrêt E/Commission, précité, point 93).

126    S’agissant du prétendu rapport établi par le secrétaire général à l’attention des questeurs, le Parlement a déclaré qu’un tel document n’a pas été rédigé. Le requérant n’ayant pas présenté d’indices pertinents et concordants susceptibles de mettre en cause cette déclaration, il y a lieu de rejeter son argumentation (voir, en ce sens, arrêt Gorostiaga, point 72 supra, point 122). En tout état de cause, ledit rapport n’est pas invoqué pour fonder la légalité de la décision attaquée.

127    S’agissant de la consultation des questeurs du 25 avril 2007, le Parlement a produit, en annexe à son mémoire en défense, le compte rendu s’y rapportant. Le requérant, pour sa part, n’a fait aucune observation sur la façon dont la non-communication de ce document aurait pu nuire à sa défense et affecter à son détriment l’issue de la procédure administrative. Par conséquent, la non-divulgation du compte rendu relatif à la consultation des questeurs du 25 avril 2007 n’a pas été de nature à violer les droits de la défense du requérant (voir, en ce sens, arrêt Gorostiaga, point 72 supra, points 118 et 120).

128    Quant au projet de rapport prétendument rédigé par le directeur général des finances, force est de constater qu’il n’a pas été utilisé par le Parlement contre le requérant dans la décision attaquée. Celle-ci s’appuie sur le rapport final de l’OLAF du 18 septembre 2006, les documents fournis par le requérant au Parlement en janvier 2007 et les observations sur ceux-ci de la part de l’OLAF du 8 février 2007. Ainsi qu’il ressort de la description des faits (voir points 23 à 28 ci-dessus), le secrétaire général a informé le requérant des conclusions de l’OLAF et lui a transmis une copie de la correspondance entre le Parlement et l’OLAF. Le requérant a donc eu la possibilité de prendre position sur les documents que le secrétaire général a entendu utiliser contre lui. Le requérant produit du reste et commente ledit rapport de l’OLAF dans sa requête.

129    À cet égard, il semble cependant ressortir de la requête et de la demande d’audition de témoins que le requérant estime que ce document pourrait prouver que les personnes concernées de la direction générale des finances étaient parvenues à la conclusion que les sommes versées avaient été utilisées dans le but pour lequel elles avaient été accordées et que, en dehors des trois ordinateurs et des deux notes téléphoniques, aucune récupération ne se justifiait.

130    Toutefois, à supposer que ce projet de rapport existe ou qu’il ait existé, il ne permettrait, en tout état de cause, pas au requérant d’invoquer des arguments de nature à affecter le résultat auquel est parvenue la décision attaquée (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 27 novembre 1990, Kobor/Commission, T‑7/90, Rec. p. II‑721, point 30), laquelle a été prise par le secrétaire général sur la base du rapport de l’OLAF, des pièces produites par le requérant et des observations de l’OLAF sur celles-ci. Outre le fait qu’il s’agit ou s’agirait d’un simple projet de rapport, sans valeur juridique, il n’a pas servi de base à la décision attaquée.

131    Il n’y a en outre pas lieu de faire droit à la demande d’audition, dans la mesure où, même si les dépositions allaient dans le sens voulu par le requérant, elles seraient inopérantes.

132    Il convient donc de rejeter également le quatrième moyen, de sorte que le recours en annulation de la décision attaquée doit être rejeté.

 Sur les dépens

133    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Le requérant ayant succombé en ses conclusions, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions du Parlement.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      M. Hans-Peter Martin est condamné aux dépens.

Wiszniewska-Białecka

Dehousse       Kanninen

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 16 décembre 2010.

Signatures


* Langue de procédure : le français.