Language of document : ECLI:EU:T:2012:347

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

5 juillet 2012 (*)

« Marque communautaire – Demande de marque communautaire verbale Deutscher Ring Sachversicherungs-AG – Motifs absolus de refus – Caractère descriptif – Caractère distinctif – Article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑209/10,

Deutscher Ring Sachversicherungs-AG, établie à Hambourg (Allemagne), représentée par Me E. Busse, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. G. Schneider, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 11 mars 2010 (affaire R 1290/2009-1), concernant une demande d’enregistrement de la marque verbale Deutscher Ring Sachversicherungs-AG comme marque communautaire,

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de M. A. Dittrich, président, Mme I. Wiszniewska-Białecka (rapporteur) et M. M. Prek, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 5 mai 2010,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 20 septembre 2010,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 15 janvier 2009, la requérante, Deutscher Ring Sachversicherungs-AG, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal Deutscher Ring Sachversicherungs-AG.

3        Les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 36 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Assurances, affaires financières, affaires monétaires, affaires immobilières ».

4        Par décision du 10 septembre 2009, l’examinateur a rejeté la demande d’enregistrement de la marque demandée pour tous les services en cause sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b), et c), du règlement n° 207/2009.

5        Le 28 octobre 2009, la requérante a formé un recours contre cette décision auprès de l’OHMI.

6        Par décision du 11 mars 2010 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours. Elle a considéré que le signe verbal Deutscher Ring Sachversicherungs-AG était descriptif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 pour les services visés dans la demande d’enregistrement. À cet égard, la chambre de recours a relevé que le signe Deutscher Ring Sachversicherungs-AG était composé de trois mots et de l’élément « ag » indiquant la forme juridique d’une société. Elle a estimé que le mot « ring » pouvait désigner une « association de personnes qui se sont regroupées dans un but déterminé, afin de poursuivre des objectifs commun, en vue de créer et d’utiliser certains équipements, etc. » et qu’il était dès lors possible de comprendre le signe en cause comme désignant une association allemande du secteur des assurances non-vie constituée en société anonyme. La chambre de recours a, dès lors, considéré que le signe Deutscher Ring Sachversicherungs-AG était composé exclusivement d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner la forme d’organisation de la requérante ainsi que la nature des services visés dans la demande d’enregistrement et leur provenance géographique. En outre, la chambre de recours a considéré que la combinaison des éléments constitutifs du signe ne rendait pas celui-ci non descriptif par rapport aux services visés dans la demande d’enregistrement. Elle a relevé à cet égard que, contrairement à ce que la requérante soutenait, le mot « ring » au sens d’ « association » pouvait être utilisé pour désigner une société anonyme, toute société quelque soit sa forme pouvant être une association. Enfin, la chambre de recours a souligné que les assurances non-vie (Sachversicherung) étaient des services d’assurances et que ces assurances pouvaient faire l’objet d’offres dans le secteur des affaires financières, monétaires et immobilières. Elle en a conclu que le signe en cause était directement descriptif de l’ensemble des services visés dans la demande d’enregistrement.

7        La chambre de recours a également estimé que ce signe était dépourvu de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. À cet égard, la chambre de recours a considéré que le public pertinent comprendrait le signe comme une description courante d’une association allemande du secteur des assurances non-vie constituée en société anonyme. Elle a ajouté que la juxtaposition des mots, sans modification graphique ou du contenu, ne présentait aucune caractéristique additionnelle susceptible de rendre le signe, dans son ensemble, apte à distinguer les services de la requérante de ceux d’autres entreprises. La chambre de recours a dès lors considéré que l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 faisait également obstacle à l’enregistrement de la marque Deutscher Ring Sachversicherungs-AG.

 Conclusions des parties

8        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        faire droit à la demande d’enregistrement de la marque demandée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

9        L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal d’annuler la décision attaquée.

 En droit

 Sur la recevabilité du deuxième chef de conclusions de la requérante

10      Par son deuxième chef de conclusions, la requérante demande au Tribunal de procéder à l’enregistrement de la marque demandée.

11      Il résulte d’une jurisprudence constante que, dans le cadre d’un recours introduit devant le juge de l’Union européenne contre la décision d’une chambre de recours de l’OHMI, ce dernier est tenu, conformément à l’article 65, paragraphe 6, du règlement n° 207/2009, de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt du juge de l’Union. Dès lors, il n’appartient pas au Tribunal d’adresser des injonctions à l’OHMI, auquel il incombe de tirer les conséquences du dispositif et des motifs des arrêts du juge de l’Union [voir arrêt du Tribunal du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, Rec. p. II‑2579, point 20, et la jurisprudence citée]. Partant, le deuxième chef de conclusions de la requérante est irrecevable.

 Sur le fond

12      La requérante invoque deux moyens, tirés, respectivement, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 et de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du même règlement.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009

13      Dans le cadre du premier moyen, la requérante fait valoir que le signe Deutscher Ring Sachversicherungs-AG n’est pas composé exclusivement d’indications descriptives des services en cause. Ainsi, le mot « ring » serait rarement utilisé pour désigner des opérateurs économiques et aurait avant tout le sens de bague. De même, l’expression « deustcher ring » n’aurait de caractère descriptif ni pour les services d’assurance ni pour une société anonyme.

14      L’OHMI partage l’analyse de la chambre de recours s’agissant de la signification des différents éléments constituant le signe en cause. En revanche, il considère que le signe Deutscher Ring Sachversicherungs-AG, considéré dans son ensemble, n’a pas de caractère descriptif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009.

15      Ainsi, la requérante et l’OHMI sont d’avis que le signe Deutscher Ring Sachversicherungs-AG n’a pas de caractère descriptif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 et qu’il convient d’annuler la décision attaquée sur ce point.

16      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, sont refusées à l’enregistrement « les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci ». L’article 7, paragraphe 2, du même règlement énonce que « le paragraphe 1 est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de la Communauté ».

17      Les signes et les indications visés par l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 sont ceux qui peuvent servir, dans un usage normal du point de vue du public ciblé, pour désigner soit directement, soit par la mention d’une de ses caractéristiques essentielles, le produit ou le service pour lequel l’enregistrement est demandé [arrêt de la Cour du 20 septembre 2001, Procter & Gamble/OHMI, C‑383/99 P, Rec. p. I‑6251, point 39, et arrêt du Tribunal du 26 novembre 2003, HERON Robotunits/OHMI (ROBOTUNITS), T‑222/02, Rec. p. II‑4995, point 34].

18      Il en résulte que, pour qu’un signe tombe sous le coup de l’interdiction énoncée par cette disposition, il faut qu’il présente avec les produits ou services en cause un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public concerné de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description des produits et des services en cause ou d’une de leurs caractéristiques [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 20 juillet 2004, Lissotschenko et Hentze/OHMI (LIMO), T‑311/02, Rec. p. II‑2957, point 30].

19      En l’espèce, les services pour lesquels l’enregistrement de la marque Deutscher Ring Sachversicherungs-AG est demandé sont des services relatifs aux « Assurances, affaires financières, affaires monétaires, affaires immobilières ».

20      Il est constant que le public pertinent est composé des consommateurs moyens de langue allemande qui font preuve d’un degré d’attention plus élevé que lors d’un achat habituel, les services en cause étant souvent onéreux.

21      Le signe Deutscher Ring Sachversicherungs-AG est composé de trois mots et de l’élément « ag ».

22      Le mot « sachversicherung », signifiant « assurance non-vie », est directement descriptif des services d’assurance qui sont visés dans la demande d’enregistrement. L’élément « ag », qui est un acronyme pour désigner le terme « aktiengesellschaft » (société anonyme), est descriptif de la forme juridique de la requérante. Le mot « deutscher » est un adjectif désignant les personnes ou les choses d’origine allemande. Enfin, le mot « ring » signifie dans son sens premier et courant « bague ». Il peut également être compris dans le sens plus rare d’« association » ou de « groupement ».

23      Il y a lieu de relever, à l’instar de l’OHMI, que l’ajout de l’élément « ag » indiquant la forme juridique de la société, lié au mot « sachversicherungs » par un trait d’union, a pour conséquence de diviser la suite des mots composant le signe Deutscher Ring Sachversicherungs-AG en deux parties,  « deutscher ring » et « sachversicherungs-ag ». Étant donné que la seconde partie de la suite de mots décrit déjà, sous une forme facilement compréhensible par tous, la forme d’une entreprise proposant des services d’assurance, la première partie de la suite de mots ne peut normalement pas être comprise comme « association » ou « groupement ». Cette partie reste vague et est fantaisiste par rapport aux services d’assurance.

24      Ainsi, le consommateur ne pourra pas percevoir, immédiatement et sans autre réflexion, le signe demandé dans son ensemble comme une description des services en cause ou de l’une de leurs caractéristiques. L’interprétation que la chambre de recours donne du signe Deutscher Ring Sachversicherungs-AG (association allemande d’actionnaires qui se sont regroupés en vue d’offrir des services d’assurances non-vie et aux fins de la gestion d’assurances non-vie) n’est pas une interprétation qui vient naturellement à l’esprit du consommateur allemand qui est mis en présence du signe demandé. Il pourrait tout au plus parvenir à cette interprétation après une longue réflexion.

25      Il s’ensuit que, c’est à tort que la chambre de recours a considéré que le signe Deutscher Ring Sachversicherungs-AG était descriptif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009.

26      Il résulte de ce qui précède que le premier moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, doit être accueilli.

 Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009

27      Dans le cadre du second moyen, la requérante fait valoir que la chambre de recours s’est fondée à tort sur le caractère descriptif du signe Deutscher Ring Sachversicherungs-AG pour refuser de lui reconnaître un caractère distinctif.

28      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif. Le caractère distinctif d’un signe doit être apprécié par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement est demandé.

29      En l’espèce, il suffit de relever que la chambre de recours a fondé sa conclusion selon laquelle le signe Deutscher Ring Sachversicherungs-AG est dépourvu de caractère distinctif sur le fait que le public pertinent comprendra ce signe comme la description courante d’une association allemande du secteur des assurances non-vie constituée en société anonyme. Or, il résulte de l’analyse du premier moyen que le consommateur allemand ne comprendra pas le signe Deutscher Ring Sachversicherungs-AG comme signifiant « association allemande du secteur des assurances non-vie constituée en société anonyme ».

30      Par conséquent, le raisonnement de la chambre de recours au regard de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 doit être écarté, en ce qu’il est fondé sur l’erreur constatée ci-dessus.

31      Il résulte de ce qui précède que le second moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, doit également être accueilli et, partant, le recours dans son ensemble.

32      Dès lors, il y a lieu d’annuler la décision attaquée.

 Sur les dépens

33      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. L’OHMI ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la requérante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la première chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) du 11 mars 2010 (affaire R 1290/2009-1) est annulée.

2)      L’OHMI est condamné aux dépens.

Dittrich

Wiszniewska-Białecka

Prek

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 5 juillet 2012.

Signatures


* Langue de procédure : l’allemand.