Language of document : ECLI:EU:T:2012:608

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (chambre des pourvois)

20 novembre 2012(*)

« Pourvoi – Fonction publique – Fonctionnaires – Durée de la procédure visant à la reconnaissance d’une invalidité permanente partielle – Préjudice prétendument subi par le requérant – Remboursement de frais qui auraient pu être évités – Rejet du recours en première instance comme étant manifestement dépourvu de tout fondement en droit – Article 94, sous a), du règlement de procédure du Tribunal de la fonction publique »

Dans l’affaire T‑491/11 P,

ayant pour objet un pourvoi formé contre l’ordonnance du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (troisième chambre) du 30 juin 2011, Marcuccio/Commission (F‑14/10, non encore publiée au Recueil), et tendant à l’annulation de cette ordonnance,

Luigi Marcuccio, demeurant à Tricase (Italie), représenté par Me G. Cipressa, avocat,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant

Commission européenne, représentée par M. J. Currall et Mme C. Berardis-Kayser, en qualité d’agents, assistés de MA. Del Ferro, avocat,

partie défenderesse en première instance,

LE TRIBUNAL (chambre des pourvois),

composé de MM. M. Jaeger (rapporteur), président, O. Czúcz, et H. Kanninen, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

1        Par son pourvoi introduit au titre de l’article 9 de l’annexe I du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, le requérant, M. Luigi Marcuccio, demande, premièrement, l’annulation de l’ordonnance du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (troisième chambre) du 30 juin 2011, Marcuccio/Commission (F‑14/10, non encore publiée au Recueil, ci-après l’« ordonnance attaquée »), par laquelle celui-ci a rejeté sa demande tendant à l’indemnisation du préjudice subi du fait de la durée déraisonnable de la procédure conduite au titre de l’article 73 du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le « statut »), deuxièmement, à ce qu’il soit fait droit à cette dernière demande en indemnisation par la condamnation de la Commission européenne à lui verser une indemnité d’un montant de 10 000 euros et, troisièmement, à titre subsidiaire, que l’affaire en cause soit renvoyée devant le Tribunal de la fonction publique, siégeant dans une formation de jugement différente.

 Faits à l’origine du litige

2        Les faits à l’origine du litige sont exposés, dans l’ordonnance attaquée, dans les termes suivants :

« 6      Le 12 septembre 2003, le requérant a été victime d’un accident de la vie privée : il a fait une chute et s’est blessé au genou gauche. Le 16 septembre suivant, il a fait une déclaration d’accident, afin de bénéficier des prestations prévues par l’article 73 du statut, réceptionnée par l’Office ‘Gestion et liquidation des droits individuels’ (PMO).

7      Le 30 janvier 2004, la chute du 12 septembre 2003 a été reconnue par l’unité ‘Assurance maladie et accidents’ du PMO (ci-après le ‘PMO 3’) comme constituant un accident au sens de l’article 73 du statut.

8      Le 21 juillet 2004, le requérant a envoyé au PMO 3 un certificat médical de consolidation de ses lésions.

9      Par courrier du 18 août 2004, le PMO 3 a informé le requérant que le médecin désigné par l’institution souhaitait l’examiner, et l’a invité à prendre contact avec le secrétariat des médecins-conseil, dont le numéro de téléphone était indiqué.

10      Le requérant n’ayant pas donné suite au courrier du 18 août 2004, le PMO 3 lui a adressé, par lettre recommandée du 7 février 2005, une nouvelle invitation à fixer un rendez-vous avec le médecin en charge de son dossier désigné par l’institution. Ce courrier indiquait également au requérant que, en l’absence de réponse de sa part avant le 8 mai 2005, il serait considéré qu’il n’était plus intéressé par la poursuite de la procédure ouverte au titre de l’article 73 du statut.

11      Par lettre du 10 mars 2005, le requérant a répondu que, tout en se déclarant à ‘l’entière disposition du médecin désigné’, il n’entendait pas prendre contact avec l’administration par téléphone comme cela lui était demandé, jugeant un appel téléphonique ‘inopportun compte tenu de l’extrême confidentialité avec laquelle doivent être traitées les données médicales’.

12      Par courrier recommandé du 29 juillet 2005, le PMO 3 a de nouveau invité le requérant à prendre rendez-vous avec le médecin désigné par l’institution.

13      Par courrier du 15 septembre 2005, le requérant a renouvelé son adhésion formelle de poursuivre la procédure engagée au titre de l’article 73 du statut, mais réitéré son refus de communiquer par téléphone avec l’administration, au motif que l’article 18 de la réglementation de couverture ne prévoirait pas expressément de contact téléphonique entre l’assuré et l’administration.

14      Par courrier du 15 novembre 2005, le requérant a demandé au PMO 3 de lui communiquer l’identité du médecin désigné par l’institution ainsi que la date et l’heure de l’examen médical qu’il devait passer, en précisant qu’il ne manquerait pas de s’y soumettre.

15      Par courrier recommandé du 15 février 2007, que le requérant prétend avoir reçu seulement le 19 mars suivant, le PMO 3 a invité le requérant à se présenter à une visite auprès du médecin désigné par l’institution, fixée au 19 avril 2007 à Bruxelles (Belgique).

16      Le requérant, qui habite en Italie, a répondu par note du 31 mars 2007, adressée en télécopie le 2 avril 2007 et par lettre recommandée avec accusé de réception parvenue à son destinataire le 12 avril 2007, qu’il ne pourrait se présenter au rendez-vous fixé, un traitement médical en cours l’empêchant d’entreprendre de longs voyages.

17      Une nouvelle convocation lui a alors été adressée, par courrier du 7 janvier 2008, pour les dates du 31 janvier et du 1er février suivants. La visite médicale du requérant a finalement eu lieu auxdites dates.

18      Le 27 mars 2008, le médecin désigné par l’institution a déposé ses conclusions. Le 28 avril 2008, l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’‘AIPN’), sur la base desdites conclusions, a adopté un projet de décision reconnaissant au requérant un degré d’invalidité permanente de 2 % (ci-après le ‘projet de décision du 28 avril 2008’).

19      Le projet de décision du 28 avril 2008 est parvenu au requérant le 14 mai 2008. Par télécopie et lettre recommandée avec accusé de réception du 20 juin suivant, le requérant a communiqué son accord sur le projet de décision du 28 avril 2008 en renvoyant le formulaire fourni à cet effet par le PMO 3. Ce formulaire précisait notamment que le versement de la somme accordée serait effectué environ six semaines à compter du renvoi du formulaire à l’administration.

20      Par courrier du 9 septembre 2008, le PMO 3 a indiqué au requérant qu’il n’était pas en mesure de procéder au versement de la somme due, dans la mesure où manquaient les codes SWIFT et BIC de sa banque. Le PMO 3 demandait par conséquent au requérant de lui fournir ces informations le plus rapidement possible.

21      Le versement de l’indemnité due au requérant a été effectué à la fin du mois de septembre 2008.

22      Le 30 janvier 2009, le requérant a présenté, au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut, une demande d’indemnisation de l’ensemble des préjudices qui lui auraient été causés par la durée déraisonnable de la procédure conduite au titre de l’article 73 du statut.

23      Par courrier du 25 mai 2009, le chef du PMO 3 a rejeté la demande du requérant, en indiquant à celui-ci que les causes du retard qu’il invoquait lui seraient entièrement imputables. Le requérant prétend ne pas avoir reçu ce courrier.

24      Le 20 juillet 2009, le requérant a formé une réclamation contre la décision implicite de rejet née du silence qu’aurait gardé l’administration sur sa demande d’indemnisation du 30 janvier 2009, décision qui serait intervenue le 30 mai 2009.

25      Par décision du 6 novembre 2009, que le requérant affirme avoir reçue le 16 décembre 2009, le directeur de la direction ‘Statut: politique, gestion et conseil’ de la direction générale (DG) du personnel et de l’administration, en sa qualité d’AIPN, a rejeté la réclamation du requérant. Le courrier du chef du PMO 3 du 25 mai 2009 était joint à cette décision de rejet de la réclamation. »

 Procédure en première instance et ordonnance attaquée

3        Par requête parvenue au greffe du Tribunal de la fonction publique le 25 février 2010, le requérant a introduit un recours qui a été enregistré sous la référence F‑14/10.

4        Ainsi qu’il résulte du point 26 de l’ordonnance attaquée, le requérant a conclu, en première instance, à ce qu’il plaise au Tribunal de la fonction publique :

–        annuler la décision implicite de rejet de sa demande introduite le 30 janvier 2009 ;

–        annuler, pour autant que de besoin, l’acte, quelle qu’en soit la forme, portant rejet de la réclamation du 20 juillet 2009 ;

–        annuler, pour autant que de besoin, la note du 6 novembre 2009 signée par le directeur de la direction « Statut : politique, gestion et conseil » de la DG du personnel et de l’administration ;

–        établir, pour autant que de besoin, que la procédure ayant pour objet l’obtention des prestations garanties par l’article 73 du statut, à la suite l’accident survenu le 12 septembre 2003, durait depuis plus de cinq ans ;

–        constater, pour autant que de besoin, que la durée de la procédure en cause devait être considérée comme déraisonnable ;

–        condamner la Commission à indemniser le dommage matériel et moral injustement subi par lui en raison de la durée déraisonnable de la procédure en cause, en lui versant la somme de 10 000 euros, ou toute somme supérieure ou inférieure que le Tribunal estimera juste et équitable ;

–        condamner la Commission à lui verser, à compter du jour suivant celui auquel la demande du 30 janvier 2009 est parvenue à la Commission, et jusqu’au paiement effectif des 10 000 euros, les intérêts sur la somme précitée, au taux de 10 % par an avec capitalisation annuelle ;

–        condamner la Commission à lui rembourser l’intégralité des dépens et honoraires de la présente procédure.

5        La Commission, pour sa part, a conclu au rejet du recours comme non fondé et a invité le Tribunal de la fonction publique à condamner le requérant aux dépens.

6        Dans l’ordonnance attaquée, le Tribunal de la fonction publique a, tout d’abord, relevé que, selon une jurisprudence constante, le bien-fondé d’un recours en indemnité introduit au titre de l’article 270 TFUE était subordonné à la réunion d’un ensemble de conditions, à savoir l’illégalité du comportement reproché aux institutions, la réalité du dommage et l’existence d’un lien de causalité entre le comportement allégué et le préjudice invoqué (arrêts de la Cour du 1er juin 1994, Commission/Brazzelli Lualdi e.a., C‑136/92 P, Rec. p. I‑1981, point 42, et du 21 février 2008, Commission/Girardot, C‑348/06 P, Rec. p. I‑833, point 52). Ces trois conditions sont cumulatives.

7         Il a ensuite examiné, en premier lieu, la condition tenant à l’illégalité du comportement reproché à l’institution, à l’égard des trois moyens soulevés par le requérant, tirés de la violation de l’obligation de motivation, de la violation de la loi et de la violation des devoirs de sollicitude et de bonne administration.

8        S’agissant du premier moyen, le Tribunal de la fonction publique a répondu de la façon suivante :

« 38      Il est de jurisprudence constante que la violation de l’obligation de motivation n’est pas de nature à engager la responsabilité extracontractuelle de l’Union (arrêt de la Cour du 15 septembre 1982, Kind/CEE, 106/81, point 14 ; arrêts du Tribunal de première instance du 12 septembre 2007, Nikolaou/Commission, T‑259/03, point 271, et la jurisprudence citée, et du 2 décembre 2008, Nuova Agricast/Commission, T‑362/05 et T‑363/05, point 90).

39      Dès lors, le présent moyen, avancé au soutien des conclusions indemnitaires, doit être rejeté comme inopérant.

40      En tout état de cause, le moyen doit être rejeté comme manifestement non fondé.

41      En effet, la demande d’indemnisation du 30 janvier 2009 n’a pas été rejetée par une décision implicite intervenue quatre mois plus tard, soit le 30 mai 2009, mais par la décision du 25 mai 2009. Or il est indiqué clairement dans cette décision qu’il ne peut être fait droit à la demande d’indemnisation du requérant dans la mesure où le retard qu’il allègue dans la procédure conduite au titre de l’article 73 du statut lui est entièrement imputable, ce qui constitue une motivation suffisante de la décision en cause.

42      S’agissant de l’argument du requérant selon lequel la décision du 25 mai 2009 ne lui serait pas parvenue, il y a lieu de constater que l’intéressé a eu connaissance des motifs du rejet de sa demande au plus tard par la notification de la décision rejetant sa réclamation, puisque la décision du 25 mai 2009 y était annexée.

43      Or, il peut être remédié à un éventuel défaut de motivation par une motivation adéquate fournie au stade de la réponse à la réclamation, cette dernière motivation étant censée coïncider avec la motivation de la décision contre laquelle la réclamation a été dirigée (arrêt du Tribunal du 23 novembre 2010, Wenig/Commission, F‑75/09, point 36, et la jurisprudence citée).

44      Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de la violation par la Commission de l’obligation de motivation doit être rejeté. »

9        S’agissant du deuxième moyen, le Tribunal de la fonction publique a jugé ce qui suit :

« 73      Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que la durée de la procédure conduite au titre de l’article 73 du statut ne peut pas être imputée à un comportement fautif de la Commission, et doit, à de nombreux égards, être imputée au défaut de coopération du requérant avec l’administration, voire à un comportement obstructionniste de celui-ci. »

10      Enfin, s’agissant du troisième moyen, le Tribunal de la fonction publique a relevé, au point 80 de l’ordonnance attaquée, que la Commission avait agi conformément au principe de bonne administration, alors qu’elle était confrontée au comportement non coopératif, voire obstructionniste, du requérant.

11      Au vu de ces considérations, le Tribunal de la fonction publique a conclu que, en l’absence de comportement illégal de l’institution, les conclusions indemnitaires devaient être rejetées comme manifestement dépourvues de tout fondement en droit, sans même qu’il soit besoin d’examiner les deux autres conditions.

12      Le Tribunal de la fonction publique a condamné le requérant à supporter, outre ses propres dépens, les dépens exposés par la Commission et a décidé d’appliquer à son égard l’article 94, sous a), de son règlement de procédure, qui dispose que, si le Tribunal de la fonction publique a exposé des frais qui auraient pu être évités, notamment si le recours a un caractère manifestement abusif, il peut condamner la partie qui les a provoqués à les rembourser intégralement ou en partie, sans que le montant de ce remboursement puisse excéder la somme de 2 000 euros.

13      Au point 86 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal de la fonction publique a ainsi relevé les éléments suivants :

« 86      En l’espèce, outre le fait que le présent recours a été rejeté comme manifestement dépourvu de tout fondement en droit, il importe de relever que le Tribunal de première instance des Communautés européennes, dans son ordonnance du 17 mai 2006, Marcuccio/Commission (T‑241/03, point 65), ainsi que le Tribunal, dans ses ordonnances du 6 décembre 2007, Marcuccio/Commission (F‑40/06, point 50), du 4 novembre 2008, Marcuccio/Commission (F‑133/06, point 58), du 7 octobre 2009, Marcuccio/Commission (F‑3/08, point 43) et du 25 mars 2010, Marcuccio/Commission (F‑102/08, point 45, faisant l’objet d’un pourvoi pendant devant le Tribunal de l’Union européenne, affaire T‑256/10 P), ont déjà constaté que, dans ces affaires, le requérant avait opté pour la voie contentieuse sans aucune justification. Or, il est manifeste que la présente affaire s’inscrit dans le prolongement d’une telle démarche. Il convient donc, eu égard à l’importance des frais que le Tribunal a dû exposer, de condamner le requérant à rembourser une partie de ces frais au Tribunal pour un montant de 1 000 euros. »

  Sur le pourvoi

  Procédure et conclusions des parties

14      Par mémoire déposé au greffe du Tribunal le 19 septembre 2011, le requérant a formé le présent pourvoi.

15      Le requérant conclut, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler l’ordonnance attaquée dans son intégralité ;

–        faire droit intégralement à ses conclusions en première instance ;

–        condamner la Commission aux dépens ;

–        à titre subsidiaire, renvoyer l’affaire en cause devant le Tribunal de la fonction publique, siégeant en une formation de jugement différente.

16      La Commission, dans son mémoire en réponse déposé le 20 décembre 2011, conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le pourvoi comme non fondé ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

17      En vertu de l’article 145 de son règlement de procédure, le Tribunal peut, lorsque le pourvoi est manifestement irrecevable ou manifestement non fondé, le rejeter à tout moment par voie d’ordonnance motivée, et ce même si une partie a demandé au Tribunal la tenue d’une audience (ordonnance du Tribunal du 24 septembre 2008, Van Neyghem/Commission, T‑105/08 P, non encore publiée au Recueil, point 21). En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier et décide, en application de cet article, qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la procédure.

18      À l’appui de son pourvoi, le requérant soulève cinq moyens, tirés, en substance, premièrement, d’une erreur de droit, en ce que le Tribunal de la fonction publique a considéré que la violation de l’obligation de motivation n’était pas de nature à engager la responsabilité extracontractuelle d’une institution de l’Union, deuxièmement, de l’interprétation et de l’application erronées, fausses et déraisonnables de la notion d’obligation de motivation, troisièmement, d’une erreur de droit, en ce que le Tribunal de la fonction publique a refusé de considérer le mémoire en réponse de la Commission comme déposé hors délai et, partant, comme irrecevable, quatrièmement, de la violation de l’article 44 du règlement de procédure du Tribunal de la fonction publique, du droit au respect du contradictoire et des droits de la défense et, cinquièmement, de l’application erronée, fausse et déraisonnable de l’article 94 du règlement de procédure du Tribunal de la fonction publique.

  Sur le premier moyen, tiré d’une erreur de droit, en ce que le Tribunal de la fonction publique a considéré que la violation de l’obligation de motivation n’était pas de nature à engager la responsabilité extracontractuelle d’une institution de l’Union

19      Par son premier moyen, le requérant soutient, en substance, que le Tribunal de la fonction publique a commis une erreur de droit, en excluant, sans fournir de motivation et sans examiner les circonstances de fait, la responsabilité extracontractuelle de la Commission.

20      La Commission fait valoir que le moyen est inopérant et, en toute hypothèse, dépourvu de fondement.

21      Il suffit de constater que, en l’espèce, le Tribunal de la fonction publique a fait application d’une jurisprudence constante selon laquelle la violation de l’obligation de motivation n’est pas de nature à engager la responsabilité extracontractuelle de l’Union (arrêt de la Cour du 15 septembre 1982, Kind/CEE, 106/81, Rec. p. 2885, point 14 ; voir arrêt du Tribunal du 12 septembre 2007, Nikolaou/Commission, T‑259/03, non publié au Recueil, point 271, et la jurisprudence citée, et arrêt du Tribunal du 2 décembre 2008, Nuova Agricast/Commission, T‑362/05 et T‑363/05, non publié au Recueil, point 90). Partant, le Tribunal de la fonction publique n’a pas commis d’erreur de droit en excluant, sur ce seul fondement, la responsabilité extracontractuelle de l’Union. Le moyen doit donc être rejeté comme manifestement non fondé.

 Sur le deuxième moyen, tiré de l’interprétation et de l’application erronées, fausses et déraisonnables de la notion d’obligation de motivation

22      Par son deuxième moyen, le requérant fait valoir que le Tribunal de la fonction publique a jugé à tort qu’une institution de l’Union pouvait, en toute légalité, remédier au vice de motivation entachant l’une de ses décisions au moyen d’une motivation adéquate fournie au moment de la réponse à la réclamation.

23      La Commission estime que le moyen est manifestement dénué de fondement.

24      Il convient de relever qu’il est de jurisprudence constante qu’une institution de l’Union peut remédier à un éventuel défaut de motivation par une motivation adéquate fournie au stade de la réponse à la réclamation, cette dernière motivation étant censée coïncider avec la motivation de la décision contre laquelle la réclamation a été dirigée (arrêt du Tribunal du 18 septembre 2003, Lebedef e.a./Commission, T‑221/02, RecFP p. I‑A‑211 et II‑1037, point 62).

25      Tel est le cas en l’espèce, le requérant ayant reçu les motifs de rejet de sa demande au plus tard le 16 décembre 2009, par la notification de la décision rejetant sa réclamation, à laquelle était jointe le rejet de sa demande. Partant, le Tribunal de la fonction publique n’a commis aucune erreur de droit en constatant que la Commission avait remédié au défaut de motivation au stade du rejet de la réclamation. Le moyen doit ainsi être rejeté comme manifestement non fondé.

 Sur le troisième moyen, tiré d’une erreur de droit, en ce que le Tribunal de la fonction publique a refusé de considérer le mémoire en réponse de la Commission comme ayant été déposé hors délai et, partant, comme étant irrecevable

26      Par son troisième moyen, le requérant estime que le Tribunal de la fonction publique a illégalement omis de déclarer irrecevable le mémoire en défense déposé par la Commission, alors que celui-ci aurait été introduit tardivement.

27      La Commission fait valoir que le moyen est dénué de tout fondement.

28      Il convient de rappeler que le délai pour déposer un mémoire en réponse est de deux mois à compter de la notification de la requête, augmenté de dix jours de délai forfaitaire, conformément à l’article 39 et à l’article 100, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal de la fonction publique. En l’espèce, il découle des pièces du dossier que la Commission a reçu la notification de la requête le 25 mars 2010 et a déposé le mémoire en défense le 4 juin 2010, comme le requérant lui-même le reconnaît au point 9 du pourvoi.

29      Partant, le mémoire en défense ayant été introduit dans le délai prévu par l’article 39 et l’article 100, paragraphe 3, de son règlement de procédure, le Tribunal de la fonction publique n’a commis aucune erreur de droit et le moyen doit être rejeté comme manifestement non fondé.

 Sur le quatrième moyen, tiré de la violation de l’article 44 du règlement de procédure du Tribunal de la fonction publique, du droit au respect du contradictoire et des droits de la défense

30      Par son quatrième moyen, le requérant reproche au Tribunal de la fonction publique la violation de l’article 44 de son règlement de procédure, qui prévoit que « le Tribunal ne prend en considération que les documents et pièces dont les représentants des parties ont pu prendre connaissance et sur lesquels ils ont pu se prononcer ». En effet, le requérant fait valoir que la Commission a joint au mémoire en réponse des documents sur lesquels il n’a pas pu prendre position. En outre, le Tribunal de la fonction publique aurait tenu compte de ces documents afin de statuer sur l’affaire en cause. Par ailleurs, la violation commise par le Tribunal de la fonction publique porterait atteinte au droit au respect du contradictoire et aux droits de la défense, dès lors qu’il ne pourrait être exclu que, si le Tribunal de la fonction publique avait permis au requérant de prendre position sur les documents joints au mémoire en défense, il aurait pu statuer différemment sur le fond de l’affaire en cause et rendre une décision qui lui aurait été plus favorable.

31      La Commission estime que le présent moyen doit être rejeté. Premièrement, le Tribunal de la fonction publique se serait conformé à son règlement de procédure et, en particulier, à son article 76, selon lequel, « lorsqu’un recours est, en tout ou en partie, manifestement irrecevable ou manifestement dépourvu de tout fondement en droit, le Tribunal peut, sans poursuivre la procédure, statuer par voie d’ordonnance motivée ». Deuxièmement, l’absence de prise de position par le requérant sur les documents annexés au mémoire en défense n’aurait pas porté atteinte au droit au respect du contradictoire et aux droits de la défense. En effet, les documents en question n’auraient été que les lettres adressées par le bureau compétent de la Commission (PMO) au requérant pour inviter celui-ci à fixer la date de la visite médicale nécessaire à l’application de la procédure prévue à l’article 73 du statut. Il s’agirait de lettres que le requérant n’a pas nié avoir reçu et dont il aurait, par conséquent, eu connaissance au moment où il a introduit le recours dans l’affaire F‑14/10, qui a donné lieu à l’ordonnance attaquée.

32      À cet égard, il convient de relever que, dans l’arrêt du 17 décembre 2009, Réexamen M/EMEA (C‑197/09 RX-II, Rec. p. I‑12033, points 39 à 42), la Cour a jugé que les droits de la défense occupaient une place éminente dans l’organisation et le déroulement d’un procès équitable et que les droits de la défense incluaient le principe du contradictoire. Partant, les juridictions de l’Union veillent à faire respecter devant elles et à respecter elles-mêmes le principe du contradictoire. Ce principe implique que les parties puissent débattre contradictoirement tant des éléments de fait que des éléments de droit qui sont décisifs pour l’issue de la procédure.

33      En l’espèce, il est constant que le rejet explicite de la demande du 25 mai 2009, la réclamation du requérant du 20 juillet 2009, le rejet explicite de la réclamation du 6 novembre 2009, les lettres du secteur « Assurance accidents et maladies professionnelles » de la Commission (ci-après l’« AMA ») du 18 août 2004, du 7 février 2005 et du 29 juillet 2005, concernant la fixation d’un rendez-vous téléphonique avec le médecin de la Commission, et la réponse du requérant du 15 septembre 2005 auxdites lettres de l’AMA ont été produits par la Commission à l’appui du mémoire en défense et que le Tribunal de la fonction publique s’est fondé sur ces documents comme sources factuelles de l’ordonnance attaquée.

34      Toutefois, il découle, en tout état de cause, du dossier en première instance que non seulement le requérant a eu connaissance des documents joints par la Commission au mémoire en défense, dès lors qu’il en était soit l’auteur, soit le destinataire, mais qu’il a aussi expressément commenté et pris en considération lesdits documents aux fins de l’élaboration de la requête. En effet, s’agissant du rejet explicite de la demande du 25 mai 2009 et du rejet explicite de la réclamation du 6 novembre 2009, le requérant, aux points 31 à 34 de la requête en première instance, fait valoir que le second, auquel était joint le premier, était déraisonnable et dépourvu de pertinence. Par ailleurs, le requérant fait référence aux lettres envoyées par l’AMA aux points 5 et 6 de ladite requête, en affirmant y avoir répondu et avoir pris position sur celles-ci.

35      Partant, en l’espèce, le fait que la Commission ait joint ces documents au mémoire en défense ne constitue pas une circonstance de nature à entraîner, en vertu du principe du contradictoire, l’obligation pour le Tribunal de la fonction publique de permettre au requérant de présenter ses observations à leur égard. Il convient d’en conclure qu’aucune atteinte au respect du principe du contradictoire ne peut être constatée, de sorte que le moyen tiré de la violation de l’article 44 du règlement de procédure du Tribunal de la fonction publique, du droit au respect du contradictoire et des droits de la défense doit être rejeté comme manifestement non fondé.

 Sur le cinquième moyen, tiré de l’application erronée, fausse et déraisonnable de l’article 94 du règlement de procédure du Tribunal de la fonction publique

36      Par son cinquième moyen, le requérant soutient, en substance, que le Tribunal de la fonction publique n’a pas motivé de manière appropriée la condamnation aux dépens, au sens de l’article 94, sous a), du règlement de procédure du Tribunal de la fonction publique, selon lequel, « si le Tribunal a exposé des frais qui auraient pu être évités, notamment si le recours a un caractère manifestement abusif, il peut condamner la partie qui les a provoqués à les rembourser intégralement ou en partie, sans que le montant de ce remboursement puisse excéder la somme de 2 000 euros ».

37      Le requérant ajoute que, en tout état de cause, le Tribunal de la fonction publique a fondé sa décision de le condamner aux dépens sur le fondement de l’article 94, sous a), de son règlement de procédure en invoquant des circonstances extérieures à l’affaire en cause, à savoir son comportement prétendument procédurier dans d’autres affaires introduites devant le Tribunal et le Tribunal de la fonction publique. Le requérant soutient que cette motivation est contraire au libellé de la disposition, dont il ressortirait que le Tribunal de la fonction publique ne peut infliger une condamnation, en vertu de l’article 94, sous a), de son règlement de procédure, qu’en relation avec des frais qu’il a supportés durant la procédure et non en raison de comportements étrangers à cette dernière.

38      La Commission exprime des doutes quant à la recevabilité du présent moyen, en tant qu’il ne concerne pas le rejet d’un recours contre un acte de la Commission, mais une décision prise de manière autonome par le juge de première instance. En tout état de cause, la Commission fait valoir que le Tribunal de la fonction publique a bien explicité les motifs de la décision de condamnation du requérant au titre de l’article 94 de son règlement de procédure. En effet, il ressortirait de manière non équivoque des circonstances évoquées dans l’ordonnance attaquée que les frais exposés par le Tribunal de la fonction publique avaient un « caractère évitable ».

39      En ce qui concerne le fait que le Tribunal de la fonction publique se serait prétendument référé à des circonstances extérieures à l’affaire en cause, la Commission soutient que le rappel des circonstances en question ne doit pas être interprété comme le suggère le requérant, mais plutôt comme un élément utile pour évaluer si les frais de justice exposés dans cette procédure auraient pu être évités. C’est également sur la base de la démarche générale du requérant, qui s’orienterait toujours vers la voie contentieuse, que le Tribunal de la fonction publique aurait confirmé, à juste titre, le caractère manifestement abusif du recours.

40      À cet égard, il suffit de constater qu’il ressort de l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe I du statut de la Cour qu’un pourvoi ne peut porter uniquement sur la charge et le montant des dépens. Il en résulte que, dans l’hypothèse où tous les autres moyens d’un pourvoi ont été rejetés, les conclusions concernant la prétendue irrégularité de la décision du Tribunal de la fonction publique sur les dépens doivent être rejetées comme irrecevables (ordonnance du Tribunal du 18 octobre 2010, Marcuccio/Commission, T‑515/09 P, non publiée au Recueil, point 59).

41      Il s’ensuit que le cinquième moyen doit être rejeté comme manifestement irrecevable.

42      Il résulte de tout ce qui précède que le présent pourvoi doit être rejeté comme en partie manifestement irrecevable et en partie manifestement non fondé.

  Sur les dépens

43      Conformément à l’article 148, premier alinéa, du règlement de procédure du Tribunal, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, le Tribunal statue sur les dépens.

44      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, premier alinéa, du même règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 144 de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

45      Le requérant ayant succombé en ses conclusions et la Commission ayant conclu en ce sens, il supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission dans le cadre de la présente instance.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (chambre des pourvois)

ordonne :

1)      Le pourvoi est rejeté.

2)      M. Luigi Marcuccio supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission européenne dans le cadre de la présente instance.

Fait à Luxembourg, le 20 novembre 2012.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       M. Jaeger


* Langue de procédure : l’italien.